Vous êtes sur la page 1sur 23

La psychose et la métaphore

Filippo Dellanoce, Houria Abdelouahed


Dans Recherches en psychanalyse 2022/1 (N° 33), pages 43 à 64
Éditions Laboratoire CRPMS, Université de Paris
DOI 10.3917/rep2.033.0043
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

Article disponible en ligne à l’adresse


https://www.cairn.info/revue-research-in-psychoanalysis-2022-1-page-43.htm

Découvrir le sommaire de ce numéro, suivre la revue par email, s’abonner...


Flashez ce QR Code pour accéder à la page de ce numéro sur Cairn.info.

Distribution électronique Cairn.info pour Laboratoire CRPMS, Université de Paris.


La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le
cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque
forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est
précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.
La psychose et la métaphore

Filippo DELLANOCE
Psychanalyste. Docteur en Psychanalyse et Psychopathologie (Université de Paris).
Chercheur associé au laboratoire LIRCES – UCA Nice.
Université Côte d’Azur (UCA)
Campus Carlone – 98 boulevard Edouard-Herriot – 06209 Nice Cedex 3 – France

Houria ABDELOUAHED
Psychanalyste. Professeur des Université, Université Paris 13.
Université Paris 13
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
99 avenue Jean-Baptiste-Clément – 93430 Villetaneuse – France

RÉSUMÉ
Dans le Séminaire III consacré à l’étude des psychoses, Lacan dit de Schreber
qu’il est certes un écrivain, mais pas un poète. Le délire de Schreber et, par
extension, la psychose, sont essentiellement caractérisés par un manque de
métaphore. Dans notre contribution, nous examinerons d’abord la littérature
psychanalytique et psychiatrique concernant le diagnostic de la psychose de
Schreber, puis nous analyserons la thèse de la forclusion du signifiant Nom-du-
Père comme cause de la psychose. Pour comprendre la fonction métaphorique
du signifiant, nous examinons ensuite la nature linguistique de la métaphore,
sur la base des théories d’Aristote et de U. Eco. La métaphore est un instru-
ment de connaissance cognitive et additive : par la métaphore, nous attei-
gnons une nouvelle connaissance, et la métaphore apporte la connaissance
en dessinant par le langage une nouvelle caractéristique du fonctionnement
de la réalité. Une fois que la première métaphore, celle paternelle, est absente,
c’est la métaphore comme fonction de connaissance additive qui manque. Par
conséquent, aucune autre métaphore ne sera possible, puisque le sujet n’a pas
rencontré la possibilité pour une nouvelle signification d’apparaître, celle-
ci apportée par le travail du métaphorique. Nous proposons enfin quelques
considérations conclusives sur le langage psychotique, ainsi qu’une nouvelle
articulation entre métaphore, doute et certitude délirante.
MOTS-CLÉS : psychose, métaphore, D. P. Schreber, J. Lacan, U. Eco

ABSTRACT
Psychosis and Metaphor
In Seminar III devoted to the study of psychoses, Lacan says of Schreber that
he is certainly a writer, but not a poet. Schreber’s delusion and, by exten-
sion, psychosis, are essentially characterized by a lack of metaphor. In our

Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1) 43


Filippo Dellanoce et Houria Abdelouahed

contribution, we will first examine the psychoanalytical and psychiatric liter-


ature regarding the diagnosis of Schreber’s psychosis, and we then analyze
the thesis of the forclusion of the signifier Name-of-the-Father as the cause of
psychosis. To understand the metaphorical function of the signifier, we then
examine the linguistic nature of metaphor, based on the theories of Aristotle
and U. Eco. Metaphor is an instrument of cognitive and additive knowledge:
through metaphor, we attain new knowledge, and metaphor brings knowl-
edge by drawing through language a new feature of the functioning of real-
ity. Once the first metaphor, the paternal one, is absent, it’s the metaphorical
as a function of additive knowledge that is missing. Consequently, no other
metaphor will be possible, since the subject has not encountered the possibil-
ity for a new meaning, brought by the work of the metaphorical, to appear.
We finally submit some conclusive considerations on psychotic language, as
well as a new articulation between metaphor, doubt and delusional certainty.
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
KEYWORDS: psychosis, metaphor, D. P. Schreber, J. Lacan, U. Eco

RESUMEN
La psicosis y la metáfora
En el Seminario III sobre el estudio de las psicosis, Lacan dice de Schreber que
es efectivamente un escritor, pero no un poeta. El delirio de Schreber y, por
extensión, la psicosis, se caracterizan esencialmente por una falta de metá-
fora. En esta contribución, examinaremos primero la literatura psicoanalí-
tica y psiquiátrica relativa al diagnóstico de la psicosis de Schreber y luego
analizaremos la tesis de la forclusión del significante Nombre-del-padre como
causa de la psicosis. Para entender la función metafórica del significante,
examinamos a continuación la naturaleza lingüística de la metáfora, basán-
donos en las teorías de Aristóteles y U. Eco. La metáfora es un instrumento de
conocimiento cognitivo y aditivo: a través de ella alcanzamos nuevos cono-
cimientos, y la metáfora aporta conocimiento al dibujar, por el lenguaje, un
nuevo elemento del funcionamiento de la realidad. Al faltar la primera metá-
fora, la paterna, lo que se pierde es la metáfora como función del conocimiento
aditivo. En consecuencia, ninguna otra metáfora será posible, ya que el sujeto
no ha encontrado la posibilidad de que aparezca un nuevo significado, traído
por el trabajo de lo metafórico. Finalmente, proponemos algunas considera-
ciones finales sobre el lenguaje psicótico, así como una nueva articulación
entre metáfora, duda y certeza delirante.
PALABRAS CLAVE: psicosis, metáfora, D. P. Schreber, J. Lacan, U. Eco.

44 Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1)


La psychose et la métaphore

RESUMO
A psicose e a metáfora
No Seminário III dedicado ao estudo da psicose, Lacan diz de Schreber que ele
é de fato um escritor, mas não um poeta. A ilusão de Schreber e, por extensão,
a psicose, são essencialmente caracterizadas por uma falta de metáfora. Nessa
contribuição, primeiro examinaremos a literatura psicanalítica e psiquiátrica
relativa ao diagnóstico da psicose de Schreber e depois analisaremos a tese da
forclusão do significante Nome-do-pai como causa de psicose. Para entender
a função metafórica do significante, examinamos então a natureza lingüís-
tica da metáfora, com base nas teorias de Aristóteles e U. Eco. A metáfora é
um instrumento de conhecimento cognitivo e aditivo: através dela alcança-
mos novos conhecimentos, e a metáfora traz o conhecimento desenhando,
pela linguagem, uma nova característica do funcionamento da realidade. Se
a primeira metáfora, a paterna, está ausente, é a metáfora como função do
conhecimento aditivo que fica faltando. Por conseguinte, nenhuma outra
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
metáfora será possível, já que o sujeito não encontrou a possibilidade de um
novo significado, trazido pelo trabalho da metáfora, aparecer. Finalmente,
propomos algumas considerações finais sobre a linguagem psicótica, bem
como uma nova articulação entre metáfora, dúvida e certeza delirante.
PALAVRAS-CHAVE: psicose, metáfora, D. P. Schreber, J. Lacan, U. Eco

1. Introduction : questions de diagnostic


de la maladie de D. P. Schreber

Au sein de la littérature psychanalytique et psychiatrique, la maladie de


Daniel Paul Schreber a fait couler beaucoup d’encre.

Le premier mot concernant sa propre maladie revenant de droit à l’auteur


des Mémoires qui affirmait clairement être un « névropathe » (Nervenkrank)
et non un malade mental (Geisteskrank)1, le dossier médical de la première
admission de Schreber à l’asile de Sonnenberg 2 du 8 décembre 1884 diagnos-
tique une « Hypocondrie grave » (Baumeyer, 1956 (1979), p. 172) et évoque une
« tentative de suicide » le 30/01/1885 (Weber, 1903 (1975), p. 419). Lors de la
seconde admission (1893-1894), Schreber souffre d’hallucinations visuelles,
auditives et olfactives. Il fait encore des tentatives de suicide et évoque sa

1. Z. Lothane (1989, p. 222) suggère que Schreber pourrait avoir tiré cette distinction du rapport
que son médecin, Flechsig, avait produit pour l’hôpital dans lequel il travaillait pendant la période
1882-1886.
2 . … non pas à Sonnenstein, comme il apparaît dans la traduction française à (1956 (1979), p. 172) :
Cf. (Israëls, 1986, p. 188).

Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1) 45


Filippo Dellanoce et Houria Abdelouahed

peur d’agressions indécentes puisqu’il « se croit » une jeune fille. Le dossier


de l’admission à l’asile de Sonnenstein (1894-1902) avance dubitativement le
diagnostic de « paranoïa » (Baumeyer, 1956 (1979), p. 174) le docteur Weber
écrit, dans son Expertise médico-légale jointe aux Mémoires, que la maladie de
Schreber, à considérer dans la phase initiale comme un « délire hallucina-
toire », « se dégagea et cristallisa [en] un tableau de paranoïa de plus en plus
caractérisé ». On note que parallèlement à un délire bien organisé qui inclut
aussi de « fausses perceptions », « la présence d’esprit et l’orientation restent
inaltérées, la logique est conservée, […] les réactions affectives exagérées
sont absentes, l’intelligence et la mémoire n’ont pas eu à subir d’altération
sensible » (Weber, 1903 (1975), p. 425)3 . Le dernier dossier (1907-1911) parle en
revanche d’un état « plus mélancolique », toujours « gravement halluciné »,
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
caractérisé par une tentative de suicide par défenestration.

E. Bleuler diagnostique pour Schreber la dementia praecox, et C. G. Jung, la


schizophrénie (Dally, 1994), en ligne avec K. Jaspers (1913/1959 (2016), p. 152).
L. A. Sass (1994, p. 106) considère Schreber comme « the quintessential case
of schizophrenia in our century » – et il le réaffirme en 2015, en décrivant
le délire du Président comme « a paradigmatic expression of paranoid schi-
zophrenia » (2015, p. 144). W. Niederland (1974) introduit pour Schreber la
catégorie de « paranoid personality » (1974, p. 222) ; F. Ténório parle de « para-
noid delusion » (2016, p. 10) et, de la même manière, F. Arantes-Gonçalves
(2018) et S. Moritz (2010, p. 150) reconnaissent dans Schreber à la fois le
délire de persécution/paranoïde et de grandeur. Quant à T. H. McGlashan, il
affirme que « Today, according to […] (DSM-IV), Schreber would meet crite-
ria for schizophrenia, the Kraepelinian “equivalent” of DP [dementia para-
noïdes] » (2009, p. 478).

Contre ce diagnostic, K. G. Koehler (1981, p. 695) propose, en revanche,


un cadre de « major depressive disorder with bipolarity tendencies » dans
la période qui anticipe le « schizophrenic switch » en février 1894, au
moment de la deuxième hospitalisation. Sur la même ligne, A. A. Lipton
(1984) suggère de considérer la pathologie de Schreber comme un « affective

3. J. M. Alvarez (1993 (1998), p. 183) démontre que, si Weber avait fait son expertise entre 1910 et
1915, il aurait considéré Schreber comme schizophrénique/dément du type paranoïde.

46 Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1)


La psychose et la métaphore

disorder » (bipolaire) 4 . Z. Lothane, qui a consacré une grande partie de


son travail à Schreber, écrit que les hallucinations de Schreber concernant
Flechsig seraient, en vérité, des perceptions réelles du comportement et de
la personnalité du médecin 5 présentées sous forme hallucinatoire et proba-
blement induites par le traitement pharmacologique (morphine, bromure
et hydrate de chloral) à l’origine aussi des illusions perceptives et du délire.
Ensuite, Koehler note que Weber n’a jamais été un persécuteur pour Schreber
bien qu’il fût celui qui rédigea un rapport contre la liberté de Schreber et la
publication de ses Mémoires. La phase paranoïaque – que Lothane considère
comme « the hypomanic, agitated, hallucinatory and delusional phase of
melancholia » (1992, p. 348) – commença seulement pendant la deuxième
admission à l’hôpital de Flechsig (1894), là où Schreber parle de la vision du
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
« meurtre d’âme ». Lorsque Weber émit son diagnostic de paranoïa, Schreber
avait déjà dépassé cette phase de persécution proprement dite et était en
train de construire son délire cosmologique sur sa transformation en femme
et sur la fin du monde. Pour ces raisons, Lothane propose un diagnostic diffé-
rentiel de « psychotic depressive illness » (1989, p. 223).

Freud considère enfin la maladie de Schreber comme un tableau mixte :


Schreber « mérite le nom de démence paranoïaque, relevant du caractère
paraphrénique […et] du caractère paranoïde » (1911 (1995), p. 76). Concernant
ce diagnostic, C. E. Pletsch (1982, p. 285) rappelle qu’avec le cas Schreber,
Freud voulait établir la paranoïa en tant que catégorie diagnostique. En
suivant J. M. Alvarez et al., (1993 (1998), p. 43) – qui parcourent l’histoire de
la paranoïa –, nous pouvons cependant aussi dire que Freud utilisa toujours
le terme de paranoïa puisqu’il était intéressé à la dimension de production
propre au délire plutôt qu’à celle déficitaire caractéristique de la nosographie
de Kraepelin (Alvarez, Bachs & Guilana, 1993 (1998), p. 52), alors que, selon
J. Garrabé (1993 (1998), p. 56), lorsqu’il réaffirme la paranoïa de Schreber, Freud
est aussi « fidèle » à la nosographie de la sixième édition du Traité de Kraepelin,

4. Effectivement, il manque chez Schreber, comme il le souligne lui-même dans ses Mémoires, la
« désagrégation de la pensée – pour les psychiatres allemands toujours le symptôme le plus impor-
tant de la schizophrénie » (Peters 1993 (1998), p. 67) – chose qui pourrait faire abandonner l’idée de
la schizophrénie, comme Weber lui-même l’avait observé.
5 . Schatzman (1973, p. 101) a d’ailleurs démontré que le docteur Flechsig avait effectivement prati-
qué la castration sur au moins trois patients de son hôpital comme forme de cure (P. E. Flechsig, « Zur
gynaekologischen Behandlung der Histerie », Neurologisches Contralblatt, vol. 3, n. 19 et 20, p. 46).

Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1) 47


Filippo Dellanoce et Houria Abdelouahed

qui encore l’évoquait, mais aussi attentif à la dernière conception de ce même


cadre nosographique datant de la dernière édition du Traité (p. 57).

Nous constatons ainsi qu’il existe donc trois approches diagnostiques


de la maladie de Schreber : schizophrénie, trouble bipolaire et paranoïa. Il
en reste, toutefois, une quatrième : celle de U. H. Peters (1993 (1998), p. 65)
qui récupère le cadre nosographique de « psychose d’angoisse », faisant
partie des psychoses émotives décrites et introduites par Wernicke, empirée
par une psychose organogénique conséquente à une assomption prolongée
du brome. Dans ce cadre, « toutes les modifications psychopathologiques
peuvent être comprises comme émanant d’une émotionnalité modifiée
pathologiquement par l’angoisse ». Cette dernière parvient même à modifier
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
« l’image psychopathologique » (p. 66).

2. Le rejet du signifiant primordial

La question du diagnostic de Schreber, aussi intéressante et controversée


soit-elle, laisse néanmoins la place à un constat de base dont l’importance
est majeure et qui se réfère à la nature propre de la psychose au-delà de ses
déclinaisons et variations nosographiques particulières : « Ce que Schreber a
en commun avec les autres fous », c’est qu’il « croit à la réalité de son halluci-
nation » (Lacan, 1955-1956 (1981), p. 87, 11 janvier 1956). La thèse n’est pas une
originalité de J. Lacan : en ordre chronologique, il suffit de lire, par exemple,
d’abord la Note sur la monomanie homicide (1827) de E. Esquirol – qui affirme,
par rapport aux « fous », qu’ils sont « convaincus que ce qu’ils sentent est
vrai » et que « leur conviction est quelquefois plus forte que leur jugement »
(4) – ou alors l’immense Psychopathologie générale (1913) de Jaspers – dont la
traduction française de la septième et dernière édition de 1959 reste toujours
à faire – pour s’apercevoir que ce dernier aussi avait caractérisé le délire d’une
manière analogue :
On appelle vaguement idées délirantes tous les jugements faux, qui
possèdent à un haut degré [...] les caractères extérieurs suivants : 1. la
conviction extraordinaire avec laquelle ils sont maintenus, la certitude
subjective incomparable. 2. Le fait qu’ils ne sont pas influencés par
l’expérience concrète et les réfutations rigoureuses. 3. L’impossibilité
du contenu. (1913/1959 (2016), p. 103, traduction nôtre)

48 Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1)


La psychose et la métaphore

Autant, selon Esquirol, Jaspers et Lacan, la certitude devient « l’un des


traits majeurs pour le repérage diagnostique de la structure psychotique »
(Brémaud, 2014, p. 773). Mais deux nouveautés, connues désormais par tous
les psychanalystes, sont introduites par Lacan par rapport à son prédéces-
seur allemand.

1- Selon Jaspers, le délire est à concevoir comme un « trouble de la signi-


fication », pour ainsi dire : « le savoir des significations qui s’impose de
façon immédiate est l’expérience délirante primaire », affirme-t-il dans la
première partie phénoménologique de sa Psychopathologie (p. 107). Or, tout au
contraire, selon Lacan la cause du délire est à placer plutôt dans les rapports
possibles que le sujet peut entretenir avec le(s) signifiant(s).
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
2- Lacan a vu dans le manque au sein de l’inconscient – à entendre comme
l’Autre, l’ordre symbolique – d’un seul signifiant spécifique dit « primor-
dial » la cause de la psychose. Ce signifiant, qu’il va appeler le Nom-du-Père,
manquerait suite à un « rejet », suite à la mise en place du mécanisme de
la Verwerfung ou forclusion qui l’aurait placé à l’extérieur, dans le réel, en lui
rendant impossible l’expédition de sa fonction métaphorisante – la « méta-
phore paternelle ». C’est ce défaut du Nom-du-Père qui va précipiter le
« désastre croissant de l’imaginaire » (Lacan, 1958 (1966), p. 577), et « ce qui
a été rejeté du symbolique réapparaît dans le réel » (1955-1956 (1981), p. 57)
sur un mode hallucinatoire. Le langage se trouve, par exemple, pris dans « ce
désastre » de « Je viens de chez le charcutier » (p. 55-68), le désastre d’un
signifiant qui tient un rôle autre que symbolique et qui se trouve éjecté de
l’inconscient comme « truie » lorsqu’il y a un échec de la métaphore pater-
nelle comme moment structural pour le sujet. C’est cette forclusion qui est
responsable de la psychose de Schreber, laquelle psychose se caractériserait
essentiellement par l’absence, dans le langage, de toute métaphore.

Après une révision des positions de Mauritz Katan, d’Ida Malcapine,


d’Herman Nunberg et d’autres auteurs de langue anglaise (Prado de Oliveira,
1979), Lacan, dans le Séminaire III, insiste sur « la dissolution imaginaire »
et l’échec du langage, dans la psychose, à être métaphorique. Le langage
psychotique manque de métaphore : « On n’y rencontre jamais rien qui
ressemble à une métaphore », écrit-il (1955-1956 (1981), p. 247, 2 mai 1956), et
si Schreber « est assurément écrivain, il n’est pas poète » (1955-1956 (1981),

Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1) 49


Filippo Dellanoce et Houria Abdelouahed

p. 91, 11 janvier 1956). Cette absence de métaphore fait que les Mémoires d’un
névropathe ne nous introduisent pas « à une dimension nouvelle de l’expé-
rience » puisqu’elles ne nous donnent pas accès à un monde autre, tel que
par exemple le font les créations de Saint Jean de la Croix, Proust, Gérard de
Nerval (1955-1956 (1981), p. 91, 1er janvier 1956).

Là où l’hystérique nous a montré comment la parole délivre « le sens


emprisonné » qui fut écrit sur « le sable de la chair » (Lacan (1953) 1966,
p. 280), là où elle a témoigné que les mots peuvent l’« engrosser », la faire
« identifier à l’objet du penis-neid » ou encore « représenter le flot d’urine de
l’ambition urétrale, ou l’excrément retenu de la jouissance avaricieuse » de
manière telle que l’hystérique est « pris[e] dans toutes les images corporelles
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
qui captivent le sujet » (Lacan (1953) 1966, p. 301), tout autre est le rapport
du psychotique au corps et au langage. Que la phrase maternelle soit décor-
tiquée puis convertie assez rapidement en une ou plusieurs langues étran-
gères, faisant ainsi du langage un langage « désossé » (G. Deleuze) comme
chez L. Wolfson (1970), ou que la patiente dise : « C’est comme s’il y avait une
drôle de merde là-dedans qui va vers la gauche » pour exprimer : « Je sens que
cette drôle de merde de thérapeute, qui vient d’entrer dans cette pièce, est
en train de devenir communiste » (Searles, 1977, p. 203-204), ou que chaque
syllabe devienne un poignard (Bion, 1983) (et nous pouvons multiplier les
exemples), le langage dans la psychose témoigne du déchaînement du signi-
fiant ou de sa prise dans le filet des processus primaires hors la dimension
symbolique. Désarticulé, il n’atteste plus de son assujettissement à l’ordre
symbolique 6 . Rappelons que la remarque de Freud au sujet de la malade de
Tausk va dans ce sens : elle dit, de son-bien aimé, qui l’a séduite, qu’il est
un « tourneur d’yeux », qu’il lui a « retourné les yeux » (1915 (2010), p. 80).
Le psychotique appréhende les mots comme des choses. La métaphore fait
défaut dans la psychose.

3. La métaphore en question

Dans son texte Sémiotique et philosophie du langage (1984), U. Eco rappelle


que si l’on considère la bibliographie raisonnée sur la métaphore, qui compte

6. Cf. les différents articles sur le mîthâq (Le pacte primordial), (Abdelouahed, 2003).

50 Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1)


La psychose et la métaphore

environ 3000 titres et des milliers de pages, « la plupart n’ajoutent rien de


nouveau aux deux ou trois premiers concepts fondamentaux énoncés par
Aristote (p. 140). D’où aussi notre intérêt de s’y référer.

Dans la Poétique, Aristote définit la métaphore comme « le transport à une


chose d’un nom qui en désigne une autre, transport du genre à l’espèce, de
l’espèce au genre, de l’espèce à l’espèce ou encore d’après le rapport d’analo-
gie » (1465b). Ainsi, par transport, Aristote vise le mouvement consistant en
la transposition d’un nom étranger (allotrios) qui désigne une autre chose. Le
mouvement consiste en un changement selon le lieu. De cette définition, nous
retenons la notion d’écart, écart par rapport à un usage ordinaire, courant, ou
« bas », comme le dit Aristote. La métaphore n’engendre un ordre nouveau
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
qu’en produisant un écart avec l’ordre antérieur. Cette idée négative d’écart
s’accompagne d’une idée positive d’emprunt. De par l’écart et l’emprunt, la
métaphore échappe à la banalité en usant des mots étrangers à l’usage quoti-
dien (1458a) : la métaphore produit un écart avec la langue courante, que
ça soit au niveau élevé de la poésie, ou bien au niveau intermédiaire de l’ars
oratoria (Eco, Aristotele e la metafora. Conoscenza, similarità, azione, enuncia-
zione, 2005, p. 33).

La métaphore procède par transgression, à savoir la violation d’un certain


ordre établi du langage, d’un classement ou d’une structure logique. Mais
cette transgression, si elle défait un certain ordre, c’est pour en inventer un
autre, producteur lui aussi de sens. Ainsi, la transgression, comme l’exprime
Paul Ricœur, n’est que « l’envers d’une logique de la découverte » (Ricœur,
1975, p. 32). Mais dans cette transgression et dans la tension et l’écart, la
ressemblance est nécessaire. La dynamique de la métaphore repose sur
l’aperception de la ressemblance : « Bien faire de la métaphore, c’est bien aper-
cevoir les ressemblances » (Poétique, 1459a). Ainsi, la substitution se fait à
l’intérieur de la sphère de la ressemblance. S’il y a un écart par rapport à
l’usage courant, d’un point de vue dynamique, la métaphore procède d’un
rapprochement entre la chose à nommer et la chose étrangère qui donne son
nom ou à laquelle on emprunte le nom. Cette ressemblance est indispensable
car elle est ce qui guide et produit l’énoncé qui s’établit entre les termes en
dépit de leur « distance ». Des choses éloignées paraissent ainsi voisines,
et les métaphores rapprochent des choses non évidentes. La ressemblance
devient ainsi une « catégorie logique », et il revient à la métaphore de révéler

Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1) 51


Filippo Dellanoce et Houria Abdelouahed

la structure logique du semblable, un semblable qui est vu, perçu, malgré sa


différence. La langue doit avoir à sa disposition aussi bien la ressemblance
que la dissemblance ; le pouvoir d’expression d’une tournure vient de sa
différence et sa dissemblance avec d’autres tournures et d’autres styles.

Dans sa transgression, la métaphore reconnaît la logique de la ressem-


blance. Et le semblable dans la tension et l’écart n’est opérant que parce
qu’il n’est pas l’identique. Par l’écart, le semblable n’est pas l’identique. Et la
distance n’abolit pas la catégorie logique mais enrichit, au contraire, le travail
de pensée et l’opération prédicative en obéissant à une logique de la pensée.
Qu’est-ce à dire si ce n’est que la « ressemblance est plus construite que vue »
(Ricœur, 1975, p. 248) ? Construction nécessitant la présence d’altérité en soi.
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
C’est à cette seule condition que la pensée « regarde en entendant et entend
en regardant » (Heidegger, 1962, p. 127).

Si le bouleversement de la structure discursive engendrait une rupture avec


le sens, nous ne serions pas dans la catégorie de la métaphore mais dans un
véritable brouillage. Ainsi, dans un décollement par rapport au sens littéral, le
travail de la métaphore, tout en déconstruisant un ordre pour en construire un
nouveau, doit porter en lui le souci permanent de son assujettissement au sens.

Il faut à ce moment rebondir sur un trait de la métaphore, souligné par


U. Eco, qui nous servira davantage pour récupérer la signification noétique
du manque de la métaphore paternelle chez le psychotique et de son incapa-
cité à construire une quelconque métaphore successive, un trait qui n’est pas
explicite dans la remarquable étude de P. Ricœur :
[…] le problème central est de savoir si la métaphore est une moda-
lité expressive qui a aussi une valeur cognitive (ou qui l’a éminem-
ment) : c’est à cause de cela, et comme cause de cela, que naît la
question de savoir si la métaphore est […] fondatrice ou fondée. […]
Elle nous intéresse en tant qu’instrument de connaissance additive
et non substitutive. (1984 (1988), p. 141)
Eco s’éloigne des théories classiques de la métaphore, théories qui consi-
dèrent la figure rhétorique en question comme « simple phénomène de
substitution d’un terme “approprié” avec un terme “figuré” » (Eco, 2005,
p. 27, traduction nôtre), ou alors comme phénomène qui opère seulement

52 Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1)


La psychose et la métaphore

au niveau de l’expression, du style, et de l’ornement du discours. Selon ces


théories – affirmées déjà dans la Rhétorique d’Aristote (III, 2, 1404B 4-12) –
la métaphore produit, par son mécanisme de substitution, un effet d’étran-
geté (l’écart et le nom étranger, comme on a vu), qui affecte quand même
agréablement l’interlocuteur. À partir de cette sensation du plaisir ressentie
au moment de la rencontre avec la figure rhétorique, Eco peut récupérer la
« fonction cognitive » de la métaphore, déjà chez Aristote, et s’inscrire au
sein des théories contemporaines de la métaphore.

Le principe du plaisir est ce qui, pour Aristote, oriente l’appréhension et


la connaissance ; dans la Métaphysique (I, 1, 980a, 1-…), le stagirite rebondit
sur le fait que le désir de connaissance est une caractéristique commune au
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
genre humain, et que la connaissance apporte de la joie ; la métaphore est
la forme qui permet le plus de connaître avec facilité et rapidité ; le plaisir
qu’on ressent quand on rencontre une métaphore est le signe de la nouvelle
connaissance acquise. La connaissance nouvelle est donnée non seulement à
celui qui entend, mais aussi à celui qui produit la métaphore puisque celui-ci,
comme un vrai philosophe, est capable de repérer des similarités et d’iden-
tifier des choses qui semblent apparemment différentes les unes les autres
(Poétique, 22, 1459a 4-8 ; Rhétorique, III, 11, 1412a 11-15). La métaphore est
ainsi – et déjà pour Aristote lorsqu’il parle des métaphores du 4e type, à 4
éléments – un instrument de connaissance nouvelle.

L’emploi de la métaphore et ses effets ne se limitent pas alors à substituer


à partir de l’écart et de la ressemblance ; la métaphore ne se limite point à
constituer un nouvel ordre avec les noms et les significations existants mais
d’abord et surtout à ajouter du nouveau : une nouvelle similarité, une nouvelle
signification, une nouvelle catégorisation.

Par « fonction cognitive » de la métaphore selon Aristote, Eco entend ainsi


le fait que la métaphore peut dire quelque chose qui « doit être vu pour la
première fois », elle « pose une proportion qui, où qu’elle ait été posée, n’était
pas sous les yeux ; ou bien elle était sous les yeux et les yeux ne la voyaient
pas » (Eco, 1984 (1988), p. 160). La métaphore – et celui qui la produit – crée
ainsi de nouvelles similarités qui ne sont pas données, d’emblée, dans le
monde objectif, mais qui appartiennent plutôt à la vie historique et cultu-
relle dont l’orateur s’approprie subjectivement, ce qui lui permet de tisser de

Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1) 53


Filippo Dellanoce et Houria Abdelouahed

nouveaux réseaux significatifs : similarités et métaphores signifient d’abord


quelque chose seulement pour ceux à qui elles sont adressées, et seulement
pour ceux qui appartiennent au même univers sémiotique et sémantique.

La métaphore apporte alors une connaissance en dessinant par le langage


un trait nouveau du fonctionnement de la réalité, et ainsi elle donne à penser
afin de produire une nouvelle connaissance : « la métaphore impose [selon
Aristote] une réorganisation de notre savoir et de nos opinions » (Eco, 2003,
p. 101-102) – et de notre pensée et sexualité, comme on le verra par la suite :
quand une métaphore apparaît, c’est la réalité entière qui en est touchée, et
les réseaux des significations qui la structurent se réorganisent d’une manière
inédite, mais toujours cohérente et adéquate, qui laisse à la pensée la liberté de
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
se faire surprendre. Ainsi, on peut parler de « la prose du monde » (M. Merleau-
Ponty) ou de l’image qui est « l’aurore de la parole » (G. Bachelard).

La métaphore a enfin cette capacité de « réorganisation catégorielle […


des] courts-circuits possibles du labyrinthe cultures » : « certaines méta-
phores nous rendent capables de voir des aspects de la réalité que la produc-
tion même des métaphores aide à construire » (Eco, 2005, p. 284-285, traduc-
tion nôtre). Les métaphores créent une nouvelle perspective – culturellement
et historiquement définie – de visibilité et de lisibilité de la réalité.

4. Le métaphorique à l’œuvre

La psychanalyse peut être considérée aussi en tant que théorie du fonc-


tionnement de la pensée humaine (Auchincloss, 2015), pensée qui ne peut
se construire sans la sexualité. Selon la psychanalyse, la pensée humaine se
donne seulement au sein de la vie sexuelle, de manière que la pensée et le
sexuel constituent les deux pôles d’une unité épistémologique, ontologique
et psychologique dite subjectivité qui est la nature propre de cet animal homo
sapiens. Or, ce que Lacan a apporté à la construction freudienne c’est d’avoir
introduit un troisième terme au couple pensée-sexualité, celui du signifiant,
l’unité minime du langage, en y ayant subordonné les deux précédents.
Comme le note très justement R. Lévy, en se référant au séminaire de Lacan
intitulé La logique du fantasme (1967), « la pensée [est] effet du signifiant »
(Lacan, 1966-1967, p. 15 février 1) (Lévy, 2018, p. 115-116) et les changements

54 Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1)


La psychose et la métaphore

des rapports entre les signifiants (refoulement, dénégation ou forclusion, par


exemple) produisent des effets sur la pensée 7, sur la sexualité, sur le corps 8 et
sur les actes 9 (Chemama, 2006, p. 100) … bref, sur la structure !

La forclusion, en particulier, fait du sujet un psychotique, selon Lacan.


L’inexistence de la fonction métaphorisante – nécessaire pour la structuration
de la pensée et de la sexualité du sujet à un moment donné de son histoire –,
l’impossibilité d’une quelconque rencontre, un jour ou un autre 10, avec la
« métaphore paternelle », ont fait que ce sujet soit incapable de construire et
de concevoir toute métaphore successive, puisque la « métaphore paternelle »
détermine « la possibilité d’autres métaphores » (Porge, 2008, p. 17), et qu’il
prenne au contraire les mots pour les choses, comme le suggère Freud 11.
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
Si la métaphore exerce une « fonction cognitive », comme le soutient
U. Eco en s’appuyant sur Aristote 12 , et si Schreber, comme les autres exemples
de patients psychotiques évoqués, est incapable de concevoir une quelconque
métaphore – selon Lacan, il ne nous en offre aucune dans ses Mémoires – c’est
parce que le métaphorique, en tant que fonction de la pensée introduite par
le signifiant Nom-du-Père (NdP), est inopérant chez lui. Seulement en intro-
duisant cette considération nous pouvons essayer de comprendre la thèse
lacanienne du manque de métaphore dans la psychose de Schreber : la méta-
phore exerce une fonction qui opère au niveau de la pensée et qui « donne à
penser » en ajoutant une connaissance nouvelle au dynamisme de la réalité.
Là où toute métaphore manque dans le langage, c’est parce qu’elle manque
aussi au niveau de la pensée en tant que « fonction cognitive » ou instrument
de connaissance. L’apport particulier de Lacan c’est d’avoir fait dépendre
l’existence du métaphorique en tant que fonctionnement de la pensée d’un
signifiant particulier, le NdP.

7. L’obsession et la mélancolie sont, en ce sens, les exemples les plus éclatants.


8. L’hystérie (symptôme de conversion) et la schizophrénie (langage d’organe).
9 . La manie et la paranoïa.
10 . C. Demoulin différencie l’apparition de la métaphore paternelle selon la synchronie et la diachro-
nie : dans le premier cas, elle n’existe pas comme conséquence de l’absence du signifiant Nom-du-Père ;
dans le deuxième cas, elle n’est pas encore opérante, comme dans le cas de Hans qui en fait suppléance
avec son symptôme phobique, mais le Nom-du-Père n’a pas été forclos (Demoulin, 2009, p. 66).
11. Pas de métaphore paternelle ça signifie donc pas de castration, pas de signification phallique
et ainsi pas d’accès au désir.
12 . La métaphore relève ainsi d’une « heuristique de la pensée » (P. Ricœur) ou, comme le suggère
Gadamer (1976, paragraphe 406), le « métaphorique » est à l’œuvre à l’origine de la pensée logique.

Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1) 55


Filippo Dellanoce et Houria Abdelouahed

Pour reprendre maintenant le mathème de la Question préliminaire qui


montre le rapport entre le signifiant et le signifié, notre lecture nous amène à
proposer la notation suivante :

Le métaphorique c’est la barre même entre le signifiant (NdP) et les effets de


signification apportés au niveau de la pensée et de la sexualité : encore une fois
en rupture avec Jaspers – « tout le penser, c’est un penser autour des signifiés »
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
(1913/1959 (2016), p. 106, traduction nôtre, italiques ajoutés) –, l’acte de la pensée
et la vie sexuelle humaines sont structurés, selon Lacan, par le(s) signifiant(s).

Le manque du signifiant NdP, forclos, a rendu impossible l’accomplisse-


ment de sa fonction métaphorisante envers la signification d’un autre signi-
fiant, celui du Désir-de-la-Mère (DM). Le signifiant manquant n’est pas inter-
venu à métaphoriser le DM, à s’y substituer, ne pouvant par conséquent pas
donner à l’objet de ce désir la signification du phallus imaginaire qui reste
ainsi énigmatique pour l’auteur des Mémoires. Pour le dire avec Aristote et
U. Eco, il n’y a pas d’accès à une connaissance « additive » autour de la signi-
fication phallique pour le manque de la métaphore qui aurait dû la rendre
possible. Schreber reste ainsi non seulement comme ne pouvant pas échap-
per à la jouissance maternelle, mais aussi dépourvu des « effets de sexua-
tion conformes qui étaient attendus de la métaphore » (Soler, 2014, p. 133), à
savoir que « la fonction Père » décide, à ce moment de la réflexion de Lacan,
« l’inscription d’un côté ou de l’autre » par rapport à la sexuation du sujet
(p. 136). Schreber n’a ainsi pas rencontré cette toute première métaphore
– ici à entendre, nous le répétons, comme substitution d’un signifiant à la
place d’un autre afin de produire un effet nouveau et additionnel de significa-
tion – : pour lui, la signification phallique reste toujours un x inconnu auquel
il sera confronté, à un moment précis de sa propre biographie, lors de l’appel
du ministre de la Justice qui le fait Président de la Cour d’Appel. Cet appel,
adressé à la signification phallique manquante, est ce qui, selon Lacan, cause
le déclanchement de la psychose.

56 Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1)


La psychose et la métaphore

Dans le cas de Schreber, note Lacan, l’émasculation (1958 (1966), p. 564)


n’est rien d’autre qu’un réflexe sur le plan imaginaire du manque de la
signification phallique de par le défaut de la métaphore paternelle. Afin de
s’approcher du phallus, en dehors de l’assomption de la castration symbo-
lique, Schreber s’identifie à la femme pour l’avoir de l’homme (le fantasme
de l’épouse de Dieu). Ce changement imaginaire serait visible chez Schreber
dans le premier fantasme, du « ce serait vraiment bien d’être une femme qui
subit la copulation » (Schreber, 1903 (1975), p. 63-64).

5. Mémoires sans métaphore ?


© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
Comme C. Soler le souligne (2008), la psychose est alors à considérer comme
un « défaut de métaphore » à tous les niveaux. Non seulement au niveau
de l’Autre – voici la thèse du manque de la métaphore paternelle déployée
dans la Question préliminaire et qui est à considérer comme pouvant rendre
compte de la causalité de la psychose, en tant que sa « condition essentielle
mais non suffisante » (2008, p. 202) – ; non seulement au niveau du style
propre aux Mémoires de Schreber et du manque total d’une quelconque méta-
phore – affirmation, celle-ci, que nous allons méthodologiquement récupé-
rer – mais aussi au niveau des phénomènes : les symptômes de la psychose
– l’exemple lacanien évoque l’hallucination verbale – ne sont pas, comme
dans le cas de la névrose, des métaphores – à savoir, « substitution qui efface
un signifiant et qui le remplace par un autre » (2008, p. 169) – mais, plus
primitivement, « signifiants dans le réel ». Il reste toutefois, selon Lacan, la
« métaphore délirante » qui ferait suppléance à ce triple manque de méta-
phore dont Schreber témoigne.

En effet, si métaphore signifie irruption inattendue d’un signifiant hété-


rogène qui se substitue à un autre signifiant en prenant sa place en produi-
sant des effets inattendus de signification, le délire en tant qu’Un unitaire
prendrait, par rapport à Schreber et à tout psychotique, la place qui revien-
drait au signifiant qui manque dans l’ordre symbolique, celui du Nom-du-
Père, en produisant pour le sujet une nouvelle signification au niveau de
l’imaginaire (l’épouse de Dieu et mère d’une nouvelle humanité). En ceci
nous pouvons parler de « métaphore délirante » : le délire fait irruption dans
la vie psychique comme s’il était un signifiant unitaire, afin de donner au x

Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1) 57


Filippo Dellanoce et Houria Abdelouahed

inconnu du DM la signification (ratée) du phallus que la métaphore pater-


nelle aurait dû signifier. « Le tout du délire est métaphore » (Bolzinger, 2004,
p. 63), ou encore « Il y a eu métaphore [par le travail de formation du délire]
dans la mesure où cette opération langagière a introduit du neuf et du non-
sens tout à la fois » (p. 75). C. Soler explique la « métaphore délirante » en ces
termes : « le travail du délire construit une métaphore de remplacement, et le
“tu seras femme” que Schreber réalise vient à la place de la signification phal-
lique qui fait défaut » (2008, p. 17). Schreber donne, par le délire, un contenu
à la signification phallique jusque-là énigmatique 13 .

Comme nous le remarquions plus haut, C. Soler a souligné, suivant le


sillage de Lacan, le fait que dans le texte de Schreber aucune métaphore n’ap-
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
paraît. Nous ne pouvons pas reconfirmer l’affirmation (et préférons maintenir
le questionnement) dans notre réponse à la certitude de la thèse lacanienne.
D’abord, puisque nous ne nous sommes pas engagés en une lecture analy-
tique des Mémoires, dans leur version allemande, à la recherche d’une quel-
conque métaphore. Ensuite, puisqu’il n’existe pas, dans la littérature scienti-
fique et à notre connaissance, une étude linguistique de ce type conduite par
un lecteur attentif d’extraction non-psychanalytique. Encore, puisqu’aucun
auteur n’a jamais rencontré le patient Schreber, ni avant, ni pendant et ni
après la phase délirante. Ensuite, puisque les Mémoires sont un document
soumis aux règles de publication éditoriale, et l’auteur Schreber n’est pas
complètement homologue au patient Schreber. Enfin, puisque la « langue
fondamentale » de Schreber présente, néanmoins, d’autres figures rhéto-
riques, comme J.-F. Rabain l’a montré en 1980 et comme Prado de Oliveira
l’a rappelé (1997, p. 22). Il s’agit surtout de l’oxymoron et l’euphémisme, mais
pas que : « la syntaxe de la langue fondamentale, son organisation en figures
précises, euphémismes, antithèses, allusions ou antiphrases recouvre en
effet les procédés psychiques de dénégation, de déni ou de retournement
en son contraire » (Rabain, 1980, p. 344) afin de restituer un vrai « jeu des
contraires » qui dissimule l’insoutenable de la pulsion (p. 346). Ainsi, si on ne
trouve aucune métaphore dans le texte de Schreber, ce n’est pas pour autant
que toute autre figure rhétorique disparaisse.

13 . Ne sommes-nous pas devant une contradiction manifeste à support de la thèse lacanienne qui
verrait dans le manque de métaphore linguistique dans un texte publié la signature de l’essence
psychotique et de son langage et, en même temps, la métaphorisation comme nature propre du
délire, conçu en tant qu’opération langagière ?

58 Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1)


La psychose et la métaphore

Conclusions
Au-delà de la confirmation ou de la réfutation de la thèse lacanienne, nous
pouvons plutôt nous interroger sur le sens de cette thèse, à savoir sur la signi-
fication, telle que Lacan semble la concevoir, de l’incapacité du psychotique à
produire des métaphores.

Assurément, comme M. Safouan semble le reformuler de façon très


limpide, puisqu’il n’y a pas de métaphore, « everything is taken literally »,
y compris l’objet du désir (2000, p. 41). Seulement quand il est passé par la
métaphore paternelle, le désir de l’enfant (pour sa mère) se trouve engagé
sur le terrain d’objets substitutifs à l’objet qui est désormais perdu. Par le
langage, l’enfant continue à nommer à son insu l’objet fondamental de son
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
désir, mais il le nomme de façon métaphorique. La métaphore paternelle est
ce qui permet l’écart entre l’objet primordial du désir et sa nomination dans
le langage. Or, dans le cas de la psychose, il n’existe aucune différence entre le
mot et la chose, ou entre la représentation du mot et celle de la chose, comme
déjà Freud l’avait souligné : pour son patient schizophrénique, un trou est un
trou, rappelle-t-il : « l’égalité dans l’expression langagière et non la ressem-
blance des choses désignées » permet et prescrit un remplacement entre les
deux (1915 (2010), p. 83) ; le rapport verbal entre les mots détermine et subor-
donne le rapport entre les choses et l’on comprend ainsi que « le mot trou
reste identique à lui-même, quelles que soient les différences qui séparent les
“choses” qu’il peut venir à désigner » (Arrivé, 2003, p. 17).

Et ce fait de prendre la réalité, quelle qu’elle soit, de manière littérale,


revient à définir d’une manière différente la certitude du psychotique : si, en
effet, un signifiant ne peut pas se substituer à un autre pour le manque du
métaphorique ; si une signification nouvelle et additive ne peut pas faire son
apparition, comment peut-il y avoir l’espace nécessaire au doute ? Et d’ail-
leurs, c’est toujours Aristote qui conçoit l’énigme comme « séquence continue
de métaphores » (Eco, 1984 (1988), p. 160) : sans NdP, pas de métaphore, et
ainsi pas d’énigme, et alors seulement certitude, puisque l’énigme demeure
stérile, simple trou que seulement le délire pourra signifier. Ou, pour le dire
autrement et avec Aristote, « en général, on peut tirer de bonnes métaphores
des énigmes bien faites ; car les métaphores impliquent des énigmes »
(Aristote, Rhétorique, 2000, 1405 b 4) : pour qu’il y ait addition de connais-
sance apportée par le métaphorique, il faut l’énigme, mais le métaphorique

Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1) 59


Filippo Dellanoce et Houria Abdelouahed

œuvre aussi, pour celui qui reçoit la métaphore, l’énigme de la signification


cachée. Or, dans le cas du psychotique, la seule métaphore pouvant combler
l’énigme de la signification phallique toujours liée au DM reste le délire.

Il est à ce propos remarquablement intéressant de noter que J. Hillman,


un auteur jungien, a interrogé lui aussi les rapports entre paranoïa et
poésie, en arrivant à soutenir que pour vaincre la première il faut s’adres-
ser à la deuxième. Pourquoi ? Parce que le défaut, le péché le plus mortel
de la paranoïa serait justement dans son « littéralisme » et ainsi dans son
incapacité à métaphoriser quoi que ce soit : « nous définirions la paranoïa
– écrit Hillman – comme la manifestation d’une révélation noétique vécue en
manière littérale » (2012, p. 45-46, traduction nôtre). La dimension noétique
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
évoque la nature de la paranoïa au niveau de la pensée et de son fonction-
nement, comme nous l’avons déjà amplement décrit ; la réception littérale
décrirait au contraire la manière propre du psychotique de s’y rapporter,
manière qui ne se construirait pas par la médiation de la métaphore.

En suivant Hillman et pour conclure, nous pouvons reformuler les


concepts concernant la psychose de la manière suivante : la certitude, en tant
qu’impossibilité de glissement entre significations et ajout de nouvelles ; la
métaphore, en tant que glissement et ajout de signification effective ; le doute,
en tant que possibilité de glissement entre significations et ajout de nouvelles.

BIBLIOGRAPHIE
Abdelouahed, H. (2003). Les noms et les choses. La rencontre qui articule le monde.
Traduction et commentaire. Cliniques méditerranéennes, 68, 109-122. https://​doi​
.org/​10​.3917/​cm​.068​.0109
Alvarez, J. M., Bachs, J. & Guilana, E. (1998). Schreber et le problème de la paranoïa dans
la clinique psychiatrique. In Devreese, D., Lothane, Z. & Schotte, J.. Schreber revisité.
Colloque de Cerisy (1993) (p. 43-54). Louvain : Presses Universitaires de Louvain.
Arantes-Gonçalves, F., Marques, J. G. & Telles-Correia, D. (2018). Bleuler’s
Psychopathological Perspective on Schizophrenia Delusions: Towards New
Tools in Psychotherapy Treatment. Frontiers in Psychiatry, 9(306), 1-4. https://​doi​
.org/​10​.3389/​fpsyt​.2018​.00306
Aristote. (1985). Poétique. Paris : Les Belles Lettres.

60 Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1)


La psychose et la métaphore

Aristote. (2000). Rhétorique. Paris : Les Belles Lettres.


Aristote. (2010). Les Métaphysiques. Paris : Les Belles Lettres
Arrivé, M. (2003). Langage et inconscient chez Freud : représentations de mots et
représentations de choses. Cliniques méditerranéennes, 68, 7-21. https://​doi​.org/​
10​.3917/​cm​.068​.0007
Auchincloss, E. L. (2015). The Psychoanalytic Model of the Mind. Arlington, VA:
American Psychiatric Publishing.
Baumeyer, F. (1979). Le cas Schreber (1956). In Prado de Oliveira, E. Le cas Schreber.
Contributions psychanalytiques (p. 171-200). Paris : PUF.
Bion, W. R. (1983). L’hallucination. Réflexion faite (p. 75-96). Paris : PUF.
Bolzinger, A. (2004). L’analogie n’est pas la métaphore. Lettres de la S.P.F., 11, 71-80.
Brémaud, N. (2014). Note sur la certitude psychotique selon J. Lacan. L’Information
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
psychiatrique, 90, 773-6.
Chemama, R. (2006). Dépression, la grande névrose contemporaine. Paris : Érès.
Dally, A. (1994). Book Reviews: Zvi Lothane, In Defense of Schreber: Soul Murder
and Psychiatry. Hillsdale, NJ, & London: The Analytic Press, 1992. Pp. xii + 550.
History of Psychiatry, v, 417-426. https://​doi​.org/​10​.1177/​0957154X9400501910
Demoulin, C. (2009). Se passer du père ? Paris : Érès.
Eco, U. (1988). Sémiotique et philosophie du langage (1984). Paris : PUF.
Eco, U. (2003). De l’arbre au labyrinthe. Paris : Grasset.
Eco, U. (2005). Aristotele e la metafora. Conoscenza, similarità, azione, enuncia-
zione. In Lorusso, A. M.. Metafora e conoscenza (p. 27-68). Milano: Bompiani.
Eco, U. (2005). Metafora e semiotica interpretativa. In Lorusso, A. M.. Metafora e
conoscenza (p. 257-290). Milano: Bompiani.
Esquirol, É. (1827). Note sur la monomanie homicide. [Récupéré sur] BNF Gallica.
https://​gallica​.bnf​.fr/​ark:/​12148/​bpt6k10251686/​f5​.item​.texteImage
Freud, S. (1995). Le Président Schreber. Remarques psychanalytiques sur un cas de para-
noïa (dementia paranoides) décrit sous forme autobiographique (1911). Paris : PUF.
Freud, S. (2010). Métapsychologie (1915). Paris : PUF.
Gadamer, H.-G. (1976). Vérité et Méthode. Paris : Le Seuil.
Garrabé, J. (1998). La paranoïa en 1911. In Devreese, D., Lothane, Z. & Schotte,
J.. Schreber revisité. Colloque de Cerisy (1993) (p. 55-64). Louvain: Presses
Universitaires de Louvain.
Heidegger, M. (1962). Le principe de raison. Paris : Gallimard.
Hillman, J. (2012). La vana fuga dagli dèi. Milano: Adelphi.
Israëls, H. (1986). Schreber, père et fils. Paris : Le Seuil.

Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1) 61


Filippo Dellanoce et Houria Abdelouahed

Jaspers, K. (2016). Psicopatologia generale (1913/1959). Roma: Il pensiero scientifico


editore.
Koehler, K. G. (1981). The Schreber case and affective illness: a research diagnostic
re-assessment. Psychological Medicine, 11, 689-696.
Lacan, J. (1966). Fonction et champ de la parole et du langage en psychanalyse (1953).
Écrits, I. Paris : Le Seuil.
Lacan, J. (1966). D’une question préliminaire à tout traitement possible de la
psychose (1958). Écrits (p. 531-583). Paris : Le Seuil.
Lacan, J. (1966-1967). La logique du fantasme. [Récupéré sur] http://​staferla​.free​.fr/​
S14/​S14​%20LOGIQUE​.pdf
Lacan, J. (1981). Les psychoses. Le Séminaire, III (1955-1956). Paris : Le Seuil.
Leguil, C. (2016). Les preuves de l’existence du corps lacanien. L’évolution psychia-
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
trique, 81, 855-864.
Léon, J. (2013). Corps réel, imaginaire et symbolique dans un cas de trouble derma-
tologique. Bulletin de psychologie, 6(528), 451-462.
Lévy, R. (2018). L’infantile en psychanalyse. La construction du symptôme chez l’enfant.
Paris : Érès.
Lipton, A. A. (1984). Was the “nervous illness” of Schreber a case of affective disor-
der? The American Journal of Psychiatry, 141(10), 1236-1239.
Lothane, Z. (1989). Schreber, Freud, Flechsig & Weber Revisited : An Inquiry into
Methods of Interpretation. Psychoanalytic Review, 76(2), 203-262.
Lothane, Z. (1992). The missing link: Schreber and his doctors. History of Psychiatry,
III, 339-350.
McGlashan, T. H. (2009). Psychosis as a Disorder of Reduced Cathectic Capacity:
Freud’s Analysis of the Schreber Case Revisited. Schizophrenia Bulletin, 35(3),
476-481.
Moritz, S., Veckenstedt, R., Randjbar, S., Vitzthum, F., Karow, A. & Lincoln, T. M.
(2010). Course and determinants of self‐esteem in people diagnosed with schi-
zophrenia during psychiatric treatment. Psychosis, 2(2), 144-153. doi:​10​.1080/​
17522430903191791
Niederland, W. (1974). The Schreber Case: Psychoanalytic Profile of a Paranoid Personality.
New York: Quadrangle.
Peters, U. H. (1998). De quoi souffrait Schreber ? Considérations sur la maladie de
l’auteur des Mémoires d’un Névropathe sous des aspects actuels. In Devreese, D.,
Lothane, Z. & Schotte, J.. Schreber revisité. Colloque de Cerisy (1993) (p. 65-80).
Louvain: Presses Universitaires de Louvain.

62 Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1)


La psychose et la métaphore

Pletsch, C. E. (1982). Freud’s, Case Studies and the Locus of Psychoanalytic


Knowledge. Acta Hispanica ad Medicinae Scientiarumque Histmiam Illustrandam,
2, 263-297.
Porge, E. (2008). L’erre de la métaphore. Essaim, 21, 17-44. https://​doi​.org/​10​.3917/​ess​
.021​.0017
Prado de Oliveira, L. E. (Éd.). (1979). Le cas Schreber. Contributions psychanalytiques de
langue anglaise. Paris : PUF.
Prado de Oliveira, L. E. (1997). Freud et Schreber. Les sources écrites du délire, entre
psychose et culture. Ramonville-Saint-Agne : Érès.
Rabain, J.-F. (1980). Lectures du « cas Schreber ». Revue française de psychanalyse, 2,
329-347.
Ricœur, P. (1975). La métaphore vive. Paris : Le Seuil.
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)
Safouan, M. (2000). The unconscious and its scribe: Part I. Literature and Psychology,
46(1/2), 29-42.
Sass, L. A. (1994). Civilized madness: schizophrenia, self-consciousness and the
modern mind. History of the Human Sciences, 7(2), 83-120.
Sass, L. A. (2015). On Memoirs of My Nervous Illness, by Daniel Paul Schreber–
reflection. The British Journal of Psychiatry, 206(2), 144. https://​doi​.org/​10​.1192/​
bjp​.bp​.114​.144758
Schatzman, M. (1973). Soul Murder: Persecution in the Family. New York: Random House.
Schreber, D. P. (1975). Mémoires d’un névropathe (1903). Paris : Le Seuil.
Searles, H. (1977). La communication schizophrénique. L’effort pour rendre l’autre fou.
Paris : Gallimard.
Soler, C. (2008). L’inconscient à ciel ouvert de la psychose. Toulouse : Presses
Universitaires du Mirail.
Soler, C. (2010). Du parlêtre. Hétérité. Actes des rendez-vous International des Forums,
9, 26-28.
Soler, C. (2014). Des pères sans raison. Champ lacanien, 15, 129-138. https://​doi​.org/​
10​.3917/​chla​.015​.0129
Soler, C. (2016). Avènements du réel, de l’angoisse au symptôme. Cours au Collège clinique
de Paris, 2015-2016. Paris : Éditions du Champ lacanien.
Soler, C. (2017b). Nouvelle économie du narcissisme. Stylus. Revista de psicanalise, 34,
11-26.
Tenório, F. (2016). Psychosis and schizophrenia: effects of changes in psychiatric
classifications on clinical and theoretical approaches to mental illness. História,
Ciências, Saúde – Manguinhos, 23(4), 1-23. doi :http://​dx​.doi​.org/​10​.1590/​S0104​
-59702016005000018

Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1) 63


Filippo Dellanoce et Houria Abdelouahed

Weber, G. (1975). Annexe A. In D. P. Schreber, Mémoires d’un névropathe (1903)


(p. 419-429). Paris : Le Seuil.
Wolfson, L. (1970). Le Schizo et les langues. Paris : Gallimard.
© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

© Laboratoire CRPMS, Université de Paris | Téléchargé le 11/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 81.64.43.151)

64 Recherches en psychanalyse  >  n° 33 (2022/1)

Vous aimerez peut-être aussi