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NOUVELLE TECHNIQUE DE PRÉLÈVEMENT MANDIBULAIRE PAR FRACTURE DIRIGÉE

Innovation
PAR Eric Solyom et Jean-François Tulasne

Nouvelle technique
de prélèvement mandibulaire
par fracture dirigée
La technique du prélèvement de ramus décrite Introduction
par C.-M. Misch (1996) présente de nombreux
La perte dentaire induit inéluctablement une résorp-
avantages par rapport aux autres sites tion osseuse chronique cumulative et irréversible1.
endobuccaux (symphyse, rétromolaire), La reconstruction pré- ou per-implantaire de la crête
mais elle a ses limites (petite taille du greffon, résorbée est nécessaire, à la fois pour l’ostéo-intégra-
risque de lésion du nerf alvéolaire inférieur). tion des implants, et dans un but prothétique, à visée
L’objet de cet article est de présenter esthétique et fonctionnelle, afin d’obtenir un alignement
une technique originale de prélèvement adéquat des collets et une prothèse stable dans le temps.
mandibulaire, dérivée de l’ostéotomie L’os autologue est depuis toujours et encore actuelle-
de la branche montante de la mandibule décrite ment la référence en reconstruction osseuse avec un
par Epker en chirurgie orthognatique. faible taux de morbidité du site receveur et une inté-
Elle permet de prélever, sur la branche horizontale, gration complète et définitive de la greffe.
la totalité de la corticale vestibulaire en distal Plusieurs sites en dehors de la sphère buccale sont pos-
de la première molaire, ainsi qu’une partie sibles : iliaque, crânien, costal, tibial.
de la branche montante. La greffe d’os pariétal est la technique dont les suites
Les fragments osseux obtenus sont de taille plus sont les plus simples et la morbidité la plus faible2,3,4.
Les sites endobuccaux décrits sont la symphyse, le
importante que sur les autres sites endobuccaux,
ramus et la région rétro-molaire.
avec une durée d’intervention plus courte et un
risque comparable pour le nerf alvéolaire inférieur. Le prélèvement de ramus, tel qu’il a été décrit initiale-
ment par C.-M. Misch en 1996, permet d’obtenir la
Nous avons effectué 20 prélèvements
masse osseuse la plus importante avec les suites les
par fracture dirigée et les avons comparés plus simples, comparé aux autres prélèvements endo-
aux 85 réalisés selon une technique classique buccaux.
avec la microscie de F. Khoury (MicroSaw), Néanmoins, malgré cette supériorité, la quantité osseuse
fraises boules et générateur à ultrasons recueillie reste limitée et les risques pour le nerf alvéo-
(moteur piezotome). laire inférieur augmentent avec la taille du greffon.

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NOUVELLE TECHNIQUE DE PRÉLÈVEMENT
PRELEVEMENT MANDIBULAIRE PAR FRACTURE DIRIGÉE
Innovation

Pourquoi modifier la technique


de prélèvement de Ramus ? Fig. 2, 3 et 4

L’étude de Gérard Schilling réalisée sur 110 dentas-


canners10 a consisté à mesurer la distance entre le canal
alvéolaire inférieur et la partie externe de la corticale
vestibulaire, sur l’ensemble de son trajet, au sein de la
zone de prélèvement.
Cette thèse met en évidence des variations importantes
de trajet du canal alvéolaire inférieur :
■ dans 79 % des mandibules étudiées, à un ou plusieurs
endroits, la distance entre le nerf et la corticale ves-
tibulaire en regard de la zone de prélèvement est infé-
rieure à 3,2 mm ;
■ à 4 mm du foramen mandibulaire, ce qui correspond
approximativement à l’ostéotomie postérieure, la dis-
Fig. 1 Les ostéotomies selon la technique décrite par C.-M. Misch. tance entre le nerf et la corticale externe est la plus
faible. Elle est en moyenne de 2,7 mm, avec des
extrêmes à 1 et à 6 mm ;
■ à 32 mm du foramen mandibulaire, ce qui correspond
Rappel de la technique classique en moyenne à la face distale de la première molaire
et donc à l’ostéotomie antérieure, la distance séparant
de prélèvement de Ramus Fig. 1
la corticale vestibulaire du canal mandibulaire est la
C.-M. Misch est le premier auteur à avoir décrit dès plus grande. Elle est en moyenne de 5,5 mm, avec des
1996, la technique de prélèvement de ramus telle qu’elle extrêmes de 3 et de 8,5 mm.
est utilisée à l’heure actuelle5,6,7. Il décrit 4 ostéotomies : Des complications neurologiques transitoires ou défi-
■ supérieure au niveau du ramus ; nitives par lésion du nerf alvéolaire inférieur (avec hypo-
■ antérieure au niveau du corps de la mandibule, entre esthésie ou anesthésie labiomentonnière) sont donc
la première et la deuxième molaire ; possibles après un prélèvement de ramus. Une plus
■ au niveau de la ligne oblique externe ; grande fréquence de ces dernières devrait être obser-
vée lors de l’utilisation de la microscie et lorsque l’os-
■ inférieure, incomplète, située au-dessus du passage du
téotomie inférieure est faite sous le passage du nerf
nerf alvéolaire inférieur.
alvéolaire inférieur. Dans ces conditions, les ostéotomies
Une fois l’ostéotomie réalisée à la fraise, le prélève- mésiale et distale réalisées à 3,2 mm peuvent section-
ment se fait avec un ciseau à os. ner le nerf. Le risque est accru en l’absence de dentas-
canner préalable qui renseigne l’opérateur sur la position
F. Khoury décrit les mêmes ostéotomies. À l’exception
du canal. Il est surprenant de ne pas retrouver dans la
de l’ostéotomie supérieure réalisée avec une fraise boule,
littérature d’articles faisant état de ces complications neu-
les autres sont faites avec un disque rotatif de rayon
rologiques et proposant un recours systématique au
3,2 mm. Afin d’augmenter la largeur du prélèvement,
dentascanner avant prélèvement11,12.
l’ostéotomie inférieure est située sous le canal alvéolaire
Si l’on s’en tient à la technique initiale décrite par
inférieur. Cette technique est, semble-t-il, la plus cou-
C.-M. Misch, les complications sensitives, suite à un trau-
ramment utilisée.
matisme du nerf alvéolaire inférieur sont rares, les
Certains auteurs ont décrit des prélèvements de ramus ostéotomies étant toutes, en théorie, réalisées à dis-
avec le générateur à ultrasons8. D’autres utilisent le tance du nerf (avec une ostéotomie inférieure au-des-
moteur à ultrasons lorsque l’ostéotomie passe en regard sus du canal dentaire). Cela sous-entend néanmoins que
du nerf alvéolaire inférieur, et le moteur rotatif lorsque la position du nerf alvéolaire inférieur ait été contrôlée
la section est à distance de ce nerf9. par un dentascanner. La hauteur entre le canal dentaire

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Fig. 2 Empreinte du linée en sus et sous-périosté
nerf alvéolaire le long au niveau de la branche hori-
de la corticale externe
zontale et de la branche
à moins de 3 mm.
montante de la mandibule.
L’incision est faite dans le
vestibule en regard de la ligne
oblique externe à 1 cm du
Fig. 3 Le disque, s’il
avait été utilisé,aurait collet des molaires. Nous la
sectionné le nerf. prolongeons en mésial vers la
Fig. 4 Exosition du nerf après
prélèvement de ramus : l’ostéo-
deuxième prémolaire et en
tomie antérieure est intra corti- distal vers la branche mon-
cale pour ne pas léser le nerf. tante de la mandibule.
La rugination est sous-péri-
ostée avec exposition de la
et la corticale supérieure étant en moyenne de 12 mm branche horizontale de la mandibule jusqu’au bord basi-
dans la zone de prélèvement13, la largeur du fragment laire, de l’angle mandibulaire et de la branche montante
osseux prélevé doit être faible, inférieure ou égale à 10 de la mandibule jusqu’au bord postérieur. Cette voie
mm. d’abord correspond sensiblement à celle décrite pour une
ostéotomie de la branche montante de la mandibule.
Nous pouvons donc envisager :
■ soit un prélèvement de petite taille (de largeur infé-
rieure à 10 mm) dont tous les traits d’ostéotomie
sont situés au-dessus du canal mandibulaire, cela
sous réserve de localiser précisément la position ana-
tomique du nerf ; le risque de lésion de ce dernier étant
alors diminué de façon significative ;
■ soit un prélèvement de taille plus importante, mais
avec un risque non négligeable de lésion du nerf
alvéolaire inférieur.
Nous proposons ici une technique chirurgicale per-
mettant un prélèvement mandibulaire de taille plus
importante que les techniques classiques, sans pour Fig. 5 Technique de prélèvement mandibulaire par fracture diri-
autant augmenter le risque de lésion du nerf alvéolaire gée : en rouge, les ostéotomies ; en jaune, les traits de fracture.
inférieur.

Technique chirurgicale Fig. 5 à 12

Il s’agit d’un prélèvement mandibulaire par fracture diri-


gée selon les zones de faiblesse de la mandibule. Nous
demandons systématiquement un dentascanner man-
dibulaire, afin de repérer la position du nerf alvéolaire
inférieur.
L’intervention est faite sous anesthésie locale (avec ou
sans sédation intraveineuse) ou anesthésie générale. Le
protocole d’anesthésie dépendra de l’importance de la
reconstruction osseuse. Nous proposons une anesthé-
Fig. 6 Le repère de la lingula permet de connaître la pénétration
sie générale dès que la durée prévue de l’intervention du nerf. En rouge, projection du trait de fracture de la corticale ves-
est supérieure à 1 h 30 (majorité des cas). Nous réali- tibulaire.
sons l’infiltration d’une solution de xylocaïne adréna-

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Fig. 7 Tracé des


ostéotomies réalisées
au moteur à ultrasons
(moteur SATELEC).

Fig. 8 Libération
du fragment
par fracture dirigée Fig. 9 Exemple d’un prélèvement
avec deux rugines. mandibulaire selon la technique en
fracture dirigée : nous avons réalisé sur
table le début d’une ostéotomie de
ramus classique, afin de montrer le
gain osseux par cette nouvelle tech- Fig. 10 Suture par surjet.
nique.

Fig. 11 Prélèvement mandi-


bulaire gauche ; notez que le
prélèvement descend jusqu’à Fig. 12 Scanner en postopératoire d’un
la basilaire ; même patient que prélèvement réalisé à gauche ; l’en-
sur la figure 9. semble de la corticale a été prélevé.

Nous recherchons systématiquement la lingula (épine oblique externe. L’ostéotomie est cortico-spongieuse
de spix) au niveau de la corticale linguale du ramus. Ce et sans risque pour le nerf alvéolaire inférieur. Quand
repère anatomique permet de situer la pénétration du le trait se situe en avant au-dessus de la ligne oblique
nerf alvéolaire inférieur au sein de la mandibule. Nous externe, il faut être prudent et vérifier sur le scanner
réalisons 3 traits d’ostéotomie sur la corticale vestibu- la position des racines.
laire Fig. 5 et 7 :
Les traits sont réalisés avec une fraise boule, une fraise
1. l’ostéotomie supérieure part du bord antérieur de la fissure ou le générateur à ultrasons (nous privilégions
branche montante au niveau de la lingula et s’étend le moteur à ultrasons lorsque le nerf est proche de la
vers l’arrière pour s’arrêter avant le siège de péné- corticale). Le clivage de la corticale externe se fait par
tration dans la mandibule du nerf alvéolaire inférieur. fracture dirigée avec deux rugines Fig. 8 , l’une en posi-
Si le dentascanner confirme une distance raison- tion mésiale et l’autre en position distale. Nous n’uti-
nable entre le nerf et la corticale vestibulaire et s’il lisons pas de ciseau à os. Le clivage forcé provoque une
existe une parfaite différenciation entre la corticale fracture dirigée le long du bord basilaire qui rejoint la
externe et la corticale interne, nous pouvons déca- limite postérieure de l’ostéotomie supérieure du ramus
ler l’ostéotomie vers l’arrière et la prolonger au-delà (en jaune sur le schéma Fig. 5 ).
du trajet du nerf. En avant de la position du nerf, Nous rinçons le site de prélèvement avec de la Bétadine,
l’ostéotomie est cortico-spongieuse ; elle devient cor- mettons en place une gaz hémostatique résorbable et
ticale si elle se prolonge en arrière du canal mandi- fermons avec un vicryl 4/0 en surjet Fig. 10 .
bulaire ;
2. l’ostéotomie antérieure siège juste en distal de la
première molaire et traverse verticalement la corti-
Comparaison
cale vestibulaire, depuis la ligne oblique externe jus- entre les deux techniques Fig. 13 à 18

qu’au bord basilaire. L’ostéotomie est corticale, ou Notre première série porte sur 85 prélèvements de
cortico-spongieuse, en fonction de la position du nerf ; ramus avec la technique conventionnelle, les traits d’os-
3. l’ostéotomie antérieure du ramus et supérieure de la téotomie supérieur et antérieur se prolongeant au-delà
branche horizontale fait la jonction entre les deux du canal alvéolaire inférieur, afin d’obtenir un prélè-
ostéotomies précédentes, en dedans de la ligne vement de plus grande taille. 32 prélèvements ont été

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Fig. 14 Même patient que sur la figure 13 : les racines de
la 7 ont une position vestibulaire :le trait d’ostéotomie doit
passer sous les racines. Le prélèvement par fracture diri-
gée nous permetra néanmoins d’obtenir un volume osseux
satisfaisant.

Fig. 13 Position vestibulaire du nerf ; nous choisissons un prélèvement par frac-


ture dirigée (ostéotomies avec le moteur à ultrasons SATELEC).

Fig. 15 La technique par fracture dirigée nous a permis d’ob- Fig. 16 Empreinte du nerf alvéolaire le long de la corti-
tenir un prélèvement osseux satisfaisant (même patient que sur cale externe à moins de 3 mm (même patient que sur la
la figure 13). figure 13).

Fig. 17 Panoramique montrant les limites du prélèvement osseux Fig. 18 Exemple d’un prélèvement mandibulaire par
(même patient que sur la figure 13). fracture dirigée.

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faits avec la microscie de F. Koury. 53 prélèvements ont


Fig. 19 “Le nerf était
été faits soit avec le piezotome, soit en technique mixte emprisonné dans une
(c’est-à-dire avec le moteur rotatif et le moteur à ultra- gouttière vestibulaire ;
sons). Notre deuxième série porte sur 20 prélèvements le disque a été contre-
de ramus avec la technique par fracture dirigée telle que indiqué.”
nous l’avons décrite. L’intervention est toujours réali-
sée après contrôle de la position du nerf par un den-
tascanner.

Nous contre-indiquons :
■ l’utilisation du disque rotatif lorsque le nerf est proche
de la corticale externe ;
■ l’utilisation de la technique conventionnelle, en cas
de position haute et proche de la corticale externe du Discussion Fig. 19 à 24

nerf alvéolaire. Dans ce cas, afin de prendre moins de Le prélèvement de ramus comme source de tissu auto-
risque vis-à-vis du nerf pour obtenir un fragment logue a fait ses preuves, aussi bien au niveau de la qua-
conséquent, nous avons privilégié notre technique lité du tissu osseux que des suites qui sont simples.
de prélèvement de ramus par fracture dirigée. Il Elles se limitent à une tuméfaction importante de
existe donc un biais de mesure dans la comparaison l’hémiface du côté du prélèvement pendant 5 à
de nos résultats (en défaveur de notre nouvelle tech- 7 jours, avec un risque de collection hématique.
nique).
Les complications sont rares (à condition d’une éva-
Sur les 85 prélèvements réalisés de façon classique, luation préopératoire par dentascanner). Dans notre
nous déplorons : série, elles se sont limitées à un trouble de la sensibilité
■ 4 pertes de sensibilité transitoires (allant de quelques transitoire dans le territoire du nerf alvéolaire inférieur
heures à 10 jours), soit un pourcentage de 4,7 % ; dans 5 % des cas (quelle que soit la technique utilisée).
■ aucune séquelle après 10 jours. Nous ne déplorons aucune séquelle.
Afin de diminuer le risque de complication, le dentas-
Sur les 20 prélèvements réalisés avec notre technique canner nous semble, de par notre expérience et les
par fracture dirigée, nous déplorons : résultats des études anatomiques, un examen indis-
pensable : il permet d’évaluer précisément la position
■ 1 perte de sensibilité transitoire, réversible en trois
du nerf alvéolaire par rapport à la corticale vestibu-
semaines, soit un pourcentage de complication de
laire, mais également dans le sens vertical. Il faut noter,
5%;
à ce propos, que l’étude de Gérard Schilling montre
■ aucune séquelle. une parfaite concordance entre les mesures sur os sec
La surface moyenne des prélèvements de ramus est de : et celles réalisées à partir du dentascanner.
■ 4 cm2 avec la technique classique. Les prélèvements Il nous semble qu’avec les techniques classiques, le
les plus importants ne dépassent pas une longueur de prélèvement est limité par la position du nerf alvéolaire
4 cm sur une largeur de 1,5, soit 6 cm2 ; inférieur et que l’augmentation du prélèvement par un
■ 6 cm2 avec la technique par fracture dirigée. Les pré- trait d’ostéotomie inférieur au nerf augmente certes la
lèvements les plus importants avec notre nouvelle taille du greffon – de façon peu significative – mais
technique sont de 8,5 cm2 (5 cm de long avec, sur avec un risque plus important de lésion du nerf.
une partie, 2 cm de large et, sur une autre, 1,5 cm de Notre technique est originale car seules trois ostéoto-
large). mies sont réalisées et le prélèvement se prolonge jus-
qu’à la basilaire de la branche horizontale : l’ensemble
La durée moyenne d’intervention est de :
de la corticale vestibulaire est prélevé (scanner de la
■ 35 min avec la technique classique ; Fig. 12 ). Le trait supérieur, s’il est réalisé jusqu’au
■ 25 min avec la technique de prélèvement mandibu- point situé en regard de la lingula, devrait éviter un
laire par fracture dirigée. traumatisme nerveux à ce niveau. Le trait mésial, s’il

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Fig. 20 Dentascanner avant reconstruction (cas clinique 1). Fig. 21 Dentascanner après reconstruction (cas clinique 1) :
reconstruction maxillaire à partir d’un prélèvement de ramus
et de Bio-Oss.

Fig. 22 Exemple d’une reconstruction verticale et transversale ; pré- Fig. 23 Panoramique avant reconstruction (cas clinique 2).
lèvement de ramus par fracture dirigée.

est réalisé sous contrôle d’un dentascanner, devrait


également limiter le risque neurologique. Néanmoins,
nous retrouvons dans notre étude 5 % de troubles de
la sensibilité en postopératoire (un cas sur 20 prélève-
ments, réversible en 3 semaines).
Chez ce patient, le nerf était emprisonné dans une
gouttière le long de la corticale vestibulaire et a dû
Fig. 24 Panoramique après reconstruction maxillaire avec un pré-
être progressivement dégagé après fracture dirigée
lèvement de ramus ; réhabilitation prothétique et implantaire :
Fig. 19 . Cette particularité anatomique explique l’hy-
Dr Teillet (cas clinique 2).
poesthésie labiomentonnière postopératoire. Ces
troubles de sensibilité sont couramment observés en
chirurgie orthognathique dans les ostéotomies de la
branche montante, techniques qui présentent les Quelle que soit la technique de prélèvement utilisée,
mêmes limites anatomiques. Par ailleurs, dans notre nous constatons un taux non négligeable de troubles
étude, lorsque le nerf avait une position proche de la de la sensibilité en postopératoire, supérieur semble-t-
corticale vestibulaire, nous contre-indiquions le prélè- il aux études antérieures. Cette augmentation est peut-
vement de ramus classique afin de privilégier une tech- être liée à des prélèvements importants avec un trait
nique par fracture dirigée qui nous semblait apporter d’ostéotomie inférieur toujours réalisé sous la position
plus de sécurité vis-à-vis du nerf. du nerf alvéolaire inférieur.

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Les suites sont comparables quelle que soit la tech- tascanner depuis le foramen mentonnier jusqu’à la lin-
nique utilisée. Elles se limitent à un œdème important gula sécurise le prélèvement en permettant à l’opéra-
et parfois à des hématomes du côté du prélèvement. teur de choisir les ostéotomies – leur localisation, leur
Pour des reconstructions supérieures à trois dents, ver- profondeur – en fonction de la distance entre le nerf
ticales et transversales, nous avons associé au greffon alvéolaire inférieur et la corticale externe.
ramique un biomatériau de type Bio-Oss Fig. 21 dans Rappelons que dans près de 80 % des dentascanners
le sinus et à l’interface entre le greffon autologue et le étudiés, le nerf alvéolaire inférieur siège en regard du
site receveur. Cet ajout était lié à l’importance de la prélèvement, à une distance inférieure à 3,2 mm (rayon
reconstruction. Pour les reconstructions de crête plus de la microscie) de la corticale vestibulaire.
importantes, il nous semble indiqué de proposer au Lorsque les conditions anatomiques endobuccales ne
patient un prélèvement extra-oral. La greffe d’os parié- sont pas favorables, il est prudent de proposer un pré-
tal reste la technique de choix du fait de la simplicité lèvement extraoral.
des suites opératoires et du confort qui en résulte pour
le patient. La technique de prélèvement de ramus par fracture
dirigée jusqu’au bord basilaire accroît significativement
la taille du prélèvement, sans augmenter le risque de
lésion du nerf alvéolaire inférieur. Elle ne dépend pas
Conclusion d’un matériel spécifique pour l’ostéotomie et ne néces-
Le prélèvement de ramus offre la possibilité d’une site jamais l’utilisation d’un ciseau à os ou ostéotome,
reconstruction pour des secteurs limités avec des suites ce qui devrait éviter une lésion iatrogène du nerf alvéo-
simples. L’étude préalable de la mandibule par den- laire inférieur. ■

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