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Mais tant que les voitures produites restent sur les parkings de l'usine ou dans le hall
du concessionnaire, la plus-value reste virtuelle. Pour que le capitaliste récupère son
profit, il doit les vendre. C'est une phase capitale. Pour chaque automobile, chaque écran
plasma, chaque bien de consommation mis sur le marché, les capitalistes doivent trouver
un client disposant du pouvoir d'achat suffisant pour l'acheter. Ils doivent trouver un
marché solvable.
Mais le marché solvable est limité. Les clients potentiels des biens de
consommations sont les ménages, partout sur la planète. Ceux de la bourgeoisie petite
ou grande, qui consomment beaucoup, et pas seulement des jets privés ou des yachts.
Mais aussi, les plus nombreux, ceux des milieux populaires dont le pouvoir d'achat
limité permet tout juste de faire face à leurs besoins quotidiens, même dans les périodes
de prospérité économique où le pouvoir d'achat de la classe ouvrière augmente.
L'offre, de son côté, dépend de la capacité de production. Cette dernière augmente
avec les inventions scientifiques, les innovations techniques. Mais l'offre ne résulte pas
d'une décision consciente qui prendrait en compte les besoins à satisfaire ainsi que les
moyens pour y faire face. Elle résulte des décisions d'une multitude de capitalistes
individuels, opposés les uns aux autres par la concurrence.
Ces capitalistes se livrent une guerre acharnée. Dans le secteur automobile on compte
une douzaine de grands constructeurs. Si la demande mondiale est estimée à 70 millions
de véhicules neufs par an, chacun veut rafler la plus grosse part du marché. Chacun
lance des installations pour produire plus de voitures qu'il n'en vendra au bout du
compte. Cette concurrence entraîne un gonflement des capacités de production qui
dépasse un moment ou un autre la demande solvable. C'est la surproduction.
Inexorablement, certains se retrouvent avec des installations surdimensionnées ou
des stocks non écoulés. Pour rétablir l'équilibre, les perdants réduiront brutalement leur
production. Certains licencieront partiellement ou totalement leurs ouvriers, annuleront
les contrats passés avec leurs sous-traitants. D'autres feront faillite.
La crise est le seul moyen de liquider les stocks, d'équilibrer l'offre toujours plus
grande et la demande solvable limitée. L'ajustement se fait ainsi, après coup,
brutalement.
La construction d'une voiture exige des matières premières, de l'acier, divers métaux,
des câbles électriques, du plastique produit à partir du pétrole, des pneumatiques, une
multitude de pièces détachées, sans parler des machines-outils, des lignes d'assemblages
et de l'électricité pour les alimenter.
Chaque crise, chaque arrêt du processus de production dans l'automobile ou dans une
autre industrie des biens de consommation se répercutent sur les industries situées en
amont qui leur vendent ces biens de production. C'est ainsi qu'ArcelorMittal vient
d'annoncer l'arrêt de la moitié de ces hauts-fourneaux en Europe pour cause de crise
dans le bâtiment et l'automobile. Il en profite pour supprimer plusieurs milliers
d'emplois.
Comme dans tous les secteurs, la concurrence fait rage entre sidérurgistes ou entre
chimistes pour vendre le plus possible d'acier ou de plastiques aux industries des biens
de consommations. Elle fait rage aussi d'un étage à l'autre de la production, entre les
deux ou trois producteurs de minerais, les sidérurgistes et tous leurs clients
constructeurs automobiles ou industriels du bâtiment pour accaparer chacun la plus
grande part des profits.
Cette concurrence est encore une source de déséquilibre et de crise.
Mais le déséquilibre est d'autant plus grand que les investissements pour construire
un haut-fourneau ou une installation chimique sont très lourds. Les amortissements se
font sur des années et la mise en route de ces installations est longue.
Les sidérurgistes français ont par exemple, après guerre, retardé au maximum leurs
investissements dans des hauts-fourneaux capables de produire des aciers plats pour
l'automobile ou l'électroménager. Quand ils ont fini par le faire, avec l'aide massive de
l'État, dans les années 60, leurs nouvelles installations, à Fos ou à Dunkerque, étaient à
peine opérationnelles que les besoins en acier avaient chuté, condamnant de nombreux
hauts-fourneaux à la fermeture définitive. Ce fut l'une des causes de la crise de la
sidérurgie des années 70-80 qui provoqua des dizaines de milliers de licenciements et
qui vit une nouvelle fois l'État français voler au secours des de Wendel ou autres
Schneider en nationalisant leurs usines obsolètes ou surdimensionnées.
La crise permet ainsi de rétablir l'équilibre entre les différentes branches industrielles
; de rééquilibrer les deux secteurs fondamentaux de l'économie, les industries qui
produisent pour le marché des biens de consommations et celles qui produisent des
machines ou des matières premières, tous les moyens de production.
C'est encore à travers les crises que l'économie capitaliste élimine les entreprises qui
sont en trop par rapport au marché solvable.
Même dans une économie rationnellement organisée il serait nécessaire d'adapter
régulièrement les efforts collectifs, le temps de travail consacrés à produire n'importe
quelles marchandises. C'est une constante de l'économie humaine : au fur et à mesure
des innovations techniques et des améliorations dans la façon de produire
collectivement les richesses, le temps de travail moyen nécessaire pour produire la
nourriture, les vêtements mais aussi des ordinateurs ou des voitures a tendance à baisser.
Mais dans l'économie capitaliste, cet ajustement périodique se fait par la disparition
brutale des entreprises dont le temps et les coûts de production sont supérieurs à la
moyenne.
C'est encore la crise qui permet de rétablir le taux moyen de profit de l'économie
capitaliste. Pour augmenter sa part de profit, chaque capitaliste produit toujours plus de
marchandises. Si une nouvelle machine ou un nouveau procédé lui permet de produire
deux fois plus vite, deux fois plus pour deux fois moins cher, il investit dans cette
machine. Cela lui permet d'accroître sa part de marché et d'éliminer une partie de ses
concurrents.
Mais ce qui est bon pour un capitaliste individuel ne l'est pas pour la classe
capitaliste dans son ensemble.
Les concurrents finissent tôt ou tard par investir eux-aussi dans cette machine, ou une
autre encore meilleure. Au bout du compte, il y a un gonflement du capital investi dans
les machines. Comme c'est le travail humain qui produit le profit, pas les machines, ce
gonflement sans fin du capital provoque une diminution régulière du taux de profit pour
l'ensemble de l'économie capitaliste.
Chaque capitaliste tente bien sûr de résister à cette diminution en aggravant
l'exploitation des travailleurs par tous les bouts : allongement du temps de travail,
intensification des cadences, réduction des salaires comme des effectifs. Mais
l'exploitation fint par se heurter à des limites biologiques et le taux de profit moyen
diminue.
En éliminant les entreprises les moins rentables, en fermant les ateliers les moins
productifs, les crises détruisent du capital. Cette destruction de capital fait remonter le
taux de profit dans l'économie capitaliste.
Pour les capitalistes les plus faibles, la crise signifie la disparition. Pour les autres
c'est une opportunité de racheter à bas prix des concurrents. Les plus gros capitalistes
grossissent encore un peu plus. A chaque crise le capital se concentre davantage.
Pour l'économie capitaliste, les crises sont donc des moments absolument
indispensables pour purger le système de tous les déséquilibres qu'il engendre à toutes
les étapes de la production et de la distribution des marchandises.
Pour les travailleurs, chaque crise est une catastrophe car elle se traduit par des
licenciements massifs et du chômage, par l'appauvrissement d'une fraction
supplémentaire des classes populaires. Elle est nuisible, aussi, pour la société, car elle se
traduit par la destruction et le gaspillage de biens utiles qui manquent cruellement à
toute une autre fraction de l'humanité.
Mais pour l'économie capitaliste, ce ne sont que des faux-frais !
Les banques jouent encore un rôle quand les capitalistes décident de réinvestir leurs
profits. Les investissements pour construire une nouvelle usine nécessitent de gros
capitaux. En attendant de les accumuler, les capitalistes placent dans les banques, pour
les faire fructifier, les sommes récoltées au fur et à mesure de leurs ventes. Les banques
centralisent ainsi des masses de capitaux, elles les mutualisent en quelque sorte, pour les
mettre à disposition de tel ou tel capitaliste au moment où il en a besoin. Elles lui
permettent ainsi d'investir en anticipant sur ses profits à venir.
Il ne s'agit plus là d'un simple crédit commercial, d'un prêt à court terme pour faire
tourner l'entreprise mais d'un prêt à long terme, d'un crédit d'investissement.
Au cours du développement du capitalisme, les banques ont drainé vers l'industrie
des capitaux de plus en plus petits et épars provenant de petits patrons et de divers
rentiers. Des succursales bancaires de plus en plus décentralisées, les caisses d'épargne,
les bureaux de poste, ont drainé l'épargne populaire puis une fraction des salaires
ouvriers déposés sur leur compte bancaire. Elles ont ainsi transformé des sommes
éparses inutilisables en un capital mis à la disposition des gros capitalistes qui, crise
après crise, ont pris le contrôle des grands secteurs de la production.
Evidemment les banques ne font pas ce travail d'intermédiaire pour les beaux yeux
des industriels. En échange des sommes avancées, elles perçoivent un intérêt. A travers
cet intérêt elles prélèvent leur part de la plus-value crée par les ouvriers et elles ne se
contentent pas de la portion congrue.
Les banques, au cours du temps, ne sont pas restées longtemps de modestes
intermédiaires. Placées au cœur même des affaires des entreprises, au niveau du porte-
feuille, elles en ont pris le contrôle, en n'investissant que dans les plus rentables.
Parallèlement aux banques, les capitalistes trouvent leur ration de capital frais à
travers la Bourse des valeurs. Ils ont créé, très tôt dans leur histoire, des sociétés
industrielles par actions. Chaque action représente une fraction du capital. Les
actionnaires ne touchent pas un intérêt fixe, comme les banquiers, mais un dividende.
Ces dividendes, variables d'une année à l'autre, représentent une partie des profits
annuels de l'entreprise.
Les entreprises peuvent encore obtenir des capitaux en émettant sur les marchés
financiers des obligations qui rapportent à leurs porteurs un intérêt annuel fixe mais
aucun droit sur la marche de l'entreprise.
La généralisation des sociétés par actions a permis de dissocier complètement la vie
des entreprises de celle des capitaux qui leur permettent de fonctionner. Elle a surtout
accéléré la concentration en mettant sous la tutelle de gros investisseurs des milliers de
petits porteurs sans aucune prise sur la marche de l'entreprise. Cela a permis la création
des monopoles et de cartels dans les grands secteurs économiques.
Finalement il y a belle lurette que la frontière entre les industriels et les banquiers ont
disparu, qu'il n'y a pas les bons entrepreneurs industriels d'un côté et les mauvais
financiers de l'autre. Les directeurs des grandes banques sont dans les conseils
d'administrations des grandes firmes industrielles et vice-versa.
Le premier président de la Société Générale était par exemple Eugène Schneider, le
patron des forges du Creusot. Le principal banquier de l'Amérique, J.P. Morgan, qui
disposait en 1900 de plus d'or que le Trésor américain, contrôlait la moitié du réseau
ferré américain avant de racheter la principale compagnie d'acier du pays.
Le poids des financiers dans l'industrie et la concentration du capital ont augmenté
régulièrement lors de chaque crise.
Avec la concentration, l'extension du capitalisme à tous les pays, à tous les secteurs
économiques, puis le développement du crédit, plus tard les interventions directes des
États, les crises sectorielles se sont transformées en crises générales plus profondes au
moment où elles éclataient. Mais sectorielles ou générales, elles reviennent
immuablement avec une fréquence plus ou moins régulière.
En 1921, Trotsky constatait : "que pendant les périodes de développement rapide du
capitalisme, les crises sont courtes et ont un caractère superficiel (...) Pendant les
périodes de décadence, les crises durent longtemps et les relèvements sont momentanés,
superficiels et basés sur la spéculation."
Nous n'allons pas, je vous rassure, faire le tour de toutes les crises qui ont secoué
l'économie capitaliste depuis sa naissance. Nous n'en évoquerons que deux : la Grande
Dépression des années Trente provoquée par le krach boursier de New-York en octobre
1929 et la crise actuelle qui s'est brutalement aggravée le 15 septembre dernier.
Si la crise actuelle ne fait que démarrer, si nul ne peut en prévoir les développements,
tous les commentateurs la comparent à celle de 1929. Même si la situation internationale
n'est pas du tout la même et même si l'histoire ne se répète jamais de la même façon, il
est instructif d'étudier les enchaînements qui ont conduit à la crise actuelle, à la lumière
de celle de 1929.
La crise de 1929
S'il existait une échelle de Richter des crises économiques, comme pour les
tremblements de terre, celle de 1929 serait tout en haut. Elle a traumatisé la bourgeoisie
pour plusieurs générations. Le système financier de toute la planète a été ébranlé pour
des décennies. Si les banquiers n'ont pas autant sauté par les fenêtres qu'on le dit, des
centaines de banques firent faillite. La Bourse de Wall-Street n'a retrouvé son volume
d'affaires que dans les années 50. Le krach boursier d'octobre 1929 a ouvert la
dépression économique la plus profonde de l'histoire du capitalisme.
Alors qu'est-ce qui provoqua la crise de 1929 et qu'a-t-elle de commun avec la crise
actuelle ?
Ce fut, comme dans les années 2000, une époque d'intenses fusions-acquisitions. La
concentration était déjà réalisée dans l'industrie lourde, mais pas dans les nouveaux
secteurs comme l'automobile.
Henry Ford avait inventé le système des " Five Dollars Day ", 5 dollars par jour de
travail, et prétendait ainsi offrir à ses ouvriers un pouvoir d'achat suffisant pour qu'ils
achètent leur propre voiture, le fameux modèle T. En fait, il fallait une longue
ancienneté chez Ford pour toucher effectivement ce salaire. Pour les ouvriers, l'achat
d'une automobile neuve n'était possible qu'à crédit.
Le crédit fut précisément l'autre moteur de l'expansion économique des années Vingt.
Quand la crise a éclaté, il y avait plus de 1,4 milliards de dollars de créances sur des
automobiles aux États-Unis.
Les banques avaient inventé le crédit à la consommation, proposé à des fractions de
plus en plus pauvres de la population. C'était devenu un instrument magique pour élargir
artificiellement le marché solvable.
C'est le crédit encore qui favorisait la vente d'appareils ménagers. La radio était au
centre de cette " nouvelle économie ". Le principal fabriquant de postes récepteurs,
RCA, déchaînait un engouement boursier semblable à celui que connut " amazon.com "
ou " Yahoo " entre 1999 et 2001. Le cours de son action fut ainsi multiplié par sept
durant la seule année 1929.
En 1927, la Réserve Fédérale, la banque centrale américaine, qu'on appelle
couramment la FED, baissa ses taux d'intérêts. Les banques, qui pouvaient ainsi
emprunter à très bon marché auprès de la FED, accordèrent encore plus facilement des
prêts.
Ce fut le début d'une spéculation effrénée sur le cours des actions. Les acheteurs
n'attendaient plus simplement le dividende versé en fin d'année. Ils achetaient des
actions pour les revendre un peu plus cher. Le cours des actions boursières s'envola et
fut bientôt complètement déconnectées de la valeur réelle des sociétés. Après les
banquiers et les rentiers ce furent les entreprises industrielles qui spéculèrent avec toute
leur trésorerie, des salaires aux fonds de roulement. En septembre 1929, les capitaux
engagés dans la spéculation qui provenaient de l'industrie dépassaient ceux d'origine
bancaires. Des capitaux affluaient de toute l'Europe.
Ceux qui ne disposaient pas de capitaux empruntaient. Les courtiers de Wall-Street
proposaient des emprunts au jour le jour indexés sur la valeur des actions.
Les financiers créèrent des sociétés d'investissement par actions, puis des filiales de
ces sociétés qu'ils introduisaient à la Bourse. En 1929, il se créait une société par jour !
De grandes banques institutionnelles comme Morgan ou Goldman Sachs créèrent leurs
propres sociétés d'investissement. Le "génie financier" de l'époque avait inventé ses
"produits dérivés".
La bulle ne pouvait que crever. Tous les spéculateurs le savaient mais aucun ne
voulait être le premier à revendre, aucun ne voulait risquer de perdre le moindre dollar
tant que la hausse se poursuivait. Pour les rassurer sans doute, un économiste de
l'époque déclarait au printemps 1929 : "Le prix des actions a atteint ce qui paraît un
haut plateau permanent"...
Mais le plateau s'effondra. Le krach survint en octobre. Une mécanique fatale s'est
alors enclenchée : les sociétés d'investissements, profondément endettés auprès des
banques vendirent des actions en masse pour récupérer des liquidités. La plupart d'entre
elles firent faillites, fragilisant les banques qui s'écroulèrent à leur tour. Elles gelèrent le
crédit aux entreprises puis rapatrièrent le maximum de fonds depuis l'Europe et
spécialement depuis l'Allemagne. La crise d'abord boursière devint bancaire puis toucha
la production.
En réalité, le krach boursier n'avait été que le révélateur d'une crise bien plus
profonde. La récession économique était en fait déjà amorcée depuis le milieu de l'année
1929.
L'économie mondiale à la fin des années vingt était marquée par les conséquences de
la Première guerre mondiale. Malgré leur victoire sur l'Allemagne, la France et
l'Angleterre en étaient sorties considérablement affaiblies. Une grande partie de leur
appareil de production était détruit ou usé jusqu'à la corde faute d'avoir été renouvelé.
Le paysan ne trouvait plus d'engrais chimiques ou de machines agricoles, le propriétaire
de mines ne renouvelait plus son outillage.
Les monnaies européennes étaient dévaluées car les gouvernements avaient fait
marcher la planche à billet. Pour restaurer à marche forcée la convertibilité de leurs
monnaies avec l'or, les gouvernements britannique et français avaient réduit les
importations et cherchaient à exporter le plus possible en baissant tous les prix.
Bien avant la crise, cette politique poussa les puissances européennes à se replier sur
leur empire colonial dont elles intensifièrent l'exploitation.
L'appareil productif américain, alors en pleine expansion, ne pouvait pas compter sur
le marché européen pour écouler sa production. Même si son marché intérieur était
vaste, avec des régions entières encore à industrialiser, il n'était pas infini. Le recours
massif au crédit n'avait fait qu'en repousser artificiellement les limites. Les inventions
financières qui avaient conduit au krach étaient finalement une façon de placer des
capitaux qui ne trouvaient pas à s'investir dans la production.
C'est un point commun avec la période actuelle : le développement de la finance et
de la spéculation était une fois de plus provoqué par les limites du marché solvable.
La crise joua son rôle habituel en éliminant les entreprises les plus faibles et les
moins rentables. Les grands trusts de l'acier, du pétrole, de la chimie renforcèrent leur
hégémonie déjà très forte tout en voyant leurs affaires ralentir considérablement. Dans
l'automobile, la concentration augmenta. Les deux grands, GM et Ford, absorbèrent leur
ration de constructeurs indépendants.
Les banques furent les plus touchées. Près d'un millier firent faillites. Les directeurs
des plus grosses furent sermonnés et convoqués devant le Sénat. Ils furent parfois
renvoyés... mais avec des rémunérations à vie confortables même si elles ne s'appelaient
pas encore " parachutes dorés ".
Après les États-Unis, la crise s'est étendue à l'Allemagne dont l'économie fut anémiée
par le retrait brutal des capitaux américains rapatriés en urgence vers Wall-Street. Avec
deux ans de retard, le reste de l'Europe fut touchée. On vit apparaître en France, et plus
encore en Grande-Bretagne, des files de chômeurs sans ressources et des scènes de
misère populaire.
Tous les pays furent touchés. Au Brésil, on brûlait le café dans les locomotives en
espérant faire remonter les cours effondrés.
Le protectionnisme déjà très fort avant la crise fut considérablement renforcé de part
et d'autres de l'Atlantique. Le commerce mondial s'est littéralement effondré. Chaque
bourgeoisie s'est repliée sur son marché intérieur ou sur ses colonies. Aux États-Unis,
une loi instaura en 1930 des tarifs douaniers prohibitifs.
Il est à la mode, dans les milieux bourgeois mais aussi dans les milieux
altermondialistes, d'opposer la période d'après-guerre qui serait une époque
d'intervention systématique des États dans l'économie, à la période démarrée dans les
années 1970 où la règle aurait été le " laisser faire " .
La crise actuelle déclenche des débats sur les responsabilités de telles ou telles écoles
d'économistes. Il y aurait d'un côté les partisans de l'intervention des États avec le
britannique Keynes comme modèle. Il y aurait de l'autre côté les " intégristes du marché
", partisans de la dérégulation à tout prix, dont Milton Friedman était le pape. Ceux-là
auraient pris le pouvoir à l'époque de Reagan et Thatcher et seraient responsables de la
déconfiture actuelle.
Cette discussion est oiseuse. Les grands États impérialistes n'ont jamais cessé un seul
instant d'intervenir dans la marche de l'économie. La béquille de l'État devint une
caractéristique permanente de l'économie capitaliste après la grande dépression des
années trente. Ce qui changea, au tournant des années 1980, ce fut la forme de cette
intervention. Et si la forme changea, c'est qu'après une phase globale d'expansion
économique, éclata une nouvelle crise.
Même si les économistes appellent la période 1945-1970 les "trente glorieuses", elle
connut plusieurs crises "courtes et superficielles" dans une période d'expansion globale.
Ni la faim, ni la misère, ni les guerres dans le monde n'avaient disparu. Pas plus que les
inégalités sociales et l'exploitation dans les métropoles impérialistes. Le niveau de vie
des classes populaires des pays occidentaux avait un peu augmenté. C'était d'abord
l'effet du plein emploi qui permettait aux travailleurs d'obtenir des salaires un peu
meilleurs. C'était ensuite l'effet de la diminution massive du prix des équipements
électroménagers ou des automobiles, rendant ces marchandises accessibles aux milieux
ouvriers.
Cette expansion permettait une nouvelle fois aux économistes d'annoncer
triomphalement "la fin des crises du capitalisme".
Mais dès le début des années 70, inéluctablement pourrait-on dire, une nouvelle crise
de l'économie capitaliste était de retour.
Le premier symptôme de la crise fut monétaire. Tout un symbole pour la suite ! En
1971, le gouvernement Nixon dévalua le dollar et supprima définitivement sa
convertibilité avec l'or. Il y avait bien plus de dollars en circulation, partout dans le
monde, que d'or dans les réserves de la FED. Pour financer les dépenses d'armement, en
particulier celles de la guerre du Vietnam, la conquête spatiale, les nombreuses
commandes d'État à l'industrie, les gouvernements américains avaient émis des dollars
sans retenue provoquant l'inflation.
Le dollar étant la monnaie internationale, cette inflation s'était répandue sur toute la
planète. Des masses de dollars avaient été accumulées par les banques européennes, au
cours des diverses transactions internationales. Grâce à ces réserves, les banques
européennes émirent des crédits en dollars. Ce furent les eurodollars, émis sans contrôle
ni de la FED ni des banques centrales européennes. Cette création débridée de dollars
faisait baisser inexorablement sa valeur.
La dévaluation du dollar marquait la fin du système de Bretton-Woods. Cela allait
permettre, dans les années suivantes, la fluctuation de toutes les monnaies les unes par
rapport aux autres, au gré de l'offre et la demande de chacune d'entre elle.
En moins de cinq ans, le déplacement des capitaux sur les places financières de la
planète provoqua des crises, financières ou boursières, au Mexique en 1994, dans le
Sud-est asiatique en 1997, provoquant un effondrement complet des économies
thaïlandaise et indonésienne, en Russie en 1998, suivie de la faillite de l'Argentine la
même année.
Lors de cette crise, un gros fonds spéculatif américain, LTCM, se retrouva incapable
d'honorer ses engagements. La FED trouva en urgence des banques pour le sauver : sa
faillite aurait entraîné la panique dans tout le système financier et peut-être son
effondrement. Le refrain allait resservir.
La crainte des " marchés ", c'est-à-dire celle des financiers, n'empêcha pas les affaires
de repartir. La bulle gonfla alors dans le secteur de l'industrie informatique, la " nouvelle
économie " des années 1990.
Ce secteur connaissait une véritable croissance économique, basée sur la production,
bien réelle, de téléphones portables, d'ordinateurs ou d'écrans plats. Cette production
entraînait à son tour des investissements chez les fabricants de composants, en
particulier leurs sous-traitants en Chine.
Mais ce boom fut amplifié par la spéculation. Les actions d'une société comme "
amazon.com ", ne possédant que quelques gros ordinateurs et ne faisant pas encore de
profits, valaient en bourse bien plus que celles d'un géant de l'automobile comme
Général Motors ! Cela ne pouvait pas durer et finit par s'effondrer à la fin 2000
provoquant une nouvelle crise.
Cette crise, comme les précédentes, n'eut pas que des conséquences boursières. Des
sociétés de l'industrie des télécommunications firent faillite, en particulier les fameuses
start-up qui avaient fleuri dans les années précédentes. D'autres, bien plus grosses,
Alcatel, Vodaphone ou France Telecom licencièrent.
L'aggravation de la crise
Cela n'enraya pas la crise pour autant. Au fur et à mesure que les banques
annonçaient leurs bilans annuels, elles révélaient l'ampleur de leurs pertes, aggravant
encore la défiance dans le système.
A la mi-janvier 2008, les actions de plusieurs entreprises se sont effondrées à la
Bourse. La crise ne concernait plus seulement les banques.
Malgré une nouvelle baisse des taux d'intérêt par les banques centrales, la crise
s'amplifiait. En mars, l'annonce de la quasi-faillite de la banque d'affaire Bear Stearns
puis son rachat en catastrophe avec l'aide du gouvernement américain, a provoqué une
nouvelle panique...
Le cours des actions s'est ensuite un peu stabilisé, ce qui permit à certains ministres
de s'écrier : "on commence à penser à un scénario de sortie de crise".
Mais en septembre, une nouvelle vague de faillite survenait aux États-Unis. Cela
concernait une grande banque d'affaires, Lehman Brothers ; des organismes spécialisés
dans le rachat de crédits, Fannie Mae et Freddy Mac, qui possèdent à eux seuls 42% de
tous les crédits immobiliers américains ; des sociétés d'assurance comme AIG.
Le secrétaire au Trésor américain, Henry Paulson, sous l'égide des banquiers de
Wall-Street, laissa couler Lehman Brothers puis déboursa des centaines de milliards de
dollars pour sauver les autres. Il annonça alors un vaste plan de sauvetage des banques
laborieusement validé par le Congrès américain. Les députés avaient en effet du mal à
expliquer à leurs électeurs pourquoi le gouvernement offrait 700 milliards aux banquiers
alors qu'il n'avait pas fait un geste pour empêcher des millions de ménages d'être
expulsés de leur logement.
En France, les ministres assuraient encore que la crise étant purement américaine
quand, fin septembre, plusieurs grandes banques européennes étaient touchées. Fortis,
Dexia et d'autres ne durent leur salut qu'aux dizaines de milliards d'euros versés en
urgence par les gouvernements européens concernés.
Cette fois la faillite du système financier mondial n'était plus un spectre lointain. Elle
frappait à la porte. Plus aucun banquier ne faisait confiance à son voisin. Dans un
monde où des millions de transactions bancaires ont lieu en permanence, où les
financiers passent leur temps à emprunter, où toutes les banques sont interconnectées, le
refus d'alimenter les échanges interbancaires équivaut à la paralysie de l'économie.
Les banques centrales ont ouvert les vannes du crédit à grands flots. Alors qu'on
rabâche depuis des années aux travailleurs que toutes les caisses sont vides, chaque
gouvernement a sorti de son chapeau des dizaines de milliards d'euros pour nationaliser
ses banques ou les recapitaliser en urgence.
Mais en plein milieu de la tourmente, les affaires continuaient. Alors que Sarkozy
fustigeait les spéculateurs immoraux, on apprenait que la Caisse d'Epargne, une banque
publique supposée prudente, jouait et perdait 700 millions d'euros dans la spéculation.
Quant à la banque Fortis que les gouvernements belge et néerlandais venaient tout juste
de sauver de la faillite avec l'argent des contribuables, elle était rachetée par la BNP
Paribas avec la bénédiction des autorités.
Alors que la faillite générale des banques menaçait, la crise s'est étendue à la Bourse
des valeurs. La marche des entreprises étant intimement mêlée à celle de la finance,
certains fonds spéculatifs retiraient en urgence leurs capitaux de la bourse parce qu'ils
avaient besoin de liquidités. Cela accéléra la chute.
D'autres "investisseurs" anticipaient la récession et la baisse à venir des profits des
entreprises. Ils vendaient des actions dont ils estimaient le cours surévalué après des
années de hausses boursières. Après 10 jours d'effondrement le journal "Le Monde"
pouvait titré spectaculairement "25 000 milliards de dollars évanouis".
Ces 25 000 milliards de capitalisation boursière "évanouis" peuvent apparaître
comme une abstraction, un capital virtuel. Mais pour les accumuler, combien de milliers
de travailleurs ont été mis à la porte ? Combien d'accidents, de stress, de maladies
professionnelles bien réels, les ouvriers ont-il subis ?
Et puis ces capitaux reflétaient, même de façon déformée, la valeur des entreprises.
Cet effondrement rendra plus difficile l'obtention d'emprunts, la réalisation
d'investissements et pourra faire fuir des actionnaires potentiels.
Dernière étape dans l'extension de la crise, la Chine, l'Inde et d'autres pays sous-
développés sont touchés les uns après les autres. Des commentateurs, menteurs ou
stupides, nous répétaient pourtant que ces pays seraient protégés et qu'ils allaient même
tirer la croissance économique mondiale.
Mais ces pays qui servent d'ateliers de sous-traitance pour les grands groupes
industriels de la planète dépendent bien sûr tant des capitaux occidentaux que des
exportations vers les pays développés. Les capitaux sont rapatriés en urgence par les
financiers qui ont besoin de liquidités et la récession réduit massivement les
importations des pays riches. Des milliers d'entreprises chinoises ont déjà mis la clé
sous la porte dans la région de Canton, parfois des grosses, comme cette usine de jouets
de 6500 ouvriers. Des milliers de travailleurs ont manifesté dans plusieurs villes pour
réclamer leurs salaires non versés par des patrons qui se sont volatilisés, provoquant
d'ailleurs chez les autorités la crainte d'une révolte générale.
La liste des pays qui font appel au FMI pour éviter la faillite s'allonge tous les jours.
Après l'Islande, la Hongrie, l'Ukraine, il y a eu le Pakistan, la Serbie, le Liban et la
Biélorussie. L'économie de ces pays étant dépendante des capitaux occidentaux investis,
leur retrait brutal provoque une catastrophe. Cela montre au passage la valeur et la
solidité des investissements occidentaux réalisés dans ces pays.
Quant aux pays sous-développés dont l'économie repose sur l'exportation des
matières premières, la chute brutale du cours de celles-ci provoque un effondrement de
leurs rentrées financières et la ruine des petits producteurs.
La crise n'est plus seulement financière ou boursière. C'est désormais une crise
économique générale et profonde. Elle n'est plus américaine, ni européenne, elle est
mondiale.
L'intervention des États est passée à une nouvelle phase avec les plans de relance
directe de l'économie. En Europe, derrière la façade fictive d'un plan européen, chaque
gouvernement fait le compte des milliards qu'il va offrir à sa propre bourgeoisie tout en
refusant de subventionner celle d'à côté. En France, Sarkozy vient d'offrir 26 milliards
d'euros au patronat, un acompte sans aucun doute. Aux États-Unis, après les 15
milliards d'aide au secteur automobile, Obama prépare, je le cite : "le plus grand plan
d'investissement dans notre infrastructure nationale depuis la création du système
autoroutier fédéral des années 1950".
Tout indique que les commandes directes d'État vont se multiplier dans tous les pays.
La bourgeoisie les attend et les gouvernements les préparent.
Il est significatif que ce soit les dirigeants qui affichaient le libéralisme le plus
intransigeant, de Bush à Sarkozy, qui ont adopté depuis le début de la crise, la politique
la plus étatiste et la plus interventionniste. Ils n'ont pas viré leur cuti, ils n'ont fait que
répondre aux nécessités urgentes d'une économie capitaliste paralysée par la crise.
En intervenant massivement dans l'économie, ils reconnaissent à leur façon que le
capitalisme ne peut pas se passer de l'État.
C'était déjà le rôle planificateur de l'État, la nationalisation des secteurs clés de
l'économie et des principales banques qui avait permis le redémarrage de l'économie
après la deuxième guerre mondiale. Ce sont les interventions répétées des États et de
leurs banques centrales qui ont empêché l'effondrement du système bancaire ou boursier
à chaque fois qu'une bulle spéculative a éclaté depuis 30 ans.
Mais la nécessité d'une régulation et d'une intervention planificatrice est bien plus
profonde. Malgré une concentration accrue du capital, malgré des réseaux financiers de
plus en plus interconnectés, l'anarchie de la production et tous les déséquilibres
provoqués par la concurrence acharnée entre les capitalistes demeurent. Ce sont des
freins de plus en plus puissants au fonctionnement de l'économie.
Chaque capitaliste, chaque banquier agit plus que jamais en fonction de ses intérêts
égoïstes, même si cela rapproche tout le système du précipice. Avec la crise, le caractère
parasitaire et nuisible de la bourgeoisie, son incapacité à agir dans le sens des intérêts
collectifs y compris ceux de son propre système, est encore plus flagrant. Du coup, le
rôle régulateur de l'État est encore plus indispensable.
Nous ne savons pas combien de temps durera cette crise, ni dans quel état la société
en sortira.
Comme lors de chaque crise, la lutte entre les capitalistes eux-mêmes est exacerbée.
On assiste à une phase accélérée de concentration. On assiste à une guerre acharnée
entre les différents secteurs de la production. Les sidérurgistes se positionnent face aux
constructeurs automobiles. Les producteurs de minerais face aux sidérurgistes. Les
grands groupes répercutent le coût de la crise sur leurs sous-traitants. Les banquiers
imposent des taux de crédit exorbitants aux patrons les moins puissants.
Mais l'ensemble de la classe capitaliste mène une guerre encore plus violente contre
la classe ouvrière. S'ils se laissent faire, les travailleurs paieront la crise, par la perte de
leur emploi, par la baisse de leur salaire, par l'appauvrissement de toute leur classe. C'est
eux qui paieront tous les plans de sauvetage des gouvernements.
C'est parce que la bourgeoisie ne s'est jamais vraiment heurter à la force collective
des travailleurs depuis la fin des années 70, qu'elle pu rétablir ses taux de profits,
procéder à des dizaines de plans sociaux successifs et appauvrir toutes les classes
populaires.
Depuis 30 ans et le début de la crise, il y a eu de multiples réactions de défense. Elles
furent presque toujours le dos au mur, entreprise par entreprise. La bourgeoisie a
pleinement profité de la complicité des partis de gauche qui ont gouverné en faisant
accepter les sacrifices. Elle a profité aussi de celle des directions syndicales qui ont
émietté soigneusement toutes les réactions.
Aujourd'hui, rien ne nous garantit que l'aggravation de la crise provoquera des luttes
de la même ampleur. Rien, sauf l'expérience du passé justement et sauf la confiance que
nous avons, en tant que marxistes, dans la capacité du prolétariat à contester son
exploitation.
Si les travailleurs ne veulent pas "subir une période de misère biologique
épouvantable", pour reprendre l'expression de Trotsky, il faut qu'ils se défendent. Il faut
que la classe ouvrière lance une offensive générale collective.
Bien sûr le réveil de la combativité ouvrière ne dépend pas des révolutionnaires.
Mais il est par contre de leur responsabilité de tenter de diffuser et de rendre concrets les
objectifs vitaux que les travailleurs devront mettre à l'ordre du jour quand ils se
radicaliseront.
Il faut que les travailleurs sortent avec le moins de dégâts possibles de cette crise
dont ils ne sont en rien responsables. Ils ne doivent pas accepter le chômage. Cela
implique l'interdiction des licenciements des travailleurs en activité et le retour à
l'emploi de ceux qui ont déjà été jetés hors des entreprises. Cela exige la répartition du
travail entre tous mais, évidemment, sans diminution des salaires. C'est ce qu'on appelle
"l'échelle mobile du temps de travail".
Cela coûtera de l'argent ? Oui, évidemment ! Mais pas plus que les milliards
distribués sans limite aux banquiers. Et il serait infiniment plus juste humainement, plus
utile socialement, de sauver les salaires des travailleurs plutôt que les profits des
banquiers !
Les travailleurs ne doivent pas accepter non plus la chute brutale de leur niveau de
vie, en particulier du fait de l'inflation. Ils devront imposer l'alignement immédiat de
leurs salaires sur le coût réel de la vie, ce qu'on appelle "l'échelle mobile des salaires".
Mais par dessus-tout, au-delà de ces revendications de défense immédiate, ce que les
travailleurs en lutte devront imposer, c'est de mettre le nez dans les affaires de la
bourgeoisie. Ils devront imposer un contrôle sur leurs comptes, leurs profits, leurs
projets. Ils devront finalement contester aux capitalistes leur propriété sur les moyens de
productions pour prendre eux-mêmes le contrôle de l'économie.
L'une des étapes dans cette prise de contrôle, que la crise actuelle rend d'ailleurs très
concrète, est l'expropriation de toutes les banques privées et leur centralisation en une
banque unique, sous le contrôle direct des travailleurs et de la population. Il s'agit de
mettre un terme à la rivalité et à la concurrence destructrice entre les banques.
Quant à ceux des industriels qui demandent de l'aide à l'État pour éviter la faillite,
alors qu'ils ont démontré leur incapacité à assurer normalement la production, il serait
absolument légitime de les exproprier, sans indemnités ni rachat !
C'est en s'emparant, l'une après l'autre, de ces revendications, que les travailleurs se
rendront compte que l'on peut parfaitement se passer des capitalistes, que l'on peut
mettre un terme à la dictature que les banquiers ou les actionnaires des grands groupes
exercent sur toute l'économie.
Mettre ainsi un terme au capitalisme, c'est la seule et unique façon de mettre un
terme définitif aux crises économiques destructrices et d'éviter la barbarie à l'humanité.