Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Bernard Sesboüé
La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les
limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la
licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie,
© Centre Sèvres | Téléchargé le 19/10/2022 sur www.cairn.info (IP: 102.129.81.217)
1. Le premier chapitre
1. Par hypothèse cette étude se contente de l’analyse du texte final. Le temps m’a
manqué pour recourir systématiquement aux actes du concile et l’espace réservé à
cet article ne permettait pas de le faire, car il y faudrait sans doute une thèse. Nous
disposons en effet, grâce aux soins de Massarelli, Secrétaire du concile, et de son
équipe de tachygraphes, des conférences données par les théologiens pour prépa-
rer les débats, des échanges entre les évêques et de l’évolution du texte à travers ses
quatre rédactions successives. Les quelques sondages entrepris (par exemple dans
le premier discours d’exposition du sujet dû à Salmeron, cf. Concilium Tridentinum.
Diariorum, Actorum, Espistularum, Tractatuum nova collectio, ed. Societas Goerresiana
[Görresgesellschaft], Tome V 2, Herder, Fribourg en Brisgau, 1911, pp. 265-272)
montrent que la doctrine paulinienne et en particulier celle de Galates et de Romains
est au premier plan des préoccupations.
AU CONCILE DE TRENTE 397
2. Cf. Les Conciles œcuméniques, t. II-2 : Les décrets de Trente à Vatican II, éd. Alberigo
Cerf, Paris, 1994, p. 1367.
3. Dans sa rédaction le concile se tient également près des documents magisté-
riels antérieurs (Indiculus de Célestin, concile d’Orange), mais ce n’est pas le lieu ici
de détailler ces sources.
398 B. SESBOÜÉ
2. Le deuxième chapitre
4. Ici le débat avec les luthériens est surtout de l’ordre du vocabulaire : en langage
catholique le libre arbitre est la donnée anthropologique qui permet à l’homme de
choisir ; le langage luthérien ne nie pas cette donnée de base. S’il parle de
serf-arbitre, c’est parce que, sans la grâce du Christ, cette capacité de choix reste
dans l’esclavage du péché. Le langage catholique exprime la chose en distinguant
libre arbitre humain et liberté chrétienne. Cela dit, on ne saurait nier la divergence
entre les deux confessions concernant la gravité des conséquences du péché
originel sur le libre arbitre humain.
AU CONCILE DE TRENTE 399
3. Le troisième chapitre
logique du « de même que ... de même ». Dans les deux cas la proposition
principale exprime la solidarité nouvelle établie avec le Christ par la
nouvelle naissance, tandis que la solidarité pécheresse en Adam lui est
rapportée de manière subordonnée et reçoit d’elle l’authentique lumière
d’une révélation ordonnée au salut. Paul est également commenté par
Paul avec la longue citation de Col 1,12-14 sur le transfert d’héritage, le
passage des ténèbres à la lumière et l’entrée dans le Royaume.
Cette matrice paulinienne est interprétée dans le cadre de la théologie
augustinienne du péché originel, qui insiste sur la transmission physique
de celui-ci. Le point de vue de la communication relève de la théologie
scolastique, alors que la problématique paulinienne en restait à la logique
universelle du rapport entre péché et salut. En cela Trente va au-delà de
saint Paul en intégrant des préoccupations venues de la tradition. Mais
cette application aux cas personnels de l’antinomie paulinienne entre
Adam et le Christ est un développement légitime de la visée paulinienne.
4. Le quatrième chapitre
10. Le concile dit ici promeretur et non meretur. En langage technique il exclut le
mérite de condigno, mais ne se prononce pas sur le mérite au sens large de congruo.
M. VILLER avait déjà remarqué cette nuance, Cours Viller, Ad instar manuscripti, San
Miguel, Argentine, 1956, t. I, p. 284. Un commentateur protestant A. OBERMANN a
relevé également la chose, cf. E. Schillebeeckx, « Aperçu nouveau sur le décret
tridentin touchant la justification », Concilium 5, 1966, pp. 165-168.
11. Cf. le commentaire de ce texte donné par L. BOUYER, Du protestantisme à
l’Église, op. cit., p. 55.
406 B. SESBOÜÉ
12. Il n’y a pas à reprendre ici les argumentations bien connues du P.S. LYONNET.
408 B. SESBOÜÉ
13. Cf. St. LYONNET, Le péché originel en Rom 5,12 et le concile de Trente, Inst. Bibl.
Pont. Rome, 1961.
AU CONCILE DE TRENTE 409
2. Les sacrements
15. A. VANNESTE, « Le décret de Trente sur le péché originel », N.R.T. 87, 1965,
pp. 716-717.
AU CONCILE DE TRENTE 411
les versets de Jean 6, où Jésus ne parle que de son corps. Paul n’est invoqué
que pour illustrer le pouvoir de l’Église sur les sacrements (1 Co 4,1 et 1
Co 11,34). Le troisième décret, consacré au sacrifice de la messe, fait une
référence spéciale à Hébreux 7, qui met en scène le Christ comme grand-
prêtre, revient à 1 Corinthiens 11, 23-29, et cite enfin 1 Corinthiens 10, 14-22
dans le but de prouver le caractère sacrificiel de l’eucharistie, puisque le
chrétien ne peut pas boire à la fois à la coupe du Seigneur et à la coupe
sacrificielle des démons. Le document utilise aussi volontiers diverses
expressions tirées de l’Écriture, mais généralement séparées de leur
contexte.
Pour la pénitence et l’extrême-onction la référence aux textes pauli-
niens est rare et se réduit le plus souvent à quelques expressions usuelles.
Le décret sur le sacrement de l’ordre, doctrinalement très relié à celui sur
le sacrifice de la messe, fait toujours référence à Hébreux et cite 2 Timothée
1,6-7 où Paul invite son disciple à se souvenir de la grâce reçue par
l’imposition des mains. Il invoque globalement l’enseignement de Paul
(ch. 4), en référence à 1 Corinthiens 12, pour affirmer que dans l’Église
tous ne sont pas prophètes, ni apôtres, ni docteurs. Pour le mariage le
concile cite Éphésiens 5,25-32.
Comme on le voit, cette moisson est faible. La distance prise par
rapport à l’enseignement de Paul est infiniment plus grande que pour la
justification. Le concile se contente en fait de fonder l’institution des
sacrements dans les textes scripturaires les plus usuels.
© Centre Sèvres | Téléchargé le 19/10/2022 sur www.cairn.info (IP: 102.129.81.217)
Le décret sur la justification, pour être une œuvre artificielle, n’en est pas
moins, à bien des points de vue, un excellent travail ; à tel point qu’on peut
se demander si la Réforme se serait développée, si ce décret avait été rendu
au concile du Latran, au début du siècle, et était réellement passé dans la
chair et le sang de l’Église 16.
16. A. von HARNACK, Dogmengeschichte, III, p. 711 ; cité par H. Küng, La justifica-
tion, DDB, Paris, 1965, p. 132.