Vous êtes sur la page 1sur 10

 21-175-A-35

Dacryo-cysto-rhinostomie par voie endonasale


Dacryocystorhinostomy from endonasal route
B. Fayet, E. Racy

Mots clés : La dacryo-cysto-rhinostomie est l’intervention chirurgicale qui supprime la gouttière lacrymale pour pouvoir
Dacryo-cysto-rhinostomie marsupialiser le sac lacrymal dans la fosse nasale. Elle est indiquée principalement comme traitement des
Voies lacrymales sténoses lacrymonasales symptomatiques (abcès, colique lacrymale, suppuration, épiphora invalidant) et
Dacryocystite accessoirement pour la mise en place d’une intubation bicanaliculaire lorsque le cathétérisme vertical sans
Larmoiement fausse route n’est pas possible. La principale difficulté est de bien repérer et bien gérer la zone chirurgicale
Sténose lacrymonasale idéale au sein des multiples variantes anatomiques de la fosse nasale. Elle s’accommode mal des fosses nasales
Intubation que l’on ne peut élargir. Ses résultats peuvent être comparés favorablement à ceux de la voie externe.
© 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Keywords: The dacryocystorhinostomy is the surgery that removes the lacrymal duct for the fistulization of the lacrymal
Dacryocystorhinostomy sac into the nasal cavity. It is primarily indicated for the treatment of symptomatic lacrymo-nasal stenosis
Lacrymal duct impotency (abscess, lacrymal colic, discharge, disabling epiphora) and secondarily for the establishment of a bicanalicular
Dacryocystitis intubation when the vertical catheter without false route is not possible. The main difficulty is to properly
Epiphora identify and manage the ideal surgical area in multiple anatomic variations of the nasal cavity. This area
Lacrymo-nasal stenosis badly accommodates with nasal cavities which cannot be expanded. These results can be favorably compared
Intubation with results obtained from the the external route.
© 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Plan En un siècle, la technique de la DCR endonasale a beaucoup


évolué par rapport à la description princeps de Caldwell [2] grâce
■ Introduction et historique 1 à l’avènement du guidage endoscopique mais aussi grâce à une
meilleure connaissance de l’anatomie du méat nasal moyen.
■ Technique de la dacryo-cysto-rhinostomie endonasale 1 Au sein de la littérature lacrymale, la lecture de cinq publi-
Intrumentations 1 cations nous semble indispensable avant de débuter en voie
Anesthésie 2 endonasale.
Étapes opératoires 2 • Whitnall [5] souligne que la partie craniale de la gouttière
Traitement postopératoire 6 lacrymale est presque constamment doublée par une cellule
Évolution postopératoire 6 ethmoïdale dont l’importance du développement ventrocau-
■ Complications de la dacryo-cysto-rhinostomie par voie dal est variable. De ce fait, le passage dans l’ethmoïde antérieur
endonasale 6 est presque obligatoire au cours des DCR.
Complications liées au repérage 7 • Blaylock et al. [6] mettent en exergue l’importance du clivage de
Saignements 7 la suture maxillolacrymale qui constitue la base de standardi-
Douleurs 7 sation de l’ostéotomie de la voie externe.
Complications esthétiques 7 • Welham et al. [7] définissent les critères de qualité d’une bonne
Complications diverses 8 ostéotomie : l’ablation osseuse doit comporter toute la gout-
■ Résultats et indications 8 tière lacrymale et la partie haute du conduit lacrymonasal pour
Taux de succès 8 prévenir les échecs et notamment les SAS muqueux (sump syn-
Mécanismes des échecs 8 drome). En fin d’ostéotomie, le canalicule commun doit être
Voie endonasale ou voie externe ? 8 entouré d’un cercle de liberté de 3 à 5 mm de diamètre.
Indications 8 • McDonnogh et Meiring [8] montrent que l’ablation du processus
unciforme donne un accès direct à la voie lacrymale verticale.
• Fayet, Racy et al. [9] ont montré que la cellule ethmoïdale décrite
par Withnall et le processus unciforme ne faisaient qu’un.
La maîtrise de la rhinoscopie antérieure est un prérequis pour
débuter dans la DCR par voie endonasale. Les éléments constitu-
 Introduction et historique tifs de la zone chirurgicale (maxillaire, cornet moyen, processus
unciforme, septum nasal) présentent chacun un continuum de
La dacryo-cysto-rhinostomie (DCR) est l’intervention chi- variations anatomiques. Elles sont indépendantes les unes des
rurgicale qui supprime la gouttière lacrymale pour pouvoir autres, ce qui explique qu’il n’existe pas deux fosses nasales iden-
marsupialiser le sac lacrymal dans la fosse nasale. Elle est indiquée tiques. La transillumination du canalicule commun est une bonne
principalement comme traitement des sténoses lacrymonasales. sécurité pour débuter.
Historiquement, si l’on excepte l’intervention lacrymale men-
tionnée dans le Code d’Hamourabi [1] , la voie endonasale a été la
première voie d’abord décrite à la fin du XIXe et au début du XXe
siècle [2, 3] .  Technique
Elle a été totalement supplantée par la voie externe à la suite des de la dacryo-cysto-rhinostomie
travaux de Toti et de Dupuis-Dutemps publiés quelques années
plus tard [4] . Cette DCR par voie externe présentait plusieurs avan- endonasale
tages substantiels :
• elle se déroulait à ciel ouvert ; Intrumentations
• l’enseignement de la technique était simple parce qu’elle
n’imposait pas au préalable une parfaite connaissance de Visualisation du site opératoire
l’anatomie nasale ; Elle se fait par guidage endoscopique. On utilise un endoscope
• les étapes opératoires étaient bien standardisées ; rigide de 4 mm de diamètre externe avec une visée dans l’axe
• les résultats postopératoires étaient très bons et consensuels. dite 0◦ . La visée panoramique (PanoView) des optiques offre un

EMC - Ophtalmologie 1
Volume 21-175-A-35 2012
doi:10.1016/S0246-0343(12)55706-0
21-175-A-35  Dacryo-cysto-rhinostomie par voie endonasale

champ de vision équivalent, voire supérieur à celui obtenu avec risque d’effraction intraorbitaire. L’infiltration est étendue à la par-
le microscope opératoire. Le guidage endoscopique permet de tie antérieure du cornet moyen et/ou du septum nasal lorsqu’une
mobiliser la visée dans la fosse nasale bien plus profondément et résection de ces structures s’avère nécessaire. Ce geste ne semble
plus rapidement qu’on ne le ferait avec un microscope opératoire. pas souhaitable lors des reprises de DCR si les repères ne sont pas
L’image est recueillie par une microcaméra raccordée à un moni- certains.
teur. L’endoscope est entouré d’un système d’irrigation-aspiration
qui nettoie l’optique à la demande. Les gaines lavantes aspirantes
permettent de limiter les entrées et sorties de l’endoscope. Tout ce Étapes opératoires
matériel doit être autoclavable. Repérage de la zone chirurgicale
Matériel chirurgical Rhinoscopie antérieure
Elle permet d’apprécier l’accès à la zone chirurgicale.
• Instruments lacrymaux : un dilatateur double, une sonde à Il n’existe pas deux fosses nasales identiques, et l’expérience est
voies lacrymales type Galezowski ; une pince droite sans griffe irremplaçable. Après vasoconstriction muqueuse, il existe sché-
type Kocher. matiquement trois situations :
• Instruments pour gérer l’étape lacrymonasale : un décolleur à • les instruments atteignent le méat moyen sans blesser la
bout mousse, une pince à prise déjetée avec des mors orientés muqueuse nasale : la fosse nasale est dite « large » ;
à 45◦ , type Blakesley, de 3 mm de largeur ; une paire de ciseaux • les instruments sont arrêtés par les variantes anatomiques du
courbes à cornet ; une faux ; un aspirateur coagulant. septum nasal et/ou du cornet moyen. Le septum nasal est excep-
• Instruments pour l’ostéotomie : tionnellement rectiligne et médian mais les anomalies vraiment
◦ emporte-pièces (rongeurs) : le diamètre est de 3 mm chez gênantes sont plus rares (< 15 %). Elles varient de la déviation
l’adulte et 2 mm chez l’enfant. L’ouverture se fait à 90◦ de localisée jusqu’à l’obstruction complète de la fosse nasale par
l’axe du manche, en direct et en inversé ; la cloison et la lame perpendiculaire de l’ethmoïde. Bien plus
◦ forage protégé : la tige du foret est incorporée dans une gaine souvent, c’est la tête du cornet moyen qui handicape l’accès à la
métallique qui la sépare de l’endoscope et surtout de la zone chirurgicale lorsqu’elle est avancée et/ou renflée en bulbe.
muqueuse nasale. La fraise dépasse à l’extrémité terminola- Ce renflement est parfois la conséquence d’une pneumatisation
térale de la gaine. Le diamètre de la fraise à pans varie de 2,7 (concha bullosa). Ce n’est pas constant. Dans ces différents cas,
à 4 mm environ. La fraise la plus employée mesure 3,2 mm. la fosse nasale est étroite mais élargissable ;
Ce tube protecteur comporte son propre système d’irrigation- • la fosse nasale, bien que rectiligne, est filiforme dans son
aspiration. L’irrigation diminue les risques de brûlure osseuse ensemble et n’autorise pas une progression atraumatique des
et muqueuse et réduit la formation de vapeurs. La bouillie et instruments. Cette fosse nasale que l’on ne peut élargir rend
le saignement disparaissent en partie grâce à l’aspiration de très difficile la réalisation d’une voie endonasale.
la pièce à main. L’irrigation-aspiration intégrée au forage est
un progrès par rapport au forage simple. L’instrumentation Imagerie
restérilisable est quasi inusable. Les incidences doivent préciser les notions suivantes :
• l’insertion antérieure du processus unciforme sur la paroi laté-
Remarques concernant l’instrumentation rale ;
• l’existence d’une procidence méningée ;
• Le microscope opératoire équipé d’une focale 300 mm présente • la position du récessus frontal ;
l’avantage de donner une image stéréoscopique, mais il est par- • une pathologie associée comme : un aspergillome du sinus
fois difficile de focaliser assez loin dans la fosse nasale. maxillaire, une sinusite, une polypose, une maladie de Wege-
• L’optique 30◦ présente l’avantage de visualiser obliquement le ner, etc. ;
site opératoire, mais rend l’orientation plus difficile pour les • après échec d’une DCR : la position de l’ostéotomie par rap-
premiers cas. port au reste de sac lacrymal. C’est dans ce dernier cas que
• Le forage simple est bon marché mais présente les risques inhé- l’opacification simultanée du sac lacrymal est intéressante.
rents à l’absence de protection. Le foret en rotation peut brûler L’imagerie est confrontée aux données de la rhinoscopie anté-
la muqueuse nasale et/ou l’orifice narinaire. Ce risque est plus rieure.
important si la fosse nasale est étroite. Les vapeurs osseuses
peuvent affecter la visibilité du site opératoire. Le forage non Transillumination [10–14]
protégé nous semble devoir être abandonné. On utilise une fibre optique reliée à un générateur de lumière
• La gouge et le marteau ont largement fait la preuve de leur froide. Il s’agit des mêmes fibres que celles utilisées en chirurgie
efficacité. Nous n’en avons pas l’expérience dans la DCR. vitréorétinienne. La fibre est guidée jusqu’au contact osseux. On
• Aucun des lasers disponibles n’est suffisamment efficace pour cherche à dépister l’apparition du spot de lumière en fosse nasale.
réaliser l’ostéotomie maxillaire. Sa réputation d’innocuité est Si la fibre optique reste bien horizontale, le spot indique la posi-
usurpée. À cette date, l’intérêt du laser, pour le patient, n’a pas tion du canalicule commun. La zone de sécurité chirurgicale se
été démontré. situe en avant et en bas du spot (si la fibre n’a pas perforé les voies
lacrymales).
Le recours à la transillumination du canalicule commun
Anesthésie n’est pas indispensable. Cependant, cette aide nous semble
irremplaçable pour l’enseignement de la méthode et chaque fois
Anesthésie locorégionale ? Anesthésie générale ? que l’anatomie est remaniée. Statistiquement, le spot apparaît
Les techniques d’anesthésie sont identiques à celles de la voie juste en dessous de l’opercule du cornet moyen. L’hypertrophie
externe. Nous trouvons pour notre part l’anesthésie locorégionale de la première cellule ethmoïdale peut le masquer.
inconfortable pour une voie endonasale.
Dacryo-cysto-rhinostomie ethmoïdale (encore
Préparation de la fosse nasale appelée « unciformienne » ou rétrograde)
Le méat moyen de la fosse nasale est méché avec une solution Elle reproduit en miroir la standardisation technique de la voie
de Xylocaïne® à 5 % naphazolinée chez l’adulte et de Xylocaïne® externe [15] .
à 1 % adrénalinée chez le petit enfant.
Après quelques minutes, la muqueuse nasale en regard de la Élargissement programmé de la fosse nasale
zone chirurgicale est infiltrée par une solution de Xylocaïne® à Cette étape est facultative. Elle s’adapte cas par cas aux condi-
1 % adrénalinée avec une seringue à pas de vis de 5 ml et une tions locales (Fig. 1 à 3).
aiguille de 21 gauge. Un ou 2 ml suffisent. Cette infiltration reste • Septum nasal. La subluxation septale par pression ou à
au contact de la partie maxillaire de la gouttière pour prévenir le l’aide d’un écarteur à valves (type Killian) est simple et

2 EMC - Ophtalmologie
Dacryo-cysto-rhinostomie par voie endonasale  21-175-A-35

Figure 1. Vue préopératoire. Figure 3. Détail de la bosse lacrymale et du cornet moyen.

Figure 4. Ciseaux à cornet.

Figure 2. Transillumination et cornet moyen recouvrant.

rapide [16] mais comporte un risque de fracture de la lame


criblée de l’ethmoïde chez le sujet âgé ostéoporotique. Nous
l’avons définitivement abandonnée au profit de la septoplastie
chirurgicale.
• Cornet moyen. La turbinectomie moyenne antérieure est réali-
sée délicatement, à l’aide de ciseaux courbes à cornet (Fig. 4, 5).
La section doit se faire sans imprimer de mouvement de torsion
au cornet moyen, au risque de transmettre cette torsion à la
lame criblée de l’ethmoïde avec le risque de rupture. La résec-
tion se limite à la portion tout antérieure du cornet moyen. Figure 5. Après turbinectomie moyenne antérieure.
Cette turbinectomie moyenne antérieure est jugée suffisante
lorsque plus aucune portion de cornet moyen ne double en
dedans la zone d’abouchement du sac et que les instruments Lambeau mucopériosté
atteignent librement l’opercule du cornet moyen (OCM) et La muqueuse nasale est incisée en U, avec une charnière dorsale.
la jonction maxillaire-os lacrymal. Il est inutile d’étendre la L’incision ventrale, presque verticale, se fait sans jamais quitter
turbinectomie moyenne antérieure plus vers l’arrière, car le le contact avec le processus frontal du maxillaire, assez près de
risque de complications augmenterait sans bénéfice supplé- son bord postérieur. Elle ne dépasse pas en hauteur l’OCM et se
mentaire [17–19] . termine près du cornet inférieur.

EMC - Ophtalmologie 3
21-175-A-35  Dacryo-cysto-rhinostomie par voie endonasale

Figure 6. Clivage du volet mucopériosté initié sur la bosse lacrymale.


Figure 7. Le clivage du volet mucopériosté est prolongé jusqu’à la
suture maxillolacrymale.
L’incision caudale est horizontale, d’arrière en avant, juste au-
dessus du cornet inférieur. L’incision crâniale est horizontale et
un peu plus petite que la précédente. Elle se situe juste en des-
sous de l’OCM. Par prudence, il est important, pour réaliser les
incisions crâniale et caudale, de bien enrouler le bord postérieur
du maxillaire, d’arrière en avant. Le décolleur mousse clive ce
volet de muqueuse nasale jusqu’à dénuder l’apophyse frontale
du maxillaire. Le volet de muqueuse nasale est saisi au niveau
de l’OCM avec une pince à prise déjetée puis éliminé. Les bords
de la fenêtre muqueuse ainsi obtenue sont cautérisés en cas de
saignement persistant.
Dans la majorité des cas, la gouttière lacrymale est doublée à
sa partie craniale par une pellicule osseuse à peine plus épaisse
que l’os lacrymal lui-même : c’est la partie antérieure du processus
unciforme [8, 20] qui fait partie de l’ethmoïde antérieur.
Le processus unciforme est clivé puis médialisé. Là encore, ce
geste se fait en prenant appui sur le maxillaire, avec un décolleur
à bout mousse, en remontant jusqu’à l’OCM. Insistons encore : ce
geste prudent ne doit pas quitter son appui contre le bord posté-
rieur du maxillaire. Dès le clivage et la médialisation du processus
unciforme, on peut apercevoir la paroi interne du sac lacrymal,
doublé en dedans par l’os lacrymal. Il se laisse mobiliser par les
mouvements imprimés à la sonde à voies lacrymales ou par la
fibre transilluminatrice. Ceci permet alors d’analyser les rapports
de la gouttière lacrymale avec le processus unciforme. Le dépistage
du spot peut être facilité en diminuant l’intensité lumineuse de Figure 8. Contrôle avec la transillumination.
l’endoscope. Toute la partie de processus unciforme en regard de
la gouttière lacrymale doit être éliminée [7] . Il est complètement
inutile de retirer la partie horizontale du processus unciforme. En haut et en arrière on peut apercevoir le relief de l’artère eth-
Deux refends aux ciseaux sont réalisés, parallèles au grand axe moïdale antérieure qui marque la ligne de réflexion de l’étage
des cornets, sur 1 cm environ, puis la languette de processus unci- antérieur de la base du crâne. Elle doit être respectée.
forme est saisie à la pince et retirée. Ceci contribue à augmenter Soulignons que dans moins de 10 % des cas, l’insertion anté-
l’espace chirurgical en regard de la gouttière lacrymale. rieure du processus unciforme reste postérieure à la crête lacrymale
Noter que la réalisation du volet de muqueuse nasale et le cli- postérieure sur toute la hauteur de la gouttière lacrymale [5, 6, 9, 20] .
vage du processus unciforme sont souvent simultanés lors de la L’unciformectomie antérieure est alors totalement inutile et serait
réalisation du lambeau mucopériosté (Fig. 6 à 8). dangereuse.
L’ablation de la partie antérieure du processus unciforme [8]
donne accès au bord postérieur du processus frontal du maxillaire Ostéotomie
et ouvre les cellules ethmoïdales antérieures (groupe cellulaire Le repérage de la suture maxillolacrymale va permettre de repro-
unciformien). Il faut compléter cette ouverture jusqu’à la gout- duire en miroir l’ostéotomie que l’on ferait par voie externe [21–29] .
tière uncibullaire et bien retirer la racine du processus unciforme Les emporte-pièces sont engagés dans la jonction maxillaire-os
dans sa partie haute. Elle est généralement située à proximité de la lacrymal, près du cornet inférieur (Fig. 9). Pour le forage osseux,
partie postérosupérieure du dôme du sac. Ce geste peut ouvrir le la tête du foret est plaquée contre le bord postérieur du proces-
récessus frontal lorsqu’il se draine dans ce groupe cellulaire, ce qui sus frontal du maxillaire. La rotation du foret ne doit pas être
est le cas dans 30 % des cas [9] . Il faut alors être très prudent pour déclenchée en avançant dans la fosse nasale mais uniquement
ne pas réaliser de destruction muqueuse circulaire au niveau de en ressortant. Il est exceptionnel que la convexité de la bosse
ce récessus, ce qui risquerait d’entraîner une complication sinu- lacrymale soit telle que l’on ne puisse pas isoler la suture maxillo-
sienne frontale. lacrymale au moins dans sa partie inférieure.

4 EMC - Ophtalmologie
Dacryo-cysto-rhinostomie par voie endonasale  21-175-A-35

Figure 9. Début de l’ostéotomie avec un emporte-pièce. Figure 11. En fin d’ostéotomie, le sac est bien dégagé. Test de « liberté
osseuse » avec la sonde transilluminatrice.

Figure 10. Ostéotomie de la partie inférieure de la gouttière lacrymale.


Figure 12. Aspect final. Le sac est marsupialisé et l’on voit apparaître
l’intubation par le canalicule commun.
La partie lacrymale de la gouttière lacrymale est éliminée par
simple pelage (Fig. 10). Une sonde à voies lacrymales mobilise le
sac tandis que le décolleur à bout mousse médialise en douceur senter comme une « fleur de liseron ». Il est classique de respecter
l’os lacrymal. Il faut prendre garde à ne pas aller trop en arrière un cercle de liberté de 3 ou 5 mm autour du canalicule commun [7] .
pour ne pas perforer la lame papyracée. Les pellicules d’os lacrymal
sont éliminées à la pince.
La qualité de la séquence osseuse s’apprécie cliniquement : la Gestes associés
pression avec un doigt appliqué contre la région médiocanthale
• Intubation. Son intérêt n’est pas discutable lorsqu’une patho-
médiale mobilise librement le sac dans la fosse nasale (Fig. 11).
logie canaliculaire est associée. En l’absence de sténose
Les bords de l’ostéotomie sont un peu plus périphériques que le
canaliculaire associée, le bénéfice de l’intubation reste à démon-
contour du sac lacrymal.
trer.
• Méchage. Le recours au méchage n’est pas systématique. Il est
Marsupialisation du sac lacrymal (Fig. 12, 13) réservé aux saignements non contrôlés par l’hémostase élec-
La paroi interne du sac est médialisée avec une sonde ou trique ou alors pour réappliquer la muqueuse nasale après
une pince. Le sac lacrymal est ouvert à l’aide d’une faux ou de septoplastie. Nous utilisons des produits très rapidement résor-
microciseaux. Toute la face médiale du sac lacrymal et du canal bables.
lacrymonasal doit être éliminée. La sonde lacrymale est mobilisée • Attelle de cornet. Son efficacité n’est pas démontrée. Nous pré-
dans les différents plans de l’espace pour analyser la liberté osseuse férons un élargissement programmé de la fosse nasale.
autour du canalicule d’union, particulièrement avec l’OCM. En fin • Attelle septale. En cas de septoplastie associée, elle réapplique
d’intervention, la face interne du canalicule d’union doit se pré- le périchondre et la muqueuse pendant la première semaine.

EMC - Ophtalmologie 5
21-175-A-35  Dacryo-cysto-rhinostomie par voie endonasale

• Les recommandations portent sur la présence éventuelle d’une


sonde lacrymale associée. Il est interdit au patient de se mou-
cher, de renifler pendant une dizaine de jours et de prendre
l’avion pendant une quinzaine de jours. Les visites de contrôle
sont programmées à j1, j7, j30 et 1 an. Un arrêt de travail de 1
semaine environ semble suffisant.

Évolution postopératoire
• Sur le plan clinique, les suites sont morphologiquement plus
simples que pour une voie externe car on ne décèle habituel-
lement aucun signe extérieur d’intervention : ni œdème, ni
hématome, ni inocclusion palpébrale, etc.
• Sur le plan fonctionnel, il n’existe ni douleurs, ni céphalée et le
larmoiement disparaît dès la première semaine.
• Sur le plan endoscopique, l’analyse du rétablissement de la
continuité muqueuse, entre la fin de l’intervention et la cica-
trisation finale, est difficile en raison de la présence quasi
constante de sécrétions qui masquent et adhèrent à la zone
opératoire durant toute cette période. Compte tenu de tous ces
handicaps de visualisation, il est bien difficile d’affirmer que les
sutures muqueuses influencent réellement le rétablissement de
la continuité.
En synthèse de nos observations, il semble que la muqueuse
Figure 13. Aspect 1 an plus tard avec test à la fluorescéine. nasale bourgeonne pour rejoindre la muqueuse lacrymale. Cette
dernière aurait plutôt tendance à se rétracter qu’à proliférer. La
Remarques fusion des muqueuses est obtenue en moins de 2 mois en règle
générale, mais la vitesse de cicatrisation est très variable selon les
• Le chlorhydrate de cocaïne est un puissant vasoconstric- individus.
teur mais est contre-indiqué chez les sujets âgés et chez les Cette cicatrisation nasale peut être capricieuse avec des croûtes
coronariens en raison du fort passage systémique dû à la vas- plus ou moins longues à se résorber. Chez certains patients, on
cularisation de la fosse nasale. Sa supériorité sur la naphazoline note un retard de cicatrisation avec un os dénudé (maxillaire)
est discutable. d’aspect ostéitique, alors souvent recouvert de croûtes purulentes.
• On sépare sur le plan technique une méthode unciformienne (cf. Un prélèvement local retrouve souvent une colonisation par Sta-
supra) et une méthode maxillaire. Dans la technique maxillaire phylococcus aureus, germe habituellement présent dans le vestibule
(encore appelée antérograde), l’ostéotomie est débutée délibé- narinaire. Dans ce cas, le patient peut signaler des cacosmies et/ou
rément en pleine bosse lacrymale [16, 30–33] . L’ablation osseuse est des douleurs de la branche montante du maxillaire.
élargie de proche en proche en s’enfonçant dans la fosse nasale, L’examen endoscopique de la fosse nasale et de l’ostium peut
jusqu’à dégager le sac lacrymal. La gouge et le marteau trouvent être handicapé par l’interposition de synéchies postopératoires.
là tout leur intérêt. Cette technique présente l’avantage de ne Elles sont secondaires à des traumatismes muqueux. Ces synéchies
pas imposer d’élargissement du méat moyen de la fosse nasale sont d’autant plus fréquentes que la fosse nasale était étroite. Elles
aux dépens du cornet moyen et/ou du septum nasal. Mais le sont beaucoup plus rares si la fosse nasale était large ou avait été
repérage est plus difficile et elle nous semble moins propice à la délibérément élargie par résection. Anatomiquement, toutes les
standardisation. La latéralisation des instruments peut blesser variétés de synéchies peuvent s’observer. Elles doivent être respec-
le muscle oblique inférieur, perforer la région canthale, source tées lorsqu’elles n’engendrent ni trouble respiratoire, ni obstacle
de cicatrice inesthétique ou de fistule permanente [34] . Notre au drainage lacrymal.
préférence pour la voie unciformienne est liée au fait que le repé- Des bourgeons charnus peuvent être retrouvés sur le bord de
rage endonasal de la suture maxilllolacrymale est relativement la muqueuse au contact des berges de l’ostéotomie ou au contact
aisé. Cette marque anatomique est parfaitement fiable. Une fois de l’intubation. Les bourgeons disparaissent spontanément une
ce clivage réalisé, il nous semble plus simple de reproduire les fois la cicatrisation terminée. Ce n’est qu’en cas de persistance
mêmes gestes que pour une DCR externe. La préférence tech- prolongée et avec échec fonctionnel que se discute un traitement
nique est sans influence sur le résultat si en fin d’intervention local par corticoïdes locaux ou par nitrate d’argent.
le canalicule commun est bien dégagé. La cicatrisation terminée montre une muqueuse lisse, sans
• La suture des muqueuses est séduisante [29, 35] car elle permet bourgeonnement ni croûtes, avec un orifice lacrymal bordé par
de poursuivre le parallèle technique avec la voie externe. Les un épithélium non inflammatoire. Il est alors impossible de
contrôles endoscopiques de nos tentatives de sutures diverses reconnaître les anciennes limites du sac lacrymal, et totalement
n’ont pas été concluants. L’affrontement de muqueuses après impossible de deviner les bords de l’ostéotomie. L’aspect macro-
sutures mécaniques comme thermiques n’est pas stable dans la scopique de l’abouchement est très variable. Il existe souvent
majorité des cas. une sorte de « delta », d’antichambre. L’observation directe du
canalicule d’union est difficile en raison de son orientation cau-
dale. Le succès fonctionnel est assuré lorsque les parois de l’
Traitement postopératoire « antichambre » restent à distance l’une de l’autre. La pression digi-
• Un flash d’antibiotiques juste avant l’intervention fait partie tale sur la région canthale mobilise un peu de larmes ou une bulle
des recommandations des chirurgies sinusiennes. Poursuivre d’air mais pas de mucus.
l’antibiothérapie per os pendant 1 semaine ne nous semble pas
nécessaire sauf si une septoplastie a été réalisée. L’instillation de
collyres associant néomycine et dexaméthasone à raison d’une  Complications
goutte quatre fois par jour est poursuivie pendant 7 jours.
• La fosse nasale est lavée au sérum physiologique, quatre fois par
de la dacryo-cysto-rhinostomie
jour pendant 15 jours. par voie endonasale
• L’ablation des croûtes nasales, notion classique après chirur-
gie ethmoïdale, ne nous paraît pas nécessaire, sauf en cas de Elles sont identiques à celles rapportées avec la voie externe.
menace de stricturotomie liée à leur agglutination sur le sili- Seules les fréquences diffèrent. Toutes les complications citées
cone. peuvent s’associer à des degrés divers.

6 EMC - Ophtalmologie
Dacryo-cysto-rhinostomie par voie endonasale  21-175-A-35

Complications liées au repérage brospinale. Le scanner doit être demandé de toute urgence. Sans
attendre son résultat, les précautions d’usage (antibiothérapie,
• Abcès du sac lacrymal secondaire au scanner avec injection des vaccination antipneumococcique) sont instaurées. Le pronostic
voies lacrymales. La survenue d’un abcès du sac lacrymal dans vital est engagé.
les suites immédiates de l’examen survient dans environ 1 % La fréquence exacte des effractions de la lame criblée de
des cas. Coïncidence ? l’ethmoïde et des rhinorrhées cérébrospinales après DCR est mal
• Complications de la transillumination [36] . La fiabilité de la connue, faute d’étude systématique.
transillumination est excellente ; mais elle n’a de valeur que Les publications de rhinorrhées cérébrospinales après DCR
positive. Elle peut être prise en défaut par les hypertrophies cliniquement parlantes sont anecdotiques [21, 37–41] au regard du
ethmoïdales ou lorsque l’OCM est situé en bas et en avant. nombre de DCR réalisées chaque année. Il n’est pas certain que la
L’inclinaison de la fibre transilluminatrice peut être utile mais voie externe soit plus sûre que la voie endonasale.
elle n’indique plus le canalicule d’union. Des sténoses canali- Cet accident a suscité plusieurs travaux anatomiques qui ont
culaires iatrogènes ont été signalées après utilisation de fibre montré que statistiquement, l’ostéotomie d’une DCR conserve
optique. Cette cicatrisation canaliculaire peut résulter soit une marge de sécurité par rapport à l’endocrâne [42–44] . Cependant,
d’une blessure de la muqueuse canaliculaire par l’extrémité de la cette marge de sécurité peut être prise en défaut par l’existence
fibre, soit d’une brûlure secondaire à un contact malencontreux d’une procidence méningée, toujours difficile à déceler clinique-
avec la coagulation. ment.
La possibilité d’un traumatisme indirect est moins souvent dis-
cutée dans la littérature lacrymale. Le septum nasal et/ou le cornet
Saignements moyen s’insère sur la lame criblée de l’ethmoïde, et un mouve-
Peropératoires ment de torsion malencontreux peut se compliquer d’effraction
de la lame criblée de l’ethmoïde. Toutes ne se compliquent pas
Sur le plan général, les deux éléments les plus importants de rhinorrhée cérébrospinale. Cette éventualité est observée dans
concernent le contrôle de la tension artérielle et la qualité de 10 % des premières séries de chirurgies fonctionnelles endosco-
l’hémostase. piques des sinus [45] .
Sur le plan local, la progression des instruments au sein d’une Le colmatage de la brèche, lorsqu’il est nécessaire, peut se faire
fosse nasale étroite peut blesser la muqueuse nasale qui va saigner par voie neurochirurgicale ou par voie oto-rhino-laryngologique.
dans un premier temps et risquer des synéchies en cicatrisant. Les douleurs de l’orifice narinaire compliquent les forages non
Ces traumatismes muqueux sont conditionnés par la promiscuité protégés qui ont brûlé l’orifice narinaire.
des parois de la fosse nasale et le nombre d’entrées-sorties des
instruments. Ces derniers sont limités par le couplage de système
d’irrigation-aspiration aux instruments et à l’optique. Douleurs secondaires (premières semaines)
L’élargissement chirurgical lors de la voie d’abord endona- • Les douleurs localisées à la pommette ou en regard du sinus
sale (septoplastie chirurgicale, turbinectomie moyenne partielle frontal suggèrent l’apparition d’une sinusite aiguë maxillaire
[TMP], unciformectomie antérieure) comporte en fait moins de ou ethmoïdofrontale. Ces complications sont rares et le plus
risque de saignement peropératoire car l’hémostase des tranches souvent résolutives médicalement. Ces sinusites relèvent soit
de section se fait dans de meilleures conditions. L’élargissement de l’aggravation d’un état inflammatoire préexistant, soit de
programmé comporte également moins de risque de synéchie modifications anatomiques induites par la DCR [46] . Anatomi-
postopératoire que le fait de laisser deux blessures muqueuses face quement, le récessus frontal est au contact de la face médiale
à face au sein d’un méat nasal étroit. de la gouttière lacrymale dans 30 % des cas et sa paroi antérieure
Les petits saignements peropératoires sont gênants pour la visi- est alors le processus unciforme. L’unciformectomie antérieure
bilité et sont inconfortables pour le patient opéré sous anesthésie peut léser le récessus frontal. Lorsque le sinus frontal a un
locale. Une coagulation opiniâtre nous paraît préférable à tout drainage très antérieur, le processus unciforme et la gouttière
méchage hémostatique, même avec des mèches à résorption très lacrymale peuvent constituer les parois, médiale et latérale, du
rapide. Les contrôles endoscopiques ont montré une réaction récessus frontal. Cependant, les sinusites frontales irréductibles
inflammatoire prolongée dont les conséquences sur le résultat sont très rares. L’unciformectomie antérieure peut théorique-
postopératoire sont inconnues. ment se compliquer de sinusite maxillaire ou ethmoïdale mais
ceci est très rarement reporté dans la littérature médicale.
Saignements secondaires • Les douleurs localisées à la branche montante du maxillaire
Les formes graves (pertes d’hémoglobine au-delà de 4 g) sug- suggèrent une ostéite maxillaire. Elle compliquerait une résec-
gèrent une blessure de l’artère ethmoïdale antérieure ou de l’une tion muqueuse trop étendue ou un bourgeonnement trop lent
de ses branches. La survenue d’une hémorragie n’est pas toujours qui laisseraient une partie de l’os maxillaire à nu dans la fosse
immédiate. Elle peut se démasquer secondairement lorsque l’effet nasale. L’ostéite est volontiers associée à une cacosmie. Cette
des vasoconstricteurs s’épuise. Elle peut n’apparaître que plus tard complication semble plus fréquente après méchage de la fosse
encore, au moment de la chute de l’escarre (vers le 5e jour). Dans nasale et suggère une contamination du site opératoire (staphy-
ces deux cas, une reprise chirurgicale pour une coagulation sélec- locoque, pyocyanique ou anaérobies).
tive n’est pas à exclure totalement.
La septoplastie chirurgicale comporte un risque d’infection
lorsqu’un hématome de cloison se forme dans les suites opéra- Complications esthétiques
toires.
Ecchymoses palpébrales
Mis à part ceux provoqués par l’anesthésie locale, les ecchy-
Douleurs moses et hématomes des paupières s’observent après effraction
de la lame papyracée de l’ethmoïde. Les ecchymoses non
Les douleurs après DCR sont totalement anormales. Elles consti-
compliquées disparaissent sans séquelles en 1 mois environ.
tuent un signe d’alarme majeur qui ne doit en aucun cas être
négligé. La date de survenue et leurs localisations permettent
d’orienter le diagnostic. Séquelles esthétiques
Elles semblent l’apanage de la voie maxillaire. Les strabismes
Douleurs précoces sont la conséquence d’une lésion du muscle droit médial ou de
L’apparition de céphalées dans les suites immédiates d’une l’oblique inférieur. Les fistules de la région médiocanthale et les
DCR, qu’elle soit externe, endonasale ou même transcanaliculaire, réactions cicatricielles exubérantes [34] compliquent des perfora-
fait redouter une brèche méningée. Lorsque le patient s’assoit, on tions ou une photoablation de la face latérale du sac et de son
constate un écoulement de liquide clair. C’est la rhinorrhée céré- enveloppe périostée.

EMC - Ophtalmologie 7
21-175-A-35  Dacryo-cysto-rhinostomie par voie endonasale

Complications diverses moyen ; ostéotomie de toute la gouttière lacrymale libérant large-


ment le canalicule commun. Les échecs de DCR endonasale sans
• L’apparition de graisse orbitaire dans le champ opératoire est décalage osseux sont souvent associés à une fibrose muqueuse. Le
presque constante après effraction de la lame papyracée. Cet pronostic d’une reprise est très mauvais.
événement doit rendre vigilant en raison du risque d’abcès
orbitaire, de blessure artérielle avec hématome rétrobulbaire
compressif et son risque de cécité. L’effraction orbitaire est Voie endonasale ou voie externe ?
plus fréquente dans la méthode classique, dite « maxillaire » ou
Les études comparant leurs voies endonasale et externe sont
« antérograde ». Le risque de hernie de graisse orbitaire oscille
rares [21, 23, 46, 48–50] et leur méthodologie critiquable, soit pour des
ainsi entre 4 % et 10 % [16, 34] . Dans la méthode rétrograde, dite
raisons de techniques chirurgicales, soit pour des décalages chro-
« ethmoïdale » ou « unciformienne », le taux de hernie de graisse
nologiques d’inclusion des cas.
orbitaire est inférieur à 1 % [46] .
Il n’existe aucune preuve irréfutable que la voie endonasale
• La cacosmie est la sensation d’une odeur désagréable par une
soit supérieure à la voie externe. Chaque opérateur a parfaite-
seule narine (en particulier dans ce cas dans la narine opé-
ment le droit d’avoir sa préférence. La voie endonasale paraît
rée). Elle nécessite toujours une consultation pour en vérifier
plus confortable dans les reprises de DCR, lorsqu’il faut associer
l’origine. Dans la majorité des cas, la cacosmie est simple-
un geste complémentaire (polypose, aspergillome, etc.) et dans le
ment due à la persistance de croûtes sur la sonde d’intubation
traitement d’abcès du sac lacrymal incontrôlable médicalement.
(plus Bika que Monoka) dans la fosse nasale, mais parfois une
La voie endonasale semble discutable chaque fois qu’une inci-
véritable rhinite croûteuse s’est installée, responsable d’une
sion canthale externe est imposée (dissection d’un diverticule du
cacosmie persistant plusieurs semaines (jusqu’à cicatrisation
sac lacrymal, abord sanglant du canalicule commun, canthopexie
muqueuse complète). Le traitement consiste en un décroûtage
nasale par plaque ou fil d’acier) et lorsque la fosse nasale est trop
et des lavages au sérum physiologique.
étroite.
• La sensation de « nez vide » (empty nose syndrome) complique
la résection excessive des cornets (moyens et inférieurs). Elle
est absente ici, car le cornet inférieur est toujours respecté et la Indications
résection du cornet moyen ne porte que sur une petite portion
antérieure. • La DCR est indiquée pour traiter les sténoses lacrymonasales
symptomatiques. Elle est d’autant plus efficace que la stase est
importante.
 Résultats et indications • La DCR est parfois nécessaire au cours de certaines intuba-
tions bicanaliculonasales anatomiquement difficiles. Le contact
Taux de succès osseux a bien été retrouvé mais le cathétérisme vertical sans
fausse route s’avère impossible. Dans cette situation, la DCR est
Globalement, le taux de succès après DCR par voie endonasale indiquée en association, même si le segment vertical des voies
oscille autour de 85 % d’après les grandes séries des 20 dernières lacrymales est dépourvu de pathologie.
années. • Chez l’enfant, les sténoses lacrymonasales réagissent remar-
Il est encore malaisé d’en tirer des enseignements pratiques car quablement bien à l’intubation lacrymonasale à l’inverse des
les séries sont peu comparables : la standardisation opératoire et sténoses lacrymonasales de l’adulte. La DCR constitue un
les critères de qualité ne sont pas consensuels, à l’inverse de la recours et les indications de première intention sont très rares.
voie externe. • La DCR a été proposée comme traitement des larmoiements
Dans notre expérience [46] , les résultats fonctionnels après DCR non expliqués, dits « à voies lacrymales perméables ». Nous n’en
endonasale unciformienne sont un peu meilleurs que ce que avons pas l’expérience.
nous obtenions après voie externe ou après voie endonasale
maxillaire [47] . L’efficacité de la voie endonasale est excellente
dans la prévention des rechutes de colique lacrymale (100 %) ou
de dacryocystite aiguë (99 %). Pour faire disparaître l’épiphora,
 Références
l’efficacité de la DCR est plus inconstante : elle est très bonne [1] Ducasse A. Les voies lacrymales. Paris: Masson; 2006.
(90 %) en cas de dacryocystite chronique isolée, que le sac lacrymal [2] Caldwell G. Two new operations for obstruction of the nasal duct, with
soit dilaté ou non. L’efficacité peut s’effondrer lorsque la sténose preservation of the canaliculi and an incidental description of a new
lacrymonasale est associée à une pathologie inflammatoire chro- lacrymal probe. N Y Med J 1893;57:581.
nique palpébrale (trachome, rosacée, blépharite, etc.) ou nasale [3] West JM. A window resection in the nasal duct in cases of stenosis.
(sarcoïdose, trisomie 21, etc.). Trans Am Ophthalmol Soc 1914;12:654–8.
[4] Dupuy-Dutemps L, Bourguet M. Procédé plastique de dacryo-
cystorhinostomie et ses résultats. Ann Ocul 1921;158:241–61.
Mécanismes des échecs [5] Whitnall SE. The relations of the lacrimal fossa to the ethmoidal cells.
Ils doivent être analysés en confrontant rhinoscopie antérieure Ophtalmic Rev 1911;30:321–5.
et tomodensitométrie. [6] Blaylock WK, Moore CA, Linberg JV. Anterior ethmoid anatomy faci-
L’examen endoscopique des échecs de DCR distingue trois caté- litates dacryocystorhinostomy. Arch Ophthalmol 1990;108:1774–7.
gories : [7] Welham RA, Henderson PH. Results of dacryocystorhinostomy ana-
• la synéchie interpariétale englobant l’ostium et une paroi en lysis of causes for failure. Trans Ophthalmol Soc UK 1973;93:601–9.
[8] McDonogh M, Meiring JH. Endoscopic transnasal dacryocystorhino-
regard, que ce soit le septum nasal ou le cornet moyen. C’est
stomy. J Laryngol Otol 1989;103:585–7.
l’apanage des fosses nasales étroites ou qui n’ont pas été
[9] Fayet B, Racy E, Assouline M, Zerbib M. Surgical anatomy of the lacri-
assez élargies. La synéchie interpariétale en dehors de l’ostium
mal fossa: a prospective computed tomodensitometry scan analysis.
n’affecte pas le drainage ; Ophthalmology 2005;112:1119–28.
• le sump syndrome : la persistance d’un sas muqueux se démasque [10] Gonnering RS, Lyon DB, Fisher JC. Endoscopic laser-assisted lacrimal
lorsque l’on exerce une pression sur la région canthale. Sur le surgery. Am J Ophthalmol 1991;111:152–7.
plan osseux, il persiste la partie basse de la gouttière lacrymale ; [11] Boush GA, Lemke BN, Dortzbach RK. Results of endonasal laser-
• la cicatrisation totale de la muqueuse nasale : aucun ostium assisted dacryocystorhinostomy. Ophthalmology 1994;101:955–9.
n’est visible. L’imagerie révèle le plus souvent la persis- [12] Menerath JM, Guichard C, Kydavongs P. Endonasal dacryocystorhino-
tance d’une partie de gouttière lacrymale. Une part de stomy using endoscopic guidance. Personal experience. J Fr Ophtalmol
néo-ostéogenèse pour expliquer les échecs secondaires d’une 1999;22:41–5.
DCR, bien que controversée, nous semble possible. [13] Massaro BM, Gonnering RS, Harris GJ. Endonasal laser dacryocys-
Dans la majorité des cas, la prévention des échecs se fait torhinostomy. A new approach to nasolacrimal duct obstruction. Arch
au niveau de l’étape osseuse : élargissement rationnel du méat Ophthalmol 1990;108:1172–6.

8 EMC - Ophtalmologie
Dacryo-cysto-rhinostomie par voie endonasale  21-175-A-35

[14] Woog JJ, Kennedy RH, Custer PL, Kaltreider SA, Meyer DR, Camara [33] Steadman MG. Transnasal dacryocystorhinostomy. Otolaryngol Clin
JG. Endonasal dacryocystorhinostomy: a report by the American Aca- North Am 1985;18:107–11.
demy of Ophthalmology. Ophthalmology 2001;108:2369–77. [34] Piaton JM, Keller P, Limon S, Quenot S. First line endonasal dacryo-
[15] Fayet B, Racy E, Assouline M. Systematic unciformectomy for cystorhinostomy. Technique and results. Comparison between diode
a standardized endonasal dacryocystorhinostomy. Ophthalmology laser and electrocautery instrument. Study based on 422 procedures. J
2002;109:530–6. Fr Ophtalmol 2002;25:135–45.
[16] Bernal Sprekelsen M. Results of endoscopically controlled dacryocys- [35] Tsirbas A, Wormald PJ. Mechanical endonasal dacryocystorhinostomy
torhinostomies. An Otorrinolaringol Ibero Am 1994;21:91–9. with mucosal flaps. Br J Ophthalmol 2003;87:43–7.
[17] Gustafson RO, Bartley GB. A plea for preservation of the middle tur- [36] Eloy P, Watelet JB, Claramunt R, Martinez M, Bertrand B, Hoe-
binate during dacryocystorhinostomy. Ophthal Plast Reconstr Surg beke M, et al. Internal approach to dacryocystorhinostomy. General
1999;15:75–6. considerations and preliminary results. Bull Soc Belge Ophtalmol
[18] Metson R. The endoscopic approach for revision dacryocystorhino- 1994;252:31–4.
stomy. Laryngoscope 1990;100:1344–7. [37] Fayet B, Racy E, Assouline M. Cerebrospinal fluid leakage after endo-
[19] Giacchi RJ, Lebowitz RA, Jacobs JB. Middle turbinate resection: issues nasal dacryocystorhinostomy. J Fr Ophtalmol 2007;30:129–34.
and controversies. Am J Rhinol 2000;14:193–7. [38] Beiran I, Pikkel J, Gilboa M, Miller B. Meningitis as a complication
[20] Soyka MB, Treumann T, Schlegel CT. The Agger Nasi cell and uncinate of dacryocystorhinostomy. Br J Ophthalmol 1994;78:417–8.
process, the keys to proper access to the nasolacrimal drainage system. [39] Dresner SC, Codere F, Brownstein S, Jouve P. Lacrimal drainage
Rhinology 2010;48:364–7. system inflammatory masses from retained silicone tubing. Am J Oph-
[21] Dolman PJ. Comparison of external dacryocystorhinostomy thalmol 1984;98:609–13.
with nonlaser endonasal dacryocystorhinostomy. Ophthalmology [40] Dryden RM, Wulc AE. Pseudoepiphora from cerebrospinal fluid leak:
2003;110:78–84. case report. Br J Ophthalmol 1986;70:570–4.
[22] Fayet B, Racy E. Is the uncinate process resection the key to endonasal [41] Wesley RE, Bond JB. Intranasal procedures for successful lacrimal
dacryocystorhinostomy? J Fr Ophtalmol 2000;23:433–6. surgery. Ophthal Plast Reconstr Surg 1986;2:153–7.
[23] Hartikainen J, Grenman R, Puukka P, Seppa H. Prospective randomized [42] Botek AA, Goldberg SH. Margins of safety in dacryocystorhinostomy.
comparison of external dacryocystorhinostomy and endonasal laser Ophthalmic Surg 1993;24:320–2.
dacryocystorhinostomy. Ophthalmology 1998;105:1106–13. [43] Kurihashi K, Yamashita A. Anatomical consideration for dacryocys-
[24] McDonogh M. Endoscopic transnasal dacryocystorhinostomy. Results torhinostomy. Ophthalmologica 1991;203:1–7.
in 21 patients. S Afr J Surg 1992;30:107–10. [44] Ritleng P, Caubet E, Fantin J. Lacrimo-meningeal relations: anatomical
[25] Mortimore S, Banhegy GY, Lancaster JL, Karkanevatos A. Endoscopic study and practical aspects. Bull Soc Ophtalmol Fr 1984;84:1205-8,
dacryocystorhinostomy without silicone stenting. J R Coll Surg Edinb 11, 14.
1999;44:371–3. [45] May M, Levine HL, Mester SJ, Schaitkin B. Complications of endosco-
[26] Tsirbas A, Wormald P. Agger nasi cell mucosal autograft for lacri- pic sinus surgery: analysis of 2108 patients–incidence and prevention.
mal sac reconstruction during endonasal dacryocystorhinostomy. Orbit Laryngoscope 1994;104:1080–3.
2004;23:105–10. [46] Fayet B, Racy E, Assouline M. Complications of standardized endo-
[27] Yung MW, Hardman-Lea S. Endoscopic inferior dacryocystorhino- nasal dacryocystorhinostomy with unciformectomy. Ophthalmology
stomy. Clin Otolaryngol Allied Sci 1998;23:152–7. 2004;111:837–45.
[28] Whittet HB, Shun-Shin GA, Awdry P. Functional endoscopic transna- [47] Fayet B, Vericel R, Racy E, El Aouani A, Bernard J, Renard G.
sal dacryocystorhinostomy. Eye 1993;7(Pt4):545–9. Dacryocystorhinostomie couplée à la transillumination canaliculaire.
[29] Codere F, Denton P, Corona J. Endonasal dacryocystorhinostomy: a Bull Mem Soc Fr Ophtalmol 1998;4:222–6.
modified technique with preservation of the nasal and lacrimal mucosa. [48] Javate RM, Campomanes Jr BS, Co ND, Dinglasan Jr JL, Go CG, Tan
Ophthal Plast Reconstr Surg 2010;26:161–4. EN, et al. The endoscope and the radiofrequency unit in DCR surgery.
[30] el Khoury J, Rouvier P. Endonasal dacryocystorhinostomy (95 cases). Ophthal Plast Reconstr Surg 1995;11:54–8.
Acta Otorhinolaryngol Belg 1992;46:401–4. [49] Sadiq SA, Hugkulstone CE, Jones NS, Downes RN. Endosco-
[31] Rouvière P, Vaille G, Garcia C, Teppa H, Frèche C, Lerault P. Dacryo- pic holmium:YAG laser dacryocystorhinostomy. Eye 1996;10(Pt1):
cystorhinostomy using the endonasal approach (author’s transl). Ann 43–6.
Otolaryngol Chir Cervicofac 1981;98:49–53. [50] Cokkeser Y, Evereklioglu C, Er H. Comparative external versus endo-
[32] Jouve Y, Dehon A, Blanc PH, Rouvier P. Dacryocystorhinostomy in scopic dacryocystorhinostomy: results in 115 patients (130 eyes).
endonasal microsurgery. Bull Mem Soc Fr Ophtalmol 1982;94:64–6. Otolaryngol Head Neck Surg 2000;123:488–91.

B. Fayet, Ancien interne des hôpitaux de Paris, ancien chef de clinique-assistant (brunofayet@club-internet.fr).
Service d’ophtalmologie, Hôtel-Dieu de Paris, 1, place du Parvis-Notre-Dame, 75004 Paris, France.
E. Racy, Ancien interne des hôpitaux de Paris, ancien chef de clinique-assistant.
Clinique Saint-Jean-de-Dieu, 19, rue Oudinot, 75007 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Fayet B, Racy E. Dacryo-cysto-rhinostomie par voie endonasale. EMC Ophtalmologie 2012;9(1):1-9
[Article 21-175-A-35].

Disponibles sur www.em-consulte.com


Arbres Iconographies Vidéos/ Documents Information Informations Auto- Cas
décisionnels supplémentaires Animations légaux au patient supplémentaires évaluations clinique

EMC - Ophtalmologie 9
Cet article comporte également le contenu multimédia suivant, accessible en ligne sur em-consulte.com et
em-premium.com :

1 autoévaluation
Cliquez ici

© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 13/05/2015 par COLMAR Hospitaux Civils de Colmar (54086)

Vous aimerez peut-être aussi