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PSYCHODRAME
Brigitte Kammerer, Gabrielle Mitrani, Isaac Salem
ERES | « Le Coq-héron »
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http://www.cairn.info/revue-le-coq-heron-2014-2-page-77.htm
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à l’objet et une défense contre les attaques extérieures de l’objet. Elle fait
cruellement défaut au psychotique qui n’a pas suffisamment de représentation
de lui-même et se présente à nous comme une entité brute, énigmatique. Le
psychotique, pourrait-on dire, ne se représente pas mais se présente. C’est en
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instaurant une aire de jeu, un espace intermédiaire entre l’objet et le sujet, qu’il
pourra reconstruire son enveloppe.
Les failles du pare-excitation correspondent à un défaut d’introjection
entraînant une incapacité structurelle à associer, qu’il faut distinguer de la résis-
tance à l’association libre chez des sujets névrosés. On pourrait se représenter un
sujet souffrant d’un défaut d’introjection fantasmatique comme un individu en
quelque sorte encore excessivement ouvert sur la réalité et les objets externes.
Ce défaut de fermeture de l’inconscient ne peut pas permettre de garder les
objets internes pour constituer un monde fantasmatique inconscient. L’empiè-
tement de l’objet se produit quand celui-ci est trop présent, ou trop absent.
Piera Aulagnier et W. Bion partagent une conception assez proche à propos des
débuts de l’appareil psychique (l’identification projective de l’enfant dans la
mère, et la rêverie maternelle). C’est l’activité partagée entre la mère et l’infans
qui va permettre le développement des pensées.
L’essentiel est l’expérience de la métabolisation des sensations, en particu-
lier celles de déplaisir, de souffrance, de déception ou de frustration. Une mère
suffisamment bonne n’est ni trop présente, ni trop absente, et surtout respecte
l’espace transitionnel entre elle et son enfant afin que ce dernier ait l’illusion
que c’est lui qui crée tout ce qu’il vit.
Sensorialité et psychose
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rieur, familier-étranger ne sont pas pertinentes quand nous parlons « sensoria-
lité ». Au travers du processus de présentation (terme préféré, en particulier, par
L. Kahn, à celui de figuration, car prenant mieux en compte la polysensoria-
lité), ce matériau brut doit pouvoir accéder à une représentation.
Nous abordons ainsi la question du processus de symbolisation et de
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les relations entre la mère et l’enfant, les conditions d’éclosion d’une psychose
sont en place. Face à ce postulat, la folie représente la forme extrême que prend
le refus3. »
La sensorialité est une sensorialité liée au plaisir, à la satisfaction, et en ce
sens elle appelle bien la question de la satisfaction hallucinatoire, mais elle est
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Avec R. Roussillon, nous proposons de placer au centre du vécu subjectif
essentiel de la psychose une expérience de « terreur agonistique » inélaborée,
et contre laquelle la psyché s’est construite.
« La terreur agonistique est un état de souffrance psychique extrême mêlé
à une terreur de cet éprouvé ou de la violence réactionnelle qu’il mobilise.
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tation. À la mesure de la terreur qui l’habite, l’expérience fait retour avec une
intense destructivité adressée aussi bien à soi-même qu’à l’environnement
actuel. C’est ici que le secours de l’environnement – y compris thérapeutique
– est précieux, car l’expérience de terreur agonistique n’est pas métabolisable
par le patient qui ne peut, seul, étayer la déflexion de celle-ci vers le dehors, et
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Psychose et objet
La psychose et le Moi
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une unité du Moi par laquelle une certaine conflictualité peut passer. En
ayant recours au psychodrame, nous tentons de réduire la part clivée du Moi,
« d’élargir le passage » par lequel passe cette conflictualité, et de la laisser agir
sur le patient. Il s’agit donc de travailler la possibilité du Moi du psychotique de
surmonter le déni de la conflictualité. En fait, il est souhaitable, au cours de ce
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travail, d’éviter deux écueils : d’une part, ne pas rendre la séance traumatique
pour le psychotique en le confrontant à des scènes trop conflictuelles ; d’autre
part, éviter de maintenir le déni par des scènes trop peu conflictuelles.
Le jeu psychodramatique crée des microtraumatismes afin d’ébranler la
défense du déni. Dans une séance, on choisit dans le premier moment, dans les
propos du patient, un aspect conflictuel entendu par le meneur de jeu, mais que
le patient n’a pas ressenti dans toute son ampleur. On bâtit avec le patient un
canevas de scène autour de cet aspect conflictuel et on attend qu’il soit déve-
loppé dans le jeu, avant que le meneur de jeu, par son interprétation, permette
que le conflit soit intériorisé et intégré par le patient.
Travailler la conflictualité qui passe et se fait entendre, malgré le clivage,
et essayer « d’élargir le passage » veut dire approfondir l’intrication pulsion-
nelle : « Travailler cette conflictualité, c’est renforcer et étendre l’unité du moi,
faire reculer le clivage, même si un certain clivage cicatriciel, anciennement
inscrit dans la structure (topique) du moi, est ineffaçable9. » L’outil psychothé-
rapique qu’est le psychodrame est, selon nous, le plus adapté pour soigner la
désintrication pulsionnelle psychotique.
La figuration
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Au psychodrame, la figuration s’inscrit dans l’espace de la transitionna-
lité, telle que l’a définie Winnicott. Elle doit être suffisamment ouverte, souple
et nuancée pour que le patient puisse s’en emparer, l’utiliser et se l’approprier.
Dans ces conditions, la figuration devient alors agent de liaison. En passant par
l’image, non plus visuelle comme dans le rêve mais agie dans l’espace de jeu
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La réflexivité
Pour qu’une image se reflète, il lui faut un espace qui la sépare de son reflet,
une fraction de temps qui permette le mouvement d’aller-retour, et un miroir,
objet tiers sur lequel elle viendra buter avant de se réfléchir ou se réfracter,
selon le modèle optique envisagé. Reprises dans le registre métaphorique de la
réflexivité intrapsychique, ces trois conditions impliquent : un espace interne,
la suspension de l’activité de décharge, et une limite sur laquelle la pulsion
viendra buter avant de rencontrer deux de ses destins possibles, le retournement
sur la personne propre, et le renversement en son contraire, tous deux à la base
de la fonction réflexive.
Si le terme de réflexivité n’apparaît pas directement dans l’œuvre de
Freud, différentes pistes vont dans cette direction. M. Ody10 en a suivi deux.
La première concerne les deux destins pulsionnels déjà évoqués, dont
Freud souligne11 qu’ils n’en forment souvent qu’un seul, tant ils sont proches,
voire coïncident. Pour M. Ody, ce « double retournement » représente le
10. M. Ody, « La psychana-
soubassement de la fonction réflexive. Il en veut pour preuve cette remarque
lyse, la réflexivité et l’en- de Freud : « Le verbe actif se transforme non en passif, mais en verbe moyen
fant », rfp, vol. 76, 2012/3. réfléchi. » Ody souligne l’importance de ce temps « réfléchi » où il voit la base
11. S. Freud, « Pulsion et des-
tin des pulsions », dans ocp
du narcissisme et l’origine de la constitution d’un espace psychique propre au
xiii, Paris, Puf, 2005, p. 173. sujet, qui le différencie de l’objet, et pose les fondations de son identité.
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à protéger le nourrisson du débordement désorganisant d’une excitation non
contrôlable, et non fractionnable par ses seuls moyens. Le holding de la mère
chez Winnicott tout comme la capacité de rêverie maternelle chez Bion ont
pour but de pallier l’impuissance du nourrisson ; ils représentent les prémices
du futur pare-excitation de l’enfant qui portera les traces de l’histoire de sa
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constitution.
Si le pare-excitation représente l’objet tiers sur lequel l’image va venir
se refléter, ses éléments constitutifs à la fois endogènes et exogènes vont en
faire un miroir transformationnel. Dès lors, comme le remarque G. Pragier12,
la question de la réflexivité ne se résume plus au simple retour sur lui-même
d’un contenu émanant du sujet, mais se double de la question de la réfraction et
de l’auto-organisation. Elle représente une activité complexe de réajustement
intrapsychique permanent qui implique à la fois la processualité, la temporalité,
et la tiercéité.
La seconde piste suivie par M. Ody concerne la notion du « devenir
conscient » qui, pour Freud, se confond en partie avec ce que nous appelons la
réflexivité. Freud y voit l’aboutissement d’un travail complexe qui met en jeu le
passage de deux censures, une première entre l’inconscient et le préconscient,
une seconde entre le préconscient et le conscient. Du passage de cette deuxième
censure, Freud nous dit qu’elle nous « avertit que le devenir conscient n’est pas
un pur et simple acte de perception, mais vraisemblablement un surinvestisse-
ment, un nouveau progrès dans l’organisation psychique13 ».
Ce nouveau progrès concerne l’articulation des représentations de choses
avec les représentations de mots, et passe par un travail d’abstraction et de
symbolisation.
Dans un premier temps, la question du « devenir conscient » repose pour
lui sur le couple idéal que représenterait un analyste, dont « l’attention en
égal suspens » viendrait réfléchir tel « un miroir non déformant » le discours
associatif du patient. Grâce à ses interprétations, l’analyste permet à l’analy-
12. G. Pragier, « De l’auto
sant d’élargir le champ de sa réflexivité par prises de conscience successives analyse à l’auto-organisation,
(insight) de ses conflits internes, issus de la lutte entre la poussée des rejetons un parcours réflexif ? », rfp,
d’un inconscient refoulé et les résistances qui lui sont opposées. op. cit.
13. S. Freud, « L’incons-
Mais, très rapidement, la simplicité de ce modèle va venir se heurter à la cient », dans ocp xiii, Paris,
prise en compte du transfert puis du contre-transfert. Cet obstacle va déboucher Puf, 2005, p. 232.
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et de perlaboration qui va ouvrir au patient la voie de l’appropriation subjective
du contenu de la séance comme de la cure.
C’est là que la question de l’insight (union fugitive du sujet percevant et
du sujet perçu), ou du devenir conscient comme projet de la cure, se fond dans
une perspective plus vaste et plus complexe, qui intègre la question de la perla-
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tous ceux qui croisent son regard. C’est la déesse Athéna qui permettra à Persée
d’accomplir sa tâche en lui offrant son bouclier « poli comme un miroir ».
« Au moment de rencontrer Méduse, lui dit-elle, tu ne la regarderas point, tu
te serviras du bouclier pour y voir son reflet. » Ainsi protégé de la brutalité
captatrice et destructive de Méduse, Persée parviendra à lui couper la tête et à
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retrouver le chemin de la liberté. « Notre thèse, écrit Pasche, est que le psycho-
tique est celui qui ne dispose pas du bouclier de Persée, celui que le regard de
Méduse angoisse, puis immobilise jusqu’à le pétrifier. »
Si Persée représente le sujet, et Méduse la réalité extérieure, le bouclier-
miroir représente le pare-excitation qui viendra défléchir l’impact brutal du
monde externe, en suspendre le choc immédiat et inéluctable, et ainsi éviter
le collapsus topique et le risque d’implosion ou d’explosion psychique. Pour
Pasche, le bouclier de Persée, appendice inanimé d’Athéna, elle-même subs-
titut maternel, est le précurseur de l’objet transitionnel ; sa fonction protec-
trice et réflexive renvoie aux relations précoces de la mère et de l’enfant et à
l’histoire de leur rencontre, à leur désaccordage à un moment crucial pour le
bébé, soit que la mère n’ait pu proposer ce « bouclier », soit que l’enfant n’ait
pu le recevoir. Pour avoir une représentation de lui-même, écrit Pasche, il faut
d’abord que l’enfant soit regardé et perçu par la mère. C’est de la qualité de ce
regard que dépendra la capacité du sujet à se construire une image réflexive :
« Le corps de la mère est le premier miroir de l’enfant. »
Quarante ans plus tard, R. Roussillon17 s’appuie lui aussi sur un récit – non
plus un mythe mais un conte populaire – pour aborder l’enjeu narcissique et
identitaire de la fonction réflexive. Il s’agit du conte d’Andersen « La reine des
glaces ». Il y est également question d’un miroir, un miroir brisé, dont les éclats
glacent le cœur de ceux qui les reçoivent. La sensibilité, l’empathie, l’amour
de soi et de l’autre disparaissent ; viennent à la place l’indifférence, la solitude,
la haine. À partir de cette métaphore, R. Roussillon s’interroge sur les cures en
impasse qui se heurtent à la toute-puissance narcissique du sujet et viennent
16. F. Pasche, « Le bouclier
buter sur sa destructivité dans un transfert paradoxal. Faisant le lien avec le de Persée ou psychose et réa-
concept de Winnicott du visage de la mère comme « miroir primitif » du bébé, lité » dans Le sens de la psy-
R. Roussillon propose l’idée suivante : « Là où la structure narcissique nous chanalyse, Paris, Puf, 1971.
17. R. Roussillon, La psy-
montre le sujet de manière solipsiste, là où il est seul dans son monde, là où il chanalyse, une remise en jeu,
tourne en rond, passant de lui à lui-même, il faut réintroduire l’histoire de la Paris, Puf, 2010.
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qui, s’appuyant sur la capacité de rêverie maternelle, va permettre à celle-ci de
métaboliser puis de restituer à l’enfant, sous une forme dédramatisée et signi-
ficative, les éléments bêta appréhendés par le bébé comme un ensemble énig-
matique, bizarre ou terrifiant, c’est-à-dire, lui offrir un reflet de lui-même qu’il
puisse s’approprier et où il puisse se reconnaître. Ce miroir à la fois contenant,
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non-jeu), une temporalité rythmée par la scansion (qui traduit un arrêt de jeu
signifiant de la part du meneur et non un arrêt de la séance) et une chorégraphie
spécifique qui manifeste un déplacement transférentiel particulier, fractionné
sur les acteurs dans la scène, puis recentré sur le meneur de jeu après la scène.
La scansion représente au psychodrame un moment de la séance particu-
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besoins, un miroir auquel il pourra s’identifier avant de pouvoir éventuellement
l’intérioriser. Le jeu apporte aux patients, comme aux thérapeutes, un gain de
plaisir qu’ils peuvent partager et qui va dans le sens d’un investissement libi-
dinal de la rencontre avec l’autre, et donc avec soi-même.
Il est évident que les acteurs peuvent jouer tous les rôles au psycho-
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associatifs nouveaux et d’échapper à la compulsion de répétition mortifère.
Et c’est dans le temps des vacances, un temps suspendu, retenu, alors qu’elle
occupe momentanément une fonction maternelle auprès d’un enfant, qu’Anna
peut s’identifier à la mère-analyste du psychodrame, et intérioriser le reflet de
son image réfléchie par l’analyste : « Le réfléchissement implique l’existence
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nécessaire de l’autre (la partie qui réfléchit). C’est une façon d’intégrer la part
non intégrée parce qu’elle n’est pas seulement ressentie mais vécue comme une
reconnaissance. […] Le non-intégré est désormais vu d’une façon plus cohé-
rente et significative car l’autre a compris, et c’est cette compréhension qui est
réfléchie en miroir, non pas seulement les faits qui ont été communiqués18. »
Anna s’autorise alors, par la pensée, à faire des associations entre les idées
et les agirs. Elle peut se poser réflexivement la question de ce qui se passe à
l’intérieur d’elle et faire l’hypothèse d’une culpabilité inconsciente qui la fait
se punir, dans la réalité, de ses pensées hostiles à l’égard de sa mère. Il s’agit
du fruit d’une lente perlaboration qui lui permet de reprendre, dans un registre
secondarisé, une activité de décharge autodestructrice qui, en venant buter sur
le miroir transformationnel inscrit dans le dispositif du psychodrame et intério-
risé, va permettre à la pulsion d’opérer ce « double retournement » qui ouvre et
fonde la fonction réflexive.
« Chose inouïe, écrivait Victor Hugo, c’est au-dedans de soi qu’il faut
regarder le dehors19. »
Résumé
La psychose est caractérisée par une défaillance du pare-excitation entraînant trauma-
tisme, détresse, clivage et défaut de symbolisation. La construction du psychisme, la
capacité de figuration et de représentation s’enracinent dans la sensorialité. Le jeu au
18. A. Green, « Origines et
psychodrame interpelle le patient corporellement, affectivement et au niveau du lan-
vicissitudes de l’être dans
gage. Il favorise la conflictualité, faisant ainsi reculer clivage et désintrication pulsion- l’œuvre de Winnicott », rfp,
nelle. Il constitue un espace transitionnel et de réflexivité. vol. 75, 2011/4.
19. V. Hugo, Contemplation
Mots-clés suprême, Paris, Calmann-
Psychose, psychodrame, pare-excitation, clivage, sensorialité, réflexivité. Lévy, 1901.
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Coq 217.indd 92
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