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Recueil Dalloz

Recueil Dalloz 2004 p.1179

La fiction au secours des quasi-contrats ou l'achèvement d'un débat juridique

Emmanuel Terrier, Docteur en droit, Chargé d'enseignements à la faculté de droit de Montpellier

L'essentiel

Les décisions récentes rendues dans le domaine des quasi-contrats apportent une extension remarquable dans le domaine concerné
par cette source d'obligations.

Pourtant, s'il ne s'agit pas exactement de la « révolution quasi contractuelle », cette évolution prétorienne est tout de même
intéressante au regard de la théorie des quasi-contrats. Certes, l'élargissement énoncé ne trouve aucune réelle justification au regard
des critères qui sont donnés tant de manière classique que moderne. Cependant, tout l'apport de ces décisions est de mettre fin à une
controverse ancestrale sur les fondements d'une notion ambiguë.

1 - La « résurrection » prétorienne des quasi-contrats, attendue et arrivée, n'apporte pas la lumière espérée sur les contours
exacts qui définissent cette notion et moins encore sur le régime des obligations qui en naissent.

2 - La jurisprudence la plus récente semble prendre l'habitude, peut-être contestable, de se référer aux quasi-contrats dès
lors que les recours aux systèmes classiques de responsabilité semblent obstrués. Un tel usage est tentant dans la mesure
où il est facilement réalisable, il est même attrayant puisque l'obligation quasi contractuelle naît d'une situation juridique
à la fois non conventionnelle et licite. Ainsi, glissant entre les interstices, cette notion est-elle susceptible de recouvrir tout
ce qui est délaissé tant par le régime contractuel que par le régime délictuel. A ce titre, la définition du quasi-contrat
offrirait la possibilité de sanctionner des situations pour lesquelles les formes classiques de responsabilité ne seraient
d'aucun secours (1).

3 - C'est ainsi, semble-t-il, qu'il convient d'observer les décisions récentes, rendues au visa de l'article 1371 du code civil,
qui utilisent cette notion pour qualifier des situations jusqu'alors inédites (2). Certains auteurs y voient une sorte de «
qualification miracle » qui justifierait l'intervention du droit dans nombre de situations à problèmes (3) ; d'autres, en
revanche, minimisent ou critiquent le phénomène, en émettant de nombreuses contestations à propos des qualifications
hasardeuses auxquelles se prête parfois la jurisprudence (4). Mais d'aucuns voient, en cet élan prétorien, l'inauguration
d'une catégorie générale de quasi-contrats innomés.

4 - Cet engouement nouveau est paradoxal au regard d'une opinion traditionnelle qui présentait cette source d'obligations
comme celle « dont l'intérêt et la pertinence aient été les plus contestés [...] » (5). L'aversion classique s'est traduite par
le soin tout particulier que prennent habituellement les auteurs à éviter une approche générale de la notion de quasi-
contrat en s'attachant directement à la description des situations quasi contractuelles particulières de la gestion d'affaire,
de l'enrichissement sans cause et du paiement de l'indu (6).
5 - Tout porte à croire qu'il faille aujourd'hui perturber deux siècles d'enseignement du droit des obligations (7) et en
envisager tant une définition générale qu'une théorisation autonome des quasi-contrats innomés. Cela signifierait dès lors
que le droit positif actuel a réussi à dissiper les incertitudes inhérentes à cette notion. Mais il apparaît vite que ce n'est pas
le cas.

6 - Il convient, en effet, de limiter l'enthousiasme initial que suscite l'analyse première de ce mouvement jurisprudentiel
dans la mesure où celui-ci, sortant des schémas traditionnels, soulève des difficultés au regard des justifications de la
notion. Cette difficulté devrait amener à se demander si ces jurisprudences n'ont pas, par une extension trop large, modifié
la nature particulière de cette source d'obligations. Un questionnement sur une éventuelle dénaturation des quasi-contrats
vient alors à l'esprit (I). Toutefois, ce pessimisme s'estompe rapidement si l'on accepte de se prêter à une étude
fondamentale et originelle de la notion, qui, par ailleurs, en fait sa spécificité. Il apparaît alors que loin de faire des quasi-
contrats un concept juridique dénaturé, l'élan jurisprudentiel nouveau n'est qu'un « retour aux sources » de celui-ci (II).

I - L'éventuelle dénaturation des quasi-contrats


7 - Le recours à la qualification de quasi-contrat dans des domaines très divers et hors du cadre résiduel dans lequel la loi
l'avait cantonné (8) devait amener à la volonté d'affirmer une utilisation autonome du quasi-contrat (9). Or, une telle
utilisation laisse planer des incertitudes sur la nature même de la notion, posant un certain nombre de difficultés au regard
des justifications qui lui sont généralement données. Ni les critères traditionnels (A), ni les théories nouvelles (B) ne
justifient la référence actuelle aux quasi-contrats, qui semblent, de ce fait, avoir changé de nature.

A - Une dénaturation par absence de la justification traditionnelle

8 - Le quasi-contrat est entendu, originellement (10), comme un acte licite générateur d'obligations civiles, n'impliquant
pas le consentement des parties, mais qui est sanctionné comme un contrat. Les décisions récemment rendues pourraient
effectivement cadrer avec cette approche ancienne, si la justification classique donnée à ce mécanisme (1) ne devait être
écartée (2).

1 - La justification classique recherchée

9 - Afin d'entériner l'existence d'un mécanisme quelque peu particulier, la réflexion juridique a tenté de trouver une sorte
de dénominateur commun qui permettrait de le justifier. Ce fut l'idée d'un déséquilibre. En effet, les situations liées à ce
mécanisme présentent, toutes, au départ, un désavantage économique : l'attribution d'un avantage injustifié à une
personne au détriment d'une autre. Les quasi-contrats feraient donc naître une obligation à la suite d'un « fait juridique
profitable » (11) à l'une des parties. Ils offrent ainsi une possibilité de rééquilibrer la situation, alors même que le droit
ne l'aurait pas permis.

Ainsi peut-on voir les actes à l'origine d'une gestion d'affaire comme des actes nécessaires, dont la carence aurait causé un
préjudice au géré, et qui, en revanche, ont pesé sur le gérant. Le paiement de l'indu est, lui, un paiement injustifié qui
constitue un avantage financier indéniable à une personne au détriment d'une autre. Le bénéfice originaire se traduit
comme un avantage sans équivalent « naturel » ou factuel pour le tiers en relation avec le bénéficiaire.

C'est en raison de la recherche d'un tel équilibre entre des intérêts divergents que fut proposée l'idée d'une équité (12)
quasi contractuelle, laquelle justifierait l'existence de cette source d'obligation en exigeant la correction de ces
désavantages. La loi édicte donc un correctif pour ces situations de déséquilibre positif, créées par l'attribution sans raison
d'un actif.

10 - La justification, a priori solide (13), fut à l'origine de l'émergence, à la fin du XIXe siècle, de la théorie de
l'enrichissement sans cause. La Cour de cassation, en affirmant l'existence de l'action de in rem verso au visa de l'article
1371 du code civil (14), fit de l'équité le fondement même de l'avènement de cette action (15). Cette analyse
emportera, jusqu'à nos jours, la conviction de la majorité de la doctrine (16), les considérations d'équité constituant le «
seul critère opératoire [...], dont la pertinence est absolue » (17). Elle pourrait justifier à nouveau l'extension de la
catégorie des quasi-contrats.

2 - La justification classique écartée

11 - Cependant, dès le début du XXe siècle, le critère d'une équité économique a été peu à peu écarté (18), le quasi-
contrat étant rapidement conditionné à d'autres critères comme la notion de subsidiarité (19) pour l'action de in rem
verso (20).

Les décisions rendues aujourd'hui ne font plus du critère de l'équité un élément pertinent. L'arrêt de la Chambre
commerciale précité du 26 octobre 1999 l'illustre parfaitement. Cette décision se prononce sur la nature de la sanction de
l'engagement du cessionnaire d'une entreprise en difficulté. La Cour de cassation a sanctionné, en l'espèce, l'inexécution
de l'engagement d'un cessionnaire, alors même que ce dernier n'avait pas signé le plan de cession, au visa de l'article 1371
du code civil. Le choix du quasi-contrat dans cette affaire est remarquable, dans la mesure où il s'agissait de sanctionner
l'inexécution d'un plan de cession qui était dénué de tout caractère définitif, faute de signature de la part du cessionnaire.
La situation en cause était donc antérieure à tout déplacement de valeurs. Il n'y avait eu, en l'espèce, aucun «
enrichissement » ou, plus exactement, de « bénéfice » en faveur du « cessionnaire », justifiant le fait qu'il soit tenu d'une
obligation quasi contractuelle (21).

Cette qualification aurait très bien pu passer pour malencontreuse si elle était demeurée un cas isolé. Or, statuant dans un
tout autre domaine, la Cour de cassation a pu confirmer qu'elle entendait étendre le champ d'investigation de l'article
1371 du code civil.

12 - Les deux arrêts précités, désormais célèbres, de la Chambre mixte de la Cour de cassation du 6 septembre 2002 ont
offert l'occasion, à propos de contentieux opposant des sociétés de loterie publicitaire à des consommateurs plus ou moins
crédules, de trancher la controverse relative au régime de responsabilité des sociétés de ce type dont l'habitude était
d'envoyer aux consommateurs des lettres leur faisant croire qu'ils étaient les gagnants de lots importants. Or, bien souvent,
aucun gain n'était en jeu, ou, quand celui-ci existait, l'« heureux gagnant » ignorait qu'il n'en était que potentiellement
gagnant : le gain était fictif au moment de la réception de la lettre ; c'était un simple appât publicitaire. Si, classiquement,
les juges sanctionnaient cette démarche sur un fondement conventionnel (22) ou délictuel (23), la décision fut ici
rendue au visa de l'article 1371 du code civil. Cette solution met fin au débat sur la nature de la responsabilité à mettre en
jeu dans de telles situations mais elle est, sinon critiquable, du moins atypique.

13 - Dans ces situations, encore, il n'y a aucun déplacement réel de valeurs : les lettres « annonce[nt] un gain à une
personne dénommée sans mettre en évidence l'existence d'un aléa » (24). Ne sont susceptibles d'être qualifiées de quasi-
contrat que les lettres qui provoquent une croyance ferme en gain, alors que dans ces affaires il n'y a aucune attribution
véritable. De ce fait, le critère d'équité n'est plus pertinent, car nul ne bénéficie d'un avantage injustifié : les sociétés
condamnées n'avaient pas conditionné par ces loteries le « pseudo-gain » à un achat quelconque. Il n'y a donc en leur
faveur ni bénéfices directs ni transfert de valeurs qui justifierait le rétablissement d'un équilibre économique. Le « pseudo-
bénéficiaire », lui, ne pouvait se prévaloir d'un gain certain, faute de quoi le contentieux eût été assurément contractuel.

14 - S'il y avait eu transfert de la valeur promise (25), celui-ci n'aurait pu être effectué que par la seule réception de la
lettre. Un tel raisonnement n'est possible qu'en accordant à cette lettre la valeur d'un engagement volontaire ferme : un
instrumentum de la volonté d'attribuer le gain. Elle correspondrait alors davantage à une offre ou à un engagement
unilatéral qu'au « fait purement volontaire » qui est à l'origine des situations quasi contractuelles. La distinction entre les
situations conventionnelles et quasi contractuelles réside en l'objet de la volonté. Celui-ci opère dans les situations quasi
contractuelles sur un simple fait sans chercher à créer un effet juridique. Or, en l'espèce, il y a la volonté d'envoyer une
lettre dont les termes sont équivoques ce qui va provoquer, dans l'esprit de son destinataire, l'illusion d'un gain et non son
attribution. C'est là le seul effet attendu et toute autre approche modifierait, ici, l'intention des sociétés.

15 - La situation réelle, ne présentant ainsi aucun déplacement de valeur, dénature le quasi-contrat. « Traditionnellement
appréhendé comme un mécanisme de compensation ou de restitution en faveur de l'auteur d'un fait profitable d'autrui, il
constitue désormais aussi une technique de sanction « des promesses sans lendemain » (26). Le fait purement volontaire
qui sera à l'origine de cette qualification n'est plus celui qui procure un avantage non justifié à une personne, mais un fait
« accompli dans son propre intérêt, et qui a engendré une simple espérance de gain dans l'esprit d'autrui... » (27).

16 - De ce fait, puisque, en l'absence de transfert de valeur, il n'y a plus déséquilibre, le critère de l'équité n'est plus
pertinent. Il faut donc rechercher et apprécier une justification nouvelle du tournant pris par la Cour de cassation en
matière quasi contractuelle.

B - Une dénaturation par inadéquation de la justification nouvelle

17 - Dans la mesure où le quasi-contrat est utilisé désormais dans des situations où l'équité ne semble pas en être la
justification, il convient d'en trouver une autre (1). Mais, là encore, l'idée d'une justification apparaît fort délicate (2).

1 - La justification nouvelle recherchée

18 - C'est par la théorie de l'apparence que certains ont cherché à justifier le quasi-contrat (28). Les tenants de cette
analyse partent de l'idée que, dans l'hypothèse où le contrat apparent trouve son fondement dans la loi, le lien de droit qui
en découle produit exactement les effets du contrat (29). Il convient dès lors d'en déduire une analogie parfaite avec le
quasi-contrat. Bien que marginale, cette hypothèse pourrait justifier l'extension jurisprudentielle de l'article 1371 du code
civil, mais la transposition des postulats de cette théorie dans les nouvelles situations quasi contractuelles paraît difficile.

19 - Une lecture des décisions de justice au regard de la théorie ainsi énoncée permettrait de penser que l'article 1371 du
code civil représente le fondement textuel de la théorie purement prétorienne de l'apparence (30) tant pour le « quasi-
gagnant » des loteries publicitaires que dans le « quasi-plan de cession » de sociétés en difficultés.

Les situations en cause dans ces deux espèces présentent bien des faits qui échappent en réalité au contrôle habituel du
droit et malgré cela les solutions en font émerger des droits subjectifs. Or la théorie de l'apparence admet que des « droits
apparents » produisent des conséquences juridiques en dépit de l'inefficacité réelle des règles. Le rapprochement paraît
donc s'imposer et la justification acquise.

20 - L'attribution d'un fondement textuel faciliterait l'admission des hypothèses d'apparence. Par ailleurs, et du seul point
de vue pratique, l'on passerait d'un système où il faut apporter la preuve de l'erreur et de sa légitimité (31) à un système
de présomption de bonne foi (32). Ainsi, n'y aurait-il plus lieu de démontrer d'une part que « tout prêtait à croire » et
d'autre part qu' « on a cru » (33). Or, là encore, la justification semble inopportune.

2 - La justification nouvelle écartée

21 - La justification par l'apparence doit être abandonnée. D'abord, comme cela a été soulevé, l'apparence met en scène
une situation juridique à trois personnes qui cadre mal avec les situations factuelles des arrêts rendus (34). Ensuite, il
faut constater que les décisions susévoquées vont bien au-delà de cette théorie, la protection qu'elles imposent dépassant
amplement les objectifs pour lesquelles celle-ci a été élaborée.

En effet, le but de cette théorie est de protéger les personnes qui agissent pour acquérir des droits, partant d'une erreur
légitime d'appréciation des faits. Ainsi l'acquéreur d'un bien qui croit légitimement être en relation avec le propriétaire;
celui qui contracte avec un tiers, pense que celui-ci est le mandataire d'un autre, et est protégé en considération des risques
juridiques que comportent les opérations dans lesquelles il s'était engagé. La théorie de l'apparence a été émise pour inviter
à l'action. En revanche, elle ne protège pas ceux qui prétendent tirer profit d'une situation sans effort personnel : « ceux
qui sont protégés sont ceux qui agissent pour acquérir des droits, non ceux qui prétendent tirer profit de la situation
existante sans effort personnel » (35). L'extension jurisprudentielle des quasi-contrats par la théorie de l'apparence
dénaturerait alors profondément celle-ci. Elle ne justifie donc pas l'élan prétorien nouveau.

22 - Ainsi, les solutions nouvelles, révélatrices d'un engouement nouveau pour les quasi-contrats, ne trouvent, au regard
des critères énoncés, aucun élément qui pourrait justifier l'élargissement de cette notion à un régime général issu d'une
utilisation autonome de l'article 1371 du code civil. Faut-il admettre le fait, sans avoir à en rechercher la raison et se
cantonner dans la consécration aisée de quasi-contrats sui generis dégagés par les juges au gré des situations ou, mieux
encore, de leur fantaisie (36) ? S'agit-il d'une « qualification par défaut » (37) ou d'une consécration d'un mécanisme
de responsabilité, qui jouerait de façon subsidiaire quand le recours aux autres régimes de responsabilité est fermé ? Outre
le fait qu'un tel usage est loin d'être souhaitable, ce serait voir, dans ces dernières décisions, la brèche qui amènerait une
dénaturation par l'éclatement total de la notion.

23 - Déjà de nombreuses propositions avaient été faites en faveur d'une extension des quasi-contrats pour qualifier les
conventions d'assistance, de transport bénévole, de dépôt nécessaire, des pourparlers contractuels... La jurisprudence est
donc, en quelque sorte, le porte-parole du nouvel engouement doctrinal pour les quasi-contrats. Le risque est de voir les
magistrats consacrer une par une chacune de ces propositions et faire de la sorte de la catégorie des quasi-contrats un
agrégat de situations juridiques sans aucun autre critère commun.

24 - Ne conviendrait-il pas d'opter pour une analyse moins novatrice mais plus rassurante ? En fait, la réponse au dilemme
quasi contractuel devrait être recherchée non pas dans une approche prospective de ces décisions, mais bien, au contraire,
dans une analyse rétrospective des fondements de la notion de quasi-contrat elle-même. En effet, si l'on accepte de ne pas
observer l'évolution jurisprudentielle comme un vaste mouvement d'évolution de la notion, mais au regard de ses origines,
tout l'apport de cette « résurrection » quasi contractuelle serait de mettre un terme aux controverses qui, depuis la
résurgence du droit romain, tendent à fonder cette source d'obligations à tout le moins atypique. Dès lors, loin de dénaturer
les quasi-contrats, elle manifesterait, bien au contraire, un véritable retour aux sources de cette notion.

II - Le « retour aux sources » des quasi-contrats


25 - Le dilemme concernant la notion de quasi-contrat tient au fait que celle-ci est née d'une méprise, laquelle a généré
non seulement l'aversion qu'elle subit depuis sa redécouverte, mais encore de réelles controverses sur ses fondements. La
jurisprudence actuelle, si elle ne trouve pas de justification au regard des mécanismes classiques, permet, si l'on accepte
de se pencher sur le concept originaire de la notion de quasi-contrat, de mettre un terme à ces controverses en réunissant
les éléments des sources des quasi-contrats qui jusqu'alors n'avaient été présentés que de manière alternative. En étendant
leur portée, la pratique prétorienne étend par voie de conséquence les fondements, réunissant (B) ce qui était
traditionnellement et historiquement morcelé (A).

A - Le morcellement des fondements des quasi-contrats

26 - Le caractère presque « ésotérique » de la notion de quasi-contrat pousse à la tentation de remonter jusqu'à ses origines
dans l'espoir d'y retrouver son essence et de pouvoir dissiper les ambiguïtés qui l'accompagnent. Les doutes inhérents à la
notion paraissent venir, pour une grande partie, de l'interprétation du droit romain (38). C'est donc tout naturellement
en remontant jusqu'à lui que s'expliquent les raisons de ce morcellement (1), et mieux encore la solution qui y fut apportée
(2).

1 - Les raisons historiques du morcellement

27 - L'expression de quasi-contrat doit sa découverte à l'affinement de la notion de contrat. Jusqu'au Ier siècle de notre ère,
les juristes romains ne possédaient, en réalité, que deux sources d'obligations, celles dont l'origine est licite, dans le sens où
elles n'ont pas comme source un fait nuisible pour autrui, et celles dont l'origine est un fait illicite (39). Les premières
étaient qualifiées de contractuelles, les secondes de délictuelles. Ainsi, longtemps les situations « contractuelles »
renvoyaient bien plus à la notion de licéité qu'à l'idée de rencontre des volontés (40).

28 - A la fin de l'époque classique, les juristes ont fait un rapprochement entre l'effet obligatoire des obligations et l'échange
des consentements, établissant entre eux un lien de causalité. Une conception plus étroite de la notion de contrat est née,
comprenant uniquement les obligations fondées sur l'accord des volontés. De ce fait, un certain nombre de situations
auxquelles les juristes romains reconnaissaient des effets de droits similaires à ceux des contrats se trouvèrent
progressivement exclues de la définition du rapport contractuel. Ceci poussa Gaïus (41) à définir ces situations comme
celles dans lesquelles le débiteur est tenu quasi ex contractu, c'est-à-dire comme s'il y avait eu un contrat (42). Mais
jamais les Romains n'ont tenté de définir la notion de quasi-contrat. Celle-ci s'appréhendait négativement : ce n'est pas un
contrat car il n'y a pas à son origine de rencontre des consentements et ce n'est pas un délit car le fait qui en est la cause
n'est ni prohibé, ni dommageable. Ainsi les quasi-contrats n'avaient-ils, originellement, aucune unité conceptuelle (43).
Ils signifiaient seulement l'existence d'une catégorie intermédiaire. Cependant le risque d'une confusion ne résista pas à
la relecture des glossateurs qui firent des quasi-contrats une source autonome d'obligations.

29 - La redécouverte des Institutes fut l'occasion de systématiser la division quadripartite de Gaïus. L'origine quasi ex
contractu de l'obligation fut en quelque sorte stigmatisée comme s'il s'agissait alors d'une naissance ex quasi contractu des
obligations (44). Que cette division des sources fut un « contresens » (45), un « malentendu » (46) ou simplement
un accident importe peu : puisque la conception d'une catégorie d'obligation venait de naître, il fallait désormais pouvoir
l'expliquer et en assumer au mieux les conséquences.

30 - Partant d'une création involontaire, la lacune première à combler fut celle des justifications de l'institution, c'est-à-
dire la recherche d'un fondement a posteriori qui devait pouvoir expliquer les conséquences juridiques prêtées à ces
situations. Ce raisonnement visait donc à construire à partir d'une erreur initiale une institution, comme pour une
architecture où le bâtiment aurait existé avant même que l'on se fût préoccupé des fondations.
31 - Il importait, en effet, de trouver un fondement à cette catégorie d'obligations nées de ces quasi-contrats, et de ce fait
de justifier l'existence même du quasi-contrat. C'est ainsi que naquit une querelle qui devait diviser, au XIIIe siècle, les
glossateurs. L'école d'Azon énonçait que le quasi-contrat oblige parce que la loi en a décidé ainsi, et ce pour des raisons
d'équité. La théorisation fondée sur l'idée d'une existence réelle en vertu de la loi s'avérait rassurante. Elle encadrait de
manière étroite un mécanisme mal appréhendé et peu rationnel et devait, de ce fait, triompher de l'idée d'une justification
fondée sur la fiction.

2 - La solution classique au morcellement

32 - Face à l'école d'Azon, les disciples de Bartole prônaient une justification de l'émergence du quasi-contrat au regard de
l'idée de fiction (47), mécanisme flou (48), au demeurant fort répandu aujourd'hui (49). L'idée de ces exégètes
revenait à affirmer que les quasi-contrats créent l'illusion d'un contrat et obligent de ce fait. Il est vrai qu'en admettant que
la fiction soit « un artifice de technique juridique (...) consistant à supposer un fait ou une situation différents de la réalité
en vue de produire un effet de droit » (50), il est possible de reconnaître que les quasi-contrats soient des consentements
fictifs créant un mécanisme illusoire de contrat. Cela permet d'élargir la notion à des types inconnus de quasi-contrats : le
concept n'étant plus encadré par les termes de la loi, il peut être ouvert à des situations où la stricte analyse de la situation
n'aurait pas permis de l'appliquer à tout cas de figure où il y a illusion de contrat. Mais cette théorisation ne devait pas
emporter la conviction des juristes postérieurs.

33 - Les auteurs de droit coutumier se sont rattachés à la théorie d'Azon (51). Ce qui n'est ni contractuel, ni délictuel
peut être quasi contractuel à condition que la loi en dispose ainsi, et ce dans un souci d'équité. En conséquence, lorsque a
été rédigée dans le code civil la partie relative aux quasi-contrats, une application toute particulière a été accordée aux
développements relatifs aux deux cas particuliers de quasi-contrats, la gestion d'affaire (52) et le paiement de l'indu
(53). La définition générale fut bâclée (54) car, dans l'esprit du législateur, elle était inutile : l'élément essentiel du quasi-
contrat n'était autre que la volonté légale. Les termes de l'article 1371 du code civil semblent ainsi n'avoir pour seule
ambition que d'introduire, le plus vaguement possible, les quasi-contrats nommés. Ce texte ne saurait donc prétendre à la
précision d'une définition de qualité (55) et moins encore à fonder un principe général (56).

De ce fait, dans le code civil, les quasi-contrats demeurent « une notion obscure et ambiguë dont le paradoxe est qu'elle a
cependant définitivement acquis droit de cité » (57).

34 - A partir du XXe siècle, ce point de vue ne fut plus remis en question. La théorie légaliste, ayant l'avantage de la
simplicité, fut acquise, une fois pour toutes. Il faut, en effet, reconnaître qu'elle résout, a priori, bien des problèmes.
D'abord, l'autorité législative répond d'emblée à la question de l'origine coercitive de cette catégorie d'obligation. Ensuite,
elle justifie que les auteurs ne s'aventurent pas sur l'étude hasardeuse de la catégorie elle-même et ne se cantonnent que
dans l'analyse exégétique des quasi-contrats nommés, seule expression de la loi. Cette théorie, cependant, offre ses limites
notamment au regard des fondements de la notion quasi contractuelle. Rien n'explique, en effet, pourquoi la loi fait naître
des situations de gestion d'affaire et de paiement de l'indu des obligations. La justification de la source quasi contractuelle
d'obligations demeure donc incertaine. Cette faille permettrait ainsi toute extension du régime des obligations nées quasi
ex contractu non fondée sur la loi.

35 - L'acceptation consensuelle de cette théorie prend désormais un tout nouveau profil avec la jurisprudence nouvelle
qui balaye la conception classique de l'article 1371 du code civil. Cette sorte d' « émancipation » prétorienne de la notion
illustre significativement l'explosion de l'aménagement classique qui était admis et fait ressurgir les mânes des tenants de
l'école de Bartole. Mais, paradoxalement, loin de ressusciter la querelle ancestrale, les nouvelles décisions rendues en
matière quasi contractuelle y mettent définitivement un terme en réunissant les éléments qui étaient originellement en
opposition.

B - La réunion des fondements des quasi-contrats

36 - Bien que les décisions rendues aient du mal à être justifiées, il faut bien se rendre à l'évidence et admettre que les
situations en cause ont été génératrices de droit en raison de leur proximité apparente avec une situation contractuelle.
Ressurgit alors l'idée d'une fiction, issue de la ressemblance avec le mécanisme conventionnel.

37 - Le propos est ancien. Dès le XIXe siècle, fut avancée l'idée que la gestion d'affaire n'était rien d'autre qu'un mandat
fictif et que le paiement de l'indu était une forme de prêt fictif (58). Balayée par l'émergence de la théorie de
l'enrichissement sans cause, elle réapparaît, pourtant, sans ambiguïtés, aujourd'hui.

38 - Dans le cas des loteries publicitaires, l'engagement quasi contractuel ne peut résulter que d' « un fait », « purement
volontaire ». Le fait qui sera à l'origine de l'obligation en l'espèce est l'attitude de « l'organisateur d'une loterie qui annonce
un gain à une personne dénommée sans mettre en évidence l'existence d'un aléa » (59). La source de l'obligation réside
donc dans le comportement volontaire d'induire en erreur, dans la volonté de faire croire à l'attribution d'un gain.
Autrement dit, le fait sanctionné n'est autre que la création d'une illusion, dans la mesure où l'offre, en l'espèce, ne peut
être entendue que comme fictive. La fiction du gain va engager l'illusionniste en ce qu'il n'a pas mis en évidence l'existence
d'un aléa. Cette décision permet ainsi à une croyance de bonne foi de devenir réalité. Le quasi-contrat permet « la mutation
de l'illusion créée dans l'esprit du consommateur en obligation à la charge de l'entreprise organisatrice d'une loterie »
(60).

39 - La décision relative à la sanction de l'inexécution d'une cession d'entreprise, imparfaite en la forme (61), pourrait
également être rapprochée de ce mouvement jurisprudentiel favorable à la reconnaissance de droits illusoires. Il faut
rappeler que, en l'espèce, le plan de cession n'avait pas été signé par le « cessionnaire », impliquant l'impossibilité de se
prévaloir des règles relatives aux cessions d'entreprise. Là encore, fiction. Aucun droit réel n'existe, mais la situation de
fait porte à croire en l'existence d'un lien de droit. Le magistrat, grâce à cette catégorie hybride d'obligations, possède un
outil parfait pour rendre l'illusion contractuelle concrète : la volonté apparente bien réelle.

40 - Si ces décisions ne répondent pas à l'esprit dans lequel a été construite la théorie de l'apparence (62), il s'agit
néanmoins d'une situation où la croyance - entendue comme illusion - devient source de droit. Les faits sont trompeurs, ils
induisent en erreur. Ils créaient le faux espoir de la reprise d'une entreprise en difficulté par des créanciers impayés ou
celui d'un gain ; mais la réalité est, au regard de cette croyance, décevante.

41 - Pour autant, il ne s'agit pas d'une forme subsidiaire de responsabilité civile. En effet, ces décisions, dont le seul objectif
est de réaliser une croyance, vont uniquement dans le sens d'une reconnaissance de la fiction contractuelle. Elles ne
tendent pas à sanctionner le comportement qui consiste à induire en erreur, car en cela le fondement délictuel établi sur
la volonté dolosive eût été plus opportun.

42 - Le fondement de ces décisions se situe assurément en amont de cela. Le droit cherche à résoudre le problème des
situations illusoires, à donner une force créatrice à la croyance. C'est parce que l'on croit en l'existence d'un rapport
juridique que celui-ci devrait exister. On n'indemnise pas la peine que procure la réalité, mais on donne corps à la foi.

De cette manière, les explications avancées à l'époque de la renaissance du droit romain ressurgissent. Les quasi-contrats
sont des sources d'obligations parce qu'ils sont quasiment des contrats (63). Les faits ressemblent à un rapport juridique.
Les mécanismes quasi contractuels nouveaux donnent, précisément, l'illusion d'un contrat. Ils ne présentent pas la
condition essentielle à la formation de ce lien juridique puisqu'il n'y a pas à leur origine la rencontre de deux
consentements, mais, tels qu'ils sont perçus, l'idée erronée de l'engagement de l'un provoque la volonté de s'engager de
l'autre. La rencontre des volontés est illusoire, le lien contractuel est une fiction. Mais c'est cette fiction, ou plus exactement
cette illusion, qui crée du droit.

43 - Voilà pourquoi ce n'est pas la révolution quasi contractuelle tant attendue par une certaine partie de la doctrine, mais
seulement l'achèvement d'un débat plus qu'ancestral : celui de la justification de cette catégorie fortuite d'obligation.

La querelle théorique qui a pu séparer la doctrine à des époques différentes prend fin par une conciliation. Les deux
hypothèses contribuent désormais ensemble à la construction du droit positif (64). Le fondement légaliste, qui trouve sa
justification dans l'équité, demeure. Il reste le fondement classique des quasi-contrats nommés et de l'extension
traditionnelle faite par la jurisprudence à l'action de in rem verso. L'extension récente faite par la jurisprudence du
domaine des quasi-contrats étend, désormais, les fondements de cette source d'obligations à l'illusion. Elle ouvre la porte,
chaque fois que ce cas de figure se présentera, à un possible rattachement à l'idée d'un quasi-contrat. L'école d'Azon et
celle de Bartole semblent aujourd'hui réconciliées par l'extension de la notion de l'illusion. Et si tout ceci n'était que justice
? Née d'une « méprise » ou d'une illusion trompeuse, la notion de quasi-contrats rend en quelque sorte hommage aux
circonstances de sa naissance, en la consacrant désormais comme une source de droit.

Mots clés :
CONTRAT ET OBLIGATIONS * Quasi-contrat * Notion * Théorie des quasi-contrats * Dénaturation * Retour aux
sources

(1) Cf. C. Asfar, Vers un élargissement de la catégorie des quasi-contrats, ou une nouvelle interprétation de l'article 1371
du code civil, Droit et Parimoine, mai 2002, p. 28.

(2) V. Cass. com. 26 oct. 1999, D. 2000, Jur. p. 383 , note A. Pélissier, et Somm. p. 328, obs. A. Honorat ; D. 1999, AJ
p. 67, obs. A. L. ; RTD civ. 2000, p. 835 , obs. J. Mestre et B. Fages ; JCP éd. E 2000, p. 127, n° 7, obs. M. Cabrillac et
P. Pétel ; Cass. ch. mixte 6 sept. 2002 (2 espèces), D. 2002, Jur. p. 2963 , note D. Mazeaud, et AJ p. 2931, obs. A. L. ;
RTD civ. 2003, p. 94 , obs. J. Mestre et B. Fages ; JCP 2002, II, 10173, note S. Reifegerste ; Contrats, conc., consom.
2002, comm. 151, obs. G. Raymond ;. V. aussi P. le Tourneau et A. Zabalza, Le réveil des quasi-contrats (à propos des
loteries publicitaires), Contrats, conc., consom. 2002, chron. n° 22 ; E. Savaux, Defrénois 2002, art. 37644, p. 1608 ; Cass.
1re civ. 18 mars 2003, D. 2003, IR p. 1009 ; Contrats, conc., consom. 2003, comm. n° 100 ; Rev. contrats 2003, n° 1, p.
80, note D. Fenouillet.

(3) M. Douchy, La notion de quasi-contrat en droit positif français, Economica, coll. Droit civil, 1997, n° 28 ; P. Malaurie
et L. Aynès, Droit civil, Les obligations, Defrénois, 9e éd., 2003, n° 902 ; A. Bénabent, Droit civil, Les obligations,
Montchrestien, 8e éd. 2001, n° 451 ; P. le Tourneau, Quasi-contrat, Rép. civ. Dalloz, n° 38 ; C. Asfar, op. cit. ; C. Aubert
de Vincelles, note sous Cass. ch. mixte 12 avr. 2002, D. 2002, Jur. p. 2433 .

(4) Pour Josserand cette notion est « un monstre légendaire » à « bannir du vocabulaire juridique », in Cours de droit civil
français, t. II, 1933, n° 10 ; V. aussi l'affirmation de l'inexistence de cette notion par H., J. et L. Mazeaud et F. Chabas,
Leçons de droit civil, t. II, Les obligations, Montchrestien, 9e éd., 1998, spéc. n° 649 ; R. Bout, in La gestion d'affaire en
droit français contemporain, préf. P. Kayser, LGDJ, 1972, n° 7. V. enfin D. Fenouillet, note préc.

(5) J. Honorat, Rôle effectif et rôle concevable des quasi-contrats en droit actuel, RTD civ. 1969, p. 653. V. également H.
Vizioz, La notion de quasi-contrat en droit civil, thèse, Bordeaux, 1912.

(6) V. Starck, Roland et Boyer, Les obligations, t. 2, Le contrat, Litec, 4e éd., 1996, p. 779 s. ; Marty, Raynaud et Jestaz,
Les obligations, t. IV, 2e éd., p. 200 s. ; R. Cabrillac, Droit des obligations, Dalloz, 5e éd., 2002.

(7) V. D. Mazeaud, note préc.

(8) Ibid.

(9) V. spéc. P. le Tourneau et A. Zabalza, chron. préc.

(10) Par ex. Théophile, Ad. Institutes, 4, 5. V. A.-E. Giffard, Précis de droit romain, t. 2, Les obligations, Précis Dalloz,
1938, n° 167 s.

(11) J. Carbonnier, Droit civil, les obligations, PUF, 2000, n° 297.

(12) Sur cette notion V. C. Albiges, Equité in Rép. civ. Dalloz, 2003.

(13) Cf. C. Albiges, De l'équité en droit privé, LGDJ, Biblio. dr. privé, 2000, vol. n° 329, n° 71 s.

(14) Cass. req. 15 juin 1892, Patureau, DP 1892, 1, p. 596 ; S. 1893, 1, p. 281, note J.-E. Labbe ; Grands arrêts..., 11e éd.,
Dalloz, 2000, par F. Terré et Y. Lequette, n° 227.

(15) Le lien absolu entre l'avènement de la théorie de l'enrichissement sans cause et la théorie de l'équité ne prête à aucun
doute. La Chambre des requêtes, par un arrêt du 17 mars 1857 (DP 1857, 1, p. 150) pour la gestion d'affaire, a ouvert la
voie à la reconnaissance ultérieure par les juridictions de l'enrichissement sans cause fondé sur l'équité, consacrée dans
l'arrêt Patureau précité.

(16) Cf. D. Mazeaud, note préc., l'auteur renvoyant à P. Malinvaud, in Droit des obligations, Litec, 2003, spéc. p. 325 ; J.
Carbonnier, op. cit., spéc. p. 525. Sont en faveur de cette explication doctrinale M. Douchy, P. le Tourneau, op. cit. ; V.
encore C. Aubert de Vincelles, pour qui « l'équité constituerait [...] le seul fondement cohérent du quasi-contrat », note
préc.

(17) P. le Tourneau, Quasi-contrat, Rép. civ. Dalloz, 2002, n° 15.

(18) C. Albiges, Equité, op. cit., n° 18.

(19) Cf. J. Raynard, A propos de la subsidiarité en droit privé, Mélanges Mouly, Litec, 1998, p. 131 s.

(20) Cass. civ. 2 mars 1915, DP 1920, 1, p. 102 ; Grands arrêts, op. cit., n° 115, p. 618. D'autres éléments visent à limiter
des cas de reconnaissance de l'action de in rem verso, ainsi l'incidence de la faute de l'appauvri (cf. Cass. com. 16 juill.
1985, D. 1985, Jur. p. 393, note J.-L. A. ; RTD civ. 1986, p. 110, obs. Mestre) hors du cas de l'imprudence ou de la
négligence (Cass. 1re civ. 11 mars 1997, D. 1997, Jur. p. 401, note Billiau ; Contrats, conc., consom. 1997, n° 113, note
Leveneur ; Gaz. Pal. 1997, 2, Somm. p. 453, obs. Piedelièvre).

(21) V. en ce sens C. Asfar, op. cit. ; A. Pélissier, note préc., spéc. n° 18.

(22) Sur la responsabilité contractuelle de ces sociétés : Cass. 2e civ. 11 févr 1998, D. 1999, Somm. p. 109 , obs. R.
Libchaber ; Defrénois 1998, p. 1044, obs. D. Mazeaud ; JCP 1998, II, 10156, note G. Carducci, 1998, I, 155, n° 1, obs.
M. Fabre-Magnan, et 1998, I, 185, n° 1 s., obs. G. Viney ; Cass. 1re civ. 12 juin 2001, D. 2002, Somm. p. 1316 , obs. D.
Mazeaud ; JCP 2002, II, 10104, note D. Houtcieff. Comp. la qualification d'engagement unilatéral pour ces loteries
publicitaires : Cass. 1re civ. 28 mars 1995, D. 1996, Jur. p. 180, note J.-L. Mouralis , et 1995, Somm. p. 227, obs. P.
Delebecque ; RTD civ. 1995, p. 886 , obs. J. Mestre.

(23) Sur la responsabilité civile délictuelle de ces mêmes sociétés : Cass. 2e civ. 3 mars 1988, D. 1988, Somm. p. 405, obs.
J.-L. Aubert, et 1990, Somm. p. 105 , obs. C. Gavalda et C. Lucas de Leyssac ; JCP 1989, II, 21313, note G. Virassamy
; 7 juin 1990, RTD com. 1991, p. 88 , obs. B. Bouloc ; D. 1990, IR p. 171 ; 28 mars 1995, préc. ; 18 déc. 1996, Bull.
civ. II, n° 307 ; 26 oct. 2000, Bull. civ. II, n° 148.

(24) Cass. ch. mixte 6 sept. 2002, 2e espèce, préc.

(25) Comme il semble ressortir du commentaire de ces décisions par P. le Tourneau, chron. préc.

(26) D. Mazeaud, note préc., spéc. n° 14.


(27) Ibid., n° 13.

(28) Le chef de file de cette renaissance doctrinale est certainement A. Bénabent, Les obligations, Montchrestien, op. cit.,
p. 323 et 324. D'autres auteurs se sont aussi prêté à ce rapprochement, comme E. Savaux à propos de Cass. 2e civ. 26 oct.
2000, Defrénois 2001, art. 37365, où il envisageait cette analyse pour des loteries publicitaires avant même le revirement
du 6 septembre. V. aussi D. Houtcieff, note préc. ; A. Batteur, Le mandat apparent en droit privé, thèse, Caen, 1989,
n° 857, p. 528 ; P. le Tourneau, Le mandat, Rép. civ. Dalloz, 1992, n° 162 s.

(29) A. Bénabent, op. cit., n° 501, p. 324.

(30) V. J. Ghestin et G. Goubeaux, Traité de droit civil, Introduction générale, LGDJ, 4e éd. 1994, n° 838 s.

(31) Pour que puisse être mise en oeuvre la théorie de l'apparence, il faut que la réalité prête objectivement à croire en
l'existence d'une situation de droit, et que celui qui se prévaut de cette confusion démontre qu'il a réellement commis
l'erreur. La seule ignorance de la situation véritable ne suffit pas, il faut que l'erreur commise « présente certains caractères
qui dépassent la bonne foi strictement entendue ». Cf. J. Ghestin et G. Goubeaux, op. cit., n° 862 s.

(32) C. civ., art. 2268.

(33) Le refus d'indemnisation qu'a essuyé le demandeur dans le second arrêt du 6 septembre 2002, préc., illustre cela.
Dans cette espèce, la présomption de bonne foi a échoué devant l'évidence des circonstances, puisque le consommateur
en réponse à la lettre lui annonçant son gain avait joint au bon de réception une lettre menaçant la société de vente par
correspondance de poursuites en cas de non-exécution de la promesse de gain. La Cour a donc rejeté le pourvoi arguant «
qu'il avait cherché à tirer profit d'un gain qu'il savait n'être pas le sien ». Sa lettre de menace avouait qu'il n'avait pas
réellement cru gagner.

(34) V. D. Mazeaud, citant P. le Tourneau, pour qui l'apparence « suppose toujours une situation juridique à trois
personnes (titulaire du droit réel, titulaire du droit apparent, tiers contractant) et un conflit d'intérêts entre les extrêmes »,
in note préc. note 2, D. 2002, Jur. p. 2963, n° 11.

(35) J. Ghestin et G. Goubeaux, op. cit., n° 869.

(36) S. Reifegerste, chron. préc.

(37) Cf. A. Pélissier, note préc., p. 386.


(38) L'appréhension « historico-critique » de la notion fut surtout développée par Vizioz, in La notion de quasi-contrat,
thèse préc.

(39) V. J.-L. Gazzaniga, Introduction historique au droit des obligations, 1992, PUF, n° 14 ; V. Rouhette, Contribution à
l'étude critique de la notion de contrat, thèse, Paris, 1965, n° 67 s., p. 279 s., à rapprocher de C. Despotopoulos, La notion
de synallagma chez Aristote, Archives phil. droit, 1968, p. 115.

(40) Cf. J. Honorat, op. cit., n° 11.

(41) Gaïus, Res cottidianae (pratique quotidienne), ouvrage qui devait, par la suite, être surnommé Aurei (Livre d'or) in
Digeste, 44, 7, 5 . A.-E. Giffard, op. cit., n° 11, n° 167 s. V. également J.-P. Levy, Histoire des obligations, Litec, 1995, p.
105 s.

(42) J.-P. Levy, ibid.

(43) Ces situations « classiques » d'obligations nées quasi ex contractu étaient : la gestion d'affaire, le paiement de l'indu,
l'indivision, l'obligation du tuteur envers son pupille et l'obligation qui incombe à l'héritier tenu du passif (cette dernière
ne se trouvant pas, a priori, dans la classification initiale de Gaïus) ; Cf. J. Honorat, op. cit., n° 12, p. 664 ; Giffard, op. cit.,
n° 167.

(44) J. Carbonnier, op. cit., n° 297 ; Vizioz, thèse préc.

(45) P. le Tourneau, in Rép. civ. Dalloz, op. cit., n° 2.

(46) J.-M. Jacquet, Les quasi-contrats, Rép. civ. Dalloz, Fasc. n° 10, 1996, n° 33.

(47) Sur l'inutilité de la fiction dans le droit, V. Starck, Roland et Boyer, Introduction au droit, Litec, 4e éd., 1996, n° 348.
Plus largement, P. Malaurie et L. Aynès, P. Morvan, Introduction générale, Defrénois, 2003, n° 166.

(48) P. Woodland, Le procédé de la fiction dans la pensée juridique, thèse, Paris II, 1981.

(49) V. J. Schmidt-Szalewski, Les fictions en droit privé, Archives phil. droit, t. 20, 1975, p. 273 s.; P. Woodland, Le
procédé de la fiction dans la pensée juridique, thèse, Paris II, 1981; G. Wicker, Les fictions juridiques, contribution à
l'analyse de l'acte juridique, préf. J. Amiel-Donat, LGDJ, Biblio. dr. privé, 1997, vol. n° 253.

(50) Fiction, in Vocabulaire juridique Capitant, par G. Cornu, PUF, coll. « Quadrige », 2003.

(51) Domat explique que les quasi-contrats emportent des obligations parce que la loi en dispose ainsi pour des raisons
d'équité. Pothier, quant à lui, ne put se résoudre à adopter un fondement unique. Il présenta la notion selon les deux
explications précédemment exposées : d'une part, la loi et l'équité, et, d'autre part, le consentement présumé.

(52) C. civ., art. 1372 à 1375.

(53) C. civ., art. 1376 à 1381.

(54) C. civ., art. 1371. Les termes ont longuement été critiqués, notamment par Planiol soulevant leur caractère incomplet,
contradictoire et inexact (Classification des sources des obligations, Rev. crit. législ. et jur., 1904, p. 230 s.).

(55) Planiol et Ripert, Traité pratique de droit civil français, t. 7, par P. Esmein, LGDJ, 2e éd., 1957, n° 719.

(56) Rappelons toutefois que l'alinéa 1er de l'art. 1384 c. civ. fut érigé en principe général de la responsabilité du fait des
choses : Cass. req. 6 mars 1928, DP 1928, 1, p. 97, note Josserand.

(57) J.-M. Jacquet, Les quasi-contrats, op. cit., n° 33.

(58) Cf. P. le Tourneau, Quasi-contrat in Rép. civ. op. cit., n° 18 et 19.

(59) Cass. ch. mixte 6 sept. 2002, 2e espèce, préc.

(60) D. Mazeaud, note préc., n° 3 et 13 : « le critère de l'obligation quasi contractuelle ne réside plus dans l'avantage
indûment reçu d'autrui à la suite d'un fait volontaire spontané et désintéressé, mais dans l'illusion légitime créée chez
autrui à la suite d'un fait volontaire, fût-il désintéressé... le quasi-contrat [...] constitue désormais aussi une technique de
sanction des promesses sans lendemain ».

(61) Cass. com. 26 oct. 1999, préc.


(62) V. supra, n° 18.

(63) Cf. Demolombe, Cours de Code Napoléon, t. 31, n° 53, cité par J.-M. Jacquet, op. cit., et D. Mazeaud, note préc.,
n° 11.

(64) V. en ce sens E. Savaux, obs. préc., Defrénois 2002, art. 37644, p. 1610.

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