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Seconde partie: La théorie Générale de la

Constitution

Par Pr Reda El Fellah


Semester 1. Module: Théorie Générale du Droit
Constitutionnel
2023-2024

Remarque: Cette seconde partie est la suite de la première partie intitulée:


"Théorie générale de l'Etat" du polycopié du module: "Théorie Générale
du Droit Constitutionnel"

1- La constitution

La règle de droit régit aussi bien la société que les institutions politiques qui
détiennent le pouvoir sur la dite société. Cela correspond à l'emergence de
l'autorité politique qui exerce ses compétences en vertu d'une conformité à deux
références principales qui sont : la légitimité et la légalité.
Si le contrat social comme nous l'avons étudié met en place les piliers de la
légitimité dans le sens ou le contrat est basé sur le consentement des gouvernés
vis à vis du pouvoir exercé sur eux par l'autorité politique, la légalité est
symbolisée par la constitution qui est la loi suprême ou fondamentale qui limite
et encadre juridiquement l'Etat.
On peut dire alors que la constitution constitue la forme écrite du contrat social.,
ou selon une autre expression le cahier de charge adossé au contrat social. Elle
est selon l'expression de Maurice Hauriou une quête de compromis entre le
pouvoir et la liberté. Hauriou décrit la formation de la Constitution comme si des
pièces d’échecs étaient en mouvement, portant le nom de "pouvoir" et le nom de
"Liberté" et le nom "Etat" pour atteindre finalement une sorte de compromis et
d’harmonie.
La constitution est appelé également "loi suprême" car c'est la loi qui se trouve
au sommet de la pyramide des normes selon l'expression du juriste autrichien
Hans Kelsen. Les autres normes qui appartiennent au bloc de légalité et au bloc
réglementaire sont hiérarchiquement inférieurs à la norme constitutionnelle et
devraient s'y conformer.

Source:Par WikipSQ, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=141182630

2- Le droit constitutionnel
Le droit constitutionnel est une branche du droit public car il correspond à une
construction normative qui a accompagné la juridicisation du pouvoir politique.
l'Etat est donc titulaire de la personnalité juridique, qui fait qu'elle lui incombe
des droits et des obligations, et le droit constitutionnel jouit d'une position
suprême par rapport aux autres branches de droit car il englobe les règles
juridiques qui sont à la base de toute l'organisation de l’État et de son
fonctionnement au niveau des trois pouvoirs principaux au sein de l'Etat pour ce
qui est de leurs compétences , mais également pour ce qui concerne les relations
entre eux y compris les principes de la séparation des pouvoirs et de leur
coopération et et leur équilibre. Il établit les règles sur lesquelles repose le
système de gouvernement.
Par conséquent, le droit constitutionnel ne peut être enfreint par aucun autre
droit promulgué au sein de l’État. Le juriste et professeur Maurice Duverger,
considère le droit constitutionnel comme "l’ensemble des règles de droit
fondamentales supérieures aux autres textes"1. Le droit constitutionnel s’est
cristallisé depuis le XVIIe siècle en Europe occidentale dans un contexte de
conflits politiques autour d'un processus socio-politique qui a abouti à une sorte
de coexistence pacifique entre le pouvoir d'une part et la liberté d'autre part au
sein de l'Etat-Nation.
Les juristes qui s'attachent au positivisme normatif décrivent le droit
constitutionnel comme "l'encadrement juridiques des phénomènes politiques"
selon l'expression de Maurice Hauriou. Cette definition privilégie une
conception normative qui tend vers la consécration à travers les règles de droit
constitutionnel de la primauté du juridique sur le politique, ou en d'autres termes
du normativisme juridique sur le decisionnisme politique. Dans ce sens, la
constitution et ce qu'on inclut dans le bloc de constitutionnalité prescrivent une
certaine configuration de l'organisation et du fonctionnement de l'Etat, et en
même temps définissent les droits et libertés des citoyennes et citoyens.

2-1 Le droit constitutionnel: coexistence pacifique


entre le pouvoir et la liberté
La doctrine constitutionnelle ou ce qui est commencement appelé le
"constitutionnalisme" a émergé depuis le 17e siècle afin de résoudre le problème
initial d'incompatibilité entre d'une part le pouvoir qui tend naturellement vers
l'excès comme cela a été theorisé par plusieurs philosophes et savants comme
Ibn Khaldoun et Montesquieu, et d'autre part la liberté au sens politique comme

1Maurice Duverger, Institutions politiques et droit constitutionnel (I. Les grands systèmes politiques
et II. Le système politique français) ,1970
obligation de neutralité axiologique de l'Etat, mais également comme obligation
de l'Etat de protéger les libertés en érigeant les droits de l'homme comme finalité
ultime de l'Etat de droit.
C'est dans ce contexte que les premières constitutions occidentales écrites ont vu
le jour, traduisant dans leurs caractéristiques une tendance vers l'équilibre entre
le pouvoir et la liberté dans le cadre de l’État-nation.

2-2 Conceptions du droit constitutionnel


Le droit constitutionnel est fondé sur un loi suprême qui est la constitution.
Selon le juriste Marcel Prélot, le droit constitutionnel est un moyen de pouvoir
(la technique du pouvoir), en ce sens qu’il est la science des règles juridiques
selon lesquelles s'opère, se stabilise, et se transfère le pouvoir politique.
Certes, la constitution décrète l'organisation de l'exercice du pouvoir politique
dans l'État, détermine les organes de l'Etat et leurs attributions respectives, ainsi
que les rapports qui s'établissent entre eux. Mais, la constitution décrète
également les droits et libertés à protéger et à faire respecter.
Deux conceptions du droit constitutionnel s'affrontent: la première au sens
matériel et la seconde au sens formel.
- Definition matérielle: Cette définition met l'accent sur le contenu et la
substance des règles constitutionnelles. Le droit constitutionnel englobe selon
cette conception toutes les règles qui sont d'essence ou de nature
constitutionnelle.
La définition du droit constitutionnel conformément à ce critère est fondée sur
l’objet traité par la règle de droit sans égard à la forme. La conception matérielle
du droit constitutionnel inclut toute règle constitutionnelle qui, par sa nature ou
sa substance, est considérée comme constitutionnelle, que ça soit le texte de la
Constitution, d’autres textes écrits qui peuvent être des lois constitutionnelles ou
même des lois ordinaires qui régissent des questions intrinsèquement de nature
constitutionnelle, ou encore des règles qui ne sont pas écrites comme la coutume
constitutionnelle.
Bien que les constitutionnalistes conviennent de définir le droit constitutionnel
en fonction de son essence et de son contenu, ils sont en désaccord sur les sujets
qui peuvent être considérés comme de nature constitutionnelle.
À cet égard, l’opinion dominante est de limiter les sujets de droit constitutionnel
à tout ce qui concerne l'organisation et le fonctionnement du pouvoir politique :
la nature du régime politique, la forme de l'Etat, l’organisation et l’exercice des
pouvoirs, ainsi que les droits et devoirs des citoyens vis-à-vis de l’État. Un
certain nombre d’auteurs plaident pour l’inclusion d’orientations économiques et
sociales parmi les questions de nature constitutionnelle en vertu de leur essence.
Le juriste George Burdeau, en définissant l'objet de la Constitution, soutient
qu’elle inclut, outre les fondamentaux du système de gouvernement, les
orientations politiques et idéologiques qui devraient structurer l'action des
pouvoirs au sein de l'Etat.
- Définition formelle:
Le critère de définition du droit constitutionnel devient selon cette conception la
forme que prend la constitution et non pas son contenu ou la substance des
règles ou les questions sur lesquelles il porte.
Ainsi, le droit constitutionnel s'identifie au droit de la constitution dans sa forme
écrite, en l'occurence un texte qui obéit à des procédures d'adoption et de
révision spécifiques qui sont distinctes de celles des lois ordinaires.
- Avantages et inconvénients des deux conceptions:

✓ Les avantages et inconvénients de la définition matérielle:


Parmi les avantages, on cite la prise en considération de toutes les questions
d'essence constitutionnelle abstraction faite de la forme dans laquelle les règles
sont contenues. Ceci présente néanmoins l'inconvénient de relativiser le principe
de la suprématie de la constitution dans la mesure ou la définition matérielle ne
coincide pas avec un texte écrit bien identifié et obéissant à des formalités
spéciales d'adoption et de révision.
✓ Les avantages et les inconvénients de la définition formelle:
La définition formelle présente l'avantage de consacrer le principe de la
suprématie de la constitution, mais il s'agit d'une conception restrictive qui
n'englobe pas tous les sujets de nature constitutionnelle qui seront régis par des
textes non constitutionnels. La définition formelle ignore également la
constitution coutumière.

3- Les sources du droit constitutionnel


Selon le critère objectif ou matériel, le droit constitutionnel inclut toutes les
règles de nature constitutionnelle, qu’elles proviennent du texte constitutionnel
écrit, des lois organiques, des lois ordinaires, de la coutume constitutionnelle ou
de la pratique constitutionnelle.

3.1 Le Texte constitutionnel écrit


Le texte constitutionnel écrit est rédigé par une autorité ou un organisme spécial,
différent d’un État à un autre selon des formalités d'adoption et de révision plus
ou moins démocratiques, et en fonction du texte s'il constitue une nouvelle
constitution ou juste une revision constitutionnelle.
Lorsqu'il s'agit d'une nouvelle constitution, L'autorité chargée d’établir une
nouvelle constitution est connue sous le nom d’assemblée constitutive
originaire, en ce sens qu'elle est fondamentalement différente des autres organes
centraux de l’État, puisqu’il ne tire pas son existence de la Constitution, mais
c'est cette dernière qui tire d'elle son existence.
Mais lorsqu'il s'agit d'une révision constitutionnelle, cette assemblée est appelée
"Assemblée constitutive dérivée" car son mandat se limite à modifier la
Constitution conformément aux dispositions constitutionnelles en vigueur. Ainsi,
il faut souligner que le pouvoir constitutif originaire est libre dans ses choix, et
que le pouvoir constitutif dérivé est limité dans l’exercice de ses fonctions en
vertu de la Constitution.
Dans l'histoire de l'écriture des textes constitutionnelles, on distingue grosso
modo deux approches. La première approche repose sur la concision et se limite
au strict minimum des dispositions liées à l’organisation et au fonctionnement de
l'Etat, et à la garantie des libertés et des droits, mais avec un style limpide et
d'une manière claire sans entrer dans les détails. Cette approche conduit à des
constitutions appelés "techniques" avec une structure interne obéissant à une
logique de division en chapitres et articles.
La seconde approche se caractérise par un style littéraire et des formules très
longues avec tous les détails, mais ce type de constitution s'efface aujourd'hui au
profit des constitutions techniques et généralement courtes.

3-2 Les lois organiques


Le texte constitutionnel est de nature normative, mais il s'agit souvent de courts
textes écrits qui ne contiennent pas tous les détails. C’est le rôle des lois
organiques de compléter, détailler et préciser le contenu de la Constitution.
Les lois organiques sont l’ensemble des lois adoptées par le législateur, que ce
soit de sa propre initiative (en particulier dans les États dotés de constitutions
souples ou coutumières) ou prescrits par le législateur constitutionnel, qui les
énumère expressément dans le texte constitutionnel (dans le cas des
constitutions rigides). Ces lois portent sur l’organisation et l'exercice du pouvoir
politique, ainsi que sur les autres questions de nature constitutionnelle.
Les lois organiques sont considérées comme une continuité des dispositions de
la Constitution et font partie donc du bloc de constitutionnalité se plaçant dans la
hiérarchie des normes dans une position intermédiaire au dessous du texte
constitutionnel, et au dessus des lois ordinaires. Ce qui explique la soumission
de ces lois à certaines procédures spéciales notamment dans les pays qui
disposent de constitutions rigides, ce qui exige l’intervention obligatoire du
tribunal constitutionnel pour contrôler leur constitutionnalité, c'est à dire leur
conformité à la constitution. Cette immunité constitutionnelle obligatoire fait
défaut aux lois ordinaires qui ne sont pas soumises à un contrôle constitutionnel
obligatoire mais seulement facultatif.

3-3 La coutume constitutionnelle


Tout d'abord, il convient de noter que la coutume est la première et la plus
ancienne source de droit. La coutume constitutionnelle est une source
importante des normes constitutionnelles, aussi bien pour les constitutions
coutumières que pour les constitutions écrites. Si la coutume constitutionnelle
est l’essence et le moteur des constitutions coutumières, elle joue en ce qui
concerne les constitutions écrites, un rôle interprétatif, complémentaire et même
une fonction modificative mais cette dernière fonction est contestée (comme
nous le verrons plus loin).

✓ Définition de la coutume constitutionnelle


Le juriste Jean Jicquel définit la coutume constitutionnelle comme "la règle non
écrite que les autorités de l’État ont convenu sur la nécessité et l'obligation de
suivre". La doctrine s’accorde sur la définition de la coutume constitutionnelle
comme une pratique émanant des institutions politiques qui se caractérise par la
répétition et la constance et la clarté (élément materiel), et qui crée chez eux le
sentiment moral de son caractère obligatoire (élément moral ou psychologique).

✓ Les éléments constitutifs de la coutume constitutionnelle


La coutume constitutionnelle apparait comme une pratique constitutionnelle
visant à compléter ou interpréter une disposition constitutionnelle, mais son
acquisition de la force juridique contraignante est conditionnée par la réunion de
deux éléments: L'élément matériel et l'élément moral. Cette pratique devrait
porter sur l’exercice par les institutions politiques de leurs compétences sur des
questions de nature constitutionnelle, avec le consentement ou au moins sans
opposition des autres institutions politiques. La répétition et la constance et la
clarté de la pratique devraient être confortés par l'intériorisation dans la
"conscience des institutions", de son caractère contraignant (opinio juris).

✓ Les types de la coutume constitutionnelle


La doctrine constitutionnelle fait la distinction entre trois types de coutumes
constitutionnelles exprimant trois rôles différents, cependant la doctrine est divisée
quant à l’évaluation du caractère légal de ces trois fonctions.

- Fonction interprétative : la coutume explicative se manifeste lorsque le


document constitutionnel ne clarifie pas la règle constitutionnelle, éliminant ainsi
l’ambiguïté et établissant une précision explicative. Ainsi, il ne crée pas la règle
constitutionnelle, mais contribue plutôt à son application progressive et à sa clarté.
La coutume interprétative ne pose pas de problème pour ce qui est de sa légalité
car possédant la même valeur juridique que les textes constitutionnels. D’une
manière générale, l’interprétation peut être politique (par les institutions politiques)
ou judiciaire (par le pouvoir judiciaire compétent, c.-à-d. le tribunal
constitutionnel).
- Fonction supplétive : La coutume supplétive apparaît lorsque le texte
constitutionnel laisse un vide dans la réglementation d’une question
constitutionnelle particulière, et la coutume supplétive intervient pour combler le
vide qui peut se manifester dans la pratique. Ainsi, la coutume supplétive crée une
règle constitutionnelle et une nouvelle disposition, contrairement à la coutume
interprétative, qui ne fait que clarifier ce qui est énoncé dans le texte écrit.
La majorité des juristes, dont George Burdeau, Marcel Brélot, André Hauriou et
Maurice Duverger, conviennent de rattacher la coutume supplétive à la coutume
interprétative en termes de valeur juridique, en acceptant son équivalence par rapport
aux textes constitutionnels écrits, sauf s'elle constitue une violation explicite de la
Constitution ou une modification de ses dispositions. Un courant opposé estime qu’il
n’est pas admissible pour la coutume de compléter la constitution en créant une
nouvelle règle constitutionnelle, surtout dans le cas des constitutions rigides. De toute
manière, le rôle de la coutume supplétive s'avère nécessaire lorsque le texte
constitutionnel est plutôt court ou dans le cas d'un Etat qui est doté d'une nouvelle
constitution.
- Fonction modificative: Une coutume modificative désigne une pratique ou une
conduite relative à l’organisation et au fonctionnement de l’État visant à modifier
le document constitutionnel, que ce soit par addendum -ajout- ou par suppression.

‣ La coutume modificative par ajout : accorde à un pouvoir au sein de l’État


une compétence qui n’a pas été établie dans le texte et qui est déduite par
l’interprétation. Un exemple de coutume modificative est la disposition de
la Constitution française de 1865 du pouvoir exécutif d’émettre des décrets
législatifs ayant force de loi, bien que la Constitution stipule explicitement
que la loi est la prérogative exclusive du Parlement et ne peut pas être
déléguée.
‣ Coutume modificative par suppression : lorsqu’un pouvoir au sein de
l’État s'abstient de mettre en application une compétence énoncée dans le
document constitutionnel écrit, que certains appellent "non-application
habituelle de la disposition constitutionnelle" ou "abandon de la règle
constitutionnelle"
La coutume modificative soulève le problème de sa légitimité en raison de sa
violation implicite de la Constitution, surtout si celle-ci est rigide.
Alors que des juristes reconnaissent la coutume modificative comme une expression
directe de la volonté de la nation souveraine, et admettent que la coutume
constitutionnelle puisse modifier la règle écrite, un courant opposé nie sa légalité, ce
qui est le point de vue du professeur Julien la Ferrière quand il affirme que "L’idée de
la coutume constitutionnelle, c’est-à-dire qu’il y a une règle non écrite mais
juridiquement contraignante, est en fait contraire à l’idée d’une constitution rigide et
écrite". Et le juriste George Vedel rejette la nature juridique de la coutume
constitutionnelle et va jusqu'à la considérer comme "un renoncement à l’idée de la
Constitution dans son sens positiviste, ainsi que la reconnaissance implicite que le
droit constitutionnel peut trouver sa source dans la violation de la Constitution, ou
dans la répétition de cette violation"

4- Les Types de constitution

On distingue plusieurs types de constitutions en se basant sur les 3 critères suivants:


- Premier critère: La procédure d'élaboration et la présence de la volonté populaire à
l'origine du texte constitutionnel. Selon ce critère, on distingue les constitutions
démocratiques de celles non démocratiques
- Second critère: la forme de la constitution, et à ce niveau on distingue les
constitutions écrites et les constitutions coutumières.
- Troisième critère: le critère concernant la procédure de révision. En fonction de ce
critère, on distingue les constitutions souples et les constitutions rigides.

4.1 les constitutions démocratiques et les constitutions non démocratiques


les constitutions peuvent être établies selon deux procédés : les procédés
démocratiques et les procédés non démocratiques.

- Les procédés démocratiques

Les procédés démocratiques font prévaloir la volonté de la nation car elle seule
possède la souveraineté et constitue la source de tous les pouvoirs. Une constitution
est jugée démocratique parce que le peuple intervient au début et/ou à la fin du
processus. Ainsi, il existe deux principaux procédés : l’Assemblée constituante et le
référendum constitutionnel.

- L'Assemblée constituante : Sur la base du principe de la souveraineté populaire


et conformément aux principes de la démocratie représentative (suffrage
universel direct...), le peuple élit une assemblée, généralement appelé
"Assemblée constituante", dont la tâche est d’élaborer la Constitution et de
l'adopter en leur nom.
Ce procédé a été initiée en Amérique du Nord et en Europe, pour mettre en place les
premières constitutions modernes, puis de nombreux pays aux XIXe et XXe siècles
ont suivi la même méthode.

- Référendum constitutionnel : Un référendum constitutionnel désigne la


soumission d’un projet de constitution au peuple pour donner son acceptation ou son
rejet. Selon ce procédé, un projet de constitution est rédigé par une assemblée élue ou
par une commission technique, et ensuite il est présenté au verdict populaire à travers
un référendum.

Cette méthode traduit une forme de démocratie directe, et l’opinion dominante dans
la doctrine considère que le référendum constitutionnel est le moyen le plus
démocratique dans l’élaboration du document constitutionnel, notamment lorsqu'il
intervient dans la continuité de son adoption par une assemblée élue.

- Procédés non démocratiques

En ce qui concerne les procédés non démocratiques, Leur principale caractéristique,


c'est la non prise en compte de la volonté populaire dans l'élaboration de la
constitution. On distingue à ce niveau la constitution octroyée du pacte
constitutionnel.

- la constitution octroyée: La Constitution sera élaborée et adoptée de manière


unilatérale par le souverain, sans que quiconque y participe. Dans cette configuration,
la constitution n'est qu'une "concession" du monarque à ses sujets.

- Le pacte constitutionnel :

Le procédé du pacte constitutionnel est un procédé moins autoritaire que l'octroi dans
lequel la constitution est établie d'un commun accord entre un Individu qui détient
l'essentiel du pouvoir politique, et une ou plusieurs assemblées plus ou moins
représentatives. Ce qui caractérise ce procédé est que le gouvernant ne monopolise
pas le pouvoir de décision (comme dans le procédé de l'octroi), mais dans lequel la
volonté du peuple est partiellement prise en considération, mais qui n'est pas
complètement libre (comme dans les méthodes démocratiques)
4-2 Les constitutions écrites et les constitutions coutumières

Le caractère prédominant des constitutions d’aujourd’hui est la Constitution écrite.


En effet, cette distinction selon la forme devient relative, dans la mesure ou l'accent
est mis sur l’élément prédominant des normes constitutionnelles. En effet, les États
dotés d’une constitution écrite continuent à développer des normes coutumières
constitutionnelles, et le très peu d'Etats avec des constitutions coutumières ont adopté
certains lois constitutionnelles écrites, comme au Royaume-Uni.

- La constitution coutumière: C'est la constitution dont le contenu réside dans un


ensemble de traditions d'usages et de pratiques non écrites qui ont acquis avec le
temps une valeur juridique contraignante.

Aussi, selon Georges BURDEAU, il y a constitution coutumière "lorsque les règles


relatives à l’organisation politique d'un pays résultent des usages et précédents sans
avoir jamais été codifiés dans un texte officiel". Cette définition rejoint celle de Jean
GICQUEL qui définit la constitution coutumière comme « une règle de droit non
écrite qui résulte des précédents concordants auxquels les pouvoirs constitués
acquiescent ou se soumettent ».

La Constitution coutumière se compose de règles coutumières qui sont établies


depuis longtemps pour régir le système de gouvernement de l'Etat. La coutume
constitutionnelle est la source et le moteur de la Constitution coutumière.

Les constitutions coutumières présentent l'avantage d'être souples et une capacité


d'adaptation avec l'évolution de la réalité politique, mais prennent généralement
beaucoup de temps pour se former, et peuvent être entachées par une certaine
ambiguïté et imprécision.

Les constitutions non écrites ont prévalu dans le monde jusqu’à la promulgation de la
première Constitution des États-Unis d’Amérique en 1787 en tant que constitution
écrite au sens moderne. Il suffit que la majorité des règles constitutionnelles en
vigueur au sein de l’Etat ne soient pas écrites pour considérer la Constitution comme
coutumière. La Constitution du Royaume-Uni se distingue comme le modèle le plus
célèbre de la Constitution coutumière, qui a aussi intégré progressivement avec le
temps des documents écrits de nature constitutionnelle.
-La constitutions écrite: Nous sommes devant une Constitution écrite lorsque la
majorité des règles constitutionnelles sont écrites dans un ou plusieurs documents
constitutionnels avec la possibilité de recourir aux coutumes constitutionnelles
comme sources complémentaires. Les constitutions écrites sont soumises à des
procédures d'élaboration et de révision spécifiques.

• Les Avantages et les inconvénients des constitutions écrites :

- Clarté et précision : pour que ses dispositions ne soient pas ambiguës, en réduisant
les marges d' interprétation par les détenteurs du pouvoir politique.

- Le document écrit permet à chacun de se référer plus facilement au document


constitutionnel pour connaître les fondements et les compétences des pouvoirs, ainsi
que les droits et libertés qui lui sont conférés et les devoirs qui lui incombent.

- Le rôle éducatif en particulier lorsque la Constitution est soumise au référendum, et


que le projet de constitution ou de revision constitutionnelle suscite un débat
concomitant sur le projet de société. Cela constitue un facteur d'apprentissage de la
démocratie.

- La définition précise des attributions de l'Etat fédéral et des états fédérés en ce qui
concerne les Etats composés n'est possible pratiquement que grâce à une constitution
écrite.

Néanmoins, il exige quelques inconvénients :

- Un niveau minimal de réactivité de la Constitution écrite aux variables politiques,


économiques et sociales, en particulier pour les constitutions rigides.

- Les rédacteurs de la Constitution peuvent être soumis à l’influence ou à la pression


de certaines circonstances politiques ou de certaines orientations idéologiques, ce qui
génère des dispositions constitutionnelles qui peuvent ne pas être compatibles avec
les intérêts du pays ou par rapport à un processus de démocratisation.

4-3 Les constitutions souples et les constitutions rigides


Du point de vue de la place du bloc de constitutionnalité dans la pyramide des
normes, La distinction entre constitution souple et constitution rigide est la plus
importante car elle comporte une conséquence juridique liée au principe de la
suprématie de la constitution. Dans les constitutions rigides, ce principe est appliqué
de manière pointue, alors que dans les constitutions souples, les lois ordinaires ont la
même valeur juridique que la constitution, même s'elles jouissent d'un statut supérieur
du point de vue politique.

- La constitution rigide: Une constitution est dite rigide lorsque sa procédure de


révision est prévue par la constitution, elle-même, et obéit à des procédures
spéciales en termes d'initiative, de prise en consideration de cette initiative et en
termes de la majorité requise pour l'adoption (les deux tiers ou les trois
cinquièmes), ainsi que la soumission du projet de révision constitutionnelle au vote
du peuple par voie de référendum. La procédure est solennelle et plus complexe à
mettre en œuvre que la procédure de modification des lois ordinaires.

Les rédacteurs de la Constitution rigide visent à assurer une sorte d'immunité de la


constitution conforme au principe de sa suprématie par rapport aux lois et donc vis-à
vis du pouvoir législatif.

La rigidité de la Constitution peut être partiellement absolue pour certaines


dispositions, lorsque la Constitution stipule que certains articles de la Constitution ne
peuvent jamais être modifiés de façon permanente. A titre d'exemple, selon l'article
175 de la constitution marocaine "Aucune révision ne peut porter sur les dispositions
relatives à la religion musulmane, sur la forme monarchique de l'État, sur le choix
démocratique de la nation ou sur les acquis en matière de libertés et de droits
fondamentaux inscrits dans la présente Constitution".

Il existe également une autre forme de rigidité qui est absolue pour l'ensemble de la
constitution mais de façon temporaire : lorsque le législateur constitutionnel empêche
toute révision constitutionnelle pendant un délai de temps. L'objectif est de garantir
une certaine stabilité des dispositions de la Constitution pendant un certain temps.
Cette forme de rigidité permet de sauvegarder la stabilité politique notamment suite à
l'adoption d'une nouvelle constitution.
- La constitution souple: Elle peut être modifiée de la même manière et selon les
mêmes procédures que les lois ordinaires, et le législateur a le pouvoir de modifier la
Constitution de la même manière que toute loi ordinaire. La distinction entre les
normes constitutionnelles et les lois ordinaires disparaît sur le plan formel.

L'exemple type d'une constitution flexible est la Constitution coutumière anglaise, où


le Parlement peut modifier les règles constitutionnelles coutumières
(prédominantes) , ou les textes écrits qui coexistent avec la constitution coutumière
en suivant les mêmes procédures valables pour la modification des lois ordinaires.

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