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Les pathologies de la surface oculaire constituent des entités variées impliquant la conjonctive, la cornée et
Mots-clés :
le film lacrymal. Les méthodes d’étude du film lacrymal représentent une seule facette de l’exploration de la
Film lacrymal surface oculaire qu’il est difficile de dissocier des méthodes d’examens conjonctival et cornéen. Cette évaluation
Conjonctive repose avant tout sur la réalisation de tests cliniques simples qu’il convient d’effectuer de façon rigoureuse
Test de Schirmer et dans un ordre précis. Le test de Schirmer, la mesure du break-up time, l’analyse de l’imprégnation par
Fluorescéine la fluorescéine et par le vert de lissamine restent les piliers de cette exploration. Les autres méthodes comme
Temps de rupture du film lacrymal la mesure de l’osmolarité du film lacrymal ou les empreintes conjonctivales sont des apports indéniables en
Vert de lissamine recherche et dans des cas d’inflammations conjonctivales complexes. Les techniques qui nécessitent le recueil
Osmolarité lacrymale des larmes souffrent de biais liés au mode de prélèvement.
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Keywords:
Lacrymal layer
Conjunctiva Ocular surface disorders are lacrymal, corneal and conjunctival entities. Methods to study lacrymal layer
Schirmer test can hardly be dissociated from conjunctival and corneal assessments. These evaluations are mainly based
Fluorescein on Schirmer test, Break up time, fluorescein and lissamin green stainings leading to the definition of an
Break-up time organigram. Other methods such as measurement of osmolarity or impression cytology are reliable methods
Lissamin green for research or for complex inflammatory cases. All techniques using tear sampling suffer from the biases due
Osmolarity to reflex tearing during the collection.
© 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Film lacrymal
Introduction Généralités
Les affections de la surface oculaire constituent un ensemble Le film lacrymal est l’interface entre l’œil et le monde exté-
hétérogène impliquant l’unité fonctionnelle représentée par le rieur. Il doit assurer une bonne qualité réfractive, une défense
film lacrymal et la surface cornéoconjonctivale. Le film lacry- antimicrobienne efficace et doit être capable de protéger la sur-
mal est une structure élaborée et dynamique dont le rôle est face oculaire contre toutes les attaques extérieures [3] . Il constitue
primordial. Chacune de ses couches a son importance et lui d’ailleurs la deuxième barrière de protection de la surface ocu-
permet d’assurer ses différentes fonctions qui sont de protéger laire après les paupières. Il est composé d’eau, d’enzymes, de
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Volume 11 > n◦ 2 > avril 2014
http://dx.doi.org/10.1016/S0246-0343(14)63262-7
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Couche lipidique
Test de Schirmer I et dérivés
Elle est essentiellement sécrétée par les glandes de Meibomius,
glandes de type holocrine qui sont enchâssées dans le tarse. Les tests décrits ci-dessous permettent d’apprécier le réflexe
Chaque orifice libère ses sécrétions lipidiques lors du clignement de larmoiement lié à une stimulation conjonctivale (Schirmer I),
et assure ainsi la diffusion des lipides à la surface du film lacry- nasale (Schirmer II) et rétinienne (Schirmer III) [11] .
mal. L’épaisseur et la stabilité du film lacrymal sont dépendantes Le test de Schirmer I mesure la sécrétion lacrymale totale, basale
de la capacité d’expression de ces glandes de Meibomius qui et réflexe. Une bandelette de papier buvard graduée de 5 en
sont sous l’influence de facteurs divers de types mécanique, ner- 5 mm est placée dans le fornix inféroexterne à la jonction du
veux, hormonal et physique. Sa composition majoritairement de tiers externe et des deux tiers internes du cul-de-sac conjoncti-
nature lipidique (triglycérides, acides gras libres, cires, choles- val pendant cinq minutes, en évitant tout contact cornéen. Le
térol estérifié) varie d’un sujet à l’autre. La phase lipidique du test, bilatéral et comparatif, est effectué sans anesthésie locale et
film lacrymal est constituée de deux niveaux distincts : un niveau avant toute instillation ou geste local (Fig. 1). La mesure doit être
superficiel constitué de lipides non polarisés, hydrophobes, et un lue au bout de cinq minutes (longueur de la zone humidifiée).
niveau profond constitué de lipides polarisés et en contact étroit On parle d’hyposécrétion lorsque l’imprégnation du papier
avec les lipocalines de la couche aqueuse sous-jacente. Elle repré- buvard est inférieure à 10 mm en cinq minutes. On améliore la
sente donc la couche la plus externe du film lacrymal et joue spécificité du test en retenant la valeur seuil de 5 mm. Cepen-
un rôle majeur malgré sa faible épaisseur. Elle assure quatre rôles dant, la sensibilité de ce test est médiocre (variant de 25 à 83 %
principaux : la prévention de l’évaporation de la couche mucinoa- selon les auteurs) et sa reproductibilité mauvaise rendant parfois
queuse, la lubrification de la cornée et des paupières au cours du l’interprétation de son résultat difficile. Ce test est important pour
clignement, le lissage du film lacrymal qui en améliore les qualités distinguer les différentes étiologies de sécheresse oculaire [12] .
optiques et enfin un rôle de barrière contre la contamination du Le test de Schirmer II mesure la sécrétion après stimulation de la
sébum cutané. muqueuse nasale avec un Coton-Tige® qui induit un larmoiement
réflexe dont la norme est située à 10 mm [13, 14] . Ce test serait plus
sensible que celui de Schirmer I mais est abandonné actuellement.
Couche aqueuse Le test de Schirmer III évalue l’influence de la stimulation lumi-
neuse sur la sécrétion lacrymale.
Elle représente la majeure partie du film précornéen et son
épaisseur est d’environ 8 m. Elle est principalement consti-
tuée d’eau (98 %), mais contient aussi des gaz, des électrolytes, Test de Jones
des facteurs de croissance, des composés organiques et pro-
téiques, des immunoglobulines et des cellules desquamées. La Il s’agit d’un test de Schirmer effectué après instillation d’un
sécrétion basale est assurée par les glandes lacrymales acces- anesthésique local qui supprime la composante réflexe du lar-
soires de Krause et Wolfring tandis que la sécrétion réflexe et les moiement due à l’irritation conjonctivale, même si la distinction
protéines le sont par la glande lacrymale principale. Elle joue
un rôle antimicrobien essentiel grâce à un taux élevé de lyso-
zyme et une concentration importante d’anticorps et permet
l’apport de nutriments, d’oxygène et une hydratation cornéenne
prévenant une kératinisation qui entraînerait une opacification
cornéenne.
Couche muqueuse
Elle est constituée de mucines qui sont des glycoprotéines de
haut poids moléculaire. Celles-ci sont sécrétées par les cellules à
mucus de la conjonctive. La couche muqueuse constitue la couche
la plus profonde du film lacrymal et elle adhère étroitement aux
Figure 1. Test de Schirmer I.
cellules épithéliales sous-jacentes.
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entre sécrétions basale et réflexe n’est pas aisée [15] . Il permet donc
une étude de la sécrétion lacrymale basale (flux physiologique)
et il est considéré comme anormal en dessous de 5 mm au bout
de cinq minutes de contact [16] . Il doit être réalisé au moins deux
minutes après l’instillation d’anesthésique local.
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Autres examens
• L’OCT de segment antérieur permet de fournir une image struc-
turelle du film lacrymal [34, 35] .
• Le microscope confocal in vivo permet surtout une visuali-
sation des conséquences cornéennes et conjonctivales d’un
dysfonctionnement lacrymal.
• L’analyse de la température du film lacrymal (thermographie)
semble être un moyen intéressant d’apprécier la qualité de celui-
ci. Cet examen reste du domaine de la recherche.
Dosages lacrymaux
Le mode de prélèvement à privilégier demeure le principal obs-
tacle au dosage lacrymal de différentes substances qui nécessitent
donc chacune la définition de la « moins mauvaise » méthode de
prélèvement [36] . Une stimulation, aussi minime soit-elle, liée à un
contact avec la conjonctive, ne met plus le prélèvement dans des
conditions basales puisqu’il entraîne un larmoiement réaction-
Figure 3. Examen de la surface oculaire à l’aide de colorants vitaux. nel, donc une dilution de la substance dosée d’autant plus que
Imprégnation par le vert de lissamine (chaque zone – nasale, temporale cette dilution varie selon les molécules. Une des méthodes pour
ou cornéenne – est cotée sur 3 dans le score de Van Bijsterveld). éviter ce biais est de rapporter la substance dosée à une variable
comme la teneur en albumine. Cette technique néglige toutefois
la variation protidique liée à certaines affections conjoncti-
marquage est évaluée par les mêmes classifications que pour le vales inflammatoires. Plus qu’une valeur absolue, il est donc
rose bengale (score de Van Bijsterveld, score d’Oxford) auquel il préférable d’évaluer, par le dosage direct dans les larmes, une
s’est progressivement substitué (Fig. 3) [26] . molécule par rapport à une autre (par exemple, rapport des
marqueurs du système Th1/Th2 dans les affections inflamma-
toires de la conjonctive). Le deuxième obstacle est bien entendu
Examens complémentaires le faible volume de larmes, circonstances encore aggravées
par la sécheresse oculaire, ce qui privilégie donc les micro-
méthodes permettant des dosages multiples à partir d’un seul
Test de clairance de la fluorescéine prélèvement.
Certains auteurs insistent sur la valeur du test de clairance d’une
solution de fluorescéine à 0,5 % (10 l) qui peut être effectué assez
facilement par l’évaluation du degré de dilution de fluorescéine au
Dosage du lysozyme et de la lactotransferrine
bout d’un temps donné par fluorométrie. Cet examen est un bon lacrymale
reflet du turnover des larmes, de la production de larmes et indirec-
tement des capacités de drainage des larmes. Les valeurs normales Il permet d’apprécier l’activité fonctionnelle de synthèse pro-
sont en moyenne de 19 contre 11 chez les patients atteints de syn- téique de la glande lacrymale puisque la lactoferrine représente
drome sec. Il serait plus sensible que le test de Schirmer et aurait le quart des protéines réflexes. Pour obtenir une analyse fiable, le
une meilleure corrélation avec les symptômes rapportés par les dosage du lysozyme doit être confronté à celui de sujets témoins
patients ; cependant, il n’est pas ou peu utilisé en pratique clinique du même âge. Il ne fait pas partie des critères fiables d’examens
courante [27] . Différents index ont été définis afin de sensibiliser les complémentaires en raison de la grande variabilité liée au mode
tests cliniques [28] . de prélèvement des larmes (disque de papier déposé au niveau de
la rivière lacrymale).
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Muselier A, Creuzot-Garcher C. Examen de la sécrétion lacrymale. EMC - Ophtalmologie 2014;11(2):1-7
[Article 21-169-A-10].
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Iconosup 6
Évaluation de la hauteur du ménisque de larmes qui peut être coloré par la fluorescéine pour faciliter la mesure. Sa valeur normale
est d'environ 0,3 mm. On remarque la présence d'une imprégnation cornéenne par la fluorescéine.
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Iconosup 7
Mesure du temps de rupture du film lacrymal : une quantité minime de fluorescéine est instillée. La cornée est alors examinée en
lumière bleue pour mesurer le délai d'apparition de la première zone sombre au niveau de la surface cornéenne. Cette zone ne doit
pas correspondre à une ulcération cornéenne mais bien à un dry spot distribué de façon aléatoire à la surface cornéenne.
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Iconosup 8
Marquage par le vert de lissamine. La coloration par imprégnation à partir de bandelettes imprégnées de vert de lissamine est
parfois peu marquée (a). L'utilisation d'un filtre rouge permet de facilité la détection (b).
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© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 13/05/2015 par COLMAR Hospitaux Civils de Colmar (54086)