LECTURE LINEAIRE N°3

TITRE ET RÉFÉRENCE DU TEXTE : Les Fausses confidences, II, 13

INTRODUCTION
Accroche
En 1737, Marivaux achève Les Fausses Confidences, dont le titre énigmatique est en lui-même un stratagème : une
ruse de guerre, destinée à leurrer, à tromper un ennemi pour le faire tomber dans un piège.
Auteur (nom, époque, mouvement, principales œuvres, biographie pertinente)
Marivaux = dramaturges français des plus reconnus dans la comédie bourgeoise et psycho.
intrigues complexes et virtuoses + procédés d’interversions où maîtres et valets échangent rôles.
thème de la surprise de l’amour, permet rire et aussi la critique sociale d’une société fondée sur le rang et
l’apparence.
Œuvre (titre, genre, date, court résumé, thèmes, personnages)
Les Fausses Confidences = comédie prose et trois actes jouée 1ere fois en 1737.
Dorante, honnête jeune bourgeois ruiné, aime en secret Araminte, haute et riche bourgeoise qui l’emploie.
Malgré écart de fortune, leur amour triomphera grâce aux stratagèmes valet Dubois.
Extrait (place dans l’œuvre, résumé, contexte)
Dans la scène 12 de l’acte III, Araminte et Dorante se révèlent enfin leur amour. = dénouement pièce

Problématique Comment fonctionne le mécanisme de ce dénouement ambigu ?

MOUVEMENTS
1 La comédie de la hiérarchie sociale
2 Un double aveu
3 Un dénouement ambigu

MOUVEMENT 1 : La comédie de la hiérarchie sociale

LIGNE EXTRAIT NOM DU PROCÉDÉ ANALYSE DE L'EFFET PRODUIT

1 « On sait que vous m’aimez, et on
croirait que je n’en suis pas fâchée »
1 « Il faut se quitter »
temps et la Conformément à ce que l’on attend d’elle,
bienséance sous la Araminte renvoie son intendant
forme du pronom Interdit à un domestique d’aimer sa maîtresse
indéfini «on» à la vue de tous  mal vu
ton autoritaire et sec Renforce son autorité et pouvoir sur DO

4 « allez » injonctif Décision prise, ne veut plus y revenir

« chacun à ses chagrins » « À quoi
vous sert de l’avoir?», lui demande-
4-5 t-elle en lui refusant son portrait
«vous n’êtes pas raisonnable»
5 « J’ai tout perdu ! »
10 « n’ajoutez rien à ma douleur ! »
« que je vais être à plaindre! »
6 «Il n’y a pas moyen» «vous savez
peindre» «vous n’êtes pas
raisonnable »
Aucune compassion Dorante triste, soumis et plaintif
Elle le malmène et le le terme «Madame» ponctue presque toutes ses
prends de haut répliques rappelle respect vis-à-vis de sa
maîtresse.
mode exclamatif + peine à maintenir le vernis social, et sa douleur
hyperbole de quitter A
tonalités lyriques et Renforce pitié et douleur de DO
pathétiques
phrases déclaratives Araminte ne perd pas contenance + fermeté
portrait ici mentionné par S0 est celui de la boîte. DO peintre dc aussi le propriétaire. Araminte, l’avait
confisqué et utilisé pr contraindre jeune homme à avouer ses sentiments (II, 16). L’accessoire donc apparu
à multiples reprises, toujours à des moments clés. Idée de Dubois au départ objet a ensuite servi les plans
d’Araminte : le stratagème du valet lui a échappé, mais pour réussir tout aussi bien.

Résumé grandes idées du mouvement 1 :

a. Comment maîtresse et domestique maintiennent-ils, au début de la scène, l’apparence des codes sociaux
supposés les séparer? Appuyez-vous sur leurs éléments de langage pour répondre.
b. Que traduisent les types de phrases (déclaratif, exclamatif, interrogatif, injonctif) utilisés quant à la
capacité des deux personnages à tenir en respect leurs émotions ?
c. Selon vous, lequel des deux portraits d’Araminte (celui de la boîte ou celui du tableau) est évoqué dans
ce passage, et sommes-nous toujours dans le cadre de l’ingénieux stratagème de Dubois? Justifiez votre
réponse.

MOUVEMENT 2 : Un double aveu

LIGNE EXTRAIT NOM DU PROCÉDÉ ANALYSE DE L'EFFET PRODUIT

7 émotions Dorante, amène la conversation sur le terrain

«bien cher» «vengée» «douleur»
11 « Vous donner mon portrait ! »
11 « songez-vous que ce serait avouer
que je vous aime ?»
13 « Et voilà pourtant ce qui m’arrive»
«pourtant »
13 « d’un ton vif et naïf »
14 «se jetant à ses genoux»
18 «Dans tout ce qui s’est passé chez
vous, il n’y a rien de vrai que ma
passion, qui est infinie, et que le
portrait que j’ai fait »
16- «un domestique, qui savait mon
18 amour, qui m’en plaint, qui [...]
consentir»
19- en [v]: «il voulait me faire valoir
20- auprès de vous» ou en [m]:
21 «Madame, ce que mon respect, mon
amour, et mon caractère ne me
permettent pas de vous cacher »
des émotions en réclamant le portrait
Exclamation +
construction phrase révèlent son trouble
réduite mini
question rhétorique rendre le portrait vaudrait aveu de sa part
encore, l’accessoire sert support à confidence
amoureuse
aveu d’Araminte = ni frontal ni explicite Peine
Litote à formuler ce qu’elle éprouve passe par des
détours langagiers
Araminte comprend sentiments + surprise de
didascalie constater que c’est bien d’amour qu’il s’agit, et
cet aveu s’adresse autant à Dorante qu’à elle-
même. =prise de conscience vive mais timide
hyperboles, Après aveu, attitude bcp + retenue et discours
exclamations et devient soudain très construit et maîtrisé
gestes spectaculaires
Effet de surprise
zeugma
rythme ternaire Surprise - révélation
il plaide pour lui-même dans ce qui est supposé
être un discours d’auto-accusation —habileté
Allitérations oratoire nouvelle pour le personnage, et qui
peut jeter le doute sur son intégrité

21- « J’aime encore mieux...» / «J’aime construction Dorante n’est sujet d’aucun verbe dans cette
23 mieux...» anaphorique et les longue réplique, sauf du verbe «aimer»
parallélismes
Résumé grandes idées du mouvement 2 :
a. Dans quelle mesure l’aveu d’amour d’Araminte à Dorante est-il annoncé par les répliques qui le
précèdent ?
b. Quels sont les deux procédés stylistiques employés par Marivaux pour cette confidence amoureuse?
Vous semblent-ils efficaces ?
c. Dorante est-il si piètre orateur qu’on pouvait le supposer au début de la pièce ? Appuyez-vous sur les
procédés rhétoriques qu’il utilise dans la réplique où il avoue à Araminte le stratagème de Dubois.

MOUVEMENT 3 : Un dénouement ambigu

LIGNE EXTRAIT NOM DU PROCÉDÉ ANALYSE DE L'EFFET PRODUIT

13- « d’un ton vif», «se jetant à ses
17- genoux» «se lève, et tendrement»,
24 «étonnée» « le regardant quelque
temps sans parler »
Prémisse n° 1 : Si elle avait appris la
ruse de la bouche d’un autre, elle
aurait éprouvé de la colère; —
Prémisse n° 2 : mais elle l’apprend de
Dorante; — Donc : Dorante est «le
plus honnête homme du monde».
Prémisse n°1 : Tous les moyens sont
bons pour séduire quand on
aime(«puisque vous m’aimez
véritablement, ce que vous avez fait
pour gagner mon cœur n’est point
blâmable»); — Prémisse n° 2 : tous
les moyens sont bons pour séduire
quand on aime (« il est permis à un
amant de chercher les moyens de
plaire »); — Donc : il faut pardonner
à l’amant qui est parvenu à ses fins
15 «Modérez votre joie; levez-vous»
7 «dédommager», «cher»
personnages extériorisent secrets et vrais
sentiments. débarrassés de tout mensonge, montée
en puissance de leurs émotions.
didascalies Faux : didascalies montrent émois vont
redescendant, frénésie dans la gestuelle à la
contenance, et à attitude presque froide. raison et
l’analyse reprennent dessus sur l’enthousiasme de
la déclaration d’amour.
logique raisonnement pas fiable : les
sentiments d’Araminte pour Dorante,
syllogisme exprimés à travers cette hyperbole pour le
moins paradoxale, l’emportent ici
problème vient pas de la déduction
logiquement exacte, mais des prémisses qui
sont identiques et reposent sur raisonnement
syllogisme machiavélique subjectif qui n’a rien à voir
avec une vérité incontestable, même si
Araminte le présente sous la forme d’une
moralité
Hyperboles, gestes Attitude excessive,
très expressifs, Araminte semble un peu gênée de ce
abondance de la débordement d’affect
modalité on peut se demander à cause de ces outrances
exclamative : était-il sincère ou en rajoutait-il ?
lexique de l’argent pour parler du portrait qu’il a peint et ne veut
pas perdre  Dorante un coureur de dot vil,
cupide et hypocrite ?

Résumé grandes idées du mouvement 3 :

a. Comment les didascalies de ce passage marquent-elles l’incohérence entre l’état émotionnel des
personnages et leurs attitudes ?
b. Sur quel double syllogisme (rhétoriquement efficace mais moralement douteux) Araminte s’appuie-t-
elle pour pardonner à Dorante ?
c. En quoi les prises de parole de Dorante peuvent-elles laisser un doute sur sa véritable motivation de
conquérir Araminte (amour ou argent) ? Appuyezvous sur ses excès langagiers, son trop-plein de
sensibilité et sa gestuelle peu naturelle.

CONCLUSION
Ouverture Nous avons vu que les déclarations amoureuses d’Araminte et de Dorante font de cette
scène 12 de l’acte III l’acmé de la pièce (= son point culminant) en mettant fin aux fausses
confidences.

Mise en relation des idées principales issues des mouvements

L’intensité des sentiments  ôter masques des perso, et souligner l’égale sensibilité des individus, indépendamment
de leur appartenance sociale.
Scène galante s’achève sur message de la pièce de Marivaux : dissimulation peut être véhicule de sincérité
amoureuse, qui justifie tous les stratagèmes.
Pour répondre à la problématique
talent de Marivaux est aussi de décrire avec une grande finesse psychologique les aleas et les petits
arrangements du sentiment amoureux. Si cette pièce est une comédie, qui par conséquent, a une fin
heureuse, ce dénouement reste ambigu. Jusqu’au bout le personnage de Dorante nous interroge quand à ses
intentions réelles, pures ou intéressées.