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Questions de sociologie

Pierre Bourdieu

L’art de résister aux paroles


Le capital culturel procure un profit direct et des profits de distinction résultant de sa rareté. La distinction appelle
distinguées les conduites qui se distinguent du commun sans intention de distinction. Il y a un profit de distinction
qui se double du profit de désintéressement.
Illusion du « communisme culturel » : l’œuvre d’art requiert des instruments qui ne sont pas universellement
distribués. Donc ceux qui les ont s’assurent des profits de distinction.
La contre-culture, la marginalité est située dans le monde social, comme tout le monde. Cependant, les mouvements
de contestation de l’ordre symbolique mettent en question ce qui paraît aller de soi. La contre-culture doit posséder
des armes nécessaires pour se défendre contre la domination culturelle. C’est une culture capable de mettre à
distance la culture, de l’analyser et non de l’imposer une forme inversée.
Il n’y a pas dans la réalité quelque chose qui ressemble à ce qu’on appelle la culture populaire. Les classes dominées
ont un rôle passif dans les stratégies de distinction, ne sont qu’un repoussoir.
Les effets de rapports différents au système scolaire se traduisent souvent sous forme de conflits de générations.
Comment s’opposer à l’imposition des valeurs dominantes ? Tout langage qui est le produit du compromis avec la
censure intérieure et extérieure exerce un effet d’imposition qui décourage la pensée. Il faut parler au lieu d’être
parlé par des mots d’emprunts chargés de sens social.

Une science qui dérange


La sociologie est une discipline très divisée. C’est une discipline scientifique, sans cesse affrontée à la question de sa
scientificité. La sociologie dérange car elle dévoile des choses cachées et parfois refoulées. La scientificité est un
enjeu, car on peut se débarrasser des vérités gênantes en disant qu’elles ne sont pas scientifiques.
L’erreur en sociologie réside dans un rapport incontrôlé à l’objet, dans l’ignorance de tout ce que la vision de l’objet
doit au point de vue, c’est-à-dire à la position occupée dans l’espace social et dans le champ scientifique. Deux
facteurs contribuant à la production de la vérité : l’intérêt que l’on a à savoir et à faire savoir la vérité et la capacité
que l’on a de la produire. Toute proposition qui contredit les idées reçues est exposée aux soupçons de parti-pris
idéologique ou politique. Elle heurte des intérêts sociaux donc on lui demande beaucoup plus de preuves.
Les dominants ont besoin d’une science capable de rationaliser la domination, de renforcer les mécanismes qui
l’assurent et la légitiment. Cette science a des limites car elle ne peut opérer de mise en question radicale. La
sociologie conservatrice est donc partielle. La fonction de la sociologie n’est pas de servir à quelqu’un, de servir le
pouvoir. Sa fonction scientifique et de comprendre le monde social à commencer par le pouvoir. Cette opération
n’est pas neutre socialement et elle remplit une fonction sociale.
La société existe sous deux formes inséparables : les institutions, l’habitus. Le corps socialisé ne s’oppose pas à la
société mais est une de ses formes d’existence.
La sociologie prend le biologique et le psychologique comme un donné et cherchent à établir comment le monde
social l’utilise, le transforme.
S’oppose à l’approche objectiviste qui substitue le modèle à la réalité. Le sociologue doit objectiver les effets
inévitables des techniques d’objectivation qu’il est obligé d’employer.
Il y a une vérité objective du subjectif. Les sujets sociaux ont un vécu qui n’est pas la vérité complète de ce qu’ils font
et qui fait pourtant partie de la vérité de leurs pratiques. La sociologie rappelle que ce n’est pas la parole qui agit ni la
personne qui les prononce mais l’institution, elle montre les conditions objectives qui doivent être réunies pour que
s’exercent efficacement de telles pratiques sociales (le prêtre qui dit que je te baptiste par exemple). Pour que ça
fonctionner, il faut que l’acteur croie qu’il est au principe de l’efficacité de son action
L’investissement, c’est l’inclination à agir qui s’engendre dans la relation entre un espace de jeu proposant certains
enjeux (le champ) et un système de dispositions ajustées à ce jeu (l’habitus). L’institution est capable de produire
l’investissement. L’investissement est l’effet historique de l’accord entre deux réalisations du social : dans les choses,
par l’institution, et dans les corps, par l’incorporation.

Le sociologue en question
Laisser parler le langage ordinaire, c’est accepter la philosophie sociale inscrite dans le discours spontané. Les
sciences sociales doivent conquérir tout ce qu’elles disent contre les idées reçues que véhicule le langage ordinaire et
dire ce qu’elles ont conquis dans un langage qui est prédisposé à dire tout à fait autre chose. La recherche de la
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rigueur conduit à sacrifier la belle formule qui simplifie, et lui préférer une expression plus lourde mais plus exacte et
plus contrôlée. Le sociologue doit parfois recourir à des mots forgés pour éviter le détournement.
D’ordinaire, on ne parle presque jamais du monde social pour dire ce qu’il en est, presque toujours pour dire ce qu’il
devrait être. Le discours sur le monde social est presque toujours performatif. Le discours du sociologue est donc
souvent reçu comme performatif. Les lecteurs lisent la sociologie avec les lunettes de leur habitus. Il y a le principe
d’un malentendu structural dans la communication entre le sociologue et son lecteur.
Les gens qui ont les moyens techniques de s’approprier la sociologie n’ont pas intérêt à se l’approprier, tandis que
ceux qui ont cet intérêt ne possèdent pas les instruments d’appropriation. Il faudrait divulguer le regard scientifique.
On confond sous le mot déterminisme deux choses différentes : la nécessité objective inscrite dans les choses et la
nécessité vécue, subjective, le sentiment de nécessité ou de liberté. Le degré auquel le monde social nous paraît
déterminé dépend de la connaissance que nous en avons ; le degré auquel le monde est réellement déterminé n’est
pas une question d’opinion. Le sociologue découvre la nécessité, on lui reproche d’être de plus en plus déterministe
quand il progresse. Mais tout progrès dans la connaissance de la nécessité est un progrès dans la liberté possible.
La science ne fait qu’enregistrer sous forme de loi tendancielle la logique qui est caractéristique d’un certain jeu à un
certain moment. Dès que la loi est énoncée, elle peut devenir un objet de lutte : la connaissance de la loi donne une
chance de la contrecarrer. La sociologie défatalise. « La sociologie fournit des moyens de dominer la domination. »
De même, la sociologie révèle que l’idée d’opinion personnelle est une illusion. On peut alors avoir des opinions
personnelles dès lors qu’on sait que ces opinions ne sont pas telles spontanément.
Utilise des statistiques de l’INSEE pour le capital économique et des titres scolaires pour le capital culturel. La science
consiste à faire ce qu’on fait en sachant et en disant que c’est tout ce qu’on peut faire, en dénonçant les limites de la
validité: les indicateurs de l’INSEE ne sont pas des bons indices.
Essaie de construire des définitions rigoureuses qui ne sont pas seulement des concepts descriptifs mais des
instruments de construction. Le concept de capital social produit par exemple le moyen d’analyser la logique selon
laquelle ce capital est accumulé, transmis ou produit. Cela pose des problèmes et des objections. « La recherche,
c’est peut-être l’art de se créer des difficultés fécondes et d’en créer aux autres. »

Comment libérer les intellectuels libres ?


Le sujet de la science fait partie de l’objet de la science. On ne peut comprendre la pratique qu’à condition de
maîtriser les effets du rapport à la pratique inscrits dans les conditions sociales de toute analyse théorique de la
pratique.
Une sociologie des intellectuels offre aux intellectuels la possibilité d’une liberté par rapport au déterminisme qui
s’impose à eux. L’intellectuel peut remplir sa fonction libératrice à condition qu’il domine ce qui le détermine.
L’habitus est une sorte de programme (au sens informatique) historiquement monté, au principe de l’efficacité des
stimuli qui le déclenchent puisque ces stimulations conventionnelles et conditionnelles ne peuvent s’exercer que sur
des organismes disposés à les percevoir.

Pour une sociologie des sociologues


L’inconscient d’une discipline, c’est son histoire, ce sont les conditions sociales de production oubliées.
Il est question, dans l’objet choisi, dans la manière de construire cet objet, non du sociologue ou de l’historien en tant
que sujet singulier, mais de la relation objective entre les caractéristiques sociales pertinentes du sociologue et les
caractéristiques sociales de cet objet. Il y a une hiérarchie des objets de recherche et une hiérarchie des sujets de la
recherche (les chercheurs) qui contribuent à la distribution des objets entre le sujet. « Il n’y a donc rien de neutre
socialement que le rapport entre le sujet et l’objet ». Il faut donc objectiver le rapport à l’objet.

Le paradoxe du sociologue
Théorie de la connaissance et théorie politique sont inséparables : toute théorie politique enferme une théorie de la
perception du monde social. On oppose traditionnellement une théorie empiriste et une théorie constructiviste (dit
qu’il n’y a d’objet perçu que par un acte de construction). D’où les deux positions : les classes sociales existent dans la
réalité et la science les enregistre, les classes sociales sont des constructions opérées par les agents sociaux.
Connaissons-nous le monde social par construction ou par constat ?
Distinction politique entre objectivisme scientiste/théoréticiste et subjectivisme/spontanéisme. Exemple : la
révolution comme produit dans le déroulement fatal inscrit dans la logique de l’histoire ou comme produit d’une
action historique (loi immanente du monde social qui provoque la catastrophe finale ou primat du sujet et de l’action
historique). Objectivisme : conçoit le monde social comme un univers de régularités objectives indépendantes des
agents et construite à partir d’un point de vue d’observation impartial qui est hors de l’action. Subjectivisme : le
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monde social est le produit des actions individuelles. La vision objectiviste est une vision de savant, la vision
spontanéiste est une vision de militant.
Les attributions que font les gens sont opérées par un sens social qui est une quasi sociologie, une intuition pratique
de la correspondance entre les positions sociales et les goûts. Les agents ont des systèmes de classement dans la
tête. Deux ordres d’objectivité : les classes objectives construites sur la base des salaires, diplômes… ; les classes
objectives en tant qu’elles existent dans la tête des agents soumis au classement. On passe son temps à objectiver les
autres.
La lutte entre l’objectivisme et le subjectivisme est permanente : chacun cherche à imposer sa représentation
subjective de soi-même comme représentation objective. Le dominant est celui qui a les moyens d’imposer aux
dominés qui le perçoivent comment il demande à être perçu.

Ce que parler veut dire


« Le sociologues donnent des armes plutôt que des leçons ».
Le discours dépend de ses conditions de réception. Nous apprenons un langage ainsi que les conditions
d’acceptabilité de ce langage, c’est-à-dire que nous apprenons que ce langage sera payant dans telle ou telle
situation. La situation linguistique fonctionne comme un marché dans lequel quelque chose s’échange : ces choses
sont des mots, le rapport de communication est aussi un rapport économique ou se joue la valeur de celui qui parle.
La situation linguistique scolaire exerce une censure sur tous ceux qui anticipent en connaissance de cause les
chances de profit et de perte qu’ils ont étant donné la compétence linguistique dont ils disposent. Qui définit
l’acceptabilité ? Le professeur est un juge en matière linguistique.
L’essentiel de ce qui se passe dans la communication n’est pas dans la communication. Exemple : discours professoral
fonctionne s’il y a un rapport d’autorité. Il faut des émetteurs légitimes, des récepteurs légitimes, une situation
légitime (signes institutionnels, langage d’importance), un langage légitime (un langage qui dit et qui le dit bien).
Le professeur ne peut pas produire un espace autonome arraché aux lois du marché : un professeur qui refuse de
corriger le langage a le droit de le faire mais compromet les chances de ses élèves.
Le marché linguistique comprend tout type de relations de communication. Quand deux locuteurs se parlent, il y a
une relation objective entre leurs compétences non seulement linguistiques mais aussi sociales (âge, sexe, classe…).
Cette relation donne sa structure au marché et définit une loi de formation des prix.

Quelques propriétés des champs


Les champs des espaces structurés de positions dont les propriétés dépendent de leur position dans ces espaces et
qui peuvent être analysées indépendamment des caractéristiques de leurs occupants (en partie déterminées par
elles). Il y a des lois générales des champs. Un champ se définit en définissant des enjeux et des intérêts spécifiques
et qui ne sont pas perçus de quelqu’un qui n’a pas été instruit pour entrer dans ce champ. Il faut qu’il y ait des gens
prêts à jouer le jeu, doté de l’habitus impliquant la connaissance et la reconnaissance des lois immanente du jeu.
La structure de champ est un état du rapport de force entre les agents et les institutions engagées dans la lutte ou
dans la distribution du capital spécifique qui oriente les stratégies ultérieures. Les luttes ont pour enjeu le monopole
de la violence légitime caractéristique de champs considérés, c’est-à-dire la conservation (pour ceux qui
monopolisent le capital spécifique) ou la subversion (hérésie) de la structure de la distribution du capital spécifique.
Les dominant ont des stratégies de conservation. Les dominés ont des stratégies visant à renverser les principes du
jeu au nom de l’esprit du jeu. La lutte permanente à l’intérieur du champ est intégratrice : c’est un changement qui
tend à assurer la permanence. Le principe du changement est la lutte pour le monopole de la distinction.
Tous les agents d’ un champ ont en commun des intérêts fondamentaux : tout ce qui est lié à l’existence du champ.
Les indices de la constitution d’un champ : l’apparition d’un corps des conservateurs des vies et des œuvres, la trace
de l’histoire du champ dans l’œuvre.
Exemple : « Etre philosophe, c’est maîtriser ce qu’il faut maîtriser de l’histoire de la philosophie pour savoir se
conduire en philosophie dans le champ de la philosophie. »

Le marché linguistique
Habitus linguistique + marché linguistique = expression linguistique.
L’habitus linguistique est le produit des conditions sociales, il est production de discours ajusté à une situation, un
marché ou un champ. Pour les sophistes, il faut savoir bien parler mais aussi savoir parler à propos (kairos : but de la
cible). L’acceptabilité sociologiquement définie suppose la conformité des mots aux règles immanentes de la langue
et aux règles immanentes à une situation ou un marché linguistique.

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Il y a marché linguistique à chaque fois que quelqu’un produit un discours à l’intention de récepteurs capables de
l’évaluer. Le prix reçu par le produit d’une compétence est déterminé sur un marché déterminé et dépend des lois de
formation des prix propre à ce marché.
La notion de compétence peut être remplacée par la notion de capital linguistique. Toute personne qui parle reçoit
un profil linguistique. Le capital linguistique est le pouvoir sur les mécanismes de formation des prix linguistiques, le
pouvoir de faire fonctionner à son profit les lois de formation des prix.
Une compétence n’a de valeur qu’aussi longtemps qu’il existe pour elle un marché.
Il y a des rapports de force linguistiques qui suppose que le marché linguistique est relativement unifié. Exemple : le
maire béarnais produit un effet de condescendance lorsqu’il s’adresse en béarnais aux béarnais, il produit cet effet
seulement parce qu’il est agrégé. Sur le marché linguistique s’exercent des formes de domination.
A autrefois fait une enquête sur les préférences des gens. Une des variables explicatives est l’effet des
caractéristiques propres de la situation d’enquête. Les membres des classes populaires interrogés sur leur culture
sélectionnent ce qui leur paraît le plus conforme à l’image qu’ils ont de la culture dominante. L’enquête culturelle ou
linguistique enregistre une compétence en situation, une compétence pour un marché particulier. Il faut donc faire
varier la relation entre compétence et marché en faisant varier les situations de marché, afin de voir la vérité du
langage.
Plus une situation est officielle, plus celui qui accède à la parole doit être autorisé. A l’inverse, le franc-parler met
entre parenthèses les lois du marché.
Précisions de vocabulaire :
Il y a un effet de censure dans chaque champ, chaque champ à ses propres lois linguistiques.
Ethos : ensemble objectivement systématique des dispositions à dimension éthique, de principes pratiques ;
système des schèmes pratiques. Eidos : système des schèmes logiques.
Habitus : ce que l’on a acquis et qui s’est incarné de façon durable dans le corps sous forme de disposition
permanente, produit des conditionnements. Il est générateur : produit des conditionnements qui tend à reproduire
la logique objectives des conditionnements mais en lui faisant subir une transformation. Les ajustements imposés par
la nécessité de l’adaptation peuvent transformer l’habitus, mais ces transformations sont limitées parce que l’habitus
définit la perception de la situation. La situation est la condition permissive de l’accomplissement de l’habitus.
La différence entre champ et appareil ? L’appareil introduit le fonctionnalisme du pire : c’est une machine
programmée pour réaliser certaine fin. Dans un champ, les dominant doivent compter avec la résistance des
dominés. Il devient un appareil lorsque les dominants annulent la résistance et la réaction des dominés.

La censure
Toute expression est un ajustement entre un intérêt expressif et une censure constituée par la structure du champ
dans lequel s’offre cette expression, et cet ajustement est le produit d’un travail d’euphémisation pouvant aller
jusqu’au silence, limite du discours censuré. Parler, c’est mettre des formes. Le discours doit ses propriétés aux
conditions sociales de sa production.
Le discours euphémisé exerce une violence symbolique qui a pour effet d’interdire la seule violence qu’il mérite et
consiste à réduire à ce qu’il dit mais dans une forme telle qu’il ne prétend pas le dire.
Le champ fonctionne comme censure car il est situé dans la structure de la distribution du capital. Il exclut deux
choses : l’indicible qui ne peut pas être dit étant donné la structure de la distribution des moyens d’expression, et
l’innommable qui pourrait être dit mais qui est censuré.

La « jeunesse » n’est qu’un mot


Le sociologue rappelle que les divisions entre les âges sont arbitraires. La frontière entre jeunesse et vieillesse est un
enjeu de lutte car les classifications imposent des limites et produisent un ordre.
Jeunesse et vieillesse sont des constructions sociales. L’âge est une donnée biologique socialement manipulée et
manipulable : parler des jeunes comme d’une unité sociale dotée d’intérêts communs est une manipulation car le
terme jeunesse subsume sous le même concept des univers sociaux très différents. L’accès plus important à
l’enseignement secondaire a fait découvrir à une partie des jeunes ce statut temporaire mi-enfant mi-adulte.
Phénomène d’inflation scolaire : un titre vaut toujours ce que valent ses porteurs, un titre qui devient fréquent est
donc dévalué, et perd encore de sa valeur quand il devient accessible à des gens sans valeur sociale.
Les conflits de générations sont des conflits entre des systèmes d’aspiration constitués à des âges différents : ce qui
pour la première génération était une conquête de toute la vie devient donné dès la naissance à la deuxième
génération. La vieillesse connait un déclin social, une perte de pouvoir social, la vieillesse est anti jeune parce que
l’avenir est derrière elle, tandis que les jeunes définissent l’avenir. Des conflits de générations se constituent autour
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de rapports différents avec le système scolaire : on retrouve aux mêmes postes des non diplômés d’hier et des
faiblement diplômés d’aujourd’hui. Les vieux invoquent l’expérience associée à l’ancienneté, les jeunes invoquent la
compétence garantie par les titres. La relation commune à un état particulier du système scolaire avec des intérêts
spécifiques est un principe unificateur d’une génération : cette génération est par exemple plus qualifiée à emploi
égal que la génération précédente.

L’origine et l’évolution des espèces de mélomanes


La musique est le plus spiritualiste des arts, l’amour de la musique est une garantie de spiritualité. Être insensible à la
musique est une forme de barbarie. La musique est un art pur par excellence car elle ne dit rien et n’a rien à dire. Elle
est la forme la plus absolue de la dénégation du monde.
Les expériences musicales sont enracinées dans l’expérience corporelle la plus primitive. « Nos goûts nous expriment
plus que nos jugements ».
Les goûts sont toujours distinctifs. L’exaltation de certains artistes anciens a pour contrepartie la dévalorisation des
interprètes actuels les plus conformes aux exigences de l’industrie de masse.
La production produit la consommation et l’évolution de la production est une des causes du changement des goûts.

La métamorphose des goûts


Le goût est le principe des choix opérés dans les pratiques et les propriétés. Les goûts sont hiérarchisés. Les goûts
sont le produit d’une rencontre entre des biens et un goût.
Il y a des biens qui précèdent les goûts (les biens d’avant-garde) : contribuent-ils à faire les goûts ? Question de
l’efficacité symbolique de l’offre de biens.
L’artiste est celui qui transforme le goût en objet, qui réalise le potentiel, c’est-à-dire ce sens pratique du beau qui ne
peut se connaître qu’en se réalisant. L’artiste est quelqu’un que l’on reconnaît comme tel en se reconnaissant dans ce
qu’il a fait, en reconnaissant dans ce qu’il a fait ce que l’on aurait fait si on avait su le faire. Les goûts sont le produit
d’une rencontre entre le goût objectif de l’artiste et le goût du consommateur.
Comment se fait-il que toute demande trouve une offre en matière de goûts ? Modèle qui s’impose spontanément :
le producteur culturel est un calculateur économique rationnel qui parvient à satisfaire des besoins à peine formulés
voire ignorés de façon à tirer le plus grand profit possible. Modèle de Bourdieu : il y a des espaces de production
dans lesquels les producteurs ne travaillent pas les yeux fixés sur leurs clients, mais les yeux fixés sur leurs
concurrents. Ils travaillent dans un espace où ce qu’ils produisent dépend de leur position dans l’espace de
production. Les producteurs produisent des produits diversifiés par la logique des choses et sans recherche de la
distinction.
Le champ artistique est le lieu de changements permanents : un artiste est dépourvu de valeur parce que dénué
d’originalité. Ceux qui sont renvoyés au passé sont déclassés, mais peuvent aussi devenir classiques et être éternisés.
Le changement n’est pas le produit une recherche de l’ajustement à la demande. L’espace de production des biens et
l’espace de production des goûts changent au même rythme. Un des facteurs qui déterminent le changement de la
demande : l’élévation du niveau quantitatif et qualitatif de demande qui accompagne l’élévation du niveau
d’instruction. Les biens offerts perdent de leur rareté relative et de leur valeur distinctive à mesure que croît le
nombre de consommateurs qui sont enclins et aptes à se les approprier : la divulgation dévalue, les biens
appartenant aux happy fews deviennent commun. L’élévation du niveau de la demande coïncide avec un
abaissement du niveau de l’offre (comme le disque ou le livre de poche). Les consommateurs défendent leur rareté
en défendant la rareté des produits qu’ils consomment. Le public averti se déplace vers les produits modernes, mais
il y a aussi des retours et des rénovations : il y a donc des cycles.

Comment peut-on être sportif ?


L’ensemble des pratiques sportives constitue une offre destinée à rencontrer une demande sociale. Existe-t-il un
espace de production doté de sa logique et de son histoire propres à l’intérieur duquel s’engendrent les produits
sportifs, c’est-à-dire l’univers des pratiques et consommations sportives disponibles et socialement acceptables à un
moment donné du temps ? Quelles sont les conditions sociales de possibilité de l’appropriation des différents
produits sportifs ? Comment s’est constitué le corps des spécialistes vivant directement ou indirectement du sport ?
Quand ce système d’agents et d’institutions a-t-il commencé à fonctionner comme un champ de concurrence ?
Le sport s’est constitué comme une réalité spécifique. L’apparition du sport au sens moderne s’accompagne d’une
rupture avec d’anciennes activités. L’histoire sociale du sport peut fonder la légitimité d’une science sociale du sport
comme objet scientifique séparé en établissant à partir de quel ensemble de conditions sociales on peut parler de
sport, par opposition au jeu.
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Le passage du jeu au sport s’est accompli dans les grandes écoles réservées aux élites de la société bourgeoise. Les
exercices corporels de l’élite sont coupés des occasions sociales ordinaires auxquelles les jeux populaires restent
associés et dépouillés des fonctions sociales attachées aux jeux traditionnels. L’inclination à l’activité pour rien
prendre part à l’ethos des élites bourgeoises, de même que le fair play (manière de jouer le jeu en maintenant la
« distance au rôle » — expression de Goffman). Processus de rationalisation destiné à assurer la prévisibilité et la
calculabilité : corpus de règlements, corps de dirigeants spécialisés. Elaboration d’une philosophie politique du
sport : pratique désintéressée affirmant les vertus viriles des futurs chefs et la volonté de vaincre selon les règles (fair
play). L’exaltation du sport enferme une nuance anti intellectuelle. Les fractions dominantes de la classe dominante
valorisent l’éducation contre l’instruction, le caractère ou la volonté contre l’intelligence, le sport contre la culture, le
masculin contre le féminin.
Certaines pratiques sportives doivent leur intérêt au profit de distinction qu’elles procurent. Opposition entre sports
chics et pratiques vulgaires et entre pratique du sport et consommation de spectacle sportif. Le sport-spectacle est
une marchandise de masse, l’organisation de spectacles sportifs comme un show business. La compétence purement
passive acquise en dehors de la pratique est un facteur permissif de l’évolution de la production : le connaisseur voit
ce que le profane ne voit pas, tandis que le profane recherche le sensationnel et s’attache à la victoire.
Le développement de la pratique du sport est lié au fait qu’il est un moyen d’occuper au moindre coût les
adolescents dans les public schools. Il est ensuite devenu un enjeu de lutte entre les institutions organisées en vue de
la mobilisation et de la conquête politique des masses. La divulgation du sport s’accompagne d’un changement des
fonctions assignées à la pratique et d’une transformation de la pratique : le goût de la violence, l’exaltation du
sacrifice se développent. La carrière sportive représente une des seules voies d’ascension sociale pour les classes
dominées.
La logique d’orientation des agents verts telle pratique sportive tient compte des dispositions à l’égard du sport, de
l’habitus. Il y a une variation des pratiques selon la classe sociale qui tient compte de la variation du capital
économique et culturel, des variations de la perception et de l’appréciation des profits que ces pratiques procurent,
du temps libre. Demande populaire : un corps fort, des sports collectifs, sport associé à la jeunesse pour en canaliser
l’énergie. Demande bourgeoise : un corps sain, sport bourgeois pratiqué pour sa fonction d’entretien physique et
pour le profil social. Le rapport au corps propre est différent : rapport instrumental chez les classes populaires ; corps
traité comme une fin, corps-pour-autrui, fonction hygiénique, esthétique et sociale chez les classes privilégiées.
Les transformations de l’offre s’engendrent dans les luttes de concurrence pour l’imposition de la pratique sportive
légitime et pour la conquête de la clientèle : lutte entre les différents sports, les différentes écoles et traditions au
sein de chaque sport, les différentes catégories d’agents engagés dans cette concurrence. Les transformations de la
demande sont une dimension de la transformation des styles de vie.

Haute couture et haute culture


Homologie de structure entre le champ de production des biens de mode et le champ de production des biens de
culture légitime comme la musique, poésie ou philosophie. Parle des premiers car les seconds sont protégés contre la
désacralisation par l’analyse scientifique, mais vaut aussi pour les seconds. Analyse du fétichisme et de la magie.
Les dominants dans le champ de la haute couture sont ceux qui ont le pouvoir de constituer des objets comme rares
par le procédé de la griffe, ceux dont la griffe a le plus de prix.
Le champ de la mode occupe une position intermédiaire entre un champ fait pour organiser la succession et un
champ où les gens sont radicalement irremplaçables : à la fois affirmation du pouvoir charismatique du créateur et
affirmation de la possibilité du remplacement de l’irremplaçable.
Le problème de la succession, c’est la possibilité de transmettre un pouvoir créateur. La griffe est une marque qui
change la nature sociale de l’objet mais pas la nature matérielle, mais cette marque est un nom propre. Il y a un
pouvoir qui repose sur la foi, d’autant plus grand que le couturier est situé haut dans la hiérarchie du champ.

Mais qui a créé les créateurs ?


Sociologie et art ne font pas bon ménage : l’art est un univers de croyance, la sociologie désenchante. Première idée
reçue : la sociologie peut rendre compte de la consommation culturelle mais pas de la production car il y a un espace
sacré du créateur. Deuxième idée reçue : la sociologie (la statistique notamment) minore, réduit la création
artistique.
L’approche qui subordonne l’artiste aux contraintes d’un milieu ou à la demande d’un client succombe dans un
finalisme naïf. Il y a une autonomie de l’artiste qui n’est pas autre chose que l’autonomie du champ artistique. L’objet
de la sociologie des œuvres culturel n’est ni l’artiste singulier, ni la relation entre artiste et groupe social, mais
l’ensemble des relations entre l’artiste et les autres artistes, entre l’ensemble des agents engagés dans la production
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de l’œuvre ou de la valeur sociale de l’œuvre. La sociologie des œuvres prend pour objet le champ de production
culturelle et la relation entre le champ de production et le chant des consommateurs.
Les déterminismes sociaux s’exercent à travers l’habitus du producteur et à travers les demandes et contraintes
sociales inscrites dans la position qu’il occupe dans un champ de production. La création est la rencontre entre
l’habitus et une certaine position. Le sujet de l’œuvre d’art n’est pas un artiste singulier ni un groupe social mais le
champ de la production artistique dans son ensemble. Exemple : Flaubert défend l’art pour l’art et occupe dans le
champ de production littéraire une position neutre, dans un double refus de l’art social et de l’art bourgeois ; le
discours indirect libre montre l’hésitation et la tentation de s’identifier au groupe dont il rapporte les propos, la
structure chiasmatique exprime la double relation de la double négation qui l’oppose en tant qu’artiste pur à la fois
aux bourgeois et au peuple.
Il n’y a donc pas de recherche de l’ajustement entre production et consommation, cet ajustement résulte de
l’homologie structurale entre l’espace de production et le champ des consommateurs. La correspondance qui
s’établit entre le producteur et son public n’est pas le produit d’une recherche d’ajustement.
Une des propriétés des champs de production culturelle réside dans le fait que les actes qui s’accomplissent et les
produits qui s’y produisent enferment la référence à l’histoire du champ. Les consommateurs se définissent comme
légitimes en se montrant incapables de les repérer.
Ce qui fait la valeur de l’œuvre d’art, ce n’est pas la rareté du produit mais la rareté du producteur manifesté par la
signature, c’est-à-dire la croyance collective dans la valeur du producteur et de son produit. Une des tâches
principales de l’histoire de l’art serait de décrire la genèse d’un champ de production artistique capable de produire
l’artiste.

L’opinion publique n’existe pas


Premier postulat d’une enquête d’opinion : tout le monde peut avoir une opinion. Deuxième postulat : toutes les
opinions se valent. Troisième postulat : il y a un accord sur les problèmes qui méritent d’être posés.
Le problème n’est pas la représentativité des échantillons, qui est plutôt bonne, mais le fait que les questions sont
biaisées dans leur formulation. Ces biais sont liés au fait que les problématiques des sondages d’opinion sont
subordonnées à une demande particulière en fonction de la conjoncture, aux préoccupations du personnel politique.
Le sondage d’opinion est un instrument d’action politique et sa fonction et d’imposer l’illusion qu’il existe une
opinion moyenne. Dissimule que l’état de l’opinion est un système de forces et de tensions.
Éliminer les non-réponses ? L’analyse des non réponse apporte une information sur ce que signifie la question et sur
la catégorie considérée : le taux de non-réponse est plus élevé chez les femmes notamment pour les problèmes
politiques, le taux de non-réponse diminue avec l’instruction…
Plusieurs principes à partir desquels on peut engendrer une réponse : 1/ La compétence politique qui varie
approximativement comme le niveau d’instruction : il faut être capable de constituer la question comme une
question politique et être capable de lui appliquer des catégories proprement politiques. 2/ L’ethos de classe :
système de valeurs implicites que les gens ont intériorisé depuis l’enfance et à partir duquel ils engendrent des
réponses. Exemple : les classes populaires sont plus rigoristes sur les problèmes touchant à la morale domestique,
aux relations entre générations ou sexes ; plus favorable à la novation sur des questions de structure politique et
d’ordre social.
La problématique dominante (celle qui intéresse essentiellement les gens qui détiennent le pouvoir) est très
inégalement maîtrisée par les différentes classes sociales.
Les enquêtes d’opinion traitent l’opinion publique comme une simple somme d’opinions individuelles où l’individu
exprime dans l’isolement une opinion isolée. En réalité, les opinions sont des forces et les rapports d’opinion sont des
conflits de force entre des groupes : dans les situations de crise, sous l’effet de politisation, il faut choisir entre des
groupes qui se définissent politiquement et mettent en avant des opinions.
On a d’autant plus d’opinions sur un problème que l’on est plus intéressé par ce problème.
Une consultation électorale (que pensez-vous de la politique d’untel ?) : pose une seule question sur ce qu’on ne
pourrait saisir vraiment qu’en de multiples questions, qui n’auront pas la même signification pour tous et qui risquent
d’être posées d’une manière qui avantage le candidat.

Culture et politique
Le produit fini en sociologie (opus operatum) cache les conditions de sa production (modus operandi).
Les variations constatées dans le taux de non-réponse tiennent aux propriétés des répondants ou aux propriétés de
la question. La compétence politique, technique, est une compétence sociale. La propension à acquérir la
compétence technique est d’autant plus grande que l’on est plus compétent socialement, c’est-à-dire reconnu
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socialement digne donc tenu d’acquérir cette compétence. Le monde social constitue des différences par le fait de
les désigner. La différence entre hommes et femmes dans leurs compétences politiques est fondée sur un coup de
force social, sur une assignation à compétence.
Corrélation fréquente entre le capital scolaire et des compétences non enseignées par le système scolaire. Effet
d’assignation statutaire, de « Noblesse oblige » : ceux qui sont socialement désignés comme compétents ont de plus
grandes chances de le devenir par l’effet d’allocation (on les met dans une meilleure classe).
Un certain nombre de gens s’éliminent donc du jeu politique et du système scolaire, et ce sont généralement ceux
que les dominant élimineraient s’ils le pouvaient : ceux qui s’éliminent collaborent à leur propre élimination.
La politique est un phénomène de marché : un corps de professionnels produit l’ensemble des discours qui sont
offerts à des gens dotés d’un goût politique, c’est-à-dire d’une capacité inégale de discerner entre les discours offerts.
Du côté de la production : espace de concurrence qui a sa logique autonome, son histoire ; la production se fait en
fonction de la position occupée dans cet espace de concurrence. Du côté de la consommation : espace de clients qui
apprécient les produits offerts en fonction des catégories de perception et d’appréciation.
Les classes les plus démunies de la capacité d’opinion, réduite à la fides implicita, délèguent à une instance dont ils
font le choix le soin de faire leur choix. Plus une catégorie sociale est démunie, plus elle est à l’égard de son parti à
l’état de remise de soi, plus le parti a de liberté en fonction des nécessités de la concurrence avec les autres partis.
Le sens de classe est profondément enfoui dans le corps (manière de se tenir, de parler…). Lorsque les plus démunis
doivent choisir entre plusieurs réponses préformées : s’ils ont un indice de la bonne réponse, ils choisissent ; sinon ils
sont vouées à l’allodoxia, c’est-à-dire qu’ils choisissent avec leur sens de classe (choisir un politique pour sa « bonne
gueule ») et non la conscience de classe (le choisir pour ses paroles).

La grève et l’action politique


La grève n’a un sens que dans le champ des luttes du travail : structure objective de rapports de force définie par la
lutte entre travailleurs, dont elle constitue l’arme principale, et employeurs, avec un troisième acteur, l’Etat.
Quels sont les facteurs d’unification de ce champ? Des facteurs économiques et des facteurs politiques (existence
d’un appareil de mobilisation comme le syndicat). L’unification de ces appareils provoque-t-elle unification du champ
des luttes ? Pas nécessairement : décalage entre le caractère national des organisations syndicales et le caractère
international des entreprises et de l’économie.
L’ancienneté de l’entrée dans le champ mesure la durée du processus d’ouvriérisation ou usinisation (travailleurs
s’approprient leurs entreprises et sont appropriés par elle). Plusieurs aspects du processus : renoncer aux enjeux
extérieurs, s’identifier à leur position dans le champ de luttes et épouser les intérêts associés.
Dans cette lutte, comment sont définis les enjeux et les moyens légitimes ? Parfois des contradictions entre
dominants et dominés mais aussi entre les dominés. « L’enjeu de la lutte est un enjeu de lutte ». Trois niveaux dans
une lutte ouvrière : impensé de la lutte (chose qu’on n’a pas idée de discuter ou de revendiquer), ce qui est
impensable (explicitement condamné), le revendiqué. Les convenances collectives : ensemble des normes qui
obligent les travailleurs à s’imposer des limites qui conduisent à l’acceptation de la définition dominante de la lutte
convenable.
Quels sont les facteurs de la force des antagonistes en présence ? La grève est l’instrument principal de lutte parce
qu’une des seules armes dont les travailleurs disposent est le retrait du travail ; la force physique et la violence
symbolique. La grève est un instrument de violence réelle qui y a des effets symboliques par l’intermédiaire de la
cohésion, de la rupture collective avec l’ordre ordinaire, de la manifestation.
Les stratégies de travailleurs ne sont efficaces que si elles sont collectives, donc conscientes et méthodiques,
médiatisées par une organisation. Plusieurs types de collectifs : le groupe additif ou récurrents (addition d’individus,
sondages d’opinion ou vote à bulletin secret), la mobilisation collective (groupe rassemblé physiquement dans un
même espace qui manifeste sa force par son nombre), la délégation (parole du représentant syndical valant de
nombreuses personnes)
La mobilisation de la classe ouvrière est liée à l’existence d’un appareil symbolique de production d’instruments de
perception et d’expression du monde social, d’autant que la classe dominante tend à produire et à imposer des
modèles de perception et d’expression démobilisateurs.

Le racisme de l’intelligence
Il n’a pas un racisme mais autant de racismes que de groupes qui ont besoin de se justifier d’exister comme ils
existent.

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Le racisme de l’intelligence est un racisme de classe dominante. La reproduction dépend de la transmission du
capital culturel, incorporé donc apparemment naturel. Ce racisme permet aux dominants de justifier l’ordre social
qu’ils dominent.
Le mode d’euphémisation du racisme et la scientifisation du discours : un pouvoir fondé sur la science demande à la
science de fonder le pouvoir. Le classement scolaire est un classement social euphémisé, naturalisé, absolutisé : il
est une discrimination sociale légitime et qui reçoit la sanction de la science.
Pourquoi la recrudescence du racisme de l’intelligence ? L’élitisme de bonne compagnie est devenu brutal, le système
scolaire a vu ses titres dévalués par l’apparition de gens dépourvus des prédispositions sociales qu’il exige.

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