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ISET TATAOUINE Droit commercial Prof : Mlle OUNI Aycha

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Chapitre IV : Le droit de la concurrence

La science économique internationale est caractérisée par une forte croissance et par une
accélération des échanges dans les divers secteurs. Cette évolution conduit à la constitution
des sujets de plus en plus puissants (les opérateurs économiques) qui présentent une menace
pour les marchés. Cela nécessite des mesures protectionnistes de nature à protéger la liberté
des échanges.

L’économie nationale était conditionnée par les autorisations permettant à l’administration de


contrôler les investissements de réglementer les activités de commerce et de limiter les
importations. C’est dans ce contexte que la plupart des Etats, pour surveiller, réglementer et
établir le fonctionnement concurrentiel du marché se sont dotés d’un instrument juridique
spécifique qui constitue ce qu’on appelle aujourd’hui le droit de la concurrence.

Comment peut-on définir la concurrence ?

Le concept de concurrence est un concept difficile à définir. Cette difficulté découle du fait
que ce terme est économique plutôt que juridique, la concurrence veut dire « courir avec » ou
« courir ensemble ».

La concurrence vient du mot grec qui veut dire pour un groupe d’individu entrer dans le
même but pour réaliser un objectif commun et partager les mêmes bénéfices.

La doctrine soutient que « la concurrence est une situation de relativité, de compétition, de


ruse, de conflit et toujours d’antagonisme ».

On ne peut parler de concurrence sans faire référence à trois notions importantes :

 La notion d’entreprise
 La notion du marché
 La notion de la liberté des prix

1°- La notion d’entreprise :

C’est l’une de base économique, a des fonctions essentielles dans le système d’échange
dominé par la loi du marché. Elle est le principal agent de l’expansion économique et la
source principale de l’emploi.

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2°- La notion du marché :

C’est une notion indissociable à celle de la concurrence que peut être défini par le lieu où
s’échange des produits et des services ou comme le définit le conseil de la concurrence
français « le lieu où se rencontre l’offre et la demande, le produit ou le service qui seront
considérés comme substituable avec les autres produits »

3°- La notion de la liberté de prix :

La Tunisie comme tous les autres Etats qui subissent la mondialisation figure au membre de
ces pays en adoptant un ensemble des dispositions législatives qui dans leur fondement
procède la même inspiration reposée sur le même principe de la liberté des prix, qui est
comparable à celle en vigueur dans la plupart des pays européens. La Tunisie a rompu
définitivement avec le régime de fonction des prix par la voie de la loi du 29 juillet 1991
relative à la concurrence et prix.

Cette loi comporte 62 articles qui sont classés et ordonnés dans 5 titres correspondants à 5
rubriques consacrés au :

1°- Principe de la liberté des prix

2°- Les pratiques anticoncurrentielles

3°- Le conseil de la concurrence

4°- La transparence des prix et pratiques restrictives

5°- Les infractions et sanctions

Section I : La concurrence déloyale

La concurrence déloyale est un comportement concurrent qui vise à exercer un agissement


préjudiciable soit vis-à-vis de fond de commerce soit sur son achalandage soit vis-à-vis ce qui
entoure le fond de commerce, sa clientèle.

Il sera question dans cette section de s’intéresser à la notion de concurrence déloyale en la


distinguant des notions voisines (§1) pour mettre l’accent sur les faits constitutifs de la
concurrence déloyale (§ 2).

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Paragraphe I : La notion de la concurrence déloyale

Le droit de la concurrence vise à combattre une pratique assez ancienne dans le commerce et
l’industrie : la concurrence déloyale. Le législateur tunisien n’a pas défini cette notion, il se
limite dans l’article 92 du C.O.C d’énumérer les agissements constitutifs du concurrence
déloyale. Cet article précise que « peuvent donner lieu à des dommages-intérêts, sans
préjudice à l’action pénale, les faits constituant une concurrence déloyale et par exemple :

 Le fait d’user d’un nom ou d’une marque à peu près similaire à ceux appartenant
légalement à une maison ou fabrique déjà connue, ou à une localité ayant une
réputation collective, de manière à induire le public en erreur sur l’individualité du
fabricant et la provenance du produit.
 Le fait d’user d’une enseigne, tableau, inscription, écriteau ou autre emblème
quelconque, identique ou semblable à celui déjà adopté légalement par un
négociant, ou fabricant, ou établissement du même lieu, faisant le commerce de
produits semblables, de manière à détourner la clientèle de l’un au profit de l’autre.
 Le fait d’ajouter au nom d’un produit les mots : façon de…, d’après la recette de …
ou autres expressions analogues, tendant à induire le public en erreur sur la nature
ou l’origine du produit.
 Le fait de faire croire par des publications ou autres moyens, que l’on est le
cessionnaire ou le représentant d’une autre maison ou établissement déjà connu »

Sous Paragraphe I : Concurrence déloyale et notions voisines

A°- Concurrence déloyale et concurrence parasitaire

Il est assez difficile de distinguer entre la concurrence déloyale et la concurrence


parasitaire, car les agissements tendent parfois à se confondre. La qualification par le juge
devient délicate à faire. La jurisprudence montre que la concurrence parasitaire consiste
pour une entreprise d’entrer dans le siège d’une autre pour tirer profit d’une de ses actions
sans rien dépenser.

B°- Concurrence déloyale et concurrence interdite

La concurrence interdite est définie comme étant celle qui fait l’objet de restriction
formelle résultant de la loi ou d’un contrat. La concurrence interdite est la concurrence qui
est illégale dans la mesure où son exercice consiste à violer une règle juridique

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préalablement établie par la loi, soit par les engagements pris dans une relation
contractuelle.

Sous Paragraphe II : Définition de la concurrence déloyale

La concurrence déloyale peut être définie comme l’ensemble des procédés contractuels
contraire à la loi ou à l’usage, constitutif d’une faute intentionnelle ou non et de nature à
causer un préjudice au concurrent.

Paragraphe II : Les agissements constitutifs d’une concurrence déloyale

La jurisprudence retient quatre (4) faits au titre de la concurrence déloyale :

1°- Le dénigrement

2°- Les moyens de désorganisation des entreprises rivales

3°- L’utilisation des procédés commerciaux illégitimes

4°- L’utilisation illégitime de la réputation d’autrui

1°- Le dénigrement

Le dénigrement consiste à jeter le discrédit sur la personne ou sur le produit concurrent. Il


a pour objet de rendre le client hostile soit à l’achat de produit, soit à la fréquence de
commerce.

Le dénigrement peut être soit direct ou indirect, celui direct a pour objet de dénigrer
expressément un produit ou même oralement lorsqu’on arrive à prouver les propos. Le
dénigrement indirect est encore difficile à prouver dans la mesure où il résulte
implicitement de l’agissement d’un autre commerçant.

2°- Les moyens de désorganisation des entreprises rivales

Il est impossible de dresser une liste exclusive des pratiques qui peuvent être considérées
comme des moyens de désorganisation des entreprises rivales, mais ils peuvent se résumer
en trois pratiques :

1°- La suppression de publicité de concurrent qui consiste à arracher les affiches


publicitaires.

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2°- La clause d’exclusivité qui est une clause insérée dans un contrat de vente ou de
distribution et en fonction de laquelle le fournisseur donne un monopole au
concessionnaire (revendeur) afin que ce dernier soit le seul habilité à distribuer
le produit.

3°- Le débauchage des personnels du concurrent qui signifie le passage de


personnels de l’entreprise vers un concurrent direct.

3°- L’utilisation des procédés commerciaux illégitimes

Dans une économie de marché, l’imagination du commerçant industriel et autre prestataire


de service est souvent étroite pour trouver toujours des moyens et des procédés commerciaux
de nature à attirer la clientèle. Mais le commerçant n’est pas libre de choisir les procédés qui
les trouve intéressent pour écouler le produit dans le marché.

En effet, la vente est soumise à une réglementation bien particulière qui interdit toutes
pratiques visant à fausser le jeu de la concurrence. Tel est le cas par exemple de la
réglementation à prime ou à cadeau.

4°- L’utilisation illégitime de la réputation d’autrui

L’une des pratiques les plus utilisées par le commerçant malhonnête est la confusion qu’il
espère créer dans l’esprit de consommateur en se basant sur l’imitation ou la contrefaçon.

Ces pratiquent privent le commerçant victime de sa clientèle. Elles causent le doute dans
l’esprit de consommateur en se rendant compte que le produit acheté ne répond plus aux
mêmes degrés de satisfaction d’où une certaine déception. Le législateur a prévu deux
mécanismes qui peuvent trouver le titulaire des signes distinctifs et des inventions
technologiques contre les risques d’imitation et de contrefaçon.

L’utilisation illégitime de la réputation d’autrui peut être faite soit par l’imitation soit par
l’identification à une entreprise déjà connue. L’imitation consiste à reproduire un produit déjà
existant sur le marché de façon identique ou quasi-identique.

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Paragraphe 3 : Les pratiques anticoncurrentielles

Les pratiques anticoncurrentielles se résument en quatre pratiques qui peuvent fausser le


jeu de la concurrence et que le législateur combattre pour préserver les intérêts de marché
et d’intervenir sur le marché.

Sous paragraphe 1: Les comportements sanctionnés au titre des pratiques


anticoncurrentielles

(1) : Les concentrations économiques

Avant de s’intéresser aux procédés économiques, il convient de définir les concentrations.

Paragraphe (1) : Définition de la concentration économique

Le législateur tunisien à l’instar des autres législateurs n’a pas donné une définition des
concentrations économiques dans le souci de ne pas se limiter à une définition qui pourrait
être dépassée surtout par des formes de plus complexes qui échapperaient à son contrôle.

En revanche, la doctrine estime qu’il existe trois types de concentrations :

1°- La concentration ponctuelle : qui consiste à un rassemblement d’entreprise ayant des


activités identiques.

2°- La concentration horizontale : qui consiste à rapprocher des affaires dont les
vocations sont complémentaires.

3°- La concentration verticale : qui consiste à rassembler à l’intérieur d’une même


entreprise allant de l’extraction de matière première à la livraison au consommateur
des produits finis.

Paragraphe (2) : le champ d’application de contrôle exercé sur les opérations de


concentrations économiques

L’article 7 nouveau de la loi du 24 avril 1995 dispose que : « au sens de la présente loi, la
concentration économique résulte de tout acte, quelle qu’en soit la forme, qui emporte
transfert de propriété ou de jouissance de tout ou partie de biens, droits ou obligations d’une
entreprise ayant pour effet, de permettre à une entreprise ou à un groupe d’entreprises
d’exercer directement ou indirectement, sur une ou plusieurs autres entreprises une influence
déterminante »

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A la lecture de cet article on pourrait déduire que le législateur retient comme opération de
concentrations certaines formes d’actes qui permettent l’acquisition d’un pouvoir de contrôle.

L’article 7 nouveau définit donc de façon extrêmement large la notion de concentration. En


premier lieu, la concentration résulte de tout acte quelque soit la forme et en faisant référence
à la notion d’acte. Le législateur a voulu exclure de contrôle de la concentration économique
tout acte résultant de la croissance interne de l’entreprise ou l’accroissement d’une même
entreprise dû aux circonstances économiques ou aux progrès techniques.

Paragraphe (3) : Les procédures de contrôle

La procédure de contrôle des concentrations économiques se caractérise par le pouvoir de


décision attribué par le ministre de commerce et par le rôle accessoire et cumulatif joué par le
conseil de concurrence.

1°- La compétence de ministre de commerce de statuer sur les applications de


concentration

En fonction de l’article 9 nouveau de la loi de 1995 , le contrôle de concentration relève de la


compétence du ministre de commerce investi de pouvoir exécutif de décision, le conseil de la
concurrence n’a qu’un rôle consultatif à l’initiative de ministre.

Le texte ajoute que : « tout projet de concentration ou toute concentration doit être soumis au
ministre chargé du commerce par les parties concernées par l’acte de concentration dans un
délai de 15 jours à compter de la date de la conclusion de l’accord , de la fusion, de la
publication de l’offre d’achat ou d’échange des droits ou obligations ou de l’acquisition
d’une participation de contrôle »

Après la notification du projet de la concentration, les opérations concernées doivent attendre


que le ministre vérifie si le projet n’est pas de nature à créer une atteinte à la concurrence,
ainsi le ministre peut se comporter de l’une des façons suivantes :

 Autoriser l’opération, si celle-ci n’est pas susceptible de porter atteinte à la


concurrence. Le silence de ministre après un délai de 6 mois vaut un consentement
tacite.
 La deuxième façon est d’autoriser l’opération mais avec des conditions
 La troisième façon : la saisie du conseil pour demander son avis.

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2°- Le rôle consultatif du conseil de concurrence en matière de concentration économique

Dans cette hypothèse s’ouvre une seconde phase d’examen approfondi de trois mois
supplémentaires à compter à la saisie. Le conseil rend un avis consultatif au ministre ce qui lui
permet d’établir un bilan concurrentiel de l’opération et il lui revient d’autoriser l’opération
avec ou sans engagement de la part de l’entreprise comme en première phase ou de ne pas
autoriser cette opération.

2 : Les ententes anticoncurrentielles

L’entente est une pratique prohibée par le droit de la concurrence lorsqu’elle a pour objet de
fausser le jeu de la concurrence. Il convient d’abord de définir la notion (§1) avant de
s’intéresser aux différentes conditions de cette entente (‘§2). Enfin on va passer à étudier les
types d’ententes sur le marché (§3).

Paragraphe 1 : Définition de l’entente

A partir de l’article 5 de la loi de 29 juillet 1991, on peut définir les ententes comme étant un
accord de volonté explicite ou tacite, toute pratique entre les entreprises en vu d’exercer une
action commune sur le marché comme par exemple fixer les prix, répartir les marchés,
contrôler la production ou le progrès technique.

Paragraphe 2 : Les conditions de l’entente anticoncurrentielle

Pour qu’une entente soit qualifiée comme telle, il faut qu’elle comporte deux conditions :

 A°- L’existence d’un accord : c’est tout accord passé entre concurrents et non
concurrents. Il n’est pas nécessaire que les opérateurs s’engagent par écrit. L’essentiel
c’est qu’elle produit des effets.
 B°- L’action concertée : en matière d’entente, il est très difficile de prouver ce type
d’action et c’est pour cette raison que la jurisprudence cherche à prouver les actions
concertées à partir d’une coordination qui se manifeste par le comportement des
participants.

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Paragraphe 3 : Les types d’ententes sur le marché

L’article 5 énumère quatre pratiques d’entente anticoncurrentielles :

1°- Faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu de l’offre et de la demande.

2°- Limiter l’accès au marché à d’autres entreprises ou le libre exercice de la


concurrence

3°- Limiter ou contrôler la production, les investissements ou le progrès technique

4°- Répartir les marchés ou les sources d’approvisionnement

3 : L’abus de position dominante

La position dominante sur un marché est une situation vers laquelle tend chaque opérateur
économique afin de consolider sa place et obtenir encore plus des parts sur les marchés.

L’abus de position dominante constitue une pratique anticoncurrentielle dans la mesure où


l’entreprise dominante dicte sa loi sur le marché en utilisant le pouvoir dont elle dispose
pour contrôler mieux un marché et imposer sa politique de nature à fausser le jeu de la
concurrence.

Paragraphe 1 : La notion de position dominante

A°- Définition de la position dominante

L’article 5 de la loi de 1991 n’a pas défini la position dominante, mais on peut dire que la
position dominante est le pouvoir d’une entreprise de faire obstacle au maintien de
concurrence effective sur le marché vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et des
consommateurs.

B°- Les formes de la position dominante sur le marché

La position dominante est soit exclusive lorsqu’elle émane d’une seule entreprise soit
collective lorsqu’elle l’œuvre de plusieurs entreprises.

1° - La domination exclusive : est une situation où une entreprise bénéficie d’un droit
de propriété industrielle tel qu’un titre de brevet d’invention ou d’un marque.

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2°- La domination collective : elle peut être constituée par plusieurs entreprises agissent
ensemble sur un marché spécifique comme une entité collective.

En France par exemple, le conseil de la concurrence a considéré que la fédération


internationale de football association ‘(FIFA), le comité français de la coupe du monde
détenaient ensemble lors de la coupe du monde de 1998 une position dominante collective
du marché des billets destinés à la confection des forfaits artistiques à l’occasion de cette
épreuve.

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Paragraphe 2 : L’abus des positions dominantes

Il existe deux types d’abus, les abus illicites par eux-mêmes (a) et les comportements qui
ne sont abusifs que parce que l’entreprise occupe une position dominante (b)

A°- les abus illicites par eux-mêmes

Relève notamment de cette catégorie les pratiques énumérées dans l’article 5 alinéa4 et les
articles 26-27 de la loi 91-64 sur la concurrence. Il s’agit de la revente à perte, de
l’imposition d’un prix minimum de la vente, la pratique des conditions de vente
discriminatoire ainsi que tout autre comportement visé plus généralement par le régime
jurisprudentiel.

L’article 39 de la même loi prévoit des sanctions pécuniaires pour les contrevenants
adoptant ces pratiques en vue d’exercer une position dominante sur le marché. La sanction
est une amende qui varie entre 200à 20.000 dinars.

B°- Les comportements qui ne sont abusifs que parce que l’entreprise occupe une
position dominante

Certaines pratiques considérées admissibles au point de vue de la concurrence lorsqu’elles


émanent d’une entreprise qui ne détient que d’une faible position sur le marché et étant de
ce fait soumise à une concurrence effective devient anticoncurrentielle lorsqu’elle émane
d’une entreprise en position dominante.

D’une manière générale, sont considérés comme abusifs tous les comportements excédant
les limites d’une concurrence normale de la part d’une entreprise en position dominante
et qui ne trouve d’autre justification que l’élimination des concurrents effectifs ou
concurrentiels ou l’obtention d’avantage injustifié.

Le développement de la grande distribution et la création de quelques hyper marchés en


Tunisie ont été accompagné par certaines pratiques critiquables. Certains abusent de leur
position dominante pour imposer aux fournisseurs des prix minimums, d’autres exigent
des offres de produits à l’occasion de leur concurrence.

Le conseil de la concurrence a donné à plusieurs reprises des exemples de telles pratiques


comme l’affaire « Afrimar » des services maritimes contre la société tunisienne des

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activités maritimes (STAM). Cette société abuse illicitement de sa situation de


domination dans le marché lorsqu’elle impose ses tarifs sur le marché aux clients

(décision n°797 du 25 décembre 1997 contre STAM).

En dehors de ces pratiques abusives, d’autres pratiques qui sont condamnables du fait de
l’occupation de l’entreprise initiatrice d’une position dominante sur le marché et
l’exemple type de cette situation c’est l’affaire qui unie deux entreprises de Lotfi
Abdennadher franchisée Mamie-Nova et la société STIAL de Mohamed Eddeb qui
commercialise la marque française « Danone ».

L’effet de cette affaire remonte au mois de ramadan de l’année 2002, selon la plainte
déposée en janvier 2003 a procédé au changement du diamètre de ces pots de yaourts.
Cela a entrainé une diminution de 12% du poids de ces pots qui passe ainsi de 125g à
110g. Cette diminution du poids s’est accompagnée d’une compagne publicitaire
annonçant une diminution des prix de 40 millimes pour ce même pot. La diminution était
faite sans que l’annonce ne précise d’une manière explicite que cette diminution du prix
correspond en fait à une diminution du poids pour le même pot.

Il faut ajouter à tout cela que le groupe Danone-Tunisie STIAL est l’incontestable leadeur
des produits des produits laitiers où ils détiennent 60% de la part du marché et que la
société Abedennadher ne s’est jamais bien portée depuis sa naissance.

Il est ainsi démontré que le groupe « Danone » a une position dominante dans le marché
tunisien et il a essayé de profiter de cette traditionnelle période de pic de consommation

( le mois de ramadan) et de sa position dominante pour fausser le libre jeu de la


concurrence.

4 : l’état de dépendance économique

Le même article qui traite l’abus de la position dominante à savoir l’article 5 traite
également l’abus de dépendance économique en stipulant que : « Est également
prohibée, l’exploitation abusive d’une position dominante sur le marché intérieur ou sur
une partie substantielle de celui-ci, ou d’un état de dépendance économique dans lequel
se trouve une entreprise cliente ou fournisseur qui ne dispose pas de solutions
alternatives, pour la commercialisation, l’approvisionnement ou la prestation de
service ».

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Comme la position dominante, la dépendance économique n’est pas prohibée en tant que
telle, mais pour que l’infraction soit caractérisée, trois conditions doivent être réunies :

1°- l’existence de situation de dépendance économique

2°- une exploitation abusive de cette situation par le cocontractant, clients ou fournisseurs.

3°- une affectation réelle ou potentielle du fonctionnement ou de la structure de la


concurrence.

a°- l’existence d’une situation de dépendance économique :

L’existence de l’état de dépendance économique peut s’apprécier aussi bien du côté de


fournisseur que du distributeur. Le travail de la jurisprudence notamment française a
montré que : pour l’état de dépendance économique d’un fournisseur vis-a-vis du
distributeur, il faut retenir :

1°- l’importance du chiffre d’affaires réalisé par le fournisseur avec le distributeur.

2°- l’importance du distributeur dans la commercialisation du produit concerné.

3°- l’existence de solutions alternatives pour le fournisseur.

Pour l’état de dépendance économique d’un distributeur vis-à-vis d’un fournisseur :

 1er critère : la notoriété de la marque du fournisseur apprécié par rapport au


produit en cause.
 2ème critère : l’importance de la part du fournisseur dans le marché considéré.
 3ème critère : l’impossibilité pour le distributeur d’obtenir auprès d’autres
fournisseurs des produits équivalents.

Dans une décision rendu le 18 août 2003, le conseil de la concurrence a définit l’état de
dépendance économique pour un distributeur comme la situation d’une entreprise qui ne
dispose pas de la possibilité de substituer à son fournisseur ou à ses fournisseurs dépendants à
sa demande d’approvisionnement dans des conditions techniques et économiques
comparables. Ainsi, dans cette décision le conseil a indiqué un véritable critère décisif de la
solution équivalente.

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b°- L’exploitation abusive de la situation de dépendance économique :

L’article 5 de la loi de 1991, tel qu’il a été modifié en 2015 a énuméré les pratiques
anticoncurrentielles susceptibles de constituer un abus de dépendance économique. Il s’agit
du refus de vente, les ventes liées à des pratiques discriminatoires. Cette liste n’est pas
limitative, il existe d’autres pratiques qui ont été jugées discriminatoires comme par exemple
les restrictions à l’entrée sur le marché de nouveaux distributeurs. La mise à l’écart du
fournisseur, la réduction brutale de leur part menace à la rupture abusive des relations
commerciales établies.

D’une manière générale, on peut affirmer que les ventes liées et une grande partie des
pratiques anticoncurrentielles non justifiées en matière de fixation de prix, du délai de
paiement, des conditions ou modalité de vente ou d’achat sont généralement le fait du
fournisseur envers les distributeurs. Alors que la rupture et la menace de rupture des relations
commerciales établies sont souvent le fait des distributeurs à l’égard des fournisseurs.

c°- L’affectation réelle ou potentielle du fonctionnement ou de la structure de la


concurrence

Il convient de souligner que la prohibition de l’abus de dépendance économique vise à assurer


le bon fonctionnement du marché et à assurer la garantie d’équilibre dans les relations entre
partenaires économiques selon l’expérience française l’abus de dépendance économique a été
rarement constaté puisqu’il a été souvent difficile de rapporter la preuve d’un effet sur le
marché la prohibition a été appliquée en tant que telle et le conseil n’a souvent prohibé
lorsque l’abus de dépendance économique résulte d’une position dominante de l’auteur de
l’abus.

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Section II : La justification des pratiques anticoncurrentielles

Une pratique anticoncurrentielle ayant pour objet ou pourrait avoir pour effet d’empêcher, de
restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence, peut être considérée comme licite, si elle
contribue au développement technique ou économique ou si elle est de nature à procurer au
consommateur un profit équitable. L’article 6 de la loi de la concurrence dispose que ne sont
pas considérés comme anticoncurrentielles les ententes et les pratiques dont les auteurs
justifient qu’elles ont pour effet un progrès technique ou économique et qu’elle procure aux
utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte.

L’article 6 de la loi de 1991 a une portée générale et il est construit autour des notions clés
pratiquement insaisissable celle du progrès économique et technique. Il s’agit d’une
justification législative d’éventuelle atteinte à la concurrence en vue d’un but d’intérêt général
qui transforme les intérêts particuliers des agents économiques. Plusieurs questions se posent
et beaucoup de critères subjectifs d’appréciation entrent en jeux. Par rapport à quel paramètre
s’apprécient ces progrès économiques ou techniques, intérêt général ou local, progrès national
ou international, protection d’environnement ou amélioration de condition technique de
production.

La preuve du progrès pose un nombre de difficultés pratiques, il doit être rapport de ce


progrès et suffisamment important pour justifier les atteintes à la concurrence observée. Ainsi,
pour apprécier les faits selon leur juste valeur le conseil de la concurrence adopte une double
démarche : d’abord, il essaye de vérifier si la pratique en question relève bien des pratiques ou
des comportements anticoncurrentiels tels que définit par la loi, ensuite le conseil recherche
si cette pratique peut être justifiée.

Pour se faire, le conseil adopte une méthode dite « le bilan économique » en fonction de
laquelle il met en balance les avantages et les inconvénients de la pratique en question. Le
conseil cherche à prouver si la pratique en question est de nature à améliorer la productivité
ou la qualité de la distribution des produits ou des services offerts.

Il faut souligner aussi que le conseil exige deux conditions supplémentaires pour que la
pratique anticoncurrentielle ne tombe pas sous le coup de la sanction.

1ère condition ; un progrès économique minime ne serait justifié une atteinte grave à la
concurrence.

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2ème condition : le bénéfice du progrès ne doit pas concerner uniquement les autres
comportements mais doit bénéficier tous les intervenants sur un marché opérateur
économique comme les consommateurs, conditions édictées pour un souci d’équité entre les
agents économiques.

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Chapitre 3 : les mécanismes de protection prévus par

le droit de la concurrence

afin de préserver les intervenants sur un marché ouvert à la concurrence, le législateur a prévu
deux modalités de recours : le recours sur la base de la responsabilité délictuelle pour le
sanctionner et le recours devant le conseil de la concurrence.

Section I : Le recours sur la base de responsabilité délictuelle

Le recours sur la base de la responsabilité délictuelle exige certaines conditions

Paragraphe 1 : les conditions de recours sur la base de responsabilité délictuelle

La concurrence déloyale a pour fondement la protection des concurrents victimes et la


réparation des préjudices qui ont subi. Un fondement basé sur la responsabilité civile d’où
l’on déduit qu’une personne ne peut être condamnée pour concurrence déloyale qu’avec la
présence de trois conditions cumulatives à savoir : la faute, le préjudice subi et le lien de
causalité entre les deux.

1°- La faute :

La faute est un comportement normal, une défaillance de conduite par rapport à l’attitude
normale qu’on aurait dû avoir en partielle circonstance. Il est évidemment impossible de
dresser une liste des fautes sanctionnables et la qualification de la faute ne peut être faite
qu’au cas par cas sous le contrôle strict des tribunaux et éventuellement de la Cour de
cassation.

2°- Le dommage

En matière commerciale, le dommage n’est pas corporel mais financier, il doit être réel même
s’il n’est pas encore matérialisé et son évaluation dépend du montant des dommages et
intérêts. Cette évaluation est très difficile en matière de concurrence déloyale et s’apprécie
souvent sur des expertises confiées à des personnes extérieures à l’affaire.

Le calcul des préjudices essayera de s’appuyer sur le maximum d’élément objectif


contrôlable, comme par exemple une diminution du chiffre d’affaires. Les tribunaux disposent
d’un large pouvoir d’appréciation et d’une réelle marge de main d’œuvre, car il est difficile
d’objectiver totalement l’évaluation.

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3°- Le lien de causalité

La victime qui demande la réparation doit prouver la faute et le lien de causalité reliant cette
faute au dommage. C’est une tâche difficile, car il est fréquent qu’un dommage soit le résultat
de plusieurs circonstances. La jurisprudence résout le problème d’une façon casuistique sans
privilégier une position à l’autre.

Paragraphe II : Les sanctions

Au niveau de la concurrence déloyale, le législateur tunisien dans l’article 92 du C.O.C


dispose que le contrevenant peut subir deux sanctions : l’une à caractère civile et l’autre à
caractère pénale.ces mesures peuvent donner lieu à des dommages-intérêts sans préjudice de
l’action pénale. C’est-à-dire que la personne visée peut se présenter devant le ministère public
pour provoquer une action pénale.

Section 2 : Le recours devant le conseil de la concurrence sur la base des


pratiques anticoncurrentielles

Afin de mettre en œuvre une politique économique basée sur la libre concurrence, la Tunisie
s’est dotée d’une autorité chargée de protéger la concurrence sur le marché. Il s’agit du
conseil de la concurrence. Cette autorité de régulation de la vie économique en Tunisie a
commencé par être une commission avec des prérogatives assez limitées.

Mais depuis la réforme de 1995 la commission a changé pour un conseil doté d’une
personnalité morale et une autonomie financière et obligatoirement saisi pour avis sur tous
projets de concentration ayant pour effet d’entraver d’une manière significative la
concurrence. Le conseil est une juridiction administrative spécialisée qui détient à la fois un
pouvoir décisionnel et un pouvoir de proposition. Il traite les affaires portées devant lui et
peut même saisir d’office des pratiques anticoncurrentielles.

Il peut également en cas d’urgence et après avoir entendu les parties et le commissaire du
gouvernement ordonné des mesures provisoires susceptibles d’éviter un préjudice imminent et
irréparable pouvant affecter l’intérêt économique général portant atteinte à certains secteurs
économiques ou à celui de l’une des parties et ce jusqu’à ce qu’il soit statuer sur le fond.

Il peut aussi prononcer les exécutions provisoires de ses décisions et ordonner leur application
dans les journaux qu’il désigne au frais du condamné. L’étude du conseil de la concurrence
passe par connaitre son mode de fonctionnement ensuite ses diverses attributions.

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Paragraphe 1 : Le fonctionnement du conseil de la concurrence

Le conseil de la concurrence est une autorité de régulation marqué par sa saisine, sa


composition et sa procédure.

1°- La saisine du conseil :

La saisine constitue la faculté reconnue à une partie pour appréhender une autorité ou une
juridiction, le conseil de la concurrence peut être saisi d’après l’article 15 de la réforme de
2015 par le ministre chargé du commerce ou toute personne ayant délégation à cet effet :

 les entreprises économiques,


 les organisations professionnelles et syndicales,
 les organisations ou groupement des consommateurs légalement établis
 les chambres de commerce et d’industrie,
 les autorités de régulation,
 les collectivités locales

2°- La composition du conseil

La composition du conseil de la concurrence est marquée par la diversité .il y’a une
présence majoritaire des juristes, des magistrats, des experts universitaires ou
représentants des consommateurs et des représentants de la vie économique. Le conseil
est composé selon l’article 13 de la réforme de 2015 de quinze membres comme suit :

1°- Un président exerçant ses fonctions à plein temps, nommé parmi les magistrats ou les
personnalités ayant de la compétence en matière économique ou en matière de concurrence ou
de consommation et disposant d'au moins 20 ans d'ancienneté.
2°- Deux vice-présidents :
- un conseiller au tribunal administratif ayant une ancienneté de dix ans au moins dans le
grade entant que premier vice-président exerçant ses fonctions à plein temps,
- un conseiller auprès de la cour des comptes ayant une ancienneté de dix ans au moins dans
le grade en tant que deuxième vice-président exerçant ses fonctions à plein temps
3°- Quatre magistrats de l'ordre judiciaire du deuxième grade au moins ayant une expérience
d'au moins cinq ans dans les litiges commerciaux.

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4°- Quatre personnalités choisies en raison de leur compétence dans les domaines suivants :
- économie,
- droit,
- concurrence,
- consommation.
5° Quatre personnalités ayant exercé ou exerçant dans :
- le secteur de l'industrie et du commerce,
- le secteur des services,
- le secteur de l'agriculture,
- le domaine de protection du consommateur.

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Deuxième partie : les effets de commerce et les moyens de paiement

Chapitre I : La lettre de change

La lettre de change est un acte juridique par lequel une personne dite tireur donne mandat pur
et simple à une autre personne qu’on appelle tiré pour payer une somme d’argent à une date
précise qu’on appelle l’échéance et au profit d’une tierce personne qu’on appelle bénéficiaire
ou porteur.

Section (1) : Les conditions de forme nécessaire à la validité de la traite

L’article 269 du C.C exige pour la validité de la L de C certaines mentions obligatoires qui
sont :

 1°- la dénomination de la L de C :

Cela signifie que le titre doit obligatoirement comporter les termes « lettre de change » afin de
distinguer celle-ci des autres effets de commerce.

 2°- le mandat pur et simple de payer une somme d’argent :

L’article 269 du C,C exige que la L de C doit comporter le mandat pur et simple de payer une
somme déterminée.

 3°- le nom de celui qui doit payer la L de C : le tiré :

La L de C doit comporter le nom, le prénom et l’adresse de tiré car celui le débiteur principal
de la L de C, c-à-d c’est le tiré qui doit payer la traite à l’échéance.

 4°- le lieu de payement :

L’article 269 du C.C précise que la L de C doit comporter le lieu où le payement doit
s’effectuer. Le lieu de payement est toujours une agence bancaire où se trouve le compte de la
personne tenue du paiement de la L de C.

 5°- le nom du bénéficiaire de la L de C :

L’article 269 exige que le nom de celui auquel le payement doit etre fait, doit figurer sur la L
de C.

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 6°- la date et le lieu d’émission :

L’article 269 exige que la L de C comporte la date et le lieu d’émission c-à-d le lieu où il a
été crée.

 7°- l’échéance de la L de C :

La L de C doit indiquer la date d’échéance, c-à-d la date à laquelle le porteur le porteur ou le


bénéficiaire de la traite doit présenter celle-ci au paiement.

 8°- la signature du tireur :

L’article 269 du C,C exige que la L de C comporte la signature du tireur car celle-ci exprime
et traduit le consentement irrévocable du tireur à l’égard d’un acte juridique qui est la L de C.

Section (2) : Les conditions de fond nécessaire à la validité de la L de C

Etant un acte de commerce et donc un acte juridique, la L de C doit respecter les conditions
exigées par le dt commun à savoir la capacité de signataire, leur consentement et il faut qu’il y
ait un objet et cause licite.

1°- La capacité juridique :

En raison du caractère commercial de la traite ; celui qui émet une L de C ou qui la signe doit
obligatoirement avoir la capacité juridique pour accomplir un tel acte.

2°- Le consentement :

La L de C ne peut être déclarée valablement émise ou tirée que si une volonté réelle véritable
et certaine s’est exprimée par sa signature sur la L de C à quelque titre qu’il soit. Lorsqu’il y
a un vice de consentement, le signataire de la L de C dont le consentement est vicié, n’est pas
engagé cambiairement.

3°- La cause :

Conformément au C.O.C, toutes les obligations doivent avoir une cause licite et conforme à
l’ordre public. Autrement dit, lorsqu’une L de C n’a aucune cause ou lorsqu’elle concerne une
cause illicite ou comporte une cause licite en apparence mais illicite réellement, la L de C doit
être déclarée nulle.

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4°- L’objet :

La L de C n’est valable que si elle porte sur un objet licite c-à-d un objet autorisé légalement
c-à-d que l’objet ne doit pas porter sur une chose interdite par la loi si non elle est frappée par
la nullité absolue parce qu’elle est contraire à l’ordre public ; par exemple : la L de C portant
sur la vente d’organe humain.

Section III : la provision de la lettre de change

La provision peut être définie comme la créance du tireur sur le tiré mais aussi la contre partie
qui doit recevoir le tiré et qui peut être soit des marchandises, soit des matières premières soit
un bien meuble ou immeuble, soit une prestation de services, soit un prêt…

§ (1) : La preuve de la provision en cas de refus d’acceptation

Si la L de C n’a pas été accepté, il appartient au tireur d’établir et de prouver l’existence de la


provision c-à-d que le tireur doit prouver que la provision a été fourni au tiré avant l’échéance
ou au plutard à l’échéance.

Si la L de C a circulé et fait l’objet des plusieurs endossement sans qu’elle soit acceptée, il
appartient au tireur d’apporter la preuve de l’existence et de la fourniture de la provision pour
que tout les signataires de la traite soient tenus solidairement au profit de tireur et au profit du
porteur.

§ (2) : la preuve de la provision en cas d’acceptation d’une lettre de change :

1°- le rapport juridique entre le tireur et le tiré accepteur

Lorsque le tiré a accepté la traite, il doit payer obligatoirement la L de C à l’échéance et ce


qu’il ait reçu ou non la provision car la loi lui permet de se retourner contre le tireur qui n’a
pas fourni la provision et qui demeure le premier garant de la L de C qu’il a émise.

Si à l’échéance le tiré accepteur refuse de payer au motif qu’il n’a pas reçu la provision, il y’a
un renversement de la charge de la preuve, c-à-d qu’il appartient au tireur de prouver qu’il a
fourni la provision.

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2°- le rapport juridique entre le tiré- accepteur et le porteur

Si le porteur est le tireur et que celui-ci n’a pas fourni la provision, le tiré-accepteur qui
apporte la preuve de l’absence de provision ne sera pas tenu du paiement du titre à l’échéance
car le tireur ne saurait s’enrichir injustement sur le compte du tiré.

Si le porteur est autre personne que le tireur, le tiré qui a accepté est tenu de payer à
l’échéance le porteur de la L de C même s’il n’a pas reçu la provision parce que l’absence de
provision est une exception inopposable au porteur légitime et de bonne foi.

Si le tiré accepteur paye le porteur alors qu’il n’a pas reçu la provision, il peut se retourner
contre le tireur aussi bien sur le terrain civil que commercial et lorsqu’il apporte la preuve que
le tireur a émis la L de C avec l’intention d’escroquer, il peut engager une action pénale pour
escroquerie fondée sur l’article 191 du C. pénal.

Section IV : L’acceptation de la lettre de change

L’acceptation est l’engagement cambiaire et irrévocable par lequel le tiré s’oblige à payer la L
de C à l’échéance indiquée.

§ (1) Les conditions nécessaires à l’acceptation

Le porteur qui souhaite présenter le titre à l’acceptation doit vérifier l’existence des conditions
suivantes :

 Il doit tout d’abord vérifier si la L de C comporte toutes les mentions obligatoires.


 Il doit s’assurer de la réalité du titre c-à-d qu’il doit s’assurer qu’il possède un titre
émis valablement par le tireur.
 Il doit vérifier si le titre ne comporte pas la clause non acceptable.
 Il doit vérifier les mentions facultatives qui comportent le titre notamment L de C
acceptable ou contre acceptation et la clause du retour sans frais.
 Il doit aussi vérifier si la traite est payable ou domiciliée chez une personne autre que
le tiré .
 Le porteur doit aussi vérifier si la L de C n’a pas été émise dans un certain délai de
vue.
 Le porteur doit vérifier si la L de C doit être présenter à l’acceptation au tiré ou à son
mandataire.

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 L’acceptation de la L de C doit être donner par écrit soit sur le titre lui-même, soit sur
une allonge.
 L’acceptation doit être donner d’une manière claire et irrévocable.
 L’acceptation doit être donner au plutard à l’échéance du titre, mais elle peut
intervenir avant celle-ci.
 L’acceptation doit être pure et simple et non conditionnelle c-à-d non assortie des
conditions.
 L’acceptation peut être donner conformément à l’article 285 du C.C pour une somme
inférieure à celle qui comporte le titre.

§ (2) : Les effets de l’acceptation


1°- Les effets liés au rapport tiré et porteur

L’acceptation d’une L de C par le tiré donne au porteur une action directe contre le tiré
accepteur qui sera tenu de payer la traite à l’échéance conformément à l’art 287 alinéa 2 du
C.C. c’est pourquoi l’effet principal de cette acceptation est de purger la L de C de toutes les
exceptions et de tout les vices sauf ceux qui sont apparents et ceux concernant le rapport entre
le tireur et le tiré.

Par sa signature d’acceptation, le tiré accepteur s’oblige personnellement et cambiairement au


profit du bénéficiaire ou du porteur de la L de C de payer à l’échéance la somme inscrite sur
le titre à l’échéance.

Si à l’échéance, le porteur n’est pas payé par le tiré accepteur il doit dresser un protêt de
payement et engager tout les recours cambiaire contre tout les signataires y compris le tiré
accepteur.

2°- Les effets liés au rapport tiré-tireur

L’acceptation du tiré présume l’existence de la provision et donc sa fourniture par le tireur,


cette présomption dans ce rapport est une présomption simple. Par conséquent, le tiré qui a
accepté sans avoir reçu la provision peut prouver contre le tireur par tous les moyens
l’absence de provision. Cass. N° 21233 du 27 fev 1991.

Lorsque la L de C n’est pas accepté, le porteur de la L de C peut conjoindrement avec le tireur


exercer une action civile contre le tiré non accepteur et qui a reçu la provision.

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3°- Les effets liés au rapport tireur-porteur

Si la L de C a été accepté et que le tiré refuse le paiement, le porteur peut demander au tireur
de lui apporter la preuve de la fourniture de provision et c’est que le porteur soit négligent ou
prudent.

§ (3) ; Le refus de l’acceptation de la L de C

La loi tunisienne adopte le principe de liberté d’acceptation en matière de la L de C


nonobstant l’absence ou la fourniture de la provision et c’est pourquoi le tiré peut refuser
l’acceptation alors qu’il a reçu la provision. Deux solutions sont possibles :

=Ou bien le tiré refuse d’accepter mais s’engage à payer la L de C à l’échéance et dans ce cas
il n’est pas obligé de s’engager cambiairement.

=Soit parce qu’il refuse l’acceptation et le paiement et c’est pourquoi le législateur afin
d’assurer un minimum de protection pour les signataires de la L de C, il a rendu l’acceptation
obligatoire dans certains cas conformément à l’article 283 alinéa 9 :

 Si la L de C a été tiré en exécution d’un contrat de fourniture de marchandise.


 Si la L de C est conclue entre des commerçants personne physique ou morale.
 Lorsque le tireur a satisfait à ses obligations résultant des contrats, le tiré ne peut
refuser l’acceptation.
 L’acceptation est obligatoire par le tiré lorsque pour reconnaitre la qualité et la
conformité des marchandises a bénéficié d’un délai normal et raisonnable pour
assurer la vérification des marchandises.

Section V : La circulation de la L de C par l’endossement

L’endossement est une technique juridique par laquelle la L de C est négociée par le porteur
ou le bénéficiaire au profit de l’endossataire.

L’endossement se fait par une mention au dos du titre en précisant la date d’endossement et la
signature de l’endosseur ainsi que son identité.

La date d’endossement permet d’apprécier la capacité de l’endosseur d’une part et de


déterminer d’autre part les droits et les obligations des différents signataires du titre.

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L’endossement peut avoir pour but le paiement d’une dette et dans ce cas l’endossement est
pure et simple et lorsque l’endossement a pour objet de charger l’endossataire d’assurer le
recouvrement de la somme inscrite sur le titre, l’endossement est dit par procuration ou
endossement pour encaissement parce que l’endosseur donne un mandat à l’endossataire pour
assurer le recouvrement du titre à sa place.

 Les conditions de fond propre à l’endossement

Pour que l’endossement soit valable et entrainer tout les effets cambiaires, il doit respecter les
conditions suivantes :

 La capacité juridique de l’endosseur


 L’acquisition légitime du titre
 L’endossement doit être pure et simple
 L’endossement de la L de C doit avoir lieu au plutard au jour de l’échéance ou au jour
du protêt faute paiement

Section IV : Le paiement de la lettre de change

Le paiement constitue la dernière étape dans la vie de la traite. Le paiement peut avoir lieu
soit par le tiré accepteur ou non accepteur ou par le garant du paiement c-à-d l’avaliseur ou la
caution ‫ الكفيل‬ou enfin par n’importe quel autre signataire de la L de C.

§ (1) : La présentation de la L de C au paiement

L’article 294 du C.C dispose que « le porteur doit présenter la L de C au paiement soit au jour
où celle-ci est payable c-à-d à l’échéance, soit à l’un de deux jours ouvrables qui suivent ».

L’article 294 ajoute que la L de C peut être présenter, pour son paiement soit à une chambre
de compensation, soit par un moyen électronique d’échange informatique.

La présentation au paiement de la L de C doit se faire soit auprès du tiré accepteur, soit


auprès du tiré accepteur, soit auprès d’une personne intervenant pour le compte du tiré soit
enfin auprès du garant de la L de C.

La L de C doit être présenter dans un délai maximum d’une année et ce délai commence à
courir à partir de la date d’émission du titre. Le payement peut être total ou partiel et dans les
deux cas il doit préciser sur le titre.

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Quant à la monnaie du paiement, il faut préciser que les transactions faite entre des résidents
du territoire tunisien quelque soit leur nationalité doivent avoir lieu en dinars tunisien.

§ (2) : Le refus du payement de la L de C

En principe lorsque la L de C a été accepté, le tiré accepteur ou son mandataire ou la personne


intervenant pour le compte du tiré doit à l’échéance, payé le porteur de la L de C et récupérer
le titre avec les précisions apportées par le porteur sur le titre concernant le paiement totale de
somme inscrite sur le titre.

Si le paiement est partiel, le porteur doit le préciser sur le titre et exiger la signature de la
personne qui a payé partiellement le titre.

Cependant, lorsque le tiré accepteur ou toute autre personne tenue de payement refuse celui-
ci, le porteur est tenu de payement refuse celui-ci, le porteur est tenu de dresser un protêt faute
de payement pour sauvegarder ses droits cambiaires sauf s’il en est dispensé.

Après avoir dresser protêt, le porteur peut se retourner contre tout les signataires du titre qui
sont tenus solidairement d’une manière indivisible.

Le protêt doit être en principe dresser au jour de l’échéance du titre ou au plutard dans les
deux jours ouvrables qui suivent la date d’échéance.

Toutefois, le législateur a dispensé le porteur de dresser protêt faute de payement lorsque :

 Le porteur a déjà dressé un protêt faute d’acceptation.


 Lorsque le tiré accepteur est en faillite car l’article 569 du C.C suspend toutes les
poursuites judiciaires à l’égard du débiteur défaillant.
 Lorsque le tireur est en faillite et à condition que la L de C n’est pas été acceptée.
 Lorsque la L de C comporte la clause sans protêt ou retour sans frais.
 L’article 316 du C.C prévoit la dispense du protêt au profit du porteur en cas de force
majeure et ce même article ajoute que ne sont pas constitutifs de force majeure les
faits purement personnels au porteur par exple la longue maladie ou la condamnation à
la prison .

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Chapitre II : Le chèque

Le chèque est un titre par lequel le tireur donne l’ordre à son banquier ou à une institution
assimilée, de payer une somme d’argent préalable et disponible au profit du bénéficiaire ou à
son ordre. Le chèque est utilisé par le titulaire du compte comme instrument de retrait de
fonds et comme instrument de paiement.

Section I La création du chèque

On se limitera à l’étude des conditions de forme ainsi qu’aux conditions de fond.

§ (1) : Les conditions de forme

Le chèque contient un certain nombre des mentions qui sont :

1. La dénomination de chèque : le terme « chèque » doit être utilisé dans le texte


même du titre ( exple : veuillez payer contre ce chèque…).
2. Le mondat pur et simple de payer une somme déterminée : la somme à payer doit
être déterminée. Le texte ne précise pas si la somme doit être indiquée en toutes
lettres ou en chiffres. En pratique, les chèques sont libellés en même temps en
chiffres et en lettres.
3. Le nom du tiré : l’article 346-3 qui prescrit l’indication du nom du tiré, doit être
complété par l’article 348 du C.C qui exige que le chèque soit tiré sur un banquier
ou un établissement assimilé.
4. L’indication du lieu de paiement : le chèque doit indiquer le lieu où le paiement doit
s’effectuer. En fait ce lieu est désigné par le nom de l’agence où le tireur a ouvert
son compte ( exple ….payable à l’agence de la STB).
5. L’indication de la date et du lieu de création du chèque : il faut entendre par date,
l’indication du jour, du mois et de l’année.
6. La signature du tireur : la signature du tireur est une mention très importante car
elle exprime sa volonté et l’engage tant sur le plan civil que sur le plan pénal.
§ (2) : Les conditions de fond

Le chèque met généralement en présence trois personnages : un tireur, un tiré et un


bénéficiaire. Chacun de ces trois personnages doit remplir certaines conditions pour que le
chèque soit valable.

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1°- Conditions quant au tireur

Le tireur peut être soit une personne physique, soit une personne morale. L’émission du
chèque est un acte juridique qui doit répondre aux conditions de l’article 2 du C.O.C à savoir :

 La capacité
 Le consentement
 L’objet
 La cause
A ces conditions, il faut ajouter le pouvoir pour ce qui est des personnes agissant pour le
compte d’autrui.

2°- Conditions quant au tiré

Le chèque ne peut être tiré que sur un banquier ou une institution assimilée (exp : société de
leasing).

Le chèque tiré sur une personne autre qu’un banquier ou une institution assimilée serait
entaché de nullité et son auteur serait sanctionné d’une amende fiscale égale à 6% du montant
du chèque.

3°- Conditions quant au bénéficiaire

Il en résulte des articles 351 et 352 du C.C que le bénéficiaire du chèque peut être :

 Une personne dénommée ou à son ordre.


 Le porteur.
 Une personne indéterminée (lorsque le chèque est en blanc).
 Le tireur lui-même.

Section II : La transmission du chèque

La transmission du chèque est effectuée tantôt au profit d’un endossataire pour régler la
créance de celui-ci vis-à-vis de l’endosseur, tantôt pour permettre l’encaissement du titre par
l’intermédiaire d’un banquier.

L’étude de la transmission du chèque portera successivement sur l’endossement translatif (§1)


et l’endossement par procuration (§2).

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§ (1) : L’endossement translatif du chèque

L’endossement translatif du chèque obéit à des conditions légales (A) et produit des effets
(B).

A°- Conditions de l’endossement translatif :

La matière est largement empruntée au droit de la lettre de change. On y relève des conditions
de fond et des conditions de forme.

1- Les conditions de fond :


Le chèque est susceptible d’endossement même s’il ne comporte pas la clause à « ordre ».
L’endossement peut être effectué par toute personne propriétaire du chèque à condition
qu’elle soit capable d’en disposer.

L’endossement est une convention qui suppose le consentement de l’endosseur et de


l’endossataire. Ce consentement peut être explicite ou tacite.

L’endossement doit porter sur tout le montant du chèque. L’endossement partiel est donc nul
(article 361 alinéa 2 du C.C).

2- Forme de l’endossement :
L’endossement prend la forme d’une signature apposée sur le chèque. Il peut être fait au profit
d’une personne dénommée, au porteur ou en blanc.

B°- Les effets de l’endossement translatif :

L’endossement transmet tous les droits résultant du chèque et notamment la propriété de la


provision. Le transfert de la provision au porteur présente un intérêt pratique certain en cas de
faillite du tireur ou d’un endosseur lorsque cette faillite survient après l’émission ou
l’endossement du chèque. Ce dernier doit être payé malgré la faillite postérieure du tireur ou
de l’endosseur.

L’endossement du chèque a aussi pour effet d’engager solidairement l’endosseur avec les
autres signataires du titre envers le porteur.

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§ (2) : L’endossement de procuration

L’endossement de procuration est effectué en utilisant l’une des mentions prévues à l’article
369 du C.C à titre indicatif, à savoir « valeur en recouvrement », « pour encaissement » ou
« par procuration ».

L’endossement de procuration est le plus souvent réalisé en blanc. On se limitera à l’étude des
obligations de l’encaisseur.

A°- les obligations de l’encaisseur :

L’encaisseur qui est le plus souvent un banquier doit faire preuve de diligence pour encaisser
rapidement le chèque qui lui est remis. Le chèque impayé devrait être renvoyé au remettant
par lettre recommandée ou tenu à sa disposition après envoi d’un avis de sort.

Le banquier encaisseur doit s’assurer que le chèque a été régulièrement endossé à son profit et
vérifier la signature du remettant qui doit être son client si le chèque est barré.

B°- Le défaut d’encaissement :

L’article 369 alinéa 1 du C.C dispose que le porteur du chèque qui a reçu mandat pour
l’encaisser peut exercer tous les droits découlant du titre.

Lorsque le banquier exerce les recours que la loi lui ouvre contre les différents signataires, ces
derniers ne peuvent lui opposer que les exceptions qui seraient opposables à l’endosseur car le
mandataire est placé dans la même situation que son mondant.

Le paiement du chèque et recours faute de paiement

Section (1) : Le paiement

Le paiement du chèque est réglementé dans les articles 371 à 382 du code de commerce qui
rappellent dans une large mesure la lettre de change.

L’étude de ces articles permet de relever des obligations qui incombent respectivement au
porteur (§1) et au tiré (§2).

§(1) : L’obligation de présentation

Le porteur du chèque doit le présenter au paiement, conformément aux articles 347 et 371 et
suivant du code de commerce régissant le lieu (A) et le délai de présentation (B).

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A°- Le lieu de présentation

La présentation du chèque doit être faite au lieu indiqué sur le titre, qui est une mention
obligatoire (article 346-4 du code). Le lieu de présentation est généralement celui de l’agence
où le compte du tireur est tenu.

A défaut d’indication spéciale, le lieu désigné à coté du nom du tiré est réputé être le lieu du
paiement. Si plusieurs lieux sont inscrits à coté du nom du tiré , le chèque est payable au
premier lieu indiqué (article 347 alinéa 2 du code de commerce). A défaut de ces indications,
le lieu de payement est réputé être le lieu où le tiré a son principal établissement, c.-à-d. le
siège de la banque (article 347 alinéa 3).

Le chèque peut en outre être présenté à une chambre de compensation. L’article 373 du code
de commerce dispose à cet égard que « la présentation à une chambre de compensation
équivaut à la présentation au paiement »

B°- Le délai de présentation

Le chèque peut être établi et présenté immédiatement au paiement, sachant qu’il est payable à
vue. La règle est d’ordre public. Toute stipulation contraire doit être réputée non écrite. Il
serait donc inutile de postdater un chèque. L’article 371 alinéa 2 précise que « le chèque
présenté au paiement avant le jour indiqué comme date d’émission, est payable le jour de la
présentation ».

Le chèque doit être présenté dans les délais fixés à l’article 372 du code de commerce. Ces
délais sont de huit jours pour les chèques émis et payables en Tunisie et de soixante jours pour
les chèques émis hors du territoire tunisien.

La présentation du chèque doit avoir lieu pendant un jour ouvrable. Lorsque le dernier jour du
délai de présentation est un jour férié légal, le délai est prorogé jusqu’au premier jour
ouvrable qui en suit l’expiration (article 404 alinéa 1 du code de commerce). Il faut assimiler
aux jours fériés légaux, les jours où aucun paiement ne peut être exigé (samedi et dimanche).

§ (2) : Les obligations du tiré

Une obligation de vérification pèse sur le banquier tiré. Cette vérification porte sur l’identité
du porteur (A), la chaine des endossements (B) et la régularité apparente du titre(C)

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A°- L’obligation de vérifier l’identité du porteur

Le problème se pose lorsque le chèque est au porteur. Le banquier est-il tenu de relever
l’identité de la personne qui se présente comme porteur du chèque ?

A priori, cette obligation semble inutile, puisque par définition, la personne du porteur est
indifférente ; le banquier doit payer à celui qui présente le titre au paiement. Il est d’usage
cependant que le banquier exige une pièce d’identité du porteur ? Cette pratique est justifiée,
car le banquier qui paye un chèque, doit exiger un acquit. Ceci suppose donc une vérification
de l’identité de celui qui donne un acquit.

La vérification de l’identité du présentateur du chèque s’impose pour faciliter le cas échéant la


recherche du coupable, lorsque le titre s’avère volé, perdu ou falsifié.

Le banquier doit vérifier outre l’identité du porteur sa capacité et son pouvoir.

B°- L’obligation de vérifier la chaine des endossements

L’article 377 alinéa 2 du code de commerce dispose que « le tiré qui paye un chèque
endossable est obligé de vérifier la régularité de la suite des endossements, mais non la
signature des endosseurs ».

Cette règle s’impose d’elle-même, car la vérification de la signature des endosseurs est
pratiquement impossible pour le banquier, qui ne dispose pas de moyens pour y procéder. En
conséquence, le tiré qui ne reçoit aucune opposition peut payer. L’article 3 77 alinéa1 déclare
ce paiement libératoire. En revanche, le paiement effectué en méconnaissance d’une
opposition n’est pas opposable au tireur.

C°- L’obligation de vérifier la régularité formelle du chèque

Le banquier tiré doit vérifier la régularité formelle du chèque, telle que prévue à l’article 346
et notamment la conformité de la signature.

En pratique, le préposé du banquier chargé du paiement, doit vérifier si la signature apposée


sur le chèque est conforme à la signature déposée par le titulaire du compte.

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Section (3) : Le défaut de paiement

Le défaut de paiement du chèque ouvre au porteur des recours qui sont soumis à une
procédure préalable et qui obéissent à des règles largement empruntées au droit de la lettre de
change. Le recours faute de paiement sont soumis à une procédure spécifique.

Il y a lieu ainsi d’examiner :

 La procédure préalable au recours


 Le recours
 La prescription du recours

§ (1) : Procédure préalable au recours

La procédure préalable au recours a pour objet le protêt et l’avis du défaut de paiement.

A°- Le protêt

L’article 386 du code de commerce prévoit que « le porteur peut exercer ses recours contre les
endosseurs, le tireur et les autres obligés, si le chèque présenté en temps utile n’est pas payé et
si le refus de paiement est constaté par un protêt ».

Il résulte de ce texte que le recours faute de paiement est subordonné d’une part à
l’observation du délai de présentation prévu à l’article 372 du code de commerce, et d’autre
part à l’établissement d’un protêt.

Le protêt dont le contenu est fixé à l’article 401 du code de commerce ( transcription littérale
du chèque et des endossements, sommation de payer, motifs du refus de paiement), doit être
établi par huissier du justice, avant l’expiration du délai de présentation (article 387 du code
de commerce). Toutefois, si le chèque est présenté le dernier jour du délai, le protêt peut être
établi le premier jour ouvrable suivant( article 387).

Ces délais sont prolongés en cas de force majeure, conformément à l’article 394 du code de
commerce. Après la cessation de la force majeure, le porteur doit immédiatement présenter le
chèque au paiement et faire dresser le cas échéant le protêt.

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B°- L’avis du défaut de paiement

L’article 388 du code de commerce met à la charge du porteur l’obligation de donner avis du
défaut de paiement à son endosseur et au tireur dans les quatre jours ouvrables qui suivent le
jour du protêt et en cas de clause de retour sans frais, le jour de la présentation.

Une obligation de transmettre l’avis pèse sur chaque endosseur. Chacun doit aviser
l’endosseur qui le précède, dans les deux jours ouvrables qui suivent le jour où il a lui même
reçu l’avis, en indiquant les noms et adresses des personnes qui ont donné les avis précédents.

L’avis doit être donné à l’endosseur précédent si l’endosseur n’a pas indiqué son adresse ou
l’a indiqué d’une façon illisible. L’huissier est obligé sous peine de dommages- intérêts
d’informer le tireur du défaut de paiement dans les 48 heures qui suivent l’enregistrement du
protêt.

§(2) : Le recours du porteur impayé

Le porteur d’un chèque impayé dispose d’un recours conservatoire et d’un recours en
paiement.

Le recours conservatoire peut être exercé sur la base de l’article 408 qui dispose que le
porteur d’un chèque ayant fait l’objet d’une attestation de non paiement ou d’un protêt, peut
sur simple présentation dudit chèque, procéder à une saisie conservatoire sur les biens
meubles du tireur ou de l’endosseur.

En cas de non paiement du chèque dans un délai d’un mois à partir de la signification de la
saisie, le porteur du chèque peut par ordonnance sur requête, faire saisir et vendre aux
enchères publiques les biens saisis sur la base de l’article 408 alinéa 2 du code de commerce.

Le recours en paiement emprunte plusieurs de ses règles au droit de la lettre de change :


solidarité des signataires (article 390), inopposabilité des exceptions (article 368) etc.

§(3) : La prescription du recours

A°- Les délais de prescription

a°- La prescription de six mois

Cette prescription joue :

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 Pour les recours du porteur contre les endosseurs et le tireur à partir de l’expiration du
délai de présentation .
 Pour les recours des divers obligés au paiement du chèque, les uns contre les autres, à
partir du jour où l’obligé a remboursé le chèque ou du jour où il a été lui-même
actionné.

b°- La prescription de trois ans

la prescription de trois ans s’applique à l’action du porteur contre le tiré. Elle commence à
courir à compter de l’expiration du délai de présentation fixé à l’article 372 du code de
commerce.

B°- Effets de la prescription

La prescription de l’article 398 a pour effet d’éteindre l’action fondée sur le titre. Cet article
dispose qu’en cas de déchéance ou de prescription, il subsiste une action contre le tireur qui
n’a pas fait provision ou les autres obligés qui ne seraient enrichis sans cause.

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