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Abdeslam BENDIABDELLAH
Professeur
Directeur du Laboratoire Management des Hommes et des Organisations
Université de Tlemcen, Algérie
a_bendiabdellah@yahoo.fr
INTRODUCTION
219
Malgré ces données intéressantes et stimulantes de la réalité du genre
à l’échelle mondiale, le phénomène en soi reste encore mal cerné en
Algérie. Ceci reflète l’idée que l’activité des femmes entrepreneures
identifiées formellement en tant que telles, est récente. La littérature
algérienne pointe le doigt sur la rareté des études académiques relatives à
l’entrepreneuriat féminin en Algérie (Gillet, 2007 ; Ghiat, 2014). Les
auteurs1 critiquent, l’absence quasi-totale de statistiques incluant la
dimension genre dans le monde de l’entrepreneuriat. Aussi, les données
officielles relatives aux effectifs des femmes entrepreneures sont rares et
peu précises, à l’exception de quelques articles dans la presse
journalistique, où le consensus est de mise quant à l’idée qu’il y a très peu
de femmes entrepreneures en Algérie. Il s’avère en conséquence très
difficile d’avoir des statistiques assez précises concernant le nombre
exact de femmes chefs d’entreprises2.
Pour tenter de comprendre cette faible présence des femmes dans les
projets entrepreneuriaux algériens, nous avons mené en 2010 une étude3
auprès de 36 entreprises créées et gérées par des femmes algériennes et
réparties à travers le territoire national, étude qui nous a permis de
recueillir une somme d’informations riches en enseignements.
Dans le présent article, nous analysons et interprétons une partie des
résultats qui découlent de cette enquête. Nous nous focalisons sur 5
interviews, en effectuant d’autres croisements de variables permettant de
décrire d’autres facettes de l’expérience entrepreneuriale féminine en
Algérie. L'article est organisé comme suit. La première section aborde
brièvement le concept de l’entrepreneuriat féminin en tentant de repérer
sa spécificité et sa singularité. La deuxième section montre l'image des
femmes entrepreneures algériennes à travers la présentation de quelques
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220
1. CADRAGE THEORIQUE
4Et très récemment, mais dans une proportion moindre, d’Europe, notamment la
Finlande, l’Espagne, la Suisse et la Suède.
5Les indicateurs clés de l'expansion rapide de ce champ de recherche selon Hughes et
221
l'entrepreneuriat au féminin pourrait reposer sur la perception sociale de
la place de la femme, ce qui rend cette catégorie d’entrepreneurs moins
visible et moins étudiée. Les auteurs insistent sur la nécessité d'envisager
les questionnements relatifs à la recherche sur les femmes entrepreneures
différemment, et estiment qu’une nouvelle phase dans la recherche sur
l’entrepreneuriat féminin est indispensable pour engendrer de nouvelles
perspectives (Ahl, 2006 ; De Bruin et al., 2007). Cependant, Hughes et al.
(2012), se déclarent optimistes envers les futures recherches quand elles
affirment que « we are confident that future researchers will produce even richer and
more robust understandings of female entrepreneurs and their endeavors. This is
especially so given the growing maturation of the field that offers a growing array of
questions, tools, and frameworks with which to work».”
Pour l’Algérie, (Abedou, 2007) du CREAD7 témoigne, après une
vaste enquête, que : «Dans les pays du Sud et particulièrement au Maghreb, la
recherche sur les PME n'est qu'à ses débuts». Gillet (2007) atteste, de son côté,
que peu de travaux de recherche portent sur les entrepreneurs algériens.
Elle confirme qu’ « aucune recherche ne traite spécifiquement de l’entrepreneuriat
féminin en Algérie ». Cependant, l’analyse de « l’émergence du travail des femmes
algériennes dans le secteur de l’entrepreneuriat est un objet de recherche nouveau qui
traverse quatre champs principaux de recherche : l’entrepreneuriat, le travail des
femmes, la condition féminine et les rapports sociaux de sexe en Algérie » (Gillet,
2002). Cette affirmation est validée par Ghiat (2014) qui estime que
l’entrepreneuriat est insuffisamment étudié en Algérie. Nous pouvons
également soutenir que, ce thème est pratiquement très peu exploré par
les universitaires et chercheurs algériens. Les statistiques afférentes à
cette catégorie d’entrepreneurs sont peu précises. Par ailleurs, les analyses
des spécialistes ne s’appuient pas toujours sur le même type de données
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consensus au niveau de la définition. Ce terme est ambigu et peut parfois
porter à confusion (Cornet et Constantinidis, 2004).
Cependant, à travers une littérature de plus en plus abondante dans
les pays occidentaux, nous avons pu entrevoir que la notion de
l’entrepreneuriat féminin ou de la femme entrepreneure a connu
plusieurs définitions. Belcourt et al. (1991) décrivent la femme
entrepreneure, comme : «cette femme qui recherche l'épanouissement personnel,
l'autonomie financière et la maîtrise de son existence grâce au lancement et à la gestion
de sa propre entreprise ». La femme est donc entrepreneure « dans la mesure où
elle change de statut et/ou de métier et/ou d’organisation afin de créer une nouvelle
richesse » (Arasti, 2008). De même, Adrien et al. (1999) proposent la
définition fonctionnelle suivante : « a person who takes financial risks, in order
to start up or to acquire a business, and who directs it in an innovative and creative
way by developing new products and conquering new markets ». Autrement dit, ces
femmes assument, seules ou en partenariat, tous les risques et
responsabilités financières, administratives et sociales liés au
développement de leurs activités (Cornet et al., 2004). Pour
Lavoie(1988), la femme entrepreneure c’est : « la femme qui, seule ou avec un
ou des partenaires, a fondé, acheté ou accepté en héritage une entreprise, qui en assume
les risques et les responsabilités financières, administratives et sociales et qui participe
quotidiennement à sa gestion courante ».
Quant à la tentative de définir l’entrepreneuriat féminin dans le
contexte algérien, elle s’avère plus délicate encore. D’abord, il y a une
absence quasi-totale de statistiques incluant la dimension genre dans le
monde de l’entrepreneuriat algérien. Les rares documents existants
souffrent d'imprécision des chiffres officiels relatifs aux effectifs des
femmes entrepreneures. En outre, une confusion conceptuelle entre
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Partant de cette idée, plusieurs gouvernements et organisations sociales
travaillent afin de stimuler son développement en tant que moyen pour
renforcer les économies locales dans différentes régions du monde.
L’explication évidente de cette nouvelle orientation, selon Karlsson et
Anderson (2009), est que la mondialisation rapide ces dernières années, a
fondamentalement changé les avantages concurrentiels dans les pays et
les régions. Cette évolution se traduit par une forte hétérogénéité des
dispositifs d’accompagnement existants (Culliere, 2005).
L’Algérie, n’est pas en reste. Les stratégies de développement
adoptées aujourd’hui s’inscrivent dans une logique de diversification des
économies. Les orientations politiques prennent en compte la nécessité
de multiplier les programmes et politiques visant à la promotion de
l’entrepreneuriat féminin. Cet ensemble d’indicateurs témoigne d’une
émergence progressive de l’entrepreneuriat féminin en Algérie et
confirme la tendance d’un développement de l’esprit entrepreneurial
comme outil d'intégration socioéconomique de la femme algérienne.
Concrètement, le potentiel qu’offrent les femmes algériennes dans la
promotion de l’entrepreneuriat est encore largement inexploité. Les
statistiques algériennes8 n’affichent que 17.42 % des femmes sur
l’ensemble des entrepreneurs algériens. Le taux de féminité des projets
financés par l’Agence Nationale de Soutien à l’Emploi des Jeunes
(ANSEJ) est de 10 %. C’est presque la même moyenne de féminité des
projets financés par la Caisse Nationale d’Assurance Chômage (CNAC),
se situant autour de 11 % des financements dédiés aux femmes.
Toutefois, l'ANSEJ avance qu’elle soutient annuellement la création
d’environ 1200 micro-entreprises créées par des femmes sur les 8500
créations à travers le pays (soit près de 14 %). Jusqu’au 30 juin 2012, sur
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région ouest du pays), 51,8 % d'entre elles ont affirmé que l'idée du
projet leur est venue de la formation qu'elles ont suivie et de l'expérience
acquise au cours de leur carrière. Plus de deux tiers affirment n’avoir
perçu aucune aide d’un quelconque organisme public. L’étude révèle
également que pour 28,2 % des femmes entrepreneures enquêtées, le
montage financier de leur entreprise a été réalisé grâce au soutien
familial, contre 16,5 % qui ont bénéficié d’un crédit bancaire en plus du
fonds propre apporté (Benghabrit et Rahou, 2006).
Sur un autre registre, les données de l’enquête GEM Algérie (2011),
menée en partenariat avec le CREAD, montrent que l’activité
entrepreneuriale reste encore dominée par les hommes, même si les
femmes ont enregistré une progression significative ces dernières années.
Le taux d’activité entrepreneuriale féminine moyen national est de 5.7,
comparativement au taux masculin qui est de l’ordre de 12.3. S’agissant
des phases de développement de l’activité entrepreneuriale, la même
enquête enregistre un taux d’activité entrepreneurial très important dans
la phase de démarrage, puis il diminue dans les phases de
l’entrepreneuriat naissant et dans l’entrepreneuriat établi (GEM, 2011).Si
ces chiffres semblent bien indiquer l’existence d’un potentiel de
développement de l’entrepreneuriat féminin en Algérie, cela ne doit pas
faire illusion. En effet, comparé à ceux des autres pays, l’entrepreneuriat
féminin en Algérie de par sa marginalité reste un épiphénomène. Au
Maroc, en Tunisie et dans bien d’autres pays de la région MENA13, ce
phénomène semble avoir connu une évolution autrement plus favorable
qu’en Algérie, ce qui explique le stade avancé de son développement
dans ces pays. Le rôle marginal dû à l’absence des dispositifs et système
d’appui spécifiques, expliquent les raisons empêchant son évolution en
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Nord.
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d’accroître la crédibilité de nos résultats et permettre d'obtenir un
nombre d’enquêtées représentatif, nous avons sollicité la collaboration de
certains acteurs qui, à des degrés divers, se sont directement impliqués. Il
s’agit, notamment, de la Chambre de Commerce et d’Industrie de la
TAFNA14 et de l’association des femmes d’affaires algériennes (la
SEVE)15.
Pour la construction d'objet de recherche, nous avons tout d’abord
procédé à une revue de la littérature existante, ce qui nous a aidés à
mieux affiner les contours du phénomène étudié, et à formuler notre
question de recherche. Cette revue de littérature nous a permis
d’identifier certains facteurs susceptibles de façonner le phénomène de
l’entrepreneuriat féminin. Pour cela nous nous sommes appuyés sur les
travaux empiriques réalisés par l’OCDE, GEM et la Banque mondiale,
travaux qui couvrent diverses régions du monde (USA, Canada, Europe
et région MENA). Quant aux textes de référence, nous nous sommes
intéressés particulièrement aux écrits de (Brush et aI., 1991 ; Brush,
1992 ; Ahl, 2006 ; Carrier et aI., 2006 ; Orser, 2007 ; Verheul, 2005 ;
Cornet et aI., 2004). Ces travaux partagent l'hypothèse que les femmes
entrepreneures ont presque les mêmes difficultés à travers le monde.
En parallèle, des entretiens ont été menés en face-à-face avec un petit
échantillon de femmes d’affaires de la wilaya de Tlemcen, ce qui nous a
permis de mieux cerner notre problématique. Menées donc de façon
concomitante avec la recherche bibliographique, ces rencontres avec les
femmes entrepreneures16, nous ont mené à identifier les facteurs
particuliers au contexte algérien. Les premiers résultats n’ont fait que
confirmer les fondamentaux de la littérature sur les grandes
caractéristiques de l’entrepreneuriat féminin, à savoir, que les besoins de
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Tlemcen, d’Oran et de Sidi Bel Abbes. Cette démarche qualitative nous a
permis, de recentrer notre objet de recherche et de préparer l’élaboration
de notre questionnaire. Cette étape a été l’occasion de découvrir de
nouvelles dimensions du phénomène étudié. Autrement dit, valider les
variables sélectionnées d'après la littérature et en identifier de nouvelles.
Cette phase a permis également d’obtenir des récits et explications
fondés sur l’expérience personnelle des interviewées.
Dans une telle perspective, nous avons profité de plusieurs rencontres
organisées au sein de la Chambre de Commerce de la wilaya de Tlemcen
(CCI-TAFNA)18. Nous avons mené des entretiens semi-directifs
qualitatifs auprès de cinq de ces femmes19. Nos interrogations ont été
portées sur les point suivants : dans un premier temps, nous avons
interrogé les sujets, sur le profil de leur entreprise (âge, taille, secteur
d’activité, etc.), ainsi que sur les raisons ayant motivé leur création. Puis,
nous nous sommes intéressés à leurs expériences entrepreneuriales,
notamment les problèmes qu’elles ont rencontrés et les supports dont
elles ont bénéficié lors de la création et pendant le développement de
leurs entreprises. Des discussions ont été également conduites sur leur
état de connaissance par rapport à quelques fondamentaux, tels que les
notions de risque, de stratégie, d’innovation, la RSE, etc.
Pour l’administration du questionnaire, nous avons utilisé plusieurs
formules, tout en privilégiant celle qui consiste à automatiser la
procédure sous forme de formulaire électronique, autant pour ses
avantages (notamment la facilité d’administration et l’économie des
déplacements) que pour les inconvénients découlant des autres
méthodes, compte tenu de nos contraintes. La structuration du
formulaire, malgré sa simplicité, a nécessité plusieurs tests pour en
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habituel chez les femmes d’affaires algériennes, comme nous l’ont certifiées plusieurs
interviewées lors de l’étude préliminaire.
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femmes entrepreneures elles-mêmes qui ont accepté de nous
communiquer les e-mails de leurs collègues. Suite aux précautions
d’usage, de forme et de fond, prises pour optimiser le nombre de
réponses, nous avons finalement reçu 36 réponses, par le biais du
formulaire web21 et confirmer nos résultats au moyen d’entretiens en face
à face.
228
• La moyenne d’âge des femmes entrepreneures était de 40 à 55
ans : celles de 40 à 50 ans sont clairement plus nombreuses (83 %),
contre 6 % pour les plus de 50 ans. Toutefois, les deux tranches d’âge se
réfèrent à un âge auquel les femmes sont relativement libérées des
responsabilités matrimoniales et d’éducation de leurs enfants. Ainsi,
seulement 17 % d’entrepreneures femmes actives a un âge compris entre
27 et 39 ans, âge correspondant globalement aux périodes des maternités
et d’éducation des enfants. Par ailleurs, on note qu’aucune femme
entrepreneure, dans l’échantillon, n’a moins de 25 ans. Or, 75 % de la
population algérienne est composée de jeunes de moins de 25 ans. Ceci
confirme, a priori, l’idée que la catégorie sociale des entrepreneurs et
chefs d’entreprise reste plutôt fermée aux jeunes, en général, et aux
jeunes femmes, en particulier, conclusion qui rejoint notamment celle
faite par (Gillet, 2007).
• Au sujet de la situation matrimoniale, nous constatons que 80.6
% de l’échantillon sont mariées (29 femmes) contre 8.3 % divorcées et
5.6 % veuves. Les chefs d’entreprise célibataires représentent 5.6 % de
l’échantillon.
• Quant aux raisons de se lancer dans les affaires, la forte majorité,
78.1 %, provient essentiellement des femmes diplômées ayant connu une
longue période d’inactivité, expliquant leur accès aux affaires comme une
forme de délivrance du train-train domestique. D’autres créatrices
d’entreprises ont par contre choisi de légaliser leurs activités, après un
passage par le secteur informel, en vue de bénéficier de l’accès au crédit
bancaire. Le motif d’autonomie financière est également naturellement
présent, que ce soit à l’égard de la famille ou du conjoint. Celui de la
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facile par rapport aux EURL. Outre les limites de l’épargne personnelle,
les difficultés de mobiliser des ressources financières en vue de la
création d’entreprise ont poussé 65 % des femmes interrogées à partager
la propriété avec le mari, un membre de la famille, ou même un ami. Seul
un tiers des femmes se déclarent propriétaires uniques.
La répartition des entreprises révèle la prédominance du secteur
tertiaire, représentant presque la moitié des activités 44.4 %. Ainsi, les
femmes enquêtées sont davantage présentes dans les prestations de
service (Informatique-Internet-Télécom, Communication, Relation
presse, Juridique-Fiscal, Audit-Conseil-Consulting...) que dans l’industrie
(ex : Electronique, Mécanique) laquelle n’occupe que 13.9 %. Le secteur
agroalimentaire occupe quant à lui, le deuxième rang avec 22 %. Même si
l'enquête a révélé une faible présence de la branche industrielle, il semble
que la tendance va de plus en plus vers la diversification des activités.
Ainsi, les femmes activent non seulement dans les secteurs qui leur sont
traditionnellement réservés (à l’exemple du textile), mais aussi dans
d’autres secteurs investis ordinairement par leurs homologues masculins :
notamment dans les TIC, l’agroalimentaire et la chimie plastique. Plus de
la moitié de l’effectif global des femmes qui ont répondu à l'enquête
(52.8 %) ont embauché entre 10 et 49 employés, c.-à-d., qu’elles sont de
type « petite entreprise » tandis que les 8.3 % suivantes sont de type
« moyenne entreprise » et 5.6 % sont de type « grande entreprise »
puisqu’elles emploient plus 250 personnes. Cette proportion est
remarquable par rapport à notre échantillon de 36 enquêtées.
Dans l’échantillon, les TPE sont relativement moins nombreuses, leur
proportion de 33.3 % n’est pas significative, alors que des études
algériennes tendent à affirmer la prédominance de la très petite
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23Ces derniers constatent que 93,2 % des PME algériennes ont moins de dix salariés.
230
l’entrepreneuriat. Le taux de 19.4 % (moins de 2 ans) souligne la
croissance du nombre de nouvelles créations dans les deux dernières
années (2009 et 2010).
231
accumulation certaine de savoir-faire entrepreneurial, il peut aussi
s’expliquer par l’insuffisance en ressources humaines internes se
rapportant aux compétences managériales et opérationnelles.
- Elles sont conscientes des changements évolutifs de
l’environnement. Le climat entrepreneurial défavorable dans lequel elles
activent, est contrebalancé par un grand engouement à rencontrer de
nouvelles contingences, et à s’inscrire dans l’économie moderne, celle du
savoir et de l’entreprise performante. Elles s’intéressent à apprendre et
s’accommoder. En effet, la progression des nouvelles technologies de
l’information (NTIC) et l’extension de l’usage d’Internet, ont
certainement contribué à l’amélioration voire la consolidation du système
relationnel entre les femmes entrepreneures algériennes.
En réponse à la question : « Participez-vous à des activités de réseautage ? »,
la forte majorité (95 %) a répondu positivement. En plus, elles le font
souvent par le moyen de la messagerie électronique (e-mailing). Certaines
profitent des réunions ou des rencontres souvent à travers des groupes
relationnels, profitant de l’avantage de la proximité. Il apparaît donc
clairement que, la progression des NTIC et l’extension de l’usage
d’Internet, ont contribué à l’amélioration, voire, la consolidation du
système relationnel entre les femmes entrepreneures (2 % d’entre elles
participent à des forums et des conférences). D’ailleurs, l’ensemble des
interviewées insistent sur l’importance de l’aspect relationnel comme
moyen de pérenniser le rapprochement entre les femmes entrepreneures,
contribuant ainsi à étendre leur potentiel dans le développement
économique national. L’approche de réseautage qui sert à la circulation
de l’information (transmission de connaissances), pourrait effectivement
maintenir la diffusion des connaissances et des expériences de manière à
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24La zakat constitue un aspect d’équité très important dans la finance islamique. Le
musulman possédant le minimum imposable est tenu de calculer chaque année lunaire
une taxe sur le capital (2.5%) et de le donner aux plus pauvres dans sa région de
résidence.
232
sont prioritaires en termes d’acquisition de la zakat. Ceci engendre en
conséquence un climat de travail dynamique régi par la confiance
interpersonnelle, stabilise le différentiel de turn-over du staff et contribue
implicitement à la cohésion sociale. Cette stabilité aide ces femmes
entrepreneures à prouver plus de créativité et à prendre des décisions
plus innovantes. Selon Verheul et al. (2005), cet aspect inventif peut
mener alternativement à une qualité plus élevée de l’entrepreneuriat.
233
Informatique-Internet-Télécom, Communication-Relation presse,
Juridique-Fiscal, Audit-Conseil-Consulting, etc.). Elles contribuent ainsi à
la diversité de l'entrepreneuriat.
- Elles adoptent des stratégies multiples. La compétitivité de leurs
entreprises est parfois mise à mal, du fait de l’envahissement, sur leur
marché, de la contrefaçon spécialement chinoise, et en raison de
l’augmentation des coûts de production, consécutive au recours à des
matières premières ou des équipements de qualité importés le plus
souvent de l'étranger. Pour diminuer ces coûts, quelques femmes chefs
d’entreprises recourent généralement à l’externalisation d’une partie de
leurs activités vers l’informel25 (généralement des femmes au foyer).
D’autres femmes considèrent que l’innovation en termes de produit ou
de service, est la meilleure stratégie pour acquérir une part de marché. En
général, ces femmes se comportent différemment des hommes,
notamment face aux risques. Il semble qu’elles mettent en œuvre des
stratégies moins audacieuses. La majorité des femmes rencontrées ont
par ailleurs tendance à prendre des décisions moins risquées.
- Très ambitieuses, elles expriment la volonté d’être seul maître de
leur activité professionnelle. Même si l’idéologie dominante liée au
contexte socioculturel national, tend encore à faire de l’entreprenariat
une activité d’abord masculine et donc un domaine réservé en priorité
aux hommes, il semblerait que l’environnement des affaires et le climat
social en Algérie sont bien moins discriminatoires qu’on a tendance à le
croire. Nos résultats d’ordre quantitatif sont surprenants à ce propos,
dans la mesure où la plupart des répondantes à notre enquête (72 %) ont
avoué n’avoir jamais ressenti une quelconque discrimination dans leurs
activités, que ce soit de la part des différentes administrations, des
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25(Kerzabi et Tabet, 2009) ont clairement révélé ce constat quand ils arguent qu’une
partie des activités de l’entreprise algériennes se pratique dans l’informel (financement,
production, commercialisation, approvisionnement).
234
développement de leur activité. Elles démontrent un attachement
qualitatif au travail, permettant la reconnaissance et la réalisation de soi.
235
L’étude a aussi dévoilé une insuffisance de formation appropriée et un
manque de ressources humaines qualifiées. D’où la nécessité de faciliter
l’accès à des formations spécifiques pour les femmes entrepreneures afin
de combler leurs carences en connaissances managériales dans la gestion
quotidienne de leurs affaires. Notons également l’absence de systèmes
d’information pour que la femme entrepreneure soit formée et informée
en vue de pouvoir s’adapter à un environnement complexe : les marchés,
le climat politique, les conditions économiques. Mais plus encore, les
interviewées expriment un fort sentiment d’isolement dû au manque de
contacts, d’intégration et de rattachement à des réseaux professionnels,
compte tenu du nombre réduit de réseaux d'entraide et des difficultés à
s'intégrer dans les réseaux existants. Étant donné que ces femmes
semblent avoir investi un domaine nouveau, face à un environnement
incertain et évolutif fait d’ouverture et de mondialisation, elles ont
souvent besoin d’échanges mutuels d'expériences, d'informations et de
connaissances pertinentes en vue de saisir des opportunités ou trouver
des solutions aux problèmes de la gestion de leur entreprise. A ces fins,
elles s’orientent généralement vers leur entourage proche (collègues,
amis, familles). C’est le cas d’une entrepreneure « aventurière » de 40 ans,
titulaire d’un ingéniorat en microbiologie et qui gère son entreprise
depuis plus de seize ans. Elle nous a raconté son aventure
entrepreneuriale en mettant l’accent sur l’appui de son conjoint : « En
créant mon entreprise, j’ai cassé les habitudes et la routine de ma vie
quotidienne. C’était très stimulant, mais cette aventure était un facteur déstabilisant
pour le couple et pour l’ensemble de ma famille. Sans l’adhésion de mon conjoint
depuis le début, la situation risquait d’être beaucoup plus dure à assumer
matériellement et psychologiquement […]. Actuellement nous partageons, à deux, mes
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CONCLUSION
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dresser un historique mettant en relief les grandes lignes de tendance de
ce phénomène, de faire un bilan et de tracer les perspectives de ce champ
émergent dont la réalité profonde reste à décrypter.
L’objectif de notre étude consistait pour l’essentiel à livrer un état
statique de l’image réelle de l’expérience entrepreneuriale féminine en
Algérie. Au terme de ce travail sur un champ d’étude encore peu exploité
en Algérie, nous pouvons dire que les femmes rencontrées font, dans
leur ensemble, preuve de beaucoup d’amour du métier d’entrepreneur, et
c’est peut-être l’une des clés de leur réussite. Notre expérience avec ces
femmes, nous a permis également de conclure qu’être femme et
entrepreneure, c’est mettre en avant des valeurs de persévérance et
d’engagement personnel, de même qu’il faut avoir une volonté affirmée à
franchir ce domaine réservé traditionnellement aux hommes, permettant
ainsi la réalisation de soi et la reconnaissance des autres. Ceci confirme
les apports de Ekinsmyth (2011) qui qualifie l’entrepreneuriat féminin
comme : «une forme d’entrepreneuriat essentiellement motivé par le désir d’atteindre
une harmonie entre vie professionnelle et vie privée, à travers une orientation identitaire
qui brouille les frontières entre les rôles de mère et de femme d’affaires ».
27 L’association des femmes algériennes chefs d’entreprises, Pour plus d’information sur
ces objectifs, sa mission, et ses activités voire le site web de: http://www.seve-
algerie.org/
28 AME ( Algerian women managers and entrepreneurs) pour en savoir plus visiter leur
site http://www.ame-dz.com
237
BENGHABRIT, N., RAHOU Y., 2006, « Itinéraires de femmes
entrepreneures en Algérie: cas d’Oran », Colloque International : Création
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