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Traumatisme de la cheville
Sous la direction de
Mouhssine Bendahou
Khaled Saidi
Sylvie Besch
Frédéric Khiami
Springer
Mouhssine BENDAHOU
Service d’accueil des urgences
Hôpital de la Pitié-Salpêtrière
75013 Paris
Khaled SAIDI
Service d’accueil des urgences
Hôpital de la Pitié-Salpêtrière
75013 Paris
Sylvie BESCH
Service de rééducation fonctionnelle et traumatologie du sport
Hôpitaux de Saint-Maurice
94410 Saint-Maurice
Frédéric KHIAMI
Service de chirurgie orthopédique
Hôpital de la Pitié-Salpêtrière
75013 Paris
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littérature existante.
Partie I
Généralités
1. Anatomie clinique de la cheville et du pied
Comprendre pour bien traiter ........................................ 3
M. Scepi
Partie II
Cheville aiguë fermée
3. Démarche diagnostique devant une cheville aiguë ...... 25
S. Besch, E. Rolland et M. Peyre
II-1
Lésions ligamentaires « entorses de la cheville »
4. Examens complémentaires
Pourquoi ? Lesquels ? Quand ?........................................ 39
D. Zeitoun Eiss
II-2
Lésions osseuses
7. Fracture de la malléole latérale ....................................... 69
C. Camelot
9. Fractures du talus.............................................................. 97
E. Sariali
II-3
Le piège : lésions tendineuses
II-4
Fausses entorses de la cheville
17. Fausses entorses de cheville :
les fractures de la base du 5e métatarsien ....................... 187
F. Ledon et J.-B. Courroy
Partie III
Cheville chronique
19. Cheville douloureuse chronique :
démarche diagnostique et thérapeutique....................... 211
F. Khiami
Partie IV
Outils thérapeutiques
22. Rééducation de la cheville et du pied.
Pourquoi ? Comment ? Quand ? ..................................... 259
B. Tamalet
Points essentiels
t La « cheville traumatique » intéresse le plus souvent quatre articulations : la
tibio-fibulaire distale, la talo-crurale, la subtalaire et le groupe articulaire
tarso-métatarsien et médio-tarsien.
t Les points d’insertion du naviculaire et de la base du processus styloïde du
Ve métatarsien peuvent être le siège de fracture en raison des contraintes
mécaniques qui s’y appliquent en traumatologie (notamment dans les
mécanismes indirects).
t Les éléments anatomiques antérieurs de contention sont faibles, ce qui
explique les transmissions des contraintes sur les appareils ligamentaires
collatéraux et subtalaires.
t Les groupes articulaires fonctionnels et anatomiques sont étroitement
liés et doivent engager à toujours envisager des atteintes anatomiques
multiples (et ne pas se contenter d’évoquer une « banale » entorse du
complexe ligamentaire collatéral latéral).
t La proximité des éléments destinés à la vascularisation et à l’innervation
du pied doit conduire à un examen clinique soigneux de ces fonctions
devant une cheville traumatique (notamment en cas de luxations et/ou
de fractures).
Introduction
La connaissance de l’anatomie clinique de la cheville et du
pied est indispensable pour l’urgentiste qui aborde les pathologies
traumatiques et fonctionnelles de ces deux entités. Ce chapitre est
différent des classiques descriptions dans le sens où il se veut volon-
tairement pratique, « dynamique » (description des structures dans
le mouvement) et en relation directe avec la clinique aux urgences.
L’anatomie clinique de la cheville et du pied aux urgences se conçoit
comme un ensemble fonctionnel comprenant les articulations de la
M. Scepi (
), Service Accueil Urgences – SAMU – SMUR, CHU Hôpital Jean Bernard,
86021 Poitiers Cedex. Laboratoire d’Anatomie. Faculté de Médecine. Université de Poitiers.
– e-mail : m.scepi@chu-poitiers.fr
Sous la direction de M. Bendahou, K. Saidi, S. Besch, F. Khiami, Traumatisme de la cheville
ISBN : 978-2-8178-0351-7, © Springer-Verlag Paris 2013
4 Traumatisme de la cheville
Anatomie de surface
Le bord antérieur de l’extrémité inférieure du tibia est palpable
en dedans de la saillie du tendon du muscle tibial antérieur lorsque
le pied est en flexion dorsale ; la palpation se continue sur le versant
médial pour atteindre très facilement la malléole médiale.
La malléole latérale est aisément palpable sur sa face antérieure,
latérale et postérieure. En arrière, de part et d’autre de la saillie
du tendon calcanéen, les deux gouttières rétro malléolaires sont
palpables et doivent apparaître libres de tout épanchement.
En avant et en dehors de la saillie du tendon du muscle tibial anté-
rieur, la saillie des tendons du muscle extenseur des orteils masque
la palpation de l’articulation tibio-fibulaire distale.
Fig. 2 – Vue latérale de la cheville. Fig. 3 – Vue médiale de la cheville. 1 : liga-
1 : ligament collatéral latéral : ligament talo- ment collatéral médial : couche superficielle ;
fibulaire antérieur ; 2 : ligament collatéral 2 : ligament collatéral médial : couche profonde.
latéral : ligament talo-fibulaire postérieur ;
3 : ligament collatéral latéral : ligament calca-
néo-fibulaire ; 4 : rétinaculum des extenseurs ;
5 : fibula ; 6 : calcanéus.
Anatomie fonctionnelle
L’articulation talo-crurale va intervenir dans deux comparti-
ments fonctionnels, statiques et dynamiques. La statique de cette
articulation trouve son intérêt dans le maintien de la station érigée.
Cette fonction, propre à l’Homme, exige une stabilité parfaite du
talus en grande partie assurée par l’articulation talo-crurale et ses
éléments anatomiques.
La stabilité antéro-postérieure est assurée dans les déplacements
antérieurs par le bord antérieur de l’extrémité inférieure du tibia,
les ligaments antérieurs, le groupe des muscles extenseurs des
orteils et tibial antérieur ainsi que les muscles fibulaires. Dans le
sens postérieur, la stabilité est assurée par le bord postérieur de
l’extrémité inférieure du tibia, le rétrécissement postérieur de la
mortaise tibio-fibulaire et les ligaments postérieurs.
En ce qui concerne la dynamique de cette articulation, il n’existe
qu’un seul degré de liberté dans la talo-crurale, ce qui ne permet
8 Traumatisme de la cheville
Anatomie fonctionnelle
En statique, cette articulation est presque immobile et contri-
bue à la stabilité de la cheville et du pied (station érigée, appui
monopodal statique).
En dynamique, lors des mouvements de flexion, la fibula est le
siège d’une légère ascension et sa surface articulaire se rapproche
de celle du tibia (rotation médiale associée). Lors des mouvements
d’extension, ces déplacements s’inversent.
Cette articulation est donc fonctionnellement associée de façon
intime aux amplitudes de la précédente et contribue ainsi à la sta-
bilité dans la marche.
Anatomie de surface
Difficilement palpable, elle peut cependant être explorée dans
sa stabilité en bloquant le talus et en imprimant des mouvements
antéro-postérieurs et latéraux au calcanéus (qui doit rester solidaire
du talus).
Anatomie des éléments articulaires
Les surfaces articulaires, postérieures du talus et du calcanéus
sont exactement inversement conformes (très excavée pour le talus
et très convexe pour le calcanéus). La capsule fibreuse doublée de sa
membrane synoviale, est renforcée par trois ligaments : talo-calca-
néen médial, talo-calcanéen latéral, talo-calcanéen postérieur. Le
ligament talo-calcanéen interosseux est une lame fibreuse, courte
et résistante, tendue verticalement dans le sinus talo-calcanéen
(sinus du tarse) (fig. 11).
Anatomie fonctionnelle
L’anatomie fonctionnelle de cette articulation doit être conçue
en étroite liaison avec celle des articulations talo-crurale et trans-
verse du tarse. Néanmoins, au niveau de l’articulation subtalaire,
trois axes de mouvements sont à envisager : sagittal, transversal
et vertical. Selon l’axe vertical, les mouvements du calcanéus sont
de type abduction et adduction : on dit classiquement que le cal-
canéus « vire ». Selon l’axe transversal, le calcanéus présente des
mouvements de rotation antérieure et postérieure : le calcanéus
« tangue ». Selon l’axe sagittal, les mouvements effectués sont des
rotations médiale et latérale : le calcanéus « roule ».
Tous ces mouvements combinés, associés à ceux permis, et démul-
tipliés par les autres articulations du tarse, vont aboutir à des mou-
vements complexes, « associés », mais cependant de la plus haute
importance fonctionnelle : les mouvements d’inversion (amenant
la plante du pied vers l’intérieur, vers l’axe du corps, et éversion,
amenant la plante du pied vers l’extérieur). Ces notions d’anatomie
fonctionnelle trouvent toute leur importance dans la compréhen-
sion de la genèse des lésions ligamentaires et ostéochondrales asso-
ciées dans la plupart des traumatismes de la cheville.
12 Traumatisme de la cheville
Articulation cuboïdo-naviculaire
1 Elle est de type syndesmose et unit le naviculaire et le cuboïde.
Le ligament cuboïdo-naviculaire est épais.
Articulations intercunéiformes médiale et latérale et articulation cunéo-cuboïdienne
Les surfaces articulaires sont maintenues par des ligaments
plantaires et dorsaux et surtout par des ligaments interosseux, très
résistants, situés en arrière des surfaces articulaires et contribuant
efficacement au maintien de l’axe du pied. D’un point de vue fonc-
tionnel, ces trois groupes d’articulations constituent une « assise »
importante dans les appuis statiques et dynamiques et complètent
les fonctions des autres articulations du tarse pour assurer la sta-
bilité dans la station érigée. Ainsi, l’anatomie clinique, appliquée
à la biomécanique de la « cheville », intéresse plusieurs groupes
articulaires dans les aspects statiques et dynamiques (fig. 15). Ces
associations anatomiques expliquent facilement les associations
lésionnelles dans les pathologies traumatiques et la difficulté d’éta-
blir en urgence un diagnostic lésionnel précis, notamment dans la
pathologie traumatique ligamentaire.
Bibliographie
1. Kamina P (2012) Atlas d’anatomie. Paris, Maloine
2. Kamina P (2008) Anatomie clinique. Tome 1. Paris, Maloine
3. Rodineau J (1978) La cheville. Paris, Laboratoire Besins-Iscovesco
4. Golan P, Vega J, de Leuw PAJ et al. (2010) Anatomy of the ankle ligaments: a
picturial essay. Knee Surg Traumatol Arthrosc 18 : 557-69
5. Kapandji IA (1974) Physiologie articulaire. Membre inférieur. Paris, Maloine
6. Olivier C (1970) Mécanique articulaire. Paris, Vigot
Principes de la consolidation osseuse et
ligamentaire appliqués à la cheville traumatique
Prise en charge aux urgences
2
M. SCEPI
Points essentiels
t Chez l’adulte, la phase initiale de cicatrisation ligamentaire dure jusqu’au
10e jour post-traumatique.
t La phase initiale de cicatrisation osseuse s’étend jusqu’au 15e jour post-
traumatique.
t La mobilisation précoce, protégée et adaptée, favorise la qualité de la
cicatrisation ligamentaire et en raccourcit les délais.
t Chez l’enfant, le ligament est plus solide que l’os et il faut donc toujours
rechercher les lésions métaphyso-épiphysaires.
t Il faut compter environ une année pour que le tissu originel (ligamentaire,
osseux) retrouve ses propriétés physiologiques et biomécaniques.
M. Scepi (
), Service Accueil Urgences – SAMU – SMUR, CHU Hôpital Jean Bernard,
86021 Poitiers Cedex. Laboratoire d’Anatomie. Faculté de Médecine. Université de Poitiers.
– e-mail : m.scepi@chu-poitiers.fr
Sous la direction de M. Bendahou, K. Saidi, S. Besch, F. Khiami, Traumatisme de la cheville
ISBN : 978-2-8178-0351-7, © Springer-Verlag Paris 2013
18 Traumatisme de la cheville
Les études chez l’animal, in vivo et in vitro, ont montré que le pro-
2 cessus de cicatrisation se faisait en trois phases consécutives dans le
temps : une phase initiale, que l’on peut qualifier d’inflammatoire,
une seconde phase de cicatrisation, dite de remodelage, puis une
troisième phase, tardive, de renforcement de la cicatrice.
Phase initiale
Immédiatement après la lésion, il y a formation d’un pont san-
guin qui unit les deux berges : le clou sanguin. Des fibroblastes
apparaissent dès le troisième jour avec ébauche d’une nouvelle
matrice (glycoprotéines, collagène, cellules mésenchymateuses,
etc.).
Phase de remodelage
Elle se réalise entre le 15e et le 28e jour post-traumatique. Elle
consiste en la formation, le développement et l’orientation dans le
sens de la traction de fibres de collagène.
De façon concomitante à ces deux phases, une prolifération
vasculaire extrinsèque et intrinsèque (berges de la lésion), se
développe. Cette phase « vasculaire », parallèle, dure environ 4 à
6 semaines.
Phase de renforcement
Elle correspond à une prolifération et à un renforcement des
fibres de collagène. L’organisation de ces fibres se poursuit et pro-
gressivement la récupération de leurs propriétés biomécaniques se
réalise. Cette phase peut durer jusqu’à la 40e semaine (expérimen-
tation animale) [1].
Les propriétés biomécaniques des tendons et des ligaments sont
différentes, cependant il semble que leur processus de cicatrisa-
tion soient les mêmes, ou suivent les mêmes voies sus-décrites. Les
délais de récupération sont sensiblement identiques, mais il faut
souligner l’influence de la localisation des lésions et des possibilités
de sollicitation sur les délais de récupération.
Lors du processus de cicatrisation, la résistance, mais aussi le
volume et la compliance du ligament, ou du tendon, évoluent
dans le temps. Cette notion est importante dans la construction
des programmes de réadaptation. Ainsi, l’analyse de la résistance
aux sollicitations en stress, avant rupture, montre une récupéra-
tion d’environ 50 % de la solidité initiale dans un délai de 8 à
16 semaines. Ce laps de temps est raccourci si l’on se rapporte à
une analyse par unité de surface [2].
Principes de la consolidation osseuse et ligamentaire appliqués à la cheville traumatique 19
Phase initiale
L’hématome périfracturaire s’organise autour du foyer de fracture
et est le siège de phénomènes inflammatoires. Dès le 5e jour, des fibro-
cytes apparaissent à partir de la moelle osseuse en regard du foyer de
fracture. Cette phase se prolonge jusqu’au 15e jour post-traumatique.
20 Traumatisme de la cheville
2 Phase intermédiaire
Un cal fibreux s’organise et le périoste d’épaissit. Cette phase
s’étend du 15e au 21e jour.
Phase terminale
Dès le 20e jour, le cal fibreux est recouvert d’un tissu osseux
compact. Vers le 40è jour, des travées osseuses s’organisent et le
cal osseux se constitue. La reconstitution des ostéons et du canal
médullaire est effective 8 à 12 mois plus tard.
La cicatrisation osseuse est favorisée par : la stabilisation en posi-
tion anatomique du foyer de fracture, la compression de celui-ci,
la vascularisation du périoste et de l’os et par le type de traitement
et le terrain [2].
Dans le cas des lésions chondrales (tassement du dôme talien), il
faudra se méfier de la difficulté diagnostique en urgence, et dans le
cas de certitude lésionnelle, savoir prévenir le patient de la gravité
fonctionnelle potentielle de ces lésions (stabilité articulaire, inter-
vention avec greffe possible dans les suites, etc.). En effet, la cica-
trisation chondrale est moindre que celle du tissu osseux, du fait de
la vascularisation très pauvre du tissu cartilagineux.
En conclusion
Bibliographie
1. Lui PP, Rui YF, Ni M, Chan KM (2011) Tenogenic différenciation of stem
cells for tendon repair: what is the current evidence? J Tissue Eng Regen Med
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2. Kamina P (2006) Anatomie clinique. Tome 1. Paris, Maloine
3. Gusman DM, Dockery GL (1994) Adhesive lesions of the talocrural joint.
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4. Van Moppes FI, Van den Hoogenband CR, Greep JM (1979) Adhesive
capsulitis of the ankle (frozen ankle). Arch Orthop Trauma Surg 94: 313-5
Partie
Cheville aiguë fermée
II
Démarche diagnostique
devant une cheville aiguë 3
S. BESCH, E. ROLLAND ET M. PEYRE
Points essentiels
t La grande diversité des lésions nécessite de passer systématiquement en
revue les différentes structures anatomiques locorégionales.
t L’examen clinique d’une articulation suppose comme pré-requis
incontournable de connaître son anatomie fonctionnelle sous peine
d’effectuer des gestes stéréotypés dénués de sens clinique correct.
t Le bilan articulaire comporte différentes étapes, réalisées dans un ordre
chronologique standardisé : interrogatoire, inspection, mobilité (active et
passive), tests isométriques, palpation.
t Il convient toujours de réévaluer tous les patients au bout de quelques jours.
t L’imagerie « à l’aveugle », sans orientation clinique, est le plus souvent
inadaptée et donc inutile.
Physiopathologie
Moyens du diagnostic
Interrogatoire
C’est une étape fondamentale. Il doit être systématique et
correctement orienté. Il cherche à :
– évaluer le délai écoulé depuis l’accident : plus les signes
locaux (gonflement, hématome…) apparaissent précocement,
plus la lésion est a priori grave ;
– détailler les circonstances exactes du traumatisme permet-
tant d’établir les structures anatomiques impliquées dans le
mouvement et donc susceptibles d’avoir été lésées :
tsoit choc direct (coup de pied, tackle) provoquant une
compression des structures locales. Selon l’intensité, les
lésions peuvent être totalement bénignes (simple contusion des
plans superficiels évoluant favorablement en quelques jours) ou
plus sévères (fracture, luxation ou rupture tendineuse) sources
éventuelles de séquelles ;
tsoit choc indirect (torsion, pied bloqué), sollicitant l’articu-
lation dans ses amplitudes extrêmes. Les moyens passifs de
contention sont alors mis en tension voire distendus, rom-
pus partiellement ou dans leur totalité. En cas de rupture
complète, les butées que représentent les structures osseuses
deviennent les ultimes remparts avant que ne se produise
une luxation articulaire ;
– apprécier ce qui a été ressenti, voire entendu, au moment
précis de l’accident : la sensation de déchirure, l’impression de
déboîtement de la cheville, de craquement, l’apparition quasi
instantanée d’une tuméfaction sont des signes évoquant une
lésion osseuse ou ligamentaire grave. En revanche, la sensation
de claquement n’est pas spécifique ;
– quantifier la douleur bien que celle-ci, tout comme le degré
d’impotence fonctionnelle, ne soit pas des signes fiables per-
mettant de préjuger de l’importance des lésions ;
– faire préciser le siège de la douleur initiale ;
– noter l’évolution des symptômes dans les suites immédiates :
persistance, augmentation, disparition. Dans les lésions liga-
mentaires, la douleur évolue classiquement en trois temps
(douleur initiale intense, parfois syncopale, atténuation en
quelques minutes, puis accentuation quelques heures plus tard,
et nette recrudescence le lendemain matin au lever), mais reste
souvent plus intense durant les premiers jours pour une entorse
de gravité moyenne ou même une entorse bénigne que pour
une entorse grave (diminution des afférences nociceptives, après
rupture de tous les ligaments concernés) ;
– rechercher les antécédents traumatiques et les traitements
déjà effectués.
28 Traumatisme de la cheville
3 Examen physique
Inspection
On note d’emblée l’existence ou non d’une déformation globale
de la cheville et/ou de l’arrière-pied, faisant craindre en premier
lieu une fracture bimalléolaire et/ou une fracture-luxation.
S’il n’y a pas de déformation notable, il faut rechercher un héma-
tome (gonflement focalisé) dont la survenue quasi immédiate,
quelques minutes après le traumatisme, est le témoin d’un saigne-
ment local (ce qui élimine d’emblée le diagnostic d’entorse bénigne), et
dont la localisation initiale (figs. 1, 2, 3) peut guider le diagnostic
lésionnel (tableau I).
Tableau I – Hypothèses diagnostiques selon la localisation de l’hématome initial.
Topographie
Hypothèses lésionnelles
de l’hématome initiale
Plantaire Fracture (en particulier tarsienne ou médio-
tarsienne) jusqu’à preuve du contraire
Prémalléolaire externe Entorse du ligament collatéral latéral
Rétromalléolaire externe Luxation des tendons fibulaires, fracture de la fibula
Région malléolaire externe Fracture de la fibula, de la joue talienne latérale,
entorse de l’articulation tibio-fibulaire
Bord externe du pied Fracture du 5e métatarsien, entorse calcanéo-
cuboïdienne
Cou-de-pied Fracture du talus, de l’os naviculaire, arrachement
capsulaire antérieur
Face interne du pied Fracture de la malléole médiale, de l’os naviculaire,
du talus, fracture bimalléolaire, lésion du tendon
tibial postérieur
Région calcanéenne Rupture du tendon calcanéen, fracture de la
margelle postérieure du tibia, du tubercule postéro-
externe du talus, du calcanéum
Fig. 4 – Examen des fibulaires, patient en Fig. 5 – Examen du tibial postérieur, patient
décubitus ventral : éversion contrariée du en décubitus ventral : adduction + flexion
pied. plantaire contrariée du pied.
32 Traumatisme de la cheville
Conclusion
Au terme de cet examen clinique, on aura :
– reconnu une lésion ostéo-articulaire grave et noté l’existence
de lésions vasculo-nerveuses associées, dirigeant rapidement le
patient en radiologie suivi de la mise en place en urgence d’un
traitement adapté ;
– pour les traumatismes ne s’accompagnant d’aucune déforma-
tion articulaire ou osseuse évidente, apprécié la nécessité d’un
bilan radiologique en s’appuyant sur les critères d’Ottawa ;
– reconnu certaines lésions des tissus mous : rupture du tendon
calcanéen, luxation des tendons fibulaires pouvant nécessiter
un geste chirurgical ;
– apprécié assez souvent la gravité des lésions ligamentaires ;
– mis en place la conduite à tenir ultérieure : traitement initial
d’attente puis planification du suivi.
Ainsi, en se référant à des notions anatomo-physiologiques et en
s’appuyant sur les données de l’examen clinique et du bilan d’ima-
gerie, on peut, devant un traumatisme récent de la cheville, réussir
à établir un diagnostic lésionnel fondé. Cependant, quelle qu’ait été
la conduite thérapeutique mise en place initialement, il conviendra
toujours de réévaluer tous les patients au bout de quelques jours,
temps nécessaire à l’amélioration des conditions locales et/ou à la
diminution des douleurs facilitant l’examen (éventuellement étayé
par d’autres examens complémentaires), afin de confirmer ou non le
diagnostic initial et le traitement.
Démarche diagnostique devant une cheville aiguë 35
Bibliographie
1. Biga N (2009) Examen clinique du pied et du cou de pied. Collecte des
données et constructions d’enchainements étiopathogéniques. Rev Chir
Ortho Traum 95 (Suppl) 47-54
2. Duquennoy A (1996) Entorses graves de la tibiotarsienne. Symposium.
SOFCOT XLIX réunion annuelle. Rev Chir Orthop 2 (Suppl): 123-663
3. Judet T (1996) Biomécanique du cou-de-pied. In: Rodineau J, Saillant G,
eds. Les lésions ligamentaires récentes du cou-de-pied : de la péronéotibiale
inférieure à la médiotarsienne. 14e Journée de traumatologie du sport de la
Pitié-Salpêtrière. Paris, Masson. p. 9-13
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5. Rodineau J (1993) Signes de gravité des entorses de cheville. J Traumatol
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Rolland E, Charlot N, eds. Traumatologie de la cheville. Paris, Sauramps.
p. 9-22
7. Stiell IG, McKnight RD, Greenberg GH (1994) Implementation of the
Ottawa ankle rules. JAMA 271: 827-32
36 Traumatisme de la cheville
Fig. 8 – À gauche : vue latérale ; à droite : vue médiale. Reproduit avec l’autorisation
des Editions Scientifiques L&C d’après Stiell IG, McKnight RD, Greenberg GH :
Implementation of the Ottawa ankle rules. JAMA 1994 ; 271 : 827-832. Reproduction tirée
de « Grands Concepts & Méthodes qui ont marqué l’évolution de la traumatologie et de la
rhumatologie sportives ces quinze dernières années » sous la direction de Jacques Rodineau.
Éditions scientifiques L&C, 2007, Paris.
Lésions ligamentaires
« entorses de la cheville » II-1
Examens complémentaires
Pourquoi ? Lesquels ? Quand ? 4
D. ZEITOUN EISS
Points essentiels
• Des radiographies standard peuvent être réalisées au décours immédiat
d’une entorse en respectant les critères d’Ottawa.
• Il n’y a ni urgence absolue ni obligation à faire d’autres examens
d’imagerie. Ils seront prescrits en fonction de l’évolution clinique.
• Si besoin, l’échographie doit rester l’examen de première intention et doit
toujours être couplée à la radio standard ; on peut la réaliser dans les 3 à
10 jours suivant le traumatisme.
• La tomodensitométrie peut être indiquée en aigu pour éliminer de
façon formelle une lésion osseuse post-traumatique fortement suspectée
cliniquement et non visualisée sur les radios.
• L’IRM est plutôt indiquée à distance du traumatisme en cas de douleur
ou de laxité persistante au décours d’un traitement bien suivi.
Phase aiguë
Une imagerie au décours immédiat d’une entorse n’est pas sys-
tématique. Les indications de radiographies standard sont bien
définies selon les critères d’Ottawa. Ces règles permettent surtout
d’éliminer ce qui n’est pas une atteinte ligamentaire et de faire le
diagnostic de fracture associée à une potentielle lésion ligamentaire.
D. Zeitoun Eiss (), Service de radiologie (Pr P.A. Grenier), Groupe hospitalier Pitié-
Salpêtrière, 75651 Paris Cedex 13 – e-mail : delphine.zeitoun@psl.ap-hop-paris.fr
Sous la direction de M. Bendahou, K. Saidi, S. Besch, F. Khiami, Traumatisme de la cheville
ISBN : 978-2-8178-0351-7, © Springer-Verlag Paris 2013
40 Traumatisme de la cheville
A B
C D
Fig. 4 – Coupe échographique montrant une lésion récente du ligament talo-fibulaire antérieur.
Phase chronique
Conclusion
Bibliographie
1. Saliou G, Kocheida M, Vernois J et al. (2007) Ankle and foot sprains:
conventional radiography aspects. J Radiol 88: 541-7
2. Wybier M, Mathieu P, Morvan G et al. (2008) Musculoskeletal radiology:
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3. Cyteval C, Blin D, Sarrrabère MP et al. (2007) Imaging of traumatic injuries
of the foot and ankle. J Radiol 88: 789-801
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5. Perrich KD, Goodwin DW, Hecht PJ, Cheung Y (2009) Ankle ligaments on
MRI: appearance of normal and injured ligaments. AJR Am J Roentgenol
193: 687-95
La classique entorse du ligament collatéral
latéral : quel traitement choisir ? 5
J. RODINEAU
Points essentiels
• La fréquence des entorses de cheville au cours des activités sportives mais
aussi de la vie quotidienne mérite d’être soulignée.
• Peu de problèmes de traumatologie n’ont suscité autant d’opinions
divergentes que le traitement des entorses de la cheville.
• La notion de « traitement fonctionnel » paraît faire l’unanimité de nos
jours mais ce traitement, en l’absence d’une définition précise, connaît
une extraordinaire variété dans ses modalités et sa durée.
• Cette prise en charge « fonctionnelle » nécessite une démarche
diagnostique cohérente centrée sur une question initiale fondamentale :
celle du diagnostic différentiel. L’étape suivante est celle du diagnostic de
gravité des lésions afin de récuser tout traitement approximatif ou mal
codifié.
• Une fois franchies toutes les étapes du diagnostic lésionnel, il ne reste qu’à
adopter le traitement le plus approprié et l’adapter à la gravité établie des
lésions.
Introduction
Mécanismes spécifiques
Évaluation clinique
Bien qu’elles soient d’une extrême fréquence, les entorses laté-
rales de l’articulation talo-crurale présentent cependant des diffi-
cultés certaines quant à l’appréciation exacte de l’importance des
lésions. Or, celle-ci est la base de tout traitement.
Les données de l’interrogatoire constituent une source de rensei-
gnements d’intérêt primordial, fondée sur les éléments suivants :
– la perception d’un craquement et surtout d’une sensation de
déchirure est un bon signe de gravité lésionnelle ;
– les réactions douloureuses qui accompagnent et suivent l’ac-
cident sont d’intensité variable. Au cours du traumatisme, la
perception d’une douleur est un phénomène banal mais l’évolu-
tion de la douleur peut donner des renseignements intéressants.
Habituellement, à la douleur initiale fait place une certaine
indolence suivie, quelques heures après, de la réapparition d’une
tension douloureuse. Dans les ruptures ligamentaires, le mode
évolutif peut revêtir deux aspects : d’une part, l’aggravation
progressive des douleurs et, d’autre part, l’indolence très nette
faisant suite à une douleur initiale brutale, non troublée par la
réapparition tardive de phénomènes douloureux ;
– la tuméfaction pré- et sous-malléolaire qui se forme en l’es-
pace de quelques minutes, en avant et au-dessous de la malléole
latérale, constitue un symptôme fidèle de gravité ;
– dans une entorse de gravité moyenne, l’ecchymose n’ap-
paraît guère avant la 24e heure et elle reste limitée. Dans les
formes graves, elle apparaît beaucoup plus précocement et va
rapidement diffuser ;
– survenant dans des délais variables après le traumatisme,
atteignant son développement maximum en 36 à 48 heures,
le gonflement péri-articulaire ne paraît pas être, du moins pris
séparément, un bon critère de gravité ;
– le degré d’impotence fonctionnelle peut varier parfois paral-
lèlement à la gravité des lésions mais il est loin d’y être toujours
proportionnel.
L’examen physique présente une importance considérable et sa
valeur ne saurait être sous-estimée ; sa difficulté non plus.
48 Traumatisme de la cheville
Bilan d’imagerie
Traitement
Conclusion
Le traitement des lésions ligamentaires collatérales latérales récentes
de la cheville est fondé sur la gravité des lésions mais aussi sur l’âge du
sujet, sa personnalité, ses activités sportives et/ou professionnelles, ses
motivations. La phase initiale de la majorité des traitements comporte
cinq mesures : application de froid, bandage compressif, suppression
de l’appui, utilisation de cannes anglaises pour la déambulation,
surélévation du membre inférieur pendant le repos.
Dans les entorses bénignes, ce protocole représente la totalité du
traitement. Il doit être poursuivi jusqu’à disparition de la sympto-
matologie clinique.
Dans les entorses de gravité moyenne, le traitement peut revêtir des
modalités différentes en se fondant sur le bilan clinique et le bilan
56 Traumatisme de la cheville
Bibliographie
1. Barrois B, Ribinik P, Davenne B (2002) Entorses de cheville. Encycl Med
Chir (Elsevier, Paris) kinésithérapie. Médecine Physique Réadaptation. 26-
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4. Brasseur JL, Richard O, Tardieu M, Roger B (1994) Échographie des ligaments
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versus conservative treatment for ankle injuries of the lateral ligament complex
of the ankle in adults. Cochrane Data-base Syst Rev 18: CD 000380
Autres entorses de la cheville
6
P. FIEUZAL
Points essentiels
t L’entorse du ligament collatéral latéral peut masquer l’atteinte du ligament
talo-calcanéen interosseux (ligament en haie). Il faut toujours tester la
sous-talienne lors d’une entorse de la cheville.
t Un effondrement de l’arche médiale du pied en contexte post-traumatique
doit faire rechercher une lésion de l’articulation talo-naviculaire et de ses
deux ligaments.
t L’atteinte isolée du ligament collatéral médial est peu fréquente. Il
convient de rechercher systématiquement une fracture de la fibula et une
fracture de Maisonneuve (équivalent de fracture bimalléolaire).
t Le diagnostic d’entorse de l’articulation tibio-fibulaire inférieure est
exceptionnellement porté à la phase aiguë. Pourtant, les séquelles peuvent
être majeures.
Introduction
P. Fieuzal (
), Service des Urgences – SAMU – SMUR, CHU de Poitiers, 86021 Poitiers
Cedex – e-mail : pfieuzal@yahoo.fr
Sous la direction de M. Bendahou, K. Saidi, S. Besch, F. Khiami, Traumatisme de la cheville
ISBN : 978-2-8178-0351-7, © Springer-Verlag Paris 2013
58 Traumatisme de la cheville
6 Entorse sous-talienne
Rappels anatomiques
Le talus est encastré en haut dans la pince bimalléoaire et s’arti-
cule en bas et en avant avec le bloc calcanéo-pédieux. La partie
inférieure entretient un contact postérieur avec le calcanéus (thala-
mus et sustentaculum tali), tandis que la face antérieure s’articule
avec la partie postérieure de l’os naviculaire. Entre les deux zones de
contact, se trouve une dépression, dite sinus du tarse, occupée par
le ligament talo-calcanéen interosseux ou ligament en haie. C’est le
pivot central de la stabilité articulaire sous-talienne. Les éléments
stabilisateurs secondaires comportent le faisceau moyen du ligament
collatéral latéral (calcanéo-fibulaire), le ligament collatéral médial
et le ligament talo-calcanéen postérieur (fig. 1). Il est intéressant de
rappeler qu’il n’existe aucune insertion musculaire sur le talus.
Examen clinique
Il est difficile de porter le diagnostic clinique d’entorse de l’arti-
culation sous-talienne car l’atteinte isolée est rare et s’accompagne
en général d’une lésion concomitante du plan ligamentaire colla-
téral latéral, dont la symptomatologie peut masquer celle propre
du sinus du tarse [1]. En théorie, il serait intéressant de pouvoir
tester l’articulation sous-talienne à la recherche d’une augmenta-
tion anormale des amplitudes en varus/valgus du calcanéus, mais
en pratique, ce testing à la phase aiguë est extrêmement difficile
et probablement peu spécifique. Cependant, devant un tableau
douloureux de la région latérale de la cheville, l’examen doit être
minutieux et précis pour pouvoir évoquer une atteinte de l’arti-
culation sous-talienne. Seule la palpation du sinus du tarse per-
met de soupçonner la lésion. La douleur est plus distale que celle
retrouvée lors d’une rupture du ligament talo-fibulaire antérieur et
Autres entorses de la cheville 59
Imagerie
Le bilan comporte une radiographie pied/cheville de face et de
profil stricts ainsi qu’un cliché de trois quarts déroulé qui expose
parfaitement le sinus du tarse et l’articulation calcanéo-cuboï-
dienne. Il faut veiller à analyser le processus latéral du talus qui
peut être lésé au moment de l’entorse. En l’absence du petit arra-
chement calcanéen antérieur ou d’une fracture du processus latéral
du talus, qui ne sont pas constants, l’échographie précisera la lésion.
Celle-ci peut être demandée dès la période aiguë en fonction de la
disponibilité du radiologue, ou bien être différée de quelques jours
surtout si la cheville est trop douloureuse. Enfin, si la radiographie
peut dépister une fracture associée, elle ne permet pas en revanche
de la décrire de manière suffisamment précise pour décider du
traitement définitif. Cette région anatomique difficile d’accès à la
radiographie est précisée au mieux par une tomodensitométrie.
Traitement
Il n’y a pas de consensus sur la prise en charge thérapeutique des
lésions isolées de l’articulation sous-talienne. Le traitement est le
plus souvent le même que celui appliqué pour l’entorse du ligament
collatéral latéral, volontiers fonctionnel, surtout grâce à la diffusion
des orthèses de marche. L’immobilisation stricte et rigide peut se
concevoir si l’imagerie dépiste un volumineux arrachement osseux
calcanéen et/ou une fracture non déplacée du processus latéral du
talus. Inversement, devant une fracture déplacée, un avis chirurgical
doit être demandé. En l’absence de fracture, il n’y a aucune place pour
un traitement chirurgical à la période aiguë. Le développement d’une
instabilité chronique secondaire invalidante, de diagnostic extrê-
mement difficile, pourra nécessiter également un avis chirurgical.
Rappels anatomiques
Elle intéresse principalement le ligament collatéral médial
(LCM). Il comprend deux plans : l’un profond entre le sommet
malléolaire médial et la partie postérieure du corps du talus ; l’autre
superficiel, dit ligament deltoïde, nappe le plan médial en partant
du rebord antérieur de la malléole médiale pour se déployer en
éventail en formant un faisceau tibio-talien postérieur et un fais-
ceau tibio-calcanéen. Ce plan médial est complété en profondeur
par le ligament calcanéo-naviculaire plantaire (fig. 2).
Clinique
Le mécanisme habituel comprend un mouvement forcé en
hyper-valgus (parfois réactionnel à un accident d’instabilité en
varus corrigé par une contraction musculaire réflexe).
62 Traumatisme de la cheville
Examens complémentaires
Ils comportent des radiographies standard de la cheville (face, face
en rotation médiale de 20°, profil) recherchant :
– une fracture de la malléole latérale ;
– un arrachement osseux de la pointe malléolaire médiale ;
– une lésion de l’articulation tibio-fibulaire distale (diastasis) ;
– une incarcération du ligament collatéral médial se traduisant
par un diastasis tibio-talien ;
– une atteinte du dôme du talus.
Le bilan nécessite également une radiographie de la jambe de face
et de profil à la recherche de la classique fracture de Maisonneuve.
La réévaluation clinique entre le 5e et le 8e jour permet d’affiner le
diagnostic. En cas d’évolution défavorable, une échographie peut
être utile pour compléter le bilan tendineux et ligamentaire. Le
reste des examens est affaire de spécialistes de l’appareil locomoteur
et se réalise le plus souvent en différé.
On portera une attention toute particulière aux radiographies de
l’enfant chez qui une lésion du ligament collatéral médial peut
s’accompagner d’un décollement épiphysaire de l’extrémité infé-
rieure de la fibula. Chez ces jeunes patients, il est indispensable
d’effectuer des clichés comparatifs.
Traitement
Le traitement est le plus souvent fonctionnel, tel qu’il a été décrit
dans le chapitre des entorses latérales de la cheville, selon les
Autres entorses de la cheville 63
Rappels anatomiques
L’articulation tibio-fibulaire inférieure (TFI) est une arthrodie
dépourvue de capsule articulaire permettant des mouvements
extrêmement limités. Sa cohésion est essentielle pour assurer la
stabilité de la mortaise talo-crurale. Elle possède trois structures
ligamentaires :
– le ligament tibio-fibulaire distal interosseux ;
– le ligament tibio-fibulaire distal antérieur ;
– le ligament tibio-fibulaire distal postérieur.
Le ligament interosseux est dans le prolongement de la membrane
interosseuse, tendue tout le long de la diaphyse des deux os de la
jambe (fig. 3).
6 Clinique
Dans l’entorse de la TFI, le verrouillage en flexion plantaire
active disparaît et le « ballottement » du talus persiste, signant la
lésion des faisceaux ligamentaires inférieurs.
Signalons que ces lésions, isolées, sont rares lors des traumatismes
de la cheville. Les circonstances de survenue sont représentées par
des traumatismes associant une flexion dorsale et une rotation laté-
rale forcée du pied. La douleur siège de manière élective au niveau
de l’articulation TFI, c’est-à-dire plus haut que le lieu habituel de
la classique entorse latérale de cheville.
Outre l’instabilité décrite plus haute, la douleur est reproduite par
le mécanisme causal, c’est-à-dire une rotation latérale passive et
douce du pied, genou fléchi à 90°. Il est important de pratiquer
ce testing après avoir éliminé une fracture associée. La flexion
plantaire avec mouvement d’inversion forcée du pied retrouve
parfois une tuméfaction ovalaire douloureuse à la palpation située
en regard de l’articulation tibio-fibulaire inférieure [6]. La flexion
dorsale passive du pied reproduit la douleur de l’interligne tibio-
fibulaire. À noter qu’en l’absence de lésion du ligament collatéral
latéral, on ne retrouve pas de tiroir tibio-talien ni de douleurs en
varus.
Chez l’enfant et l’adolescent, les lésions ligamentaires sont volon-
tiers des arrachements des insertions osseuses tels que décrits par
Tillaux où le ligament tibio-fibulaire antérieur arrache l’inser-
tion tibiale épiphysaire, réalisant une fracture Salter III ou plus
rarement un arrachement de l’insertion fibulaire (fig. 4).
Examens complémentaires
Le bilan radiologique comprend des clichés en charge si pos-
sible de face stricte et de profil, ainsi qu’un cliché de face à 20° de
rotation médiale afin de dégager l’intégralité de la mortaise. Le
cliché de jambe incluant la tête fibulaire éliminera une fracture
de la fibula. Il est important de dépister le diastasis TFI au mieux
par des clichés comparatifs. Dans tous les cas, en cas d’atteinte
atypique en dehors de la zone habituelle des entorses latérales plus
classiques, une échographie peut être utile quelques jours après le
traumatisme pour affiner le diagnostic. Si celui-ci se confirme,
l’appréciation de la gravité nécessitera le plus souvent le recours à
une IRM afin de faire le bilan lésionnel ligamentaire précis.
Traitement
En l’absence de lésions associées, le traitement est le plus sou-
vent orthopédique par une botte fermée sans appui pour une
durée de 6 semaines en général. Cette immobilisation est impé-
rative afin d’assurer une bonne cicatrisation de la membrane inte-
rosseuse et du ligament tibio-fibulaire inférieur. L’emploi d’une
orthèse ne peut convenir du fait de l’immobilisation relative
qu’elle procure, entraînant une ouverture de la pince tibio-fibu-
laire à chaque mouvement de la cheville. La chirurgie est indi-
quée en cas de lésions associées telles qu’une fracture malléolaire
médiale ou latérale, un diastasis tibio-talien médial. En cas de
diastasis tibio-fibulaire distal, le vissage percutané fibulo-tibial est
la technique de choix, mais nécessite une ablation de la vis à la
6e semaine postopératoire.
Conclusion
De diagnostic difficile, les entorses décrites dans ce chapitre
nécessitent donc un examen clinique soigneux en marge de l’explo-
ration classique du ligament collatéral latéral. Ces lésions mécon-
nues pourraient être responsables de séquelles fonctionnelles ou de
douleurs chroniques invalidantes. On s’appuiera sur des explora-
tions radiologiques et échographiques simples, parfois à distance en
cas de persistance d’instabilité clinique ou de douleurs chroniques.
Bibliographie
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tarse. In : Traumatologie du sport en pratique courante. 4e éd. Paris, Vigot.
p. 288-9
66 Traumatisme de la cheville
Points essentiels
t C’est la plus fréquente des fractures du membre inférieur.
t Il ne faut pas occulter une lésion ligamentaire associée, aboutissant à une
rupture de l’anneau de stabilité ostéo-ligamentaire talo-crural.
t Le traitement de ces fractures est plutôt orthopédique s’il respecte un bon
centrage du talus (valeur des critères radiologiques de Skinner).
t Le traitement chirurgical ne s’inscrit que pour un complet respect de
l’anatomie, toute malposition fibulaire pouvant aboutir à un décentrage
talien potentiellement arthrogène.
t Le délai de consolidation moyen d’une fracture malléolaire isolée est de
45 jours.
Introduction
Anatomie
La fibula est un os long, pair et asymétrique de forme très grêle.
Elle constitue avec le tibia le squelette de la jambe. Elle n’inter-
vient pas dans la transmission des pressions mais c’est un élément
essentiel de l’articulation de la cheville avec son rôle de mortaise
tibio-fibulaire élastique.
La malléole latérale, dont le nom a été emprunté au xvie siècle au
latin malleolus, signifie littéralement « petit marteau ». Elle forme la
partie saillante et postéro-externe de la cheville, située à l’extrémité
tarsienne de la fibula.
Elle descend plus bas, plus en arrière et elle est d’apparence plus
volumineuse que la malléole médiale. Elle possède une forme lan-
céolée et allongée verticalement. Son extrémité est aplatie transver-
salement et pointe en dehors. Dans son ensemble, elle présente une
légère inclinaison externe de 7°, donnant un valgus physiologique
à son orientation.
Elle présente anatomiquement deux faces, deux bords et un
sommet (fig. 1) :
– La face latérale est sous-cutanée et palpable. Sa crête oblique
coupe la partie supérieure pour se continuer sur le bord posté-
rieure de la fibula. Elle aboutit ainsi à un os vrillé de dedans
en dehors avec un angle malléolaire de 30° par rapport à la
verticale de la fibula (fig. 2).
Fracture de la malléole latérale 71
Champ tibial
COUPE FRONTALE
Péroniers Ligt péronéo-tibial
latéraux inf. et ant. Ligt péronéo-tibial
inf. et post.
Surface articul.
Ligt péronéo-astr. ant. Ligt péronéo-astr. post.
Ligt P. calcan.
FACE EXTERNE FACE INTERNE
Fig. 1 – Anatomie de la malléole fibulaire (d’après Brizon/Castaing [3]). Dessin Michel Scepi.
Face ext.
Face post.
Bord ext.
Biomécanique et anamnèse
Flexibilité de l’articulation talo-crurale
L’articulation de la cheville doit être flexible afin de faire face
aux énormes forces appliquées sur le talus à l’intérieur de la mor-
taise talo-crurale. La face interne de l’articulation est essentielle-
ment rigide, car la malléole médiale, à la différence de la malléole
Fracture de la malléole latérale 73
Supination Rotation
Dupuytren Inter- Type
Rotation B externe
basse ligamentaire IV
externe Intertuberculaire
74 Traumatisme de la cheville
Fig. 4 – Anneau de stabilité théorique talo-tibial dans le plan coronal. L’atteinte d’au moins
deux éléments rend l’ensemble possiblement instable (trois sites ligamentaires : ligament
latéral, médial et péronéo-tibial inférieur). Source : Robin Smithuis Fracture mechanism
and Radiography by Robin Smithuis Fracture mechanism and Radiography. Site internet :
http://www.radiologyassistant.nl/en/p4b6d817d8fade/ankle-fracture-mechanism.html
Fracture de la malléole latérale 75
Anamnèse
Dans la majorité des cas, le mécanisme est indirect en supi-
nation, semblable à celui d’une entorse de cheville (80 %) [6]. Il
peut être au mieux précisé lors de l’anamnèse par la classification
de Duparc [6] en recherchant un mouvement en adduction, en
abduction ou en rotation externe. Un mécanisme par choc direct
est rare (5 %) [1, 6]. Il n’entre, dans ce cas de figure, dans aucune
classification particulière et engendre le plus souvent une fracture
comminutive avec une possible lésion cutanée associée.
Clinique
L’examen clinique retrouve une douleur exquise lors de la pal-
pation de la malléole latérale au niveau de la fracture. Il existe une
impotence fonctionnelle relative puisqu’un patient présentant une
fracture isolée et peu déplacée de la malléole latérale peut marcher
avec un appui complet. L’examen clinique permet en outre d’ap-
précier les critères d’Ottawa qui serviront à orienter l’indication
des clichés radiologiques.
Valeur des critères d’Ottawa (fig. 5) :
– chez un patient adulte ;
– douleur postérieure sur les 6 derniers centimètres de la fibula ;
– impossibilité d’effectuer 4 pas consécutifs, soit à l’arrivée soit
lors de l’examen clinique.
Fig. 5 – Critères d’Ottawa et fracture de la malléole externe : une douleur est retrouvée sur les
6 derniers centimètres postérieurs de la fibula. Dessin Michel Scepi.
76 Traumatisme de la cheville
Radiologie
Les clichés de base consistent en trois incidences systématiques
pour optimiser l’analyse radiologique [1] : une incidence de face,
de profil strict et de face en rotation interne de 20° (le rayon passe
dans l’axe le 4e métatarsien).
Description des principales fractures (fig. 6)
L’analyse synthétique effectuée par Vives et al. [6] (tableau I)
permet de répartir ces fractures en quatre types principaux.
Les classifications anatomiques initiales étaient basées sur la situa-
tion du trait de fracture sur la fibula. D’abord rudimentaires par
Dupuytren [6] en fracture haute ou basse, les classifications se
sont ensuite appréciées par la situation du trait de fracture par
rapport aux ligaments tibio-fibulaires (Danis 13) ou par rapport
aux tubercules tibiaux externe (Duparc 13). Ces deux dernières
classifications restent anatomiquement proches.
Par la suite, le mécanisme traumatique a été également pris en
compte : initié par Lauge-Hansen [6] et repris ensuite par Duparc
[6] (mécanisme en adduction, en abduction, ou en rotation externe
sus- ou inter-tuberculaire).
A B C D
Fig. 6 – Différents types de fracture (d’après Vives et al. [6]). A : sous-tuberculaire ; B : sus-
tuberculaire comminutif ; C : sus-tuberculaire oblique ou spiroïde ; D : intertuberculaire.
Dessin Michel Scepi.
Fracture de la malléole latérale 77
Fig. 11 – Fracture isolée de la malléole fibulaire sur les incidences de face, de profil et de trois
quarts interne et externe.
par la fracture d’un grand pont osseux vertical [5, 6]. Ces lésions
nécessitent, par le risque d’instabilité de la mortaise, une réduc-
tion chirurgicale associée plus ou moins à un blocage transitoire
de la syndesmose.
Fig. 14 – D’après l’Atlas de
Keats, les quatre localisations
classiques des os surnuméraires
de la malléole latérale. Une
fracture est évoquée devant
l’aspect irrégulier, non cortica-
lisé des berges fracturaires. Plus
l’arrachement osseux est petit,
plus le diagnostic différentiel
est difficile. La confrontation
radio-clinique permet de lever
le doute. Dessin Michel Scepi.
Fig. 16 – Fracture de fatigue à distance, les radiographies montrant un cal osseux limité.
L’échographie retrouve un petit remodelage cortical avec hyperhémie périphérique évoquant
un cal osseux [8]. Imagerie Ostéoarticulaire Clinique du Sport, Bordeaux-Mérignac.
Lésions stables
Une lésion osseuse isolée de la malléole latérale est considérée
comme stable. Elle présente même une certaine tolérance d’adapta-
tion fonctionnelle si le déplacement est minime, cette constatation
[6] donne ainsi une place très large au traitement orthopédique.
Vives [6] rappelle que sur une série de traitement orthopédique
76 % des défauts anatomiques conduisent à 57 % des chevilles
dont la fonction est strictement normale. Un bon centrage du talus
(vérifié au test de Skinner), même associé à un léger cal vicieux
malléolaire, aboutit presque toujours à un résultat fonctionnel
satisfaisant. On considère comme un bon résultat fonctionnel, la
récupération d’une flexion dorsale de la talo-crurale à au moins 10
à 15° [1, 6]. Les fractures entrant dans ce cadre étant :
– les fractures interligamentaires, non ou peu déplacées ;
– les fractures sous-ligamentaires, non ou peu déplacées.
Fracture de la malléole latérale 83
Lésions instables
Les situations où les lésions osseuses de la malléole latérale isolées
sont déplacées ou considérées comme instables sont :
– les fractures de la malléole latérale déplacées ;
– les fractures de la malléole latérale sus-ligamentaire instables ;
– les fractures associées à un diastasis tibio-fibulaire ;
– les fractures associées à un diastasis médial visible sur le cliché
de face (équivalent d’une entorse grave interne).
Ces lésions doivent faire discuter un geste chirurgical de réduction
et/ou d’ostéosynthèse.
Sous couvert d’une immobilisation provisoire par une attelle talo-
jambière postérieure, un avis spécialisé est recommandé [2, 6].
Le traitement chirurgical pourra être décidé. Pour espérer un bon
résultat il faudra obligatoirement une reconstruction anatomique
parfaite [6]. Le moindre défaut n’est pas bien toléré, voire même
pour Vives [6], plus de 10 % des fractures qui ont été correctement
réduites chirurgicalement ont un potentiel de dégradation arthro-
gène inexpliqué. Les principes de cette chirurgie seront selon les
cas :
– une réduction orthopédique avec immobilisation plâtrée sous
contrôle radioscopique ;
– une ostéosynthèse de la fracture en question (plaque 1/3 de
tube, vissage direct, broche, haubanage voire fixateur externe
selon l’état cutané…) ;
– une ligamentorraphie ou désincarcération du ligament
médial ;
– une vis de syndesmose provisoire en cas de diastasis
tibio-fibulaire ;
– l’immobilisation systématique par botte pédieuse sur 45 jours
avec un traitement anticoagulant préventif des maladies
thrombo-emboliques ;
– elle sera suivie d’une rééducation fonctionnelle avec un appui
complet progressif immédiat.
Fracture de la malléole latérale 85
Variante :
– une rééducation précoce peut être conseillée en cas de mon-
tage stable au 15e jour en insistant sur la flexion dorsale et en
maintenant une attelle entre les séances. L’obtention d’une
flexion dorsale utile de 10° à 15 ° est le meilleur garant d’une
récupération fonctionnelle satisfaisante [1].
Complication – Évolution
L’évolution peut se faire sur un simple retard de consolidation.
Une fracture qui est stable est le plus souvent visible entre 2 et
3 mois sur les clichés radiologiques et ne doit pas faire retarder le
début d’appui. Seule une douleur persistante imposera l’utilisation
transitoire d’une orthèse pneumatique ou mousse de marche.
Une pseudarthrose sera évoquée devant la persistance du trait
de fracture au-delà de 6 mois de traitement. Elle impose un avis
orthopédique afin d’apprécier l’opportunité d’une intervention
chirurgicale (décortication, greffe et ostéosynthèse).
Un cal vicieux, un excentrage de la mortaise talo-crurale ou un
déplacement secondaire sur un traitement orthopédique de décou-
verte secondaire doivent faire discuter une réduction chirurgicale
avec ostéosynthèse, d’autant plus que la découverte est précoce. On
rappelle ici la relative bonne tolérance fonctionnelle par adaptation
dans ce genre de situation [6]. Une intervention de réduction san-
glante rapide sera à décider si la fracture n’est pas consolidée. En
revanche, les échecs de traitement orthopédique repris secondai-
rement par la chirurgie donnent les plus mauvais résultats [6]. Le
risque arthrogène est important si la réduction n’est pas parfaite.
Ces constatations imposent un avis spécialisé de principe.
Les autres complications ou risques classiques à toute fracture sont :
– la phlébite qui impose une anticoagulation systématique en
cas d’immobilisation plâtrée ; celle-ci n’est pas nécessaire lors
d’un traitement fonctionnel associé avec appui autorisé ;
– une neuro-algodystrophie sera évoquée devant des douleurs
persistantes au-delà de 2 mois du traumatisme. Le tableau
clinique associe à des degrés divers : une douleur diffuse à la
marche et spontanée au repos, un œdème, un accès cyanique,
une raideur, voire une hypersudation… Ce diagnostic impose
un traitement antalgique et fonctionnel approprié.
Conclusion
Bibliographie
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11. Weber BG (1966-1972) In: Huber H, ed. Die Verletzungendes oberen
Sprunggelenkes. Stuttgart, Verlag
Fractures bimalléolaires
8
E. FOURNIOLS
Points essentiels
t C’est une urgence.
t Faire une radiographie de face et de profil en légère rotation interne pour
le diagnostic et la classification de la fracture.
t La luxation associée doit être réduite en urgence.
t Le traitement est le plus souvent chirurgical.
t Risque évolutif : l’arthrose tibio-talienne.
Introduction
8 Classification
Les fractures par adduction (fig. 1) sont les plus rares, représentant
environ 5 %. Elles entraînent une fracture sous-ligamentaire de
la fibula (ou une entorse grave du ligament latéral externe) et une
fracture oblique en haut et en dedans de la malléole médiale. Une
lésion ostéo-cartilagineuse par impaction du bord interne du pilon
tibial est fréquemment associée.
Les fractures par abduction (fig. 2) représentent environ 15 à
20 % des fractures bimalléolaires. Elles entraînent une fracture
horizontale basse de la malléole médiale et une fracture haute de
la fibula, au-dessus des ligaments tibio-fibulaires. Une rupture de
la membrane intersosseuse est la règle, tout comme les ligaments
tibio-fibulaires. L’existence d’un diastasis tibio-fibulaire confir-
mera ces ruptures ligamentaires. Deux formes particulières sont
à connaître : la fracture très proximale de la fibula qui peut être
située parfois au col de celui-ci et correspondant à la « fracture
de Maisonneuve ». La deuxième forme correspond à la « fracture
équivalent bimalléolaire » liée à la rupture du ligament collaté-
ral médial (à la place d’une fracture malléolaire interne), qui peut
éventuellement s’incarcérer entre la joue interne du talus et la face
externe de la malléole médiale.
Les fractures en rotation (fig. 3) sont les plus fréquentes et concernent
près de 75 % des fractures. La fracture de la malléole latérale est
interligamentaire, oblique et la fracture de la malléole médiale est
volontiers horizontale. Une fracture équivallent bimalléolaire peut
aussi être retrouvée dans ces mécanismes en rotation. Il peut y avoir
en plus une fracture de la partie postérieure du pilon tibial ou frac-
ture de la malléole postérieure. Ces « fractures trimalléolaires » sont
volontiers instables et associées à une luxation postérieure (fig. 4).
Fractures bimalléolaires 89
Conduite à tenir
L’examen clinique, lors d’une fracture bimalléolaire, est aisé.
Il doit être systématique et rapide afin de ne pas retarder le bilan
radiographique. Le patient, suite au traumatisme, a une impotence
90 Traumatisme de la cheville
Traitement
Traitement orthopédique
Seules les fractures non déplacées et sans signes de souffrance
cutanée seront traitées par une immobilisation plâtrée de type
botte aux urgences. Un cliché de contrôle juste après l’immobili-
sation est obligatoire, ainsi qu’un contrôle radio-clinique à 8 jours,
21 jours et 45 jours. L’appui est en règle repris progressivement
après 60 jours.
En dehors de ces cas rares, le traitement orthopédique est conduit
au bloc opératoire. Les indications de ce traitement sont discutées
[2, 4, 5]. Les indications les plus courantes sont les fractures sur os
porotiques et chez le sujet très âgé ayant une fracture peu déplacée
et/ou stable. Les fractures par abduction et les fractures en rotation,
à condition qu’il n’y ait pas de refend dans la malléole postérieure,
peuvent, sur le principe, bénéficier d’un traitement orthopédique.
Ce traitement est fait sous anesthésie générale ou locorégionale,
avec un contrôle scopique peropératoire. Une réduction parfaite
doit être obtenue. Le type d’immobilisation est discuté, cruro-
pédieux [4-6] les 45 premiers jours ou uniquement avec une botte
[2, 7] pour toute la durée de la contention, soit 60 à 90 jours.
92 Traumatisme de la cheville
Traitement chirurgical
Le traitement chirurgical est le traitement de principe des frac-
tures avec déplacement. Il faut réduire parfaitement les deux mal-
léoles en commençant classiquement par la fibula. La réduction
sera maintenue par une plaque sur la fibula, plus rarement des
broches associées à un cerclage et par un vissage de la malléole
médiale. La plupart du temps, la réduction de la fibula permet la
réduction du diastasis tibio-fibulaire (fig. 6). En cas de persistance
de ce diastasis, un vissage temporaire tibio-fibulaire est absolu-
ment nécessaire (fig. 7). Cette vis de syndesmodèse sera à retirer à
la 6e semaine lors d’une courte intervention réalisée idéalement en
ambulatoire.
Évolution
Fig. 10 – Pseudarthrose mal- Fig. 11 – Cal vicieux articulaire. Fig. 12 – Arthrodèse tibio-
léolaire médiale. talienne.
Conclusion
Bibliographie
1. Hulsker C, Kleinveld S, Zonnenberg C et al. (2011) Evidence-based treatment
of open ankle fractures. Arch Orthop Trauma Surg 131: 1545-53
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cheville. Montpellier, Sauramps Medical. p. 77-89
Fractures bimalléolaires 95
Points essentiels
t Mécanisme en hyperflexion: traumatisme sportif et accident de la voie
publique.
t Les fractures parcellaires sont souvent non diagnostiquées en particulier
les fractures de l’apophyse latérale.
t Un scanner doit systématiquement être réalisé.
t 2 complications majeures ; l’arthrose et l’ostéonécrose.
t Toute fracture déplacée doit être traitée chirurgicalement.
Introduction
9 Diagnostic
Clinique
Les fractures totales ont un tableau clinique très bruyant asso-
ciant douleur, œdème de la cheville et impotence fonctionnelle
totale. En cas de luxation associée, il existe une déformation avec
souvent une souffrance cutanée pouvant aller jusqu’à l’ouverture.
L’examen clinique doit comporter la palpation des reliefs osseux :
malléoles latérales et médiales, le calcanéum, le sustentaculum tali,
l’os naviculaire et la tête du talus. On recherchera une ouverture
cutanée retrouvée dans 22 % des cas [1] et une atteinte vasculo-
nerveuse qui demeure néanmoins très peu fréquente. En cas de
pouls non perçu, un Doppler peut être utile.
Les fractures parcellaires sont souvent non diagnostiquées et consi-
dérées comme entorse grave. Sariali et al. [2] ont montré que 68 %
de ces fractures passent inaperçues lors de l’examen en urgence,
avec un retard diagnostique moyen de 46 mois. Dans les fractures
de l’apophyse latérale du talus, une douleur élective est retrouvée à
la palpation 1 cm au-dessous de la malléole latérale.
Examens complémentaires
Radiographies
Les radiographies demeurent l’examen de première intention et
doivent comprendre au minimum une incidence antéro-posté-
rieure de cheville à 15° de rotation interne de hanche pour per-
mettre la visualisation de tout le dôme talien, et un profil strict de
cheville incluant le médio- et l’arrière-pied. En cas de doute, cer-
taines incidences obliques permettent de mieux visualiser le talus :
– les incidences obliques dorso-plantaires en flexion plantaire
de cheville permettant de dérouler le col ;
– un profil en rotation médiale pour explorer l’interligne talo-
calcanéen postérieur ;
– l’incidence de Canale [3] (pied en pronation de 15° et rayon
incliné de 45° caudalement pour explorer la déviation axiale du
col) ;
– l’incidence de Broden pour analyser le processus latéral du
talus (face avec le pied en rotation interne de 30° et flexion
plantaire de 20°).
Les radiographies sont indispensables pour le suivi, en particulier
pour rechercher le signe de Hawkins [4] de revascularisation du
talus. Il s’agit d’une ligne de clarté sous-chondrale apparaissant
vers le 2e mois et correspondant à une ostéopénie réactionnelle
dans un talus encore vascularisé.
Fractures du talus 99
Tomodensitométrie
La tomodensitométrie (TDM) est devenue actuellement quasi
systématique dans les fractures du talus. En effet, elle permet de
mieux préciser les caractéristiques du trait de fracture, le nombre
de fragments et les atteintes articulaires. Elle comporte des coupes
axiales, coronales et sagittales, ainsi que des reconstructions 3D
extrêmement utiles dans l’analyse des fractures parcellaires. Les
études publiées utilisant la TDM dans l’analyse des fractures du
talus rapportent davantage de fractures parcellaires et de fractures
comminutives que les travaux n’utilisant que des radiographies.
Imagerie par résonance magnétique
Cet examen n’est pas indiqué en urgence. Cependant, il peut
être utile dans certains cas : une contusion ostéo-chondrale et une
fracture de fatigue où un œdème osseux est retrouvé. Elle est éga-
lement recommandée pour le suivi d’une ostéonécrose du talus
secondaire à la fracture.
Ce sont les fractures les plus fréquentes (50 %) et les plus graves
[1], souvent associées à d’autres lésions [5-7], témoignant d’un trau-
matisme à haute énergie. On retrouve en effet une autre fracture du
talus dans 20 % des cas, une fracture de la malléole interne dans
20 à 30 % des cas, une lésion associée du pied ou de la cheville
homolatérale dans 44 % des cas et une atteinte du pied opposé
dans 25 % des cas.
Mécanisme
Décrite initialement chez les aviateurs de la Première Guerre
mondiale dont le pied posé sur le palonnier reculait brutalement,
elles sont actuellement essentiellement la conséquence des accidents
de la voie publique ou d’une chute d’un lieu élevé.
Le mécanisme lésionnel est une hyperflexion dorsale brutale de
l’avant-pied par rapport à un arrière-pied resté verrouillé sous la
tibio-talienne (exemple : choc frontal en voiture avec le pied de
l’accélérateur restant bloqué sur la pédale). Ceci génère une rupture
des structures capsulo-ligamentaires postérieures du talus puis une
impaction du col du talus sur le rebord antérieur du tibia. Au stade
suivant, il se produit une rupture des ligaments talo-calcanéens
postérieurs puis interosseux aboutissant à une subluxation, voire
une luxation sous-talienne. Le stade ultime est l’énucléation du
corps du talus.
100 Traumatisme de la cheville
9 Classification
La plus utilisée est celle de Hawkins et al. [8] (fig. 1) qui fait réfé-
rence à celle de Butel et Witvöet, qui s’inspire de celle de Coltard :
– type I : fracture peu ou pas déplacée ;
– type II : subluxation ou luxation subtalaire postérieure. La tête
du talus conserve ses rapports avec le bloc calcanéo-pédieux,
le corps du talus demeure solidaire de la pince tibio-fibulaire
(fig. 2) ;
– type III : énucléation du corps du talus qui se place à la partie
rétromalléolaire médiale, menaçant ainsi la peau. Il existe une
luxation subtalaire et talo-crurale. Le corps présente une double
rotation avec un dôme talien qui regarde en bas et en dedans ;
– type IV : en plus des lésions précédentes, la luxation talo-
naviculaire menace la vascularisation de la tête du talus.
Évolution – Complication
Lésions cutanées (ouverture ou nécrose secondaire)
Retrouvées dans 3 à 28 % des cas [6, 7], elles siègent le plus sou-
vent au niveau de la région sous- et rétromalléolaire médiale (pour
toutes les fractures du talus). Elles sont plus fréquentes en cas de
fracture déplacée. L’ouverture peut se produire secondairement par
nécrose cutanée, surtout en cas de retard à la réduction.
Infection
Le taux d’infection rapporté varie de 0 à 5 % et augmente en
cas de fracture ouverte [6, 7]. C’est une complication grave qui
péjore le pronostic fonctionnel de la cheville.
Fractures du talus 101
Pseudarthrose
Les retards de consolidation sont assez fréquents, avec un trait
qui peut rester visible au 6e mois post-traumatique. En revanche,
les pseudarthroses sont rares, variant de 1 à 4 % dans la littéra-
ture [6, 7]. Elles sont favorisées par la comminution fracturaire
ainsi que par une ostéosynthèse insuffisante ne permettant pas de
contrôler les forces de cisaillement induites par les mouvements
d’éversion-inversion.
Cal vicieux
Complication fréquente retrouvée dans 20 à 30 % des séries [3],
le cal vicieux peut être dû à un défaut de réduction ou à une erreur
d’analyse initiale. En effet, certaines fractures de type II sont à tort
considérées comme des types I. Parfois, lors de la reprise de l’appui,
on note un allongement du cal qui engendre un varus de l’arrière-
pied. Ces cals vicieux sont le plus souvent en flexion dorsale/varus
et engendrent un défaut d’appui au sol avec instabilité à la marche,
enraidissement et augmentation des contraintes, ce qui aboutit
à une arthrose de l’arrière-pied. Ainsi, 17° de varus réduisent la
mobilité sous-talienne de 30 % [9].
Ostéonécrose
Elle touche la partie latérale et postérieure du talus (fig. 3). La
fréquence de l’ostéonécrose varie dans la littérature de 13 à 69 %
des cas [3, 6, 10]. Hawkins [8] a décrit un signe radiologique d’une
excellente sensibilité correspondant à une raréfaction de l’os sous-
chondral qui apparaît vers la 6e-8e semaine. Ce signe traduit des
phénomènes de revascularisation. L’IRM ne doit pas être réalisée
avant le 3e mois afin d’éviter les faux négatifs.
Arthrose post-traumatique
9 C’est la complication la plus fréquente des fractures du col du
talus avec une incidence variant de 47 % à 90 % [6, 7]. L’arthrose
peut être subtalaire (> 50 %) ou talo-crurale (18 à 48 %). Il existe
cependant une dissociation radio clinique avec parfois absence de
répercussion fonctionnelle.
Traitement
Traitement non chirurgical
Seules les fractures de type I sont traitées orthopédiquement
avec une immobilisation par botte plâtrée 45 jours et mise en
décharge pour une période de 45 à 90 jours jusqu’à consolidation
de la fracture. La remise en charge doit être progressive. Un trai-
tement par anticoagulant à dose prophylactique doit être instauré
pendant toute la durée de l’immobilisation.
Traitement chirurgical
Il s’adresse aux fractures déplacées, l’objectif étant d’obtenir
une réduction anatomique sans compromettre la vascularisation
du talus ou la vitalité des parties molles souvent mises à mal au
moment du traumatisme. L’exposition du talus est difficile et
peut nécessiter deux voies d’abord (médiale et latérale), voire une
ostéotomie de la malléole interne. Cependant, les abords exten-
sifs doivent être évités afin de ne pas compromettre la vitalité du
talus. L’abord est le plus souvent antéro-médial. L’ostéosynthèse est
essentiellement réalisée avec un vissage dans l’axe du col permet-
tant de comprimer le foyer de fracture (fig. 4). Cette synthèse peut
être contrôlée sous scopie pour limiter l’abord chirurgical. Certains
auteurs ont proposé une ostéosynthèse par plaque [11]. La synthèse
par broches est insuffisante et doit être proscrite. Dans les fractures
comminutives, d’autres ont proposé une arthrodèse talo-crurale
voire tibio-talo-calcanéenne, qui a l’avantage d’augmenter l’apport
vasculaire du talus. La talectomie d’emblée doit être évitée car elle
entraîne une perte de hauteur du pied.
A B
Fig. 4 – Exemple de synthèse de fracture du col par vissage direct (A, B). La TDM
postopératoire (C) permet de contrôler la réduction et l’absence de corps étrangers intra-
articulaires.
Classification
Vallier et al. [4] distinguent quatre types :
– type I : trait de fracture situé latéralement dans le plan sagittal ;
– type II : trait de fracture situé médialement dans le plan
sagittal ;
– type III : trait de fracture coronal (fig. 5) ;
– type IV : fractures comminutives.
A B C
Fig. 5 – Fracture du corps du talus type III (A). Synthèse par vissage direct en compression (B, C).
104 Traumatisme de la cheville
9 Évolution – Complication
Les complications sont identiques aux fractures du col du talus
mais plus fréquentes. Selon Vallier et al. [7], le taux d’arthrose est
de 65 % au niveau talocrurale et de 35 % au niveau subtalaire. Ces
auteurs avaient également rapporté un taux de nécrose de 38 %
avec un risque plus élevé en cas de fracture sagittale.
Traitement
Le traitement non chirurgical est réservé aux fractures non
déplacées. Les fractures sagittales simples sont abordées par voie
antéro-médiale ou antéro-latérale en fonction de la topographie. La
mise en flexion plantaire facilite l’exposition. Les fractures com-
plexes nécessitent parfois un double abord voire une ostéotomie de
la malléole médiale. L’ostéosynthèse est le plus souvent réalisée par
vissage direct (fig. 5) soit de dedans en dehors, soit de dehors en
dedans. Une plaque peut être utilisée en cas de fracture associée du
col ou de forte comminution.
Mécanisme
Elles constituent 5 à 10 % des fractures du talus [5, 12] et sont
le plus souvent en rapport avec un traumatisme sportif. Le tableau
clinique est celui d’une entorse du médio-pied avec une douleur
exquise à la mobilisation de l’articulation talo-naviculaire. Le dia-
gnostic est confirmé par une incidence radiologique de Canale [3].
La TDM est utile pour préciser la topographie de la fracture, les
lésions associées, le déplacement et la comminution. Le traitement
orthopédique est réservé aux fractures non déplacées et consiste
en une immobilisation par botte durant 1 mois. Le traitement
chirurgical est réservé aux fractures déplacées, en cas de fragment
dépassant 50 % de la surface articulaire de la tête du talus et/ou
d’instabilité médio-tarsienne. Cette instabilité peut être confirmée
par des clichés dynamiques. En cas d’évolution défavorable, une
arthrodèse talo-naviculaire peut être réalisée secondairement.
9 Mécanisme
Réputées pour être la fracture du snowboarder, les causes les
plus fréquentes selon Sariali et al. [2] et Hawkins et al. [15] sont
les chutes d’un lieu élevé et les accidents de la voie publique où le
pied reste bloqué sur une pédale. Concernant le mécanisme, les
données de la littérature sont discordantes. Pour Hawkins [15] et
Fjeldborg [16], la fracture est secondaire à une dorsiflexion asso-
ciée à une inversion. Selon Sariali et al. [2], le mécanisme le plus
fréquent est une hyperflexion dorsale associée à une pronation. Il
est probable que la fracture se produise alors par un effet casse-
noisette, avec une apophyse latérale qui est prise en tenaille entre la
malléole latérale et la surface thalamique latérale.
Diagnostic
Le diagnostic est fait secondairement dans 68 % des cas avec un
retard de 46 mois [2]. Le tableau clinique est celui d’une entorse de
la cheville avec évolution défavorable, persistance des douleurs et
limitation du périmètre de marche. L’examen clinique retrouve une
douleur vive prémalléolaire. La radiographie de face à 30° de rota-
tion interne permet de voir la fracture. Cependant, la tomodensito-
métrie demeure l’examen de choix (fig. 7) car elle permet de mieux
analyser le trait, la comminution, la taille du fragment, et la pré-
sence de possibles corps étrangers intra-articulaires. Les reconstruc-
tions 3D sont extrêmement utiles pour guider la chirurgie (fig. 7).
A B C
Fig. 7 – Fracture du processus latéral du talus type II-b (A). Les reconstructions 3D sont
utiles à la compréhension du trait (B). Synthèse par vissage direct (C).
Classification
La classification la plus utilisée est celle de Hawkins [15] :
– type I : simple arrachement avec petit fragment inférieur à
0,5 cm. La fracture est bi-articulaire allant de la talo-crurale à
la sous-talienne ;
Fractures du talus 107
Évolution – Complication
L’évolution est souvent défavorable avec un taux élevé d’arthrose
subtalaire et de pseudarthrose. Sariali et al. [2] ont rapporté une
fréquence de 53 % pour chacune de ces complications. L’évolution
peut également se faire vers un cal vicieux souvent mal toléré. En
cas de forte comminution, il peut se produire un comblement du
sinus du tarse responsable de douleurs chroniques. Le résultat est
meilleur en cas de diagnostic précoce.
Traitement
Les fractures non déplacées doivent être traitées orthopédi-
quement avec une immobilisation stricte par botte en résine, sans
appui durant 45 jours.
Le traitement chirurgical doit être réservé aux fractures déplacées.
Une exérèse doit être réalisée pour les fragments de moins d’un
centimètre. Les gros fragments (> 1 cm) doivent être réduits et
synthésés par vissage direct (fig. 7).
Bibliographie
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108 Traumatisme de la cheville
Points essentiels
• Les fractures transthalamiques sont de pronostic extrêmement péjoratif
en cas de traitement inadapté.
• Les fractures transthalamiques nécessitent un traitement chirurgical
dans les premiers jours, par une équipe ultraspécialisée.
• La lutte contre l’œdème est primordiale pour le pronostic : une contention
veineuse doit être appliquée le plus vite possible.
• Le bilan radiologique comprend des clichés standard du calcanéum
de profil et des incidences rétromalléolaires. On peut y adjoindre une
tomodensotimétrie pour mieux analyser les lésions.
Introduction
Les fractures transthalamiques du calcanéus sont de traitement
difficile et ont souvent des conséquences fonctionnelles graves
[1], alors que la plupart des autres fractures ont un bon pronostic.
L’objet de ce chapitre est de donner les clefs au lecteur pour savoir
dépister puis orienter les fractures de mauvais pronostic vers une
équipe chirurgicale spécialisée dans le traitement de ces lésions.
Mécanisme lésionnel
Les fractures du calcanéus sont le plus souvent dues à une chute
d’une hauteur plus ou moins élevée avec réception sur le pied. Il y
a deux articulations sous-taliennes, l’une antérieure au niveau du
Fig. 1 – L’effet de cisaillement entre les contraintes exercées sur la surface thalamique
antérieure et postérieure donne naissance à un trait de fracture fondamental sagittal. La
tubérosité postérieure (1) monte et s’immisce entre les fragments thalamique interne (2) et
externe (3). Le fragment externe (3) bascule vers l’avant et verticalise sa partie de l’articulation
talaire postérieure. © H. Lelièvre.
10
Autres fractures
10
Bilan radiologique
Les fractures du calcanéum survenant le plus souvent au cours
d’une chute d’un lieu élevé, il faut vérifier l’absence de lésions éta-
gées et/ou de fractures du rachis ou du bassin associées. Sinon, le
bilan radiologique comprend un calcanéum de profil et un cliché
rétromalléolaire.
Le cliché de profil (fig. 6) permet d’estimer le déplacement de la
tubérosité postérieure par le calcul de l’angle de Böhler, qui peut
alors être proche de 0 voire négatif (il doit normalement être supé-
rieur à 20°). L’angle de Gisane (normalement compris entre 130 et
140°) permet d’estimer la verticalisation et l’enfoncement du frag-
ment thalamique externe. L’examen attentif du profil articulaire de
la surface talaire postérieure permet d’évaluer la fracture selon la
classification d’Utheza. Si cette articulation semble horizontalisée,
c’est que le trait fondamental sagittal est très latéral rendant le frag-
ment thalamique externe peu visible ; la fracture est donc dite hori-
zontale. À l’inverse, si l’articulation semble verticalisée, c’est que
le trait fondamental sagittal est très médial, rendant le fragment
thalamique interne peu visible ; la fracture est donc dite verticale.
Dans ce cas de figure, la partie antérieure de cette articulation
n’est plus en face du bord supérieur de l’apophyse antérieure : on
constate qu’elle est enfoncée. Enfin, quand les deux aspects précé-
dents sont présents, c’est que le trait fondamental sagittal passe au
milieu de l’articulation : les deux fragments thalamiques sont éga-
lement visibles. Il y a alors un signe du croisement entre les deux
profils articulaires. La fracture est dite mixte.
Le cliché rétromalléolaire (fig. 7) permet de visualiser le trait fon-
damental sagittal, de préciser sa position et de dépister des trais de
fractures accessoires. En outre, on peut vérifier qu’il n’y a pas de
saillie osseuse dans le canal tarsien pouvant entraîner une com-
pression du nerf tibial postérieur (cliniquement le patient aurait des
paresthésies, voire une anesthésie plantaire). D’autre part, on peut
voir une éventuelle fracture du tubercule des fibulaires, bien que
celle-ci ne soit souvent vue qu’en tomodensitométrie.
Fractures du calcanéus 115
10 Conditionnement
Le conditionnement est primordial pour le pronostic [4].
Comme dans toutes les fractures du pied et de la cheville, le risque
cutané est majeur et doit être impérativement contrôlé dès le début
de la prise en charge. L’œdème survient très rapidement et peut en
quelques heures rendre impossible une intervention à ciel ouvert
avant plusieurs semaines, ce qui rend ensuite extrêmement difficile
l’obtention d’une réduction correcte de la fracture. Idéalement, la
fracture doit être opérée dans les premiers jours et à horaire ouvrable
(ces fractures de traitement complexe ne doivent pas être opérées
par des équipes non entraînées au milieu de la nuit). C’est pourquoi,
le membre doit être surélevé et une contention appliquée au plus
vite. Nous utilisons pour cela du matériel disponible dans tous les
services d’urgences : le pied est emballé sous plusieurs épaisseurs
de bandes de ouate de manière à bien repartir la pression réalisée
par une bande contentive (ou à défaut une bande adhésive élastique
mise en place en spirale à la manière d’une bande de contention).
Il est inutile de serrer fort ; la simple élasticité de la bande a un
fort effet sur l’œdème (fig. 9). Une fois cette contention réalisée, la
cheville est immobilisée dans une attelle postérieure. Les anticoa-
gulants sont prescrits en fonction du délai opératoire : si celui-ci est
inférieur à 24 heures, les anticoagulants seront débutés seulement
en postopératoire. Des antalgiques sont prescrits immédiatement.
Traitement
Fractures transthalamiques
Le traitement des fractures transthalamiques est, en règle,
chirurgical [5]. Seules les formes sans aucun déplacement peuvent
être traitées orthopédiquement. On sait que la mobilisation pré-
coce de l’articulation sous-talienne permet un remodelage articu-
laire, diminue grandement le risque arthrogène et augmente les
mobilités articulaires. Cependant, le traitement fonctionnel risque
de majorer les conflits sous-malléolaires, une perte de la hauteur
et des difficultés de chaussage. Il faut donc préférer le traitement
chirurgical réalisé par une équipe spécialisée. Passé la première
semaine, la réduction devient plus difficile et elle est pratiquement
impossible au-delà de 3 semaines. Actuellement, des techniques
percutanées ou mini-invasives permettent d’obtenir des réductions
satisfaisantes malgré la présence d’œdème et donc avec un risque
cutané minime [6–8] (fig. 10). Il n’est actuellement plus de mise
d’attendre plusieurs semaines pour opérer un pied sans œdème : les
Fractures du calcanéus 117
10 Conclusion
Bibliographie
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Le piège :
lésions tendineuses II-3
Tendon calcanéen
(Achille) II-3A
Rupture du tendon calcanéen
11
J.F. KOUVALCHOUK
Points essentiels
t Le diagnostic de rupture du tendon calcanéen est uniquement clinique.
t Il repose sur des signes cliniques pathognomoniques : perte de l’équin
physiologique, manœuvre de Thompson positive, impossibilité d’appui
monopodal sur pointe.
t Les examens complémentaires ne sont jamais utiles au diagnostic.
t Les ruptures traumatiques sont toujours totales.
t Dès le diagnostic établi, dans l’attente du traitement définitif, des mesures
doivent être immédiatement mises en œuvre : immobilisation en équin,
interdiction d’appui, anticoagulants.
Signes cliniques
Interrogatoire
La description des circonstances de l’accident en est le premier
temps. Le traumatisme, toujours indirect, peut être de deux types :
soit une mise en tension excessive (chute avant au ski, pointe du
pied qui glisse sur une marche d’escalier), soit une contraction
explosive et non maîtrisée (démarrage brutal, détente brusque).
Une douleur postérieure très vive l’a accompagné, véritable coup
de fouet ou impression de choc direct faisant se retourner le patient
à la recherche de son agresseur. Dans le même temps, il perçoit
une sensation de craquement, parfois même audible par les voi-
sins. Dans les minutes qui suivent, la douleur diminue quelque
peu et le patient peut se relever et faire lentement quelques pas.
Sur ces seuls éléments d’interrogatoire, le diagnostic doit déjà
être évoqué. Il reste à s’enquérir du contexte propre au patient :
âge, profession, sports pratiqués et le niveau, antécédents et tout
particulièrement celui d’infiltration locale de corticoïdes à l’occa-
sion de douleurs tendineuses préexistantes ou de traitement par
fluoroquinolones.
Inspection
D’emblée, on peut remarquer que la marche se fait pied tota-
lement à plat, sans décoller le talon. Les douleurs étant posté-
rieures, c’est en décubitus ventral que l’examen se déroule. Toute
la région postérieure de la cheville est tuméfiée et parfois ecchy-
motique, mais les régions malléolaires et sous malléolaires sont
parfaitement intactes. De profil, si le patient est vu tôt, on note
que le bord postérieur de la partie inférieure de la jambe n’est
pas régulier, mais présente un véritable coup de hache (fig. 1)
Rupture du tendon calcanéen 127
11 Palpation
Précocement, on peut palper une encoche située à 4 à 5 cm au-
dessus de l’angle postéro-supérieur du calcanéus. Plus tard, elle est
comblée par l’hématome local, mais on retrouve à ce niveau une
douleur exquise très précise (fig. 3).
Bibliographie
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Place du traitement conservateur
dans les ruptures récentes et anciennes
du tendon calcanéen de l’adulte
12
S. BESCH, E. ROLLAND, J. RODINEAU, F. KHIAMI
Points essentiels
t La cicatrisation tendineuse varie en fonction de la topographie, du type
et du délai de l’ancienneté de la lésion.
t Le traitement conservateur comprend deux méthodes au choix : soit
orthopédique par botte (plâtre ou résine), soit fonctionnelle par système
amovible.
t Le traitement orthopédique doit respecter certains principes :
– de durée d’immobilisation prolongée (d’au moins 10 semaines) ;
– de rééducation progressive de la mobilité et de la force musculaire ;
– de protection de la flexion dorsale brutale de la cheville dans les 2 mois
qui suivent la levée de l’immobilisation.
t La pratique d’une échographie initiale permet de juger clairement de
la persistance ou non d’un diastasis entre les deux moignons tendineux
en flexion plantaire, facteur pronostique majeur pour le traitement
conservateur.
t L’arbre décisionnel thérapeutique repose sur : le type de rupture, le
patient (âge, niveau d’activités sportives et contraintes professionnelles),
l’expérience et l’habitude du praticien.
Traitements orthopédiques
Historique
La première description d’une ébauche de traitement orthopé-
dique peut être attribuée à Petit en 1772 qui utilisa un bandage
élastique destiné à limiter la tension des jumeaux ( flexion plantaire
maximale du pied associée à une flexion du genou) et la déambula-
tion sans appui. Ce bandage fut suivi du port d’une genouillère en
légère flexion et chaussage maintenant le pied en équin.
Dès 1841, de Lavacherie énonce les grands principes du trai-
tement orthopédique, toujours en vigueur de nos jours : « un
simple appareil empêchant la mobilité des bouts tendineux suffira
toujours pour seconder le travail de cicatrisation en permettant la
déambulation ».
Des techniques et protocoles aussi variés que mal systématisés, en
particulier sur la durée d’immobilisation, vont ensuite être propo-
sés, favorisant les ruptures itératives, complication redoutable attri-
buée dès lors au traitement orthopédique en général, et suscitant
la réflexion des chirurgiens pour développer un traitement plus
radical.
Il a fallu attendre une époque relativement récente pour que Lea
et Smith en 1968 [1] réactualisent le traitement orthopédique. En
se basant sur des études expérimentales démontrant les capacités
de cicatrisation spontanée du tendon calcanéen, ils proposent un
protocole thérapeutique en deux parties : 8 semaines d’immobi-
lisation par botte en équin de gravité, l’appui étant protégé par
deux cannes anglaises, suivies par un chaussage avec talonnette de
25 mm pendant 4 semaines.
En 1975, Rodineau, en France, rappelle l’intérêt du traitement
orthopédique. Son protocole est le suivant : botte en équin de
Place du traitement conservateur dans les ruptures récentes et anciennes du tendon calcanéen 135
gravité durant 4 semaines, avec appui autorisé dès la 48e heure sous
couvert d’une sandale à talon surélevé. Un second plâtre est confec-
tionné pour 4 semaines avec diminution de l’équin en l’absence
d’augmentation de la flexion dorsale. À l’ablation du plâtre, une
talonnette de 2 à 3 cm est mise en place, la hauteur étant diminuée
progressivement au cours des semaines suivantes. La rééducation
est alors débutée : les exercices proposés sont destinés à mettre en
charge et organiser le cal par un travail actif du triceps en course
interne puis moyenne contre résistance progressive (fig. 1).
Les différentes publications ultérieures vont alors non seulement
confirmer les bons résultats du traitement orthopédique, mais
aussi identifier ses risques et inconvénients :
– risque de rupture itérative (8 à 30 % selon les séries) ;
– risque d’allongement avec augmentation de la flexion dorsale ;
– amyotrophie et diminution de la force tricipitale ;
– délai d’immobilisation et de récupération plus longs qu’après
un traitement chirurgical.
A B
Fig. 1 – Bottes de marche du commerce (A) ou de confection artisanale (B).
Évolution
De nombreux auteurs vont proposer des changements au pro-
tocole initial afin de diminuer le risque de rupture itérative et les
séquelles fonctionnelles. Trois principaux paramètres vont faire
l’objet de discussions : la technique d’immobilisation (genouillère
ou botte), la durée d’immobilisation (stricte ou relative) et l’appui
autorisé ou non.
136 Traumatisme de la cheville
Technique d’immobilisation
12 Les jumeaux étant des muscles bi-articulaires, l’immobilisation
du genou a été proposée par certains pour diminuer les tractions et
limiter le risque de diastasis des deux moignons du tendon rompu.
La comparaison des résultats avec les séries laissant libre le genou
ne révèle cependant aucun bénéfice à ce type d’immobilisation
quant au risque de rupture itérative. En revanche, la gêne fonc-
tionnelle engendrée par le blocage du genou ne fait qu’accroître
les effets secondaires du traitement orthopédique (raideur, amyo-
trophie, indisponibilité professionnelle plus longue).
Durée d’immobilisation
Elle varie selon les séries. Elle comporte une période d’équin de
gravité de 1 à 6 semaines permettant d’obtenir un cal tendineux
par affrontement des extrémités, suivie d’une période avec réduc-
tion progressive de l’équin sur 4 à 6 semaines supplémentaires
afin de favoriser une mise en tension progressive du cal fibreux
primaire. Dans la plupart des cas, cette immobilisation stricte est
relayée par une talonnette limitant la flexion dorsale en appui pen-
dant la phase de rééducation. L’analyse de la littérature ne permet
pas de conclure sur une durée idéale d’immobilisation.
Des complications ont été retrouvées dans chacune des trois phases
du traitement :
– un enraidissement en cas d’immobilisation prolongée ;
– des allongements séquellaires tendineux avec augmentation de
la flexion dorsale en cas de réduction trop précoce de l’équin ;
– des ruptures itératives notées dans toutes les séries, pouvant
survenir jusqu’au 2e mois après l’ablation de l’immobilisation.
Malgré toutes les variantes proposées, quelques principes semblent
acquis :
– l’immobilisation en équin de gravité ou forcée ne doit pas
dépasser 6 semaines pour limiter le risque de raideur articulaire ;
– la réduction progressive de l’équin doit se faire par des plâtres
successifs, changés toutes les semaines, pour diminuer le risque
d’allongement tendineux, mais, si lors du changement de plâtre,
on constate une tendance à la persistance d’une flexion dorsale
augmentée, il ne faut pas hésiter à revenir à l’étape antérieure ;
– pour diminuer le risque de rupture itérative, l’immobilisation
doit être suffisamment longue (au moins 10 semaines) ;
– à la levée de l’immobilisation, le port d’une talonnette de 2 cm
est recommandé afin de diminuer le risque de mise en tension
brutale du tendon par flexion dorsale incontrôlée, tout en per-
mettant une « mécanisation » de celui-ci par la marche. Sa hau-
teur sera diminuée très progressivement en quelques semaines.
Autorisation d’appui
Certains auteurs ont adopté d’emblée la botte de marche en
équin de gravité, avec adjonction d’une sandale à talon surélevé
Place du traitement conservateur dans les ruptures récentes et anciennes du tendon calcanéen 137
Traitement fonctionnel
Historique
Des auteurs suisses et surtout allemands [3, 4] ont proposé un
traitement véritablement fonctionnel à partir de 1990. Le principe
138 Traumatisme de la cheville
Indications thérapeutiques
dans la rupture récente du tendon calcanéen
En fonction du patient
Un sujet sportif, a fortiori compétiteur, bénéficiera plus facile-
ment d’une technique chirurgicale, au mieux percutanée, avec des
suites utilisant le concept du traitement fonctionnel. En revanche,
un sujet âgé ou présentant des contre-indications locales ou géné-
rales à un geste chirurgical, voire à une immobilisation prolongée,
représente le profil idéal pour le recours à un traitement fonctionnel.
En fait, l’indication est surtout difficile pour le patient actif ayant
des activités sportives de loisirs et qui présente une rupture franche
en plein corps du tendon calcanéen.
Dans l’absolu, c’est la balance entre son désir de retour à son niveau
sportif antérieur et ses contraintes socioprofessionnelles, parfois
142 Traumatisme de la cheville
Conclusion
grande diversité des lésions observées tant par leur topographie que
leur ancienneté et les populations intéressées.
Bibliographie
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Place du traitement chirurgical
dans la rupture aiguë du tendon calcanéen 13
F. KHIAMI, S. BESCH, E. ROLLAND
Points essentiels
t La rupture du tendon calcanéen à la jonction myotendineuse est traitée
orthopédiquement ou fonctionnellement, et est exceptionnellement
chirurgicale.
t La rupture à l’insertion basse est toujours chirurgicale.
t La rupture en plein corps peut être traitée fonctionnellement,
orthopédiquement ou chirurgicalement.
t Les techniques percutanées semblent donner de bons résultats mais les
suites opératoires sont exigeantes.
t Le taux de rupture itérative après chirurgie est inférieur à 5 %.
Introduction
Résultats habituels
Les résultats du traitement chirurgical conventionnel dans les
différentes séries publiées [2-5] sont très satisfaisants en l’absence
de problème de cicatrisation cutanée. La cicatrisation tendineuse
est obtenue dans plus de 98 % des cas avec un tendon épaissi
sans augmentation de la flexion dorsale moyennant une raideur
minime en flexion plantaire. Le délai de reprise progressive des
activités sportives est de 3 à 4 mois, plus précoce et plus sûr
qu’après un traitement orthopédique.
Complications
Plus que le risque de rupture itérative (inférieur à 3 %), ce
sont surtout les problèmes de cicatrisation cutanée estimés entre
10 et 20 %, qui pénalisent les résultats du traitement chirurgi-
cal conventionnel. Ils peuvent être à l’origine de complications
infectieuses graves (2 à 3 %) avec désunion cutanée et nécrose
septique du tendon, imposant une excision chirurgicale. Le
plus souvent, les complications cicatricielles sont bénignes mais
très fréquentes (jusqu’à 20 % selon les séries), incluant adhé-
rences, cicatrice croûteuse instable et parfois névrome ou conflit
avec la chaussure. Elles génèrent des douleurs à la reprise de la
marche ou à la course, ainsi qu’une gêne fonctionnelle parfois
permanente sans solution thérapeutique vraiment efficace.
Place du traitement chirurgical dans la rupture aiguë du tendon calcanéen 149
Justification
Du fait de ces complications, certaines modifications de la tech-
nique chirurgicale conventionnelle classique doivent être aban-
données (plastie tendineuse d’emblée), alors que d’autres méritent
d’être conservées (abord mini-invasif).
Le recours à une colle biologique, parfois utilisée seule par certains
[6], peut devenir une alternative simple et efficace à la suture ten-
dineuse si les résultats des premières séries sont confirmés.
Pour éviter plus sûrement les complications cutanées et infectieuses,
certains auteurs ont proposé à la suite d’une publication d’Aldam
[7] des techniques mini-invasives. Le principe est de réduire la voie
d’abord à la zone de rupture par une incision cutanée horizon-
tale limitée (2 à 3 cm), mais suffisante pour réaliser et vérifier le
contact des extrémités tendineuses. Certaines techniques décrivent
des méthodes de suture directe, mais d’autres nécessitent l’utili-
sation d’un appareillage spécial dont le plus connu est l’achillon
d’Assal [8]. L’analyse des séries chirurgicales [9, 10] semble montrer
de meilleurs résultats anatomiques et fonctionnels qu’avec les tech-
niques classiques. Il n’y a quasiment pas de complications locales,
mais un risque de rupture itérative persistant, expliqué par le type
de la lésion tendineuse dont la suture n’est pas toujours accessible
à une voie d’abord limitée ou par un protocole postopératoire non
respecté compte tenu de la simplicité des suites.
Malgré ces bons résultats, au début des années 1990, les difficultés
techniques ou la disponibilité d’un appareillage adapté ont plutôt
favorisé le développement des techniques percutanées.
Conclusion
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154 Traumatisme de la cheville
Points essentiels
t Le diagnostic de luxation des fibulaires est rarement fait à la phase aiguë.
t Le diagnostic est clinique et facilité par l’échographie.
t Le test de Sobel peut reproduire la luxation et permettre un diagnostic
de certitude.
t La radiographie est indispensable et peut permettre le diagnostic dans le
stade 3.
t Le traitement de référence est chirurgical.
Introduction
Anatomie
Clinique
Fig. 1 – Test de Sobel. La manœuvre consiste à réaliser une éversion contrariée qui peut
reproduire la luxation.
Luxation des tendons fibulaires 161
Examens complémentaires
Ils ne sont pas indispensables au stade initial lorsque le diagnos-
tic est évident. De la même manière, au stade de chronicité, dans
un contexte évocateur associé à un examen clinique sans équi-
voque, le bilan paraclinique peut se résumer au strict minimum.
Inversement, devant une évolution traînante malgré le traitement
institué, les examens complémentaires permettent souvent de cor-
riger un diagnostic erroné. Ces examens sont variés et d’apports
différents.
Au stade aigu, seules la radiographie et l’ échographie sont utiles.
La radiographie standard de cheville comporte deux clichés systé-
matiques de face et de profil, complétés au besoin d’une face en
rotation médiale de 20°, déroulant la mortaise tibio-talienne et
l’articulation tibio-fibulaire inférieure. Généralement, la radiogra-
phie standard est normale, ce qui doit être faussement rassurant.
Beaucoup plus rarement, le seul et très rare signe pathognomo-
nique de la luxation des fibulaires peut être mis en évidence, sous
la forme d’un fragment cortical postérieur de la malléole latérale
arraché en « coup d’ongle », définissant le stade 3 d’Eckert et Davis.
L’ échographie est le meilleur examen d’orientation et de dépistage
qui lève, à lui seul, entre des mains expérimentées, tout doute
diagnostique. L’échographie analyse la position des tendons, véri-
fie l’absence de « twist » tendineux, élimine une fissuration, une
rupture, détermine le contenu de la gaine et met en évidence une
anomalie du nombre de tendons. L’échographie permet en outre
d’analyser la cheville et le pied dans leur intégralité guidée par
l’examen clinique (plans ligamentaires, tendon calcanéen ou tibial
postérieur…). La rentabilité diagnostique, le faible coût, la disponi-
bilité associés aux caractères dynamique et comparatif de l’échogra-
phie en font un examen de référence dans la pathologie tendineuse,
en général, et de la cheville en particulier. Selon Grant [14], les
ultrasons peuvent être considérés comme l’examen de référence en
première intention pour établir un diagnostic de certitude.
Néanmoins, elle souffre des inconvénients classiques de l’échogra-
phie (opérateur-dépendant, courbe d’apprentissage longue, excel-
lence du matériel…), et de la difficulté de réaliser un examen de
contact sur une cheville douloureuse et œdématiée.
Au stade chronique, la radiographie reste utile, associée à l’IRM
ou à la tomodensitométrie (TDM). Cependant, ces examens ne
relèvent pas de l’urgence et sont utiles en consultations spécialisées.
L’imagerie par résonance magnétique [15] permet une excellente
analyse des parties molles, comme les anomalies myologiques
du peroneus quartus, les lésions fissuraires tendineuses, les sur-
nombres tendineux, les lésions des plans ligamentaires souvent
associées. L’IRM dynamique aura probablement sa place dans les
années à venir.
162 Traumatisme de la cheville
Traitement
Indications
Conclusion
Bibliographie
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166 Traumatisme de la cheville
Points essentiels
t La rupture du tibial postérieur est une affection du compartiment médial
de la cheville et de l’arrière-pied.
t L’affaissement progressif de l’arche médiale du pied sous la forme d’un
pied plat valgus doit faire suspecter en premier lieu une lésion du tibial
postérieur.
t Deux tests cliniques orientent le diagnostic : la perte de force du pied
lors d’une manœuvre d’inversion contrariée, et la perte de varisation de
l’arrière-pied lors d’une montée en demi pointe (examiné de dos).
t L’échographie est l’examen le plus utile au diagnostic à la phase aiguë,
l’IRM à la phase chronique.
t Le type de traitement est conditionné par l’importance du retentissement
fonctionnel, l’âge et la demande fonctionnelle du patient, la réductibilité
du pied plat valgus et l’importance de la déformation du pied.
Mécanisme
Le mécanisme lésionnel correspond à une contraction brutale
du muscle tibial postérieur dans une position d’étirement extrême
du tendon, qui peut se rompre soit en plein corps, notamment
en sous-malléolaire, ou alors se désinsérer du tubercule médial du
scaphoïde constituant un arrachement osseux.
Ce tableau survient le plus souvent lors d’accidents sportifs.
Examen clinique
La présentation clinique est assez stéréotypée et associe une
impotence fonctionnelle partielle du pied et de la cheville, une boi-
terie et une douleur localisée dans la région médiale de la cheville
et de l’arrière-pied.
L’inspection permet de constater un empâtement ou une tuméfac-
tion périmalléolaire médiale. En fonction du siège de la rupture,
cet empâtement ou cette tuméfaction pourra siéger de manière
préférentielle en arrière de la malléole médiale ou au-dessous. La
palpation oriente vers une région précise électivement douloureuse.
Rupture du tendon tibial postérieur 171
Examens complémentaires
Les examens complémentaires associent un bilan radiogra-
phique classique de face et de profil de la cheville ainsi qu’une
incidence du pied de face et de profil afin d’éliminer toutes les
causes osseuses de douleur du compartiment médial (fracture de la
malléole médiale, fracture du naviculaire…). Elles permettront par
ailleurs de dépister les arrachements osseux à l’insertion du tibial
postérieur.
Lorsque la radiographie est normale et que l’examen clinique
oriente vers une atteinte du compartiment médial, l’objectif initial
est de préparer la cheville à un examen programmé plus spécialisé.
Cette étape préliminaire nécessite un traitement anti-douleur et
anti-œdémateux, la mise en décharge, le glaçage et la contention
relative.
172 Traumatisme de la cheville
Traitement curatif
Dans le cas d’une rupture aiguë dépistée tôt, le traitement de
référence est la chirurgie, dont le principe est la régularisation des
moignons tendineux, ainsi que la suture directe qui autorise une
cicatrisation de bonne qualité. Les suites comportent une immo-
bilisation de la cheville dans une botte en résine à angle droit pour
6 semaines sans appui. Puis, la botte est retirée et remplacée par
une semelle rehaussant l’arche médiale du pied pour protéger et
soulager le tendon. La rééducation débute à la levée de l’immobi-
lisation afin de récupérer les amplitudes articulaires. Le renforce-
ment débutera entre le 3e et le 4e mois postopératoire.
Rupture chronique
Anatomopathologie
L’anatomopathologie des lésions permet de comprendre pour-
quoi la tendinopathie chronique évolue sous différentes formes. Il
peut être diversement constaté des pathologies de friction dans la
gaine associant des ruptures partielles, une fissuration longitudi-
nale ou une véritable rupture intratendineuse sans discontinuité
aboutissant à un allongement résiduel séquellaire.
La rupture peut aussi se faire avec une discontinuité des fragments
tendineux ou un arrachement au niveau du tubercule du navicu-
laire constituant le point de démarrage de la déformation de l’ar-
rière-pied et de l’affaissement de l’arche interne dès le moment où
il existe cet allongement tendineux.
Rupture du tendon tibial postérieur 173
Présentation clinique
Le patient, qui le plus souvent consulte en dehors du circuit des
urgences, localise plus précisément la zone douloureuse et fournit
de nombreux examens complémentaires déjà prescrits.
Le tableau est celui d’une tendinopathie chronique qui évolue
depuis plusieurs mois, voire plusieurs années, avec parfois des
périodes de rémission complètes des douleurs, le plus souvent en
rapport avec une baisse de l’activité physique. Ce tableau moins
bruyant peut aboutir à une rupture chronique, progressive par
allongement dégénératif du tendon, un affaissement de l’arche
interne du pied (fig. 2) et une dislocation progressive de l’arrière-
pied qui devient plat et valgus avec une modification progressive
des appuis de l’arrière-pied [4].
Cliniquement, le patient décrit une douleur rétromalléolaire, sous-
malléolaire ou prémalléolaire médiale, avec un empâtement pro-
gressif qui peut diminuer au repos. Il peut au contraire se plaindre
de douleurs traçantes sur le trajet du tibial postérieur.
Le testing clinique consiste à analyser l’inversion du pied ainsi que
l’inversion contrariée de celui-ci. Ce test peut provoquer des dou-
leurs traçantes le long du trajet du tendon ou alors un déficit de la
force motrice.
Au stade chronique, il est important d’analyser le patient de dos
afin de vérifier l’absence de constitution d’un pied plat valgus et
de l’effondrement de l’arche interne. La montée en demi-pointe
permettra de constater l’absence de varisation de l’arrière-pied qui
signera la dysfonction du tibial postérieur.
Fig. 2 – Effondrement de l’arche médiale du pied gauche aboutissant à un pied plat valgus.
Il est possible de visualiser le 4e orteil gauche, alors qu’à droite, il n’apparaît pas
(photo du Pr Rodineau).
Examens complémentaires
Devant ce tableau plus chronique, les examens complémentaires
doivent privilégier les radiographies mais surtout l’échographie du
compartiment médial du pied et de la cheville.
174 Traumatisme de la cheville
Attitude thérapeutique
Selon l’exigence fonctionnelle du patient, sa disponibilité et le
terrain, le choix thérapeutique pourra être influencé, de même que
l’invasivité de la solution à mettre en place.
Sur le plan thérapeutique [5], contrairement à une rupture aiguë,
la rupture chronique sur terrain de tendinopathie doit faire appel
à des mesures conservatrices surtout chez les patients à faible
demande fonctionnelle. Celles-ci insisteront sur la rééducation
fonctionnelle, la mise en place d’orthèses plantaires avec soutien
de l’arche interne pour soulager le tendon et l’utilisation d’anti-
inflammatoires pour calmer les phénomènes douloureux locaux.
En l’absence d’efficacité de ce traitement conservateur, surtout si
le tendon s’allonge ou est totalement rompu, si l’arrière se désaxe
avec une arche interne qui s’effondre rapidement, de même que
chez les patients sportifs à haute demande fonctionnelle, la chirur-
gie peut devenir indiquée. Celle-ci fera appel à des techniques de
suture directe en cas de rupture réparable sans tension, de plastie
tendineuse locale (fléchisseur des orteils ou tendon tibial anté-
rieur par exemple) voire à des autogreffes pour une reconstruction
tendineuse en cas de rupture non réparable chez des sujets jeunes.
La chirurgie peut en outre être très invasive, surtout lorsqu’il existe
une déformation de l’arrière-pied, et peut associer des arthrodèses
localisées, notamment sous-taliennes pour éviter ou corriger la
dislocation et le pied plat valgus [6].
Au total, la rupture du tendon tibial postérieur est une patholo-
gie qui doit être recherchée devant tout traumatisme aigu de la
cheville avec souffrance du compartiment médial, ou devant toute
Rupture du tendon tibial postérieur 175
Bibliographie
1. Saillant G, de Labareyre H, Roy-Camille R (1990) Ruptures of the tibialis
posterior tendon. A clinical and therapeutic study apropos of 13 cases. Rev
Chir Orthop Reparatrice Appar Mot 76: 559-67
2. Marcus RE, Goodfellow DB, Pfister ME (1995) The difficult diagnosis of
posterior tibialis tendon rupture in sports injuries. Orthopedics 18: 715-21
3. Foster AP, Thompson NW, Crone MD, Charlwood AP (2005) Rupture of the
tibialis posterior tendon: an important differential in the assessment of ankle
injuries. Emerg Med J 22: 915-6
4. Pomeroy GC, Pike RH, Beals TC, Mannoli A (1999) Acquired flatfoot in
adults due to dysfunction of the posterior tibial tendon. J Bone Joint Surg
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5. Myerson MS. Adult acquired flatfoot deformity (1996) Treatment of
dysfunction of the posterior tibial tendon. J Bone Joint Surg 78-A: 780-92
6. Resnick RB, Jahss MH, Choueka J, Kummer F, Hersch JC, Okereke E (1995)
Deltoid ligament forces after tibialis posterior tendon rupture: effects of triple
arthrodesis and calcaneal displacement osteotomies. Foot Ankle Int 16: 14-20.
Erratum in: Foot Ankle Int 1995 ; 16 : 314
Autres
tendons II-3D
Lésions du tendon tibial antérieur
et de l’extenseur commun des orteils 16
A. FREY
Points essentiels
t Les lésions traumatiques des tendons des muscles extenseur commun
des orteils et/ou tibial antérieur sont souvent de diagnostic méconnu en
urgence.
t Deux grands types de mécanisme sont à l’origine des lésions de ces
tendons : le traumatisme direct provoquant une rupture tendineuse
(soit complète, soit incomplète) et les atteintes microtraumatiques
entraînant des tendinopathies, des ténosynovites pouvant se compliquer
secondairement, elles aussi, de rupture.
t Le diagnostic est facile à évoquer, à condition de réaliser un examen
clinique complet de la cheville et de l’avant-pied.
t Une imagerie simple, radiographie standard et échographie, suffit la
plupart du temps pour établir le diagnostic.
t Le traitement des ruptures est le plus souvent chirurgical.
Rappel anatomique
Le muscle tibial antérieur est un muscle profond situé dans la
loge antéro-latérale de la jambe. Son insertion proximale se situe
sur le versant latéral de la tubérosité tibiale, les deux tiers supé-
rieurs de la face latérale du tibia et sur la partie adjacente de la
membrane interosseuse et du fascia crural. Le corps musculaire se
prolonge par un tendon puissant qui descend verticalement avec
un point de réflexion au niveau du rétinaculum des extenseurs où
le tendon passe dans un dédoublement du feuillet anatomique ;
c’est à cet endroit qu’il peut exister des conflits mécaniques à l’ori-
gine des tendinopathies corporéales. Son insertion distale se situe
sur le bord médial de l’os cunéiforme médial et sur la base du
1er métatarsien.
Physiopathologie
Hormis les ruptures provoquées par un agent externe, les prin-
cipales lésions rencontrées au niveau du tendon du tibial antérieur
sont des tendinopathies voire des ténosynovites secondaires à des
phénomènes de friction lors de son passage dans le ligament annu-
laire antérieur [2]. Les ruptures par étirement tendineux brutal
(flexion plantaire non contrôlée) sont rares, survenant le plus sou-
vent sur un tendon fragilisé (sujet âgé, antécédents de tendino-
pathie chronique, infiltrations locales…). Les ruptures spontanées
doivent faire rechercher une pathologie inflammatoire chronique
(goutte) ou la prise de statines [3].
Les ruptures peuvent être totales ou partielles (fissure longitudinale) :
– les ruptures complètes peuvent se produire à deux endroits :
soit au niveau des poulies de réflexion, soit au niveau de l’inser-
tion distale avec parfois arrachement d’une pastille osseuse ;
– les fissures longitudinales, beaucoup plus rares, siègent le plus
souvent au niveau du passage sous le rétinaculum [4].
Examen clinique
Radiographie
Elle est réalisée de principe. Les incidences demandées sont :
– une cheville (face et profil strict) ;
– un avant-pied de face et de trois quarts dégageant bien l’inter-
ligne cunéo-métatarsienne.
Cette imagerie permet de rechercher des signes évocateurs de la
lésion tendineuse (arrachement osseux au niveau de la sone d’in-
sertion, présence d’ostéophytes taliens antérieurs [2] ou d’éliminer
d’autres diagnostics (fracture, tumeur, calcifications…).
Échographie
Elle permet d’étudier le tendon (rupture, fissure, nodule, épais-
sissement) et sa gaine (épanchement, gonflement) et de localiser
avec précision la lésion.
À distance, en consultation spécialisée, on peut parfois deman-
der une IRM pour analyser finement les lésions, notamment les
tendinopathies fissuraires.
Quels traitements ?
Conclusion
Bibliographie
1. Raguet M (2008) Les ruptures du tendon du muscle tibial antérieur. J
Traumatol Sport 25: 214-8
2. Fadel GE, Alipour F (2008) Rupture of the extensor hallucis longus tendon
caused by talar neck osteophyte. Foot Ankle Surg 14: 100-2
3. Jerome JT, Varghese M, Sankaran B, Thomas S, Thirumagal SK (2008)
Tibialis anterior tendon rupture in gout--case report and literature review.
Foot Ankle Surg 14: 166-9
4. Jellad A, Salah S, Bouaziz MA, Bouzaouache H, Ben Salah Z (2012) Unusual
clinical presentation of a partial tibialis anterior rupture. Ann Phys Rehabil
Med 55: 38-43
Fausses entorses
de la cheville II-4
Fausses entorses de cheville :
les fractures de la base du 5e métatarsien 17
F. LEDON ET J.B. COURROY
Points essentiels
t La clinique : ne pas penser systématiquement devant un traumatisme
de la cheville et/ou du pied : c’est une entorse de cheville ; palper
systématiquement la base du 5e métatarsien et faire le test du CPL qui fait
partie du bilan du pied traumatique.
t La radiographie : dans tout traumatisme des pied/cheville, faire un
3/4 déroulé du pied centré sur le médio-pied. Sur ces radiographies,
chercher le trait transversal partiel peu apparent des fractures métaphyso-
diaphysaires proximales.
t Le traitement est d’emblée chirurgical pour les fractures métaphyso-
diaphysaires proximales et les fractures articulaires déplacées chez les
actifs comme chez les sportifs.
t Le temps de consolidation de toutes les fractures de la base est très long :
8 à 10 semaines dont 4 sans appui.
t En attente de la confirmation de la lésion, mettre le pied en décharge
(canne anglaise ou chaussure).
Introduction
Interrogatoire
Examen clinique
Types de fractures
La classification propo-
sée par Stewart distingue
différents types fracturaires
en fonction de la localisa- Fig. 1 – Zones des fractures :
vert et bleu : épiphysaires proxi-
tion du trait de fracture : males ; vert : styloïde ; bleu :
styloïdienne, épiphysaire articulaire ; jaune : métaphyso-
et métaphyso-diaphysaire diaphysaires proximales : frac-
tures de Jones et fractures de
proximales, ou diaphysaire fatigue. Collection F. Ledon,
(fig. 1). J.B. Courroy.
190 Traumatisme de la cheville
Fig. 4 – Os péronier Fig. 5 – Fracture épi- Fig. 6 – Fracture épi- Fig. 7 – Fracture épi-
situé à la face plantaire physaire proximale physaire proximale physaire proximale
du cuboïde. articulaire sans dépla- avec déplacement par avec déplacement,
cement ; traitement arrachement néces- traitement chirurgi-
orthopédique mais sitant un traitement cal par hauban (ou
traitement chirurgical chirurgical chez les vissage).
chez le sportif de haut sportifs de haut niveau,
niveau par vissage. les jeunes sportifs.
Pour les autres, discus-
sion au cas par cas.
Traitement
Bibliographie
17
1. Besch S, Peyre M, Rodineau J, Riou B (2008) Fractures de la base du
5e métatarsien : quel(s) traitement(s) ? In : Rodineau J, Besch S, eds. La
cheville traumatique : des certitudes en traumatologie du sport. Paris, Masson.
p. 159-72
2. Stewart IM (1960) Jones’s fracture: fracture of base of fifth metatarsal. Clin
Orthop 16: 190-8
Entorses du médio-pied ou de Chopart
18
J. DE LÉCLUSE
Points essentiels
t Tout traumatisme en inversion du pied doit faire rechercher
systématiquement une lésion du médio-tarse.
t Une lésion du médio-tarse médial est rarement isolée.
t L’incidence radiographique du trois quarts déroulé du pied est nécessaire
pour le diagnostic lésionnel.
t Un traitement antalgique initial efficace conditionne les suites.
t Le traitement orthopédique est réservé aux entorses avec lésions osseuses.
18 Articulation talo-naviculaire
La tête convexe du talus vient s’emboîter sur la face postérieure
concave de l’os naviculaire, sur la facette antéro-médiale de la face
dorsale du calcanéus et sur le ligament calcanéo-naviculaire infé-
rieur. Trois ligaments stabilisent cette articulation (figs. 1 et 2).
– Le ligament calcanéo-naviculaire inférieur, ou spring ligament
des Anglo-Saxons [4]. Sa couche profonde reçoit la face infé-
rieure de la tête du talus. Sa couche superficielle, épaisse et
solide, est tendue du sustentaculum tali à la face inférieure et à
l’extrémité médiale de l’os naviculaire. Son rôle principal est de
maintenir la voûte plantaire.
– Le ligament talo-navicualire supérieur. Il est tendu de la face
dorsale du col du talus au versant postérieur du bord supérieur
de l’os naviculaire. Il reçoit des renforcements provenant des
faisceaux antérieurs du ligament deltoïde.
– Le ligament calcanéo-naviculaire latéral. C’est le faisceau
médial du ligament bifurqué (ou en « Y » de Chopart). De son
attache commune sur la face dorsale de la grande apophyse du
calcanéus, il s’élargit pour venir se fixer sur l’extrémité latérale
de l’os naviculaire, s’unissant par son bord inférieur avec le
ligament calcanéo-naviculaire inférieur.
Articulation calcanéo-cuboïdienne
La surface articulaire du calcanéus, orientée en avant et en dedans,
est convexe transversalement et concave dans le sens vertical. La sur-
face articulaire du cuboïde présente une double courbure qui s’oppose
à celle de la surface du calcanéus. Elle est concave transversalement
et convexe dans le sens vertical, prenant une disposition dite en
« selle ». Trois ligaments stabilisent cette articulation (figs. 1 et 2).
Fig. 1 – Vue dorsale du médio-tarse. 1 : liga- Fig. 2 – Vue plantaire du médio-tarse. 1 : liga-
ment deltoïde, tibio-naviculaire ; 2 : ligament ment calcanéo-cuboïdien plantaire ; 2 : liga-
talo-naviculaire supérieur ; 3 : ligament bifur- ment deltoïde, tibio-naviculaire ; 3 : ligament
qué, calcanéo-naviculaire latéral ; 4 : ligament calcanéo-naviculaire inférieur ou plantaire.
bifurqué, calcanéo-cuboïdien médial ; 5 : liga-
ment calcanéo-cuboïdien dorsal.
Entorses du médio-pied ou de Chopart 197
Clinique
Symptômes
Formes mineures
L’accident initial peut passer inaperçu. La poursuite des activi-
tés est possible sans gêne particulière. C’est au décours des activi-
tés physiques, voire le lendemain, que les symptômes douloureux
apparaissent. Le déroulement du pas est sensible et la montée sur
demi-pointe est inconfortable.
Dans d’autres cas, les douleurs initiales sont minimes, permettant
la poursuite des activités mais toute accélération du pas ainsi que
la marche sur un sol inégal réveillent les douleurs. Par la suite, les
douleurs présentes lors du pas postérieur imposent de marcher le
pied à plat sans dérouler le pas.
Formes graves
L’accident est net. Un craquement est souvent perçu. Le sujet a
eu une sensation que « son pied s’est tordu ». Les douleurs sont vives
et diffuses sur l’ensemble du pied. L’impotence est immédiate et
complète : l’appui au sol est très douloureux. Un œdème, volon-
tiers ecchymotique, apparaît rapidement sur la face dorsale et le
bord latéral du médio-pied pour ensuite s’étendre sur l’ensemble
du pied.
Examen clinique
Diagnostic positif
L’aspect du pied varie en fonction de la gravité de l’entorse et
de son étendue lésionnelle : du simple empâtement localisé au
médio-pied (fig. 3), à l’impressionnant pied traumatique aigu avec
ecchymose et gonflement global du cou-de-pied.
Si la marche est possible, la phase d’impulsion est écourtée car
douloureuse. La montée et la tenue sur la demi-pointe exacerbent
les douleurs.
L’étude de la mobilité passive du médio-pied s’effectue en immo-
bilisant l’arrière-pied d’une main et en agissant sur les métatarsiens
de l’autre (fig. 4). L’abaissement du 1er rayon et l’élévation du 5e
évaluent la pronation ; la manœuvre inverse évalue la supination ;
en élevant puis en abaissant l’avant-pied, on apprécie la flexion dor-
sale et plantaire et en poussant l’avant-pied en dedans et en dehors,
on évalue respectivement l’adduction et l’abduction (fig. 5).
200 Traumatisme de la cheville
18
Diagnostic lésionnel
Dans l’entorse calcanéo-cuboïdienne, l’ensemble des signes cli-
niques se localise sur le bord latéral du médio-pied. Le gonfle-
ment initial puis l’ecchymose apparaissent d’emblée à distance de
la malléole latérale. L’appui se fait préférentiellement sur l’arche
interne du pied. L’adduction et la supination passives sont les mou-
vements les plus douloureux. La palpation de l’interligne calcanéo-
cuboïdien reproduit les douleurs.
Dans l’entorse talo-naviculaire, le gonflement localisé en regard
de l’interligne est discret et l’ecchymose peu fréquente. L’appui se
fait plutôt sur le bord latéral du pied afin d’éviter l’abaissement
de l’arche interne. Les mouvements d’abduction et de pronation
reproduisent les douleurs médiales, tout comme la palpation locale.
Dans l’entorse globale de l’articulation transverse du tarse, les
signes cliniques sont importants. Le gonflement s’étend sur tout le
pied. L’appui est douloureux et la marche s’effectue en mobilisant
en bloc le médio-pied. Toutes les manœuvres sollicitant ce dernier
sont douloureuses.
L’entorse latérale du pied, consécutive à un mouvement de supina-
tion force, correspond à des lésions ligamentaires de l’articulation
transverse du tarse mais aussi, à un moindre degré, aux articula-
tions adjacentes : talo-crurale, sous-talienne et tarso-métatarsienne
latérale. L’examen de ces dernières révèle des signes de lésions cap-
sulo-ligamentaires, mais l’ensemble des anomalies cliniques et les
douleurs prédominent sur l’articulation calcanéo-cuboïdienne.
Diagnostic différentiel
Entorse talo-crurale
Rarement le diagnostic d’entorse médio-tarsienne est porté
devant une entorse talo-crurale latérale ; le plus souvent, c’est
l’inverse qui se produit. Les signes d’entorse talocrurale sont bien
connus et font l’objet d’un chapitre particulier.
Entorse sous-talienne
Parfois associée à une entorse tarso-métatarsienne, l’entorse
sous-talienne, dans ce cas, fait suite à un mouvement d’inversion.
La difficulté diagnostique résulte de la pauvreté et le peu de spéci-
ficité des signes cliniques de cette entorse. Ainsi, devant tout trau-
matisme en inversion du pied, il faut penser à une possible atteinte
de l’articulation sous-talienne isolée mais le plus souvent associée à
une entorse talo-crurale et/ou transverse du tarse.
Entorse tarso-métatarsienne
Les mécanismes lésionnels des entorses tarso-métatarsiennes
latérales sont similaires à ceux de l’entorse calcanéo-cuboïdienne.
Le diagnostic d’une atteinte tarso-métatarsienne se fonde sur la
présence initiale d’un gonflement localisé et sur la reproduction
202 Traumatisme de la cheville
Examens complémentaires
Radiographies
Selon les règles d’Ottawa [7], devant un traumatisme récent du
pied, la prescription d’un bilan radiographique est justifiée lorsque
la palpation de l’os naviculaire et/ou de la styloïde du 5e métatar-
sien est douloureuse, chez un patient âgé de plus de 18 ans et de
moins de 55 ans, ou qu’il est dans l’incapacité de prendre appui
et de faire deux pas. Ces critères cliniques ont été validés pour
la recherche de fractures, mais pas précisément pour les avulsions
osseuses.
Le bilan radiologique de base comporte les incidences du pied de
face, de profil et un trois quarts déroulé du pied. On peut être
amené à demander un cliché supplémentaire de la cheville de face
en légère rotation interne en cas de doute sur l’intégrité des articu-
lations talo-crurale ou sous-talienne (entorse latérale du pied).
Ces incidences radiologiques permettent d’éliminer les fractures-
luxations [8] et de distinguer les fractures des avulsions osseuses
capsulo-ligamentaires (fig. 6). Ces dernières se situent habituel-
lement à la partie supérieure et latérale du calcanéus et du cuboïde,
et sur le versant dorsal et médial de l’os naviculaire et du talus
(fig. 7). L’incidence de face permet de voir les avulsions du liga-
ment calcanéo-naviculaire inférieur et, plus rarement, du ligament
calcanéo-cuboïdien inférieur. L’incidence de profil visualise les
avulsions du ligament talo-naviculaire supérieur. Les avulsions des
ligaments calcanéo-cuboïdien médial et dorsal, et les fractures-
arrachements de la longue apophyse du calcanéus, sont mises en
évidence sur l’incidence de trois quarts déroulé du pied.
Entorses du médio-pied ou de Chopart 203
Échographie
Cet examen n’apporte pas d’élément supplémentaire au diagnostic
clinique et radiologique, contrairement aux entorses talo-crurales [9].
Tomodensitométrie
Elle est parfois nécessaire pour confirmer l’existence d’une frac-
ture parcellaire par impaction d’un os du tarse suspectée sur le
bilan radiographique. Cet examen permet également d’évaluer
avec précision le déplacement fracturaire pouvant orienter le choix
thérapeutique (fig. 9).
204 Traumatisme de la cheville
Traitement
Traitement orthopédique
Devant un pied hyperalgique, d’autant qu’il s’agit d’un patient
pusillanime, la confection d’une botte en résine confortable permet
de diminuer de façon spectaculaire les phénomènes douloureux.
La durée de cette immobilisation « protectrice » est courte, de 5
à 10 jours ; elle est ensuite relayée par un traitement fonctionnel.
Le traitement orthopédique reste indiqué dans les formes graves
avec fractures ou arrachements osseux. La botte résine est conser-
vée 4 à 6 semaines et est suivie de séances de rééducation. L’appui
est autorisé s’il est indolore.
Traitement fonctionnel
Le but est de remettre rapidement en fonction le pied en limitant
les mouvements du médio-pied par la pose d’un bandage circulaire
de type strapping (fig. 10). L’appui est repris rapidement avec des
chaussures basses, de préférence à semelles rigides. Un soutien tem-
poraire de l’arche plantaire médial dans les entorses talo-navicu-
laires, latéral dans les entorses calcanéo-cuboïdiennes, diminue les
contraintes ligamentaires et facilite ainsi la reprise d’une marche
indolore. Quelques séances de rééducation aident à la récupération
de la fonction dynamique du pied. Ce traitement, indiqué dans
les entorses bénignes et de gravité moyenne, donne d’excellents
résultats et permet une reprise des activités physiques en quelques
jours. Dans les entorses graves sans lésion radiologique, passée la
Entorses du médio-pied ou de Chopart 205
Complications – Séquelles
Syndrome algodystrophique
La survenue de ce syndrome douloureux régional chronique
est largement favorisé par : un traitement initial inefficace contre
les phénomènes douloureux et de stase, une contention mal adap-
tée dans sa réalisation et/ou sa durée, une reprise prématurée des
activités physiques.
206 Traumatisme de la cheville
18 Instabilité
Elle est rare et est souvent associée à une instabilité talocrurale
et/ou sous-talienne. Il s’agit plus fréquemment d’une instabilité
fonctionnelle que clinique. Les clichés dynamiques comparatifs
peuvent mettre en évidence une laxité unilatérale mais leur inter-
prétation est délicate. Le traitement est avant tout conservateur :
rééducation proprioceptive de la cheville et du pied, avec parfois
réalisation d’un bandage ou le port de semelles orthopédiques lors
des activités physiques.
Raideur articulaire
À long terme, la répétition de microtraumatismes et les frac-
tures parcellaires de l’articulation transverse du tarse sont à l’ori-
gine d’une installation progressive d’une raideur articulaire par
phénomènes arthrosiques. Essentiellement calcanéo-talo-navicu-
laire, cette arthrose est relativement bien tolérée.
Conclusion
Bibliographie
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frequency and course of recovery. Foot Ankle Int 17: 196-9
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midtarsal joint and lesser tarsal bones. J Am Acad Orthop Surg 6: 249-58
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Bouysset M, ed. Le pied en rhumatologie. Paris, Springer-Verlag. p. 1-16
4. Rule J, Yao L, Seeger LL (1993) Spring ligament of the ankle: normal MR
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Le pied en rhumatologie. Paris, Springer-Verlag. p. 17-23
Entorses du médio-pied ou de Chopart 207
Points essentiels
t Il faut faire la différence entre les chevilles post-traumatiques et celles qui
sont atraumatiques (« overuse »).
t Il faut savoir reprendre totalement l’interrogatoire et l’examen clinique
devant une cheville douloureuse chronique.
t Les entorses de cheville d’évolution lente sont un diagnostic de dernier
recours.
t Les radiographies et l’échographie relèvent du service des urgences, la
tomodensitométrie et l’IRM seront discutées en consultation de suivi.
t Le traitement va de la simple infiltration à l’arthrodèse de cheville,
justifiant une prise en charge précoce pour limiter les séquelles.
19 Démarche diagnostique
Interrogatoire
Devant une plainte fonctionnelle, l’enquête clinique, quelle
que soit la spécialité, débute par l’interrogatoire. Celui-ci s’attache
à faire préciser le ou les symptômes dont la douleur est le plus
souvent au premier plan.
Préciser les symptômes
Il convient de préciser le mode d’apparition, la durée d’évolu-
tion, la localisation, l’intensité et le retentissement fonctionnel. Si
la douleur prédomine souvent, d’autres signes fonctionnels doivent
être recherchés tels que des blocages articulaires, des craquements
ou claquements, un gonflement global ou localisé, une instabi-
lité, une limitation des amplitudes articulaires, une boiterie, une
perte de force, des troubles neurologiques (paresthésies-hypoesthé-
sie-anesthésie)… entre autres. Chacun de ces différents éléments
concourt à établir une première appréciation diagnostique qui
peut sensibiliser et orienter l’examen physique. À titre d’exemple,
des phénomènes douloureux antérieurs associant des craquements
et un gonflement aux efforts évoquent fortement une pathologie
articulaire, contrairement à une douleur postérieure calcanéenne
irradiant au mollet qui oriente vers une pathologie tendineuse
calcanéenne.
Contexte micro- ou macrotraumatique
Un contexte sportif exigeant doit faire évoquer toutes les patho-
logies dites « d’overuse », telles que les fractures de fatigue, les
conflits articulaires ou les tendinopathies. À l’inverse de ces patho-
logies de surcharge, il est essentiel de reconnaître et de faire pré-
ciser la notion de traumatisme plus ou moins ancien qui orientera
vers toutes les affections post-traumatiques souvent méconnues au
stade initial pouvant décompenser à un stade plus avancé voire au
stade de complications.
Préciser le mécanisme lésionnel
La reconnaissance du mécanisme lésionnel peut apporter d’in-
nombrables informations utiles à la formulation d’un diagnostic.
Un traumatisme en varus de la cheville évoquera fortement des
séquelles d’une entorse banale mal soignée ou sur laquelle des
lésions associées sont passées inaperçues (fracture ostéo-chondrale,
fracture du processus latéral du talus, rupture tendineuse mécon-
nue…). Un traumatisme en flexion dorsale et rotation latérale fera
rechercher une lésion de l’articulation tibio-fibulaire inférieure.
Cheville douloureuse chronique : démarche diagnostique et thérapeutique 213
Examen physique
Examen du patient debout
L’examen débute par l’analyse de la marche à la recherche
d’une boiterie (esquive douloureuse), d’un steppage (nerf fibulaire
commun ou rupture du tendon tibial antérieur) ou d’un fauchage/
talonnage (rupture du tendon calcanéen). L’analyse du patient se
fait de face puis de dos en statique à la recherche d’une déformation
du pied et de l’arrière pied (plat, creux, varus, valgus, axé…). La
stabilité monopodale et la montée unipodale sur demi-pointe ana-
lysent surtout la force de propulsion du triceps (rupture du tendon
calcanéen) et recherchent la perte de varisation du calcanéum à la
montée (qui oriente vers une lésion du tendon du tibial postérieur).
Examen couché
L’examen se poursuit en décubitus dorsal et note les mobili-
tés active et passive de la cheville à la recherche d’une asymétrie
(perte de la flexion dorsale lors d’un conflit antérieur tibio-talien,
enraidissement global d’une cheville arthrosique, augmentation de
la flexion dorsale au cours d’une rupture chronique ou d’une ten-
dinopathie du tendon calcanéen). Les laxités sont analysées par
la recherche des tiroirs antéro-postérieurs, latéraux/médiaux tibio-
taliens et sous-talien. La souplesse de l’articulation sous-talienne
est testée comparativement à la recherche d’un enraidissement ou
d’une laxité (arthrose, synostose, instabilité).
Recherche des points douloureux
Il convient de palper méthodiquement l’interligne tibio-talien
médial/central/latéral ainsi que les joues taliennes en flexion/
extension (à la recherche d’un point douloureux pouvant faire évo-
quer une lésion du dôme talien, une lésion capsulo-ligamentaire),
les reliefs osseux malléolaires médial et latéral et la marge anté-
rieure tibiale (pseudarthrose, fracture de fatigue, conflit osseux),
les zones d’insertion ligamentaires médiales et latérales (faisceaux
talo-fibulaires antérieur et postérieur, faisceau calcanéo-fibu-
laire, ligament deltoïdien, dans le cadre de séquelles ligamentaires
d’instabilité chronique de la cheville), l’articulation tibio-fibulaire
distale, le sinus du tarse (syndrome du sinus du tarse, instabilité
sous-talienne), la base du 5e métatarsien (pseudarthrose, fracture
de fatigue), l’os naviculaire (fracture de fatigue)…
Le testing dynamique de la cheville recherche un conflit antérieur
ou postérieur par la mise en flexion dorsale/plantaire forcée qui
réveille la douleur. La mise en rotation latérale forcée contrariée de
la cheville peut tester l’articulation tibio-fibulaire distale.
Cheville douloureuse chronique : démarche diagnostique et thérapeutique 215
Testing tendineux
Le testing évalue tous les tendons de la cheville et du pied. Il se fait
en trois étapes :
– la première consiste à palper chaque tendon le long de son
trajet anatomique à la recherche d’une douleur, nodule, crépi-
tation, empâtement, perte de substance, disparition du relief
tendineux ;
– la seconde isole le tendon étudié et en fait un bilan analytique
de contraction sans résistance ;
– la troisième étape consiste en un bilan analytique contre
résistance de l’examinateur. Il est classique de s’attarder sur le
tendon calcanéen, les tendons fibulaires et le tibial postérieur.
Le tendon calcanéen peut être le siège d’une tendinopathie ou
d’une rupture ancienne. L’examen sur le ventre recherche une
verticalisation du pied avec perte de l’équin physiologique, une
amyotrophie du triceps et un signe de Thompson, qui signent
la rupture ancienne. En cas de tendinopathie chronique, ces
éléments ne seront pas retrouvés, mais la douleur sera prépon-
dérante. Il conviendra de préciser exactement le siège de celle-ci
(corps tendineux ou insertion). Le bilan des tendons fibulaires
et du tibial postérieur a déjà été décrit dans les chapitres
spécifiques de cet ouvrage.
Enfin, l’examen neurologique est nécessaire afin de dépister une
pathologie locale (syndrome du tunnel tarsien, étirement du
nerf sural), régionale (compression du nerf fibulaire commun)
ou plus générale (sciatalgie tronquée à la cheville, neuropathie
médicale).
Au terme de l’examen clinique, de nombreux diagnostics peuvent
facilement être retenus alors que d’autres, plus complexes, néces-
siteront des investigations complémentaires pour les mettre en
lumière.
Les diagnostics principaux à envisager [1-3] sont les suivants.
– Lésions osseuses :
tfractures passées inaperçues dépistées au stade de pseudarth-
rose : pointe malléolaire latérale ou médiale (fig. 1), marge
antérieure ou postérieure du tibia, queue du talus (fig. 2),
processus latéral du talus (fig. 3), arrachement calcanéen au
niveau du sinus du tarse, base du 5e métatarsien…
tfracture de fatigue : malléole médiale/latéral (fig. 4),
pilon tibial, naviculaire, base du 5e métatarsien, cuboïde,
calcanéum…
– Lésions ligamentaires :
tinstabilité chronique ;
tséquelles d’entorse du ligament collatéral latéral/médial ;
tlésion de l’articulation tibio-fibulaire inférieure ;
tinstabilité sous-talienne ;
tinstabilité talo-naviculaire.
216 Traumatisme de la cheville
Examens complémentaires
Fig. 2 – Patient présentant des douleurs chroniques postérieures de la cheville après un traumatique
datant de plusieurs mois. Le bilan met en évidence une fracture du processus postérieur du talus.
Échographie
19 Elle demeure le prolongement de l’examen clinique par son carac-
tère dynamique, comparatif, disponible et peu onéreux. Cet examen
est devenu une référence dans toute la pathologie extra-articulaire
non osseuse entre des mains expérimentées et doit être demandé
précocement devant une cheville douloureuse chronique. La seule
faiblesse de cet examen provient de l’impossibilité d’analyse intra-
articulaire et de la difficulté d’analyse de l’organe osseux, quoique cer-
tains diagnostics de fracture de fatigue de la malléole médiale aient pu
être avancés en échographie. L’échographie peut être demandée aux
urgences si les symptômes le justifient (blocage articulaire, cheville
hyperalgique… par exemple) et le radiologue disponible. Dans tous
les autres cas, si la cheville douloureuse chronique ne présente aucun
caractère d’urgence, l’examen doit être demandé en consultation.
Principes thérapeutiques
Bilan podologique
Il fait partie intégrante du circuit thérapeutique car il permet
l’évaluation et la correction des troubles morphostatiques du pied
et de l’arrière-pied pouvant retentir sur la cheville et constituer
des facteurs lésionnels aggravants. En marge de la dimension
préventive, le positionnement d’orthèses plantaires permet dans
certaines situations de favoriser les conditions de la guérison.
Chaque lésion devra subir une évaluation de la pertinence de la
prescription d’orthèses plantaires.
Rééducation fonctionnelle
Elle est incontournable dans toutes pathologies chroniques dès
lors qu’une indication opératoire n’a pas été posée. La rééduca-
tion comporte plusieurs aspects et ne se résume pas au simple
renforcement musculaire.
Traitement médical
Il associera diversement des antalgiques simples et/ou des
anti-inflammatoires. Les infiltrations extratendineuses, au mieux
radio- ou écho-guidées, relèvent du spécialiste lorsque le diagnostic
lésionnel précis est établi.
220 Traumatisme de la cheville
Conclusion
Bibliographie
1. Rodineau J (2011) Séquelles des traumatismes articulaires chez les sportifs.
Paris, Elsevier-Masson
2. Rodineau J, Besch S (2008) La cheville traumatique : des certitudes en
traumatologie du sport: des certitudes en traumatologie du sport. Paris,
Elsevier Masson
3. Catonné Y, Khiami F, Rolland E, Saillant G (2012) Techniques chirurgicales
en traumatologie du sport. Montpellier, Sauramps Médical
Cheville œdématiée :
démarche diagnostique et thérapeutique 20
A.A. LOPEZ ET A. GOLDCHER
Points essentiels
t L’infiltration œdémateuse est mise en évidence par la « prise du godet » à
la pression tissulaire.
t L’objectivation et la surveillance des œdèmes nécessitent la pesée et la
mesure des périmètres de façon itérative.
t La présence d’œdèmes bilatéraux et symétriques impose un bilan général.
t L’affection la plus fréquente responsable d’œdèmes bilatéraux est
l’insuffisance cardiaque.
t L’insuffisance lymphatique se caractérise par sa persistance après repos en
position déclive prolongée.
Introduction
Historique
« Nous disons qu’un œdème est fait du sang phlegmatique… aussi
le phlegme qui n’est autre chose que du sang imparfait peut être fait
par notre chaleur naturelle… le flegme ou pituite est de la nature
de l’eau froide et humide, de consistance fluxile, de couleur blanche
et de saveur douce ou plustôt fade car ainsi estimons-nous cette eau
bonne qui n’a aucun goûst… D’usage : elle nourrit le cerveau comme
aussi toute autre partie froide et humide, modère le sang et aide le
mouvement des articles » disait Ambroise Paré [1].
Définition
Étymologiquement du grec ancien oídêma, (RLGKPD = gon-
flement, tumeur), l’œdème est un syndrome résultant d’une
hyperhydratation extracellulaire par déséquilibre des pressions
hydroélectrolytiques entre les liquides circulants et les tissus
interstitiels.
Rappels physiopathologiques
L’infiltration séreuse anormale des tissus interstitiels sous-cutanés
des membres inférieurs (mais aussi d’autres organes) peut être le
fait de quatre mécanismes principaux :
– l’augmentation de la pression hydrostatique intravasculaire,
(insuffisance cardiaque, thrombose veineuse) ;
– la baisse de la pression oncotique plasmatique, (hypoprotéiné-
mie de malnutrition) ;
– l’augmentation de la perméabilité membranaire (médiateurs
pro-inflammatoires : cytokines, histamine, bradykinine…) ;
– la diminution anormale de la résorption (ou drainage) lym-
phatique (obstruction).
Ce trouble de l’homéostasie définie par Claude Bernard, [2] est
souvent multifactoriel.
Il se comprend pour ce qui est de la régulation des échanges capil-
laires et pour la filtration glomérulaire par les lois de Starling [3, 4].
Cheville œdématiée : démarche diagnostique et thérapeutique 225
Diagnostic clinique
20 Diagnostics étiologiques
Œdèmes bilatéraux
Les œdèmes bilatéraux, symétriques et étendus des membres
inférieurs doivent faire rechercher des épanchements dans d’autres
organes et en particulier les séreuses viscérales (plèvres, péricarde,
poumons…). S’ils sont retrouvés, ils constituent le syndrome
œdémateux généralisé ou anasarque.
Cet état s’accompagne de symptômes perçus par le patient comme :
prise de poids, asthénie et dyspnée. Il découle de quatre grandes
causes principales, qui sont, par ordre de fréquence :
– l’insuffisance cardiaque ;
– l’insuffisance rénale ;
– l’insuffisance hépatique ;
– la malnutrition.
L’ insuffisance cardiaque, dite globale, apparaît le plus souvent bru-
talement chez des cardiaques connus et traités. Elle peut survenir
de façon plus sournoise chez des patients ayant des antécédents
d’embolie pulmonaire. Elle touche les cœurs droits et gauches.
L’insuffisance cardiaque droite est plus volontiers associée aux
sujets atteints d’insuffisance respiratoire sévère.
Les insuffisances cardiaques peuvent s’accompagner de complica-
tions rénales fonctionnelles (par mauvaise perfusion) responsables
de la rétention œdémateuse. L’augmentation de sécrétion d’aldos-
térone, accompagnant généralement l’insuffisance cardiaque,
aggrave les épanchements.
L’ insuffisance rénale résulte de pathologies multiples : infections
microbiennes, maladie auto-immune, diabète mal équilibré, arté-
rite, état de choc… Ces diagnostics médicaux plus difficiles néces-
sitent le recours aux examens complémentaires d’autant que les
dysfonctions rénales sont parfois réversibles.
Cheville œdématiée : démarche diagnostique et thérapeutique 227
Iatrogénie médicamenteuse
Les médicaments pouvant provoquer des œdèmes des membres
inférieurs sont nombreux (tableau I). Les mécanismes d’épan-
chement extracellulaire sont, soit une rétention hydrosodée
(primitive ou secondaire) par modification volumique comparti-
mentale (vasodilatateurs, corticoïdes…), soit par modification de la
230 Traumatisme de la cheville
– Inhibiteurs calciques :
• dihydropyridines (nifédipine, amlodipine, félodipine),
• plus rarement : vérapamil, diltiazem
Antihypertenseurs – Vasodilatateurs directs: minoxidil
– Bêtabloquants
– Antihypertenseurs centraux : clonidine, alphaméthyldopa
– Sympatholytiques : réserpine, guanéthidine
– Corticostéroïdes
– Minéralocorticoïdes
Hormones
– Estrogènes-progestérone
– Testostérone
– Non sélectifs
AINS
– Phénylbutazone
Antidépresseurs
IMAO
Antirhumatismaux – Interleukine 2
majeurs D-pénicillamine, sels d’or (syndrome néphrotique)
Réglisse
(glycyrrhizine)
AINS : anti-inflammatoires non stéroïdiens. IMAO : inhibiteur de la monoamine oxydase.
Angio-œdèmes
Ils comprennent plusieurs entités [11, 12]. Ceux associés à
une urticaire sont majoritairement des réactions anaphylactoïdes
d’origine allergique. La libération histaminique est responsable de
l’augmentation de perméabilité des capillaires artériels et veineux.
Ces formes répondent aux antihistaminiques. L’origine médica-
menteuse (AINS) est la plus incriminée.
Des formes non allergiques, sans réaction urticarienne héréditaire
ou acquise sont liées à des déficits en C1 inhibiteur ou liées à une
hypersécrétion bradykinique ou encore idiopathique. Les antihis-
taminiques et même l’adrénaline y sont inefficaces. C’est le cas de
l’œdème angioneurotique familial, maladie héréditaire autosomique
dominante due à une carence du système d’activation du complé-
ment (C1 Inh). Elle se manifeste dans les suites de rhinopharyngites,
de troubles affectifs, de chocs nerveux ou psychologiques. D’autres
formes pharmacodépendantes des œstrogènes ou des inhibiteurs de
l’enzyme de conversion sont acquises. Le traitement actuellement
proposé est l’acide tranexanique ou le danazol.
Cheville œdématiée : démarche diagnostique et thérapeutique 231
Maladies rares
La dermatose neutrophilique ou syndrome de Sweet [10] associe
une éruption aiguë fébrile papulonodulaire (papule discoïde ferme)
à un important infiltrat œdémateux dermique à polynucléaires
neutrophiles. Elle affecte la femme de 30 à 50 ans, semble secon-
daire (réactionnel à un agent infectieux) et justifie la recherche
d’autres étiologies sous-jacentes. Le traitement repose sur la prise
de corticostéroïdes par voie orale pendant 1 à 3 mois. L’évolution
est généralement favorable avec des récidives possibles, dépendantes
de l’affection mère incriminée. Une surveillance sanguine prolon-
gée se justifie pour dépister la survenue, possible, de phénomènes
myéloprolifératifs.
L’œdème hyperéosinophilique ou syndrome de Gleich [14] associe la
fièvre, l’urticaire et une prise de poids rapide à l’épanchement der-
mique. Son évolution est le plus souvent bénigne. Le test à l’injec-
tion d’albumine marquée au technétium (épreuve de Landis) est
positif ; on retrouve une augmentation significative des IgM. La
corticothérapie y est efficace.
Le syndrome des ongles jaunes [15-17] (xanthonychie ou syndrome
de Samman et White) associe trois critères essentiels : anomalies
unguéales, lymphœdème et troubles respiratoires. L’œdème siège
aux membres inférieurs et parfois aux mains. La coloration jaune
des ongles s’accompagne d’un arrêt de leur croissance et d’une
modification de leur forme qui tend à s’incurver dans les sens lon-
gitudinal et transversal. L’atteinte pulmonaire, par dilatation des
bronches, s’accompagne d’épanchement pleural et d’infections des
sinus. Sa cause, inconnue, semble immunitaire. Le syndrome est
impliqué dans d’autres affections comme les néoplasies du sein,
des poumons, de l’utérus, la maladie de Hodgkin, le mélanome,
les dysfonctions thyroïdiennes, les connectivites…
Œdèmes unilatéraux
Ils ne le sont parfois qu’en début d’évolution (la bilatéralisation
secondaire est fréquente et renvoie au chapitre précédent).
Conclusion
Bibliographie
1. Ambroise Paré (1842) Œuvres complètes. p. 41-3
2. Bernard C (1865) Introduction à l’étude de la médecine expérimental : Paris
Éditions Garnier-Flammarion (1966)
3. Starling EH (1909) The Fluids of the Body Cornell university library – digital
collections (Relié – 17 février 2010)
4. Starling EH, Hamilton H (1912) Principles of Human Physiology Lea &
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London: Dawsons, 1965
5. Lieurade M (1932) Les « Enfants Rouges » du Cameroun. Bull Soc Path Exot
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6. De Bondt J alias Jacobus Bontius (1592-1631), Historiae naturalis et medicae
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7. Eijkman C (1965) The Nobel Prize in Physiology or Medicine 1929 and
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article mis en ligne http://www.lalibre.be/societe/global/article/662143/
vitamine-c-tendance-a-la-hausse.html
9. Grellier P (1978) Le traitement anti-scorbutique du docteur Mac Bride de
Dublin à bord des vaisseaux de la Navy (1766-1767), Thèse de doctorat en
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10. Parhon C, Pitis M, Stanescu V, Segal S et al. (1956) Study of 65 cases of
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11. Petitpierre S, Bart PA, Spertini F, Leimgruber A (2008) Multiples étiologies de
l’angiœdème. Rev Méd Suisse 154: 33141
Cheville œdématiée : démarche diagnostique et thérapeutique 239
Points essentiels
t La cheville instable, qui se présente souvent sous la forme d’une entorse
récidivante aux urgences, peut en cas de négligence thérapeutique évoluer
vers une arthrose excentrée.
t L’étiologie principale est l’insuffisance ligamentaire de l’articulation talo-
crurale parfois associée à celle de l’articulation subtalienne.
t Cependant, il n’existe pas une mais des instabilités chroniques de la
cheville.
t La démarche diagnostique repose sur un examen clinique précis et
comparatif associé aux radiographies dynamiques.
t Le traitement débute toujours par une rééducation neuromusculaire et le
traitement chirurgical est justifié lorsque la laxité est évidente ou lorsque
l’instabilité est invalidante.
Introduction
FISSURATION
LUXATION
et
RÉCIDIVANTE
TÉNOSYNOVITE
PATHOLOGIES
FIBULAIRES
Rare. Tableau de ressaut Douleurs chroniques
douloureux récidivant rétromalléolaires
avec ou sans instabilité latérales.
SYNDROME
DOULOUREUX Douleurs chroniques sous-malléolaires médiales par
DU COMPARTIMENT atteinte du LCM
MÉDIAL
LTFAI : ligament talo-fibulaire antéro-interne. LCM : ligament collatéral médial.
Entorse à répétition,
appelée encore entorse récidivante de la cheville
ou instabilité mécanique de la cheville
C’est de loin le motif le plus fréquent de consultation aux urgences
pour une cheville instable. Il s’agit de patients se présentant pour une
Cheville instable : démarche diagnostique et thérapeutique 245
Interrogatoire
1. La notion de temps pour qualifier la récidive peut varier de 2 à 5 années pour les
antécédents d’entorses documentées de la cheville. Nous prenons ici la définition proposée
par le Professeur Saragaglia de l’Hôpital Sud du CHU de Grenoble.
246 Traumatisme de la cheville
21 Examen clinique
Un temps couché
La mobilité de la cheville doit être testée en flexion dorsale (ten-
don calcanéen court ou rétraction des gastronémiens : la mobilité
de la flexion dorsale de la cheville genou fléchi est normale mais
limitée genou en extension), flexion plantaire, en inversion et éver-
sion (idéalement en décubitus ventral) ; la mesure chiffrée peut être
effectuée à l’aide d’un goniomètre plaqué sur la face latérale de la
fibula et du calcanéum en exerçant manuellement les contraintes.
La recherche des points douloureux sur les trajets ligamentaires,
des interlignes articulaires et des tendons fibulaires permet d’orien-
ter le diagnostic.
La recherche des laxités ligamentaires est très importante mais en
pratique difficile à exercer dans le cadre d’un examen aux urgences
car elle peut être limitée par la douleur. Elle doit être compara-
tive pour éliminer les laxités constitutionnelles. La laxité en varus,
recherchée de préférence en décubitus ventral permet de mettre
en évidence une atteinte du ligament calcanéo-fibulaire et du
ligament talo-fibulaire antérieur [10]. Pour un clinicien exercé,
cette manœuvre en fonction de la position de la main au niveau
du talon peut permettre d’évaluer la laxité talo-crurale et la laxité
subtalaire. On peut par ailleurs visualiser une dépression ou avale-
ment de la peau en varus équin. La laxité antérieure est recherchée
idéalement en position assise et permet de tester le ligament talo-
fibulaire antérieur. En position couchée, le choc talien est recher-
ché en appliquant une translation tibiale postérieure, l’autre main
soulevant et bloquant le talon contre la table d’examen.
L’examen de l’avant-pied avec la recherche d’hallux valgus ou
d’hallux rigidus fait partie de la recherche de facteurs favorisant
cette instabilité de cheville.
Un temps debout
À la marche, le varus dynamique de l’arrière-pied (fig. 2) doit
être recherché car il favorise l’instabilité de cheville (même sans
insuffisance ligamentaire) [11].
Cheville instable : démarche diagnostique et thérapeutique 247
Examens paracliniques
L’examen clinique demande une compétence spécifique et n’est
pas toujours facilement reproductible. Il permet d’orienter vers un
diagnostic d’instabilité mais sa négativité ne peut pas nous faire
éliminer ce diagnostic. C’est pourquoi les examens paracliniques
sont fondamentaux et peuvent permettre un bilan lésionnel et
fonctionnel précis (fig. 3). Dans le cadre des urgences, seuls deux
examens peuvent avoir un intérêt : la radiographie simple de la
cheville et les radiographies dynamiques pour mettre en évidence
une laxité et découvrir les lésions associées éventuelles. Les autres
examens paracliniques sont à connaître mais ne sont plus l’affaire
de l’urgentiste. L’arthro-scanner et l’IRM permettent d’identifier
les lésions anatomiques. L’échographie, tout en étant un examen
abordable par l’urgentiste, semble beaucoup plus utile dans le bilan
d’une entorse fraiche de la cheville que dans le bilan d’une cheville
instable. Le bilan initial doit permettre d’orienter le patient dans la
bonne filière médicale pour avoir le meilleur choix thérapeutique.
La chirurgie des lésions ligamentaires n’est proposée que s’il existe
une atteinte fonctionnelle importante pour le patient. Le but pour
nous urgentistes est de ne pas passer à côté d’une lésion dont la
sanction pourrait être chirurgicale et dont la négligence amènerait
à l’arthrose excentrée tant redoutée. Dans le cadre de l’urgence
nous avons donc besoin d’outils permettant d’éliminer les diagnos-
tics lésionnels associés, rôle des radiographies standard, et de quan-
tifier l’instabilité dite fonctionnelle, rôle des clichés dynamiques
encore appelés clichés en stress.
248 Traumatisme de la cheville
Radiographies dynamiques
Elles peuvent être réalisées dans le cadre de l’urgence2 ou, plus
souvent, être prescrites pour la consultation post-urgence (figs. 4 et
5). Elles permettent d’avoir un outil décisionnel pour l’orientation
du patient. En effet, elles sont fondamentales [12] pour mettre en
évidence la laxité talo-crurale et permettent de déduire la topo-
graphie des lésions. La force émise pour provoquer la laxité peut
être induite manuellement, en auto-varus ou à l’aide d’un appa-
reil de Télos® avec une force de 150 Newton. Il existe une laxité
anormale en varus lorsque le bâillement est strictement supérieur
à douze degrés (ou le différentiel avec l’articulation controlatérale
saine dépasse strictement les 5 degrés) (fig. 6). Il existe une laxité
en tiroir antérieur pour une valeur strictement supérieure à 8 milli-
mètres (ou le différentiel avec l’articulation controlatérale saine est
supérieur à 3 millimètres) (fig. 7) [13].
Il est important de noter que ces clichés dynamiques quantifiés ont
une grande valeur diagnostique en cas de positivité, signant alors
une instabilité de la cheville par lésion ligamentaire. En revanche,
la négativité de cet examen ne permet pas de conclure sur la sta-
bilité de la cheville. Il existe en effet de nombreux faux négatifs,
dus à la douleur ou à la contraction réflexe des fibulaires.
Les autres examens complémentaires ne sont pas réalisés dans le
cadre des urgences.
Fig. 4 – Télos face en varus équin : étude du Fig. 5 – Télos de profil : étude du ligament
ligament calcanéo-fibulaire. tibio-fibulaire antérieur.
Radiographies de face
en charge et comparatifs
de la cheville cerclée
de Méary (fig. 8)
Elles permettent de déter-
miner le morphotype de l’ar-
rière-pied afin de visualiser
et de quantifier des facteurs
favorisants comme le varus de
l’arrière-pied. Fig. 8 – Clichés de chevilles cerclées de Méary.
250 Traumatisme de la cheville
Choix thérapeutiques
Traitement médical
Le traitement de la cheville instable sera dans un premier temps
conservateur. Il devra corriger les éventuels troubles statiques de la
cheville avec des moyens simples en évitant le port de talon pour le
patient, en prescrivant des semelles à coin calcanéen pronateur et
en conseillant le port de chevillère en cas de reprise d’une activité
sportive. Idéalement, à la sortie des urgences, une orthèse de che-
ville et des chausettes de contention de classe 2 seront prescrites.
L’action de ces deux moyens sur la stabilité de la cheville a été
démontrée [14, 15]. L’orthèse de cheville peut, par son effet stabi-
lisateur, avoir une action antalgique ; la chaussette de contention
de classe 2 a, en plus de son effet stabilisateur, une action sur le
drainage de l’oedéme. La rééducation proprioceptive sera elle aussi
toujours prescrite. Elle aura comme objectif la reprogrammation
neuromusculaire [16]. Le suivi sera fait par un médecin rééduca-
teur ou un médecin du sport. Il sera conseillé au patient, dans tous
les cas, de consulter à 3 mois du traumatisme un spécialiste pour
compléter le bilan de l’instabilité de la cheville afin de ne pas pas-
ser à côté d’une lésion dont la sanction pourrait être chirurgicale.
Cheville instable : démarche diagnostique et thérapeutique 251
Traitement chirurgical
Il sera toujours conseillé dans le cas d’une instabilité de che-
ville de consulter un chirurgien orthopédiste pour discuter d’un
éventuel traitement chirurgical. La consultation devrait avoir lieu
environ 2 à 3 mois après le traumatisme ayant fait évoquer le dia-
gnostic de cheville instable et après une rééducation fonctionnelle
bien conduite. Une lésion chronique anatomique ligamentaire a
très peu de chances de guérir malgré un traitement fonctionnel
bien conduit [12].
Les objectifs de la chirurgie sont tout d’abord de corriger un éven-
tuel trouble statique de la cheville suceptible de provoquer cette
instabilité de la cheville. La correction d’un hallux valgus ou la
correction d’un varus calcanéun par l’ostéotomie de Dwyer (fig. 9)
peuvent être proposées en premier lieu. Il est conseillé de réaliser
ce geste chirurgical avant le geste de réparation ligamentaire. En
effet, le risque de nécrose cutanée est important si les deux gestes
sont faits dans le même temps. Une correction du trouble statique
peut parfois éviter la réparation ligamentaire.
Le deuxième objectif de la chirurgie est de restaurer la stabilité talo-
crurale et sous-talienne par la réparation ligamentaire. De très nom-
breuses techniques chirurgicales existent, avec un grand nombre de
variantes. Quatre classes techniques ont été individualisées suite à la
série multicentrique française présentée à la SOFCOT 2008 [17]. Il
s’agit des classes C1 (retente capsuloligamentaire isolée), C2 (retente
associée à un renfort) (fig. 10), C3 (plastie utilisant partiellement un
tendon stabilisateur-éverseur comme le court fibulaire) et C4 (plas-
tie utilisant la totalité d’un tendon stabilisateur-éverseur). L’analyse
de l’étude multicentrique a permis de mettre en évidence 87 % de
bons et très bons résultats sur la stabilité, avec 20 % de complica-
tions (surtout nerveuses). Ces résultats ont permis de mettre en
évidence l’intérêt de la chirurgie dans le traitement de l’instabilité
et la protection face à l’arthrose secondaire.
Conclusion
Bibliographie
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254 Traumatisme de la cheville
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Cheville instable : démarche diagnostique et thérapeutique 255
21 5. J’ai l’impression que mes chevilles sont INSTABLES quand je me tiens sur
UNE jambe :
Jamais 2
Sur la pointe des pieds 1
Avec le pied à plat 0
6. J’ai la sensation que mes chevilles sont INSTABLES quand :
Jamais 3
Je fais des sauts d’un pied sur l’autre 2
Je fais des sauts à pieds joints sur place 1
Je sautille 0
7. J’ai la sensation que mes chevilles sont INSTABLES quand :
Jamais 4
Quand je cours sur des surfaces irrégulières 3
Je trottine sur des surfaces irrégulières 2
Je marche sur des surfaces irrégulières 1
Je marche sur des surfaces planes 0
8. Généralement, quand je commence à me tordre la cheville, je peux me
rétablir :
Immédiatement 3
Souvent 2
Parfois 1
Jamais 0
Je ne me suis jamais tordu la cheville 3
9. Après m’être tordue la cheville, celle-ci revient à la « normale »
Presque immédiatement 3
En moins d’un jour 2
En 1 à 2 jours 1
En plus de 2 jours 0
Je ne me suis jamais tordu la cheville 3
Partie
Outils thérapeutiques
IV
Rééducation de la cheville et du pied.
Pourquoi ? Comment ? Quand ? 22
B. TAMALET
Points essentiels
t La prescription de rééducation dépend du diagnostic lésionnel mais aussi
de l’état fonctionnel à un moment donné.
t Elle doit prendre en compte les éléments suivants : douleurs, troubles
trophiques, mobilité (amplitudes), stabilité, demande fonctionnelle du
patient.
t Le rôle du médecin est essentiel, posant le diagnostic, les indications et
contre-indications possibles sur lesquels le kinésithérapeute va établir ses
principes de la rééducation.
t La cicatrisation ligamentaire et tendineuse ou la consolidation osseuse
peuvent être favorisées par une remise en fonction partielle, protégée,
dirigée en rééducation.
t La récupération d’une flexion dorsale de cheville suffisante est prioritaire
sur la flexion plantaire.
Introduction
tmobilité (amplitudes) ;
tstabilité fonctionnelle (à distance du traumatisme) sous la
dépendance de :
- la proprioception ;
- la force musculaire (hors lésion neurologique) ;
– la demande fonctionnelle du patient : sujet âgé avec risque
de perte d’autonomie, sportif, travailleur sédentaire ou exigeant
physiquement.
Le médecin traumatologue devra toujours garder ce plan à l’es-
prit permettant de hiérarchiser les priorités de traitements au sein
desquels la kinésithérapie prend sa place et de définir les axes de
rééducation.
En effet, la prescription ne remplace pas la démarche du kinésithé-
rapeute. Le médecin a la responsabilité d’établir un diagnostic pré-
cis et, à partir de celui-ci et des éléments de son bilan fonctionnel
contextualisé, de définir :
– la nécessité ou non de la rééducation ;
– ses indications/contre-indications ainsi que ses objectifs ;
– la date de sa mise en route.
Des objectifs finaux et/ou intermédiaires doivent être énoncés
et appliqués sur un plan qualitatif et quantitatif [1]. À partir de
là, le médecin peut, s’il le souhaite, préciser sa prescription, qui
s’impose alors au masseur-kinésithérapeute (nombre de séances,
fréquence), bien que cela ne soit plus obligatoire selon les der-
nières recommandations en vigueur [2]. Lorsque le prescripteur ne
fait pas mention du nombre de séances, le kinésithérapeute peut
le faire lui-même. Il est tenu pour cela d’adresser un bilan dia-
gnostic kinésithérapique initial (BDK) à la sécurité sociale et au
prescripteur.
Après une première série, la prolongation de cette rééducation sera
décidée lors d’une consultation ultérieure comportant la réévalua-
tion des différents paramètres.
Les recommandations de l’ANAES sur les entorses de cheville
en janvier 2000 comportent une synthèse des éléments du bilan
comme suit [3] :
– déficiences : douleur, troubles trophiques, diminution de la
mobilité, faiblesse musculaire ;
– incapacités : représentées par l’altération de la stabilité fonc-
tionnelle, souvent elle-même conséquences des déficiences sus-
citées auxquelles s’ajoutent les déficits proprioceptifs difficiles à
évaluer cliniquement indépendamment des déficiences ;
– handicap : de ses déficiences et incapacités résultent un cer-
tain niveau de handicap caractérisé par les perturbations des
activités de la vie quotidienne
En réalité, au-delà de la cheville, ces principes d’évaluation
s’appliquent à toutes les pathologies orthopédiques.
262 Traumatisme de la cheville
Gain d’amplitude
22 Renforcement musculaire
Le déficit musculaire est rarement individualisable dans les trau-
matismes de la cheville non compliqués de luxation ou de rupture
tendineuse.
Il est pourtant constant après immobilisation stricte et/ou mise en
décharge dépassant quelques jours.
Il est difficilement quantifiable sauf pour le triceps sural. Dans
les fractures, son évaluation est faussée par la présence de dou-
leur compte-tenu des rapports étroits des tendons avec les foyers
de fractures (par exemple tibial postérieur ou fibulaire dans les frac-
tures bimalléolaires). De plus, il est imprudent de vouloir tester un
muscle contre résistance maximale lorsque son trajet ponte le foyer
de fracture.
Le renforcement dit analytique (muscle travaillé individuellement)
doit tenir compte de la solidité relative en évitant les contre résistances
distales qui pourraient mettre en porte-à-faux le foyer de fracture
(exemple : renforcement des fibulaires et fracture de la malléole latérale).
Le travail des muscles latéraux ( fibulaires et tibial postérieur), qui
sont avant tout stabilisateurs (fonction de contrôle des mouvements),
passe probablement plus par une approche de reprogrammation sen-
sitivo-motrice que par la recherche d’un niveau de force. Le travail
des muscles antéro-postérieurs comme le triceps, connu pour son
rôle de propulsion, nécessite quant à lui un véritable renforcement
pour retrouver puissance et endurance.
Rééducation proprioceptive
Encore appelée reprogrammation neuro-motrice (RNM), cette
partie incontournable de la rééducation en traumatologie vise à
provoquer des réponses motrices à partir de stimulations sen-
sitives et sensorielles [4]. Grâce à des techniques spécifiques, ces
sensations vont être utilisées de manière à faciliter le mouvement
dans son efficacité sur différents paramètres : vitesse, puissance,
ajustement, anticipation.
La notion de rééducation proprioceptive est née des travaux de
Freeman [5] sur les entorses de cheville. En effet, cette patholo-
gie semble bien être un modèle de recrutement de nos facultés de
régulation neuro-motrice dans un but de protection articulaire,
notamment dans la prévention secondaire des entorses du plan
latéral. Quelques précisions à ce sujet trouvent donc particulière-
ment leur place dans cet ouvrage car ce qui a été montré pour la
cheville peut être extrapolé aux autres lésions ligamentaires, tendi-
neuses ou articulaires, surtout lorsqu’elles participent à la fonction
d’équilibration (mais pas uniquement).
Rééducation de la cheville et du pied. Pourquoi ? Comment ? Quand ? 265
22
Fig. 1 – Utilisation d’un plateau instable Fig. 2 – Utilisation d’un plateau instable
unidirectionnel dans le plan sagittal en appui unidirectionnel dans le plan frontal en
unipodal. décharge.
Afin d’éviter d’être redondant avec ce qui a été dit plus haut ou
avec ce que les auteurs des autres chapitres de l’ouvrage ont déjà
développé, nous ne reprendrons ici que les points essentiels pour
aider le lecteur à la prescription et le suivi de la kinésithérapie en
consultation de traumatologie.
Avant de rédiger son ordonnance, il faut, en kinésithérapie comme
en médecine en général, se demander quel est l’objectif de ce
Rééducation de la cheville et du pied. Pourquoi ? Comment ? Quand ? 267
Fractures du talus
La prescription de rééducation dans ce cas ne diffère pas de
celle des fractures articulaires de la cheville ; les grandes lignes
seront habituelles : reprise d’appui progressive (et ses conséquences
dans le choix des exercices par le kinésithérapeute), traitement des
troubles trophiques, gain d’amplitude (avec restriction possible sur
la flexion dorsale si celle-ci comporte un risque pour la consolidation),
reprogrammation sensori-motrice, tonification musculaire puis
renforcement musculaire des muscles périarticulaires une fois la
consolidation acquise. La raideur articulaire et les douleurs seront
longtemps préoccupantes dans les fractures du dôme talien plus
que dans celles du col.
Fractures du calcanéum
Principes de précaution communs aux fractures du calcanéum :
avant consolidation, il conviendra d’éviter les étirements forcés du
triceps et sa contraction contre résistance. Le gain en flexion dor-
sale, s’il est nécessaire, se fera donc genou fléchi (cf. plus haut).
Une fois la reprise d’appui autorisée sans immobilisation, les deux
phases (étirement puis contraction) sont indispensables au cours
de la marche rapide ou les escaliers ; des exercices devront donc
préparer le calcanéum à cette étape.
– Fractures articulaires : les séquelles douloureuses sont très fré-
quentes alors que la raideur est fonctionnellement bien tolérée.
Les douleurs sont souvent dues à une arthropathie sous-talienne
secondaire à la perte relative de congruence. De ce fait, la réé-
ducation ne cherchera pas à récupérer la mobilité sous-talienne,
mais plutôt à laisser s’installer la raideur voire l’ankylose de
celle-ci pour favoriser l’indolence. En revanche, la récupération
de la mobilité des articulations de voisinage et notamment du
médio-pied sera importante pour favoriser les mécanismes de
compensation des appuis. La reprogrammation neuro-motrice
dans ce contexte sera particulièrement importante.
– Fractures non articulaires de la grosse tubérosité non déplacées,
traitées fonctionnellement ou orthopédiquement : la rééduca-
tion sera assez légère, guidant la reprise progressive de l’appui
uniquement en fonction des douleurs et des activités physiques
qui se feront assez naturellement à la disparition des douleurs
d’appui. La récupération de la fonction complète passera par un
réentraînement musculaire du triceps sural avec beaucoup d’au-
torééducation (montée sur demi-pointe bipodale puis unipodale).
– Fractures déplacées de la grosse tubérosité : la gêne principale, en
dehors des douleurs initiales d’appui, est due à terme à la perte
d’efficacité du triceps sural. En effet, l’aplatissement de l’arrière
pied entraîne une détente relative de l’appareil suro-achilléen.
270 Traumatisme de la cheville
Entorse sous-talienne
Cette atteinte est exceptionnellement isolée, en général associée
aux entorses talo-crurales. La rééducation sera souvent comprise
comme un tout. Une attention particulière sera portée à la
Rééducation de la cheville et du pied. Pourquoi ? Comment ? Quand ? 271
22
Conclusion
Une prescription de rééducation de qualité et la capacité à analy-
ser les éventuelles causes d’échec de celle-ci dans l’évolution d’une
lésion traumatique nécessitent d’une part une bonne connaissance
orthopédique diagnostique de la lésion observée chez le blessé et,
d’autre part, des notions approfondies de la fonction globale che-
ville-pied. Tout cela doit être remis dans le contexte de chaque
patient, notamment de sa demande fonctionnelle spécifique.
Il n’est pas nécessaire au médecin prescripteur de connaître l’infinie
variété des exercices de kinésithérapie dont le choix est laissé bien
évidemment au kinésithérapeute mais de comprendre l’indication
des moyens de rééducation rapportées aux déficiences observées
au-delà d’un diagnostic lésionnel.
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276 Traumatisme de la cheville
Points essentiels
t La gestion des immobilisations en traumatologie tient compte de la lésion,
des habitudes du thérapeute et du profil du patient à traiter.
t Le traitement tend à être conservateur en l’absence de lésion osseuse. En
cas de fracture non chirurgicale, il repose dans la majorité des cas sur une
immobilisation rigide.
t Le protocole RICE doit être appliqué en phase initiale si le diagnostic en
urgence est impossible.
t La prévention des maladies thrombo-emboliques est systématique si la
décharge est totale ou partielle.
t Le traitement adjuvant repose sur les antalgiques, les anti-inflammatoires,
les bas de contention et la kinésithérapie.
Introduction
Lésion
La rupture du tendon calcanéen en est un exemple. En fonction
de la localisation de la rupture la prise en charge pourra être ortho-
pédique ou chirurgicale.
Habitudes du thérapeute
Le chirurgien sera plus volontiers interventionniste contraire-
ment au traumatologue et au rééducateur fonctionnel qui seront
plus conservateurs.
Profil du patient
Le patient âgé ne sera pas traité de la même manière qu’un jeune
sportif. De même, la stratégie thérapeutique sera différente chez un
patient présentant un terrain morbide et fragile.
Ce chapitre ne reprendra pas les indications thérapeutiques préconi-
sées et précisées dans les autres chapitres. L’objectif est l’application
pratique des stratégies évoquées.
Fig. 1 – Strapping de cheville. 1 : 1re bande. 2 : 2e,3e et 4e bandes. 3 : 5e bande. 4 : 6e, 7e et
8e bandes.
Outils thérapeutiques – Immobilisations et autres traitements adjuvants 281
que les autres moyens de contention pour une reprise des activités
23 sportives et professionnelles [6]. Il n’y a pas de supériorité d’un
modèle d’orthèse par rapport à un autre [7, 8].
Il faut prescrire un modèle que le thérapeute connaît en précisant
sur l’ordonnance que la taille doit être adaptée à la corpulence du
patient. Le patient recevra les conseils du fournisseur (pharmacien
ou autre) pour la mise en place correcte (cf. modèles d’ordonnances).
Dans l’arsenal thérapeutique des orthèses amovibles, les bottes
de marche tendent à se développer. Cependant, elles ne relèvent
pas d’une consultation d’urgence compte tenu de la fréquence des
traitements d’attente instaurés et de l’incertitude diagnostique. Le
coût élevé de ces dispositifs implique un diagnostic lésionnel précis
afin d’avoir un traitement adapté et une prescription faite à bon
escient. Le plus souvent, ce type d’orthèse sera donc prescrit à la
consultation de contrôle, en dehors du circuit d’urgence.
Surveillance
– Elle consiste à surveiller l’absence d’effet « garrot » ou de
macération et mycose.
– Idéalement, la syndactylie est changée toutes les 48-72 heures.
Il convient d’informer et d’éduquer le patient et son entourage
dans la réfection de cette immobilisation simple.
– Le port de chaussures ouvertes est préconisé.
Fig. 4 – Attelle plâtrée postérieure. 1 : Position de la jambe. 2 : Mesures. 3 : Préparation.
4 : Mise en place. 5 : Protection des malléoles. 6 : Maintien de l’attelle.
Matériel
– Jersey tubulaire de taille adaptée à la morphologie du patient.
– Bandes plâtrées de taille adaptée à la corpulence du patient.
– Bandes de maintien de type Velpeau (en général 2 ou 3).
Technique
– Installer le patient pour obtenir une cheville positionnée à 90°.
tPatient placé en décubitus ventral (en l’absence de contre-
indication), genou fléchi à 90° permettant d’obtenir la dorsi-
flexion automatique de la cheville.
284 Traumatisme de la cheville
Fig. 5 – Botte plâtrée ou en résine. 1 : Positionnement de la jambe et jersey. 2 : Mise de la
ouate. 3 : Confection de la botte. 4 : Liberté de la tête du 5e métatarse.
286 Traumatisme de la cheville
Fig. 6 – Botte de Graffin. 1 : Positionnement de la jambe. 2 : Ouate. 3 : Liberté du talon.
4 : Confection du plâtre. 5 : repli du jersey. 6 : Fenêtre talonnière. 7 : 2e bande de plâtre.
8 : Renforcement latéral. 9 : Finitions.
Cruro-pédieux
Il est de moins en moins utilisé dans le cadre des lésions de la
cheville. Quant au cruro-jambier, il n’a pas d’indication dans les
pathologies distales du membre inférieur (fig. 7).
Matériel
– Jersey tubulaire.
– Ouate.
– 2 bandes de plâtre de 10 ou 15 cm et 1 bande de 20 ou 30 cm
selon la morphologie du patient.
Outils thérapeutiques – Immobilisations et autres traitements adjuvants 287
Fig. 7 – Cruro-pédieux. 1 : Position du genou à 20° et de la cheville à 90°. 2 : Mise en place
du jersey et de la ouate. 3 : Confection de la partie pédieuse du plâtre. 4 : Confection de la
partie crurale du plâtre.
Technique
– Positionner le genou en flexion de 10 à 20°, l’axe du 2e rayon
du pied parallèle à celui de la patella et la cheville à 90°. Pour
cela, le patient sera installé en décubitus dorsal, le membre infé-
rieur sur une barre à genou avec un coussin sous la fesse (côté
lésé) et un support sous le pied.
– Mettre le jersey et la ouate comme pour la botte plâtrée, en
veillant à remonter jusqu’au pli fessier et en évitant les plis.
– Faire une botte avec une bande de 10 ou 15 cm selon la tech-
nique décrite ci-dessus.
– Utiliser une bande de 20 ou 30 cm pour faire la partie crurale.
– Poser la 3e bande pour recouvrir les deux autres en prenant
soin de renforcer la zone de jonction.
– Outre les éléments anatomiques mentionnés pour la botte, il
faudra protéger le grand trochanter, le triangle fémoral (ancien-
nement triangle descarpa), les condyles fémoraux médial et
latéral, la patella, le creux poplité et la tubérosité tibiale.
– Les limites du cruro-pédieux sont pour sa partie proximale,
une ligne oblique passant sous le pli fessier en arrière, 2 tra-
vers de doigts sous le pli inguinal et sous le grand trochanter
en latéral. Pour sa partie distale, les limites sont celles de la
botte.
288 Traumatisme de la cheville
Traitements généraux
Antalgiques
Le paracétamol reste le traitement de référence en première
intention, en l’absence de contre-indication. Il présente le meilleur
rapport bénéfice-risque seul ou en association [2]. S’il est insuffi-
sant, un traitement antalgique par palier II ou III pourra être utilisé.
Conclusion
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