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CHAPITRE I : LE REGIME JURIDIQUE DU DOMAINE PUBLIC DE


L’ETAT

Section I : Siège de la matière

§ 1. Distinction entre domaine public et domaine privé

A. Intérêt et raison d’être de la distinction

Le domaine privé est soumis au régime juridique de droit privé; il est objet de
propriété privée et son contentieux relève des tribunaux de droit commun. Le
domaine public quant à lui est soumis à un régime juridique spécial de droit
public; ce régime est celui de la domanialité, caractérisé par les règles de
l’indisponibilité.

B. Critères de distinction

1° Critère tiré de la nature des biens: domaine public par destination

Selon ce critère, le domaine public est constitué de portions de territoire


destinées à l’usage de tous et non susceptibles de propriété privée. Ce sont
essentiellement les voies publiques, les lacs et cours d’eau, les quais, etc. Le
bien du domaine public est celui que les usagers peuvent utiliser directement
sans intermédiaire et qui est disponible pour l’ensemble des usagers sans
discrimination.

2° Critère tiré de l’affectation des biens Selon le second critère, les biens du
domaine public sont tous les biens qui sont affectés à l’usage du public ou
encore au fonctionnement d’un service public. La jurisprudence française a
adopté la position d’après laquelle, sauf dispositions contraires de la loi, les
biens de l’Etat, des collectivités administratives et des établissements publics ne
sont compris dans le domaine public qu’à la condition :

- soit d’être mis ou placé à la disposition directe du public usager;


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- soit d’être affectés à un service public, pourvu qu’en ce cas, ils soient, par
nature ou par des aménagements particuliers, adaptés exclusivement ou
essentiellement aux besoins particuliers de ce service.

Le domaine public comprend alors

- le domaine maritime : rivages, étangs, ports, phares, balises, etc.

- le domaine aérien : l’air situé au-dessus du territoire

- le domaine fluvial : cours d’eau et lacs navigables ou flottables déclarés


domaniaux

- le domaine terrestre : le sol et le sous sol

- le domaine public artificiel : les voies publiques, les voies ferrées, les voies
aériennes, les complexes hospitaliers, les domaines militaires, les ports et
édifices, les plages, les biens meubles et immeubles affectés au fonctionnement
des services publics.

Le domaine privé est constitué de biens appartenant aux collectivités publiques


et qui ne sont affectés ni à l’usage du public, ni à un service public mais
exploités financièrement pour, procurer des revenus à l’Administration
propriétaire. Par exemple, les maisons de l’Etat mises en location et les biens
rentrant dans le fonds de commerce des sociétés d’Etat sont des biens du
domaine privé de l’Etat. Les biens des sociétés d’économie mixte ne font pas
partie du domaine public mais du domaine privé des sociétés privées.

§2. Condition juridique de la domanialité publique

La condition juridique de la domanialité publique est marquée par la règle de


l’indisponibilité. Le domaine public est indisponible car il est inaliénable,
imprescriptible et insaisissable.

A. L’inaliénabilité
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L’inaliénabilité des biens du domaine public est justifiée par l’affectation de ces
biens à l’usage du public ou à un service public. Le principe de l’inaliénabilité
interdit toute cession à titre onéreux ou gratuit d’un bien appartenant au domaine
public.

Ce principe entraîne l’impossibilité d’exproprier le domaine public ou d’y


constituer des droits réels. La vente d’un bien du domaine public est nulle.

L’action en nullité sera portée devant le juge judiciaire par tout administré
justifiant d’un intérêt à protéger

B. L’imprescriptibilité

La règle de l’imprescriptibilité interdit d’acquérir par prescription, c’est-à-dire


par l’écoulement d’un certain laps de temps, un droit sur le domaine public,
qu’il s’agisse d’un droit de propriété ou d’une servitude.

Ainsi, l’inattaquabilité du certificat d’enregistrement après deux ans ne peut


s’appliquer aux biens du domaine public. La règle de l’imprescriptibilité
s’applique de la même façon que celle de l’inaliénabilité ; elle ne peut être
invoquée que par l’Administration. De même, aucune action possessoire n’est
possible contre l’Administration et aucune prescription ne peut concerner les
dommages causés au domaine public.

C. L’insaisissabilité

En vertu du principe de l’insaisissabilité, les biens du domaine public ne peuvent


faire l’objet d’aucune des voies d’exécution forcée organisée par le droit privé.
Ce principe est justifié par la règle de continuité et de régularité des services
publics.

Section II : LA FORMATION DU DOMAINE PUBLIC


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La formation du domaine public comprend plusieurs modalités par lesquelles


un bien fait son entrée dans le domaine public et connaît différents régimes par
son affectation, sa désaffectation, son incorporation et sa mutation.

§1. L’acquisition

L’acquisition est l’acte juridique ou le fait matériel qui entraîne l’appartenance


d’un bien dans le patrimoine de l’Administration sans distinction du domaine
public ou privé. 208 §2. L’incorporation L’incorporation est l’acte qui, après
l’acquisition d’un bien, fait passer celui-ci soit dans le domaine public naturel ou
artificiel. L’incorporation au domaine public naturel se réalise en même temps
que l’acquisition du fait qu’elle découle de phénomènes naturels.

§3. L’affectation

L’affectation est l’acte ou le fait par lequel un bien acquis par l’Administration
et incorporé au domaine public reçoit une destination particulière, c’est-à-dire,
reçoit, selon la distinction d’intérêt général, une destination à l’usage du public
ou à un service public. Les biens du domaine public naturel ne nécessitent pas
une, affectation mais plutôt une délimitation.

§4. La désaffectation

La désaffectation ou le déclassement est l’acte ou le fait par lequel un bien sort


du domaine public, c’est-à-dire, il cesse d’être affecté soit à l’usage du public,
soit au service public. La désaffectation relève de l’autorité compétente pour
l’affectation. Par exemple, pour vendre un immeuble qui servait au
fonctionnement d’un service public, il faut d’abord procéder à sa désaffectation
par „un acte administratif. Les véhicules affectés au service public font l’objet
de déclassement avant leur aliénation.

§5. Les mutations domaniales


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La mutation domaniale est une procédure par laquelle l’Etat peut d’autorité
changer l’affectation d’un bien appartenant à une autre personne morale de droit
public lorsque l’intérêt général l’exige. L’Etat.

Section III : LES UTILISATIONS DU DOMAINE PUBLIC PAR DES


PARTICULIERS

Le principe de l’indisponibilité du domaine public n’interdit pas son utilisation


par des particuliers. Ceux-ci peuvent utiliser le domaine public à condition que
ces utilisations restent conformes à l’affectation du bien et qu’elles n’entravent
jamais le droit qu’a l’Administration de déterminer ou de modifier l’affectation
du domaine.

On distingue à cet effet l’utilisation du domaine affecté au service public de


l’utilisation du domaine affecté à l’usage du public.

§1. L’utilisation du domaine affecté à un service public

En règle générale, le domaine affecté à un service public ne peut être utilisé par
des particuliers de manière privative. La seule possibilité qui peut se présenter
est celle, d’utiliser le domaine public par l’intermédiaire du service public lui-
même. Par exemple l’accès des particuliers dans les bâtiments administratifs ou
les chemins de fer se réalise lorsque l’on accède au service public lui-même.

Néanmoins, le concessionnaire du service public ou des travaux publics peut


disposer de la faculté d’utilisation du domaine public dans le cadre de
l’exécution du service public ou des travaux publics. Lorsque la concession ne
constitue pas le titre juridique permettant l’utilisation du domaine, le
concessionnaire doit alors obtenir des permissions de voirie ou conclure des
contrats comportant occupation du domaine.

§2. L’utilisation du domaine affecté à l’usage du public


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On distingue plusieurs formes d’utilisation du domaine affecté à l’usage du


public.

A. Les utilisations collectives du domaine public

Les utilisations collectives ou communes sont celles qui sont réalisées par le
public en tant que tel, c’est-à-dire, de façon anonyme, sans l’intervention d’un
titre juridique particulier. Il s’agit par exemple de la circulation ou du
stationnement sur les voies publiques. L’utilisation collective du domaine
affecté à l’usage du public est un phénomène normal qui jouit de la protection de
l’Administration dont le rôle est d’assurer la liberté de cette utilisation par tous.

C’est pourquoi, traditionnellement, l’Administration faisait respecter les


principes de la liberté, de l’égalité et de la gratuité qui régissaient l’utilisation du
domaine affecté à l’usage du public.

B. Les utilisations privatives du domaine public

Les utilisations privatives du domaine public sont « celles qui sont effectuées
par des personnes individuellement déterminées par un titre conféré par
l’Administration, ce titre leur donnant le droit d’occuper d’une manière privative
une portion du domaine public ». Ex. l’exploitation d’une plage à titre privé.

De par leur caractère privatif, ces utilisations excluent l’application du principe


de liberté, d’égalité et de gratuité. Ces utilisations donnent droit au paiement
d’une taxe ou redevance. Elles sont caractérisées par la précarité de leur
situation. Les utilisations privatives procèdent par la permission de voierie, le
permis de stationnement, l’alignement individuel, la concession domaniale. La
permission de voierie est un acte qui autorise l’utilisation d’un bien du domaine
public par un particulier avec une construction en matériaux durables, une
pénétration dans le sous-sol.
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Par exemple, les stations d’essence, les lieux de restauration, les parcs de jeux.
Le permis de stationnement est un acte qui autorise l’occupation de l’espace
public sans emprise sur le sol, sans construction durable.

Tel est le cas de terrasses de boisson, d’étalage des marchandises sur le trottoir,
d’emplacement pour taxis, de kiosques à journaux etc. L’alignement individuel
est un acte administratif individuel qui a pour effet de limiter la propriété d’un
particulier par rapport à la voie publique pour des raisons de travaux et de
sécurité des usagers.

Le plan d’alignement ou d’urbanisme est différent de l’alignement individuel car


il consiste à la détermination par l’autorité administrative de la limite du
domaine public routier au droit de propriétés riveraines. C’est le cas
d’élargissement d’une route qui nécessite l’occupation des espaces privés
moyennant paiement d’un prix à convenir.

La concession domaniale est un contrat comportant occupation d’un domaine


public à titre privatif et de l’exploiter à son profit contre paiement d’une
redevance ou royaltie. Il en est ainsi de la concession d’espaces publics tels que
les parcs et les plages, la concession mobilière telle que la jouissance de salles
de fêtes ou de cinéma etc.

On distingue la concession domaniale de la concession de voirie qui diffère de la


permission de voirie ; celle-ci est un acte unilatéral sans aucune garantie car il
peut être révoqué « ad nutum ».

CHAPITRE II : LA PROTECTION DU DOMAINE PUBLIC

Le domaine public étant par nature un bien de la communauté, il importe qu’il


soit assuré d’une protection particulière. C’est pourquoi, plusieurs procédés
concourent à la protection du domaine public. L’Administration elle-même a
l’obligation d’entretenir le domaine public ; la règle de l’inaliénabilité du
domaine public constitue certes un frein contre la mauvaise utilisation du
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domaine public, mais des mesures de protection sont également prévues contre
les occupants sans titre du domaine public.

SECTION 1ère. L’obligation d’entretien du domaine public

L’Administration est obligée d’entretenir le domaine public dans l’état de son


affectation. Le mauvais entretien du domaine public peut entraîner la
responsabilité de l’Administration du fait des dommages causés aux tiers par des
ouvrages publics mal entretenus. Par exemple, un accident de circulation dû au
mauvais état de la route peut donner lieu à la responsabilité de l’Administration.

SECTION II. La protection pénale du domaine public

La protection pénale permet à l’Administration de sanctionner les particuliers


qui seraient coupables d’empiètements ou de dégradations du domaine public.
La protection pénale du domaine public comprend la police de la conservation
du domaine public et les contraventions de voirie.

A. La police de conservation du domaine public

La police de la conservation du domaine public est définie comme étant « le


pouvoir reconnu à certaines autorités administratives de prendre des règlements
de police en vue d’assurer la conservation de certaines dépendances du domaine
public» La police de la conservation du domaine public est assortie, comme
toute police de l’ordre public, des sanctions pénales; elfe constitue une police
spéciale qui ne s’applique qu’au seul domaine public; elfe vise la protection du
domaine public et non pas l’ordre public en général.

B. Les contraventions de voirie

Les contraventions de voirie sont des atteintes qui sont portées au domaine
public en violation des mesures prises par la police de la conservation du
domaine public. Lorsqu’il s’agit de la petite voirie (atteintes à l’intégrité des
voies publiques), les contraventions de voirie sont sanctionnées par les mêmes
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règles que celles de la police de circulation routière. Lorsqu’il s’agit de la grande


voirie, telle que le domaine maritime, le domaine fluvial et certaines
dépendances du domaine terrestre (chemin de fer) les contraventions sont
sanctionnées par des amendes en fonction des critères fixés par des textes
particuliers qui organisent les différentes polices de conservation de la grande
voirie.

Le contrevenant peut également être condamné aux frais de réparation du


préjudice causé au domaine public. De même, le juge peut ordonner l’expulsion
ou la démolition des ouvrages irrégulièrement établis.

C. La protection du domaine public contre les occupants sans titre

Les occupants sans titre du domaine public sont des personnes qui occupent le
domaine public sans l’autorisation de l’Administration ou après l’expiration de
leur titre d’occupation. L’occupation sans titre constitue une situation illicite à
laquelle il doit être mis fin sans que l’intéressé puisse prétendre à une indemnité.

L’Administration dispose de plusieurs moyens pour agir contre les occupants


sans titre :

- l’occupation sans titre étant une contravention de voirie, il peut être ordonné
des poursuites pénales et l’expulsion du contrevenant sur décision du juge (en
France cette compétence relève du juge du référé administratif) ;

- à défaut d’autres procédés juridiques et en cas d’urgence, l’Administration peut


recourir à la voie d’exécution forcée, lorsque l’ordre public est menacé ; -
Lorsque l’occupant dispose d’un titre irrégulier, l’Administration peut recourir
au juge civil pour obtenir l’annulation du titre et demander le déguerpissement
de l’occupant irrégulier.

Section III : L’ACQUISITION FORCEE DES BIENS DU DOMAINE PRIVE


DES PARTICULIERS PAR L’ADMINISTRATION
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§1. La réquisition

La réquisition est une mesure d’exécution forcée qui permet aux pouvoirs
publics de disposer de biens matériels ou de la jouissance de biens immeubles
appartenant à des particuliers. La réquisition peut également contraindre les
particuliers à prester. Leur service au profit de l’Administration sans requérir
leur consentement, en cas de grève ou de crise. La réquisition est une mesure
provisoire qui n’entraîne pas la dépossession du bien d’un particulier mais qui
permet son usage temporaire par l‘Administration pour des raisons d’intérêt
général ou d’ordre public.

A. Conditions d’emploi

La réquisition est soumise à certaines conditions qui s’appliquent selon qu’il


s’agit des réquisitions militaires ou civiles.

1. Réquisitions militaires

Les réquisitions militaires sont autorisées au profit des autorités militaires en cas
de mobilisation de l’Armée ou de rassemblement des troupes ou encore lorsque
les circonstances spéciales l’exigent; dans ce dernier cas, l’exigence est tirée
d’un texte réglementaire. En cas de mobilisation, la réquisition militaire peut
porter sur des objets très divers tels que les objets mobiliers, les droits d’usage,
les services personnels et les établissements industriels. Dans d’autres cas, la
réquisition ne peut porter que sur des objets tels que le logement, le
cantonnement, la nourriture journalière, les moyens de transport ou de
logistique.

2. Réquisitions civiles

Le droit de réquisition civile est admis dans des cas très divers et à tout moment.
Quant à son objet, la réquisition civile peut porter pratiquement sur toutes
espèces des choses, à l’exception de la
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propriété immobilière. Elle peut ainsi concerner: les objets mobiliers, l’usage
des immeubles, les entreprises industrielles, les services personnels.

Il existe également le régime dit de «logement d’office» qui permet à une


autorité locale de réquisitionner les logements inoccupés ou insuffisamment
occupés au profit des personnes dépourvues de logement ou logés dans des
conditions manifestement insuffisantes ou encore victimes de calamités
naturelles.

B. Procédure de la réquisition

Du point de vue des règles de compétence, le droit de réquisition militaire est


exercé par le Ministère de la Défense Nationale, par le biais de son Ministre ou
des autorités militaires régionales ou locales; la réquisition civile relève des
autorités compétentes concernées au niveau central ou provincial ou encore,
s’agissant des logements, des organes des entités décentralisées.

Du point de vue de la forme, la réquisition est une décision administrative qui


s’effectue de façon expresse, sous le respect du principe de la légalité et en
tenant compte de l’égalité de répartition des charges entre les habitants de la
localité.

C. L’indemnisation

La réquisition donne droit au payement de l’indemnité au profit de la personne


dépossédée. L’évaluation et le paiement de l’indemnité de réquisition sont
postérieurs à l’opération de réquisition.

L’indemnité est appréciée par l’Administration sur avis de la commission


d’évaluation, sous réserve de recours devant le juge par le particulier qui estime
que le montant proposé par l’Administration ne correspond pas au préjudice
subi. Cette indemnisation procède de la responsabilité administrative sans faute
mais pour risque.
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La décision de réquisition est susceptible de recours pour excès de pouvoir.

§2. L’expropriation pour cause d’utilité publique

A. Les conditions d’emploi de l’expropriation

1°. Les biens susceptibles d’expropriation

L’expropriation pour cause d’utilité publique est une opération administrative


par laquelle l’Etat impose la cession de la propriété d’un immeuble privé dans
un but d’utilité publique, moyennant une indemnité juste et préalable.

L’article 34 de la Constitution affirme que « la propriété privée est sacrée ».


Toute saisie d’un bien doit trouver son fondement dans une décision
juridictionnelle et toute appropriation d’un bien privé pour cause d’utilité
publique ne peut intervenir qu’en vertu de la loi et moyennant une juste et
préalable indemnité.

L’expropriation est une mesure d’acquisition forcée d’un bien privé, de nature
immobilière; la cession forcée est justifiée par un motif d’utilité publique et
intervient moyennant une indemnité. La différence entre la réquisition et
l’expropriation réside sur le fait que l’expropriation n’est jamais mobilière, elle
porte nécessairement sur un immeuble ou un droit immobilier.

En droit congolais, la matière est régie par la loi n° 77-001 du 22-02-1977.


Celle-ci définit les biens immobiliers comme étant :

- la propriété immobilière ;

- les droits réels immobiliers

- les droits de créance sur un immeuble

- les droits de jouissance sur les terres (étant entendu que le sol et le sous- sol ne
peuvent faire l’objet d’expropriation du fait qu’ils font partie du domaine
public).
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2°. La notion d’utilité publique L’utilité publique est une notion dont
l’appréciation est laissée au juge de l’excès de pouvoir car elle est déclarée par
voie de décision administrative du Ministre ou du Président de la République,
selon le cas.

Le Conseil d’Etat français considère que « une opération ne peut être légalement
déclarée d’utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût
financier et éventuellement les inconvénients d’ordre social qu’elle comporte ne
sont pas excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente ». On parle ici de théorie
du bilan de l’expropriation.

L’utilité publique s’apprécie par rapport à trois questions :

- l’expropriation projetée est-elle, de façon concrète, justifiée par un intérêt


public?

- L’expropriation est-elle nécessaire par rapport au besoin exprimé?

- L’expropriation est-elle efficace par rapport aux coûts excessifs, par rapport
aux conséquences néfastes d’ordre social.

Par exemple, l’expropriation de toutes les maisons situées sur la route de


(Aéroport pour construire l’autoroute peut avoir des conséquences sociales et
financières plus néfastes que la construction même de l’autoroute.

3°. Les titulaires du pouvoir d’expropriation

On distingue à ce sujet l’expropriation par zone de l’expropriation par périmètre.

Lorsque le bien à exproprier concerne une propriété immobilière ou un groupe


d’immeubles bien délimités et identifiés on parle d’expropriation par périmètre
dans ce cas, la compétence revient au Ministre des Affaires Foncières.

Lorsque l’expropriation porte sur un ensemble de biens compris sur une


superficie donnée (par exemple, un quartier ou une avenue) sans devoir
identifier les immeubles concernés mais en englobant tout ce qui se trouve dans
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la superficie, on parle alors de l’expropriation par zone et, dans ce cas, la


compétence revient au Président de la République.

B. La procédure d’expropriation

1°. La phase administrative

a. L’enquête préalable

Cette enquête vise à recueillir l’avis des collectivités, organismes et particuliers


intéressés sur l’utilité justifiant l’opération d’expropriation.

L’enquête est confiée à un enquêteur ou à une commission d’enquête et le


rapport d’enquête est adressé à l’autorité compétente.

b. La déclaration d’utilité publique

Cette déclaration constate que l’expropriation est justifiée par une utilité
publique réelle. Elle est faite par voie d’arrêté du Ministre ou d’ordonnance du
Président de la République; elle constitue donc un acte administratif susceptible
de recours pour excès de pouvoir. La décision de déclaration d’utilité publique
détermine en même temps la zone ou les biens concernés par la procédure
d’expropriation. Elle est publiée au journal officiel car il s’agit d’un acte
particulier.

L’arrêté de déclaration d’utilité publique peut être suivi d’un autre arrêté de
cessibilité qui permet d’identifier les différentes propriétés concernées par
l’expropriation. Mais, dans la pratique, l’acte de cessibilité est compris dans
l’acte déclaratif d’utilité publique qui reprend la liste des parcelles à exproprier.

Contrairement au droit français où la décision d’expropriation est prononcée par


le juge de l’expropriation qui prend une ordonnance d’expropriation, en droit
congolais, la décision d’expropriation est une décision administrative qui
englobe la déclaration d’utilité publique et la cessibilité des biens.

2°. La phase d’indemnisation préalable


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Cette phase comprend deux opérations préalables :

L’expertise du bien ou des biens et l’indemnisation. Cette procédure relève du


Ministre des affaires foncières de la manière ci-après

- le Ministre des Affaires Foncières désigne deux géomètres experts immobiliers


qui déterminent la valeur du ou des biens sur base d’un procès-verbal.

- le Ministre propose le montant de l’indemnisation à la ou aux victimes de


l’expropriation.

En cas d’accord, le paiement est effectué par l’Etat et le transfert de propriété est
réalisé par le conservateur des titres immobiliers.

Lorsque l’exproprié n’est pas d’accord avec le montant qui lui est proposé,
l’Administration saisit le Tribunal de Grande Instance du ressort de l’immeuble.
Le Tribunal procède à la désignation de trois experts pour réévaluer le ou les
biens. Sur base de cette nouvelle expertise, le Tribunal fixe le montant de
l’expropriation devant être payé par l’Etat avant la mutation immobilière.

N.B. : Le principe en matière d’expropriation est que l’indemnité doit être juste
et équitable et elle doit intervenir avant la mutation du bien en faveur de l’Etat.

C. Le contentieux de l’expropriation

Le contentieux de l’expropriation se situe à deux niveaux : au niveau du juge de


l’excès de pouvoir lorsqu’il s’agit d’attaquer la décision administrative de
déclaration de l’utilité publique. Le recours juridictionnel est précédé par le
recours administratif ; celui-ci est introduit dans un délai d’un mois au lieu de
trois mois au niveau du juge de droit commun lorsqu’il s’agit de déterminer le
montant de l’indemnisation en cas de désaccord sur la proposition de
l’Administration.

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