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II.

Aspects individuels du droit du travail

Cours n°4 : 2.1/ La formation et l’exécution du contrat de travail (2ème partie)

2/ Les conditions de formation du contrat de travail

Le recrutement se finalise par la formation d’un contrat de travail valide et suppose l’accord
de volonté des deux parties.
L’article L. 1221-1 CT dispose que :
« Le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun. Il peut être établi selon
les formes que les parties contractantes décident d'adopter. »

Comme tout contrat, le contrat de travail est un accord de volontés entre deux parties, destiné à
créer des obligations :
(art. 1101 du code civil : « Le contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes
destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations. »)

Obligations de l’employeur Obligations du salarié


- Déclarer le salarié aux organismes - Être de bonne foi lors de l'embauche
sociaux - Respecter les directives de l'employeur
- S'acquitter de toutes les cotisations - Exécuter consciencieusement le travail
- Fournir le travail convenu et verser le - Satisfaire à l'obligation de loyauté
salaire prévu - Respecter le règlement intérieur et les
- Fournir les moyens nécessaires à accords en vigeur
l'exécution du travail - Exécuter de bonne foi le contrat de
- Respecter les libertés individuelles du travail (respect des clauses).
salarié
- Respecter le principe de non-
discrimination
- Satisfaire à son obligation de sécurité
- Consacrer des ressources à la formation
professionnelle
- Respecter la loi et les accords collectifs
- Exécuter de bonne foi le contrat de
travail (respect des clauses).

2.1/ Les conditions de fond

Selon l’article 1128 du code civil, le contrat de travail n’est valide que sous réserve de :

Capacité des Contenu licite


Consentement
parties de et certain du
des parties
contracter contrat

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Cours n°4
a/ Le consentement des parties
Le contrat de travail se forme par l’échange des consentements : on parle de contrat
consensuel.
Le consentement des parties doit être exempt de tout vice, sous peine de nullité.
L'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que,
sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions
substantiellement différentes.
Le caractère déterminant est apprécié en fonction des personnes et des circonstances dans
lesquelles le consentement a été donné.

L’erreur Le dol La violence


Peut porter sur la personne de Ce sont des manœuvres Il y a violence morale si
l’employeur (erreur de la part du destinées à tromper. l’employeur a fait pression sur le
salarié) ou sur la personne du salarié, en abusant de son
Cela n’est cause de nullité que si le
salarié (erreur sur la personne que autorité, pour obtenir la signature
dol a été déterminant du
l’on recrute). du contrat de travail.
consentement : par exemple
Puisque le contrat est conclu intuitu l’employeur n’aurait pas choisi ce
personae (quant à la personne du candidat s’il avait su la vérité.
salarié), toute erreur est
En réalité, dans un tel cas,
susceptible d’annulation car elle est
l’employeur peut soit :
déterminante.
- Demander la nullité du
Elle est difficile à justifier
contrat si le mensonge a été
concernant l’erreur émanant de
déterminant
l’employeur : seulement si l’erreur
- Licencier pour faute si le
est excusable.
salarié n’avait pas les
Ainsi, l'employeur ne peut pas compétences requises :
invoquer une erreur à propos d'un exemple du salarié engagé
candidat sur lequel il s'est comme directeur régional des
insuffisamment renseigné (Cass. ventes. Il avait fait croire qu’il
soc. 3 juill. 1990 n° 87-40349). avait été strategic account
manager dans une entreprise
concurrente et cela avait été
déterminant pour
l’employeur : il s’agit donc de
manœuvres dolosives
pouvant justifier le
licenciement.

b/ La capacité des parties de contracter


Deux personnes ne peuvent valablement conclure un contrat de travail que si elles disposent
de la capacité juridique de contracter.
- L'employeur peut être une personne morale ou physique.
- Le salarié est obligatoirement une personne physique majeure, même si l’accès au
travail est fixé à 16 ans.
NB : Un mineur ne peut conclure un contrat de travail qu'avec l'accord de son
représentant légal, sauf s'il est émancipé.
Focus : La personne placée sous sauvegarde de justice ou en curatelle simple a la capacité de
contracter. En revanche, l'employeur en curatelle renforcée doit être assisté de son curateur (Cass. 1ère
civ. 3 oct. 2006 n° 04-13198). La personne sous tutelle doit être représentée par son tuteur.

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c/ Le contenu licite et certain du contrat
Comme tout contrat, pour être valable, le contrat de travail doit avoir un contenu :
- certain, qui consiste dans la fourniture d'une prestation de travail moyennant
rémunération,
- et licite, c'est-à-dire non prohibé par la loi ou contraire aux bonnes mœurs et à l'ordre
public.
Par exemple, le contrat ne doit pas être conclu dans le seul but de faire bénéficier, par la suite,
le salarié de prestations de chômage.

d/ Les sanctions des conditions de fond


Le contrat de travail peut être annulé par le juge prud'homal si l'une des conditions
essentielles requises pour sa validité fait défaut.
Le salarié devra être indemnisé pour les prestations qu'il a fournies (Cass. soc. 15 mai 2007
n° 06-43205).

2.2/ Les conditions de forme


Le contrat de travail à durée indéterminée (CDI) est la forme normale et générale de la
relation de travail.
Il peut être établi selon les formes que les parties décident d'adopter.
Le contrat de travail à durée déterminée est une exception qui obéit à une réglementation
particulière (voir cours sur le CDD).
Le CDI n’est donc soumis à aucune condition de forme, il s’agit d’un contrat consensuel et
l’écrit n’est pas une condition de validité.
La formation du contrat résulte donc du seul échange des consentements. Il peut donc être
conclu oralement.
Il reste cependant soumis à un certain formalisme.

a/ Le formalisme de protection
Les informations suivantes sont nécessaires pour fournir une protection au salarié :
• Pas d'écrit imposé pour les CDI
• Cependant, la Directive européenne du 14 octobre 1991 oblige l'empoyeur à fournir au salarié dans les deux mois de l'embauche un document
relatant des informations écrites sur la relation contractuelle : identité des parties, lieu de travail, emploi occupé, salaire, durée du travail,
éléments du durée des congés payés...
contrat de travail • Cela peut se faire dans le cadre d'une lettre d'embauche ou copie de la déclaration préalable à l'embauche ou bulletin de paie

• intitulé et références de la convention collective applicable, son lieu de consultation


Informations des • le règlement intérieur de la société
salariés par voie
d'affichage

• Celles relatives à la discrimination, le harcèlement sexuel et moral.


• Le salarié est informé qu'il bénéficie tous les deux ans d'un entretien professionnel avec son employeur consacré à ses perspectives
d'évolution professionnelle
Autres informations • livret d'épargne salarial mis en place au sein de l'entreprise

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Cours n°4
b/ Les formalités liées à l’embauche

§ La déclaration préalable à l’embauche


L'embauche d'un salarié ne peut intervenir qu'après déclaration nominative, dite
déclaration préalable à l’embauche, comportant certaines mentions, accomplie par
l'employeur auprès des organismes de protection sociale.
Article L. 1221-10 CT
Cette formalité s'impose à tous les employeurs, y compris aux particuliers.
Par ce moyen, l'employeur accomplit les déclarations et demandes suivantes :
- immatriculation de l'employeur et du salarié à la sécurité sociale,
- affiliation à l'assurance chômage de l'employeur,
- demande d'adhésion à un service de santé au travail,
- demande de suivi médical du salarié et
- affiliation des salariés agricoles aux institutions de retraite et de prévoyance
complémentaires.
Toute nouvelle embauche d'un même salarié doit faire l'objet d'une déclaration préalable, sauf
si l'intéressé est engagé par des contrats successifs effectués sans interruption.
La déclaration préalable est adressée, au plus tôt 8 jours avant la date prévisible de
l'embauche et au plus tard au moment de l'entrée en fonctions du salarié à l'organisme de
recouvrement des cotisations de sécurité sociale (Urssaf ou caisse de MSA) dans le ressort
duquel est situé l'établissement devant employer le salarié (ou le lieu de travail pour les salariés
agricoles) et, pour les salariés relevant du régime général, au service de santé au travail.
La déclaration est obligatoirement effectuée par voie électronique lorsque l'employeur relevant
du régime général a adressé plus de 50 déclarations au cours de l'année civile précédente.
La formalité est réputée accomplie si les éléments suivants ont été fournis :
- numéro d'identification de l'établissement employeur ;
- numéro de sécurité sociale du salarié s'il a déjà fait l'objet d'une déclaration préalable à
l'embauche dans un délai de 14 mois ;
- indication des date et heure de l'embauche, des nature et durée du contrat et de la période
d'essai.
L'employeur doit remettre au salarié, lors de son embauche, une copie de la déclaration ou
de l'accusé de réception.
Cette obligation est considérée comme satisfaite dès lors que le salarié dispose d'un contrat
de travail écrit mentionnant l'organisme destinataire de la déclaration.
Susceptible d'être également sanctionné au titre du travail dissimulé, le non-respect de
la déclaration préalable à l'embauche est passible de :
- une amende administrative, directement exécutoire, d'un montant égal à 300 fois le
taux horaire du minimum garanti
- et de l'amende pénale prévue pour les contraventions de 5ème classe (1.500 € d’amende
pour les personnes physiques et 7.500 € pour les personnes morales).
L'employeur n'ayant pas adressé ses déclarations par voie électronique alors qu'il y est tenu
encourt :
- une pénalité égale, par salarié, à 0,5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale ;
- de l'amende pénale prévue pour les contraventions de 4e classe (750 € d’amende pour
les personnes physiques et 3.750 € pour les personnes morales).
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Les salariés peuvent s'informer de l'accomplissement par l'employeur de la déclaration
préalable les concernant en adressant une demande écrite en ce sens aux services
administratifs compétents en matière de travail illégal qui doivent répondre dans les 30 jours.

§ Le registre unique du personnel


Quel que soit l'effectif de l'entreprise, l'employeur doit tenir un registre du personnel
dans chaque établissement (et non au siège de l'entreprise) où sont employés des salariés.
Doivent y être mentionnés de façon indélébile, lors des embauches et dans leur ordre, les
nom et prénoms de tous les salariés occupés par l'établissement, y compris les travailleurs à
domicile, ainsi que les événements postérieurs à l'embauche lorsque ceux-ci surviennent.
Doivent également y être inscrits dans une partie spécifique, et dans l'ordre de leur arrivée,
les nom et prénoms des stagiaires et des volontaires en service civique accueillis dans
l'établissement.
Les renseignements contenus dans le registre doivent être conservés pendant 5 ans à compter
de la date du départ des personnes concernées.
A défaut de registre, l’amende encourue est celle prévue pour les contraventions de 4ème classe
(750 € d’amende pour les personnes physiques et 3.750 € pour les personnes morales),
appliquée autant de fois qu'il y a de salariés concernés.
Articles L. 8223-2 CT
NB : Des informations complémentaires peuvent être mentionnées :
- pour tous les salariés : nationalité, date de naissance, sexe, emploi, qualification, dates d'entrée et de
sortie, date d'autorisation d'embauche ou de licenciement ou, à défaut, dates des demandes d'autorisation,
lorsqu'une autorisation est requise ;
- pour les stagiaires : nom et prénoms du tuteur, lieu de présence du stagiaire, lieu et dates de début et de
fin du stage ;
- pour les travailleurs étrangers assujettis à la possession d'un titre de travail : type et numéro d'ordre du
titre valant autorisation de travail. Les copies de ces documents doivent par ailleurs être annexées au
registre unique du personnel et tenues à disposition soit dans l'établissement, soit sur chaque chantier ou
lieu de travail distinct de l'établissement pour ceux des travailleurs qui y sont occupés ;
- pour les salariés détachés par un prestataire étranger, l'entreprise d'accueil doit annexer au registre les
accusés de réception des déclarations de détachement incombant au prestataire qui sont tenus à
disposition soit dans l'établissement, soit sur chaque chantier ou lieu de travail distinct de l'établissement
pour ceux des travailleurs détachés qui y sont employés ;
- le cas échéant, la mention « apprenti », « contrat de professionnalisation », « CDD », « salarié à temps
partiel » ou « salarié temporaire ». Dans ce dernier cas sont précisés le nom et l'adresse de l'entreprise
de travail temporaire ;
- pour les travailleurs mis à disposition par un groupement d'employeurs : la mention « mis à disposition
par un groupement d'employeurs » ainsi que la dénomination et l'adresse de ce dernier.

NB : Le registre est tenu à la disposition du CSE et des agents de contrôle de


l'inspection du travail. En revanche, sauf accord de l'employeur, les délégués syndicaux
n'ont pas accès au registre.
En outre, le conseil de prud'hommes n'est pas compétent pour statuer sur une demande de
mise à jour du registre, ce litige d'ordre collectif relevant du tribunal judiciaire (CA Toulouse
23 janv. 2009).
Pour la tenue du registre unique du personnel, l'employeur peut recourir à d'autres moyens,
notamment informatiques, dans les conditions, à la condition que des garanties de contrôle
équivalentes soient maintenues. Et dans un tel cas, l'employeur doit consulter le CSE avant la
mise en place du support de substitution et adresser cet avis à l'inspecteur du travail.
Art. L. 2315-5 CT

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c/ La visite d’information et de prévention
Tout salarié non affecté sur un poste à risque1 bénéficie à
l'embauche d'une visite d'information et de prévention, réalisée par un membre de
l'équipe pluridisciplinaire en santé.
La visite est organisée dans les 3 mois suivant la prise effective de poste.
Elle a notamment pour objet d'interroger le salarié sur son état de santé, de l'informer sur
son suivi médical et d'identifier si sa situation nécessite une orientation vers le médecin du
travail.
Lors de cette visite, un dossier médical en santé au travail est ouvert au salarié.
Le professionnel de santé lui délivre une attestation de suivi, également adressée à
l'employeur.
La visite d'information et de prévention est renouvelée périodiquement, selon une périodicité
fixée par le médecin du travail et qui ne peut pas excéder 5 ans.
Les salariés affectés à un poste présentant des risques particuliers pour leur santé, leur
sécurité ou celle de leurs collègues ou des tiers évoluant dans le même environnement de
travail ou encore les jeunes de moins de 18 ans affectés à des travaux dangereux, bénéficient
d'un suivi médical individuel renforcé.
NB : Ce suivi médical individuel renforcé a notamment pour objet de vérifier que le salarié est
médicalement apte au poste auquel il doit être affecté et, à défaut, de proposer des
adaptations ou l'affectation à d'autres postes. À l'issue de cet examen, le médecin du travail
délivre un avis médical d'aptitude ou, le cas échéant, d'inaptitude physique, qui est versé au
dossier médical du salarié.
Le salarié est revu par le médecin du travail selon une périodicité que ce dernier détermine et
qui ne peut pas excéder 4 ans. Une visite intermédiaire est effectuée par un membre de
l'équipe pluridisciplinaire au plus tard 2 ans après l'examen pratiqué par le médecin.

3/ Les clause du contrat de travail

En vertu de la liberté contractuelle, l’employeur est libre de choisir le contenu du contrat en


fonction des besoins de l’entreprise, sous réserve du respect des règles d’ordre public.
Certaines clauses sont interdites, d’autres sont spécifiques.

3.1/ Les clauses interdites


Elles sont interdites car contraires à l’ordre public.
En cas de mention dans un contrat de travail, elles encourent la nullité :
- Si la clause a été déterminante pour les parties au moment de la conclusion du
contrat de travail, elle entraîne la nullité de tout le contrat.
- Si la clause est accessoire, seules les dispositions de cette clause sont privées d’effets.

1
Les postes à risque sont ceux exposant les salariés à des substances ou agents dangereux (amiante, plomb, agents cancérogènes, mutagènes
ou toxiques pour la reproduction, agents biologiques susceptibles de provoquer des maladies graves), aux rayonnements ionisants, au risque
hyperbare ou au risque de chute en hauteur lors des opérations de montage et de démontage d'échafaudages. Sont également visés les travaux
dangereux auxquels sont affectés les moins de 18 ans. L’employeur peut compléter cette liste après avis du médecin du travail et du CSE

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Sont ainsi interdites :
- Les clauses couperet : celles prévoyant une rupture de plein droit du contrat de
travail en raison de son âge ou du fait qu’il peut bénéficier d’une pension de retraite,
- Les clauses d’indexation : sont interdites et nulles, dans les conventions collectives,
accords d'entreprise et contrats individuels, les clauses prévoyant une indexation des
salaires sur le Smic, le niveau général des prix, le niveau général des salaires, ou le
prix de biens, produits ou services sans rapport avec l'activité de l'entreprise,
- Les clauses attributives de juridiction : les clauses prévoyant une compétence
autre que celles des CPH,
- Les clauses compromissoires : clauses par lesquelles les parties conviennent à
l’avance de soumettre à un arbitre tout litige éventuel qui naîtrait de l’exécution du
contrat,
- Les clauses portant atteinte aux droits fondamentaux et à la vie privée : il
n’est pas possible d’apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et
collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à
accomplir ni proportionnée au but recherché,
- Les clauses qui dérogeraient de manière générale à une disposition d’ordre
public (congés payés, protection des représentants du personnel…).

3.2/ les clauses particulières du contrat de travail


Nous étudierons successivement :
- la période d’essai
- la clause d’objectifs
- la clause d’exclusivité
- la clause de mobilité
- la clause de non-concurrence
- la clause de dédit formation.

a/ La période d’essai

a.1/ Définition de la période d’essai


La période d'essai, qui se situe nécessairement au début de l'exécution du contrat de
travail, permet à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié et à celui-ci
d'apprécier si ses fonctions lui conviennent.
Facultative, elle constitue une première phase du contrat durant laquelle l'une ou l'autre des
parties peut en principe décider de rompre sans indemnité, sauf stipulations conventionnelles
contraires.

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Focus : distinction avec l’essai professionnel :
L’essai professionnel consiste en une épreuve ou un examen permettant à l'employeur de vérifier
la qualification professionnelle du postulant et son aptitude à occuper le poste demandé.
Il est de très courte durée et il n'y a pas de lien de subordination pendant son exécution, l'intéressé ne
se trouvant pas dans des conditions normales d'emploi.
L'employeur n'est pas tenu de rémunérer l'essai, sauf disposition conventionnelle contraire.

La période d’essai ne se présume pas c’est à celui qi s’en prévaut d’en rapporter la preuve (par
la loi, le contrat de travail, la convention collective).
NB : La période d'essai et la possibilité de la renouveler ne se présument pas. Elles sont
expressément stipulées dans la lettre d'engagement ou le contrat de travail (art. L. 1221-23
CT).

a.2/ Durée de la période d’essai

La durée initiale de la période d'essai ne peut pas excéder :


- 2 mois pour les ouvriers et les employés ;
- 3 mois pour les agents de maîtrise et les techniciens ;
- 4 mois pour les cadres.
Art. L. 1221-19 CT
Ces durées ont un caractère impératif, sauf durées plus courtes fixées par des accords
collectifs conclus après le 26 juin 2008 ou par la lettre d'engagement ou le contrat de travail.
Autrement dit, l'employeur ne peut les dépasser. Il peut seulement retenir une durée plus
courte dans le contrat de travail ou la lettre d'engagement, notamment si un accord collectif
le prévoit.
La durée de la période d'essai, renouvellement compris, ne peut pas dépasser :
- 4 mois pour les ouvriers et employés ;
- 6 mois pour les agents de maîtrise et techniciens ;
- 8 mois pour les cadres.
Art. L. 1221-21 CT

La période d’essai débute le 1er jour d’exécution du travail (date d’embauche) et se décompte
en jour calendaire.

Est-il possible de retenir une durée différente du maximum prévu par la loi ?
Par exception, les accords de branche conclus avant le 26 juin 2008, date d'entrée en vigueur
de la loi du 25 juin 2008 (de Modernisation sociale) et prévoyant une durée plus longue que
les durées maximales légales continuaient à recevoir application (anc. Art. L. 1221-22 CT).
Toutefois, la loi du 9 mars 2023 met fin à cette dérogation à compter du 9 septembre
2023. Les durées de période d'essai plus longues que les durées légales prévues
par ces accords de branche ne peuvent donc plus être appliquées à compter de
cette date.

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Par conséquent, seuls les maximums légaux sont désormais applicables en matière
de période d'essai.
Dans tous les cas, le contrat de travail (ou la lettre d'engagement) peut prévoir des durées plus
courtes, voire l'absence de toute période d'essai. De même, des durées plus courtes peuvent
être prévues par des accords collectifs conclus après le 26 juin 2008.

Focus sur la loi du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de
l'Union européenne dans les domaines de l'économie, de la santé, du travail, des
transports et de l'agriculture (n° 2023-171).
Elle permet à la France d'entrer en conformité avec la directive 2019/1152 (relative à des conditions
de travail transparentes et prévisibles dans l'Union européenne) qui, sauf exception, fixe à 6 mois la
durée maximale pour une période d'essai.
Cela correspond à la notion de durée raisonnable de la période d’essai.
En effet, la Haute juridiction n'a pas hésité à sanctionner à plusieurs reprises certaines périodes
d'essai trop longues.
- À titre d'exemple, dans un arrêt du 10 mai 2012 la Cour de cassation a, au visa de la
Convention n° 158 de l'OIT (Convention sur le licenciement du 22 juin 1982), jugé
déraisonnable une période d'essai de 6 mois pour un poste d'assistante commerciale et ce
au regard de la finalité de la période d'essai et de l'exclusion des règles de licenciement
durant cette période. La convention collective applicable (convention collective du Crédit
Agricole) prévoyait pourtant une telle durée.
- ou encore une décision du 11 janvier 2012, à propos d'une période d'essai qui,
renouvellement compris, pouvait atteindre un an, pour un directeur de magasin,
- une période de stage d'un an pour un chargé d'affaires : décision du 4 juin 2009.
En fixant une interdiction de dépassement des limites légales le législateur s'inscrit dans la doctrine
de la Cour de cassation et veille au respect de l'unique fonction d'une période d'essai pour
l'employeur : vérifier les capacités professionnelles du salarié et son adéquation au poste.

La durée de la période d'essai peut-elle être réduite si le salarié était déjà présent
dans l'entreprise ?
Plusieurs cas particuliers sont envisagés :
- En cas d'embauche dans l'entreprise dans les 3 mois suivant l'issue d'un
stage intégré à un cursus pédagogique réalisé lors de la dernière année
d'études, la durée de ce stage doit être déduite de la période d'essai. Cela ne
doit pas conduire à réduire la période d'essai de plus de la moitié de sa durée, sauf
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accord collectif prévoyant des dispositions plus favorables. Toutefois, si l'embauche est
effectuée dans un emploi qui correspond aux activités qui étaient confiées au stagiaire
pendant son stage, la durée de celui-ci doit être intégralement déduite de la période
d'essai. NB : lorsque le salarié est embauché par l'entreprise à l'issue d'un stage
d'une durée supérieure à 2 mois, la durée de ce stage doit être prise en compte dans
l'ouverture et le calcul des droits liés à l'ancienneté. (Art. L. 1221-24 CT),
- Si le salarié était en intérim dans l'entreprise, la durée des missions au cours des
trois mois précédant son embauche doit être déduite de la période d'essai (art. L.1251-
38 CT), à condition que les fonctions exercées ne soient pas différentes,
- Lorsqu’un CDI fait suite à un CDD, la durée du CDD doit être déduite de la période
d'essai – art. L. 1243-11 CT. Si le salarié a exécuté plusieurs CDD successifs ou
entrecoupés de brèves périodes d'interruption, il convient de déduire de la période
d'essai la durée totale de ces CDD (Cass. soc. 9 oct. 2013 n° 12-12113).

Enfin, certains salariés sont soumis à des durées spécifiques de période d’essai :
- Les VRP : pas plus de 3 mois,
- Les apprentis : pendant les 45 premiers jours, consécutifs ou non, de formation
pratique en entreprise effectuée par l'apprenti – art. L. 6222-18 CT. Ne sont donc pas
pris en compte les jours de formation théorique passés en centre de formation des
apprentis (CFA), ni les jours où l'apprenti ne travaille pas (dimanches par exemple).
Il s'agit de donner le temps à l'employeur d'être sûr de son embauche et de
permettre au jeune de tester son orientation professionnelle.
- Les titulaires d'un CDD : la durée maximale de la période d'essai varie en fonction de
la durée du contrat de travail et selon que le CDD a un terme précis ou non – art. L.
1242-10 CT,
- Les salariés intérimaires : entre 2 et 5 jours – art. L. 1251-14 CT).

a.3/ Modification importante du contrat et de travail et période d’essai

Nouvelles fonctions du Changement de poste entre Conséquences du transfert


salarié deux sociétés du groupe d’entreprise
Dans le cadre d’un changement
de fonction, le salarié sera
soumis à une période
probatoire et non une période
d’essai. En cas de transfert du contrat
La période d’essai est
Si la période probatoire n’est pas de travail : pas de période
satisfaisante, elle ne permet pas la possible.
d’essai aux salariés repris.
rupture du contrat mais de replacer le
salarié dans ses fonctions antérieures.
En cas de rupture du contrat : risque de
condamnation pour licenciement sans
cause réelle et sérieuse.

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a.4/ Prolongation ou renouvellement de la période d’essai
Prolongation Renouvellement

•incidence d'événéments sur la durée de la période •Si l’employeur ou le salarié n’ont pas disposé du temps
d'essai : elle sera prolongée en fonction de la durée de nécessaire pour apprécier les compétences du salarié ou
suspension du contrat de travail (arrêt maladie, congés si le poste convient, il est possible de renouveler la
sans solde, fermeture de l'entreprise...) période d’essai, sous certaines conditions.
•décompte en jours calendaires •renouvellement possible une seule fois et sous 2
conditions :
•si prévu par accord de branche étendu qui fixe les
conditions et durée
•si prévu dans la lettre d'engagement ou le contrat de
travail
•le renouvellement doit être accepté par le salarié
(volonté claire et non équivoque)
•durée de la période d'essai, renouvellement inclus, fixé
par la loi (voir la durée).
•en cas de non-respect des conditions = licenciement
sans cause réelle et sérieuse

a.5/ Rupture de la période d’essai


Principe :
En cas de rupture avant le terme de la période d'essai, les règles relatives à la résiliation du
contrat de travail à durée indéterminée ne sont pas applicables.
Les parties n'ont donc pas en principe à motiver leur décision de rompre et sans respecter
de procédure.
Toutefois, pour des raisons de preuve, il est recommandé de notifier la rupture de
la période d'essai soit par LRAR, soit par remise en main propre au salarié en double
exemplaire, avec mention de la date de remise.
La date de la rupture se situe au jour de l'envoi ou de la remise.
En tout état de cause, la rupture doit être explicite.
NB :
Il ne peut pas être valablement convenu que le contrat prendra fin du seul fait de l'arrivée à
son terme de l'essai (Cass. soc. 13 nov. 1996 n° 93-44052) ou en cas de refus du salarié de
prolonger l'essai (Cass. soc. 5 juin 1996 n° 92-44920).
La rupture de l'essai ne peut pas non plus se réduire à l'envoi au salarié de l'attestation pour
l'assurance chômage (Cass. soc. 17 oct. 2007 n° 06-44388).
Délai de prévenance :

Présence du salarié dans Délai de prévenance


l’entreprise
Rupture par l’employeur Rupture par le salarié
7 jours max 24 heures 24 heures
Entre 8 jours et 1 mois 48 heures 48 heures
Plus d’un mois 2 semaines 48 heures
Plus de 3 mois 1 mois 48 heures

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DCG 3
Cours n°4
La période d'essai, renouvellement inclus, ne peut être prolongée du fait de la durée du délai
de prévenance. En pratique il faut donc anticiper ce délai et la date de rupture.
Ainsi lorsque l'employeur met fin à la période d'essai avant son terme, la rupture ne s'analyse
pas en un licenciement même si l'employeur n'a pas respecté le délai de prévenance.
Une indemnité pourra être versée à ce titre.
En effet si l'employeur veut rompre la période d'essai avant la fin de cette période et si le délai
de prévenance se poursuit au-delà du terme il doit libérer le salarié au terme de la période
d'essai et verser une indemnité pour les jours restants.
L'indemnité compensatrice due en cas de non-respect du délai de prévenance est égale au
montant des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s'il avait exécuté le préavis,
indemnité compensatrice de congés payés comprise.
En cas de non-respect du délai de prévenance l'employeur est susceptible de verser au salarié
une indemnité égale au salaire correspondant à la durée de ce délai de prévenance.

Rupture abusive :
Même si la rupture de l'essai n'a pas à être motivée, les circonstances de la rupture peuvent
révéler une attitude fautive de l'employeur ou du salarié.
En particulier :
- La période d'essai étant destinée à apprécier la valeur professionnelle du salarié, sa
rupture par l'employeur pour un motif non inhérent à la personne du salarié est abusive
(Cass. soc. 10 avril 2013 n° 11-24794),
- De même, l'interruption de l'essai par le salarié du fait de l'inexécution de ses
obligations par l'employeur s'analyse en une rupture abusive imputable à ce dernier
(Cass. soc. 7 fév. 2012 n° 10-27525).
- La rupture de la période d'essai pour un motif discriminatoire est nulle (Cass. soc. 16
fév. 2005 n° 02-43402) :
« Mais attendu que les dispositions de l'article L. 122-45 du Code du travail sont
applicables à la période d'essai ;
Et attendu que la cour d'appel, ayant constaté que l'employeur avait manifestement
souhaité écarter un salarié en raison de ses récents problèmes de santé, a légalement
justifié sa décision ; »
- Si l’employeur ne laisse pas au salarié un temps suffisant pour faire ses preuves (CA
Paris 11 dec. 2008 n° 07-2548)
- ou si elle intervient pour un motif économique (Cass. soc. 20 nov. 2007 n° 06-41212).

En cas de rupture abusive ou nulle, le salarié peut solliciter le versement de dommages-


intérêts en réparation du préjudice subi par le salarié, mais pas au paiement de l'indemnité
pour licenciement abusif ou nul, ni de l'indemnité compensatrice de préavis
En cas de nullité le salarié peut demander sa réintégration s’il la demande.

b/ La clause d’objectifs
Le contrat de travail peut prévoir une clause fixant des objectifs ou des quotas à atteindre.
Il s'agira le plus souvent de la réalisation d'un chiffre d'affaires minimum sur une période
déterminée ou la conclusion d'un nombre minimum d’affaires.

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Les objectifs doivent être réalisables. En cas de contestation ce sera au juge d'apprécier le
caractère réaliste des objectifs fixés.
Si le salarié ne réalise pas les objectifs fixés, le non-respect de la clause ne justifiera le
licenciement qu'en cas d'insuffisance professionnelle ou de fautes commises par le salarié.
Ne sera pas justifié le licenciement reposant sur un résultat dû, non pas au manque de
compétence du salarié, mais à la situation économique de l'entreprise ou à la politique
commerciale de la direction, ou si les objectifs fixés ne sont pas réalisables.

c/ La clause d’exclusivité
Il s’agit de la clause qui interdit au salarié pendant l’exécution du contrat de travail
d’exercer une autre activité, hors de l’entreprise, dans un secteur concurrent ou
non.
Elle doit être écrite et acceptée par le/la salarié(e) et est interdite dans les contrats à
temps partiel.
Elle n’interdit pas au salarié l’exercice d’une activité bénévole.
La clause obligeant le salarié à consacrer l'exclusivité de son activité à l'employeur
n'est valable que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise,
justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché.
Est illicite la clause d'exclusivité rédigée en termes généraux et imprécis, ne spécifiant
pas les contours de l'activité complémentaire interdite (bénévole ou lucrative, professionnelle
ou de loisirs) et ne permettant pas de limiter son champ d'application (Cass. soc. 16 mai 2018
n° 16-25272) :
« Mais attendu qu'ayant constaté que la clause d'exclusivité était rédigée en termes généraux
et imprécis ne spécifiant pas les contours de l'activité complémentaire qui serait envisagée par
le salarié, activité bénévole ou lucrative, professionnelle ou de loisirs et qu'ils ne permettaient
pas dès lors de limiter son champ d'application ni de vérifier si la restriction à la liberté du travail
était justifiée et proportionnée, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche
inopérante au vu de ces constatations, a légalement justifié sa décision ; »
Si la clause est licite, sa violation par le salarié peut justifier son licenciement disciplinaire.

d/ La clause de mobilité
d.1/ Définition
Elle consiste à prévoir contractuellement l’éventualité d’une modification du lieu de travail du
salarié. Ainsi le salarié accepte par avance expressément toute nouvelle affectation
géographique.
Elle ne se présume pas et doit être prévue au contrat de travail ou dans la convention
collective.
NB : si la convention collective prévoit son caractère facultatif et que le contrat de
travail n’en stipule pas, la clause de mobilité conventionnelle ne sera pas applicable.
Dans le cas inverse si la convention collective la prévoit de façon obligatoire mais
pas le contrat de travail, la clause de mobilité trouvera application, sous réserve que le
salarié en ait été averti lors de son embauche et mis en demeure d’en prendre
connaissance.

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d.2/ Conditions de validité
ð L'employeur peut imposer une mutation au salarié dont le contrat de travail comporte
une clause de mobilité, à la condition que celle-ci définisse de
façon précise sa zone géographique d'application et ne confère pas à
l'employeur le pouvoir d'en étendre unilatéralement la portée.
Une clause portant sur tout le territoire national peut être valable (Cass. soc. 9 juill. 2014 n°
13-11306) :
« Vu l'article L. 1232-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que M. X...et trois autres salariés ont été engagés
par la société Euro Cargo Rail en qualité de coordinateurs des opérations France ; que
leur contrat de travail prévoyait une clause de mobilité ainsi libellée : « Compte tenu
de la nature de ses fonctions, M... prend l'engagement d'accepter tout changement de
lieu de travail nécessité par l'intérêt ou le fonctionnement de l'entreprise dans la limite
géographique du territoire français sans que ce changement constitue une modification
du contrat de travail » ; qu'exerçant leur activité à Frouard en Meurthe-et-Moselle, ils
ont été licenciés pour avoir refusé leur mutation à Paris ; qu'ils ont saisi la juridiction
prud'homale ;
Attendu que pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, les arrêts
retiennent que la seule mention du « territoire français » ne peut suffire à rendre
précise la clause de mobilité puisque n'excluant pas les « DOM-TOM », que cette clause
ne comporte aucune précision sur sa zone géographique d'application et ne permet pas
au salarié, au moment de la signature du contrat, de savoir si elle concerne les
établissements existants ou également ceux à venir ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la clause de mobilité définissait de façon précise sa zone
géographique d'application et ne conférait pas à l'employeur le pouvoir d'en étendre
unilatéralement la portée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; »
Un salarié ne pouvant pas accepter par avance un changement d'employeur,
la clause de mobilité par laquelle il s'engage à accepter toute mutation dans une autre
société est nulle, même si cette dernière appartient au même groupe (Cass. Soc. 19 mai
2016 n° 14-26556, 14 déc. 2022 n° 21-18633).

ð La clause doit être proportionnée au but recherché compte tenu de l’emploi


occupé et du travail demandé. Elle doit correspondre à la protection des intérêts
de légitimes de la société.

d.3/ Conditions d’application


ð La clause doit respecter un délai de prévenance (Cass. soc. 4 mars 2020 n° 18-
24329).
Il faut tenir compte des circonstances de fait (distance géographique entre les deux lieux de
travail et les contraintes que cela engendre pour le salarié).
En cas d’abus, c’est au salarié d’en rapporter la preuve.

ð La mise en œuvre de la clause doit être faite dans l’intérêt de l’entreprise.


Autrement dit elle doit être mise en œuvre de bonne foi et ne pas entraîner la modification
d’un autre élément du contrat de travail (horaire, fonctions…), sauf accord exprès du salarié.
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Elle ne doit pas non plus porter atteinte à la vie personnelle et familiale du salarié.
NB : L'intéressé peut refuser sa nouvelle affectation si celle-ci s'accompagne de la modification
de sa rémunération ou d'un autre élément de son contrat (par exemple passage d'un horaire
de nuit à un horaire de jour (Cass. soc. 14 oct. 2008 n° 07-40092) :
« Vu l'article L.121-1 devenu L. 1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil
;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes, l'arrêt retient, d'une part que doit
recevoir application la clause de mobilité selon laquelle le salarié accepte expressément, par
avance, ses changements d'affectation ainsi que les modifications d'horaires, de prime de poste
et de durée de trajet pouvant résulter d'une nouvelle affectation, d'autre part que le contrat de
travail ne prévoyant pas que le salarié a été engagé pour un travail de nuit, il ne peut soutenir
qu'étant affecté sur un service de jour, la suppression du versement de ses primes de nuit,
lesquelles ont pour but d'indemniser le salarié de la sujétion particulière que représente le travail
de nuit, constitue une modification de son contrat de travail ;
Qu'en statuant ainsi, alors que lorsqu'elle s'accompagne d'un passage d'un horaire de nuit à un
horaire de jour ou d'un horaire de jour à un horaire de nuit, la mise en œuvre de la clause de
mobilité suppose, nonobstant toute clause contractuelle ou conventionnelle contraire, que le
salarié accepte cette mise en œuvre, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; »
Là encore c’est au salarié de démontrer l’existence d’un abus.

d.4/ Effets de la clause de mobilité


Lorsqu’elle est stipulée dans le contrat de travail, elle constitue un simple changement des
conditions de travail.
Ainsi, le refus du salarié d'une mutation en application de la clause de mobilité peut justifier
un licenciement pour faute, voire faute grave (Cass. Ass. Plén. 23 oct. 2015 n° 13-25279 ;
Cass. soc. 13 juin 2018 n° 17-17644) :

« Attendu qu'ayant relevé que le contrat de travail à temps partiel de la salariée prévoyait la
possibilité de la modification de la répartition du temps de travail en respectant un délai de
prévenance ainsi que les cas et la nature de la modification et qu'il comportait une clause de
mobilité géographique, la cour d'appel, qui a justement retenu que la modification effectuée par
l'employeur conformément à ces dispositions relevait de son pouvoir de direction a pu décider,
sans encourir aucun des griefs du moyen, que le refus de la salariée de rejoindre sa nouvelle
affectation constituait une faute grave : que le moyen n'est pas fondé ; ».

Mais le licenciement sera jugé sans cause réelle et sérieuse si :


- L’employeur met en œuvre la clause dans des conditions exclusives de la bonne
foi (Cass. soc. 28 mars 2006 n° 04-41016) ou
- Cette mise en œuvre porte une atteinte disproportionnée au droit du salarié à
une vie personnelle et familiale (Cass. soc. 10 fév. 2016 n° 14-17576).
A été jugée abusive ou déloyale :
o la mutation imposée à une salariée mère de famille d'un enfant handicapé
moteur alors que son ancien poste demeurait libre (Cass. soc. 6 fév. 2001 n°
98-44190) ;

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o à une salariée mère de 4 enfants, peu de temps avant son retour de congé
parental alors que le poste était libre depuis longtemps (Cass. soc. 14 oct. 2008
n° 07-43071)
o en cas de mutation sur un site distant de plus de 150 km alors que l'employeur
avait connaissance des difficultés matérielles du salarié et du mauvais état de
son véhicule (Cass. soc. 2 juill. 2003 n° 01-42046)
o imposée à un salarié ne disposant d'aucun moyen de transport en commun
pour se rendre sur le nouveau lieu de travail (Cass. soc. 10 janv. 2001 n° 98-
46226)
o sans respecter un délai de prévenance suffisant (Cass. soc. 21 juin 2006 n° 04-
44866 : pour un délai de 10 jours).

Modèle de clause de mobilité


Madame/Monsieur … exercera ses fonctions à (lieu)…
Toutefois, conformément à l’article … de la convention collective de…, pour des raisons
touchant à l’organisation et au bon fonctionnement de l’entreprise, la société se réserve la
possibilité de muter Madame/Monsieur … dans tout autre établissement de l’entreprise situé
en France métropolitaine, même si un changement de domicile s’avère en conséquence
nécessaire, compte tenu des fonctions exercées par Madame/Monsieur … et des besoins de
l’entreprise.
Madame/Monsieur … disposera d’un délai de … mois pour rejoindre sa nouvelle affectation.
Le refus de Madame/Monsieur … de rejoindre son nouveau poste s’analyserait en une
inexécution de ses obligations contractuelles pouvant légitimer son licenciement pour faute.

Focus : clause de résidence


C'est la clause par laquelle l'employeur impose au salarié d'habiter à proximité de son lieu de travail. Elle porte
atteinte à la liberté de choisir son domicile, liberté individuelle reconnue par la Convention Européenne des Droits
de l'Homme.
Elle ne sera donc valable que si elle est indispensable aux intérêts légitimes de l'entreprise et proportionnés au but
recherché quant à l'enclos occupé au travail demandé : exemple en cas d’astreinte.

e/ La clause de non-concurrence

e.1/ Définition
La clause de non-concurrence est la clause par laquelle il est interdit au salarié, à
l'expiration de son contrat de travail soit de créer une entreprise concurrente soit
de passer au service d'une entreprise concurrente.
Distincte de l'obligation de loyauté, à laquelle le salarié se trouve soumis pendant la durée
d'exécution du contrat de travail, la clause de non-concurrence n'a vocation à
s'appliquer qu'après la rupture du contrat.
Elle peut être prévue au moment de la conclusion de celui-ci, ou y être insérée par la suite (il
s’agira alors d’une modification du contrat de travail qui devra avoir été acceptée par ce
dernier : Cass. soc. 1er avril 2020 n° 18-24472).

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Un écrit est nécessaire. La clause peut être d'origine contractuelle ou conventionnelle.

Origine conventionnelle Origine contractuelle


Est applicable si la convention la prévoit et En l’absence de dispositions
même en l’absence de stipulations dans le conventionnelles, ne sera valable que si le
contrat de travail, mais à condition que le contrat de travail en stipule une
salarié ait été informé de son existence au
moment de son embauche

e.2/ Conditions de validité :


Une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est :
- indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise,
- limitée dans le temps
- limitée dans l'espace,
- tient compte des spécificités de l'emploi du salarié
- comporte l'obligation pour l'employeur de lui verser une contrepartie financière.
Ces conditions sont cumulatives (Cass. soc. 10 juill. 2002 n° 00-45135).
Voyons ces conditions une par une.

ð Intérêts de l’entreprise
Apportant une restriction à la liberté individuelle du salarié, l'obligation de non-concurrence ne
se justifie que si elle est indispensable à la protection des intérêts de l'entreprise.
Il n'est cependant pas nécessaire que la clause mentionne les risques concurrentiels encourus
(Cass. soc. 15 déc. 2021 n° 20-18144) :
« Vu le principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle et l'article L.
1121-1 du code du travail :
5. Une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection
des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient
compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de
verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives.
6. Pour déclarer nulle la clause de non-concurrence et débouter la société de ses demandes,
l'arrêt retient que la clause n'indique pas quels sont les intérêts légitimes que la
société entend protéger et qui justifient l'existence de l'interdiction de
concurrence, faute de définition de l'importance du risque économique et
commercial encouru, et que c'est donc en vain que la société soutient que l'intéressé
avait un contact constant avec la clientèle et la patientèle, qu'il avait connaissance des
fichiers clients et des prescripteurs médicaux, des stratégies commerciales, des conditions
commerciales, des tarifs pratiqués par l'entreprise, des appels d'offre en cours et des clients
privilégiés de l'entreprise dont la perte pouvait avoir des conséquences préjudiciables.
7. En statuant ainsi, alors que si la clause de non-concurrence doit être
indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, cette
condition n'implique pas que soient mentionnés dans le contrat de travail les
risques concurrentiels encourus, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition
qu'elle ne prévoit pas, a violé les principe et texte susvisés. »

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Illustrations :
- Une clause de non-concurrence peut être opposée à un serveur en contact direct avec
la clientèle (Cass. soc. 1er mars 1995 n° 93-42754),
- ou au chef d'une agence de voyages (Cass. soc. 20 juin 1995 n° 93-40287)
- En revanche, n'est pas valable la clause prévue par le contrat de travail d'un laveur de
vitres (Cass. soc. 14 mai 1992 n° 89-45300) ou d'un télévendeur (Cass. soc. 11 juill.
2001 n° 99-42915) ou d'un magasinier sans contact avec la clientèle (Cass. soc. 19
nov. 1996 n° 94-19404).
Cette condition s’apprécie donc par rapport à la nature de l’emploi, la qualification et
les fonctions exercées par le salarié mais également à la nature de l’activité de l’entreprise
en cause : la clause de non-concurrence doit protéger l'entreprise contre un risque tel que la
perte d'un savoir-faire ou le détournement de sa clientèle.
Si cette condition n’est pas remplie => nullité de la clause.

ð Limitation dans le temps et l’espace


Pour ne pas faire échec au principe de liberté du travail, l'interdiction de concurrence doit
être limitée dans le temps (durée d'application) et dans l'espace (zone géographique) et quant
à la nature des activités visées.

Limitation dans le temps :


Ont été jugées illicites les clauses de non-concurrence :
- illimitées dans le temps (Cass. soc. 9 juill. 1985 n° 83-42423)
- d'une durée excessive (5 ans) eu égard au caractère modeste de l'emploi du salarié
(Cass. soc. 7 mai 1991 n° 87-43470 : pour un laveur de vitre),
- interdisant au salarié toute activité similaire en France métropolitaine pendant 2 ans,
l'obligeant ainsi à s'expatrier (Cass. soc. 28 oct. 1997 n° 94-43792).

Limitation dans l’espace :


La clause de non-concurrence visant un champ d'application géographique étendu n'est pas
en soi illicite.
Elle ne l'est que si elle empêche l'ancien salarié d'exercer une activité conforme à sa formation,
à ses connaissances et à son expérience professionnelle (Cass. soc. 3 juill. 2019 n° 18-16134 ;
Cass. soc. 15 déc. 2021 n° 20-18144).
Est ainsi illicite la clause qui est illimitée dans l'espace, comme celle s'étendant au monde
entier (Cass. soc. 8 avril 2021 n° 19-22097).
Est en revanche licite la clause de non-concurrence géographiquement limitée aux territoires
sur lesquels le salarié a exercé son activité, même si leur étendue dépend des choix de
l'employeur en application d'une clause de mobilité (Cass. soc. 26 sept. 2018 n° 17-16020).

ð Spécificités de l’emploi
La clause de non-concurrence doit laisser au salarié la possibilité d’exercer une activité
professionnelle conforme à sa formation et ses compétences professionnelles.

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ð Contrepartie financière
La contrepartie financière doit être prévue par le contrat de travail.
À défaut, celle prévue par la convention collective s'applique si le contrat s'y réfère
expressément (Cass. soc. 21 oct. 2020 n° 19-18387).
La clause de non-concurrence ne comportant pas le versement d'une indemnité (Cass.
soc. 29 janv. 2003 n° 00-44882) ou fixant une contrepartie dérisoire (Cass. soc. 15 nov.
2006 n° 04-46721) est illicite et donc inapplicable, le juge ne pouvant donc pas en fixer
le montant dans ce cas (Cass. soc. 16 mai 2012 n° 11-10760).
De même, la clause de non-concurrence applicable en cas de licenciement ne peut pas exclure
le versement de l'indemnité en cas de faute grave ou lourde (Cass. soc. 28 juin 2006 n° 05-
40990 ; Cass. soc. 4 juin 2008 n° 04-40609) :

« Vu le principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, ensemble l'article


L. 120-2 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié, lié par une clause contractuelle de non-concurrence, de
sa demande relative à la contrepartie financière, la cour d'appel retient que le contrat de travail
de M. X... excluait le bénéfice de l'indemnité qu'il instituait au cas où le salarié serait licencié
pour faute grave ;
Qu'en statuant ainsi alors que le salarié lié par une clause de non-concurrence devant bénéficier
d'une contrepartie financière, les parties ne pouvaient dissocier les conditions d'ouverture de
l'obligation de non-concurrence de celles de son indemnisation, la cour d'appel a violé le principe
et le texte susvisés ; »

La disposition minorant le montant de la contrepartie selon le mode de rupture ou


son motif est quant à elle réputée non écrite, qu'elle soit d'origine contractuelle (Cass.
soc. 8 avril 2010 n° 08-43056) ou conventionnelle (Cass. soc. 14 avril 2016 n° 14-29679). Le
salarié a droit dans ce cas à l'indemnité la plus élevée.
Les modalités de calcul, la périodicité et la durée de versement de l'indemnité de non-
concurrence sont fixées par le contrat de travail ou, lorsque le contrat s'y réfère expressément,
par la convention collective (Cass. soc. 10 mars 2004 n° 02-40108).
L'indemnité est généralement proportionnelle au salaire de l'intéressé et à la durée de
l'interdiction de concurrence.
Elle doit être calculée en tenant compte du salaire brut (Cass. soc. 13 janv. 1998 n° 95-41467).
Les éléments de rémunération retenus pour l'assiette de calcul de l'indemnité sont fixés par
la clause.
L'indemnité est versée au salarié au moment de la mise en œuvre de la clause

ð Sanctions en l’absence d’une des conditions précitées


=> Si l’une de ces conditions fait défaut, la clause de non-concurrence sera déclarée nulle.
Cette nullité ne peut être invoquée que par le salarié.
L'annulation de la clause ouvre droit, pour le salarié, à la réparation du préjudice subi apprécié
souverainement par les juges du fond (Cass. soc. 25 mai 2016 n° 14-20578).

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NB : La nullité de la clause ne fait pas obstacle à l'engagement d'une action
en concurrence déloyale contre le salarié par l'ancien employeur (Cass. soc. 28 janv. 2005 n°
02-47527).

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Ce qu’il faut retenir

Pourquoi le marchandage a-t-il été interdit en 1848 ?

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-pourquoi-du-comment-histoire/pourquoi-le-marchandage-a-
t-il-ete-interdit-en-1848-4854792

Mots clés :
Recrutement, agence nationale pour l’emploi, travailleurs handicapé, déclaration préalable à l’embauche,
déclaration sociale nominative, liberté d’embauche, promesse d’embauche, pourparlers, registre unique du
personnel, visite de prévention et d’information, consentement, déclaration préalable à l’embauche, période d’essai,
clause de mobilité, clause de non-concurrence, clause d’exclusivité.

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