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Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

COURS DE MICROECONOMIE APPLIQUEE A


LA FINANCE

Cours du Dr Kouakou Omer

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Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

Revenons à l’étymologie du mot finance. Finance signifie « arriver à la


fin ». Il y a finance lorsque des engagements sont pris et en fin de compte
honorés. En pratique, la définition de la finance par rapport à l’économie
repose sur l’introduction du temps. La finance est la prise en compte du
temps par les acteurs économiques.

Jean-Marc Daniel (2013)

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Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

CHAPITRE I

MARCHES FINANCIERS ET REALLOCATION DES RESSOURCES

Objectif pédagogique du chapitre 1 :

Ce chapitre doit permettre à l’étudiant(e) de:

 modéliser le marché financier dans sa fonction de réallocation des ressources ;


 comprendre comment les taux d’intérêt se forment sur les marchés financiers complets
et parfaits via l’arbitrage entre lissage de consommation et préférence pour la
consommation présente, d’une part, et d’autre part, via l’interaction entre taux d’intérêt
psychologique (taux d’impatience) et taux d’intérêt réel ;
 comprendre sur quels fondements théoriques reposent les formules exactes et
approchées de Fisher de calcul du taux d’intérêt réel, si utile à l’évaluation précise de
l’enrichissement réel des agents économiques ;
 savoir qu’il existe un taux d’intérêt réel unique déterminé sur les marchés financiers et
permettant d’équilibrer simultanément tous les marchés.

L’essentiel des résultats que nous déterminons dans ce chapitre est issu des travaux d’Irving
Fisher qui a élaboré des théories de taux d’intérêt et des prix des actifs à travers ses écrits de
1906 « La nature du revenu et du capital » et de 1930 « La théorie de l’intérêt ».

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Section 1 : Préférences intertemporelles du consommateur

Dans cette section, nous analysons les préférences intertemporelles en faisant ressortir les
ressorts psychologiques des choix intertemporels du consommateur. Ainsi, on abordera les
notions de taux d’impatience, de taux d’escompte psychologique et de taux d’intérêt
psychologique.

I) Marché financier et réallocation des ressources

Soit un agent (consommateur) dont les préférences sont représentées par une fonction d’utilité
intertemporelle 𝑈(𝑐1 , 𝑐2 ). Pour simplifier, on suppose que :

 Cette fonction d’utilité présente les propriétés usuelles : décroissance, convexité, etc.
 Il n’existe qu’un seul bien de consommation daté dont le prix à la date t, noté 𝑝𝑡 , est
déterminé par le marché

L’agent i possède des dotations initiales à chaque date, notées 𝑤𝑡𝑖 . Pour chaque agent dans
l’économie, soit il consomme tout ou partie de ses biens, soit il en cède tout ou partie. Mais il
ne peut la céder que contre la promesse de recevoir des biens dans le futur. L’échange porte sur
une quantité présente de biens contre la promesse de recevoir des biens d’une autre période.
Une telle opération de réallocation des ressources est motivée par le fait que chaque agent, de
par ses dotations initiales, peut être soit riche soit pauvre, ce qui nécessite d’épargner, de prêter
ou d’emprunter. De plus, chaque agent a une préférence différente du présent et du futur et les
aléas au cours du temps peuvent affecter de diverses façons les agents.

L’un des principaux mécanismes permettant aux agents de réallouer leurs ressources dans le
temps est le marché financier. Celui-ci se définit, dans une économie intertemporelle, comme
un système de réallocation intertemporelle des ressources entre les individus. Sur un tel marché,
les agents s’échangent des flux monétaires à des dates définies contractuellement. Le contrat
financier peut prendre deux formes selon la nature des liens entre les prêteurs de fonds et les
emprunteurs. Le contrat financier intermédié (finance indirecte) et le contrat financier non
intermédié (finance directe).

Pour permettre une bonne réallocation intertemporelle des ressources, le marché financier doit
revêtir certaines caractéristiques :

 Le marché financier doit être parfait : sur un tel marché financier parfait, les agents
peuvent alors prêter ou emprunter au même taux d’intérêt sans aucune contrainte sur les
quantités. La vente à découvert est donc possible. La seule restriction sur les
consommations est celle de la solvabilité des agents. Le prix des titres financiers reflète,
par conséquent, à tout moment toute l’information pertinente disponible. Un titre
financier est donc évalué à tout moment à son prix et le marché est dit efficient.

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 Le marché financier doit être complet : un marché financier complet permet la


réallocation d’une date vers n’importe quelle autre date. Dans une économie comprenant
𝑛 dates, 𝑛 − 1 marchés doivent exister pour que le marché financier soit complet. Tout
agent doit donc pouvoir, pour satisfaire son désir de consommation (d’épargne ou de
désépargne), réallouer n’importe quel montant vers n’importe quelle date. Les marchés
complets permettent de différer ou d’anticiper la consommation dans le temps. La
complétude du marché suppose implicitement l’existence de prix monétaire via les taux
d’intérêt permettant l’actualisation des revenus et des dépenses.
 Le marché financier doit permettre la circulation de titres financiers « à la Arrow »
(Arrow securities) : ceci pour préserver l’hypothèse de perfection et de complétude du
marché, dans un environnement incertain et donc d’aléa sur la consommation future. Il
est alors possible d’allouer librement de la richesse entre les différents scenarii possibles
quant à la consommation future de l’agent.

Soit un marché financier intermédié, parfait et complet dont le taux d’intérêt nominal court est
noté r. Notons 𝑆 𝑖 le montant des ressources réallouées par le marché. Quand 𝑆 𝑖 > 0, c’est de
l’épargne ; quand 𝑆 𝑖 < 0, c’est de l’emprunt.

Le programme de l’agent s’écrit :

max 𝑈𝑖 (𝑐1𝑖 , 𝑐2𝑖 )


𝑐1𝑖 ,𝑐2𝑖 ,𝑆 𝑖

𝑠𝑐 𝑡 = 1: 𝑝1 𝑐1𝑖 + 𝑆 𝑖 = 𝑝1 𝑤1𝑖 (11)

𝑠𝑐 𝑡 = 2: 𝑝2 𝑐2𝑖 = 𝑝2 𝑤2𝑖 + (1 + 𝑟)𝑆 𝑖 (12)

II) Préférences intertemporelles, taux d’intérêt psychologique et lissage de la


consommation

1) Notions de TMS intertemporel et de préférence pour le présent

Représentons les préférences du consommateur par une fonction d’utilité intertemporelle


𝑈(𝑐1 , 𝑐2 ). Pour simplifier, on suppose que cette fonction d’utilité est séparable : l’utilité de la
date t1 est indépendante de celle de la date t2.

Cette fonction d’utilité est associée à une courbe d’indifférence qui permet de définir le TMS
(taux marginal de substitution) intertemporel. Les caractéristiques du TMS :

 Le TMS intertemporel représente la quantité de bien de consommation de la date t2 qu’il


faut substituer à 1 unité consommée en t1 pour conserver la même utilité.

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 Graphiquement, le TMS intertemporel est la pente de la courbe d’indifférence


𝑑𝑐
intertemporelle: 𝑇𝑀𝑆2/1 = − 𝑑𝑐2 .
1

 Généralement 𝑇𝑀𝑆2/1 ≥ 1 : cela veut dire qu’il existe une préférence pour le présent
qu’on peut interpréter comme de l’impatience.

2) Notions de taux d’intérêt psychologique et de facteur d’escompte


psychologique

Supposons que la consommation présente est certaine alors que la consommation future
présente des aléas. Renoncer à de la consommation présente pour de la consommation future
comporte un risque. Pour que l’agent puisse le faire, il lui faut donc une rémunération que
traduit la notion de taux d’intérêt psychologique (ou taux d’impatience). Ce qu’on peut en dire
du taux d’intérêt psychologique :

 Il mesure la quantité additionnelle de biens de la date t2 qu’il faut offrir à l’agent pour
qu’il renonce à consommer une unité à la date t tout en conservant son utilité inchangée.
 C’est le rendement escompté.
 En définissant 𝜓 comme ce taux d’intérêt psychologique, il vient : 𝑇𝑀𝑆2/1 = 1 + 𝜓
 𝜓 > 0 ⇒ l’agent a de la préférence pour le présent.

La préférence pour le présent implique que l’agent accorde une moindre importance au futur.
Cette moindre importance pour le futur est rendue par la notion de facteur d’escompte
psychologique ou taux d’escompte psychologique :
1 1
 Ce taux d’escompte psychologique est définie par 𝛽 = = 1+𝜓
𝑇𝑀𝑆2/1

 Il mesure la quantité de bien à la date t=2 à laquelle l’agent est prêt à renoncer pour
obtenir une unité supplémentaire de bien à la date t=1 afin de conserver la même utilité.
Si l’agent a de la préférence pour le présent : 𝛽 < 1
 Le facteur d’escompte psychologique traduit un arbitrage entre la préférence pour le
présent de l’agent (consommer davantage aujourd’hui que demain) et un désir de lisser
sa consommation au cours du temps (tel que l’agent consomme autant aujourd’hui que
demain).

3) L’arbitrage préférence pour le présent-lissage de la consommation


intertemporelle

Modélisons dans un premier temps le désir de lissage de la consommation intertemporelle dans


un contexte où l’agent n’a pas de préférence pour le présent. Notre objectif est ici de donner les
caractéristiques de la fonction d’utilité d’un agent qui désire lisser sa consommation
intertemporelle. La fonction d’utilité de cet agent s’écrit :

𝑈(𝑐1 , 𝑐2 ) = 𝑢(𝑐1 ) + 𝑢(𝑐2 ) (1)


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𝜕𝑈 𝜕𝑈 2
avec 𝜕𝑐 > 0 et <0
𝑡 𝜕𝑐𝑡2

L’agent désire lisser complètement sa consommation si un profil de consommations


stationnaires (consommations identiques à chaque période) est préféré à tout autre profil. Soit
(𝑐, 𝑐) un profil de consommations stationnaires et (𝑐 − 𝜀, 𝑐 + 𝜀) tout autre profil. Le désir de
lissage de la consommation implique que :

𝑢(𝑐) + 𝑢(𝑐) > 𝑢(𝑐 − 𝜀) + 𝑢(𝑐 + 𝜀) (2)

Pour 𝜀 proche de zéro, on peut appliquer un développement limité d’ordre 2 pour le second
terme de l’inéquation :
𝜀2
𝑢(𝑐 − 𝜀) ≈ 𝑢(𝑐) − 𝜀𝑢′ (𝑐) + 𝑢′′ (𝑐) (3)
2

𝜀2
𝑢(𝑐 + 𝜀) ≈ 𝑢(𝑐) + 𝜀𝑢′ (𝑐) + 𝑢′′ (𝑐) (4)
2

(3) et (4) dans (2) donne :

′ (𝑐)
𝜀 2 ′′ ′
𝜀 2 ′′
𝑢(𝑐) + 𝑢(𝑐) > 𝑢(𝑐) − 𝜀𝑢 + 𝑢 (𝑐) + 𝑢(𝑐) + 𝜀𝑢 (𝑐) + 𝑢 (𝑐) (5)
2 2
Soit :

𝜀 2 𝑢′′ (𝑐) < 0 (6)

𝑢′′ (𝑐) < 0 (7)

Proposition 1: la fonction d’utilité d’un agent qui désire lisser sa consommation


intertemporelle est concave (convexité des préférences). L’utilité marginale de cet agent est
décroissante: l’agent préfère la diversification de ses préférences.

Supposons maintenant que l’agent a simultanément une préférence pour le présent et un désir
de lissage. Dans ce cas, 𝑈(𝑐1 , 𝑐2 ) = 𝑢(𝑐1 ) + 𝛽𝑢(𝑐2 ) où 𝛽 est un facteur d’escompte
psychologique.

L’agent exprime un désir de lissage de consommation si :


𝑐1 + 𝑐2 𝑐1 + 𝑐2
𝑢( ) + 𝛽𝑢 ( ) > 𝑢(𝑐1 ) + 𝛽𝑢(𝑐2 ) (8)
2 2
𝑐1 + 𝑐2 𝑐1 + 𝑐2
[𝑢 ( ) − 𝑢(𝑐1 )] + 𝛽 [𝑢 ( ) − 𝑢(𝑐2 )] = 𝐴(𝛽) > 0 (9)
2 2
On montre que pour 𝑐1 < 𝑐2 et 𝛽 < 1, 𝐴(𝛽) > 0 et est une fonction décroissante de 𝛽.

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Proposition 2: lorsque l’agent doté d’une fonction d’utilité intertemporelle, additive et


séparable, a une préférence pour le présent (𝛽 < 1), l’effet désir de lissage des consommations
l’emporte sur l’effet préférence pour le présent, lorsque 𝑐1 < 𝑐2 .

4) Mesurer l’ampleur du lissage de consommation : le concept d’élasticité


de substitution intertemporelle

L’élasticité de substitution intertemporelle mesure la variation relative de la structure de


consommation temporelle lorsque le TMS augmente de 1% tout en conservant constante
l’utilité intertemporelle. On la note 𝜎
𝑐 𝑐
𝑑 (𝑐2 ) / (𝑐2 )
1 1
𝜎= (10)
𝑑(𝑇𝑀𝑆2−1 )/(𝑇𝑀𝑆2−1 )

 Elle mesure l’ampleur du lissage des consommations


 Plus la courbe d’indifférence est convexe (ou plus grande concavité de la fonction
d’utilité intertemporelle), plus l’élasticité de substitution intertemporelle est faible et
plus la préférence pour le lissage de consommation est grande car la structure de
consommation ne varie guère dans le temps.

Section 2 : Equilibre intertemporel du consommateur et Equilibre général intertemporel

Dans cette section, nous déterminons l’équilibre du consommateur comme solution de son
programme d’optimisation. Ensuite, nous dérivons l’équilibre général intertemporel.

I) Equilibre intertemporel du consommateur

1) La contrainte budgétaire intertemporelle

Reprenons le programme de l’agent :

max 𝑈𝑖 (𝑐1𝑖 , 𝑐2𝑖 )


𝑐1𝑖 ,𝑐2𝑖 ,𝑆 𝑖

𝑠𝑐 𝑡 = 1: 𝑝1 𝑐1𝑖 + 𝑆 𝑖 = 𝑝1 𝑤1𝑖 (11)

𝑠𝑐 𝑡 = 2: 𝑝2 𝑐2𝑖 = 𝑝2 𝑤2𝑖 + (1 + 𝑟)𝑆 𝑖 (12)

Comme la variable financière 𝑆 𝑖 n’est pas un argument de la fonction d’utilité, ce programme


peut être réduit. (11) et (12) donne :

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(1 + 𝑟)𝑝1 𝑐1𝑖 + 𝑝2 𝑐2𝑖 = (1 + 𝑟)𝑝1 𝑤1𝑖 + 𝑝2 𝑤2𝑖 (13)

Cette contrainte budgétaire est dite capitalisée car exprimée en valeurs monétaires futures (t=2).
On peut en tirer la contrainte budgétaire intertemporelle ou consolidée exprimées en valeurs
actualisées à la date t=1 :

𝑝2 𝑐2𝑖 𝑝2 𝑤2𝑖
𝑝1 𝑐1𝑖 + 𝑖
= 𝑝1 𝑤1 + (14)
(1 + 𝑟) (1 + 𝑟)

Cette contrainte budgétaire consolidée stipule que la somme des dépenses de consommation
actualisées est égale à la somme des revenus actualisés. On peut réécrire cette contrainte
budgétaire intertemporelle en termes réels (en richesse physique) et non pas monétaires :

𝑝2 𝑐2𝑖 𝑝2 𝑤2𝑖
𝑐1𝑖 + = 𝑤1𝑖 + (15)
𝑝1 (1 + 𝑟) 𝑝1 (1 + 𝑟)

𝑝2 𝑐2𝑖 𝑝2 𝑤2𝑖
𝑐1𝑖 + = 𝑤1𝑖 + (15)
𝑝1 (1 + 𝑟) 𝑝1 (1 + 𝑟)

Cette contrainte budgétaire réelle consolidée peut s’écrire :

𝑐2𝑖 𝑤2𝑖
𝑐1𝑖 + 𝑖
= 𝑤1 + (16)
(1 + 𝜑) (1 + 𝜑)

Avec :

(1 + 𝑟)
1+𝜑 = 𝑝2 (17)
𝑝1

𝜑 s’interprète comme le taux d’intérêt réel court :

 Le taux d’intérêt réel est la quantité additionnelle de bien qu’il faut allouer en t=2 à
l’agent pour qu’il renonce à consommer 1 unité de bien en t=1.
 Le taux d’intérêt réel est le rendement réalisé

2) Relation entre taux d’intérêt nominal, taux d’intérêt réel et inflation

Montrons que le taux d’intérêt réel est égal au taux d’intérêt nominal corrigé du taux
d’inflation pour de faibles niveaux de taux d’intérêt:
𝑝2 −𝑝1 𝑝 𝑝2
Soit 𝑝̇ le taux d’inflation. On a : 𝑝̇ = = 𝑝2 − 1 ⇒ = 1 + 𝑝̇ (18)
𝑝1 1 𝑝1

Le taux d’intérêt réel s’écrit donc, en insérant (18) dans (17):

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(1 + 𝑟) (1 + 𝑟) 1 + 𝑟 − 1 − 𝑝̇ 𝑟 − 𝑝̇
1+𝜑 = ⇒ 𝜑= −1= =
1 + 𝑝̇ 1 + 𝑝̇ 1 + 𝑝̇ 1 + 𝑝̇

𝑟 − 𝑝̇
𝜑= (19) (𝑓𝑜𝑟𝑚𝑢𝑙𝑒 𝑒𝑥𝑎𝑐𝑡𝑒 𝑑𝑒 𝐹𝑖𝑠ℎ𝑒𝑟)
1 + 𝑝̇

⇒ 𝜑 + 𝜑𝑝̇ = 𝑟 − 𝑝̇

Pour de faibles taux d’inflation, 𝜑𝑝̇ ≈ 0 et l’on obtient :

𝜑 = 𝑟 − 𝑝̇ (20) (𝑓𝑜𝑟𝑚𝑢𝑙𝑒 𝑎𝑝𝑝𝑟𝑜𝑐ℎé𝑒 𝑑𝑒 𝐹𝑖𝑠ℎ𝑒𝑟)

Proposition 3 : Les formules de calcul du taux d’intérêt réel montrent que l’enrichissement
d’un individu dépend des marchés financiers et de l’inflation.

Remarque : Fisher traduit dans les actes ce résultat selon lequel les contrats et les taux des
emprunts obligataires doivent être indexés à l’inflation en fondant une société qui propose des
indices de prix à la consommation sur une base hebdomadaire aux journaux du pays.

II) Equilibre général intertemporel d’échanges purs

1) Equilibre de l’agent consommateur

Les agents dans notre économie intertemporelle d’échanges purs prennent leurs décisions de
manière décentralisée en tenant compte du taux d’intérêt réel. Ils maximisent leur utilité
intertemporelle sous leur contrainte budgétaire consolidée :

max
𝑖 𝑖
𝑈𝑖 (𝑐1𝑖 , 𝑐2𝑖 )
𝑐1 ,𝑐2 ,

𝑐2𝑖 𝑤2𝑖
𝑠𝑐 𝑐1𝑖 + = 𝑤1𝑖 +
(1 + 𝜑) (1 + 𝜑)

A l’optimum de consommation, on a :

𝑇𝑀𝑆2/1 = 1 + 𝜑 (21)

Or, comme on l’a déjà vu, le 𝑇𝑀𝑆2/1est, par définition, égal à 1 + 𝜓. Ainsi, à l’équilibre
intertemporel, on obtient :

𝑇𝑀𝑆2/1 = 1 + 𝜑 = 1 + 𝜓

⇒ 𝜓 = 𝜑 (22)

Proposition 4 : A l’équilibre intertemporel, tout agent réalloue ses ressources (épargne ou


emprunt) de telle manière que le taux d’intérêt psychologique (rendement escompté) s’égalise
au taux d’intérêt réel (rendement réalisé).
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2) Equilibre général

En intégrant la condition d’optimalité dans la contrainte budgétaire consolidée, on obtient pour


chaque agent i la demande brute pour le bien à chaque date : 𝑐1𝑖 (𝜑) et 𝑐2𝑖 (𝜑). Ces fonctions de
demande brutes représentent la relation entre la quantité maximale demandée en fonction du
taux d’intérêt réel et de la richesse des agents (dotations initiales).

A l’équilibre général, tous les marchés sont à l’équilibre à chaque date :

 Marché du bien 1 (bien en t=1) : 𝑐1𝐴 (𝜑) + 𝑐1𝐵 (𝜑) = 𝛺1


 Marché du bien 2 (bien en t=2) : 𝑐2𝐴 (𝜑) + 𝑐2𝐵 (𝜑) = 𝛺2

En vertu de la loi de Walras, seul le marché du bien à la date 1 permet de déterminer le taux
d’intérêt réel d’équilibre 𝜑 ∗

Proposition 5 : Au taux d’intérêt réel d’équilibre 𝜑 ∗ , tous les agents réallouent de façon
optimale leurs ressources (épargne, emprunt) via les marchés financiers parfaits et complets.

Mots clés

Préférences intertemporelles, équilibre intertemporel, taux d’intérêt psychologique, facteur


d’escompte psychologique, taux d’impatience, lissage intertemporel de la consommation,
élasticité de substitution intertemporelle, etc.

Références bibliographiques

Hadrien GOUZE (2018), « Manuel de microéconomie », Editions Ellipses, 191 p.

Robert PINDYCK et Daniel RUBINFELD (2009), « Microéconomie », 7ème édition, Pearson.

Etienne WASMER (2010), « Principes de microéconomie », Pearson Education, 2010.

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Exercices sur le chapitre I

Exercice 1

Entre deux dates, t=1 et t = 2, le facteur d’escompte psychologique d’un agent est égal à 0,9.
Calculez le taux d’intérêt psychologique et commentez.

Exercice 2

1) Montrer graphiquement que lorsque la fonction d’utilité est concave :

𝑐1 + 𝑐2 𝑢(𝑐1 ) + 𝑢(𝑐2 )
𝑢( )>
2 2
Interprétez ce résultat.

2) Montrer la préférence pour les combinaisons convexes lorsque la fonction d’utilité


élémentaire est de type 𝑙𝑛.

Exercice 3

Aux dates t=1 et t=2, un agent peut consommer respectivement 100 et 400 unités d’un bien. Ses
préférences sont résumées par la fonction d’utilité intertemporelle suivante :

𝑈(𝑐1 , 𝑐2 ) = √𝑐1 + √𝑐2

Montrez que cet agent souhaite lisser complètement ses consommations. Calculer les TMS du
bien 2 au bien 1. Commentez.

Exercice 4

Aux dates t=1 et t=2, un agent peut consommer respectivement 100 et 400 unités d’un bien. Ses
préférences sont résumées par la fonction d’utilité intertemporelle suivante :

𝑈(𝑐1 , 𝑐2 ) = √𝑐1 + 𝛽√𝑐2

Où 𝛽 est un facteur d’escompte psychologique.

Caractérisez l’effet lissage des consommations en fonction de la valeur de 𝛽

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Exercice 5

Calculez l’élasticité de substitution intertemporelle des agents A et B dont les préférences sont
représentées par les fonctions d’utilité suivantes :

𝑢 𝐴 = 𝑙𝑛(𝑐1𝐴 ) + 𝛽𝑙𝑛(𝑐2𝐴 )

𝑢𝐵 = 𝑐1𝐵 + 𝛽𝑐2𝐵

Exercice 6

Une économie est peuplée de deux agents A et B et comprend un bien durable disponible à
deux dates t=1 et t=2. Les préférences des gants sont identiques et représentées par la fonction
d’utilité intertemporelle suivante :

𝑈𝑖 (𝑐1𝑖 , 𝑐2𝑖 ) = 𝑙𝑛(𝑐1𝑖 ) + 𝛽𝑙𝑛(𝑐2𝑖 )

Les dotations initiales du bien à chaque date de l’agent A et de l’agent B sont respectivement
égales à : 𝑤 𝐴 = (200; 400) et 𝑤 𝐵 = (400; 200). Le bien est pris comme numéraire et le taux
d’intérêt réel est noté 𝜑.

Calculez l’équilibre général et montrez sous quelles conditions les échanges sont mutuellement
avantageux.

Correction des exercices

Exercice 1

Soit 𝛽 le facteur d’escompte psychologique et 𝜓 le taux d’intérêt psychologique, on a :

1 1
𝛽= =
𝑇𝑀𝑆2/1 1 + 𝜓

1
⇒ 𝜓= −1
𝛽

1
𝜓= − 1 = 0,11
0,9

Commentaire : Le taux d’intérêt psychologique mesure la quantité additionnelle de bien de la


date t = 2 qu’il faut offrir à l’agent pour qu’il renonce à consommer une unité à la date t = 1
afin de conserver son utilité inchangée. Cet agent considère qu’une unité de bien consommée à

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la date t = 1 est équivalente en termes d’utilité à 1,11 unités de bien consommées à la date t =
2 car TMS2−1 = 1,11. Comme 𝜓 = 0,11 > 0, l’agent présente une préférence pour le présent.

Exercice 2

3) On montre graphiquement que lorsque la fonction d’utilité est concave :

𝑐1 + 𝑐2 𝑢(𝑐1 ) + 𝑢(𝑐2 )
𝑢( )>
2 2
Interprétation : l’agent préfère une combinaison intertemporelle des consommations

4) Il suffit de montrer que la fonction 𝑢(𝑐𝑖 ) = ln(𝑐𝑖 ) est concave


1 1
𝑢′ (𝑐𝑖 ) = ⇒ 𝑢′′ (𝑐𝑖 ) = − 2 < 0: 𝑙𝑎 𝑓𝑜𝑛𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑢(. ) 𝑒𝑠𝑡 𝑑𝑜𝑛𝑐 𝑐𝑜𝑛𝑐𝑎𝑣𝑒
𝑐𝑖 𝑐𝑖

Exercice 3

Si l’agent consomme aux dates t = 1 et t = 2 respectivement 100 et 400 unités d’un bien, son
utilité intertemporelle s’élève à : 𝑈(100,400) = √100 + √400 = 30

Avec un profil de consommations stationnaires, ledit agent consomme une même quantité à
chaque date égale à (100 + 400)/ 2 = 250. Son utilité intertemporelle vaut : 𝑈(250,250) =
√250 + √250 = 31,62

Cet agent présente une préférence pour un lissage complet des consommations car
𝑈(250,250) > 𝑈(100,400)

On peut aussi le montrer en établissant que sa fonction d’utilité est croissante et concave en 𝑐𝑡 :

1 −1 1 −3
𝑢′ (𝑐𝑡 ) = 𝑐𝑡 2 > 0 ⇒ 𝑢′′ (𝑐𝑡 ) = − 𝑐𝑡 2 < 0
2 4
𝑙𝑎 𝑓𝑜𝑛𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑢(. )𝑒𝑠𝑡 𝑑𝑜𝑛𝑐 𝑐𝑟𝑜𝑖𝑠𝑠𝑎𝑛𝑡𝑒 𝑒𝑡 𝑐𝑜𝑛𝑐𝑎𝑣𝑒

Le taux marginal de substitution du bien 2 au bien 1 est égal à : 𝑇𝑀𝑆2/1 = 𝑈𝑚1 / 𝑈𝑚2 =
√𝑐2/ 𝑐1

Si ce TMS est calculé pour ce profil de consommations stationnaires (250,250) alors il est égal
à 1.

Commentaire : L’agent ne présente pas de préférence pour le présent car il valorise de la même
manière un bien consommé à la date 1 et un bien consommé à la date 2.

Exercice 4

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Si l’agent consomme aux dates t = 1 et t = 2 respectivement 100 et 400 unités d’un bien, son
utilité intertemporelle s’élève à : 𝑈(100,400) = √100 + 𝛽√400 = 10 + 20𝛽

Avec un profil de consommations stationnaires, son utilité intertemporelle vaut :


𝑈(250,250) = √250 + 𝛽√250 = (1 + 𝛽)15,81

Rappelons que si 𝛽 < 1 alors l’agent présente une préférence pour le présent. Autrement dit
le poids de la consommation à la date 2 diminue dans la fonction d’utilité de l’agent. L’agent
souhaite lisser complètement ses consommations si : (1 + 𝛽)15,81 > 10 + 20𝛽 ⟺ 𝛽 <
1,386 .

 pour des valeurs de β telles que 1 < β < 1,386, l’agent désire lisser son profil de
consommation malgré une valorisation relative des consommations futures plus
importantes.
 pour β < 1, le désir de lisser son profil de consommation reste vrai et la préférence pour
le présent n’annihile pas le désir de lissage des consommations. Ces deux effets sont
donc indépendants.

Exercice 5

Pour 𝑢 𝐴 = 𝑙𝑛(𝑐1𝐴 ) + 𝛽𝑙𝑛(𝑐2𝐴 ), on a

𝑐2𝐴
1 𝛽𝑐1𝐴
𝜎𝐴 = =1
1/𝛽 𝑐2𝐴
𝑐1𝐴

Lorsque le taux marginal de substitution est homogène de degré 0 alors l’élasticité de


substitution est unitaire. L’effet lissage de la consommation est donc imparfait.

Pour 𝑢𝐵 = 𝑐1𝐵 + 𝛽𝑐2𝐵 , on a

1
1 𝛽
𝜎𝐵 = = +∞
0 𝑐2𝐵
𝑐1𝐵

Lorsque les biens sont parfaitement substituables (TMS constant) alors l’élasticité de
substitution intertemporelle est infinie. L’effet lissage de la consommation est donc nul.

Exercice 6

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Dans une économie intertemporelle d’échanges purs, nous devons calculer les fonctions de
demande des agents pour caractériser le taux d’intérêt réel d’équilibre. Elles sont obtenues en
résolvant le programme de chaque consommateur. Ils prennent leurs décisions de manière
décentralisées. Ils maximisent leur fonction d’utilité intertemporelle sous leur contrainte
budgétaire consolidée qui énonce que la somme des consommations actualisées est égale à la
somme des dotations initiales actualisées avec le taux d’intérêt réel 𝜑 comme facteur
d’actualisation.

max
𝑖 𝑖
𝑈𝑖 (𝑐1𝑖 , 𝑐2𝑖 ) = 𝑙𝑛(𝑐1𝑖 ) + 𝛽𝑙𝑛(𝑐2𝑖 )
𝑐1 ,𝑐2 ,

𝑐2𝑖 𝑤2𝑖
𝑠𝑐 𝑐1𝑖 + 𝑖
= 𝑤1 +
(1 + 𝜑) (1 + 𝜑)

A l’optimalité de consommation, il n’existe aucune modification de consommation qui


permettrait d’augmenter l’utilité intertemporelle tout en respectant la contrainte budgétaire
consolidée. Il s’ensuit que le TMS est égal au rendement réel défini par 1 + 𝜑.

𝑇𝑀𝑆𝑖2/1 = 1 + 𝜑 ⇔ (1 + 𝜑)𝛽𝑐𝑖1 = 𝑐𝑖2

La dernière expression définit la structure optimale de consommation. En intégrant cette


expression dans la contrainte budgétaire, nous obtenons les fonctions de demande brute en bien
de la date t = 1 et t = 2 de l’agent i

1 𝑤2𝑖
𝑐1𝑖 = 𝑖
[𝑤 + ]
1 + 𝛽 1 (1 + 𝜑)

𝛽
𝑐2𝑖 = [(1 + 𝜑)𝑤1𝑖 + 𝑤2𝑖 ]
1+𝛽

En remplaçant les dotations initiales par leurs valeurs numériques, nous obtenons les fonctions
de demande brute en bien de la date t = 1 et t = 2 des agents A et B

1 400
𝑐1𝐴 = [200 + ]
1+𝛽 (1 + 𝜑)

𝛽
𝑐2𝐴 = [(1 + 𝜑)200 + 400]
1+𝛽

1 200
𝑐1𝐵 = [400 + ]
1+𝛽 (1 + 𝜑)

𝛽
𝑐2𝐵 = [(1 + 𝜑)400 + 200]
1+𝛽

A l’équilibre général, tous les marchés sont à l’équilibre à chaque date, c’est-à-dire qu’il existe
un taux d’intérêt réel tel que l’offre globale définie par la somme des dotations initiales est égale

16
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

à la demande globale définie par la somme des demandes individuelles à chaque date pour le
bien considéré. Soit :

Marché du bien à la date 𝑡 = 1 ∶ 1 (1 + 𝛽)[200 + 400 (1 + 𝜑)] + 1 (1 + 𝛽)[400 +


200 (1 + 𝜑)] = 200 + 400 = 600

Marché du bien à la date 𝑡 = 2 ∶ 𝛽 (1 + 𝛽)[(1 + 𝜑)200 + 400] + 𝛽 (1 + 𝛽)[(1 +


𝜑)400 + 200] = 400 + 200 = 600

Pour calculer le taux d’intérêt réel d’équilibre, nous n’utilisons qu’un marché sur deux en raison
du corollaire de la conséquence de la loi de Walras qui énonce que dans une économie à n
marchés, si n-1 marchés sont à l’équilibre alors le nième est équilibré. Le système de prix est
donc relatif car les agents ne sont pas sensibles à l’illusion monétaire.

Considérons l’équilibre sur le marché du bien à la date 𝑡 = 1 ∶ 1 (1 + 𝛽) [200 + 400 (1 +


𝜑) ] + 1 (1 + 𝛽) [400 + 200 (1 + 𝜑) ] = 600
1
La résolution de cette équation permet d’obtenir le taux d’intérêt réel d’équilibre 𝜑 ∗ = 𝛽 − 1
1
L’équilibre du marché du bien à la date t = 2 est également vérifié pour 𝜑 ∗ = 𝛽 − 1. Les
consommations optimales des agents sont obtenues en calculant les demandes brutes pour le
système de prix d’équilibre.

1 + 2𝛽
𝑐1𝐴∗ = 200 [ ]
1+𝛽

1 + 2𝛽
𝑐2𝐴∗ = 200 [ ]
1+𝛽

2+𝛽
𝑐1𝐵∗ = 200 [ ]
1+𝛽

2+𝛽
𝑐1𝐵∗ = 200 [ ]
1+𝛽

NB : Ne pas traiter la question de savoir sous quelles conditions les échanges sont mutuellement
avantageux, car nous n’avons pas eu le temps de traiter de la question de l’optimalité parétienne
dans ce contexte des choix intertemporels.

17
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

CHAPITRE II

L’EVALUATION DU RISQUE ET DE L’INCERTAIN EN FINANCE: UNE


APPROCHE MICROECONOMIQUE

Objectif du chapitre II

Ce chapitre vise à mettre en évidence l’approche microéconomique de l’évaluation du risque et


de l’incertain. L’étudiant doit être capable de :

 Modéliser le comportement de l’agent économique dans un environnement incertain via


le concept de l’utilité espérée.
 Appliquer cette approche à l’évaluation du risque sur les marchés financiers.

Section 1 :

I) Différents modèles d’évaluation

1) Le critère du gain espéré

Le critère d’espérance mathématique est le critère d’évaluation le plus ancien (calcul des primes
d’assurance-vie, sur la base des tables de mortalité définissant les probabilités de décès pour
chaque âge et pour une génération donnée). Avec ce critère d’évaluation, la valorisation d’une
richesse finale soumise à un risque additif s’écrit :

𝑉(𝑤
̃𝑓 ) = 𝐸(𝑤0 + 𝑥̃)

La limite de ce critère : le paradoxe de Saint-Petersbourg énoncé par Nicolas Bernoulli en 1713


et résolu en 1738 par Daniel Bernoulli. Comment expliquer qu’un jeu qui peut rapporter la
richesse infinie ne trouve aucun joueur pour y miser toute sa fortune ? Le jeu est le suivant : un
agent lance une pièce de monnaie non truquée. Si au premier lancer, la pièce tombe sur le côté
pile, le jeu s’arrête et le joueur gagne 2 umn. Si la pièce retombe sur le côté face, le joueur
relance la pièce et le gain, en cas d’arrêt de jeu au tour précédent, est doublé. Le jeu continue
tant que le côté face est découvert et s’arrête à l’apparition d’un côté pile. Un gain de 2𝑛 présente
1
une probabilité d’occurrence de 2𝑛. On a :

𝑛 𝑛
1
𝑉(𝑥̃) = 𝐸(𝑥̃) = lim ∑ 𝑥𝑖 𝑝𝑖 = lim ∑ 2𝑖 = lim 𝑛 = ∞
𝑛→∞ 𝑛→∞ 2𝑖 𝑛→∞
𝑖=1 𝑖=1

La valorisation de ce jeu est infinie. Tout agent rationnel décide de participer à ce jeu si le gain
net de la participation à ce jeu est supérieur à 0. Le gain net est la différence entre la valorisation
et la mise nécessaire pour participer au jeu M :
18
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

𝐺𝑁(𝑥̃) = 𝑉(𝑥̃) − 𝑀 > 0 ⇔ 𝑀 < 𝑉(𝑥̃)

Personne n’est prêt à risquer sa fortune pour participer à ce jeu.

2) L’espérance morale

Bernoulli introduit le concept d’utilité morale pour lever le paradoxe de Saint-Petersbourg. Ici
l’accroissement d’utilité 𝑑𝑢 est inversement proportionnel à la richesse initialement détenue 𝑤,
pour un accroissement faible de cette richesse 𝑑𝑤:

1 𝑑𝑢 1
𝑑𝑢 = 𝑑𝑤 ⇔ =
𝑤 𝑑𝑤 𝑤
1
L’utilité marginale 𝑤 permet de caractériser la fonction d’utilité morale 𝑢𝑀 :

𝑢𝑀 (𝑤) = ln(𝑤)

On a désormais :
𝑛 𝑛 𝑛
1 𝑖
1
𝑉(𝑥̃) = 𝐸𝑢(𝑥̃) = lim ∑ 𝑢(𝑥𝑖 )𝑝𝑖 = lim ∑ ln(2 ) 𝑖 = ln(2) ∗ lim ∑ 𝑖
𝑛→∞ 𝑛→∞ 2 𝑛→∞ 2
𝑖=1 𝑖=1 𝑖=1

1
On a : lim ∑𝑛𝑖=1 𝑎𝑖 = 𝑎. Ainsi:
𝑛→∞

𝐸𝑢(𝑥̃) = 2 ∗ ln(2) = ln(4)

La valorisation de ce jeu est finie est égale à ln(4). Cette valorisation inférieure à 2 traduit
l’aversion à l’égard du hasard expliquée par la concavité de la fonction d’utilité morale.

3) L’espérance d’utilité

Malgré cette avancée, la théorie mettra deux siècles pour se développer, avec Von Neumann et
Morgenstern (1944) qui établissent une axiomatique complète et ordinale de la théorie de
l’utilité espérée.

La valorisation d’un actif risqué est ainsi définie à partir de l’espérance d’utilité en transformant
aussi bien les gains aléatoires que la valorisation de l’actif risqué pour une richesse initiale
donnée

𝑢(𝑤0 + 𝑉(𝑥̃)) = 𝐸𝑢(𝑤0 + 𝑥̃)

Dans un cadre discret :

19
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

𝐸𝑢(𝑤0 + 𝑥̃) = ∑ 𝑝𝑠 𝑢(𝑤0 + 𝑥𝑠 )


𝑠=1

Dans un cadre continu :


𝑏
𝐸𝑢(𝑤0 + 𝑥̃) = ∫ 𝑢(𝑤0 + 𝑥𝑠 )𝑓(𝑥)𝑑𝑥
𝑎

[𝑎, 𝑏] 𝑒𝑠𝑡 𝑙 ′ 𝑒𝑛𝑠𝑒𝑚𝑏𝑙𝑒 𝑑𝑒𝑠 𝑣𝑎𝑙𝑒𝑢𝑟𝑠 𝑝𝑜𝑠𝑠𝑖𝑏𝑙𝑒𝑠 𝑝𝑜𝑢𝑟 l’actif risqué 𝑥̃

Le modèle d’utilité espérée attribue à la fonction d’utilité 𝑢(𝑥) un double rôle :

 La concavité de la fonction d’utilité traduit l’aversion au risque


 Elle exprime la satisfaction dans le certain

II) L’attitude au risque

 Un individu averse au risque (risquophobe) valorise tout actif financier risqué 𝑥̃ à un


niveau inférieur à son espérance mathématique car le risque est coûteux pour lui :

𝑉(𝑥̃) < 𝐸(𝑥̃)

La prime de risque est :

𝜋 = 𝐸(𝑥̃) − 𝑉(𝑥̃) > 0

 Un individu ayant le goût pour le risque (risquophile) valorise tout actif financier risqué
𝑥̃ à un niveau supérieur à son espérance mathématique car le risque n’est pas coûteux
pour lui :

𝑉(𝑥̃) > 𝐸(𝑥̃)

La prime de risque est :

𝜋 = 𝐸(𝑥̃) − 𝑉(𝑥̃) < 0

 Un individu neutre au risque valorise tout actif financier risqué 𝑥̃ à un niveau égal à son
espérance mathématique:

𝑉(𝑥̃) = 𝐸(𝑥̃)

La prime de risque est :

𝜋 = 𝐸(𝑥̃) − 𝑉(𝑥̃) = 0

20
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

On note deux types d’aversion au risque :

Arrow (1964) et Pratt (1965) énoncent qu’un agent a une aversion faible à l’égard du
risque s’il préfère une loterie certaine à toute loterie risquée procurant la même
espérance de richesse. Soit un revenu sûr 𝑥 de valeur 𝑎 et une loterie 𝑦̃ avec 𝐸(𝑦̃) = 𝑎.
Un agent a une aversion faible à l’égard du risque si :

𝑥 ≻ 𝑦̃

Rothschild et Stiglitz (1970) stipule qu’un agent a une aversion forte à l’égard du risque
si, pour deux loteries présentant la même espérance, il préfère la loterie la moins risquée.
Soit deux loteries 𝑥̃ et 𝑦̃ telles que 𝐸(𝑥̃) = 𝐸(𝑦̃). Un agent présente de l’aversion forte
si :
𝑥̃ ≻ 𝑦̃ 𝑠𝑖 𝑥̃ 𝑒𝑠𝑡 𝑚𝑜𝑖𝑛𝑠 𝑟𝑖𝑠𝑞𝑢é 𝑞𝑢𝑒 𝑦̃

La loterie 𝑦̃ est plus risquée que la loterie 𝑥̃ si elle présente un accroissement de risque
par rapport au risque de la loterie 𝑥̃. L’accroissement de risque est associé à la notion
de dominance stochastique d’ordre 2 qui traduit l’idée que si 𝑦̃ présente un plus grand
étalement des valeurs que la loterie 𝑥̃, à même espérance mathématique, alors elle est
plus risquée car elle présente plus de volatilité :

𝑠𝑖 𝑦̃ 𝑀𝑃𝑆 𝑥̃ 𝑎𝑙𝑜𝑟𝑠 𝑉(𝑦̃) < 𝑉(𝑥̃)

Avec MPS : Mean Preserving Spread signifiant un plus grand étalement à espérance
mathématique constante.

Si deux loteries 𝑥̃ et 𝑦̃ telles que 𝐸(𝑥̃) = 𝐸(𝑦̃) avec 𝑦̃ = 𝑥̃ + 𝜀̃ alors 𝑥̃ ≻ 𝑦̃ ⇔ 𝑦̃ a un


étalement à espérance mathématique constante de 𝑥̃.

Notion d’équivalent certain :


C’est la valeur certaine qui procure à l’agent la même utilité que l’actif risqué 𝑥̃ pour
une richesse initiale donnée 𝑤0 :

𝑢(𝑤0 + 𝐸𝐶𝑥̃ ) = 𝐸𝑢(𝑤0 + 𝑥̃)

𝑉(𝑥̃) = 𝐸𝐶𝑥̃ = 𝑢−1 [𝐸𝑢(𝑤0 + 𝑥̃)] − 𝑤0

Aversion au risque : 𝐸𝐶𝑥̃ < 𝐸(𝑥̃). Ce résultat est expliqué par l’inégalité de Jensen
(1970) qui énonce que, pour une fonction d’utilité élémentaire u croissante et concave :
𝐸𝑢(𝑥̃) < 𝑢(𝐸(𝑥̃))
En appliquant cette inégalité de Jensen à la définition de l’équivalent certain, on obtient :
𝑢(𝑤0 + 𝐸𝐶𝑥̃ ) = 𝐸𝑢(𝑤0 + 𝑥̃) < 𝑢(𝑤0 + 𝐸(𝑥̃))

21
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

La croissance de la fonction u implique que :


𝑤0 + 𝐸𝐶𝑥̃ < 𝑤0 + 𝐸(𝑥̃) ⇔ 𝐸𝐶𝑥̃ < 𝐸(𝑥̃)

Section 2 : Applications au marché de l’assurance et au marché boursier

Dans cette section, nous appliquons l’approche microéconomique du risque et de l’incertain au


marché de l’assurance et au marché boursier.

I) Fonction d’utilité VNM, attitude envers le risque et choix optimal : application


au marché de l’assurance

1) Le programme de l’individu dans le cas général

L’agent économique est confronté à un environnement incertain qui peut être soit favorable soit
défavorable. Son revenu dans le cas favorable donne lieu à une consommation 𝐶𝑏 . Sa
consommation dans le cas défavorable est 𝐶𝑚 .

Dans le mauvais état nature, la compagnie d’assurance lui verse une compensation d’1 fcfa par
unité souscrite. Si l’individu souscrit 𝐴 unités d’assurance, il reçoit 𝐴 comme compensation et
paiera une prime d’assurance de 𝛾𝐴. Dans le bon état de nature, la consommation de l’agent est
la différence entre son revenu brut et sa prime d’assurance, soit : 𝐶𝑏 = 𝑅𝑏 − 𝛾𝐴. Dans le
mauvais état de nature, sa consommation sera égale à son revenu brut moins la prime
d’assurance plus la compensation, soit : 𝐶𝑚 = 𝑅𝑚 − 𝛾𝐴 + 𝐴 = 𝑅𝑚 + (1 − 𝛾)𝐴.

Soit 𝑝 la probabilité que l’état de nature défavorable se produise. Le programme de l’agent


s’écrit :

Max 𝐸(𝑈) = 𝑝𝑈( 𝐶𝑚 ) + (1 − 𝑝)𝑈(𝐶𝑏 )


𝐴

Ou encore :

Max 𝐸(𝑈) = 𝑝𝑈( 𝑅𝑚 + (1 − 𝛾)𝐴) + (1 − 𝑝)𝑈(𝑅𝑏 − 𝛾𝐴)


𝐴

La condition de premier ordre donne :

𝑝(1 − 𝛾)𝑈 ′ (𝐶𝑚 ) = (1 − 𝑝)𝛾𝑈 ′ (𝐶𝑏 )

Ce qui implique :

𝑝𝑈 ′ (𝐶𝑚 ) 𝛾
=
(1 − 𝑝)𝑈 ′ (𝐶𝑏 ) 1 − 𝛾

22
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

Le terme de gauche est le TMS. Le TMS est égal au ratio des utilités marginales de chaque état
de la nature pondéré par sa probabilité.

𝑈 ′ (𝐶𝑚 ) 𝛾 1−𝑝

=
𝑈 (𝐶𝑏 ) 1 − 𝛾 𝑝

Dans ce cas général, la compagnie d’assurance est supposée avoir des coûts de gestion et
d’administration (frais de chargement). Cela implique que le prix de l’assurance est plus élevé
que le risque : 𝛾 > 𝑝. Ce qui donne que :

𝑈 ′ (𝐶𝑚 ) 𝛾 1−𝑝

= > 1 ⤇ 𝑈 ′ (𝐶𝑚 ∗ ) > 𝑈 ′ (𝐶𝑏 ∗ )
𝑈 (𝐶𝑏 ) 1 − 𝛾 𝑝

Puisque 𝑈 ′ est décroissante (cas d’aversion au risque), on a :

𝐶𝑚 ∗ < 𝐶𝑏 ∗

Interprétation :

 L’utilité marginale dans le mauvais état de la nature est plus élevée que dans le bon ;
 La consommation est strictement plus élevée dans le bon état de la nature et donc
l’utilité de l’agent strictement plus élevée dans cet état que dans le mauvais état de la
nature.
 L’assurance optimale prise ne couvre donc pas intégralement le risque, elle est partielle.
 Le fait que 𝛾 > 𝑝 peut aussi provenir du fait que l’entreprise est sur un secteur non
concurrentiel ; dans ce cas, la compagnie se garde une marge de profit. Il peut être aussi
de l’intérêt de l’assureur de ne pas couvrir intégralement le risque pour éviter la prise
de risque excessive.

2) Le cas particulier du marché d’assurance concurrentiel

Déterminons le profit espéré de la compagnie d’assurance :

𝛱 = (1 − 𝑝)𝛾𝐴 + 𝑝(𝛾 − 1)𝐴

Pour simplifier, on supposera qu’il n’y a aucun frais d’administration (frais de chargement) et
que la compagnie fait des profits nuls : 𝛱 = 0.

On peut calculer la prime que la compagnie demandera à ses clients :

(1 − 𝑝)𝛾𝐴 + 𝑝(𝛾 − 1)𝐴 = 0

Ce qui implique :

23
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

𝛾=𝑝

Interprétation : Ce résultat montre que la prime demandée pour chaque franc cfa assuré est
égale à la probabilité 𝑝 de devoir les payer.

En réinjectant ce résultat dans la condition de premier ordre, il vient :

𝑈 ′ (𝐶𝑚 )
= 1 ⤇ 𝐶𝑚 ∗ = 𝐶𝑏 ∗
𝑈 ′ (𝐶𝑏 )

Interprétation :

 Dans ce contexte où le coût unitaire de l’assurance est égal à la probabilité que le


mauvais état de nature se produise, l’agent choisit un niveau optimal d’assurance lui
permettant d’avoir exactement le même niveau de consommation dans chaque état de
la nature : l’assurance est parfaite dans ce cas. Ainsi, s’assurer complètement, c’est se
garantir d’avoir son revenu moyen en toutes circonstances.
 L’assurance permet donc à l’agent d’opérer le lissage de son revenu entre les différents
états de la nature en raison de la concavité de son utilité. Dans le cas d’un marché
parfaitement concurrentiel, il y parvient parfaitement.

II) Courbes d’indifférence en incertain, attitude envers le risque et choix optimal

1) Courbes d’indifférence

L’agent économique est confronté à un environnement incertain qui peut être soit favorable soit
défavorable. Son revenu dans le cas favorable donne lieu à une consommation 𝐶𝑏 . Sa
consommation dans le cas défavorable est 𝐶𝑚 . On peut représenter ces niveaux de
consommation dans un repère (𝐶𝑚 , 𝐶𝑏 ).

La situation initiale de l’agent est représentée par le point 𝑃𝐴 : en ce point, 𝐶𝑏 est très élevé et
𝐶𝑚 est beaucoup plus faible. Comme l’individu est averse au risque, il préfère les situations
moins extrêmes, ce qui se traduit par une courbe d’indifférence convexe. Cette courbure
convexe est une conséquence directe de la concavité de la fonction d’utilité. Dans la théorie
traditionnelle du consommateur, cette convexité de la courbe d’indifférence traduisait la
décroissance de l’utilité marginale d’un bien. En univers incertain, elle traduit l’aversion pour
le risque.

La pente de la courbe d’indifférence n’est rien d’autre que le TMS entre les deux états de la
nature. Au point initial 𝑃𝐴 , la pente est très forte : l’individu est donc prêt à sacrifier beaucoup
de sa consommation quand tout va bien pour augmenter un peu sa consommation si les choses
tournent mal. Le point 𝑃𝐵 représente une situation dans laquelle il est moins désireux de sacrifier

24
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

de sa consommation d’un état de la nature favorable à un état de la nature favorable. Le TMS


est plus faible en valeur absolue.

2) Contrainte de budget

A partir du point 𝑃𝐴 , l’agent peut transférer de l’utilité entre les divers états de la nature, en
souscrivant à une assurance. Soit le contrat d’assurance le plus simple possible : payer une
prime 𝛾 par unité d’assurance. Dans le mauvais état nature, la compagnie d’assurance lui verse
une compensation d’1 fcfa par unité souscrite. Si l’individu souscrit 𝐴 unités d’assurance, il
reçoit 𝐴 comme compensation et paiera une prime d’assurance de 𝛾𝐴.

Dans le bon état de nature, la consommation de l’agent est la différence entre son revenu brut
et sa prime d’assurance, soit : 𝐶𝑏 = 𝑅𝑏 − 𝛾𝐴.

Dans le mauvais état de nature, sa consommation sera égale à son revenu brut moins la prime
d’assurance plus la compensation, soit : 𝐶𝑚 = 𝑅𝑚 − 𝛾𝐴 + 𝐴 = 𝑅𝑚 + (1 − 𝛾)𝐴

En combinant les deux expressions ci-dessus, on obtient :


𝛾
𝐶𝑏 = 𝑅𝑏 − (𝐶 − 𝑅𝑚 )
1−𝛾 𝑚
𝛾
 𝐶𝑚 = 0 → 𝐶𝑏 = 𝑅𝑏 + 1−𝛾 𝑅𝑚
1−𝛾
 𝐶𝑏 = 0 → 𝐶𝑚 = 𝑅𝑚 + 𝑅𝑏
𝛾
𝛾
 La quantité est le prix relatif de l’assurance : 𝛾 est le prix dans le bon état de la
1−𝛾
nature, 1 − 𝛾 est le gain net du coût dans le mauvais état de la nature.

3) Choix optimal

Le choix optimal est le point de tangence entre la droite de budget et la courbe d’indifférence
la plus élevée. Si l’individu n’achète pas d’assurance, il consommera en fonction de ses revenus
dans chaque état :

𝐶𝑚 = 𝑅𝑚 𝑒𝑡 𝐶𝑏 = 𝑅𝑏

Il se situe au point 𝑃𝐴 . Mais il peut obtenir une utilité plus élevée en achetant une quantité
d’assurance qui le place au point de choix optimal, au point de tangence entre la droite de budget
et une nouvelle courbe d’indifférence plus éloignée du point d’origine. Comme l’individu est
averse au risque, la possibilité de s’assurer lui permet d’atteindre une courbe d’utilité supérieure
à ce qu’il aurait obtenu avec sa dotation initiale, en l’absence d’assurance (point 𝑃𝐴 ).

25
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

III) Une approche alternative à la théorie de l’utilité espérée : l’utilité moyenne-


variance

1) Les fondements de cette approche de l’utilité moyenne-variance

Une approche alternative à la théorie de l’utilité espérée est de représenter les distributions de
probabilité par un petit nombre de paramètres et de définir la fonction d’utilité par rapport à ces
paramètres. L’exemple le plus connu de cette approche est le modèle moyenne-variance (les
deux premiers moments de la distribution de probabilité). Ce modèle est une simplification du
modèle de l’utilité espérée. Ici, on ne considère pas que les préférences d’un individu dépendent
de l’ensemble de la distribution de probabilité de sa richesse dans les différentes situations
possibles. On suppose que ses préférences peuvent être définies sur la base d’un petit nombre
de statistiques qui synthétisent la distribution de probabilité de sa richesse. Si les choix à
effectuer peuvent être définis complètement par leur moyenne et leur variance, une fonction
d’utilité définie sur base de la moyenne et de la variance permet de classer les choix de la même
façon qu’une fonction d’utilité espérée. Comment justifier cette approche ?

Justificatif par la distribution de probabilité normale

Lorsque la distribution de probabilité de la richesse est celle de la loi normale, ses deux premiers
moments la caractérisent parfaitement. L’approche moyenne-variance se justifie alors : l’agent
économique peut ne se préoccuper que de l’espérance et de la variance.

Justificatif par des restrictions sur l’utilité espérée

Tobin (1958) et Markowitz (1959) montrent que la simplification de la fonction d’utulité


espérée sous forme de fonction d’utilité moyenne-variance est obtenue via certaines restrictions
sur la fonction d'utilité ou sur la distribution a priori des rendements aléatoires. Tsiang (1972,
1974) discute ces restrictions. En outre, Levy et Markowitz (1979) démontrent, pour certaines
classes de fonctions d'utilité, que les choix selon le critère de moyenne-variance procurent un
niveau d'espérance d'utilité qui est très proche du niveau obtenu par la maximisation directe de
l'utilité espérée, indépendamment de la nature de la distribution de probabilité.

Montrons que l’une de ces classes de fonction est la fonction d’utilité quadratique de la forme:

𝑈(𝑅) = 𝑎 + 𝑏𝑅 − 𝑐𝑅 2

𝑎, 𝑏, 𝑐 sont des constantes, avec 𝑏 > 0 𝑒𝑡 𝑐 > 0. L’agent est averse au risque pour 𝑈′(𝑅) >
𝑏
0 𝑒𝑡 𝑈"(𝑅) > 0 , soit pour 𝑅 ∈ [−∞, 2𝑐]. En prenant l’espérance de 𝑈(𝑅), on obtient :

𝐸[𝑈(𝑅)] = 𝑎 + 𝑏𝐸(𝑅) − 𝑐𝐸(𝑅 2 )

En notant 𝜎 2 (𝑅) la variance de 𝑅, on a : 𝐸(𝑅 2 ) = 𝜎 2 (𝑅)+𝐸 2 (𝑅). Ainsi :

𝐸[𝑈(𝑅)] = 𝑎 + 𝑏𝐸(𝑅) − 𝑐𝜎 2 (𝑅) − 𝑐𝐸 2 (𝑅)

On voit bien que l’utilité espérée de 𝑅 est exclusivement fonction des deux premiers moments
de la distribution de 𝑅 (espérance et variance)
26
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

Nb : la fonction d’utilité quadratique décrit, dans sa portion croissante, un individu dont


l’aversion absolue au risque est croissante et l’aversion relative au risque croissante. Une telle
fonction n’est pas réaliste pour un investisseur dont l’aversion absolue au risque est décroissante
et l’aversion relative au risque est constante. Il aurait fallu des fonctions d’utilité caractérisées
explicitement non seulement par les deux premiers moments mais aussi par des moments
d’ordre supérieur (kurtosis, par exemple). La fonction qui conviendrait le mieux pour décrire
les choix d’un investisseur est une fonction exponentielle négative.

Forme générale de la fonction d’utilité moyenne-variance

1
𝐸[𝑈(𝑅)] = 𝐸(𝑅) − 𝜑𝜎 2 (𝑅)
2
𝜑 : degré d’aversion au risque. Plus 𝜑 est élevé, plus l’individu est averse au risque. Ce
paramètre traduit également la désutilité engendrée par une unité de variance supplémentaire.
Si 𝜑 = 0, l’individu est neutre au risque.

2) Courbes d’indifférence

𝐸[𝑈(𝑅)] = 𝑎 + 𝑏𝐸(𝑅) − 𝑐𝜎 2 (𝑅) − 𝑐𝐸 2 (𝑅)

Ou encore :

𝑎 − 𝐸[𝑈(𝑅)] 𝑏
𝜎 2 (𝑅) = + 𝐸(𝑅) − [𝐸(𝑅)]2
𝑐 𝑐
A chaque valeur de 𝐸[𝑈(𝑅)] correspond une courbe d’indifférence différente, mais pour une
courbe d’indifférence donnée, 𝐸[𝑈(𝑅)] peut être considérée comme une constante. On peut
écrire :

𝑏
𝜎 2 (𝑅) = 𝐾 + 𝐸(𝑅) − [𝐸(𝑅)]2
𝑐

IV) Arbitrage entre risque et rendement : application au marché boursier

Un investisseur souhaite investir dans deux actifs : des bons du Trésor (actif sans risque) et un
ensemble représentatif de valeurs boursières. Il doit décider du montant à investir dans chaque
actif. On étudie le choix optimal de l’investisseur. Notons 𝑅𝑓 le rendement de l’actif sans risque
(rendement espéré supposé égal au rendement réel) et 𝑅𝑚 le rendement de l’actif risqué. On a
𝑅𝑚 > 𝑅𝑓 , sinon les investisseurs averses au risque n’achèteront que des bons du Trésor et se
détourneront des valeurs boursières.

27
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

Soit 𝜃 la part de l’épargne placée sur le marché boursier et (1 − 𝜃) la part utilisée pour acheter
des bons du Trésor. Le rendement espéré de l’ensemble du portefeuille de l’investisseur est :

𝑅𝑝 = 𝜃𝑅𝑚 + (1 − 𝜃)𝑅𝑓 = 𝑅𝑓 + 𝜃(𝑅𝑚 − 𝑅𝑓 )


2
En notant 𝜎𝑚 la variance de l’investissement risqué sur le marché boursier et sachant que la
variance de l’investissement dans l’actif sans risque est nulle (𝜎𝑓2 = 0), la variance du
rendement de ce portefeuille est :
2
𝜎𝑝2 = 𝐸[𝜃𝑟𝑚 + (1 − 𝜃)𝑅𝑓 − 𝑅𝑝 ]

Ou encore :
2
𝜎𝑝2 = 𝐸[𝜃𝑟𝑚 + (1 − 𝜃)𝑅𝑓 − 𝜃𝑅𝑚 − (1 − 𝜃)𝑅𝑓 ] = 𝐸[𝜃(𝑟𝑚 − 𝑅𝑚 ]2 = 𝜃 2 𝜎𝑚
2

𝜎𝑝
𝜎𝑝 = 𝜃𝜎𝑚 → 𝜃 =
𝜎𝑚

Comment l’investisseur choisit-il la part optimal 𝜃 ∗ ?

1) Risque et droite de budget


𝜎𝑝
On a vu que : 𝑅𝑝 = 𝑅𝑓 + 𝜃(𝑅𝑚 − 𝑅𝑓 ) et que 𝜃 = 𝜎 , il vient donc :
𝑚

(𝑅𝑚 − 𝑅𝑓 )
𝑅𝑝 = 𝑅𝑓 + 𝜎𝑝
𝜎𝑚

Cette équation est une droite de budget car elle décrit l’arbitrage entre le risque 𝜎𝑝 et le
rendement 𝑅𝑝 . Elle montre que le rendement espéré du portefeuille augmente lorsque l’écart-
(𝑅𝑚 −𝑅𝑓 )
type de ce rendement augmente. La pente de cette droite est le prix du risque : il indique
𝜎𝑚
quel risque supplémentaire l’investisseur est prêt à encourir pour obtenir un rendement plus
grand.

2) Choix optimal de l’investisseur

L’utilité espérée de l’investisseur est de forme moyenne-variance :

1
𝐸[𝑈(𝑅𝑝 , 𝜎𝑝 )] = 𝑅𝑝 − 𝜑𝜎𝑝2
2
Il maximise cette fonction-objectif sous la contrainte que

28
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

(𝑅𝑚 − 𝑅𝑓 )
𝑅𝑝 = 𝑅𝑓 + 𝜎𝑝
𝜎𝑚

A l’optimum, on obtient :

𝑅𝑚 − 𝑅𝑓
𝜎𝑝 ∗ =
𝜑𝜎𝑚

(𝑅𝑚 − 𝑅𝑓 )2
𝑅𝑝 ∗ = 𝑅𝑓 +
𝜑𝜎𝑚 2

Et donc :

𝜎𝑝 ∗ 𝑅𝑚 − 𝑅𝑓
𝜃∗ = =
𝜎𝑚 𝜑𝜎𝑚 2

Mots clés :

Gain espéré, utilité espérée, aversion au risque, goût du risque, neutralité au risque, équivalent-
certain, prime de risque, critère moyenne-variance, etc.

Références bibliographiques

Hadrien GOUZE (2018), « Manuel de microéconomie », Editions Ellipses, 191 p.

Robert PINDYCK et Daniel RUBINFELD (2009), « Microéconomie », 7ème édition, Pearson.

Etienne WASMER (2010), « Principes de microéconomie », Pearson Education, 2010.

Exercices sur le chapitre II

Exercice 1

Le support d’un revenu financier aléatoire est l’intervalle [100, 200]. Les revenus sont
distribués uniformément.

29
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

a) Explicitez la fonction de densité.


b) Calculez la probabilité que le revenu soit compris entre 150 et 200.

Exercice 2

Koffi offre à Digbeu une opportunité de participer à un jeu de chance où une pièce de monnaie
est lancée : si c’est pile (donc avec une probabilité de ½ pour une pièce non pipée), le jeu s’arrête
et Digbeu reçoit 1000 fcfa. Si c’est face, le jeu continue et la pièce est lancée une deuxième
1 2
fois. Si c’est pile (avec une probabilité de (2) ), le jeu s’arrête et Digbeu reçoit 2000 fcfa ;
sinon le jeu continue et ainsi de suite jusqu’à ce que la pièce tombe sur pile.

1) Quelle est l’espérance de gains dans ce jeu ? Combien Digbeu serait-il prêt à payer pour
y participer ?
2) Le critère de la valeur espérée des gains monétaires est-il un critère satisfaisant pour
expliquer les décisions de participer ou non à ce jeu ? Expliquez.
3) Bernoulli a résolu ce paradoxe en proposant que les agents ont une utilité marginale
décroissante par rapport aux gains. Vérifiez que la fonction d’utilité 𝑢(𝑥) = 𝑥1/2
implique une utilité marginale décroissante.
4) Ecrivez l’utilité espérée du jeu. Un agent rationnel accepterait-il le jeu à n’importe quel
prix ?

Exercice 3

Soit un individu dont la fonction d’utilité de la richesse est quadratique de la forme:

𝑈(𝑅) = 𝑅 2

1) Si le revenu de cet individu R=10, quelle est son utilité ?

Cet individu a maintenant la possibilité de participer à une loterie qui lui donne deux revenus,
soit 5 soit 15 avec une probabilité de ½ chacun.

2) Quel est son revenu espéré ? Déterminez son utilité espérée. Que peut-on en conclure ?
Faites une représentation graphique.
3) Calculez l’équivalent-certain et la prime de risque. Commentez
4) Pouvez-vous retrouver autrement ces résultats ?

Exercice 4

Lorsque l’on participe à une loterie, le gros lot est généralement très élevé, mais il n’y a la
plupart du temps qu’une chance très faible de la gagner. La compagnie qui organise ce jeu est
supposée maximiser ses profits.

30
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

1) Montrez que l’espérance de gain est ici toujours inférieure au coût du billet.
2) Expliquez pourquoi, malgré le résultat précédent, nombreux sont les individus qui
achètent des billets de loterie.

Exercice 5

Pour les fonctions d’utilité suivantes, déterminez le coefficient d’aversion absolue envers le
risque de l’individu et le coefficient d’aversion relative envers le risque :

 𝑈(𝑅) = 𝑎 + 𝑏𝑅 − 𝑐𝑅 2
 𝑈(𝑅) = ln 𝑅
 𝑈(𝑅) = −𝑒 −𝑐𝑅
−𝑐
 𝑈(𝑅) = −𝑒 −𝑅

Correction des exercices

Exercice 1

Le support d’un revenu financier aléatoire est l’intervalle [100, 200]. Les revenus sont
distribués uniformément.

c) Explicitez la fonction de densité.


d) Calculez la probabilité que le revenu soit compris entre 150 et 200.

a) La fonction de densité notée f(x) d’une loi uniforme continue définie sur l’intervalle [a,
b] s’énonce

1
𝑓(𝑥) = { 𝑏 − 𝑎 𝑝𝑜𝑢𝑟 𝑎 ≤ 𝑥 ≤ 𝑏
0 𝑠𝑖𝑛𝑜𝑛
Cette densité est constante car nous retrouvons le caractère d’équiprobabilités. Avec les
données de l’énoncé, la fonction de densité du revenu financier est définie par

1 1
𝑓(𝑥) = {200 − 100 = 𝑝𝑜𝑢𝑟 𝑎 ≤ 𝑥 ≤ 𝑏
100
0 𝑠𝑖𝑛𝑜𝑛
b) La probabilité d’un intervalle [α, β] est définie par
𝑃(𝛼 ≤ 𝑥 ≤ 𝛽) = 𝑃(𝑥 ≤ 𝛽) − 𝑃(𝑥 ≤ 𝛼) = 𝐹(𝛽) − 𝐹(𝛼)
Nous définissons donc la fonction de répartition d’une loi uniforme continue

31
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

0 𝑠𝑖 𝑥 ≤ 𝑎
𝑥−𝑎
𝐹(𝑥) = { 𝑠𝑖 𝑎 ≤ 𝑥 ≤ 𝑏
𝑏−𝑎
1 𝑠𝑖 𝑥 ≥ 𝑏

Avec les données de l’énoncé, la loi de répartition du revenu financier est définie par

0 𝑠𝑖 𝑥 ≤ 100
𝑥 − 100 𝑥 − 100
𝐹(𝑥) = { = 𝑠𝑖 100 ≤ 𝑥 ≤ 200
200 − 100 100
1 𝑠𝑖 𝑥 ≥ 200

La probabilité d’un intervalle [150,200] est définie par 𝑃(150 ≤ 𝑥 ≤ 200) =


𝑃(𝑥 ≤ 200) − 𝑃(𝑥 ≤ 150) = 𝐹(200) − 𝐹(150)
200−100 150−100
Soit 𝑃(150 ≤ 𝑥 ≤ 200) = − = 1/2
100 100

Exercice 2

On voit dans ce jeu (et en se basant sur ce qui a été vu au cours) que le gain au nième lancer est
2𝑛+1*1000 fcfa si « face » est obtenu pour la première fois au nième lancer (𝑛 = 1, … , ∞).Le
tableau suivant présente les résultats possibles du jeu avec leurs probabilités d’obtention :

Numéro du lancer pour lequel Gain Probabilité


« face » apparaît pour la 1ère fois
1 20 *1000 = 1000 ½
2 21 *1000 = 2000 ¼
3 22 *1000 = 4000 1/8
4 23 *1000 = 8000 1/16

N 2𝑛−1 *1000 1/2𝑛

1) Espérance mathématique du gain dans ce jeu :

1 0 1 2 1 3 2 1 𝑛 𝑛−1
𝐸(𝐺) = . 2 ∗ 1000 + ( ) . 2 ∗ 1000 + ( ) . 2 ∗ 1000 + ⋯ + ( ) . 2 ∗ 1000 + ⋯
2 2 2 2

𝐸(𝐺) = ∑ 1/2 ∗ 1000 = ∞


𝑛=1

L’espérance mathématique de gain est infinie. Or, un individu rationnel devrait être prêt à payer un
montant aussi élevé que le gain espéré pour participer à ce jeu. Digbeu devrait donc être prêt à payer un
montant infini pour participer à ce jeu.

32
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

2) Payer un montant infini pour participer à ce jeu n’est pas réaliste. En réalité, peu d’individus seraient
disposés à payer une somme élevée pour participer à ce jeu. Le critère du gain espéré n’est pas un critère
satisfaisant de choix en incertain. En effet, Digbeu tiendra compte aussi dans son raisonnement du risque
associé au jeu et non pas seulement du gain. On voit bien, en observant la troisième colonne du tableau,
que le risque d’obtenir ‘face’ dès les premiers lancers de la pièce est loin d’être négligeable. Dit
autrement, un individu rationnel en situation risquée ne raisonne pas d’ordinaire en termes de
maximisation de gain espéré. Il faut un autre critère de décision.

3) Soit 𝑢𝑚 l’utilité marginale du gain 𝑥, on obtient :


1 ′ 1
𝑢𝑚 = 𝑢′(𝑥) = 𝑥 −1/2 et 𝑢𝑚 = 𝑢′′(𝑥) = − 𝑥 −3/2 < 0
2 4

On voit bien que l’utilité marginale est décroissante (𝑢′′(𝑥) < 0)

4) Utilité espérée du jeu :


∞ ∞ ∞ 𝑛−1 ∞
1 1 𝑛−1 2 2 −𝑛−1
𝐸[𝑢(𝑥)] = ∑ 𝑛 (1000 ∗ 2𝑛−1 )1/2 ) = ∑ 𝑛 1000 ∗ 2 2 = √1000 ∑ 𝑛 = √1000 ∑ 2 2
2 2 2
𝑛=1 𝑛=1 𝑛=1 𝑛=1

−𝑛−1
On montre que ∑∞
𝑛=1 2 2 → 1 d’où :

𝐸[𝑢(𝑥)] ≈ √1000

Un agent rationnel accepterait de jouer ce jeu à un prix au plus égal à √1000fcfa .

Exercice 3

1) Si 𝑅 = 10, on a 𝑈(𝑅) = 100


1 1 1 1
2) 𝐸𝑈(𝑅) = 2 𝑈(5) + 2 𝑈(15) = 2 ∗ 25 + 2 ∗ 225 = 125

On a 𝐸𝑈(𝑅) > 𝑈(𝑅) : l’individu préfère la situation risquée à la situation certaine. Il est risquophile
(goût pour le risque).

Représentation graphique

3) L’équivalent certain d’un revenu incertain est le revenu qui, obtenu avec certitude, procure à un
individu le même niveau d’utilité que ce que lui procure le revenu incertain. En le notant 𝐸𝐶, on le
détermine de la façon suivante :

𝑈(𝐸𝐶) = 125

33
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

𝐸𝐶 2 = 125 ⇒ 𝐸𝐶 = √125 ≈ 11,2

Prime de risque 𝜋: c’est la différence entre le revenu espéré et l’équivalent-certain 𝐸𝐶 est la prime de
risque.
1 1
Revenu espéré 𝐸(𝑅) = 2 5 + 2 15 = 10

𝜋 = 𝐸(𝑅) − 𝐸𝐶

𝜋 = 10 − 11,2 = −1,2

Une prime de risque négative s’interprète simplement comme le montant que l’agent ayant du goût pour
le risque accepte de payer pour avoir un revenu incertain au lieu d’un revenu certain.

4) On peut retrouver autrement les résultats selon lesquels l’individu est risquophile et a une prime de
risque négative. Il suffit alors de montrer que la dérivée seconde de la fonction d’utilité est positive.

𝑈 ′(𝑅) = 2𝑅 et 𝑈"(𝑅) = 2 > 0

L’utilité marginale de son revenu est alors croissante : la situation positive ou négative (15 ou 5) est
symétrique en termes de revenu par rapport à 10 mais asymétrique en termes d’utilité. Supposons que
l’individu a un revenu de 10 et qu’il reçoit 5 de plus. Son utilité augmentera et comme l’utilité marginale
du revenu est croissante, l’augmentation de l’utilité sera plus forte que dans le cas de la situation
défavorable où il reçoit 5 : dans cette zone de revenus, son utilité marginale est plus faible. Donc, s’il
perd 5 à partir de 10 (pour avoir 5), alors son utilité augmentera beaucoup : chaque franc cfa perdu lui
fait perdre peu d’utilité. En raison de cette asymétrie, en moyenne, l’espérance d’utilité est plus élevée
que l’utilité de l’espérance de revenus : l’individu a donc du goût pour le risque. Il est donc prêt à payer
pour participer à une loterie (prime de risque négative) plutôt qu’on ne le paye pour y participer (prime
de risque positive).

Exercice 4

1) La compagnie œuvre toujours à garder une marge de profit positif. Ce qui implique que l’espérance
de gain soit toujours inférieure au coût unitaire du billet.

2) Le fait que nombreux sont les individus qui achètent des billets de loterie malgré le fait que
l’espérance de gain est toujours inférieure au coût unitaire du billet peut s’expliquer ainsi:Ceux qui
jouent, même s’ils sont considérés comme averses au risque pour de grandes décisions (achat de maison

34
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

par exemple), ont du goût pour le risque pour les petits montant comme le prix de billet de loterie
(fonction d’utilité de ceux qui jouent est convexe, au moins localement).

Exercice 5

Les formules sont :

 Coefficient d’aversion absolue pour le risque :


−𝑈′′(𝑅)
𝑅𝐴 (𝑅) =
𝑈′(𝑅)

 Coefficient d’aversion relative pour le risque :

−𝑈′′(𝑅)
𝑅𝑅 (𝑅) = 𝑅
𝑈′(𝑅)

𝑅𝐴 (𝑅) 𝑅𝑅 (𝑅)

𝑈(𝑅) = 𝑎 + 𝑏𝑅 − 𝑐𝑅 2 2𝑐 2𝑐𝑅
𝑏 − 2𝑐𝑅 𝑏 − 2𝑐𝑅
𝑈(𝑅) = ln 𝑅 1 1
𝑅
𝑈(𝑅) = −𝑒 −𝑐𝑅 𝑐 𝑐𝑅

𝑈(𝑅) = −𝑒 −𝑅
−𝑐
𝑐+1 𝑐 𝑐
− 𝑐+1 𝑐+1−
𝑅 𝑅 𝑐𝑐

CHAPITRE III

PRINCIPES MICROECONOMIQUES DE VALORISATION DES ACTIFS


FINANCIERS

Objectif du chapitre III

35
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

Ce chapitre doit permettre à l’étudiant(e) de:

 savoir comment utiliser les principes de l’actualisation et de l’arbitrage, les techniques


du portefeuille de synthèse et des zéro-coupons pour évaluer les actifs financiers;
 comprendre les théorèmes fondamentaux de la finance qui ont permis, depuis les années
1970, le boom des innovations financières via l’ingénierie financière ;
 comprendre les enjeux des débats autour de la théorie de la valeur fondamentale

Les résultats de ce chapitre sont issus des travaux d’Irving Fisher (1906, 1930), de John Burr
Williams (1938), de Gordon-Shapiro (…)

Section 1 : Le théorème fondamental de la finance

Dans cette section, nous énoncer des résultats essentiels de la finance que sont le théorème
d’additivité de la valeur et le théorème fondamental de la finance.

I) Eléments de définition

On note deux catégories d’actifs financiers selon leur objectif financier:

 Les actifs élémentaires : qui assurent le financement des entreprises sur les marchés
financiers (actions, obligations, etc.)
 Les produits dérivés : qui permettent de couvrir les risques

La valeur d’une action reflète l’état financier de l’entreprise par la consolidation comptable des
comptes de résultats financiers annuels et de ses perspectives de croissance. Deux facteurs
déterminent la valeur d’une action :

 Un facteur économique de long terme lié à la réalité de l’entreprise, mesurée par son
chiffre d’affaires, sa marge et sa bonne performance par rapport au marché. Le détenteur
de l’action reçoit une rémunération sous forme de dividendes pour compenser le risque
productif de l’entreprise endossée.
 Un facteur spéculatif de court terme résultant des variations induites par l’échange
d’actions à haute fréquence. Cet échange d’actions représente un jeu à somme nulle sans
création de valeur économique.

La valorisation des actifs financiers est fondée sur deux éléments importants : l’actualisation et
le principe d’arbitrage. L’arbitrage traduit la mise en place d’une transaction à partir de rien au
départ et qui résulte en un profit. Les opportunités d’arbitrage apparaissent occasionnellement.
Mais sur un marché financier développé, avec des acteurs rationnels, de telles opportunités sont
rares d’autant plus que ces opportunités sont exploitées une fois qu’elles apparaissent.
L’absence d’opportunité d’arbitrage (AOA) stipule que, partant de rien à la date initiale, il est
impossible pour un investisseur de détenir en fin de période une richesse qui soit positive ou
nulle et strictement positive avec une probabilité strictement positive.

36
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

II) Théorème fondamental de la finance

Nous énonçons le théorème d’additivité de la valeur qui conduit au théorème fondamental de


la finance

Théorème d’additivité de la valeur : le prix d’un actif C dont les revenus sont des
combinaisons linéaires d’autres actifs est égal à la même combinaison linéaire des prix desdits
actifs.

Théorème fondamental de la finance : Si les marchés sont complets, alors il existe un prix
unique pour tout actif financier. En effet, la complétude du système de marchés financiers
implique l’AOA et, en conséquence, la fixation d’un prix unique.

Nb : si les prix n’étaient pas uniques, tous les agents chercheraient à acheter au prix le plus bas
et à vendre au prix le plus élevé, ce qui créerait une opportunité d’arbitrage, autrement dit, la
possibilité de réaliser des bénéfices sans que cette stratégie financière ne soit coûteuse.

Remarque : l’exploitation de cette simple idée (un des fondements de la théorie financière
moderne) par l’ingénierie financière depuis les années 1970 a permis la multiplication des actifs
échangés via les innovations financières.

Section 2 : Les règles de valorisation des actifs

Dans cette section, nous énonçons les règles de valorisation des actifs : la valorisation via le
portefeuille de synthèse, la valorisation via les zéros-coupons et la valorisation par actualisation.

I) La règle de valorisation avec l’absence d’opportunité d’arbitrage

1) La valorisation via le portefeuille de synthèse

Que vaut un actif financier donnant le profil de revenus 𝑉1 , … 𝑉𝑡 … 𝑉𝑇 ? Pour le savoir, on recourt
au concept de « portefeuille de synthèse ». En effet, la valeur accordée à un actif n’a de sens

37
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

économique que si les marchés financiers respectent certaines caractéristiques comme la


possibilité de synthétiser financièrement l’actif étudié. Synthétiser un actif dont les revenus
futurs sont 𝑉1 , … 𝑉𝑡 … 𝑉𝑇 , c’est créer un portefeuille d’autres actifs donnant les mêmes revenus.
Ce portefeuille de synthèse et l’actif répliqué constituent deux actifs financièrement similaires.

Par exemple, si 𝑉1 = (1,0,1) , 𝑉2 = (0,1,1) 𝑉3 = (1,1,2)

On constate que le 3ème actif peut être synthétisé par le portefeuille contenant une unité de
chacun des deux premiers actifs :

1. 𝑉3 = 1. 𝑉1 + 1. 𝑉2

Fisher montre qu’un tel actif financier vaut la valeur de son portefeuille de synthèse. En effet,
sur un marché parfait, des biens identiques ont le même prix. Montrons-le :

Supposons que les prix des actifs soit tels que : 𝑞3 > 𝑞1 + 𝑞2. On peut alors acheter les deux
premiers actifs dans les mêmes proportions et vendre le troisième. A la seconde période, on
livre les dividendes de 3, et justement les revenus des deux premiers actifs sont disponibles et
justes suffisants. Par contre, à la première période, ces achats et ces ventes génèrent un profit
positif :

𝜋= 𝑞⏟3 − ( 𝑞1 + 𝑞2
⏟ ) >0
𝑣𝑒𝑛𝑡𝑒 𝑑𝑒 𝑙′ 𝑎𝑐𝑡𝑖𝑓3 𝑎𝑐ℎ𝑎𝑡 𝑑𝑒𝑠 𝑎𝑐𝑡𝑖𝑓𝑠 1 𝑒𝑡 2

L’existence de ce profit d’arbitrage est en contradiction avec l’hypothèse de l’équilibre initial


(maximisation de profit). On a donc 𝑞3 = 𝑞1 + 𝑞2

Ce résultat permet d’énoncer la règle de valorisation avec l’absence d’opportunité d’arbitrage


(AOA) :

Proposition 1 : Si deux actifs financiers génèrent le même profil de revenus, alors ils présentent
le même prix. Dit autrement, un actif financier vaut la valeur de son portefeuille de synthèse
qui permet de reproduire le profil de son revenu, s’il n’existe pas d’opportunité d’arbitrage.

2) La valorisation via les zéro-coupons

Synthétiser un actif avec des actifs quelconques peut être fastidieux car revenant à résoudre un
système de T équations à T inconnues. Heureusement, la simplicité du zéro-coupon permet de
s’affranchir de cette lourdeur : le zéro-coupon permet de synthétiser n’importe quel actif et d’en
calculer très facilement le prix.

Un zéro-coupon est un actif financier élémentaire fictif qui permet de valoriser tout actif
financier avec simplicité de calculs. C’est une obligation de maturité t qui procure le versement
unique d’un coupon de montant égal à 1 fcfa à la date t. notons 𝛽 𝑍𝐶 (𝑡) le prix d’un zéro-coupon
d’échéance t payé à la date initiale t=0. Avant de voir comment synthétiser un actif avec un
zéro-coupon, il est utile de savoir comment se détermine le prix d’un zéro-coupon.

38
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

Supposons qu’il existe un système complet et parfait de marchés courts intermédiés dont le prix
définit la valeur du taux d’intérêt court, noté 𝑟𝑡 . La complétude du marché financier implique
que les prix des zéros-coupons sont uniques et qu’il n’existe pas de stratégies financières
d’arbitrage. Pour obtenir 1fcfa à la date t, l’agent doit placer en t=0 un montant de :

1
∏𝑡𝑖=1(1 + 𝑟𝑖 )

En AOA, tous les actifs qui génèrent le même profil de revenus présentent le même prix. Il
s’ensuit que :

1
𝛽 𝑍𝐶 (𝑡) =
∏𝑡𝑖=1(1 + 𝑟𝑖 )

Avec une formule de récurrence, on obtient :

𝛽 𝑍𝐶 (𝑡 − 1)
𝛽 𝑍𝐶 (𝑡) =
(1 + 𝑟𝑡 )

Maintenant, voyons comment synthétiser un actif avec un zéro-coupon :

39
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

Si l’on veut obtenir 𝑤1 , 𝑤2 … 𝑤𝑡 aux périodes 1, 2…t, il suffit d’acheter le nombre requis de
zéro-coupon pour chaque période pour se constituer un portefeuille équivalent :

Les prix des zéro-coupons permettent de donner immédiatement la valeur économique


d’équilibre de tout actif financier. En effet, si 𝑉1 , … 𝑉𝑡 … 𝑉𝑇 sont les revenus de l’actif, son prix
d’équilibre en 0 est :
𝑇

𝑞 = ∑ 𝛽𝑡 𝑉𝑡
𝑡=1

Ce résultat est l’un des plus fondamentaux de la théorie de Fisher (1930). John Burr Williams
(1938) traduit la même idée : « En bref, une action ne vaut que ce qu’elle vous rapporte… ».
Burr caractérise la valeur fondamentale d’un actif financier en utilisant la méthode économique
de l’actualisation des flux monétaires futurs.

II) La valorisation par actualisation

1) La valeur actuelle (VA) et la valeur actuelle nette (VAN)

 La VA

La valeur actuelle du revenu d’un actif est égale au revenu aujourd’hui qui lui est équivalent.
Pour obtenir cette équivalence, on applique un taux d’actualisation 𝑎𝑡 dont la valeur dépend des
taux d’intérêt des marchés financiers 𝑟𝑡 :

𝑎𝑡 = 𝑓(𝑟𝑡 )

Si le système de marchés financiers est parfait et complet, on a :

𝑎𝑡 = 𝑟𝑡

40
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

La valeur actualisée d’un flux de revenus futurs 𝑤𝑡 générés par une stratégie financière
admissible, notée S, et actée à la date t=0 est définie par :
𝑇
𝑤(1) 𝑤(2) 𝑤(𝑇) 𝑤(𝑖)
𝑉𝐴(𝑆) = + +⋯+ 𝑇 =∑ 𝑖
(1 + 𝑎1 ) (1 + 𝑎1 )(1 + 𝑎2 ) ∏𝑡=1(1 + 𝑎𝑡 ) ∏𝑡=1(1 + 𝑎𝑡 )
𝑖=1

 La VAN

La VAN est égale à la différence entre les recettes actualisées et les dépenses actualisées. Elle
définit la valeur fondamentale d’un actif financier ou d’une entreprise. Si un investissement de
k réalisé en t=0 génère un flux de revenus 𝑤𝑡 , alors la VAN de ce projet S est :
𝑇
𝑤(𝑖)
𝑉𝐴𝑁(𝑆) = 𝑉𝐴(𝑆) − 𝑘 = ∑ −𝑘
∏𝑖𝑡=1(1 + 𝑎𝑡 )
𝑖=1

Mots-clés

Additivité de la valeur, valorisation des actifs, zéro-coupon, opportunité d’arbitrage, théorème


fondamental de la finance, actualisation, valeur actuelle nette, portefeuille de synthèse,
réplication de portefeuille, etc.

Références bibliographiques

Hadrien GOUZE (2018), « Manuel de microéconomie », Editions Ellipses, 191 p.

Robert PINDYCK et Daniel RUBINFELD (2009), « Microéconomie », 7ème édition, Pearson.

Etienne WASMER (2010), « Principes de microéconomie », Pearson Education, 2010.

41
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

Exercices sur le chapitre III

Exercice 1

Une économie comprend trois dates t=1 ; t=2 et t=3. Une entreprise émet 100 actions pour se
financer. La politique de versement de dividendes liée à ces actions est la suivante : 𝑑1 = 1000,
𝑑2 = 2000 et 𝑑3 = 1000. Il existe un système complet et parfait de marchés financiers dont
les taux d’intérêt réels sont respectivement définis par rapport à la date d’ouverture : 𝜑1 = 10%
et 𝜑2 = 5%.

a) Calculez la valeur boursière de l’entreprise à la date t=1.


b) Déterminez les prix courants d’une action.

Exercice 2

Un projet d’investissement réalisé à la date t=0 génère un flux de recettes R(t) :

Date t=1 t=2 t =3 t =4 t =5 t =6


R(t) 100 100 100 200 200 200

En raison de la stabilité économique, les taux d’intérêt courts sont invariants et égaux à 2%.
Supposons que le coût d’investissement réalisé à la date t=0 est égal à 500.

a) Calculez la valeur actualisée des revenus de ce projet d’investissement.


b) Calculez la valeur actualisée nette de ce projet d’investissement.
42
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

Supposons qu’une entreprise génère les mêmes recettes, avec des dépenses d’exploitation 𝑑𝑒(𝑡)
et d’investissement 𝐼(𝑡) définies comme suit :

Date t=1 t=2 t =3 t =4 t =5 t =6


R(t) 100 100 100 200 200 200
de(t) 80 80 80 100 100 100
I(t) 50 50 50 10 10 10

c) Calculez la valeur actualisée boursière de cette entreprise.


d) En supposant que l’entreprise émette 100 actions à la date t=1, définissez le prix
d’émission d’une action

Exercice 3

Une économie comprend deux dates t=0 et t=1 et deux états du monde futurs s=0 et s=1. L’agent
peut arbitrer entre trois actifs financiers A, B et C dont les revenus aléatoires futurs sont définis
comme suit :

t=0 t =1
s=1 s=2
Actif A 𝑤𝑡𝐴 (𝑠) -2 2 4
Actif B 𝑤𝑡𝐵 (𝑠) -2 2 1
Actif C 𝑤𝑡𝐶 (𝑠) 6 6

𝑗
𝑤𝑡 (𝑠) représente le revenu contingent de l’état s à la date t de l’actif financier j. la valeur
négative à la date t=0 caractérise le prix d’achat de l’actif versé et les valeurs positives à la date
t=1 caractérisent les revenus contingents reçus de l’actif acquis.

En l’absence d’opportunité d’arbitrage, calculez le prix de l’actif C.

Correction des exercices

Exercice 1

a) La valeur boursière d’une entreprise est égale à la somme des dividendes actualisés pour
la date de calcul considéré

43
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

𝑑𝑖𝐹𝑃
𝑉𝑏 = ∑
𝑖 ∏𝑡(1 + 𝜑𝑡 )

2000 1000
𝑉𝑏1 = 1000 + + = 3683,98
1 + 0,1 (1 + 0,1)(1 + 0,05)

1000
𝑉𝑏2 = 2000 + = 2952,38
1 + 0,05

𝑉𝑏3 = 1000

b) Pour une entreprise cotée en bourse alors la valeur boursière d’une firme est égale à la
valeur au prix de marché courant, noté 𝑝, de l’ensemble de ses 100 actions : 𝑉𝑏 = 100𝑝.
Le prix courant d’une action est donc égal à = 𝑉𝑏 /100 .

𝑉𝑏1
𝑝1 = = 368,398
100

𝑉𝑏2
𝑝2 = = 295,238
100
𝑉𝑏3
𝑝3 = = 10
100
Le prix courant d’une action diminue au cours du temps car, dans une économie à horizon fini,
le versement de dividendes à chaque date réduit la valeur boursière de l’entreprise.

Exercice 2

a) La valeur actualisée des revenus d’un projet d’investissement réalisé en t = 0 et noté


𝑉𝐴(𝐼) est égal à la somme des revenus actualisés dont les revenus sont notés w(t) et
pour un facteur d’actualisation défini par le taux d’intérêt court noté r
6
𝑤(𝑡)
𝑉𝐴(𝐼) = ∑
(1 + 𝑟)𝑡
𝑡=1

100 100 100 200 200


𝑉𝐴(𝐼) = + 2
+ 3
+ 4
+
(1 + 0,02) (1 + 0,02) (1 + 0,02) (1 + 0,02) (1 + 0,02)5
200
+
(1 + 0,02)6

𝑉𝐴(𝐼) ≈ 831,8978

44
Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

b) La valeur actualisée nette d’un projet d’investissement réalisé en t = 0 et notée VAN(I)


est égale à la différence entre la valeur actualisée des revenus d’un projet
d’investissement noté VA(I) et le coût d’investissement noté k
𝑉𝐴𝑁(𝐼) = 𝑉𝐴(𝐼) − 𝑘

𝑉𝐴𝑁(𝐼) ≈ 831,8978 − 500 ≈ 331,8978

c) La valeur actualisée boursière d’une entreprise à la date t = 1 est égale à la valeur


actualisée nette d’une entreprise définie par la somme actualisée de son résultat net à
chaque période
6
𝑅(𝑡) − 𝑑𝑒(𝑡) − 𝐼(𝑡)
𝑉𝐴𝐵(𝑡 = 1) = ∑
(1 + 𝑟)𝑡−1
𝑡=1
car les taux d’intérêts courts sont invariants.

Après calculs, nous obtenons 𝑉𝐴𝐵(𝑡 = 1) ≈ 161,2240

d) La valeur actualisée boursière permet de définir le prix des actions d’une entreprise. Si
l’entreprise émet N actions alors le prix d’une action à la date d’émission noté 𝑝𝐸 est
égal à
𝑉𝐴𝐵(𝑡 = 1)
𝑝𝐸 =
𝑁

Pour une émission de 100 actions, le prix d’émission est défini par :

161,2240
𝑝𝐸 = = 1,61224
100

Exercice 3

Une économie comprend deux dates t=0 et t=1 et deux états du monde futurs s=0 et s=1. L’agent
peut arbitrer entre trois actifs financiers A, B et C dont les revenus aléatoires futurs sont définis
comme suit :

t=0 t =1
s=1 s=2
Actif A 𝑤𝑡𝐴 (𝑠) -2 2 4
Actif B 𝑤𝑡𝐵 (𝑠) -2 2 1
Actif C 𝑤𝑡𝐶 (𝑠) -4 6 6

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Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

Si deux actifs financiers génèrent le même profil de revenu alors ils présentent le même prix.
Autrement dit, la valeur de tout actif financier j notée 𝑞 𝑗 est égale à la valeur de son portefeuille
de synthèse notée 𝑞 𝑃𝑗 s’il n’existe pas d’opportunité d’arbitrage. Déterminons le portefeuille
de synthèse de l’actif C composé des actifs A et B. Ce portefeuille de synthèse est composé de
x actif financier A et de y actif financier B. Les revenus contingents à l’état s de ce portefeuille
notés 𝑊 𝑃𝐶 s’élèvent à

𝑊 𝑃𝐶 (𝑠) = 𝑥𝑊 𝐴 (𝑠) + 𝑦𝑊 𝐵 (𝑠)

Soit

𝑊 𝑃𝐶 (1) = 2𝑥 + 2𝑦
{
𝑊 𝑃𝐶 (2) = 4𝑥 + 𝑦

Un portefeuille de synthèse délivre les mêmes revenus que l’actif dupliqué

𝑊 𝐶 (𝑠) = 𝑊 𝑃𝐶 (𝑠)

Nous obtenons ainsi la composition de ce portefeuille de synthèse :

6 = 2𝑥 + 2𝑦
{
6 = 4𝑥 + 𝑦

Ce système à deux équations et deux inconnues admet une solution évidente

𝑥=1
{
𝑦=2

Il n’existe pas d’opportunité d’arbitrage si le prix du portefeuille de synthèse de l’actif financier


C noté 𝑞 𝑃𝐶 est égal au prix dudit actif financier noté 𝑞 𝐶

𝑞 𝑃𝐶 = 𝑞 𝐶

Ainsi :

𝑞 𝐴 + 2𝑞 𝐵 = 𝑞 𝐶

Nous obtenons donc 2 + 2 × 2 = 6 ≠ 4 . Il existe donc des opportunités d’arbitrage qui


consistent à acheter un actif financier C et à vendre à découvert un actif A et deux actifs B pour
obtenir un gain de 2 à la date t = 0.

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Cours de Microéconomie Appliquée à la Finance – Master 1

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