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SÉQUENCE IV : Les Fausses Confidences, Marivaux, 1737

PARCOURS ASSOCIE : Théâtre et stratagème.


SÉANCE 1
Quelques pistes de réflexion
Théâtre et stratagème : mise en place d’une relation entre les deux termes
« et », ce qui signifie que l’un ne va pas sans l’autre.
Le théâtre, par définition, repose sur le paraitre et le jeu de rôle. C’est un lieu de
représentation et un spectacle vivant ; ne pas oublier le caractère visuel du théâtre et la
place du spectateur. C’est aussi un art illusoire.
Stratagème = Ruse habile permettant à quelqu'un d'arriver à ses fins, d'obtenir un
avantage. Synon. artifice, combinaison, combine (fam.), subterfuge,
tour, truc (fam.).Stratagème adroit, grossier, habile; stratagème amoureux; user d'un
stratagème; avoir recours à un stratagème.

Il s’agit de s’interroger sur la place du stratagème dans l’action théâtrale ;


en quoi il participe à la théâtralité. Mise en scène du stratagème.
Le stratagème est un ressort de l’action dans la comédie mais il peut aussi se retrouver dans
d’autres genres théâtraux (tragédie, drame romantique...)

Quelles sont les fonctions du stratagème au théâtre ?


Divertir, orienter l’action, tirer profit d’une situation, révéler une vérité sur les hommes et la
société, révéler l’être …

Biographie
Marivaux 1688-1783 a eu une vie consacrée à la littérature.
Il était grand lecteur.
Marivaux abandonne ses études de droit pour se vouer à l’écriture.
Journaliste à partir de 1717 au Nouveau Mercure de France. Il est ruiné par la banqueroute
de Law et devient alors avocat sans cesser d’écrire.
Ses revenus sont souvent minces et son succès tarde à arriver.
Il a la passion du théâtre et c’est par ses comédies que Marivaux accède à la notoriété.
Il en compose une trentaine entre 1720 et 1755.

Le contexte historique
Né sous le règne de Louis XIV vieillissant, Marivaux meurt sous celui de Louis XV. Son siècle
est celui des Lumières qui voit tout à la fois une crise de l’État incontestable, progrès
économique et l’essor du rationalisme.

Après la mort de Louis XIV succède la régence de Philippe D’Orléans.

C’est son arrière-petit-fils le futur Louis XV qui est l’héritier du trône mais comme ce premier
n’a que cinq ans Philippe D’Orléans fils du frère de Louis XIV devient le régent du royaume
de 1715 à 1723.
Cette régence se caractérise sur les plans
-religieux par le retour en grâce des jansénistes
-politique par le retour aux affaires de l’aristocratie
-morale par une libéralisation des mœurs
Prospérité économique et crise de l’État
Le début de la révolution industrielle
Développement notamment grâce au commerce triangulaire fondé sur la traite négrière
Cette prospérité est loin de profiter à toute la population.

L’affirmation de la toute puissance royale en vigueur sous Louis XIV est de plus en plus
combattue.
Les philosophes des Lumières défendent la justice, la liberté de conscience, la liberté de
penser et d’écrire

-Dans De l’esprit des lois Montesquieu prône la séparation des pouvoirs exécutif législatif
judiciaire seule garantie à ses yeux de la liberté de chacun.
-Dans Le contrat social Rousseau légitime le principe de la démocratie
-Diderot dans l’Encyclopédie défend aussi l’idée d’un contrat entre le peuple et le roi.

Les salons littéraires où se retrouve une élite mondaine et intellectuelle est en essor et
favorise le renouvellement des arts.

Le marivaudage
C’est un jeu raffiné où les mots sont de délicates ruses qui ont pour fonction de faire
surmonter à celle ou à celui qui aime sa peur d’aimer.
Le marivaudage n’est pas pour autant doucereux et naïf.
Les réalités sociales l’intérêt, l’argent, s’insinuent dans les évolutions du cœur.
Badinage spirituel et superficiel ; échange de propos galants et précieux.

Les personnages

-Araminte fille de Madame Argante


-Dorante neveu de monsieur Rémi
-Monsieur Rémy procureur
-Madame Argante mère d’Araminte
-Arlequin valet d’Araminte
-Dubois ancien valet de Dorante
-Marton suivante d’Araminte
-Le comte

SÉANCE 2
Analyse de la scène d’exposition (I, 2)
Visionnage de la captation de la mise en scène de Didier Besace
Lecture du début de la pièce

SÉANCE 3
Lecture linéaire 12, (I,14), « DUBOIS. Vous ne croiriez pas […] ARAMINTE. Quelle aventure !
»
Acte I : acte d’exposition
Dorante et Dubois feignent de ne pas se reconnaitre mais Araminte ne semble pas être dupe
et demande à Dubois s’ils se connaissent.
Dubois éveille la curiosité d’Araminte au sujet de Dorante mais sans trop en dire afin de ne
pas éveiller les soupçons.
Araminte craint que son intendant soit malhonnête mais Dubois la rassure en faisant un
portrait moral élogieux de Dorante.
• L’extrait étudié : fin de la scène 14. Dubois attire l’attention et la bienveillance d’Araminte
en distillant des informations sur Dorante de manière à piquer sa curiosité et la forcer à
l’interroger.
Les questions d’ Araminte vont permettre à Dubois de mettre en place une fausse
confidence : celle du récit d’un coup de foudre.

Enjeu : étudier la mise en place d’une fausse confidence par un valet fin stratège.
Mouvements de l’extrait
Mouvement 1 : « DUBOIS .Vous ne croiriez pas […] ARAMINTE , avec négligence.
Actuellement ? » : Dubois, stratège.
Mouvement 2 : « DUBOIS . Oui, madame […].ARAMINTE » : le récit habile d’une fausse
confidence.

ETUDE LINEAIRE
Mouvement 1 : « DUBOIS .Vous ne croiriez pas […] ARAMINTE , avec négligence.
Actuellement ? »
Réplique 1, Dubois :
▪ Phrase 1 : phrase juxtaposée
✓ Proposition 1 :
Négation + verbe « croire » : la négation totale est un moyen de renforcer la vérité de la
parole de Dubois ;il manifeste sa connaissance de la situation
Dubois procède par exagération afin de capter l’attention et la bienveillance d’ Araminte.
Evocation de la démesure de la passion renforcée par l’emploi de la préposition « jusque »
indiquant ici un degré extrême la folie « démence ».
✓ La proposition 2 : tournure hyperbolique sur les conséquences de la passion « elle le
ruine, elle lui coupe la gorge » = les images fortes et exagérées ont pour but de suggérer
l’emprise de la passion sur Dorante et de susciter la compassion d’Araminte.
▪ Phrase 2 : portrait élogieux de Dorante
Les deux premières propositions : Dubois commence par concéder les qualités physiques et
morales de Dorante par une énumération.
La proposition 3 « mais il n’est pas riche » : emploi du « mais » d’opposition annonce un
élément négatif relayé par l’euphémisme : Dubois cherche à faire comprendre à Araminte
que la source du problème de Dorante est qu’il est pauvre.
Cette pauvreté l’empêche d’avouer son amour.
« et vous saurez… à elles -mêmes » : phrase complexe , explicative composée d’une
proposition principale « vous saurez » suivie d’une proposition subordonnée complétive
dans laquelle est incluse une proposition subordonnée relative et une négation restrictive «
n’a tenu qu’ à ».

▪ Dubois brosse le portrait moral de Dorante, il fait de lui un être désintéressé qui ne cède
pas à l’appel de la richesse et/ou au moyen d’améliorer son statut social que pourrait lui
offrir un mariage.
▪ Dubois cherche aussi à piquer la jalousie d’Araminte en l’informant sur le fait que Dorante
est entouré de nombreuses prétendantes « des femmes » (foule anonyme = emploi du
déterminant indéfini, pluriel « des ») prêtes à s’affranchir des préjugés de classe pour lui
donner un rang, une situation sociale et la réussite.
Ce que Dubois sous-entend c’est que de nombreuses femmes sont prêtes à succomber et
que Dorante a l’embarras du choix mais comme son cœur est pris , il reste fidèle à l’être
aimé comme l’indique la dernière phrase du passage : « Il y en a une …rencontrée » :
passage de rivales potentielles « des » à « une » en particulier , Dubois affirme une certitude
« je le sais » relayée par une preuve réelle « je l’ai rencontrée »= confirmation de la véracité
de son propos, authenticité de la situation, témoin fiable .

Réplique 2 , Araminte :
✓ La didascalie porte sur l’attitude du personnage et son intention ( langage du corps + voix)
. Araminte fait semblant de ne pas s’y intéresser ; elle joue l’indifférente mais la phrase non
verbale sous forme d’interrogation contredit son attitude : en réalité, elle est flattée et
cherche à en savoir davantage.

Dubois a agi en stratège en piquant la curiosité d’Araminte .

Mouvement 2 : « DUBOIS . Oui, madame […].ARAMINTE »


Réplique 1 . Dubois :
✓ L’affirmation et l’emploi de l’adverbe « actuellement » renforce la vérité liée à la situation
temporelle réelle, proche.
✓ Dubois fait un portrait élogieux de la rivale qui pourchasse Dorante, « une grande brune
très piquante » : une femme qui attire agréablement l’attention. Puis, Il évoque les réactions
de Dorante : verbes d’action « éviter », « se cache d’elle » = il fuit et « refuse tout ».
✓ L’emploi des paroles rapportées = stratagème ; Dubois porte à la connaissance d’Araminte
son rôle de confident auprès de Dorante. Araminte peut ainsi avoir confiance en lui car
Dorante lui a fait une confidence sous le coup du secret que Dubois ici s’empresse de
révéler.
Dubois exagère les propos, il se joue d’Araminte en lui montrant le caractère exclusif de son
amour « mon cœur est pris ».
Dubois montre l’esprit chevaleresque de Dorante , c’est un homme fidèle , honnête « je les
tromperais , je ne puis les aimer ».
Réplique 2, Araminte :
✓ « Cela est fâcheux » : jugement sur la situation qu’elle peut estimer regrettable ? Pénible ?
Compassion face à la situation ?
✓ L’interrogation partielle : intérêt d’Araminte , elle veut connaitre les circonstances de leur
rencontre : lieu « où », temporalité , « avant que » , évocation d’une rencontre antérieure à
son arrivée chez Araminte.
✓ Cette interrogation a été préparée, induite par Dubois quand il a sciemment utilisé le
verbe « rencontrer » : Araminte est prête à entendre avec attention le récit de leur première
rencontre.
Réplique 3, Dubois :
✓ « Hélas !madame » : L’interjection « hélas » : est une amorce pour créer une atmosphère
et apportera un caractère dramatique presque tragique à la page de roman que Dubois
s’apprête à conter pour charmer Araminte. Pour rendre le récit du coup foudre vivant, il
l’anime devant les yeux d’Araminte en utilisant un procédé, celui de l’hypotypose (faire vivre
la scène et la donner à voir)

La construction de cette scène à vivre et voir commence par :


▪ La mise en place d’un récit de conte de fée « ce fut un jour » qui remplace la formule
initiale « il était une fois ».
▪ Des éléments d’authentification pour la crédibilité du récit, des détails réalistes ( jour , lieu
« un vendredi à l’opéra »).
▪ Le fait de faire semblant de chercher dans ses souvenirs alors que tout a été anticipé « je
m’en ressouviens ».
▪ Des actions rapportées au passé-simple pour donner à entendre la rapidité du coup de
foudre de Dorante : de la vision d’Araminte majestueuse placée au centre de l’attention à
l’immobilité de Dorante.
Dorante, « extasié » est statufié « il ne remuait plus », il est victime d’une passion violente et
inattendue.
Réplique 3 , Araminte :
L’exclamation indique que le personnage est sous le charme de ce récit et qu’il est sensible
au romanesque.

Conclusion
Dubois montre toute son habilité langagière pour manipuler Araminte afin d’attirer son
attention sur l’esprit chevaleresque de Dorante et lui faire oublier sa pauvreté.
Par rapport au spectateur : cette scène d’exagération participe au comique puisque Dubois
se joue de l’imagination romanesque d’Araminte : le spectateur sait qu’il s’agit d’une fausse
confidence dans la mesure où elle ne s’est pas faite à l’insu de Dorante car elle a été
concertée avec Dubois. Elle est à la fois vraie et fausse : Dorante est bien amoureux
d’Araminte mais le récit du coup de foudre relève de la fiction car les événements évoqués
ne sont pas vérifiables.

SÉANCE 4
Lecture linéaire 13, (II, 15) , « DORANTE. Dispensez-moi de la louer Madame […]DORANTE.
Daignez m’en dispenser […] à l’objet aimé.»
Acte II : construit autour d’objets scéniques participant au ressort du comique et à la mise
en place de stratagèmes. Les objets scéniques : le tableau d’ Araminte dans les
appartements de Dorante ; le portrait peint placé dans une boite et la lettre adressée au
comte.
L’objet entrainant toute une série de quiproquos est le portrait peint : Marton pense qu’il
s’agit de son portrait peint par Dorante ; à la scène 11 : Araminte sait que Dorante l’aime et
qu’il a peint son portrait, aveu de Dubois « Point du tout, c’est Dorante, je le sais de lui-
même et il y travaillait encore, il n’y a que deux mois lorsque je le quittai »
Une scène majeure : la scène 13 : Araminte a fait écrire une lettre par Dorante au comte
l’informant de leur mariage prochain. Cette fausse lettre a pour but de faire avouer Dorante,
mais cette stratégie échoue en raison de l’arrivée de Marton.
La scène 14 : Marton apprend à Araminte son prochain mariage avec Dorante, Araminte
feint la surprise.
➢ Extrait étudié : scène 15
Dorante avoue à Araminte qu’il n’est pas question qu’il épouse Marton induite en erreur par
monsieur Rémy.
Dans ce passage, Araminte cherche à faire avouer Dorante qui est incapable d’avouer son
amour directement.
Enjeu : étudier les tours et détours du langage amoureux.
Mouvements du passage
Mouvement 1 : « DORANTE. Dispensez-moi …à …ARAMINTE .Avec elle ! Oubliez-vous que
vous êtes ici ? » : une parole à double sens.
Mouvement 2 : « DORANTE .Je veux dire […] à l’objet aimé. » : Dorante ou une conduite
dictée par un esprit courtois .
Etude linéaire
Mouvement 1 : « DORANTE. Dispensez-moi …à …ARAMINTE .Avec elle ! Oubliez-vous que
vous êtes ici ? »
Réplique 1, Dorante :
✓ Demande poli , phrase injonctive
✓ « la » : pronom pers de 3ème pers = distance ; destinataire fictif.
✓ Utilisation du procédé de la prétérition ( feindre de ne pas vouloir dire ce que néanmoins
on dit clairement avec force) : Dorante feint de ne pas vouloir en faire l’éloge mais il le fait ,
ce qui révèle que Dorante est incapable de taire son amour.
✓ « Je m’égarerais en la peignant » : verbe « égarer » = image d’une perte de contrôle liée à
la passion ; et manipulation puisque que le spectateur sait qu’il a déjà peint le portrait.
✓ « On ne connait […] augmente : le masque du langage avec l’emploi du pronom indéfini «
on » complété par les négations = stratégie de la parole, détour. Dorante ne veut pas la louer
mais il fait un éloge indirect avec emphase.
Dorante se construit un destinataire fictif alors que le discours s’adresse à un destinataire
réel et présent sur scène : Araminte.
Dorante ne veut pas paraitre trop direct dans l’expression de sa passion.

Réplique 2 , Araminte
✓ Didascalie : Araminte n’est pas insensible au discours de Dorante.
✓ « Mais votre conduite blesse la raison » : elle soulève une contradiction, son attitude n’est
pas logique.
✓ Les deux interrogatives portent sur la finalité d’une telle conduite et la répétition de «
prétendez-vous » invite à une justification concrète. Pour elle, il y a une forme d’absurdité à
ne pas vouloir avouer son amour, à ne pas vouloir le concrétiser.
✓ « Cela est bien bizarre » : jugement, ce qui est surprenant, c’est le fait que Dorante n’est
pas capable d’exprimer directement son amour.
Réplique 3 , Dorante
✓ Apporte une réponse en prenant la posture d’un chevalier courtois.
✓ Expression à la fois du bonheur et de la souffrance.
✓ Pour le spectateur : comique de situation « voir quelque fois », « être avec elle » = alors
qu’elle est en face de lui.
Réplique 4, Araminte
✓ Fausse surprise avec l’exclamation.
✓ La question : volonté d’Araminte de pousser Dorante dans ses contradictions
✓ Jeu sur le langage « ici », tour et détour : double jeu, adverbe renvoie au lieu où se trouve
le locuteur + sens temporel = maintenant

Mouvement 2 : « DORANTE .Je veux dire […] à l’objet aimé. »


Réplique 5, Dorante :
✓ La question d’Araminte orientant l’échange oblige Dorante à répondre et à se contredire
✓ Manipulation de Dorante, il refuse d’avouer.
▪ Il reformule pour éclaircir sa pensée en jouant le jeu de la substitution
▪ Il substitue sans cesse un autre objet pour parler de l’objet aimé : après avoir utilisé des
formes de troisième personne, il utilise le portrait (substitut de la personne réelle).
Réplique 6, Araminte
✓ Elle feint la surprise ; manipulation : la question porte sur l’exécution du portrait alors
qu’elle sait que son auteur est Dorante.
Réplique 7, Dorante
Il avoue qu’il est l’auteur du portrait : il évoque la manière « par amusement », un
apprentissage et une initiative propre sans avoir recours à un tiers ce qui aurait été
malhonnête « si je n’avais pu l’avoir que par le secours d’un autre ». Parole qui se veut
sincère, honnête. Esprit courtois.

Réplique 8, Araminte
✓ L’aparté révèle ses objectifs ; forme de détermination à faire sortir de ses retranchements
Dorante, elle veut le faire avouer. Forme d’impatience.
✓ « Montrez-moi ce portrait » : phrase injonctive, parole autoritaire, expression d’un ordre.
Réplique 9 , Dorante
✓ Formulation de politesse ; esprit courtois.
✓ Procédé de la concession exprimant une contradiction : Dorante est condamné à aimer en
silence car la femme aimée est inaccessible ; expression de la souffrance.
✓ Conduite dictée par le sens du devoir, de la conscience morale « je n’en dois pas moins un
secret inviolable à l’objet aimé ».
✓ Une attitude entre sincérité et manipulation :
▪ Dorante à travers ses paroles donne une image de lui-même devant influencer Araminte : il
se présente comme un homme désintéressé capable de tous les sacrifices, capable de
renoncer volontairement à l’amour .
▪ Expression d’un idéal courtois, chevaleresque : relation secrète entre passion/désespoir et
plaisir/souffrance.

Conclusion
Une scène où Araminte au langage incisif cherche à faire avouer Dorante qui use des détours
du langage pour avouer sans avouer.
Une occasion pour Dorante de se présenter comme un chevalier servant, d’exprimer sa
sincérité afin d’infléchir le cœur d’Araminte ?
SÉANCE 5
Lecture linéaire 14, (III, 8) « LE COMTE lit. On a soupçonné […]à la didascalie(Dorante
sort).»
Acte III = acte du dénouement
Extrait : La fausse lettre écrite par Dorante sur les conseils de Dubois tombe dans les mains
de Marton qui la donne au comte pour qu’il la lise. Dans cette lettre Dorante confie à un ami
fictif qu’il va quitter son emploi d’intendant à cause de ses sentiments pour Araminte et de
sa souffrance car cet amour n’est pas réciproque. Il prétend que par maladresse un ouvrier à
confier le portrait d’Araminte et que son amour va être découvert. Il affirme que si cet
amour est révélé, il s’embarquera pour le lointain. Il préfère partir que d’être méprisé par
Araminte.

Le spectateur assiste à une lecture publique de la lettre en présence des personnages


suivants : le comte/Mme Argan ; Monsieur Rémy /Marton ;Dorante /Araminte.
Cette lecture participe au comique de situation d’autant plus que Dorante assiste à la lecture
de sa propre lettre.
Enjeu : étudier un aveu décalé entre comique de situation, fausse confidence et
manipulation.
Mouvements du passage
Mouvement 1, « LE COMTE lit . On a soupçonné que ce portrait m’appartenait […].LE
COMTE lit. Auquel cas […] suivre. » : une scène décalée entre un aveu au ton romanesque et
les commentaires de Mme Argante.
Mouvement 2 , « MADAME ARGANTE. Bon voyage au galant […] à la didascalie (Dorante sort
). » : Des réactions contrastées.
Etude linéaire
Mouvement 1, « LE COMTE lit . On a soupçonné que ce portrait m’appartenait […].LE
COMTE lit. Auquel cas […] suivre. » :
Lecture 1, LE COMTE lit = rappel lecture publique de la lettre de recommandation écrite par
Dorante.
Mise en place du comique de situation : la lecture est faite par le comte considéré comme le
rival en amour de Dorante puisqu’il désire épouser Araminte ; il devient ici son porte-voix.
Situation cocasse car tous les personnages importants sauf Dubois sont sur scène et vont
écouter la lecture de la lettre et l’aveu détourné de Dorante.
Lecture d’un stratagème mis en place par Dubois.
On a soupçonné = pronom indéfini, « on » de la rumeur + idée d’une supposition ou d’une
croyance à savoir que Dorante est le propriétaire du portrait « ce portrait m’appartenait ».
Or , Araminte et Marton savent que Dorante a peint le portrait et que ce portrait est une
preuve de son amour.
Le portrait, objet scénique = rôle dans l’action théâtrale.
« ainsi » : l’adverbe annonce une conséquence : la révélation publique comme il le prévoit «
je pense qu’ on va tout découvrir ». « On va » = présent à valeur de futur proche ; la
révélation est imminente.
Continuité du raisonnement fondé sur l’expression de la souffrance et de l’angoisse de
perdre l’être aimé (périphrase : celle que j’adore » = Araminte ; le verbe « adorer »=
expression de sa passion , forme de culte , aveu)
Intervention 1, Mme Argante : elle coupe la lecture de la lettre et exprime une vive réaction
(emploi de l’exclamation et la répétition « que j’adore » ). La reprise des termes de la lettre «
que j’adore » participe au comique car elle focalise l’attention de tous (spectateurs et
personnages sur scène) sur la révélation de la passion amoureuse de Dorante.
Forme de moquerie de la part de Mme Argante ?

Lecture 2 : autre conséquence , expression d’une certitude « j’aurai encore celui d’être
méprisé d’elle » : Dorante a peur d’être un objet de mépris c’est-à-dire que par son statut
social, sa pauvreté il n’est pas digne d’intérêt ou d’estime pour Araminte. Hypothèses : parce
qu’il a l’ambition d’aimer une femme inaccessible alors qu’ils n’appartiennent pas au même
monde ou par ce que son amour en secret en étant révélé ne respecte pas la personne
aimée.
Intervention 2, Madame Argante : « je crois » = réflexion annonçant une probabilité ;
commentaire qui souligne la lucidité de Dorante + interpellation insistance « ma fille », Mme
Argante devine et anticipe la réaction de sa fille.

Lecture 3 et 4 : début d’un raisonnement concessif


Début du raisonnement logique fondée sur une concession : Dorante minimise sa pauvreté
en estimant qu’il est improbable que ce soit aux yeux de l’objet aimé une raison suffisante «
dont je n’oserais la croire capable » (moyen de flatter la probité d’Araminte) pour mieux
valoriser ses qualités morales reconnues par ses pairs « les honnêtes gens ». Utilisation du
vocabulaire de la morale : « valeur », « estime », « honnête » = domaine de la vertu mais
aussi de la réputation.
- Stratégie de Dorante : il désamorce tout ce qu’on peut imaginer de négatif sur ses
intentions en montrant que ses actions se sont toujours situées sur le plan moral. (ne pas
oublier la présence d’Araminte sur scène qui écoute et entend les propos)
- Réception /spectateur : comique de situation au regard des personnages sur scène
capables de tous les stratagèmes et d’actions ne relevant pas de l’honnêteté.
Interventions 3 et 4 de Mme Argante :
- Intervention 3 : sorte de question rhétorique = en vertu de quoi Araminte serait -elle
incapable de le mépriser ? mise en doute.
- Intervention 4 : question rhétorique ; mise en doute de l’honnêteté de Dorante ; elle
s’offusque et juge les « honnêtes gens » se leurrent sur Dorante.

Lecture 5 : expression d’une condition, si Dorante s’est mépris sur l’attitude d’Araminte à
son égard, il envisage un départ imminent « à la veille ». Aspect romanesque ; champ lexical
du départ et de la séparation : « je n’ai plus que faire à Paris ; embarquer ; à vous suivre ».
Dorante passe à l’action et montre sa volonté d’agir avec fermeté « déterminé », personne
l’arrêtera dans son projet.
Manipulation : faux départ ; Dorante surjoue , lance une sorte de défi afin de provoquer une
réaction d’ Araminte.

Mouvement 2 , « MADAME ARGANTE. Bon voyage au galant […] à la didascalie (Dorante sort
). »
Intervention 5 de Mme Argante
Forme de raillerie avec l’expression « bon voyage au galant ». Dorante va devoir quitter les
lieux.
Elle se moque ici de la lettre de style galant, c’est-à-dire une manière de dire et d’écrire
artificiellement au service d’une stratégie de la séduction. Forme de dissimulation des
véritables intentions.
Galant : homme qui cherche à plaire aux femmes, à les séduire en leur faisant la cour.
Intervention de monsieur Rémy : son commentaire, sa réaction s’oppose à celle de Mme
Argante, il défend l’attitude de Dorante et l’amour « le beau motif d’embarquement ! ». Il
compatit avec sincérité au désespoir, à la souffrance de Dorante.
Intervention 6 de Mme Argante : interrogation totale destinée à sa fille ; elle soulève un
élément de preuve « coeur net » concernant la passion de Dorante.
Réplique du Comte : premier commentaire après sa lecture, il partage le regard critique de
Mme Argante ; ne pas oublier la relation entre Mme Argante et le Comte dans le projet de
mariage, ce qui fait d’eux des complices et c’est pourquoi le Comte ne peut que confirmer
les propos de Mme Argante.

Réplique d’Araminte :
La didascalie : adresse à Dorante ; réaction marquant l’indignation avec l’exclamation « Quoi
! », suivie par deux interrogatives exprimant une accusation.
Réplique de Dorante : un début d’explication « Madame » coupée par la réplique
d’Araminte exprimant un ordre marquant une certaine distance et une froideur. Elle évince
de la scène Dorante sans explication. La didascalie signifie le départ de Dorante de la scène,
il s’exécute.

Conclusion
Une scène décalée : un aveu décalé passant par la voix du comte. Un décalage entre le ton
romanesque de la lettre et les commentaires plus ou moins sarcastiques de Mme Argante.
La lecture de la lettre participe à l’action théâtrale, elle donne du suspens à la scène, elle
crée un effet d’attente : que va-t-il advenir de Dorante ?

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