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OEUVRE INTÉGRALE N°2 : LA PRINCESSE DE CLEVES DE MME DE LAFAYETTE

FICHE N°8 : La scène de l’aveu

I. Le discours de la princesse : un aveu héroïque ?


1.1. Un aveu totalement sincère ? 1.1. Un aveu totalement sincère ?
1.1.1. Une annonce théâtralisée. 1.1.2. Un aveu partiel et indirect.
- discours à double destinataire : procédé théâtral - une révélation indirecte : série d’euphémismes, de
du témoin caché + discours direct qui signale - Eh bien, Monsieur, lui répondit-elle en se termes abstraits au pluriel pour désigner sa passion
l’importance de cette scène. coupable : « raisons », « périls » = souci de ménager
jetant à ses genoux, je vais vous faire un aveu l’interlocuteur ou pudeur ?
- gestuelle théâtrale, hyperbolique : « se jetant à
ses genoux » = posture qui suggère la culpabilité + que l'on n'a jamais fait à son mari, mais - un aveu incomplet : « je n’ai jamais donné nulle
posture d’imploration qui crée un effet d’attente + l'innocence de ma conduite et de mes marque de faiblesse » : à la fois vrai (refus de
posture qui rompt avec l’habituelle retenue et l’adultère) et à la fois faux (marques inconscientes
mesure du pers. intentions m'en donne la force. Il est vrai que de sa passion à pls reprises)
- effets de dramatisation qui préparent l’annonce j'ai des raisons de m'éloigner de la cour, et - stratégie argumentative pour mettre en avant son
et montrent l’aspect capital de la scène : hyperbole innocence : opposition entre le « je » sing et le
qui distingue l’acte de la princesse par rapport au
que je veux éviter les périls où se trouvent pluriel « les personnes de mon âge » = volonté de se
« on » indéfini qui désigne la société « que l’on n’a quelquefois les personnes de mon âge. Je n'ai distinguer de la cour par une conduite exemplaire +
jamais fait à son mari » : singularité d’un acte jamais donné nulle marque de faiblesse, et je insistance sur son attitude irréprochable par l’emploi
exceptionnel + le gpe verbal « m’en donne la de deux termes de la négation partielle « jamais »
force » : montre la gravité de la situation.
ne craindrais pas d'en laisser paraître, si vous (adverbe) et « nulle » (déterminant)
- Mais l’héroïne rassure le destinataire par le me laissiez la liberté de me retirer de la cour, - double hypothèse qui associe le péril à deux
paradoxe entre « aveu » et « innocence » qui vient éléments ext : son mari (vous) et la mort de sa mère
ou si j'avais encore madame de Chartres = nostalgie d’une autorité extérieure pr la guider.
nier l’interprétation déshonorante et qui évoque le
pst (conduite) et le futur (intentions). pour aider à me conduire. - insistance sur la demande de retraite : « m’éloigner
de la cour », « me retirer de la cour » (répétition).
1.2. Les justifications de l’aveu.
1.2.1. Une justification morale : rester une épouse 1.2. Les justifications de l’aveu.
exemplaire. Quelque dangereux que soit le parti que je 1.2.2. Un appel désespéré à l’aide.
- Acte justifié moralement : expression du but - Utilisation de l’impératif à plusieurs reprises : par
(pour me conserver digne d’être à vous) pour
prends, je le prends avec joie pour me le vb « songer », elle demande au prince de se
justifier son aveu : héroïsme conjugal et respect conserver digne d'être à vous. Je vous mettre à sa place, par le vb « conduire » (utilisé plus
pour son mari. haut mais associé à Mme de Chartres), elle veut faire
demande mille pardons, si j'ai des sentiments du prince un nouveau rempart contre sa passion
- Conduite justifiée moralement : elle oppose
« sentiments » et « actions » (cf. opposition entre qui vous déplaisent, du moins je ne vous (incapacité à lutter seule contre sa passion) + appel
le terme déplaire à la forme nég et affirmative) : si déplairai jamais par mes actions. Songez que à la pitié + maladresse du dernier impératif (aimez-
elle ne peut contrôler ses sentiments, elle peut moi), alors même qu’elle n’éprouve que de
contrôler ses actes : responsabilité morale de
pour faire ce que je fais, il faut avoir plus « l’amitié ».
l’héroïne. d'amitié et plus d'estime pour un mari que - Valorisation ambiguë du prince : formule
superlative qui signale son respect pour son mari
- Attitude de l’héroïne : résolution et l'on en a jamais eu ; conduisez-moi, ayez pitié MAIS compliment ambigu qui écarte tt sentiment
détermination (paradoxe dangereux / avec joie +
répétition du verbe prendre à la 1ère pers) + de moi, et aimez-moi encore, si vous pouvez. amoureux.
humilité au moment où les sentiments sont avoués
explicitement : hyperbole « mille pardons ».

II. La réaction du prince : du désordre de la passion à la douloureuse maîtrise de soi.


2.1. La description de l’accablement du prince. 2.1. La description de l’accablement du prince.
2.1.1. Une attitude qui révèle les désordres de la 2.1.2. Le réveil de la prostration.
passion. - passage de l’imparfait au PS : prise de conscience
Monsieur de Clèves était demeuré pendant + le CL de la vue nous montre que le regard de
- Perte de tout maîtrise de soi : oubli de la
bienséance, des bonnes manières, marqué par la tout ce discours, la tête appuyée sur ses l’amant et la beauté de la princesse ravivent sa
négation : « il n’avait pas songé… » + l’expression mains, hors de lui-même, et il n'avait pas passion.
« hors de lui-même ». - Surenchère dans le pathétique : douleur des deux
- Attitude de prostration / accablement : une posture
songé à faire relever sa femme. Quand elle eut pers : « le visage couvert de larmes » pour elle,
pathétique : « la tête appuyée sur ses mains » + cessé de parler, qu'il jeta les yeux sur elle qu'il hyperbole « mourir de douleur » pour lui.
= Insistance sur une souffrance commune.
emploi du verbe d’état « demeurer » + le CCT la vit à ses genoux le visage couvert de larmes, - Retour à une attitude affectueuse et conforme à
« pendant tout ce discours » qui traduisent une
attitude d’accablement profond. et d'une beauté si admirable, il pensa mourir la bienséance : deux participes présents
de douleur, et l'embrassant en la relevant : « l’embrassant » / « la relevant ».

2.2. Le discours du prince : une tentative de


2.2. Le discours du prince : une tentative de maîtrise maîtrise de soi.
- Ayez pitié de moi, vous-même, Madame, lui 2.2.2. … Qui cache un abîme entre les époux.
de soi.
2.2.1. Une réponse en écho. dit-il, j'en suis digne ; et pardonnez si dans les - Hyperbole « le plus malheureux homme qui ait
- Expression d’un malheur commun : reprise des premiers moments d'une affliction aussi jamais été » : expression d’une douleur intense qui
termes exacts employés par la princesse (« ayez annonce la jalousie à venir.
pitié », « pardonnez » // « mille pardons ». Même
violente qu'est la mienne, je ne réponds pas, - 2 formules hyperboliques parallèles : piège de
douleur provoquée par la passion : formule comme je dois, à un procédé comme le vôtre. l’aveu : la noblesse du geste de la princesse interdit
hyperbolique « affliction aussi violente qu’est la Vous me paraissez plus digne d'estime et les reproches de l’époux + la princesse se sait
mienne ». aimée tandis que lui a la confirmation qu’il ne le
- Même éloge de l’autre / même respect : même d'admiration que tout ce qu'il y a jamais eu de sera jamais = surenchère dans le pathétique.
reconnaissance de l’autre avec la reprise de l’adj femmes au monde ; mais aussi je me trouve
digne + reprise des termes estime et admiration dans le plus malheureux homme qui ait jamais été.
une tournure hyperbolique + même tentative de
maîtrise de soi : « comme je dois » : proposition sub
circonstancielle traduit une conscience de son
attitude démesurée, non conforme aux attentes
sociales.
Introduction : 1) Contextualisation : Mme de La Fayette est l’une des rares femmes écrivains au XVIIe siècle, à l’image de Madeleine
de Scudéry dont elle a lu le célèbre roman précieux, Clélie (1654). Elle entretient des liens étroits avec le monde littéraire : amie de
Mme de Sévigné, elle côtoie aussi le duc de La Rochefoucauld et de nombreux hommes de lettres qui joueront un rôle important dans
sa carrière littéraire. Avant de publier anonymement La Princesse de Clèves, en 1678, elle fait paraître, sans les signer, une nouvelle
historique, La Princesse de Montpensier, et un roman, Zaïde, deux œuvres écrites en collaboration avec ses amis écrivains. La passion
amoureuse, sujet favori des salons littéraires et mondains, est au cœur de son œuvre. Dans La Princesse de Clèves, roman à dimension
historique, elle analyse les sentiments amoureux et les dangers de la Cour grâce au personnage de Mme de Clèves, jeune fille mariée à
un homme qui l’aime passionnément, mais qu’elle-même n’aime pas en retour.
2) Caractérisation de l’extrait : Nous allons étudier un extrait de la 3ème partie du roman, la scène de l’aveu, qui est l’un des passages
les plus célèbre de l’œuvre en raison des commentaires qu’il a suscité, et notamment du débat sur sa vraisemblance. Une femme, pour
se prémunir contre l’adultère, peut-elle avouer à son mari qu’elle aime et est aimée ? Dans le roman, la princesse de Clèves, qui s’est
retirée à la campagne, est invitée par son mari à rejoindre la Cour afin d’honorer ses obligations mondaines. Elle refuse, prétextant
dans un premier temps son besoin de repos, ce qui paraît suspect à son mari. Consciente de la faiblesse de cet argument, elle se trouve
alors contrainte de révéler la véritable raison de sa retraite : sa passion pour le duc de Nemours, ravivée par l’épisode de la lettre de
Mme de Thémines. Rendu nécessaire par le cours de l’action, cet aveu est aussi soigneusement préparé par la narratrice, notamment
à travers l’invitation involontaire à l’aveu que prononce le prince lors de son récit des amours malheureuses de son ami Sancerre avec
Mme Tournon. On a également reproché à cette scène la présence d’un témoin caché, le duc de Nemours, procédé jugé trop
romanesque. Mais au-delà de cette querelle sur la vraisemblance, le débat a aussi porté sur le caractère moral, voire sublime de l’aveu.
3) Problématique : Dans quelle mesure cette scène singulière de l’aveu témoigne-t-elle de la grandeur héroïque des personnages ?
4) Annonce du plan : Nous étudierons le texte en suivant ses différents mouvements… (plan linéaire).

I. Le discours de la princesse : un aveu héroïque ? (l. à )

1.1. Un aveu totalement sincère ? (l. à )

1.1.1. Une annonce théâtralisée.

1.1.2. Un aveu partiel et indirect.

1.2. Les justifications de l’aveu (l. à )

1.2.1. Une justification morale : rester une épouse exemplaire

1.2.2. Un appel désespéré à l’aide

II. La réaction du prince : du désordre de la passion à la douloureuse maîtrise de soi (l. à )

2.1. La description de l’accablement du prince (l. à )

2.1.1. Une attitude qui révèle les désordres de la passion.

2.1.2. Le réveil de la prostration

2.2. Le discours du prince : une tentative de maîtrise de soi (l. à )

2.2.1. Une réponse en écho…

2.2.2. … Qui cache un abîme entre les deux époux

Conclusion : 1) Récapitulation : Les protagonistes, dans cet extrait, semblent rivaliser d’héroïsme : leur volonté de maîtriser leur passion
et d’être digne de l’estime de leur conjoint témoigne de leur grandeur morale. Mais cet héroïsme a ses limites. L’aveu de la princesse
n’est pas totalement transparent : par sa parole indirecte, oblique, par le choix de taire le nom de son amant, elle attise une jalousie qui
minera peu à peu le prince. Cet aveu peut aussi être interprété comme un acte de faiblesse prouvant l’incapacité de l’héroïne à résister
seule à la passion : n’est-il pas cruel de demander à M. de Clèves, qui l’aime, de la protéger de sa passion pour un autre ? Quant au
prince, s’il accueille l’aveu avec une noble grandeur, il n’en cèdera pas moins, au fil du temps, à la jalousie, notamment après la
divulgation indirecte de l’aveu par le duc de Nemours. La mort du prince, et la retraite définitive de la princesse loin du monde,
témoignent du pouvoir terrible de la passion.

Ouverture :
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