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Névralgie du trijumeau
et neurochirurgie
M. Sindou, Y. Keravel, E. Simon, P. Mertens

Désormais la neurochirurgie moderne permet dans presque tous les cas de venir à bout de la douleur des
névralgies trigéminales essentielles. Lorsque celles-ci deviennent pharmacorésistantes, on peut avoir
recours à deux grands types de méthodes chirurgicales. Les premières correspondent à l’interruption des
voies responsables des phénomènes douloureux. Elles sont soit percutanées : thermocoagulation,
compression par ballonnet gonflable ou injection de glycérol, soit par radiochirurgie stéréotaxique. Le
second type de méthode est la décompression vasculaire microchirurgicale qui lève le conflit
vasculonerveux sur la racine trigéminale, cause la plus fréquente de la névralgie essentielle. Cette
méthode, qui est conservatrice et curative, nécessite un abord direct sous anesthésie générale. Elle
s’adresse aux patients en bon état général. Lorsque les patients sont très âgés et/ou en état général
précaire, les méthodes percutanées ou la radiochirurgie sont préférables, mais la durée de leur efficacité
est généralement proportionnelle au degré d’hypœsthésie séquellaire, avec ses conséquences.
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Mots clés : Névralgie ; Trijumeau ; Conflit vasculonerveux ; Compression vasculaire ;


Décompression vasculaire microchirurgicale ; Thermocoagulation ; Compression par ballon ;
Neurolyse au glycérol ; Radiochirurgie stéréotaxique ; Neurochirurgie fonctionnelle ; Microchirurgie

Plan compléter l’article de l’EMC sur les « Aspects cliniques et


thérapeutiques des névralgies essentielles du trijumeau et du
glossopharyngien » [1] (Fig. 1).
¶ Introduction 1
¶ Préalables à la décision chirurgicale 1
¶ Données d’observation anatomopathologiques 1 ■ Préalables à la décision
¶ Imagerie par résonance magnétique 2 chirurgicale
¶ Techniques neurochirurgicales 3
Évolution des techniques. Historique 3 La décision du passage au traitement chirurgical doit être
Techniques actuelles 4 précédée des trois démarches suivantes.
Il faut tout d’abord s’assurer que la douleur faciale est bien
¶ Indications chirurgicales 10 une névralgie du trijumeau. Cela est facile si les caractéristiques
Décision de chirurgie 10 cliniques sont typiques, mais plus difficile s’il existait des
Choix de la technique chirurgicale 11 atypies d’emblée ou si la névralgie est devenue atypique en
¶ Conclusion 13 vieillissant. Il est capital de rechercher par l’interrogatoire si les
antalgiques de type anticonvulsivant (carbamazépine, clonazé-
pam, gabapentine, etc.) ont été efficaces ou non, au moins au
début.
■ Introduction Il faut ensuite vérifier que tous les traitements médicamen-
teux classiques ont été conduits correctement, c’est-à-dire à
La névralgie trigéminale fut l’une des premières préoccupa- doses suffisantes, pendant une durée prolongée, et sans inter-
tions des neurochirurgiens. Dès le début du XXe siècle furent ruption intempestive par le patient.
développées des techniques efficaces : neurotomie rétrogassé- Il faut enfin que toutes les causes de névralgies symptomati-
rienne et radicotomie juxtaprotubérantielle, bien avant l’intro- ques (c’est-à-dire secondaires) aient bien été éliminées par les
duction de la diphénylhydantoïne par Bergouignan en 1941 et bilans ophtalmologique, otorhinolaryngologique, odontosto-
de la carbamazépine par Blom en 1962. Depuis, de nouvelles matologique et neurologique appropriés. De surcroît, une
techniques se sont développées. Les unes, « lésionnelles », imagerie par résonance magnétique (IRM) encéphalique de
interrompent les voies responsables de la douleur névralgique : principe est conseillée sinon obligatoire.
elles peuvent être faites par voie percutanée ou par la radiochi-
rurgie. Les autres, « conservatrices », visent à supprimer l’agent
responsable de la névralgie, à savoir les conflits vasculonerveux. ■ Données d’observation
Il s’agit de la décompression vasculaire microchirurgicale
(DVMC). C’est la place de la neurochirurgie dans l’arsenal
anatomopathologiques
thérapeutique de la névralgie essentielle (c’est-à-dire primitive) D’après la littérature, les constatations opératoires faites chez
du trijumeau que ce texte se propose d’envisager. Ce texte vient les patients ayant eu un abord direct de la racine trigéminale

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■ Imagerie par résonance


magnétique
L’IRM, dans sa forme standard, doit tout d’abord éliminer
une névralgie symptomatique. Il faut qu’elle puisse mettre en
évidence les éventuelles pathologies suivantes :
4 • une malformation de la base du crâne et/ou de la charnière
occipitocervicale, en particulier une malformation d’Arnold-
V1 Chiari ;
1 • une sclérose multiloculaire, de même que toute lésion du
2 V2 5
tronc cérébral, qu’elle soit inflammatoire, tumorale ou
3
ischémique ;
V3 • une néoformation tumorale, une malformation artériovei-
6
neuse ou un anévrisme géant de l’angle pontocérébelleux ;
• une tumeur du cavum de Meckel et/ou de la loge parasellaire,
rostral c’est-à-dire du sinus caverneux ;
• une pathologie de la fosse cérébrale moyenne et/ou de l’apex
antérieur orbitaire, etc., ainsi que du massif facial.
Figure 1. Dissection anatomique du ganglion trigéminal de Gasser, des À titre d’illustration, indiquons que ces névralgies sympto-
branches périphériques et de la racine du nerf trijumeau. Sur cette matiques (c’est-à-dire secondaires) représentaient 3,6 % du total
préparation anatomique du système trigéminal droit, réalisée selon la de nos 4 200 patients adressés au cours des 35 années passées
technique de Klingler [2] et par Klingler lui-même, on distingue les trois pour traitement neurochirurgical de leur névralgie. En outre, au
branches périphériques du nerf trijumeau : nerf ophtalmique de Willis total, quelques 3 700 ont été traités par thermocoagulation et
(V1) provenant de la fissure orbitaire supérieure (4) et se dirigeant vers la 1 350 par DVMC.
paroi latérale du sinus caverneux, nerf maxillaire (V2) provenant du Si l’imagerie IRM standard permet de dépister une éventuelle
foramen rotondum (5), nerf mandibulaire (V3) provenant du foramen cause à la névralgie, c’est-à-dire la faire classer comme secon-
ovale (6). En arrière de ces trois branches se situe le ganglion trigéminal de daire et traiter comme telle, elle n’est pas suffisante pour étudier
Gasser (3), de forme semi-lunaire, qui se prolonge en arrière par le plexus finement l’anatomie des nerfs de l’angle pontocérébelleux. La
triangulaire (2), zone qui fait la transition avec la racine du nerf (1). Cette détection des conflits vasculonerveux (CVN) requiert une
zone se distingue du ganglion par son aspect plexiforme (avec l’aimable imagerie à haute résolution (c’est-à-dire millimétrique) et doit
autorisation du Musée de la médecine, Bâle, Suisse). comporter les trois séquences spéciales suivantes en associa-
tion [4, 5] (Fig. 3, 4) :
• la séquence 3 D-T2 haute résolution donne des images fines
avec un bon contraste entre le liquide cérébrospinal (en
hypersignal), d’une part, et les structures vasculonerveuses (en
pour décompression microchirurgicale font état d’une com-
hyposignal), d’autre part, réalisant une véritable cisternogra-
pression vasculaire de la racine dans 93 % des cas en moyenne.
phie. NB. Cette séquence porte un nom différent selon la machine
Dans une série personnelle de 579 patients opérés [3], 96,7 % utilisée : Constructive Interference in Steady-State (CISS) chez
avaient un vaisseau en position conflictuelle, allant du stade de Siemens, Fast Imaging Employing steady-STate Acquisition
simple contact (grade I de notre classification) dans 17,6 % des (FIESTA) chez General Electric Medical Systems, DRIVen Equili-
cas, à celui d’indentation (grade III) dans 33,2 %, en passant brium (DRIVE) chez Philips. La limite de cette séquence
par celui de déplacement de la racine (grade II) dans 49,2 % 3D-T2 haute résolution est l’absence de différentiation entre
des cas. En d’autres termes, seulement 3,3 % des patients de la vaisseaux et nerfs, c’est pourquoi elle doit être complétée par
série ne présentaient aucune compression vasculaire visible à les séquences suivantes ;
l’exploration minutieuse sous microscope opératoire. L’agent • la séquence 3D-time of flight-angiographie par résonance
vasculaire responsable était une artère cérébelleuse supérieure magnétique (3D-TOF-ARM) visualise (en hypersignal) les
(seule ou en association avec un ou plusieurs autres vaisseaux vaisseaux à haut flux seulement, nommément les artères,
conflictuels) dans 88 % des cas, une mégadolichoartère céré- surtout si la séquence inclut un filtre de présaturation ;
belleuse antéro-inférieure (seule ou en association) dans 25,1 % • la séquence 3D-T1 avec injection de gadolinium met en
des cas, une veine enchâssée dans la racine (isolément ou en évidence (en hypersignal) toutes les structures vasculaires,
association) dans 27,6 % des cas, une mégadolichoartère c’est-à-dire non seulement les artères, mais aussi les veines.
vertébrobasilaire (seule ou en association) dans 3,5 % des cas. La comparaison des images des deux dernières séquences
Fait capital, expliquant ces pourcentages dont la somme est permet donc de différencier les veines des artères.
supérieure à 100 %, il existait plusieurs vaisseaux conflictuels C’est ainsi qu’une étude prospectrice récente personnelle,
en association chez le même patient dans 37,8 % des cas. Le comparant les données de cette imagerie, qui associe les trois
fait de ne pas les reconnaître tous, et donc de les traiter tous, séquences spéciales aux données opératoires dans 100 cas
pourrait aboutir à un échec ou à une récidive après traitement consécutifs, a montré que la sensibilité de l’IRM était de 96,7 %
pour détecter les CVN, et sa spécificité de 100 %. Qui plus est,
(Fig. 2).
une telle exploration IRM permettait de prédire le type de
En association aux conflits vasculonerveux ont été souvent
vaisseau(x) responsable(s) (dans 88 % des cas dans notre étude),
observées d’importantes altérations de la racine. C’est ainsi que, leur localisation le long de la racine et leur siège autour de la
dans notre série, chez 42 % des patients existait une atrophie racine (dans 85,7 % et 84,6 %, respectivement) et, encore plus
globale de la racine, correspondant vraisemblablement à une important, le degré de compression/distorsion/indentation de la
neuropathie coexistante et 18,2 % des patients présentaient un racine (dans 84,6 % des cas), avec un p < 0,01 [5].
épaississement de l’arachnoïde, adhérant à la racine. Chez Un appareillage IRM 3 Tesla donne des images plus perfor-
12,6 % des patients, la racine faisait une angulation marquée à mantes qu’un appareillage 1,5 Tesla. Cependant, ce dernier,
son passage sur le bord supérieur du rocher, à sa sortie du c’est-à-dire 1,5 Tesla, pourvu que l’examen soit bien fait, fournit
cavum de Meckel. Enfin 3,9 % des patients avaient une racine des renseignements presque aussi fiables (étude personnelle à
comprimée entre le pont et la surface de la pyramide pétreuse paraître dans Neurosurgery 2011).
du fait de la petitesse de la fosse postérieure, responsable d’une L’exploration IRM permet donc de décider de l’indication
absence de citerne. Toutes ces associations pathologiques chirurgicale et du choix du type d’opération à mettre en œuvre
doivent être prises en considération lors de la décompression sur des bases, non seulement cliniques évidemment, mais aussi
chirurgicale du nerf. et surtout anatomopathologiques.

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C D
Figure 2. Représentation schématique (A) et vues opératoires (B, C, D) des différentes localisations des conflits vasculonerveux [3].
Les conflits étaient situés :
dans 52,3 % des cas dans la portion juxtapontine de la racine trigéminale (D, exemple de conflit vasculonerveux par une boucle de l’artère cérébelleuse
supérieure pulsant dans l’aisselle de la racine droite), dans 54,3 % des cas dans la portion cisternale de la racine (C, exemple de conflit par l’artère cérébelleuse
supérieure reposant sur la racine trigéminale droite, déformée en hamac) et dans 9,8 % dans la portion juxtapétreuse de la racine (B, exemple de compression
par une veine : la veine pontique transverse inférieure à la sortie de la racine du porus du cavum de Meckel à droite). À son entrée dans le tronc cérébral
(c’est-à-dire au niveau de la trigeminal root entry zone), la racine du nerf trijumeau présente trois parties : la pars minor (5) motrice pour les muscles masticateurs,
la pars intermediaris (6), émanation supérieure de la pars major et dédiée à la sensibilité cornéenne, la pars major (7) sensitive. 1. porus du Cavum de Meckel ;
2. portion juxtapétreuse ; 3. tiers moyen ; 4. portion cisternale ; 8. portion juxtapontine ; 9. trigeminal root entry zone (TREZ).

■ Techniques neurochirurgicales trijumeau, vecteur des fibres de la sensibilité thermoalgésique


faciale. Celle-ci fut ensuite affinée et popularisée par Kunc
(1970).
Évolution des techniques. Historique En 1952, Taarnhoj, supposant que la névralgie faciale pouvait
La première intervention proposée fut la gassérectomie. être due à une constriction du ganglion de Gasser par une
Imaginée par Ewing Wears (1885), elle fut exécutée peu après sclérose de la dure-mère du cavum de Meckel, développa la
par Roos (1890) puis par Hartley, Horsley, Cushing. Mais elle fut décompression du ganglion par ouverture du toit du cavum.
rapidement abandonnée du fait de la survenue fréquente de Cette technique, dont l’intérêt était d’être conservatrice, fut
kératites et d’anesthésies douloureuses de la face. abandonnée en raison de ses nombreuses récidives. Peu de
C’est Frazier (1901) qui, à l’instigation de Spiller, mit au point temps après, Shelden (1955), interprétant les bons résultats
la neurotomie rétrogassérienne par voie sous-temporale extra- immédiats obtenus par la méthode de Taarnhoj comme dus au
durale. Puis Dandy (1920) développa la radicotomie juxtaprotu- traumatisme opératoire des fibres nerveuses, proposa le martel-
bérantielle par voie sous-occipitale latérocérébelleuse. Limitée à lement du ganglion par abord direct.
la pars major, elle permettait d’obtenir une analgésie sans Dans le même temps, pour pallier les risques des interven-
anesthésie complète de l’hémiface. tions par abord direct, se développèrent des techniques percu-
En 1938, Sjoqvist réalisa la tractotomie trigéminale qui tanées. L’alcoolisation du ganglion de Gasser fut proposée dès
sectionnait au niveau du bulbe le tractus descendant spinal du 1906 par Taptas. Harris (1912) en décrivit la voie d’abord

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Neurologie 3
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A B C

*
*

D E
Figure 3. Imagerie par résonance magnétique (IRM) (3 Tesla, coupes axiales, haute résolution) d’un conflit vasculonerveux entre l’artère cérébelleuse
supérieure et le nerf trijumeau à gauche.
A à C. IRM, séquence T2 haute résolution (A), séquence 3D time of flight (TOF) angiographie (B), séquence 3D T1 avec gadolinium (C). Conflit (flèche) avec
une boucle de l’artère cérébelleuse supérieure.
D. Fusion entre la séquence T2 et la séquence 3D TOF angiographie (astérisque : conflit).
E. Constatation opératoire de la présence du conflit (astérisque). La photo est inversée pour raison didactique.

latérale et Hartel (1913) la voie par le foramen ovale. Au lieu Parallèlement à ces méthodes lésionnelles se développa par
d’alcool, Jaeger proposa, en 1957, l’injection d’eau chaude au étapes successives la méthode conservatrice de décompression
niveau du ganglion, et Jefferson, en 1963 l’injection de phénol vasculaire microchirurgicale. Cette méthode repose sur la
(1/20e dans la glycérine). En 1941, Kirschner développa l’élec- constatation (fréquente) faite par Dandy en 1934, puis Lazorthes
trocoagulation sous anesthésie générale par approche stéréo- en 1964, de conflits vasculaires chez les malades opérés dans
taxique du ganglion à travers le foramen ovale. Cette technique l’angle pontocérébelleux pour névralgie essentielle de façon, à
fut ensuite améliorée par Thiry (1962) qui utilisa un courant de l’époque, à y réaliser une radicotomie juxtaprotubérantielle. La
moindre intensité de façon à éviter la perte totale de la sensi- simple décompression vasculaire ne fut réalisée pour la première
bilité tactile, puis par Schürmann (1972) qui remplaça l’anes- fois qu’en 1959 par Gardner. Elle fut ensuite popularisée (par
thésie générale par une neuroleptanalgésie pour contrôler en voie sous-temporale extradurale transtentorielle) par Jannetta à
peropératoire les effets de la coagulation. partir de 1966, puis par Hardy de Montréal (par voie rétromas-
Sweet (1969) raffina encore la technique pour en faire toïdienne) en 1970. C’est cette dernière voie qui est maintenant
l’actuelle thermocoagulation différentielle contrôlée du triju- pratiquée, particulièrement depuis que Jannetta l’a codifiée en
meau, en utilisant un générateur à haute fréquence comme y adaptant les techniques microchirurgicales.
source de chaleur, une thermistance pour mesurer la tempéra-
ture en bout d’électrode, et une anesthésie générale lors des Techniques actuelles
temps douloureux de l’intervention de très brève durée pour
permettre la coopération du malade. Cette dernière méthode est Toutes les données de la littérature concernant les techniques
capable d’obtenir une analgésie sans anesthésie complète et qui actuelles sont détaillées dans le rapport à la Société de neuro-
ne concerne que le seul territoire douloureux. Toujours dans le chirurgie de langue française de mai 2009 intitulé : « Neurochi-
cadre des techniques percutanées, Hakanson introduisit en rurgie fonctionnelle dans les syndromes d’hyperactivité des
1981 la neurolyse du ganglion de Gasser par injection de nerfs crâniens » par Sindou et Keravel [6].
glycérol dans la citerne trigéminale du cavum de Meckel par la Sont successivement considérées les techniques lésionnelles
voie du foramen ovale. Également par la même voie, Mullan percutanées (Fig. 5, 6) et radiochirurgicales (Fig. 7), puis la
développa, en 1979, la compression percutanée du ganglion de décompression vasculaire microchirurgicale (Fig. 8, 9).
Gasser par ballonnet gonflable.
C’est en 1951 que Leksell appliqua la technique de radiochi-
Thermorhizotomie percutanée, rétrogassérienne
rurgie stéréotaxique par gamma-knife à la névralgie du triju- Cette technique mise au point par Sweet [8] repose sur deux
meau, en prenant pour cible le ganglion de Gasser. Mais cette bases anatomophysiologiques. Une température de 60 °C à
méthode ne perdit son caractère anecdotique qu’à l’avènement 70 °C appliquée de quelques secondes à quelques minutes est
de l’IRM fine que rendit possible le guidage du rayonnement. capable d’obtenir une analgésie sans anesthésie complète du

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4 Creator Trial Neurologie
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A B C

D E
Figure 4. Imagerie par résonance magnétique (IRM) (3 Tesla, coupes axiales, haute résolution) d’un conflit vasculonerveux entre une veine pontique
transverse et le nerf trijumeau à gauche.
A à C. IRM, séquence T2 haute résolution (A), séquence 3D time of flight (TOF) angiographie (B), séquence 3D T1 avec gadolinium (C). Noter que le vaisseau
conflictuel n’est pas visible en 3D TOF angiographie (B), mais apparaît sur la séquence 3D T1 avec gadolinium (C). Conflit (flèche) avec la veine pontique
transverse inférieure.
D. Fusion entre la séquence T2 et la séquence 3D T1 avec gadolinium.
E. Constatation opératoire de la présence du conflit veineux, avec une zone grisâtre correspondant à une zone de démyélinisation (astérisque).

territoire opéré. La somatotopie des fibres rétrogassériennes et altération de la sensibilité cornéenne, bien centrée sur la
permet de placer l’électrode de telle sorte que la thermocoagu- zone-gâchette, et couvrant la totalité du territoire névralgique.
lation n’atteigne que les fibres correspondant au territoire La revue de la littérature a été faite sur dix séries, totalisant
douloureux. L’électrode est introduite à travers la joue et le 7 483 patients, suivis avec un recul de 3 à 26 ans en moyenne
foramen ovale (voie de Hartel), puis poussée postérieurement selon les séries (moyenne 9 ans) [11-13]. Cette revue fait état
jusqu’au bord supérieur du rocher, sous contrôle radiologique et d’une sédation immédiate dans 94 % des cas en moyenne (de
brève anesthésie générale intraveineuse (propofol), de quelques 81 % à 99 % selon les séries) et du maintien de l’efficacité à
minutes. Dans cette localisation radiologique, l’extrémité de long terme dans 60,4 % des cas (de 20 % à 93 % selon les
l’électrode est en principe au niveau rétrogassérien, en l’occur- séries). La Figure 10 est donnée à titre illustratif. Les principaux
rence le plexus triangulaire. C’est en effet à ce niveau que se effets secondaires et complications neurologiques étaient les
trouve la meilleure cible pour réaliser la thermolésion [9]. Le suivants : hypœsthésie faciale (5 % à 98 % des cas selon les
repérage de la position de l’extrémité de l’électrode au niveau séries) et déficit masticateur (4 % à 24 %) pour les premiers,
des fibres correspondant à la zone-gâchette est fait par électros- kératite (1 % à 8 %), et dysesthésies pénibles/anesthésie
timulation. Dans notre procédure [10], un courant de 5 Hz (à
douloureuse (0,8 % à 7 %) pour les secondes. La mortalité
l’intensité-seuil de 0,2 ± 0,1 V) est utilisé pour provoquer non
rapportée est de 1 ‰, par effraction de la carotide.
seulement des paresthésies (perçues par le patient), mais aussi
Dans notre série de 2 800 patients opérés et suivis avec un
des réponses musculaires (à type de réflexes trigéminofaciaux)
au niveau de la face, réponses observées par l’opérateur. Au recul allant jusqu’à 28 ans pour les plus anciennement traités
niveau du plexus triangulaire, les fibres du V3 (mandibulaires) (17 ans en moyenne) [12], le taux de récidives s’est élevé à 7 %.
sont en position inférolatérale, celles du V2 (maxillaires) Ce taux relativement faible a été obtenu au prix d’une hypœs-
intermédiaire et celles du V1 (ophtalmiques) supéromédiane. En thésie marquée du territoire névralgique dans la quasi-totalité
outre, la survenue de réponses masticatrices (directes) pour une des cas. Cette hypœsthésie était gênante (avec dysesthésies)
stimulation électrique à intensité faible (< 0,5 V) indiquerait dans 5 % des cas et s’accompagnait d’un syndrome d’anesthesia
une électrode trop proche de la racine motrice. Une fois dolorosa dans 3 % des cas.
l’électrode vérifiée en bonne place, la thermolésion est faite sous Délicate à réaliser, la thermocoagulation rétrogassérienne,
brève anesthésie générale intraveineuse (généralement propo- lorsqu’elle est faite avec précision, permet une analgésie durable,
fol), mais suffisamment légère pour examiner le réflexe cornéen et de la seule zone douloureuse. Elle n’a pas de contre-
durant les 30 à 60 secondes de la coagulation. Le critère indication d’âge. Beaucoup de séries comportent nombre de
d’efficacité de la thermocoagulation est l’obtention d’une patients nonagénaires. Cette technique est très opérateur-
analgésie à la piqûre sans perte complète de la sensibilité tactile dépendante. Elle requiert un entraînement spécifique

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Neurologie 5
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patients. Il ne s’est produit une hypœsthésie durable que dans


5,8 % des cas. La série n’a comporté aucune complication à type
1 V1
de kératite ou d’anesthésie douloureuse.
V2 Moins précise que la technique précédente et nécessitant une
V3 anesthésie générale, la compression par ballon a l’avantage
2 4 d’exposer à un risque moindre d’anesthésie cornéenne durable
3 et donc de kératite. Elle a cependant l’inconvénient d’être suivie
5 d’un taux d’échecs ou de récidives plus important.

Injection de glycérol percutanée, dans la citerne


trigéminale
6 Le traitement névralgique du trijumeau par neurolyse au
glycérol du ganglion de Gasser naquit d’une découverte fortuite.
Depuis les années 1950, Leksell et son équipe traitaient la
névralgie faciale par irradiation stéréotaxique du ganglion de
Gasser par un rayonnement gamma. Pour faciliter le repérage
radiologique de la cible était injecté, dans la citerne trigéminale,
un produit opaque dilué dans du glycérol. Il fut alors observé
que cette seule injection pouvait faire céder les crises doulou-
reuses paroxystiques. Aussi Hakanson proposa-t-il de traiter la
7 névralgie du trijumeau par une injection seule de glycérol dans
la citerne trigéminale [16] . La procédure est la suivante : le
malade est installé en position assise, tête fléchie. Un trocart est
introduit sous anesthésie locale dans le foramen ovale, puis
poussé sous contrôle radiographique jusque dans la citerne
trigéminale. Dès que l’extrémité du trocart est en place, ce qui
se traduit par une émission de liquide céphalorachidien, l’on
injecte du produit de contraste (métrizamide). Après cette
Figure 5. Préparation anatomique de la voie trans-jugo-foraminale
cisternographie, le produit de contraste est vidangé, puis du
ovale de Hartel, du côté droit. Sur ce spécimen anatomique, dont les
glycérol est injecté par petites doses jusqu’à l’obtention d’une
vaisseaux ont été injectés au latex coloré, on visualise le trajet de l’aiguille
hypœsthésie satisfaisante dans le territoire douloureux. La dose
percutanée, jusqu’au plexus triangulaire, à travers le foramen ovale (cliché
totale de glycérol est en règle de 0,2-0,4 ml.
du docteur Alvernia, avec l’aimable autorisation de l’éditeur) [7]. 1. Pars
D’après la revue de la littérature, totalisant 1 310 cas, avec des
triangularis ; 2. trompe d’Eustache ; 3. artère carotide interne ; 4. foramen
reculs de 1 à 10 ans (6,5 ans en moyenne), la neurolyse au
ovale ; 5. artère maxillaire interne ; 6. ptérygoïde ; 7. canal de Sténon.
glycérol se soldait par une sédation immédiate de 42 % à 84 %
et un maintien de l’effet à long terme de 18 % à 59 % selon les
séries (38,5 en moyenne). Cela correspond à un taux global
pour éviter effets secondaires indésirables et a fortiori complica- d’échec/récidive de 61,5 % en moyenne [17]. Les principales
tions et séquelles. complications étaient les suivantes : diminution de la sensibilité
faciale avec dysesthésies : 30 %, kératites rebelles : 5 %, érup-
Compression par ballonnet percutané du ganglion tions herpétiformes : 50 %.
de Gasser Cette technique a l’avantage de ne pas être coûteuse, mais la
Cette technique mise au point par Mullan [14] consiste en une diffusion de glycérol aux espaces sous-arachnoïdiens ne pouvant
compression du ganglion de Gasser dans le cavum de Meckel être aisément contrôlée, elle expose à des effets neurotoxiques
par la voie percutanée de Hartel, sous anesthésie générale de aléatoires.
brève durée en raison de son caractère douloureux, et sous
contrôle radioscopique. Le premier temps consiste en l’intro- Traitement radiochirurgical stéréotaxique
duction d’un trocart de grand diamètre par le foramen ovale du trijumeau
jusqu’au niveau du cavum de Meckel. Par le trocart est intro- Leksell fut le premier à avoir traité la névralgie du trijumeau
duite une sonde de Fogarty n° 4 de telle sorte que seule par des rayons gamma dirigés sur le ganglion de Gasser [18]. Les
l’extrémité gonflable dépasse de l’aiguille d’environ 15 mm. difficultés de repérage de la cible, l’absence de consensus quant
L’on injecte ensuite 1 ml d’un produit de contraste (iopamiron aux doses à utiliser et le succès des autres traitements chirurgi-
par exemple) dans la sonde de Fogarty. L’effet en est contrôlé caux firent que cette méthode resta longtemps anecdotique. Un
sur les clichés radiographiques de profil, en particulier la nouvel intérêt apparut au début des années 1999, lorsque la
classique déformation en « poire » du ballon dont la queue résolution de l’IRM permit de localiser avec précision la racine
correspond au porus du cavum de Meckel vers la citerne de postérieure du trijumeau, et lorsqu’il apparut que la radiochi-
l’angle pontocérébelleux. La durée préconisée de la microcom- rurgie pouvait être utile en cas de récidive après traitements
pression est de l’ordre de 1 minute, de façon à ce que le risque traditionnels, au travers d’une étude multicentrique. Dans le
de dysesthésies invalidantes soit minimal. chapitre du rapport sur la « Neurochirurgie fonctionnelle dans
La revue de la littérature a été faite sur 10 séries et totalise les syndromes d’hyperactivité des nerfs crâniens », chapitre
1 404 patients, suivis avec un recul de 1 à 6 ans en moyenne intitulé « Radiochirurgie dans le traitement de la névralgie
selon les séries (avec une moyenne générale de 4 ans) [11, 15]. trigéminale : résultats à long terme et influence des nuances
Cette revue fait état d’une sédation immédiate dans 96 % des techniques », Regis, analysant ses résultats personnels et ceux de
cas en moyenne (de 82 % à 100 % selon les séries) et du la littérature, donne les recommandations suivantes [19]. La dose
maintien de l’efficacité à long terme dans 67 % des cas (de 54,5 conseillée est une dose élevée (80 à 90 Gy) ; la cible conseillée
à 91,3 % selon les séries). En ce qui concerne les effets secon- est rétrogassérienne, à un seul isocentre de 4 mm sur le trajet
daires et les complications neurologiques, il est noté une citernal du nerf, à 7,5 mm de l’émergence du nerf du tronc
hypœsthésie faciale dans 4 % à 77 % des cas, et surtout une cérébral. La cible dans la trigeminal root entry zone (TREZ) est
parésie masticatrice plus ou moins durable dans 50 % à 66 % déconseillée, car elle expose à beaucoup plus d’effets indésira-
des cas selon les séries. La mortalité est d’environ 2 ‰, par bles et de complications sans obtenir une meilleure efficacité sur
effraction de la carotide. la névralgie. Il est en effet conseillé de ne pas dépasser une dose
Dans notre série de 121 patients opérés et suivis avec un recul de 15 Gy au niveau du tronc cérébral. La procédure nécessite la
moyen de 3, 4 ans [15], le taux de sédation immédiate s’est élevé mise d’un cadre de stéréotaxie, mais elle se déroule sous simple
à 94,2 %. L’efficacité initiale s’est maintenue chez 58,7 % des anesthésie locale. Un inconvénient de la radiochirurgie est

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6 Creator Trial Neurologie
Névralgie du trijumeau et neurochirurgie ¶ 17-023-A-85

2
A B C D

1
V1
3 4
5
V2
2 6 V3
E F G

H I J
Figure 6. Voies percutanées. Voie transjugoforaminale ovale de Hartel : repères cutanés (A), passage à travers la fosse ptérygomaxillaire et le foramen ovale
(B). Rapports anatomiques du trocart dans la joue : canal de Sténon (1, en C) et dans la fosse ptérygomaxillaire : artère maxillaire interne (2, en D). Traversée
du foramen ovale et placement de l’extrémité de l’électrode dans le plexus triangulaire (D). Neurolyse chimique au gycérol : schéma de l’injection dans la
citerne trigéminale (E) et contrôle radiographique par cisternographie iodée (H). Compression par ballonnet gonflable : schéma de la mise en place de la sonde
de Fogarty dans le cavum de Meckel (F) et contrôle radiographique du ballonnet en place (I). Thermorhizotomie rétrogassérienne : schéma de l’électrode en
place dans le plexus triangulaire selon la somatotopie des fibres (G) et contrôle radiographique (J). V1 : branche ophtalmique ; V2 : branche maxillaire ; V3 :
branche mandibulaire. 1. Ballon gonflé dans le cavum de Meckel ; 2. trocard inséré à travers le foramen ovale ; 3. pars major ; 4. racine trigéminale ; 5. ganglion
de Gasser ; 6. branche masticatrice (motrice).

de mal douloureux insupportable. Et cette méthode est deve-


nue, au cours des dernières années, relativement populaire du
fait de son caractère peu invasif.
La qualité des résultats est relativement différente d’une
publication à l’autre : de 21,8 % à 88,9 % après des reculs
moyens allant de 10 à 60 mois, un taux de récidives mentionné
de 0 % à 46 %, une hypœsthésie comme effet secondaire
néfaste de 0 % à 54 %, selon les séries. Ce manque d’homogé-
néité s’explique par la disparité des équipements radiochirurgi-
caux, celle des cibles, celle des doses, des reculs variables, et
aussi la façon d’évaluer les résultats selon les auteurs.
Dans la dernière évaluation de ses résultats [19, 20], l’équipe de
Marseille fait état d’un taux de guérison à 5 ans de 60 % et de
la présence d’une hypœsthésie à 5 ans de 17 %. Pour Régis et
al., la présence d’une hypœsthésie n’est pas nécessaire à
l’obtention d’un bon résultat antalgique. Pour d’autres, au
contraire, en particulier Pollock, de la Mayo Clinic, le degré de
sédation de la douleur et surtout sa durée au fil du temps est
corrélée à la présence d’une hypœsthésie postopératoire et, par
voie de conséquence, à un certain degré de dysesthésies
(p = 0,02) [21] (Fig. 11).

Figure 7. Représentation schématique d’un planning radiochirurgical. Décompression vasculaire microchirurgicale


Rond blanc : 90 Gy ; ligne jaune : 70 Gy ; ligne bleue : 35 Gy ; ligne verte :
12 Gy ; ligne rouge : limite antérolatérale du tronc cérébral, devant L’intervention est fondée sur l’observation que, dans la
recevoir < 12 Gy. plupart des névralgies dites essentielles, il existe un conflit
vasculonerveux entre le nerf trijumeau et un vaisseau de
voisinage [3, 23-25]. Ce conflit peut être mis en évidence grâce à
qu’elle demande généralement un délai de quelques mois avant l’imagerie actuelle [4, 5]. La compression vasculaire entraîne
d’être efficace. Cela ne constitue pas un problème majeur pour généralement une compression-distorsion du nerf. En outre, les
la plupart des patients, à l’exception de ceux affectés d’un état pulsations du vaisseau provoquent des lésions chroniques de

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Neurologie 7
17-023-A-85 ¶ Névralgie du trijumeau et neurochirurgie

3 2
1

A B

5
5

IV 4
V 6
VII-VIII

C D
Figure 8. Technique de la décompression vasculaire microchirurgicale (DVMC) pour un conflit vasculonerveux à partir de l’artère cérébelleuse supérieure (à
droite).
A. Abord microchirurgical rétromastoïdien « en trou de serrure ».
B. Ouverture de la dure-mère, avec lambeaux réclinés, l’un le long du sinus transverse (1), l’autre le long du sinus sigmoïde (2). L’écarteur est placé au-dessus
de l’hémisphère cérébelleux droit pour permettre une approche supracérébelleuse-infratentorielle du trijumeau. Cette approche évite les tractions sur le nerf
cochléovestibulaire (non visible, latéralement à droite). 3. Sinus pétreux supérieur.
C. Ouverture de l’arachnoïde le long du nerf trochléaire (IV), avec respect des veines pétreuses supérieures se draînant dans le sinus pétreux supérieur (3), de
façon à exposer complètement la racine trigéminale (V) depuis sa zone de pénétration dans le pont jusqu’au cavum de Meckel. La meilleure mesure de
prévention d’étirement excessif des nerfs VII et VIII est de ne pas ouvrir l’arachnoïde à leur niveau. Il existe un conflit vasculonerveux entre l’artère cérébelleuse
supérieure (4) et le trijumeau.
D. Après avoir détaché les artères du nerf, celles-ci sont transposées vers le haut le long de la tente du cervelet par deux lacettes de fibres de Téflon de 2 mm
de calibre (5), et maintenues à distance par une plaque de Téflon de 1 × 1 cm de côté (6), reposant sur la veine pétreuse, sans contact avec le nerf trijumeau.

démyélinisation focale des fibres nerveuses, qui peuvent être 15 mm de diamètre en arrière de la mastoïde, un abord micro-
observées sous microscope opératoire. Ces lésions généreraient chirurgical du trijumeau à la partie supérieure de l’angle
une hyperactivité des noyaux du système trigéminal, ce qui pontocérébelleux, une séparation des éléments du conflit
expliquerait bien le caractère épileptiforme de cette névralgie, et vasculonerveux, un écartement du vaisseau conflictuel. Lorsqu’il
l’efficacité des seuls anticonvulsivants. s’agit d’une artère, elle est maintenue à distance par un petit
Les compressions sont situées dans 52,3 % des cas au niveau écran de Téflon, si possible sans contact avec le nerf pour éviter
de la zone d’entrée de la racine dans le tronc cérébral, dans toute néocompression (Fig. 9). Lorsque le conflit est une veine,
54,3 % au niveau de la portion cisternale de la racine, dans celle-ci est coagulée puis sectionnée (Fig. 9).
9,8 % à la zone de sortie de la racine du porus du cavum de La revue des grandes séries de la littérature (17 séries, totalisant
Meckel (Fig. 8). 5 124 patients) fait apparaître des résultats à peu près similaires
Le principe de l’intervention de décompression qui doit être entre les séries [11, 28]. Dans 80 % à 98 % des cas (91,8 % en
dénommée « de Gardner-Jannetta » [24, 25], qui est conservatrice, moyenne), il existait une sédation immédiate de la névralgie. Un
consiste à libérer la racine du trijumeau de la compression effet complet, sans médicaments, persistait dans 62 % à 89 % des
vasculaire par une séparation minutieuse du nerf et du vaisseau, cas (76,6 % en moyenne) au terme du suivi (5 à 11 ans selon les
et à maintenir ce dernier à distance par une prothèse-écran séries, 7 ans en moyenne). Quatre de ces séries comportaient une
conçue à cet effet. Cette dernière ne doit pas être en contact étude avec courbe de Kaplan-Meier [29-32]. Dans la plus large, celle
avec la racine pour ne pas entraîner de néocompression de cette de Barker et al. (c’est-à-dire celle de Jannetta), comportant 1 185
dernière [26, 27]. patients suivis jusqu’à 20 ans pour les plus anciennement opérés,
L’intervention, d’une durée de 3 heures environ, est faite sous 80 % avaient un excellent résultat immédiat (pas de douleur, pas
anesthésie générale. Elle consiste en une petite ouverture de de traitement médicamenteux) et 70 % à 10 ans (Fig. 12). Dans

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2 2

2
1
1 3

1
4
3

2
3

A B C

2
1

5 1

D E F

G H I
Figure 9. Décompression vasculaire microchirurgicale. Vues opératoires.
A à C. Compression vasculaire par l’artère cérébelleuse supérieure (SCA), à gauche. La SCA (3) exerce un conflit antérosupérieur sur le trijumeau (1) au niveau
de sa zone d’entrée dans le pont (A). La SCA est disséquée, détachée du nerf (B), puis maintenue à distance en situation supérieure le long et au-dessous de
la tente du cervelet par une lame de Téflon (4) (C). Noter que le groupe des veines pétreuses supérieures (2) a été conservé.
D à F. Compression vasculaire par l’artère cérébelleuse antéro-inférieure (AICA), à gauche. L’AICA (5) est en conflit postéro-inférieur avec la racine trigéminale
(1) (D). La boucle est détachée du nerf et transposée en arrière (E), puis est maintenue à distance en l’attachant par une lacette de Téflon à la veine pétreuse
supérieure (2) qui a été conservée (F).
G à I. Compression d’origine veineuse (veine pontique transverse inférieure), à droite. La veine (6) marque une empreinte sur la face inférieure de la racine (1)
à sa sortie du cavum de Meckel (G). La flèche désigne une empreinte grise, laquelle correspond à une zone de démyélinisation sous l’effet de la compression
vasculaire exercée par la veine (H). La veine conflictuelle a été coagulée, puis éliminée (I).

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17-023-A-85 ¶ Névralgie du trijumeau et neurochirurgie

100 * Temps de suivi : 68,1 mois 1,0

90
0,8

Probabilité de succès
80

70 0,6
Pourcentage

60

50 0,4

40
0,2 Bons ou excellents résultats
30 Excellents résultats
20 0,0
0 5 10 15 20
10
Années après la première opération
0
12 36 60 120 180 240 300 Figure 12. Résultats à long terme de la décompression vasculaire
microchirurgicale (DVMC) (série de Jannetta). Courbe de Kaplan-Meier
Temps (mois) des résultats satisfaisants après DVMC, sur 20 ans de suivi, dans la série de
Figure 10. Résultats à long terme de la thermorhizotomie. À titre Jannetta, publiée par Barker et al. [29]. Le taux de guérisons était de 70 %
illustratif, courbe de Kaplan-Meier des patients sans récidive, après (une à 10 ans de suivi. Noter la stabilité de la courbe au fil du temps, à long
seule) thermocoagulation, dans la série de 1 216 patients de Kanpolat et terme.
al. [13]. Bien que le taux initial de sédations complètes fût de 97,6 %, ce
taux diminua à 43 % à 25 ans d’évolution postopératoire.

Taux de guérisons complètes (%) 1,0

100
0,8
90
Sédation complète de la douleur sans

80 0,6
prise de médicaments (%)

70
0,4
60

50
0,2
40

30 0,0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
20
Suivi (années)
10 Figure 13. Résultats à long terme de la décompression vasculaire
0 microchirurgicale (DVMC) (série personnelle ; résultats globaux). Courbe
0 12 24 36 48 60 de Kaplan-Meier des patients avec guérison complète (= pas de douleur,
pas de médicaments), jusqu’à 15 ans de suivi après DVMC, dans la série de
Temps après chirurgie (mois) Sindou et al. [28, 33]. Le taux de guérisons était de 73 % à 15 ans.
Figure 11. Résultats à long terme de la radiochirurgie stéréotaxique. À
titre illustratif, courbe de Kaplan-Meier à partir d’une étude récente faite à
la Mayo-Clinic [22]. Le maintien d’un effet favorable sur la névralgie était
Conservatrice, la décompression vasculaire microchirurgicale
de 54 % à 5 ans.
n’entraîne que très rarement une atteinte sévère du trijumeau,
aboutissant à une anesthésie douloureuse (aucune dans notre
notre série [32, 33] , les courbes Kaplan-Meier montrent une série). La méthode traite la cause de la névralgie. Ses résultats à
probabilité de guérison à 1 an de 81,2 % et à 15 ans de 73,4 % long terme sont durables et stables dans la plupart des cas.
(Fig. 13 à 15). Les taux de mortalité rapportés étaient de 0 % à
1,2 % selon les séries, 0,3 % dont la nôtre [32, 33]. La cause en
était généralement un infarctus hémorragique de la fosse ■ Indications chirurgicales
cérébrale postérieure, lié aux spasmes produits par les manipu-
lations vasculaires. Ceux-ci peuvent être grandement réduits par Décision de chirurgie
l’application locale de gouttelettes de papavérine en solution à
1/10e. Dans les séries rapportées, les complications neurologi- Pour la plupart des chirurgiens, les critères d’indication
ques permanentes les plus fréquentes étaient les suivantes : chirurgicale sont les suivants :
perturbation de l’audition et/ou de l’équilibre (de 0,8 % à 4,5 %, • névralgie trigéminale dont le caractère essentiel a été vérifié
1,5 % dans notre série), paralysie faciale (de 0 % à 1 %, 0,4 % par l’imagerie spéciale. Dans les formes atypiques, la nature
dans notre série), diplopie par paralysie trochléaire (de 0,5 % à névralgique doit être authentifiée par le fait que les antalgi-
1 %, 0,5 % dans notre série), hypœsthésie faciale avec dysesthé- ques de type anticonvulsivants ont été efficaces au moins
sies (de 2 % à 10 %, 4 %, légères, dans notre série). La compli- temporairement, au moins au début (+++). Selon nous, celui
cation la plus fréquente était la fuite de liquide cérébrospinal qui constitue le meilleur test diagnostique est la carbamazé-
(LCS) (de 2 % à 17 %), 2 % dans notre série depuis que nous pine. En cas d’allergie ou d’intolérance, à défaut de pouvoir
apposons systématiquement une plastie de fascia lata et de l’utiliser sur une durée suffisante pour juger de son efficacité,
graisse sur la suture durale au niveau de la craniotomie. l’un des autres peut y suppléer ;

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10 Creator Trial Neurologie
Névralgie du trijumeau et neurochirurgie ¶ 17-023-A-85

que le traitement entraîne. La chirurgie est maintenant


100 suffisamment efficace pour qu’il ne soit plus justifié de
90 prolonger exagérément un traitement médicamenteux devenu
peu efficace malgré l’augmentation des doses, et/ou asthé-
80 niant, retentissant sur la qualité de vie du patient.

70 Choix de la technique chirurgicale


Taux de guérisons

60 Malgré et peut-être aussi du fait de la richesse de l’arsenal


chirurgical, le choix du traitement neurochirurgical reste encore
50 controversé. Avant d’aborder l’arbre décisionnel que nous
proposons (Fig. 16), il est important de prendre en considéra-
40
tion les préliminaires suivants.
30 Le recul est désormais suffisant pour juger de l’efficacité à
long terme de la décompression vasculaire. Trois publications
20 Névralgie typique 73 %
rapportent la courbe actuarielle des résultats à plus de 10 ans [11,
Névralgie atypique 74 % 29, 32] ; le pourcentage de guérison y est de 78,2 % à 10 ans et
10
reste à peu près stable ensuite.
0 L’étude des résultats obtenus par les techniques « lésionnel-
2 4 6 8 10 12 14 16 les », c’est-à-dire par l’interruption des fibres radiculaires du
Suivi (années) trijumeau, montre qu’il existe une proportionnalité nette entre
la durée d’efficacité de cette chirurgie et le degré d’hypœsthésie
Figure 14. Résultats à long terme de la décompression vasculaire
laissée par l’intervention et cela, quelle que soit la modalité
microchirurgicale (DVMC) (série personnelle ; résultats selon la présenta-
technique utilisée [11]. Comme pour les techniques percutanées
tion typique versus atypique). Courbe de Kaplan-Meier à 15 ans de recul
lésionnelles, les études à long terme montrent que les effets
des patients guéris par DVMC, en fonction de la présentation « typique »
antalgiques obtenus par la radiochirurgie sont d’autant
et « atypique » de la névralgie trigéminale. La présence de manifestations
meilleurs que la radiolésion a entraîné une hypœsthésie [21].
atypiques, comme un fond douloureux permanent associé aux douleurs
Cependant, pour certains auteurs [19, 20] il n’est pas nécessaire
paroxystiques, ne pénalise pas le résultat de la DVMC. La composante
que cette hypœsthésie soit importante, voire présente, pour
douloureuse permanente ainsi que les éventuels phénomènes vasomo-
qu’il y ait un effet antalgique.
teurs, étaient aussi quasi constamment favorablement influencés, en
En ce qui concerne le degré d’hypœsthésie, garant de l’effet
même temps que les accès paroxystiques disparaissaient [32]. Les deux
à long terme des méthodes lésionnelles, plusieurs options
courbes sont quasi similaires : 72,74 % et 74,40 %, respectivement (p
peuvent être envisagées. L’obtention d’un effet antalgique
= 0,98).
durable peut être privilégiée, mais cela ne peut être qu’au prix
d’une hypœsthésie nette. Cette hypœsthésie est toujours
responsable d’un inconfort, parfois d’une gêne fonctionnelle.
100 Dans certains cas, heureusement peu fréquents, il peut s’y
ajouter un syndrome d’anesthésie douloureuse. À l’inverse, le
90 choix d’éviter une hypœsthésie s’associe inévitablement à un
taux de récidives nettement plus élevé. Le choix entre les deux
80 options est guidé par la préférence du chirurgien et surtout celle
70 du patient, dûment éclairé. Ce choix peut être formulé dans le
Taux de guérisons

document d’information au patient.


60 Entre thermorhizotomie, compression par ballon, injection de
glycérol, ou encore radiochirurgie, le choix est fonction de
50 l’expérience de l’équipe chirurgicale.
40 L’arbre décisionnel proposé par les auteurs est lié à la nature
de la névralgie et aux conditions du patient (Fig. 16). En
30 Âge au moment de la chirurgie pratique, il existe plusieurs types de situations concrètes :
> 70 ans 71 % • la première est représentée par les patients en bon état général,
20
50-70 ans 76 % leur permettant de supporter une anesthésie générale de
10 < 50 ans 65 % 3 heures environ. Dans les centres qui peuvent avoir recours
aux différentes variétés de techniques chirurgicales, le
0 consensus est généralement le suivant : décompression
0 2 4 6 8 10 12 14 16 vasculaire microchirurgicale en première option. Si la décom-
Suivi (années) pression vasculaire ne paraît pas souhaitable ou si elle n’est
pas investie favorablement par le patient, une méthode
Figure 15. Résultats à long terme de la décompression vasculaire
d’interruption percutanée ou la radiochirurgie stéréotaxique
microchirurgicale (DVMC) (série personnelle ; résultats selon l’âge).
peuvent être indiquées, en sachant qu’un effet de longue
Courbe de Kaplan-Meier à 15 ans de recul, en fonction de leur âge à la
durée est corrélé à un certain degré d’hypœsthésie. La place
date de la chirurgie (inférieur à 50 ans, entre 50 ans et 70 ans, supérieur à
de la radiochirurgie est encore difficile à préciser, les résultats
70 ans). Le résultat était d’autant meilleur que l’âge était élevé. La
étant assez différents selon les publications. Une étude
différence statistique n’était pas statistiquement significative (p = 0,09).
extrêmement récente, prospective, comparant les résultats de
Cependant, elle peut être considérée comme à tendance significative [33].
la radiochirurgie stéréotaxique (RS) avec ceux de la décom-
Ces résultats sont en faveur de considérer la DVMC comme première
pression vasculaire microchirurgicale fait état d’un taux de
option, y compris chez les gens âgés, si leur état général permet une
succès à 4 ans de 54 % pour la RS, versus 77 % pour la
intervention ouverte [33].
DVMC (p = 0,003) [22] ;
• la deuxième situation est celle des patients âgés et/ou en état
• durée d’évolution suffisante pour être assuré qu’il s’agit d’une général précaire, ou chez lesquels la névralgie du trijumeau
névralgie invalidante ; est secondaire à une maladie démyélinisante. Une méthode
• échec du traitement médicamenteux bien conduit et/ou percutanée est préférable. Le choix de la variété technique est
intolérance à celui-ci. Nous considérons comme intolérance, affaire d’école. Quelle que soit la technique choisie, la durée
non seulement les complications et les effets secondaires d’efficacité sera proportionnelle au degré d’hypœsthésie
néfastes ayant conduit à arrêter le (ou les) médicaments(s) en séquellaire, avec ses conséquences. La radiochirurgie est une
cause, mais aussi l’asthénie et le ralentissement intellectuel alternative aux méthodes percutanées ;

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Neurologie 11
17-023-A-85 ¶ Névralgie du trijumeau et neurochirurgie

Traitement médical (carbamazépine ±


autres anticonvulsivants) suivi par un neurologue

+ –

Inefficace et/ou mal supporté (complications)


(y compris effets secondaires : asthénie,
ralentissement intellectuel, etc.)

Traitement neurochirurgical

Sujet en bon état général et Sujet très âgé/mauvais état et/ou


compression vasculaire à l'imagerie pas de compression vasculaire

DVMC Techniques percutanées Techniques percutanées


ou ou
radiochirurgie radiochirurgie

+ –

+ – – +

Redonner
le traitement
médicamenteux Hypoesthésie Pas
douloureuse d’hypoesthésie

+ –
Refaire
Traitement médical
techniques percutanées
(douleurs neuropathiques)
ou
Stimulation corticale ?
radiochirurgie
Techniques percutanées
ou
radiochirurgie

Hypoesthésie Pas d'hypoesthésie

Techniques percutanées
Douleurs Fond douloureux
ou DVMC
paroxystiques permanent
radiochirurgie

Stimulation
corticale ?

Figure 16. Arbre décisionnel. Traitement neurochirurgical de la névralgie trigéminale essentielle. DVMC : décompression vasculaire microchirurgicale.

• la troisième situation est représentée par des conditions ayant eu recours à la chirurgie et qui leur ont prodigué des
intermédiaires, au demeurant assez fréquentes. La décision « conseils ».
est alors influencée par les convictions et les compétences En cas d’un premier échec chirurgical, les recours dépendent
de l’opérateur et bien entendu la préférence des patients. beaucoup de l’existence ou non d’une hypœsthésie séquellaire
Ces derniers ont bien souvent rencontré, dans leur quête de et du type de douleurs persistantes (paroxystiques ou perma-
guérison, d’autres patients souffrant de la même affection, nentes), comme l’illustre la figure de l’algorithme (Fig. 16).

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12 Creator Trial Neurologie
Névralgie du trijumeau et neurochirurgie ¶ 17-023-A-85

dysesthésies séquellaires. Ces phénomènes indésirables ne

“ Point fort
disparaissent pas après une DVMC faite secondairement.

Situations pratiques et indication chirurgicale Cet article a fait l’objet d’une prépublication en ligne : l’année du copyright
En pratique, il existe trois types de situations concrètes. La peut donc être antérieure à celle de la mise à jour à laquelle il est intégré.
première est représentée par les patients en bon état .

général, leur permettant de supporter une anesthésie


générale de trois heures environ. Le choix de la ■ Références
décompression vasculaire, conservatrice et curative, est la [1] Sindou M, Keravel Y, Laurent B. Aspect cliniques et thérapeutiques des
première option. Elle se justifie d’autant plus qu’il s’agit névralgies essentielles du trijumeau et du glosso-pharyngien. EMC
d’une névralgie du V1 et/ou du V2 en raison des risques de (Elsevier Masson SAS, Paris), Neurologie, 17-023-A-80, 2007 : 18p.
kératite occasionnés par les méthodes « lésionnelles ». La [2] Klingler J. Erleichterung der makroskopischen. Preparation des
deuxième est celle des patients très âgés et/ou en état Gehirns durch den Gefrierprozess. Schweiz Arch Neurol Psychiatr
général précaire. Une méthode percutanée est préférable. 1935;36:247-56.
[3] Sindou M, Howeidy T, Acevedo G. Anatomical observations during
Le choix de la technique est affaire d’école. Quelle que soit microvascular decompression for idiopathic trigeminal neuralgia (with
la technique choisie, la durée d’efficacité est en principe correlations between topography of pain and site of the neurovascular
proportionnelle au degré d’hypœsthésie séquellaire, avec conflicts). Prospective study in a series of 579 patients. Acta Neurochir
ses conséquences. La radiochirurgie stéréotaxique est une (Wien) 2002;144:1-3.
alternative aux méthodes percutanées. Des situations [4] Leal PR, Froment JC, Sindou M. Valeur prédictive de l’IRM pour la
intermédiaires sont fréquentes. La décision est alors détection et la caractérisation de la compression vasculaire dans les
influencée par les convictions et les compétences de syndromes d’hyperactivité des nerfs crâniens (trijumeau et facial).
Neurochirurgie 2009;55:174-80.
l’opérateur. Elle l’est aussi, bien entendu, par la préférence [5] Leal PR, Hermier M, Froment JC, Souza MA, Cristino-Filho G,
des patients, après exposé des avantages, limites, effets Sindou M. Preoperative demonstration of the neurovascular compres-
secondaires et risques de chacune des méthodes. sion characteristics with special emphasis on the magnetic resonance
imaging: a prospective study with comparison to surgical findings in
100 consecutive patients who underwent micro-vascular
decompression for trigeminal neuralgia. Acta Neurochir (Wien) 2010;
152:817-25.
■ Conclusion [6] Sindou M, Keravel Y. Neurochirurgie fonctionnelle dans les syndromes
d’hyperactivité des nerfs crâniens. Rapport à la Société de Neuro-
La neurochirurgie fonctionnelle de la névralgie trigéminale Chirurgie de Langue Française. Neurochirurgie 2009;55:75-292.
essentielle a beaucoup évolué au cours des décennies passées. [7] Alvernia J, Wydh E, Simon E, Sindou M, Mertens P. Anatomie
Les méthodes de section à ciel ouvert ont fait place à des microchirurgicale de la voie percutanée transovale vers la cavité
trigéminale et le ganglion trigéminal (voie de Hartel). Neurochirurgie
techniques lésionnelles percutanées ou par radiochirurgie
2009;55:87-91.
stéréotaxique, moins invasives. Surtout s’est implantée, comme [8] Sweet WH, Wepsic JG. Controlled thermocoagulation of trigeminal
première option chez les patients en bon état physique, la neuralgia ganglion and rootlets for differential destruction of pain
méthode conservatrice et curative de la lésion responsable fibres. Part 1: trigeminal neuralgia. J Neurosurg 1974;40:143-56.
lorsque celle-ci est démontrée par l’imagerie : la décompression [9] Sindou M, Keravel Y. Thermocoagulation percutanée du trijumeau
vasculaire. dans le traitement de la névralgie faciale essentielle. Résultats en fonc-
Rappelons qu’il est bien établi maintenant que la névralgie tion du siège de la thermolésion. Neurochirurgie 1979;25:166-72.
« essentielle » du trijumeau, qui est une douleur épileptiforme, [10] Sindou M. Neurophysiological navigation in the trigeminal nerve: use
est liée dans la plupart des cas à la présence d’une compression of masticatory responses and facial motor responses evoked by
vasculaire à la jonction entre les deux portions : périphérique electrical stimulation of the trigeminal rootlets for RF thermorhizotomy
guidance. Stereotact Funct Neurosurg 1999;73:117-21.
(schwannienne) et centrale (oligodendrocytaire) de la racine
[11] Tatli M, Satici O, Kanpolat Y, Sindou M. Various surgical modalities
sensitive du trijumeau dans l’angle pontocérébelleux. Cette for trigeminal neuralgia: literature study of respective long-term
névralgie, de mécanisme à la fois périphérique et central, est outcomes. Acta Neurochir (Wien) 2008;150:243-55.
provoquée par des lésions créées par la compression et les [12] Sindou M, Tatli M. Traitement de la névralgie trigéminale par
pulsations du conflit vasculaire, généralement une mégadoli- thermorhizotomie. Neurochirurgie 2009;55:203-10.
choartère cérébelleuse, plus rarement une veine ectasique. [13] Kanpolat Y, Savas A, Bekar A, Berk C. Percutaneous controlled
L’hypothèse est que ces lésions entraînent un foyer ectopique radiofrequency trigeminal rhizotomy for the treatment of idiopathic
d’influx parasites, des courts-circuits entre les fibres à travers les trigeminal neuralgia: 25 year experience with 1 600 patients.
plages de démyélinisation locales (éphapses). De surcroît, un Neurosurgery 2001;48:524-32.
phénomène de type kindling induirait une hyperactivité des [14] Mullan S, Lichtor T. Percutaneous microcompression of the trigeminal
noyaux du système trigéminal dans le tronc cérébral. ganglion for trigeminal neuralgia. J Neurosurg 1983;59:1007-12.
[15] Kéravel Y, Gaston A, Ciampi de Andrade D, Mencattini G, Le
La décompression vasculaire microchirurgicale a la capacité Guerinel C. Traitement de la névralgie trigéminale par la compression
de restaurer une fonction normale du nerf chez une large par ballon. Neurochirurgie 2009;55:197-202.
majorité de patients, y compris lorsque l’on a affaire à une [16] Hakanson S. Trigeminal neuralgia treated by injection of glycerol into
névralgie trigéminale atypique (pourvu qu’il s’agisse d’une the trigeminal cistern. Neurosurgery 1981;9:638-46.
névralgie, et non, bien entendu, d’une algie faciale atypique, [17] Sindou M, Tatli M. Traitement de la névralgie trigéminale par injection
laquelle ne relève nullement d’une indication chirurgicale, de glycérol au niveau du ganglion de Gasser. Neurochirurgie 2009;55:
quelle qu’elle soit). 211-2.
Les autres techniques, lésionnelles, sont palliatives. Elles [18] Leksell L. Stereotaxic radiosurgery in trigeminal neuralgia. Acta Chir
constituent néanmoins une alternative éminemment utile chez Scand 1971;137:331-4.
[19] Regis J, Arkha Y, Yomo S, Murata N, Roussel P, Donnet A, et al. La
les patients en condition précaire, ou ceux réticents à une
radiochirurgie dans le traitement de la névralgie trigéminale: résultats à
chirurgie directe. long terme et influence des nuances techniques. Neurochirurgie 2009;
Enfin, un argument décisif pour considérer la DVMC comme 55:213-22.
première option est que les techniques lésionnelles, incluant la [20] Regis J, Metellus P, Hayashi M, Roussel P, Donnet A, Bille-Turc F.
radiochirurgie stéréotaxique, pour être efficaces à long terme, Prospective controlled trial of gamma-knife surgery for essential
nécessitent un certain degré d’hypœsthésie et de paresthésies/ trigeminal neuralgia. J Neurosurg 2006;104:913-24.

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Neurologie 13
17-023-A-85 ¶ Névralgie du trijumeau et neurochirurgie

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M. Sindou, Professeur de neurochirurgie (marc.sindou@chu-lyon.fr).


Hôpital neurologique Pierre Wertheimer, Université Claude-Bernard Lyon I, Groupement hospitalier EST, Service neurochirurgie A, Laboratoire d’anatomie,
59, boulevard Pinel, 69003 Lyon, France.
Y. Keravel, Professeur de neurochirurgie.
Centre hospitalier Henri Mondor, Groupement hospitalier universitaire Sud, 51, avenue Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Créteil cedex, France.
E. Simon, Assistant hospitalo-universitaire en anatomie et neurochirurgie.
P. Mertens, Professeur d’anatomie.
Hôpital neurologique Pierre Wertheimer, Université Claude-Bernard Lyon I, Groupement hospitalier EST, Service neurochirurgie A, Laboratoire d’anatomie,
59, boulevard Pinel, 69003 Lyon, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Sindou M., Keravel Y., Simon E., Mertens P. Névralgie du trijumeau et neurochirurgie. EMC (Elsevier
Masson SAS, Paris), Neurologie, 17-023-A-85, 2012.

Disponibles sur www.em-consulte.com


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