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Chapitre 2

Comment est structurée la société française actuelle ?

Programme :
Sociologie et sciences politiques
Savoir identifier les multiples facteurs de structuration et de hiérarchisation de l’espace social (catégorie
SOCIO 1 socioprofessionnelle, revenu, diplôme, composition du ménage, position dans le cycle de vie, sexe, lieu
Comment est de résidence).
structurée la société Comprendre les principales évolutions de la structure socioprofessionnelle en France depuis la seconde
moitié du XXe siècle (salarisation, tertiarisation, élévation du niveau de qualification, féminisation des
française actuelle ?
emplois).
Connaître les théories des classes et de la stratification sociale dans la tradition sociologique (Marx,
Weber) ; comprendre que la pertinence d’une approche en termes de classes sociales pour rendre compte
de la société française fait l’objet de débats théoriques et statistiques : évolution des distances inter et
intra-classes, articulation avec les rapports sociaux de genre, identifications subjectives à un groupe
social, multiplication des facteurs d’individualisation.

Introduction : Qu’est-ce que la structure sociale ?

Société = plusieurs groupes so qui interagissent.


Groupes so aux caractéristiques communes + sentiment d’appartenance.
Stratification so = représentation schématisée de la So, qui hiérarchise les
groupes so.
 Hiérarchie car différences qui sont à l’origine d’inégalités.

I) Une structure sociale complexe : multiforme et hiérarchisée

A) Les évolutions de la structure socioprofessionnelle

1. La classification en PCS

Créé par INSEE


 1954 = Classement en CSP (classement
selon profession, position hiérarchique,
statut, qualification, secteur d’activité)
 1982 = CSP deviennent PCS, catégorie
avec une certaine homogénéité sociale.
 2003 et 2020 = actualisation

8 PCS : 6 actifs + 2 inactifs

 Outil statistique
2. Des mutations profondes depuis 1950

 La progression du salariat et la tertiarisation de l’économie

SALARISATION
Salariés = liés par un contrat de travail, relation de subordination // indépendants.
Salarisation = augmentation de la part des emplois salariés dans l’emploi total = 90% de l’emploi total auj.
Exemple : vidéo « paysan à l’usine » => modernisation de l’agriculture, baisse de rentabilité des petites exploitations
agricoles, changement de métier pour travailler à l’usine : revenus + stable mais changement de PCS et déplaisir des
agriculteurs (bruit, enfermement, subordination, etc.).

TERTIARISATION
Tertiarisation = augmentation de la part des emplois dans le secteur tertiaire (services) = 85% de l’emploi total en 2018.
Thèse du deservement sectoriel d’Alfred Sauvy : PT améliore productivité et transfert (déverse) des emplois du
secteur primaire  secteur secondaire  secteur tertiaire.

 Elévation du niveau de qualification et féminisation des emplois

ELEVATION NIVEAU QUALIFICATION


Augmentation du nombre de diplômés car hausse de la qualification des emplois.
 Bcp + de diplômes école de commerce = nouveaux débouchés (tertiarisation)
 Bcp + de diplômes Bac +5 = + longues études (massification scolaire).
Correspond au marché du travail : + dans secteur tertiaire, et + emplois de cadres
A noter :
 + emplois cadres, qualifiés (pour PT)
 - emplois ouvriers (remplacés par machine : PT) POLARISATION
 + emplois services non qualifiés (services à la personne)
(non délocalisables, ni robotisables)

FEMINISATION DE L’EMPLOI
1960 : 35% de l’emploi total pour des femmes
2017 : presque 50% de l’emploi total pour les femmes
 Féminisation : hausse de la part des femmes dans l’emploi total
Attention : avant femmes au travail, mais non déclarée et non rémunérée souvent.
A relier à l’évolution du marché du travail : tertiarisation
Remarque : Féminisation varie selon les métiers ! (aide à domicile // ouvrier du batiment), stéréotype + socialisation
différenciée (soin pour les femmes // force physique pour les hommes). Femmes + présentes dans métier proche de la
sphère domestique et familiale  Tertiarisation (essor des services) permet aussi féminisation.

BILAN

Agriculteur ACCE
Ouvriers CPIS
PI
E

B) De multiples facteurs de structuration et hiérarchisation de l’espace social

Dans toute société = différents groupes


hiérarchisés.
Un individu appartient à différents
groupes.

 Plusieurs dimensions structurent


la société et sont en relation les
unes avec les autres, et
interagissent.
1. Des facteurs liés à la position socio-économiques : la position professionnelle, le revenu et le diplôme.
 Position professionnelle : PCS
Cadres > PI > Employés et Ouvriers
- Inégalités de niveaux de vie
- Inégalités de qualification (niveau de diplômes)
- Inégalités de patrimoine et de revenu
- Inégalités de départ en vacances
- Inégalités de pratiques culturelles (musées, cinéma)
- Inégalités face à la santé (espérance de vie)
- Inégalités de réussite scolaire des enfants
 Revenu
Très hauts revenus (1%, voire 0,1%) / hauts revenus (10% les plus riches) / 10% les plus pauvres
- Inégalités de patrimoine importantes : 10% les + riches détiennent presque 50% du patrimoine de la France.
Inégalités de niveaux de vie qui repartent à la hausse !
Rapport interdécile : 3,5 après redistribution.
 Diplôme
Bac +5 ou plus > Bac +2 > Bac > CAP > Brevet ou sans diplôme
- Inégalités de taux de chômage
- Inégalités de pratiques culturelles (lecture de livres, musées, exposition, théâtre, concert)
- Inégalités face à la pauvreté (taux de pauvreté diffère selon le niveau de diplômes : +80% des personnes
pauvres sans Bac)
3 facteurs souvent liés entre eux : un cadre possède en moyenne un revenu et un diplôme plus élevé qu’un ouvrier.

2. Des facteurs socio-démographiques : le sexe, la composition du ménage et l’âge


 Sexe
Hommes > Femmes
- Inégalités en politique (- de femmes dans conseils municipaux)
- Moins de femmes chef d’entreprise
- Ecart salarial : femmes 20% de moins à niveau de diplôme et poste équivalent
- + femmes subissent violences conjugales et sexuelles
- Inégalités face aux tâches domestiques (4h38/jour pour ménage et enfants ! 2 fois plus que les hommes)
- + de temps partiel pour les femmes
- 84% de femmes dans familles monoparentales, + pauvreté
- + hommes parmi les sportifs de haut niveau (2 x plus)
Le manspreading : manière de s’assoir les jambes très écartées dans transports publics (domination masculine)
 Composition du ménage
Famille traditionnelle (nucléaire) ou recomposée > Famille monoparentale
- Inégalités de revenu, pour famille monoparentale + de pauvreté (1 seul revenu !)
- Inégalités de niveau de vie
 Position dans le cycle de vie : âge
25-65 ans > 15-25 et + de 65 ans  Activité > Jeunesse et Retraite
- Inégalités d’épargne (faible pour les + jeunes et retraités)
- Inégalités de patrimoine
- Inégalités en politique : jeunes moins bien représentés politiquement (50% des députés ont + 50 ans, 2020)
- Inégalités face au chômage : touche + jeunes et + âgés
- Inégalités d’équipement en biens durables (jeunes moins bien équipés : congélateur, lave-vaisselle, lave-linge.
- Inégalités d’usage d’Internet (jeux en ligne, vidéos : + jeunes)

3. Des facteurs géographiques : le lieu de résidence


Centre ville > périphérie > banlieue
- Inégalités d’accès aux services publics (école, universités, médiathèque, hôpitaux)
- Inégalités d’accès à la culture (musées, théâtre, exposition, cinéma, etc.) et équipements sportifs
- Inégalités d’accès à la santé (offre de soins, spécialistes : neuropsychiatres, stomatologues)
- Inégalités de revenus selon les régions : - d’inégalités de revenus en Bretagne (région faiblement inégalitaire)
// Ile de France très inégalitaire.

Bonus : autres facteurs = handicap, origine ethnique


II) Les débats sur l’existence de classes sociales en France

A) Les théories des classes dans la tradition sociologique

1. L’analyse de Karl MARX (1818-1883) en termes de classes sociales


Appartenance selon la place occupée dans le processus de production  un critère économique
o Bourgeois / capitaliste = propriétaire des moyens de production
o Prolétaire = ne possèdent que leur force de travail
 Processus de polarisation de la société entre ces 2 classes sociales
Domination / Exploitation des prolétaires par les bourgeois qui leur extorquent la plus value : salaire < valeur
produite. Aliénation des ouvriers (perte d’attrait pour leur travail, tâches répétitives).
 Lutte des classes, conflit inéluctable
« L'histoire de toute société jusqu'à nos jours n'a été que l'histoire des luttes de classes »
Classe sociale = classe en soi (caractéristiques communes) + classe pour soi (conscience de classe)
Classe sociale = groupe so caractérisé par une position spécifique dans le système de production (classe en soi) et par
une conscience collective (classe pour soi).
o Ouvriers : classe so car en soi (industrialisation, cité ouvrière) et pour soi (parti communiste)
o Paysannerie : sac de patates (pas de conscience)
 Conception réaliste : les classes existent dans la réalité. Lutte des classes inéluctable.

2. L’analyse de Max WEBER en termes de strates sociales


Analyse multidimensionnelle de la stratification sociale.
Analyse de différentes strates (groupes so hiérarchisés)
Société analysée selon 3 ordres, 3 dimensions …
Hiérarchie selon le niveau de Hiérarchie selon le niveau de Hiérarchie selon le niveau de prestige
richesse (revenus et patrimoine) pouvoir (honneur, style de vie, dim symbolique)
(ordre économique) (ordre politique) (ordre social)
Classement en classes sociales Classement en partis politiques Classement en groupes de statut
o Classes de possession o Organisations politiques o Personnes prestigieuses
o Classes de production o Electeurs o Personnes + dévalorisées socialement
 Conception nominaliste : classes sont des collections d’individus, outils de classement statistique (pas de
conscience de classe).
 Pas de conscience de classe
Le + svt les individus cumulent les positions dominantes ou dominées (en haut ou en bas sur tous les ordres), mais pas
obligatoirement ! Des exceptions (ex : pompiers, mère Theresa, etc.)
 3 dimensions connectées : élite économique aussi au sommet de l’échelle politique et statutaire.
WEBER : dimensions de la vie sociale multiples, individus ne se classent pas qu’en fonction de leur rapport au travail.

BILAN
MARX WEBER
Points Classement hiérarchisé du social
communs Emploi du terme de « classe » sociale
« classe sociale » définie selon critères économiques
Différences Classe repose sur la seule place dans les Plusieurs critères économiques (revenus,
rapports de production patrimoine)
Un seul critère de classement Analyse pluridimensionnelle
Conception réaliste Conception nominaliste
Approche conflictuelle : lutte de classe Domination, pas nécessairement au conflit
Conscience de classe = classe pour soi Pas de conscience de classe

BONUS : Synthèse de Bourdieu (tentative de dépassement de l’opposition entre Marx/Weber), 4 capitaux


(économique, culturel, social, symbolique), 3 classes (aisée, moyenne, populaire), classes « virtuelles », domination
mais pas de lutte.
B) Des classes sociales de moins en moins pertinentes …..

1. L’affaiblissement des frontières de classe (baisse des distances inter-classes,


moyennisation)
Henri MENDRAS : moyennisation de la société.
- Baisse des inégalités entre groupes sociaux
- Forte progression d’une vaste classe moyenne (« constellation centrale ») 
effacement des frontières de classe.
- Déclin société paysanne, embourgeoisement classe ouvrière, essor CPIS, PI
- Massification scolaire et 30G  hausse des R
- Baisse distances inter-classe : moins d’écarts d’équipement des ménages
(téléphone portable, ordinateurs)  rapprochement des modes de vie.
- Baisse du rapport interdécile
 Frontières entre les groupes so sont + floues et – rigides.

2. L’affaiblissement de la conscience de classe (baisse de l’identification à un groupe so, hausse des distances
intra-classe)
Enquête « Ouvriers malgré tout » de Martin Thibault : de – en – d’ouvriers se sentent ouvriers  baisse de la
conscience de classe (ex : Associates chez amazon, RATP « pas d’ouvriers chez nous »)
 Baisse du sentiment d’appartenance à la classe ouvrière
 Fin classe ouvrière (prolétariat)
En parrallèle, de + en + de personnes se sentent appartenir à la classe moyenne. Si tous moyens = plus de classe !
 Hausse du sentiment d’appartenance à la classe moyenne (pour ceux qui se sentent appartenir à une classe).
Hausse des distances intra-classe, notamment au sein des employés  donc – de sentiment d’appartenance à une classe
populaire. (ex : employées administratives : secrétaires / employé de commerce : caissière restauration rapide /
employé de service : femme de ménage  conditions de travail très différentes, niveaux de qualification, rémunération)

3. L’apparition de nouveaux facteurs de distinction (rapports so de genre, multiplication des facteurs


d’individualisation)
Processus d’individualisation : place croissante apporté à l’individu > au groupe.  - importance au groupe, fin des
classes.
 La multiplication des facteurs d’individualisation
Individualisation au travail : de – en – de syndiqués (taux syndicalisation = 10%), de + en + de rémunérations
individuelles (primes), autonomisation des salariés  - de collectifs, - de sentiment d’appartenance, pas de classe
pour soi.
 L’articulation des classes avec les rapports sociaux de genre
Le genre compte autant que la classe parfois.
 Importance des inégalités de sexe parfois > inégalités de classe.
Ex : mortalité routière  effet de classe : ouvriers + tués que cadres (voitures + mauvaise qualité)
 effet de genre : hommes + victimes que femmes (risque virilité)
Mortalité routière s’explique en combinant effet de classe et effet de genre.
On ne peut réduire un individu à sa classe et ignorer les rapports de genre dans lequel il est aussi pris.

C) …. Ou de plus en plus explicatives de la structure sociale ?

1. Le retour des inégalités inter-classe


Depuis 1980 : mouvement de réduction des inégalités interrompu.
 Maintien d’écart d’espérance de vie entre ouvriers et cadres (+7 ans hommes CPIS / hommes ouvrier) car
conditions de travail différente, rapport au corps et à la santé, revenus.
Retour des inégalités plus récemment ! Entre 1996 et 2016 : niveaux vie D9 +25% / niveaux de vie D1 +20% 
hausse des inégalités car niveaux de vie augmentent pour tous, mais + pour les + riches.
 Ecarts se creusent : riches s’enrichissent et pauvres s’appauvrissent.  retour des classes.
2. Le maintien de conscience de classes spécifiques
Bourgeoisie aujourd’hui : gros patrimoine, richesse importante.  fort capital économique  classe en soi !
(ex : 16ème Paris, 1 foyer sur 10 assujetti patrimoine moyen de 4 millions €)
 Cultive l’entre-soi : rallyes, bottin mondain, contournement carte scolaire  classe pour soi !
 Bourgeoisie = classe en soi + classe pour soi = classe so au sens de Marx !

3. Un critère de classe structurant les autres critères de distinction (critère de classe domine, les autres
inégalités en dépendent, découlent)
Autres facteurs de hiérarchisation de l’espace social n’empêche pas le critère de classes de rester prédominant.
Ex : parmi les femmes  femmes diplômées, cadres, qualifiées qui emploient femmes non qualifiés pour tâches
domestiques. Externalisation des tâches domestiques pour libérer femmes mais finalement femmes qualifiées qui
emploient les femmes moins qualifiées  inégalités de classe perdurent entre les femmes, en voulant réduire
inégalités hommes/femmes => création d’inégalités entre les femmes.
 Les inégalités de genre n’ont pu être en partie réduites qu’au prix d’inégalités de revenus entre femmes.
 L’existence d’inégalités de genre n’invalide pas l’analyse en termes de classes so
 Inégalités de genre et inégalités de classes coexistent
Ex : Les Gilets jaunes
Mouvement de revendications des classes populaires pour hausse pouvoir d’achat. Mobilisation collective = classe en
soi et pour soi (car prise de conscience et mobilisation !) mais effritement dans le temps... (pas de leader, comme PC
ouvriers)

BILAN
Des frontières de classes qui s’estompent Mais des classes sociales toujours présentes
 Moyennisation  Maintien / essor des inégalités économiques et
 Baisse des distances inter-classe sociales (distances inter-classes)
 Recul des consciences de classe  La montée des inégalités entre groupes sociaux
 L’individualisation des conditions de travail et  Les inégalités de genre
des salaires  La bourgeoisie : une classe sociale toujours
 Multiplication des facteurs d’individualisation mobilisée
 Des rapports sociaux de genre articulés aux
rapports de classe (ex : inégalités entre femmes
cadres et femmes employées)

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