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Le Conseil d’Etat s’est prononcé dans un arrêt du 11 décembre 2015 nommé « Domenjoud »
dans lequel il a précisé l’office du juge administratif des référés-libertés ainsi que les modalités
de son contrôle.
En l’espèce, un arrêté du ministre de l’intérieur pris en date du 25 novembre 2015 astreint une
personne à résider sur le territoire d’une commune jusqu’au 12 décembre 2015. Cet arrêté
prévoie que l’assigné effectue trois contrôles de police par jour de la semaine, et qu’il demeure
à certains horaires précisés à sa résidence.
L’assigné demande au juge des référés du tribunal administratif de Melun, sur le fondement de
l’article L.521-2 du Code de la justice administrative, la suspension de cet arrêté ministériel.
Par une ordonnance du 3 décembre 2015, le juge administratif des référés le déboute de sa
demande. L’assigné interjette appel devant le juge des référés du Conseil d’Etat qui rend un
arrêt confirmatif.
En ses motifs, l’assigné demande au Conseil d’Etat que soit renvoyée au Conseil
Constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) concernant la conformité aux
droits et libertés garantis par la Constitution aux dispositions de l’article 6 de la loi du 3 avril
1955, qui permet au ministre de l’intérieur pendant une situation d’état d’urgence de prononcer
l’assignation à résidence d’une personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de
penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre public. Ces
dispositions portent selon lui une atteinte injustifiée à la liberté d’aller et venir, et à d’autres
libertés fondamentales.
Le Conseil d’Etat rejette par son dispositif la demande de l’appelant, puis renvoie la question
prioritaire de constitutionnalité devant le Conseil Constitutionnel. Le Conseil d’Etat consacre
l’élargissement du contrôle du juge des référés-libertés, par l’instauration du plein contrôle de
proportionnalité en situation d’exception, qui doit regarder si la mesure contestée est
proportionnelle au regard de la situation d’urgence et au regard des libertés et droits de
l’assigné. Faisant ce contrôle, il juge que la mesure est proportionnée. Selon lui, les motifs de
l’assignation, pris à l’occasion de l’état d’urgence mais étrangers à celle-ci, sont tout à fait
recevables. Concernant la QPC posée, en effectuant ce contrôle, il effectue par la même
occasion un pré-contrôle de constitutionnalité en regardant si l’article de la loi respecte les
mesures de droit européen. Finalement, il consacre une présomption simple d’urgence contre
les mesures d’assignation, dans la logique de l’office du juge des référés-libertés. L’office du
juge des référés se voit alors précisée et agrandie par la même occasion.
Il s’agit dans un premier temps d’analyser la manière dont le Conseil d’Etat consacre
l’élargissement du contrôle du juge des référés-libertés en situation d’exception telle que l’état
d’urgence (I), puis d’observer comment la Haute-Cour administrative précise l’office de ce juge
à l’occasion de telles situations d’exceptions (II).
I/ L’élargissement du contrôle du juge administratif des référés en situation d’exception
L’arrêt innove en ce qu’il consacre un principe nouveau qui permet au juge des référés-libertés
d’effectuer un contrôle de proportionnalité dans une telle situation d’exception (A), puis il
apprécie concrètement l’atteinte à la liberté fondamentale contestée par le cas d’espèce (B).
Le Conseil d’Etat rompt avec sa jurisprudence limitée et consacre le pouvoir pour le juge
administratif d’effectuer un contrôle entier de proportionnalité. Il s’agit par définition d’un
principe général du droit non textuel qui impose que toute mesure restrictive prise à l’encontre
d’une personne par une autorité administrative soit proportionnée à sa situation. Le juge
constitutionnel est normalement le garant du contrôle de proportionnalité, car il doit assurer la
conciliation entre l’état d’urgence et les libertés et droits reconnus aux individus. En l’espèce,
le régime de l’assignation à résidence est rappelé dans le considérant 7, qui évoque qu’il peut
être mis en place « en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public. » Il
faut que le comportement de l’assigné constitue une menace pour l’ordre public. Concernant le
Conseil d’Etat, le contrôle de proportionnalité avait déjà été effectué par le juge administratif
dans l’arrêt Benjamin de 1933, dans lequel le Conseil d’Etat avait mis en balance le maintien
de l’ordre public avec le respect des libertés fondamentales. L’arrêt Domenjoud énonce que le
juge administratif est compétent pour vérifier la proportionnalité entre l’assignation et la finalité
d’ordre public qu’elle poursuit. C’est un contrôle de droit commun, un examen par lequel le
juge mesure l’intensité suffisante d’une mesure pour faire face à un risque de trouble à l’ordre
public. Or il exerce désormais un contrôle entier et n’effectue plus un simple contrôle de l’erreur
manifeste d’appréciation, comme il l’avait consacrée dans l’arrêt du 25 juillet 1983, Mme
Dagostini. En ce sens, il vérifie que les mesures prises en application de l’état d’urgence sont
justifiées par les troubles à la sécurité et l’ordre public constatés. Si la mesure apparait comme
disproportionnée, le juge, qu’il soit celui des référés-libertés ou celui de l’excès de pouvoir,
pourra suspendre cette mesure pour faire cesser l’atteinte disproportionnée. Le régime des
mesures d’assignation à résidence est encadré par l’article 6 de la loi du 3 avril 1955. Il s’agit
de voir si en l’espèce, ces mesures ne sont pas disproportionnées quant à la situation de l’assigné
et ne créent pas une situation grave par laquelle il est privé de ses libertés fondamentales. Selon
le Conseil Constitutionnel, la loi de 1955 de l’espèce est « une conciliation nécessaire entre le
respect des libertés et la sauvegarde de l'ordre public sans lequel l'exercice des libertés ne
saurait être assuré ». Alors c’est l’administration, comme le ministre de l’intérieur ici, qui doit
lors de l’édiction de ces mesures parvenir à concilier ces mesures. L’application de la loi de
1955 est alors plus claire. Ce contrôle se rapproche de celui effectué par le juge de l’excès de
pouvoir, mais en diffère car il considère l’exigence de proportionnalité de la mesure. On ne
regarde pas si elle porte atteinte mais si elle porte une atteinte proportionnée aux droits et
libertés du requérant. On constate donc que l’appréciation de l’espèce par le Conseil d’Etat est
assez restrictive des libertés puisqu’elle déconnecte les motifs établis pour le recours à l’état
d’urgence des mesures des assignations prises sur son fondement. Il serait dangereux que la
situation d’état d’urgence soit l’opportunité pour prendre des mesures sans rapport avec son
objet et venant restreindre la liberté des individus.
Dès lors, le Conseil d’Etat effectue ce contrôle in concreto, selon les modalités susvisées.
Après avoir défini cette nouvelle opportunité de contrôle pour le juge des référés-libertés, le
Conseil d’Etat opère une nouvelle définition de l’office du juge des référés-libertés et des
prérogatives qui lui sont attribuées dans une telle situation d’urgence.
II/ La définition de l’office du juge administratif des référés en situation d’état d’urgence
Désormais, le Conseil d’Etat va plus loin que le simple examen des dispositions de la QPC, il
présente une présomption d’urgence qui facilite grandement la mise en œuvre du référé.
B. Le juge des référés comme garant de la présomption d’urgence pour les assignations
à résidence
Enfin, ce qui paraît encore plus innovant dans l’arrêt d’espèce consiste en la consécration
d’une présomption d’urgence en matière de référé-liberté. La présomption d’urgence en matière
de référés n’est pas neuve en droit administratif puisqu’elle existait déjà en matière de référé-
suspension, selon l’article L.521-1 du Code de justice administrative, lorsque la situation pour
le requérant est justifiée de conséquences graves. Mais en l’espèce, le Conseil d’Etat reconnait
une présomption d’urgence en matière de référé-liberté dans le considérant 20 : « Eu égard à
son objet et à ses effets (...), une décision prononçant l'assignation à résidence d'une personne,
prise par l'autorité administrative en application de l'article 6 de la loi du 3 avril 1955, porte,
en principe et par elle-même, sauf à ce que l'administration fasse valoir des circonstances
particulières, une atteinte grave et immédiate à la situation de la personne, de nature à créer
une situation d'urgence. » Dans le cas d’espèce, la présomption d’urgence est reconnue pour
l’assignation à résidence de nationaux menaçant la sécurité et l’ordre public lors de l’état
urgence. Elle consacre un principe général selon lequel l’assignation à résidence est une
situation d’urgence de nature à justifier la saisine du juge sur le fondement de l’article L.521-2
du Code de justice administrative s’apprécie in concreto. Cette présomption est introduite
contre les mesures de police administrative prises en rapport avec l’état d’urgence. On présume
a priori qu’il existe une urgence à faire cesser, comme en espèce une atteinte aux droits
fondamentaux dans un tel contexte d’urgence. Elle est l’unique moyen de garantir l’examen
effectif de la légalité des mesures d’assignation à résidence, puisque la liberté d’aller et venir
est nécessairement entravée, le juge contrôle in concreto l’urgence et la gravité de cette
privation. Le Conseil d’Etat ne fonde pas la présomption sur la gravité de l’atteinte à la liberté
fondamentale mais sur la gravité de l’atteinte en tant qu’elle est commise dans le cadre de
l’application d’un régime d’exception et restrictif, celui de l’état d’urgence. Cela justifie ce
contrôle effectif. L’institution de la présomption décharge le requérant de la preuve de la gravité
des conséquences des mesures prises à son encontre, ce que montre la formule « eu égard à son
objet et à ses effets ». C’est une présomption simple, qui peut toutefois être renversée par
l’administration. Autrement dit, l’administration peut prouver que des « circonstances
particulières » justifient une telle mesure, et qu’alors il y a une absence d’urgence. Ainsi, seuls
des impératifs d’intérêt général peuvent amener le juge à écarter l’existence de l’urgence.
Correction :
Procédure en référé liberté : il faut vérifier que toutes les conditions du référé liberté sont
présente : urgence et atteinte à la liberté fondamentale. Ici la liberté c’est celle d’aller et venir.
Urgence : délai de l’assignation et conditions de l’évènement organisé.
Considérant 7 : la sécurité est une composante de l’ordre public or ici distinction. « Raisons
sérieuses » formule importante.
Considérant 14-15 : CE contrôle les 3 conditions de la QPC. Il n’y avait pas eu de contrôle de
constitutionnalité. Caractère nouveau et sérieux présent. Dans le considérant 14 on se demande
s’il faut un lien direct entre les circonstances des mesures d’assignation à résidence et l’état
d’urgence. Détachement assignation à résidence et état d’urgence. Même s’il différencie il
renvoie quand même la QPC. Peu intéressant de renvoyer QPC et assez paradoxale de la juger
comme sérieuse et juger en même temps que les assignations à résidence ne constituent pas une
atteinte à la liberté. Sur le point d’équilibre entre OP et libertés, dans le cadre des régimes
d’exception on va permettre des atteintes plus graves. Il y avait une nécessité que le CE se
prononce sur cette question-là de manière générale.
CCel dit que les mesures étaient constitutionnelles. Procédure de justice constitutionnelle de
l’urgence.
Sur la QPC en général : appréciation 3 critères, détachement assignation et état urgence puis
renvoi car il voulait décision CCel sur le sujet.
Contrôle très concret sur les antécédents judiciaires de la personne et cela justifie l’interdiction
de circuler. Normalement le CE fait surtout un contrôle restreint en matière de REP. Le contrôle
de l’erreur manifeste d’appréciation dans le cadre de l’état d’urgence déplace équilibre entre
OP et libertés. JA renforce son contrôle : arrêt Rolin 2006. Contrôle plein.
Il faut faire une différence entre le contrôle du juge des référés et le contrôle normal, une
appréciation concrète est effectuée. Il y avait des raisons sérieuses de penser qu’il était
dangereux.
Question des notes blanches qui donnent des indications or CE ne dit rien par rapport aux notes
blanches, parfois on justifie juste par « les notes blanches » et rien de plus.
Considérant 30 : pas d’atteinte grave et illégale identifiée. La présomption d’urgence est assez
inutile en l’espèce. Le requérant doit prouver qu’il y a une atteinte grave et illégale.
Possibilités de plan :
I. QPC
II. Assignation à résidence