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Adénogramme : technique
et interprétation cytologique
K. Maloum, C. Settegrana

La cytoponction ganglionnaire est un geste simple, non invasif et peu douloureux, facile à réaliser devant
toute adénopathie superficielle. Elle permet le plus souvent une orientation diagnostique rapide vers un
contexte réactionnel bénin ou vers une pathologie tumorale, hématologique ou non, imposant alors la
réalisation d’une biopsie chirurgicale pour analyse histologique. La parfaite connaissance de la structure
du ganglion et de la physiologie des réponses immunitaires est indispensable à la compréhension et
à l’étude de la cytologie ganglionnaire. La cytoponction consiste à introduire une aiguille fine dans le
ganglion et à réaliser quelques frottis avec le suc ganglionnaire recueilli.
© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Adénogramme ; Cytologie ; Ganglion ; Lymphome ; Ponction

Plan techniques immunohistologiques et éventuellement génétiques


et/ou moléculaires complètent la morphologie afin de diagnosti-
■ Introduction 1 quer et classer les hémopathies lymphoïdes.
La lecture du frottis est effectuée après coloration, généralement
■ Indications et valeur diagnostique 1 de May-Grünwald-Giemsa. Le décompte des différentes catégories
■ Technique 2 cellulaires n’est pas utile. Seuls un commentaire et une conclusion
■ Différents aspects cytologiques 2 synthétique sont rendus par le cytologiste. L’interprétation d’une
Adénites réactionnelles et bénignes 2 ponction ganglionnaire est généralement rendue dans la journée,
Pathologies tumorales 4 c’est donc un examen d’orientation simple, rapide et peu invasif.
■ Conclusion 8

 Indications et valeur
diagnostique
 Introduction
La ponction ganglionnaire est un geste médical, simple, peu
La ponction ganglionnaire à l’aiguille fine est le premier douloureux et réalisable pour toute adénopathie au moins cen-
geste diagnostique d’une adénopathie, qui peut être suffisant ou timétrique et suffisamment superficielle pour être accessible. Elle
conduire à la biopsie dont la réalisation dirigée permet de prévoir peut donc être réalisée dans tous les cas où le contexte clinique
des analyses complémentaires. De plus, lors des biopsies ganglion- n’est pas d’emblée évident. La cytologie ganglionnaire apporte
naires, la réalisation systématique d’empreintes ganglionnaires rapidement des éléments d’orientation, en faveur soit d’un proces-
permet par la rapidité et la précision de leur analyse cytologique sus réactionnel permettant alors de temporiser, soit d’une maladie
une orientation mais aussi un complément diagnostique des lym- maligne imposant une biopsie ganglionnaire d’emblée. Le résul-
phomes malins. Enfin, grâce aux possibilités de confrontation tat de la cytoponction ganglionnaire permet alors d’anticiper
cytohistologique, c’est un moyen d’apprentissage et de perfec- les examens complémentaires qu’il faudra pratiquer sur le pré-
tionnement dont l’expérience est indispensable à la maîtrise des lèvement biopsique (immunophénotypage, caryotype, biologie
données de la cytoponction. L’architecture ganglionnaire est répu- moléculaire, bactériologie, parasitologie, etc.). En cas de polyadé-
tée inaccessible à l’étude cytologique, mais l’identification de nopathies, la ponction ganglionnaire peut guider le choix du site
critères morphologiques basés sur l’analyse détaillée des cellules à biopsier. La principale limite de la cytoponction ganglionnaire
présentes sur les frottis ou empreintes ganglionnaires permet de est le risque de biais d’échantillonnage, seule une petite fraction
l’apprécier et de poser le plus souvent un diagnostic relativement du ganglion étant analysée. De ce fait, toute adénopathie estimée
précis, qu’il s’agisse d’un processus réactionnel ou lymphoma- bénigne mais persistante ou a fortiori progressive doit faire l’objet
teux. d’un prélèvement biopsique. Au cours du suivi d’une patholo-
L’interprétation cytologique d’une ponction doit toujours être gie tumorale bien identifiée initialement, un résultat non ambigu
confrontée à l’ensemble du contexte clinicobiologique. Elle ne d’adénogramme peut suffire à affirmer une récidive. Dans tous les
peut pas se substituer à une étude histologique après exérèse cas, la réalisation préalable d’une numération formule sanguine
chirurgicale du ganglion en cas de pathologie maligne. Des avec examen du frottis est nécessaire.

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Volume 8 > n◦ 3 > septembre 2013
http://dx.doi.org/10.1016/S2211-9698(12)56839-1
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Figure 2. Frottis ganglionnaire : coloration au May-Grünwald-Giemsa


d’un frottis ganglionnaire.

monomorphe ou polymorphe, et de repérer les cellules les plus


volumineuses qu’elles soient normales (amas de cellules dendri-
tiques, macrophages, etc.) ou tumorales (cellules de Sternberg,
amas de cellules métastatiques, etc.). L’analyse cytologique plus
précise se fait aux plus forts grossissements (objectifs × 40, × 50
et × 100).

Adénites réactionnelles et bénignes


Une hypertrophie ganglionnaire est possible en cas d’activation
bénigne du système immunitaire. Il peut s’agir d’une réaction à un
Figure 1. Cytoponction ganglionnaire : le ganglion est immobilisé pathogène ou au décours d’une maladie inflammatoire. Les adé-
entre deux doigts et l’aiguille est introduite dans le ganglion. nopathies peuvent être satellites du territoire atteint (maladie des
griffes du chat, etc.) ou disséminées en cas de maladie systémique
(lupus, etc.). Plusieurs aspects peuvent être distingués.

 Technique Réactions lymphoïdes prédominantes


Hyperplasie folliculaire
Avant toute ponction ganglionnaire, l’ensemble des aires gan- C’est la réaction la plus fréquemment rencontrée. Elle n’est
glionnaires doit être examiné afin de retenir la ou les adénopathies pas spécifique d’une étiologie précise. Cytologiquement, le frottis
les plus volumineuses et les plus récentes. En cas d’adénopathies ganglionnaire est polymorphe, constitué par un mélange de cel-
dans plusieurs territoires, il est préférable de ponctionner au lules B normales du centre germinatif, de cellules accessoires et de
moins deux territoires afin d’augmenter la sensibilité de l’examen. lymphocytes T. On observe de façon caractéristique trois éléments
Le territoire inguinal n’est retenu que s’il s’agit du seul terri- cytologiques essentiels :
toire atteint ou du plus volumineux. Les nombreux remaniements • les cellules lymphoïdes du centre germinatif, en particulier les
observés dans ces ganglions peuvent compliquer l’interprétation centroblastes, souvent regroupés en plages et parfois en mitose,
cytologique de ces ponctions. L’opérateur doit interroger le les centrocytes à noyau clivé sont quant à eux peu visibles. On
patient sur la durée d’évolution des adénopathies et leur carac- retrouve également parfois quelques immunoblastes et plasmo-
tère douloureux. Les caractéristiques de l’adénopathie doivent être cytes ;
relevées : taille, inflammation, dureté et mobilité. • les macrophages à corps tingibles témoignant de la mort cellu-
Avant de réaliser la ponction, il est important de considérer la laire par apoptose ;
nature de la tuméfaction. La localisation des adénopathies per- • les cellules dendritiques folliculaires, plus ou moins regroupées
met généralement de s’assurer de leur nature ganglionnaire. Il en amas, parfois difficiles à retrouver sur un frottis de cyto-
peut également s’agir de tuméfactions glandulaires (glande sali- ponction (Fig. 3). Cet aspect, sans spécificité diagnostique, peut
vaire, nodule thyroïdien par exemple), de lipomes ou de kystes. être observé notamment au cours d’infections virales et de la
La seule contre-indication de la ponction concerne les tuméfac- toxoplasmose.
tions de nature vasculaire généralement suspectées à la palpation Le principal diagnostic différentiel est celui d’un lymphome
par leur caractère « battant ». folliculaire. La présence de centroblastes en mitose et de macro-
Une anesthésie locale n’est pas nécessaire. Une désinfection phages à corps tingibles, reflets de la prolifération cellulaire et de
locale de la zone de ponction est nécessaire selon les procédures la mort cellulaire par apoptose, est en faveur d’une hyperplasie
habituelles. La ponction consiste à immobiliser le ganglion puis réactionnelle.
y introduire une aiguille de 21 à 23 G (Fig. 1). L’opérateur réalise
trois à quatre « allers–retours » dans le ganglion puis retire l’aiguille Hyperplasie immunoblastique
sans aspiration afin de ne pas altérer les cellules, ni risquer de Le frottis est polymorphe, caractérisé par une impor-
diluer le suc ganglionnaire par du sang. Le suc ganglionnaire est tante composante immunoblastique sur un fond lymphoïde
déposé sur une lame à l’aide d’une seringue remplie d’air. Des pléomorphe constitué de petits lymphocytes, de quelques cen-
frottis sont rapidement réalisés avec précaution compte tenu de la troblastes et plasmocytes. Les immunoblastes sont de grandes
fragilité des cellules ganglionnaires (Fig. 2). Si l’aspect est purulent cellules lymphoïdes à noyau arrondi, chromatine fine, nucléole
une deuxième ponction peut être pratiquée de façon à recueillir plus ou moins central et cytoplasme fortement basophile ou plus
une quantité de suc ganglionnaire suffisante pour la réalisation clair. Une hyperplasie immunoblastique peut être retrouvée lors
d’examens microbiologiques. d’infections virales aiguës, en particulier la mononucléose infec-
tieuse. Le même polymorphisme lymphocytaire peut être retrouvé
dans le sang. L’hyperplasie immunoblastique pure ne doit pas être
confondue avec un lymphome immunoblastique dont l’aspect
 Différents aspects cytologiques très monomorphe est caractérisé par la présence quasi exclusive
d’immunoblastes avec parfois une différenciation plasmocytaire.
Un adénogramme doit être observé d’abord au faible grossisse- Dans certains cas, l’aspect est plus hétérogène avec une impor-
ment (objectif × 10) afin d’évaluer l’aspect d’ensemble du frottis, tante maturation plasmocytaire et ne permet pas d’éliminer

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Figure 3. Hyperplasie folliculaire : population cellulaire polymorphe


avec un fond lymphoïde constitué de lymphocytes (2) et de centroblastes
(3), de macrophages à corps tingibles (1), de cellules dendritiques follicu-
laires (4) (coloration au May-Grünwald-Giemsa × 50).

formellement un lymphome T angio-immunoblastique (LAI). Le


recours à la biopsie ganglionnaire est indispensable dans ces situa-
tions.

Hyperplasie interfolliculaire
L’aspect cytologique est dans ce cas caractérisé par un fond
lymphoïde peu pléomorphe constitué de petits lymphocytes asso-
cié à d’assez nombreuses cellules interdigitées et parfois quelques
immunoblastes à cytoplasme clair (Fig. 4). C’est une réaction
ganglionnaire sans franche spécificité étiologique, observée le
plus souvent au cours de contextes bénins mais parfois en
accompagnement d’une atteinte tumorale partielle (carcinome,
lymphome).
Le principal diagnostic différentiel est celui d’un lymphome
à cellules T périphériques, où la population lymphoïde est plus Figure 4. Hyperplasie interfolliculaire : présence d’un fond lymphocy-
polymorphe avec des atypies cellulaires. Dans ce cas, la biopsie taire mature et des cellules interdigitées alignées.
ganglionnaire doit être réalisée. Par ailleurs, les cellules interdigi- A. Coloration au May-Grünwald-Giemsa × 50.
tées sont parfois peu visibles sur une cytoponction ganglionnaire, B. Coloration au May-Grünwald-Giemsa × 100.
le frottis apparaît alors monomorphe, constitué de petits lympho-
cytes ne permettant pas d’exclure un lymphome à petites cellules.
La biopsie peut là aussi être indiquée.
Des cas d’hyperplasie mixte mêlant des aspects d’hyperplasies
folliculaire et interfolliculaire sont également possibles.

Adénites granulomateuses
Elles sont caractérisées par une hyperplasie de cellules épithé-
lioïdes. Ces cellules sont des cellules histiocytaires transformées,
de grande taille, à cytoplasme clair, hétérogène, étendu, bien
limité, à noyau allongé ou ovalaire et à chromatine régulière, fine-
ment réticulée, avec un ou deux nucléoles. Les trois situations
réactionnelles les plus fréquemment associées sont la tuberculose,
la sarcoïdose et la maladie des griffes du chat. La présence d’un
granulome est également possible en situation tumorale, on peut
en retrouver lors de certains lymphomes T ou du lymphome de
Hodgkin.

Tuberculose
Le diagnostic peut être posé sur la seule cytoponction ganglion-
naire devant la présence : Figure 5. Tuberculose : amas de cellules épithélioïdes (1) sur un fond
• d’une nécrose caséeuse, grumeleuse, avec des débris cellulaires ; lymphocytaire.
• de cellules épithélioïdes plus ou moins regroupées en amas
formant parfois une seule cellule de très grande taille, multi-
nucléée, appelée cellule géante. Sarcoïdose
Il peut persister une population lymphoïde d’allure réaction- L’aspect est proche de celui de la tuberculose du fait de
nelle, parfois avec une composante plasmocytaire importante la présence de cellules épithélioïdes isolées ou regroupées en
(Fig. 5). Très souvent, une biopsie exérèse est réalisée. amas à distinguer des cellules géantes. On ne retrouve pas

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Figure 6. Maladie des griffes du chat : mélange de lymphocytes, poly- Figure 7. Lymphome lymphocytique : population lymphocytaire
nucléaires neutrophiles (1) et cellules épithélioïdes (2). monomorphe constituée de petits lymphocytes matures à chromatine
mottée (1). À noter la présence d’une cellule de plus grande taille nucléo-
lée (prolymphocyte [2]).

de nécrose. Cette réaction épithélioïde est associée à un envi-


ronnement lymphoïde banal peu activé et parfois quelques
plasmocytes. en flux) ou des examens de biologie moléculaire. Ces examens
complémentaires ne sont réalisés que dans certains centres spé-
Maladie des griffes du chat
cialisés et ne concernent que des cas particuliers.
Sur un fond lymphoïde pléomorphe, on note une réaction Nous décrivons l’aspect cytologique des lymphomes les plus
épithélioïde à laquelle s’ajoute la présence de foyers de polynu- fréquents et de ceux dont l’aspect cytologique est le plus caracté-
cléaires neutrophiles. Cet aspect évoque le diagnostic de maladie ristique.
des griffes du chat et doit réorienter l’interrogatoire du patient à
la recherche d’une notion de contage. L’adénopathie est généra- Lymphome lymphoblastique
lement satellite de la région de la griffure de chat (Fig. 6). Dans la classification de l’Organisation mondiale de la santé
(OMS) les lymphomes lymphoblastiques et les leucémies aiguës
Nécrose lymphoblastiques (LAL) sont regroupés au sein d’une même entité
Lorsqu’il existe un processus de destruction nécrotique, les cel- du fait de leur unité biologique. Le lymphome lymphoblastique
lules sont très altérées, voire non identifiables. est défini par une atteinte ganglionnaire et une infiltration médul-
laire absente ou minime (moins de 25 % de lymphoblastes). Le
Nécrose purulente lymphome lymphoblastique évolue fréquemment vers une forme
Il s’agit de nombreux polynucléaires neutrophiles altérés mais leucémique. La distinction entre ces deux entités est parfois déli-
encore reconnaissables et macrophages sur un fond acellulaire cate avec des formes frontières difficiles à classer.
« sale ». Cet aspect oriente généralement vers un contexte infec- Cytologiquement, le frottis est constitué d’un tapis monotone
tieux. de cellules lymphoïdes immatures, à haut rapport nucléocyto-
Nécrose tumorale plasmique, à noyau plus ou moins régulier, chromatine fine,
très homogène et parfois nucléolé. Les images de mitoses sont
Un aspect nécrotique peut correspondre à la nécrose de cellules
fréquentes. Quelques variations morphologiques peuvent être
tumorales. Il n’est alors pas possible d’orienter de façon certaine
observées avec des cellules de plus grande taille, à cytoplasme plus
sur la nature des cellules. Un examen approfondi de toute la lame
étendu ou vacuolé.
doit être réalisé afin de rechercher d’éventuelles cellules conser-
vées, permettant d’affirmer une localisation tumorale. Dans tous Lymphome lymphocytique
les cas de nécrose totale, une biopsie est nécessaire pour le diag- Le lymphome lymphocytique et la leucémie lymphoïde chro-
nostic. nique (LLC) sont regroupés dans la classification OMS du fait
Nécrose caséeuse de la nature commune de la cellule tumorale (lymphocyte B
Il s’agit d’une nécrose grumeleuse avec parfois des débris cellu- CD5+ CD23+). Il représente de 5 à 10 % des lymphomes ganglion-
laires, associée à des cellules épithélioïdes et géantes, et observée naires. On distingue le lymphome lymphocytique de la LLC par
au cours de la tuberculose. l’absence d’hyperlymphocytose sanguine.
La cytoponction ganglionnaire retrouve un frottis mono-
morphe, constitué de petites cellules lymphoïdes matures,
Pathologies tumorales régulières, à chromatine dense, grossièrement mottée et à cyto-
plasme peu étendu, parfois associées à de rares prolymphocytes
Lymphomes
(cellules lymphoïdes de taille moyenne à nucléole proéminent) et
Des adénopathies sont fréquemment retrouvées au diagnostic des grandes cellules nucléolées para-immunoblastiques (Fig. 7).
de lymphomes non hodgkiniens ou hodgkiniens et une cytoponc-
tion ganglionnaire oriente souvent le diagnostic. Lymphome folliculaire
Lorsque le diagnostic de lymphome est évoqué sur un Il s’agit d’un des lymphomes non hodgkiniens le plus fré-
adénogramme, une biopsie et un examen histologique et immu- quent. Des adénopathies périphériques isolées ou multiples sont
nohistochimique sont indispensables pour confirmer et préciser fréquentes au diagnostic. La cytoponction retrouve un frottis
le diagnostic avant tout traitement. Il est également possible polymorphe avec une population lymphoïde relativement homo-
de réaliser certains examens complémentaires hématologiques gène constituée de petites cellules centrocytiques à chromatine
à partir de suc ganglionnaire aspiré après ponction comme un dense, souvent clivées et à haut rapport nucléocytoplasmique,
immunophénotypage lymphocytaire (sur lame ou par cytométrie associée à d’assez nombreuses cellules dendritiques folliculaires.

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Figure 8. Lymphome folliculaire (A, B) : population lymphocytaire constituée d’une majorité de petits centrocytes (1) au sein de laquelle on note la présence
de cellules dendritiques folliculaires (2)

Lymphome de la zone marginale


Les lymphomes de la zone marginale représentent 10 % des
lymphomes non hodgkiniens et comprennent trois entités dis-
tinctes : les lymphomes du MALT (tissu lymphoïde associé aux
muqueuses) (70 %), les lymphomes spléniques de la zone mar-
ginale (20 %) et les lymphomes ganglionnaires (ou nodaux) de
la zone marginale (10 %). Ces derniers sont rares et donc peu
souvent retrouvés lors d’une cytoponction ganglionnaire. Cytolo-
giquement il s’agit d’une prolifération pléomorphe constituée de
cellules lymphoïdes hétérogènes avec le plus souvent des cellules
lymphoïdes de petite taille, des cellules lymphoïdes à différencia-
tion plasmocytaire et des cellules de taille moyenne, à cytoplasme
étendu et clair dites « monocytoïdes ». L’une ou l’autre de ces
populations peut être prédominante. Il s’agit le plus souvent de
proliférations lymphoplasmocytaires pouvant être associées à de
nombreuses cellules dendritiques folliculaires (si les follicules sont
colonisés par la prolifération marginale) ou plus rarement une
prolifération uniforme de cellules dites B-monocytoïdes.

Lymphomes B diffus à grandes cellules


Figure 9. Lymphome à cellules du manteau : population lymphoïde Ce sont les lymphomes les plus fréquents. Sur les frottis de
discrètement pléomorphe avec des cellules de taille petite à moyenne, à ponction ganglionnaire, ce diagnostic est évoqué devant une
chromatine plus ou moins lâche, à noyau parfois irrégulier et/ou nucléolé. prolifération lymphoïde monomorphe constituée de cellules de
grande taille, le plus souvent centroblastiques (noyau arrondi,
chromatine fine avec des nucléoles périphériques, cytoplasme
On peut observer quelques centroblastes dont le nombre est à d’abondance moyenne basophile) (Fig. 10). Au sein de cette
considérer pour évoquer une éventuelle transformation morpho- population, on distingue quelques mitoses et macrophages à
logique (Fig. 8). À la différence de l’hyperplasie folliculaire, il n’y corps tingibles. D’autres types morphologiques sont observés,
a pas de macrophages à corps tingibles et peu de mitoses. Seule notamment des lymphomes centroblastiques dits polymorphes
l’étude histologique avec appréciation de l’architecture ganglion- de par l’hétérogénéité de taille des cellules lymphomateuses, des
naire permet de poser le diagnostic de certitude. Rarement, une lymphomes à grandes cellules irrégulières, des lymphomes à pré-
dissémination sanguine de ces lymphomes peut être observée. dominance immunoblastique avec parfois une différenciation
plasmocytaire. Un panachage de petites et grandes cellules lym-
Lymphome à cellules du manteau phoïdes (sans cellules de taille intermédiaire) peut faire évoquer
La zone du manteau entoure le centre germinatif pour consti- deux diagnostics possibles selon les éventuelles atypies morpho-
tuer le follicule secondaire et correspond à des cellules résiduelles logiques : soit un lymphome B à grandes cellules riche en cellules
du follicule primaire. Cytologiquement, les lymphomes à cellules T (petits lymphocytes « banals ») ; soit un lymphome de bas grade
du manteau sont le plus souvent d’aspect pléomorphe, avec des transformé (petits lymphocytes à noyau clivé ou irrégulier asso-
cellules de taille variable, souvent moyenne, à chromatine plus ciés aux plages de grandes cellules). Dans tous les cas les études
ou moins dense, noyau irrégulier et assez haut rapport nucléocy- immunohistochimiques permettent de poser un diagnostic précis.
toplasmique (Fig. 9). On ne retrouve pas ou peu de cellules du Le syndrome de Richter représente un cas particulier de lym-
centre germinatif comme les cellules dendritiques folliculaires ou phome à grandes cellules survenant au cours de l’évolution des
les macrophages à corps tingibles. Il existe plusieurs variants mor- LLC (5 % à 10 % des cas). Il s’agit généralement d’un lymphome
phologiques et notamment un variant « blastoïde » mimant un immunoblastique ou plus rarement d’un lymphome de Hodgkin.
lymphome lymphoblastique et un variant à grandes cellules dont
les caractéristiques sont équivalentes à la forme classique mais qui Lymphome de Burkitt
peuvent parfois évoquer des grands centrocytes et faire discuter un Il s’agit d’un lymphome B relativement rare, cependant
lymphome folliculaire. Une phase leucémique est fréquemment plus fréquent chez l’immunodéprimé (infection par le virus de
observée, avec dans le sang périphérique des cellules lymphoïdes l’immunodéficience humaine [VIH]). L’aspect cytologique est,
ayant les mêmes caractéristiques morphologiques. dans sa forme typique, suffisamment caractéristique pour poser

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Figure 10. Lymphome B diffus à grandes cellules (A, B) : population cellulaire monomorphe constituée de grandes cellules lymphoïdes à chromatine fine
et nucléoles multiples plutôt périphériques (centroblastes). À noter la présence d’un macrophage à corps tingibles et d’une mitose (× 40).

Figure 11. Lymphome de Burkitt : population cellulaire monomorphe avec des cellules lymphoïdes de taille moyenne, à chromatine relativement mottée,
parfois finement nucléolée, à cytoplasme fortement basophile et vacuolé. À noter un macrophage à corps tingibles.

un diagnostic formel. Le frottis de cytoponction est massivement • le polymorphisme cellulaire associant des cellules lymphoïdes
envahi par une population monomorphe de cellules lymphoïdes de taille inégale allant de la petite à la grande cellule, à des
de taille moyenne, régulières, à chromatine de densité intermé- cellules non tumorales, cellules épithélioïdes, éosinophiles,
diaire, plus ou moins nucléolée et à cytoplasme très basophile plasmocytes et parfois cellules interdigitées ;
et souvent vacuolé. À cette population lymphoïde s’ajoutent de • les cytoplasmes très évocateurs sont marqués essentiellement
nombreux macrophages à corps tingibles reproduisant l’aspect de par leur abondance, une basophilie variable et la présence pos-
« ciel étoilé » décrit par les anatomopathologistes (macrophages à sible de granulations azurophiles ;
cytoplasme clair sur un fond cellulaire dense et sombre) (Fig. 11). • les irrégularités nucléaires parfois peu visibles en cytologie et
On observe également sur le frottis de nombreuses images de particulièrement utiles au diagnostic des lymphomes liés à
mitoses et des cellules en apoptose (chromatine dense pycno- l’human T cell lymphoma virus 1 (HTLV1). On note souvent la
tique). En l’absence de tous ces critères, et notamment lorsque présence de quelques volumineuses cellules sternbergoïdes.
les cellules lymphoïdes sont plus grandes, irrégulières ou à chro- Lymphome T périphérique. Dans sa forme commune, c’est
matine fine, il peut s’agir d’une forme frontière définie par l’OMS le caractère pléomorphe du frottis associant des cellules lym-
« Lymphome B inclassable intermédiaire entre un lymphome B phoïdes de taille inégale, des cellules histiocytaires parfois en
diffus à grandes cellules et un lymphome de Burkitt ». La confir- amas, des polynucléaires éosinophiles qui font évoquer le diag-
mation histologique complétée par l’immunohistochimie et la nostic de lymphome T pléomorphe. Des cellules pseudo-Sternberg
recherche de réarrangements de l’oncogène c-myc et de Bcl-2 sont peuvent être présentes. L’histologie, complétée par les études
indispensables, en particulier dans les formes atypiques. immunohistochimiques, confirme le diagnostic.
Lymphome T angio-immunoblastique. La première caracté-
Lymphomes T ristique cytologique du lymphome T de type LAI est l’important
Les lymphomes T sont beaucoup moins fréquents que les lym- panachage cellulaire du frottis qui peut faire discuter un pro-
phomes B (environ 10 % des lymphomes ganglionnaires) et de cessus réactionnel. L’observation attentive du frottis montre la
pronostic plus péjoratif. Le diagnostic cytologique d’un lym- présence d’une population lymphoïde très pléomorphe avec
phome T repose sur trois critères morphologiques : un mélange d’immunoblastes parfois atypiques à cytoplasme

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Figure 12. Lymphome anaplasique (A, B) : grandes cellules regroupées Figure 13. Maladie de Hodgkin.
en petits îlots caractérisées par un noyau polylobé ou irrégulier, à chroma- A. Volumineuse cellule de Sternberg (2) avec un noyau polylobé, à chro-
tine lâche peu ou non nucléolée, le cytoplasme est étendu et modérément matine lâche fortement nucléolée au sein d’une population cellulaire
basophile. polymorphe (lymphocytes matures et polynucléaires éosinophiles [1])
(grossissement × 40).
B. Cellule de Sternberg (2), noter les volumineux nucléoles bleutés (gros-
basophile (immunoblastes B) ou clair (immunoblastes T) asso- sissement × 100).
ciée à de nombreux plasmocytes. On peut retrouver des cellules
pseudo-Sternberg ainsi que des cellules dendritiques folliculaires,
des cellules épithélioïdes et des éosinophiles. Sur ces éléments immunocytochimiques montrent que ces cellules expriment la
cytologiques, le diagnostic de LAI peut être évoqué mais c’est molécule CD30 et l’antigène épithélial membranaire. Il s’agit le
l’histologie qui le confirmera en mettant en évidence, en plus plus souvent de cellules ni B, ni T (« nulles »), plus rarement de
d’une destruction de l’architecture, une hyperplasie vasculaire cellules T et très rarement de cellules B. Dans tous les cas, la biop-
associée au polymorphisme cellulaire. La confrontation de cet sie ganglionnaire est indispensable pour le diagnostic de certitude.
aspect morphologique au contexte clinicobiologique est particu- Dans 60 à 85 % des cas, une expression de l’antigène ALK (ana-
lièrement importante. Bien qu’il s’agisse de signes cliniques et plastic large cell lymphoma kinase) peut être mise en évidence par
biologiques non spécifiques, l’existence de certains d’entre eux : des techniques d’immunohistochimie.
fièvre, altération de l’état général, rash cutané, test de Coombs
positif, hypergammaglobulinémie polyclonale, constitue un argu- Lymphome de Hodgkin
ment de poids en faveur d’une LAI. Le lymphome de Hodgkin est une pathologie ganglionnaire
de reconnaissance relativement aisée par la mise en évidence
Lymphome anaplasique de cellules tumorales caractéristiques, les cellules de Sternberg et
L’adénogramme retrouve une population lymphoïde pléo- les cellules de Hodgkin. L’adénogramme est polymorphe consti-
morphe marquée par la présence d’un nombre variable de tué d’un fond lymphocytaire réactionnel associé souvent à des
grandes, voire très grandes, cellules lymphoïdes à noyau par- polynucléaires éosinophiles et parfois à des cellules épithélioïdes.
ticulièrement irrégulier ou polylobé et nucléoles généralement Au sein de cette population cellulaire, on reconnaît les cellules
peu visibles (Fig. 12). Cet aspect peut être difficile à distin- de Sternberg, caractérisées par leur très grande taille, un noyau
guer d’un lymphome de Hodgkin riche en cellules tumorales volumineux irrégulier, bi- ou multilobé, une chromatine fine et
dans laquelle les noyaux ont une chromatine boursouflée et boursouflée fortement nucléolée (volumineux nucléoles bleutés)
de volumineux nucléoles. Ces cellules sont parfois cohésives et un cytoplasme faiblement basophile et étendu. Classiquement,
et peuvent être confondues avec des cellules métastatiques, ces cellules possèdent un noyau bilobé symétrique en « miroir »
mais l’absence de chevauchement des noyaux, la chromatine avec dans chaque lobe un volumineux nucléole basophile (Fig. 13)
d’aspect « lymphoïde » et les nucléoles peu visibles sont plus en et sont très visibles dès l’observation au faible grossissement. À
faveur d’un lymphome anaplasique à grandes cellules. Les études côté des cellules tumorales typiques, on peut observer les cellules

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Figure 14. Séminome : grandes cellules arrondies plutôt isolées, à Figure 15. Carcinome bronchique à petites cellules : amas de cellules
cytoplasme d’abondance moyenne sur un fond cellulaire vacuolé carac- pseudoblastiques, de taille moyenne à haut rapport nucléocytoplasmique
téristique (grossissement × 100). à chromatine fine contenant une inclusion arrondie de coloration variable
gris-bleu (flèche) (grossissement × 100).

de Hodgkin, de taille plus modérée, mononucléées, à noyau


arrondi et fortement nucléolées, intermédiaires entre les cellules correspondant à un début de pycnose (Fig. 15). On retrouve le
de Sternberg et les immunoblastes. Sur la cytoponction, il est plus souvent des zones de nécrose sur ces frottis, voire parfois un
fréquent que les cellules tumorales soient réduites à des noyaux aspect majoritairement nécrotique et seulement quelques cellules
nus qui restent suffisamment caractéristiques pour évoquer forte- tumorales dispersées.
ment le diagnostic de lymphome de Hodgkin. D’un point de vue
Mélanome
immunologique, ces cellules expriment fréquemment le CD30 et
le CD15. Même en cas d’aspect cytologique évident à la cyto- Ces cellules sont souvent facilement reconnaissables, elles ont
ponction, une biopsie est indispensable afin de préciser le stade la particularité d’être le plus souvent pigmentées (pigments de
histologique. mélanine). Ce pigment apparaît comme une poussière grossière
de grains noirs. À côté des cellules tumorales, on peut retrouver
Métastases de tumeurs solides des macrophages contenant également des grains de mélanine,
les mélanophages. Certains mélanomes ne sont pas pigmentés
En cas de dissémination métastatique, une adénopathie peut (mélanomes achromiques) et d’identification alors beaucoup plus
être le siège d’une localisation d’une tumeur solide non héma- difficile.
topoïétique. Nous n’illustrons ici que les quelques exemples où
l’aspect est suffisamment caractéristique pour être reconnu par la
seule cytologie.  Conclusion
Séminome
L’aspect cytologique est caractéristique, le frottis est constitué La cytoponction ganglionnaire constitue souvent le pre-
de cellules d’assez grande taille, cohésives, entre lesquelles on mier geste diagnostique devant une adénopathie. Elle permet
retrouve un fond intercellulaire basophile, plus ou moins vacuo- d’orienter rapidement le diagnostic et peut être suffisante dans
lisé donnant un aspect « d’astrakan » (Fig. 14). la majorité des processus réactionnels mais doit toujours être
complétée par une biopsie ganglionnaire en cas de suspicion cyto-
Carcinome bronchique à petites cellules logique de pathologie maligne.
L’aspect de cette métastase est particulier car il mime des cel-
lules blastiques indifférenciées (aspect pseudohématopoïétique). Pour en savoir plus
Il est important de reconnaître cet aspect afin de ne pas orien-
ter par erreur le diagnostic vers une hémopathie. Le frottis est Felman P, Gentilhomme O. Atlas de cytopathologie ganglionnaire. Paris:
constitué de cellules tumorales très cohésives de taille moyenne à Arnette; 1997.
grande, à haut rapport nucléocytoplasmique et dont les noyaux Swerdlow SH, Campo E, Harris NL, Jaffe ES, Pileri SA, Stein H, et al. WHO
se déforment mutuellement. Les éléments permettant d’orienter Classification of Tumours of Haematopoietic and Lymphoid Tissues.
vers une nature extrahématopoïétique sont le regroupement en Lyon: IARC; 2008.
amas de cellules cohésives, mal conservées en périphérie des amas Küppers R. Mechanisms of B-cell lymphoma pathogenesis. Nat Rev Cancer
et, souvent, la présence d’« inclusions » bleutées dans le noyau 2005;5:251–62.

K. Maloum (karim.maloum@psl.aphp.fr).
C. Settegrana.
Service d’hématologie biologique, Groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Maloum K, Settegrana C. Adénogramme : technique et interprétation cytologique. EMC - Biologie
médicale 2013;8(3):1-8 [Article 90-15-0005-A].

Disponibles sur www.em-consulte.com


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