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Yehouda Ofrath
Dans Revue philosophique de la France et de l'étranger 2014/2 (Tome 139), pages 147
à 173
Éditions Presses Universitaires de France
ISSN 0035-3833
ISBN 9782130629450
DOI 10.3917/rphi.142.0147
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Le concept de forme
dans la philosophie de Spinoza
3. Trad. fr. Charles Appuhn, Œuvres de Spinoza, Paris, Garnier, 1929. Les
références aux énoncés de l’Éthique sont données sans mention du titre de l’œuvre,
par indication de la Partie, suivie de la définition, de l’axiome, de la proposition
ou de la démonstration d’une proposition, ou de son énoncé auxiliaire – corollaire
ou scolie. Sauf indication contraire, les citations de l’Éthique sont de la traduction
de Bernard Pautrat, Paris, Seuil, 1988. C’est toujours moi qui souligne.
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L’uniformité de la formation
à l’aide d’autres [idées] […] IV. Il forme les idées positives avant les négatives.
VI. Les idées que nous formons claires et distinctes semblent découler de la seule
nécessité de notre nature d’une façon telle qu’elles semblent dépendre absolument
de notre seule puissance ; c’est le contraire pour les confuses. En effet elles se
forment souvent contre notre gré » (par. 108). Le TRE parle aussi de « la forme du
vrai » (par. 69) ou de « la vérité » (par. 105) et de « la forme de la pensée vraie »
(par. 71), ainsi que de « former le concept » et de « former des idées », « des
pensées » (par. 72, 73 et 94) ou des définitions (par. 103), avec le sens exposé ici.
Ce traité nous offre un exemple concret d’un concept que nous pouvons former par
l’activité de notre entendement : pour « former le concept de la sphère » (par. 72),
il suffit d’inventer une cause – le mouvement de rotation d’un demi-cercle autour
de son centre, ce qui est « la manière la plus facile de former le concept de la
sphère ».
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6. Martial Gueroult, Spinoza II. L’âme (Éthique, II), Paris, Aubier, 1974
(ci-dessous : Gueroult), pp. 110-111. Mon commentaire sur ce point diffère de
celui de Gueroult en ce que j’exploite la conception spinozienne de la formation,
exposée ici.
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L’uniformité de la formation
10. En II/5 et II/6, Cor., Spinoza expose sa doctrine de l’uni-
formité de l’ordre causal, selon laquelle les choses singulières
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idée que de ce qui n’est pas une idée, est un mode. Cet argument est
exprimé directement au sujet des idées (II/5) et par référence compa-
rative au sujet des êtres formels appartenant à d’autres attributs que
la Pensée (II/6, Cor.).
Le vocabulaire technique de Spinoza décrit la modification
de la substance comme un même déploiement de la nature dans
tous les ordres de réalité. C’est pourquoi le mode est défini d’une
manière univoque : ce sont « les affections d’une substance », sans
aucune distinction entre elles, et c’est « ce qui est en autre chose »
(I/ Déf. 5), sans distinction, sous l’aspect modal, entre être en
autre chose qui est Pensée et être en autre chose qui est Étendue
ou un autre attribut. Pourtant, puisque chacun des infinis attributs
est conçu par soi et ne peut être produit par un autre (I/10, Scol.),
l’ordre de modification de chaque attribut doit nécessairement se
dérouler d’après un principe différent de celui d’un autre attribut et
les modes de l’un doivent différer de ceux de l’autre ; sinon, tous
les modes de tous les attributs seraient identiques et ne pourraient
être identifiés que comme des modifications de la substance, mais
on ne saurait les distinguer les uns des autres et l’on ne pourrait
leur attribuer une appartenance à tel ou tel attribut. Cependant,
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que lorsque les choses singulières existent dans la durée que leurs
idées, c’est-à-dire leurs formes intelligibles, existent comme actuali-
sation de l’attribut de la Pensée.
14. Il n’y a pas lieu, ici, d’entrer dans les détails de l’explication spinozienne
de la fausseté, explication dont l’essentiel est la formation d’une idée faisant partie
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La forme du corps
d’un ensemble intelligible qui, lui, est formé simultanément avec un ensemble
non intelligible ; étant une partie de l’ensemble intelligible, l’idée ne conçoit que
partiellement l’ensemble non intelligible – d’où son inadéquation.
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18. La même idée est exprimée dans le Court traité, trad. fr. Charles Appuhn,
Œuvres de Spinoza, Paris, Garnier, 1929 : « X. Cependant ce corps qui est le nôtre
était dans une autre proportion de mouvement et de repos, quand il était un enfant
non encore né, et par la suite, après notre mort, il sera dans une autre encore […] ;
XII. Si donc un tel corps a et conserve cette proportion qui lui est propre, par
exemple de 1 à 3, ce corps et l’âme seront comme ils sont actuellement ; soumis, à
la vérité, à un changement constant mais non à un si grand qu’il dépasse la limite
de 1 à 3 ; mais autant il change, autant aussi à chaque fois change l’âme. […] ;
XIV. Mais, si d’autres corps agissent sur le nôtre si puissamment que la proportion
de 1 à 3 de son mouvement ne puisse pas subsister, alors c’est la mort, et un anéan-
tissement de l’âme en tant qu’elle est seulement une idée, connaissance, etc., de
tel corps possédant telle proportion de mouvement et de repos » (Préface, par. 2,
notes X, XII et XIV).
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