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THÉORIE GÉNÉRALE DU DROIT

CONSTITUTIONNEL
(1 ÈRE PARTIE)

Pr. Hicham BERJAOUI


Professeur de droit public à la FSJES Agdal
Université Mohammed V – Rabat
Année universitaire : 2023-2024
Semestre 1er / Licence en droit (Section francophone)

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PLAN
Eléments introductifs :
• Genèse du droit constitutionnel
• Objet : le pouvoir politique
• Evolution de l’objet du droit constitutionnel
La notion de « constitution » :
• Définition
• Fonctions
• Taxinomie/Typologie
• Modes d’élaboration
• Normativité
Etat et pouvoir politique :
• Fondement : le système représentatif
• La répartition horizontale du pouvoir politique
• La répartition verticale du pouvoir politique
Le système constitutionnel marocain :

NB. Ce support doit être nécessairement complété par la prise de notes effectuée durant le
cours.

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ELÉMENTS D’INTRODUCTION

La notion de « droit » ;
La nature dilemmatique des objets des sciences sociales ;
La genèse du droit constitutionnel :
• La Grèce Antique : la notion de « conflit » d’après Platon et Aristote ;
• Le Moyen-Age : la suprématie de la religion ;
• Renaissance et temps contemporains : Constitutionnalisation/Contractualisation
/Limitation du pouvoir politique.

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L’OBJET DU DROIT CONSTITUTIONNEL

L’outil de délimitation de l’objet du droit constitutionnel réside dans la théorie de la


séparation des pouvoirs :
La concrétisation de la théorie précitée marque le passage du pouvoir politique absolu
au pouvoir politique juridiquement encadré/limité ;
La forme originelle de la théorie de la séparation des pouvoirs : Séparation
« stricte/anatomique » des pouvoirs ;
Après l’émergence du phénomène de « parti politique » et de démocratie
représentative : Il n’est plus possible qu’une séparation stricte soit installée dans la mesure où le
parti politique vainqueur de l’élection législative accède automatiquement au pouvoir
gouvernemental ;
Après l’émergence de la justice constitutionnelle : Contrôle des excès susceptibles d’émaner
de la majorité/Consécration de la normativité de la Constitution/La loi n’est l’expression
authentique et véritable de la volonté générale que si elle est conforme à la Constitution.

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Evolution de l’objet du droit constitutionnel :
Le droit constitutionnel institutionnel :
Étude de la séparation des pouvoirs publics :
Comment chaque régime politique applique t-il la théorie de la séparation
des pouvoirs ?
Le droit constitutionnel substantiel :
• Étude des libertés et droits fondamentaux garantis par la Constitution
aux gouvernés ;
• Contractualisation et limitation du pouvoir politique.
Le droit constitutionnel normatif :
Étude de la normativité de la Constitution après la mise en place des
cours et conseils constitutionnels/La garantie de la supériorité normative
de la Constitution.
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D’emblée, on peut dire que le droit constitutionnel est le droit de la
Constitution. Cette définition reste relative :
Effets de l’internationalisation du droit constitutionnel.
En principe, le droit constitutionnel essaie de répondre, au moyen d’un
discours scientifique, à deux questions majeures :
• Comment accéder au pouvoir politique ?
• Et comment l’exercer ?
La Constitution fixe les règles juridiques définissant la
dévolution et l’exercice du pouvoir politique.

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D’un point de vue historique :
Le phénomène de « pouvoir politique » est ancien dans la mesure où il a marqué tous
les groupements humains : famille, tribu, communautés religieuses, l’Etat.
En d’autres termes, le pouvoir politique marque et façonne les groupements humains
quel que soit leur degré d’institutionnalisation.
Aujourd’hui, la forme la plus élaborée des groupements humains s’incarne dans l’Etat.
C’est pourquoi, le droit constitutionnel s’intéresse à l’organisation, à la distribution et à
l’exercice du pouvoir politique au sein de l’Etat.
De plus, l’Etat est, à la fois, sujet de son ordre juridique interne et sujet de l’ordre
juridique international (La portée ambivalente de la personnalité juridique étatique).
D’où l’intérêt d’encadrer et d’organiser le caractère ambivalent de la personnalité
juridique de l’Etat par la norme constitutionnelle.

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L’impact des faits politiques majeurs sur le pouvoir
politique :
• La déclaration des droits de l’Homme et du citoyen issue de la Révolution
française de 1789 ;
• La Révolution américaine de 1776.
Principaux effets sur le pouvoir politique :
• Contractualisation du pouvoir politique et sa soumission à un cadre juridique
(l’institutionnalisation) ;
• Séparation des pouvoirs ;
• Limitation des prérogatives des gouvernants et leur assujettissement à la
reddition des comptes ;
• Garantie de droits et de libertés au profit des gouvernés.
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Le processus d’institutionnalisation du pouvoir politique s’est répercuté
sur l’objet du droit constitutionnel qui a, de ce fait, traversé trois grandes
étapes :
Le droit constitutionnel descriptif : impact du libéralisme
économique classique « l’Etat-gendarme » (jusqu’à la fin du 19ème Siècle) ;
Impact de la science politique et de la science administrative :
Naissance et développement de l’administration publique « l’Etat
interventionniste » (à partir du 20ème Siècle) ;
Emergence et évolution du contentieux constitutionnel (à partir
de la 2ème moitié du 20ème Siècle).
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LA NOTION DE « CONSTITUTION ».

La Constitution admet des définitions qui tiennent compte de deux critères :


Le critère juridique :
La Constitution désigne l’ensemble des règles juridiques qui régissent la dévolution
et l’exercice du pouvoir politique.
Elle fixe la formule distributive dudit pouvoir au sein de l’Etat :
• Verticalement via la répartition du pouvoir décisionnel entre le centre et la
périphérie (pouvoir central/collectivités territoriales) ;
• Horizontalement via l’organisation des trois pouvoirs (Législatif, Exécutif et
Judiciaire) et les relations qu’ils entreprennent.
Prise en compte de la science politique :
La Constitution serait le reflet des rapports de force animant et caractérisant une
société politique donnée.
La définition marquée par la science politique a tendance à remplacer la notion de
« sujet de droit » par celle d’« acteur ».
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Fonctions de la Constitution :
• Définir les modes de dévolution et d’exercice du pouvoir politique ;
• Décrire l’organisation, la structure et les rapports entre les organes de
l’Etat ;
• Déterminer les rapports entre le droit interne de l’Etat et le droit
international ;
• Garantir aux gouvernants des droits et des libertés ;
• Etablir les principes fondamentaux du contrôle auquel sont assujettis
les gouvernants.

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TYPOLOGIE/TAXINOMIE/MODES D’ÉLABORATION

Modificabilité :
• Constitution souple : modifiable selon la procédure applicable aux autres lois ;
• Constitution rigide : modifiable selon une procédure spéciale.
Cf.Titre XIII de la Constitution marocaine, intitulé : « De la révision de la Constitution ».
Codification dans un document unifié :
• Constitution matérielle : l’Etat en question est soumis à un ensemble de lois
constitutionnelles qui ne sont pas réunies dans un seul texte appelé « Constitution » ;
• Constitution formelle : les dispositions constitutionnelles sont contenues dans un seul
document appelé « Constitution ».
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La rédaction de la Constitution est l’acte fondateur/de naissance de l’Etat. C’est pourquoi les
constitutionnalistes s’intéressent aux modalités d’élaboration des textes constitutionnels.
Lors de l’élaboration de la Constitution, on distingue :
• Le pouvoir constituant originaire : le pouvoir qui crée la Constitution ;
• Le pouvoir constituant dérivé ou subsidiaire : le pouvoir habilité à réviser une Constitution
préexistante.
Selon l’étendue de la participation du peuple à l’élaboration de la Constitution :
• Mode d’élaboration non-participatif : le peuple n’est consulté ni avant ni après la rédaction
du texte de la Constitution ;
• Mode d’élaboration quasi-démocratique : le peuple est consulté après ou avant la
rédaction du texte de la Constitution ;
• Mode d’élaboration démocratique : le peuple est consulté avant et après la rédaction du
texte de la Constitution.

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LA NORMATIVITÉ DE LA CONSTITUTION.

La Constitution fournit le statut juridique fondamental de l’Etat. Dans un


1er temps, elle était perçue comme un texte fixant les bases macro-
institutionnelles de l’Etat (le courant holiste).
Par la suite, la Constitution commence à s’inscrire dans
l’ordonnancement normatif. D’où la mise en place d’une justice
constitutionnelle chargée de contrôler la conformité des lois à la
Constitution.

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LA RÉPARTITION DU POUVOIR POLITIQUE

Le pouvoir politique est une composante essentielle de l’objet du droit


constitutionnel.
Comme mentionné auparavant, l’étude du pouvoir politique prend en
considération les modalités encadrant sa répartition.
• La répartition horizontale : l’étude des rapports entre les trois
pouvoirs (législatif, exécutif et judiciaire);
• La répartition verticale : l’étude des rapports entre le pouvoir
central et les périphéries : (Etat unitaire : Etat/Collectivités
territoriales // Etat fédéral : Pouvoir fédéral/Entités fédérées).
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Outre la structure de répartition ou la forme du pouvoir politique,
le droit constitutionnel s’intéresse au fondement du pouvoir
politique en l’occurrence : le système représentatif.
La représentation, en tant que fondement capital du pouvoir
politique, est étroitement liée à la théorie de la séparation des
pouvoirs et aux mutations l’ayant affectée.

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Historiquement, la mise en place et le développement du système
représentatif sont liés au processus d’implémentation de la démocratie
en Angleterre.
L’évolution des prérogatives dévolues au parlement a permis
l’installation progressive de la démocratie représentative.
Dates charnières :
• 1215 : Adoption de la Grande Charte : le consentement à l’impôt /
fixation des impôts par le parlement etc.;
• 1640 : révolution anglaise : introduction de la représentation ;
• 1688 : Bill of Rights.
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1/ La formulation de la théorie de la séparation
des pouvoirs :
• John LOCKE : Essai sur le gouvernement civil 1690 ;
• Charles de Montesquieu : L’esprit des lois 1748.
D’après les penseurs pré-cités, le pouvoir politique
comprend trois organes :
• Législatif : élabore les lois ;
• Exécutif : exécute/applique les lois d’une manière
générale ;
• Judiciaire : applique les loi à des situations conflictuelles
individuelles/particulières. 18
Deux faits ont contribué à la mise en œuvre de la séparation des
pouvoirs :
• La révolution américaine de 1776 : elle s’inspire de la forme
originelle de la théorie de la séparation des pouvoirs préconisant la
spécialisation fonctionnelle/rigide de chaque organe et donne naissance,
de ce fait, au régime présidentiel ;
• La révolution française de 1789 : elle s’inspire plutôt de la
conception libérale de la théorie de la séparation des pouvoirs (de
LOCKE) préconisant la coopération entre les trois organes et donne
naissance, de ce fait, au régime parlementaire.

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II/ La naissance et l’évolution de la démocratie représentative.
La démocratie représentative est la forme de dévolution et d’exercice du
pouvoir politique la plus répandue au Monde.
Elle constitue un régime politique dans lequel l’exercice du pouvoir
politique est confié à des représentants du peuple élus au suffrage
universel.
Ces représentants sont, donc, les mandataires du peuple pour gérer en
son nom, pour son compte et sous son contrôle les affaires de l’Etat.

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La démocratie représentative pose néanmoins un dilemme
intrinsèque et des limites :
• Intrinsèquement, bien qu’il soit le détenteur de la souveraineté, le
peuple ne gouverne pas; il est plutôt gouverné ;
• La représentation ne repose pas exclusivement sur le suffrage
universel direct ;
• La démocratie représentative est différemment appliquée dans le
monde.

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III/ Les origines du système représentatif :
L’idée de représentation est ancienne : Grèce Antique, Rome etc.
• La république romaine : 509 – 27 avant JC : le Sénat, qui gérait les
affaires publiques, était composé des représentants des familles
prestigieuses de Rome (la légitimité aristocratique) ;
• L’Ancien Régime en France :
La représentation reposait foncièrement sur la légitimité
aristocratique et la légitimité théocratique :
Les Etats-Généraux (le parlement de l’époque) étaient composés des
Nobles, du Clergé et du Tiers-Etat composé d’individus qui ne sont ni
nobles ni prêtres.
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Deux constats :
1/ La légitimité du détenteur du pouvoir politique peut donc
avoir une origine :
• raciale ;
• religieuse ;
• démocratique.
2/ La conception idéale du système représentatif (l’Idéal-type
de la démocratie représentative s’il on veut utiliser l’approche
de Max WEBER) :
Initialement, la souveraineté doit permettre au peuple d’être investi
directement de l’ensemble des prérogatives du pouvoir politique qu’il
peut lui-même exercer. Exceptionnellement, il peut déléguer les
prérogatives qu’il ne peut lui-même exercer à ses représentants élus.
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Cependant :
Aucun Etat ne met en œuvre le mécanisme du gouvernement
direct.
C’est ce qui marque :
• Le passage de la souveraineté populaire (J.J. ROUSSEAU) à la
souveraineté nationale (John LOCKE) d’une part ;
• Et l’intérêt de l’adoption du système représentatif avec des
institutions intermédiaires d’autre part.

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IV/ Désignation des représentants et contrôle de leurs
actions :
Dans une démocratie représentative, les gouvernants sont désignés
par voie électorale. Ils tiennent leur mandat du peuple
(mandant/mandataire).
Les modes de désignation ou d’élection varient selon la dynamique
des rapports de force façonnant chaque système politique : la
proportionnalité, la majorité ou une formule qui les combine.
La légitimité des gouvernants réside, donc, dans le suffrage universel
dont l’opposabilité est soumise à des conditions immuables :
• Universalité ;
• Sincérité ;
• Régularité. 25
Aussi, le suffrage universel doit consacrer :
• La liberté dans la mesure où il doit profiter au plus grand nombre ;
• L’égalité dans la mesure où il doit être reconnu aux citoyens sans
discrimination aucune.
Les formes anté-démocratiques du suffrage (délaissés dans la quasi-
totalité des Etats au monde) :
• Le suffrage excluant les femmes ;
• Le vote censitaire, etc.

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V/ Le contrôle des représentants :
• Contrôle politique : opérable par les élus parlementaires et s’incarne dans
l’engagement de la responsabilité politique ;
• Contrôle juridictionnel : opérable par le juge et se manifeste dans le
contrôle de la constitutionnalité des lois et de la légalité des actes
administratifs.
Le contrôle politique s’étend sur le programme sur la base duquel le
gouvernement a pu obtenir la confiance des électeurs.
Cependant, sa portée est aujourd’hui limitée dans la mesure où la fabrique de la
décision interne dépend de facteurs déterminants :
• Variabilité de la conjoncture économique nationale et internationale ;
• Le caractère court du mandat, etc.
Le contrôle juridictionnel, lui, entraîne l’annulation des actes législatifs contraires
à la Constitution et les actes administratifs contraires à la loi.
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