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CHAPITRE 2

La diode à jonction

Objectif du chapitre

Ce chapitre permettra à l’étudiant de comprendre :


• la différence entre les conducteurs, les semi-conducteurs et les iso-
lants ;
• la structure de base des semi-conducteurs et comment ils conduisent
le courant ;
• la polarisation et les caractéristiques d’une diode.

2.1 Introduction aux semi-conducteurs

2.1.1 Différence entre conducteurs, semi-conducteurs et isolants

Les semi-conducteurs sont des matériaux dont la conductivité est inter-


médiaire entre celle des conducteurs et celle des isolants. On peut classifier
les matériaux en conducteurs, semi-conducteurs et isolants par la largeur
de leur zone interdite (figure 2.1).
La zone de conduction des isolants est pratiquement vide. Elle est sé-
parée de la zone de valence par une zone interdite de largeur supérieure à
5 eV. Dans les conditions normales, très rares sont les électrons de valence
qui reçoivent assez d’énergie pour sauter la zone interdite. Par conséquent,
la conductivité des isolants est très petite.
Pour les semi-conducteurs, leur zone interdite est beaucoup plus faible
(0,5 à 3 eV). Une légère variation de la température permet à certains
électrons de valence de devenir libre. La conductivité des semi-conducteurs
est donc plus grande que celle des isolants.

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La zone de conduction des conducteurs coïncide avec la zone de valence.


Autrement dit, tous les électrons de valence des conducteurs sont libres
et la largeur de leur zone interdite est égale à zéro. Par conséquent, la
conductivité des conducteurs est très grande.

Figure 2.1 – Diagramme d’énergie des trois types de matériaux

2.1.2 Conductivité des semi-conducteurs intrinsèques

Les corps simples semi-conducteurs ont la caractéristique principale


d’être tétravalent. Ce sont des éléments qui ont une structure cristalline. Un
semi-conducteur intrinsèque est constitué par un réseau cristallin de maté-
riau très pur. Beaucoup de semi-conducteurs, comme le germanium(Ge), le
silicium(Si), l’arséniure de gallium (AsGa), et d’autres encore, sont utilisés
en électronique. Pour un réseau cristallin de silicium, les atomes sont liés
entre eux par des liaisons covalentes (figure 2.2).

Figure 2.2 – Liaisons covalentes dans un cristal de silicium

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Au zéro absolu (0K = -273˚C), il n’y a pas d’agitation thermique et tous


les électrons périphériques participent aux liaisons covalentes ; aucun n’est
donc libre pour participer à la conduction électrique : le corps est isolant.
Lorsqu’on élève la température, l’agitation thermique permet à quelques
électrons de se libérer de la liaison covalente, et d’être mobiles dans le
cristal. Cette rupture des liaisons covalentes donne naissance à la création
d’une paire d’électron-trou : c’est la thermogénération. Elle est accompa-
gnée par le phénomène inverse qui est la recombinaison (figure 2.3).

Figure 2.3 – Création de la paire électron-trou sous l’effet de la température

Lorsqu’une tension est appliquée à travers un matériau semi-conducteur,


comme le montre la figure 2.4, les électrons libres sont maintenant facile-
ment attirés vers l’extrémité positive. Ce mouvement d’électrons libres est
appelé courant d’électrons.

Figure 2.4 – Courant des électrons dans un cristal de silicium intrinsèque

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Par ailleurs les trous créés participent à la conduction électrique en se dé-


plaçant dans le cristal (figure 2.5). Les trous sont définis comme un nouveau
porteur de charge positive. Cela est bien sûr fictif. Leur déplacement est
celui du courant.

Figure 2.5 – Courant des trous dans un cristal de silicium intrinsèque

2.1.3 Conductivité des semi-conducteurs extrinsèques

Les semi-conducteurs intrinsèques présentent assez peu d’intérêt. L’uti-


lisation de semi-conducteur dans la plupart des composants électroniques
se fait dans un état dit dopé (semi-conducteur extrinsèque). Le dopage
consiste à insérer un atome d’impureté dans la structure du semi-conducteur
pur.

2.1.3.1 Semi-conducteur P

On introduit au sein d’un cristal semi-conducteur intrinsèque, un atome


trivalent (par exemple bore, aluminium, gallium ou Indium). Ces atomes
vont se substituer, de place en place, à ceux de silicium dans le cristal
(figure 2.6). Comme ils possèdent un électron de valence en moins, il va
se créer des trous dans le semi-conducteur. À la température ambiante, ce
trou est comblé par un électron voisin sous l’effet de l’agitation thermique,
formant un trou positif dans le cristal, libre de se déplacer à l’intérieur de
celui-ci. Le semi-conducteur extrinsèque ainsi crée est dit de type P.

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Figure 2.6 – Semi-conducteur P

2.1.3.2 Semi-conducteur N

Le principe est le même que pour le semi-conducteur de type P, sauf


qu’on dope le cristal avec un corps pentavalent (phosphore, arsenic, etc).
On a alors dans le cristal la situation schématisée à la figure 2.7. L’électron
en surplus n’entrant pas dans une liaison covalente n’est que faiblement
lié à l’atome pentavalent. À la température ambiante, il est libre dans
le semi-conducteur (à cause de l’agitation thermique) et participe à la
conduction. Il en est pratiquement ainsi de tous les électrons en excès
venant de l’impureté pentavalente. Le semi-conducteur extrinsèque ainsi
constitué est dit de type N.

Figure 2.7 – Semi-conducteur de type N

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2.2 La jonction PN

La jonction PN est la juxtaposition de deux semi-conducteurs respec-


tivement dopés P et N (figure 2.8.(a)). Lorsqu’est réalisée la jonction, les
électrons de la région N diffusent vers la zone P . Cette diffusion crée au
niveau de la jonction des charges positives dans la zone N et des charges
négatives dans la zone P. Ces charges créent un champ électrique au niveau
de la jonction. Ce champ a pour effet l’arrêt de la diffusion d’elle-même.
Le champ électrique produit une différence de potentiel appelée barrière
de potentiel. La zone dépleuplée de porteurs mobiles est appelée zone de
déplétion (figure 2.8.(d)) .

(a) Mise en contact des deux semi-conducteurs (b) Création de la zone de déplétion
dopés

Figure 2.8 – Formation de la jonction PN

La barrière de tension de la jonction PN dépend de plusieurs facteurs (tem-


pérature, semi-conducteur intrinsèque de base utilisé, etc.). Elle est d’en-
viron 0,7 V pour le silicium et 0,3 V pour le germanium à 25˚C.

2.3 Diode à jonction PN

Si l’on munit un cristal de silicium dont une zone dopée P et une zone
dopée N séparée par la zone de déplétion, de deux électrodes, Il devient
une diode à jonction PN. Ces deux bornes sont l’anode disposée au niveau
de la zone P et la cathode disposée au niveau de la zone N. La structure
de base et le symbole d’une diode sont montrés à la figure 2.9.

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(a) Symbole (b) Structure de base

Figure 2.9 – Diode à jonction PN

2.3.1 Diode à jonction PN polarisée en direct

Si on applique un champ externe à l’aide d’un générateur en branchant


le pôle + sur la zone P et le pôle - sur la zone N, on peut annuler les
effets du champ interne et permettre au courant de circuler : le phénomène
d’attraction des électrons libres de la partie N par les trous de la partie
P (diffusion) n’est plus contrarié (figure 2.10). La diode est alors polarisée
dans le sens direct, et un courant relativement intense peut circuler.

Figure 2.10 – Jonction PN polarisée en direct

2.3.2 Diode à jonction PN polarisée en inverse

Si on branche le générateur dans le sens inverse du cas précédent, on


renforce le champ électrique interne, et on empêche le passage des porteurs
majoritaires : les électrons libres sont repoussés dans la zone N et les trous

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dans la zone P ; on accentue la zone de déplétion (figure 2.11).


Par contre, cette barrière de potentiel va favoriser le passage des porteurs
minoritaires (trous pour la zone N et électrons libres pour la zone P) condui-
sant à un courant, appelé courant de saturation. Ce courant ne dépend que
du nombre des porteurs minoritaires se trouvant au voisinage de la jonction

Figure 2.11 – Jonction PN polarisée en inverse

Le courant de la diode en direct et en inverse est décrit par une seule


équation donnée par :

V
! !
ID = IS · exp −1 (2.1)
VT

Avec :
- V : potentiel de barrière
- IS : courant de saturation
- VT : potentiel thermique

2.3.3 Caractéristique courant/tension

Le principe de fonctionnement de la diode à jonction peut être expliqué


en se basant sur la caractéristique courant-tension de la figure 2.12.
En polarisation directe, au dessus d’un certain seuil V0 , le courant direct
croit très rapidement avec VD . En polarisation inverse, le courant est très
négligeable et ceci est vrai jusqu’à une tension VBR dite tension de claquage.

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Quand la tension appliquée dépasse la valeur spécifiée par le fabricant, le


courant décroît très rapidement.

Figure 2.12 – Caractéristique courant-tension d’une diode ID =f(VD )

2.3.4 Modélisation de la diode

La diode est un dipôle non linéaire. L’analyse d’un comportement non


linéaire étant assez difficile, on remplace donc les diodes par des modèles
linéaires. Il y a trois différents modèles selon l’analyse ou l’étude souhaitée.

2.3.4.1 Le modèle idéal

Ce modèle est le plus simple, mais le moins précis. Il est utilisé pour des
estimations rapides et pour des analyses de circuits complexes . En direct, la
diode agit comme un interrupteur fermé et comme un interrupteur ouvert
en inverse (figure 2.13.(a)). La figure 2.13.(b) présente la caractéristique
courant-tension d’une diode idéale.

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(a) Symbole (b) Caractéristique ID =f(VD )

Figure 2.13 – Modèle d’une diode idéale

2.3.4.2 Le modèle à seuil

Ce modèle est plus utilisé pour l’étude et la conception des circuits de


base avec diode. Lorsque la diode est polarisée en direct, elle équivaut à un
interrupteur fermé en série avec une petite source de tension équivalente
(figure 2.14.(a)) égale au barrière de potentiel. Lorsque la diode est polari-
sée en inverse, elle équivaut à un interrupteur ouvert, tout comme dans le
modèle idéal, comme le montre la figure 2.14.(a). La courbe caractéristique
d’une diode à seuil est montrée à la figure 2.14.(b).

(a) Symbole (b) Caractéristique ID =f(VD )

Figure 2.14 – Modèle d’une diode à seuil

2.3.4.3 Le modèle linéarisé

Ce modèle représente une très bonne approximation linéaire de la ca-


ractéristique d’une diode réelle. Il est plus précis que le deuxième, mais

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plus complexe. Lorsque la diode est polarisée en directe, elle agit comme
un interrupteur fermé en série avec une source de tension et une faible
résistance dynamique directe comme indiqué à la figure 2.15.(a). Lorsque
la diode est polarisée inverse, elle agit comme un interrupteur ouvert en
parallèle avec une grande résistance interne inverse, comme le montre la
figure 2.15.(a). La courbe caractéristique d’une diode linéaire est montrée
à la figure 2.15.(b).

(a) Symbole (b) Caractéristique courant - tension ID =f(VD )

Figure 2.15 – Modèle d’une diode linéarisée

2.3.5 Point de fonctionnement

Soit le circuit de la figure suivante :

La caractéristique I = f(V) d’une diode réelle étant non linéaire, le point


de fonctionnement peut être déterminé graphiquement. En traçant sur un
même graphique la droite de charge statique définit par l’équation :

E−V
I= (2.2)
R
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et la caractéristique de la diode

V
! !
I = IS · exp −1 (2.3)
VT

le point de fonctionnement de la diode, définit par (IM , VM ) est l’inter-


section des deux courbes. Si la caractéristique de la diode est linéaire, le
point de fonctionnement peut être déterminé analytiquement.

2.3.6 Application du modèle linéarisé d’une diode

On fait une approximation de la caractéristique d’une diode par la


courbe donnée à la figure 2.16.(a). Cette diode est utilisée dans le cir-
cuit de la figure 2.16.(a).

Figure 2.16 – Caractéristique de la diode (a) et circuit utilisé (b)

Tracer la droite de charge du circuit et déterminer le point de fonctionne-


ment de la diode. On donne R = 50 V et E = 12 V.

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