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Université de Liège
Faculté des Sciences
Département de Géologie

Eléments de Sédimentologie
et de Pétrologie sédimentaire

Enclos entre les falaises sonores,


d'onde en onde, les galets chantent
d'anciennes mélopées qui enchantent
d'âpres dieux oubliés et les honorent...

Cortèges de galets multicolores,


de chocs en chocs, ils évoluent
vers une perfection déjà révolue
que chaque vague aussitôt colore.

Réseau fluviatile en tresse (Peonera, près Alquesar, Espagne), FB.

Table des matières


 I. AVERTISSEMENT
 II. INTRODUCTION
 LES ROCHES SEDIMENTAIRES
 L'ETUDE SEDIMENTOLOGIQUE: REMARQUES GENERALES
 III. LES SEDIMENTS DETRITIQUES
 INTRODUCTION
 SABLES, GRES ET CONGLOMERATS
 LES GRES
 Généralités
 Composition minéralogique

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 Granulométrie
 Classification
 LES SABLES
 CONGLOMERATS ET BRECHES
 Composition
 Texture
 Classification
 LES SEDIMENTS ARGILEUX ET SILTEUX
 COMPOSITION
 CLASSIFICATION
 LES ENVIRONNEMENTS DE DEPOT DES ROCHES DETRITIQUES
 ARGILES ET SILTS
 Sédiments résiduels
 Sédiments détritiques
 Sédiments d'origine volcanique
 SABLES ET GRAVIERS
 Dépôts de cônes d'éboulis
 Dépôts éoliens
 Dépôts fluviatiles
 Dépôts côtiers
 Dépôts de plate-forme
 Les tempestites
 Dépôts de bassin
 Les tsunamites
 IV. LES EVAPORITES
 INTRODUCTION
 EVAPORITES CONTINENTALES
 EVAPORITES MARINES PEU PROFONDES
 EVAPORITES PROFONDES
 DIAGENESE
 V. LES SEDIMENTS SILICEUX
 INTRODUCTION
 PETROGRAPHIE
 GEOCHIMIE
 CHERTS ET SILEX LITES
 CHERTS ET SILEX NODULAIRES
 SILICITES NON MARINES
 VI. LES PHOSPHORITES
 INTRODUCTION
 CLASSIFICATION
 VII. LES SEDIMENTS FERRIFERES
 INTRODUCTION
 GEOCHIMIE ET PETROGRAPHIE
 FORMATIONS FERRIFERES PRECAMBRIENNES
 FORMATIONS FERRIFERES PHANEROZOIQUES
 FORMATIONS FERRIFERES ACTUELLES
 FER DES MARAIS
 NODULES POLYMETALLIQUES
 VIII. LES GRANDS ENVIRONNEMENTS DE DEPOT DES CARBONATES
 INTRODUCTION
 LE DOMAINE CONTINENTAL
 CARBONATES LACUSTRES
 TUFS ET TRAVERTINS
 GROTTES
 CALICHES, CALCRETES
 LE DOMAINE MARIN
 LES PLATES-FORMES CARBONATEES TEMPEREES
 LES PLATES-FORMES CARBONATEES TROPICALES
 Les facteurs du milieu
 Les grands environnements de dépôt
 Critères de caractérisation des milieux de dépôt
 LE TALUS
 LE BASSIN
 IX. DESCRIPTION ET INTERPRETATION DES PALEOENVIRONNEMENTS CARBONATES

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 CLASSIFICATION DES ROCHES CARBONATEES


 Classification de Folk
 Classification de Dunham complétée par Embry & Klovan et Tsien
 DESCRIPTION DES PALEOENVIRONNEMENTS CARBONATES
 LES MICROFACIES STANDARDS DE WILSON-UN MODELE DE PLATE-FORME CARBONATEE
 LE MODELE DE RAMPE
 INTERPRETATION DES PALEOENVIRONNEMENTS CARBONATES
 X. TAPIS ALGAIRES, STROMATOLITHES & Co
 TAPIS ALGAIRES ET STROMATOLITHES ACTUELS
 INTRODUCTION
 CLASSIFICATION ET DESCRIPTION
 Les stromatolithes s.l.
 Les oncolithes
 QUELQUES CARACTERISTIQUES DES STROMATOLITHES
 Biologie
 Origine de la lamination
 Ecologie
 TAPIS ALGAIRES GIVETIENS
 XI. LES RECIFS
 GENERALITES - TERMINOLOGIE
 STABILISATION - MINERALISATION
 EVOLUTION AUTOGENIQUE - EVOLUTION ALLOGENIQUE
 LES RECIFS DANS L'HISTOIRE GEOLOGIQUE
 RECIFS ALGO-CORALLIENS DES EAUX SUPERFICIELLES TROPICALES
 INTRODUCTION
 GENERALITES: MORPHOLOGIE DES RECIFS ACTUELS
 UN EXEMPLE: LES ATOLLS
 Quelques définitions: atolls, îles hautes carbonatées
 Fonctionnement
 UN AUTRE EXEMPLE: LE RECIF BARRIERE
 Rôle des paramètres physiques sur la répartition et la morphologie des coraux
 BIOCONSTRUCTIONS A CORAUX AHERMATYPIQUES
 LES LITHOHERMES
 LES MONTICULES CORALLIENS PROFONDS
 Exemple des Bahamas
 Critères de reconnaissance des monticules récifaux profonds dans l'histoire géologique
 Exemple des monticules de l'Atlantique nord
 Critères de reconnaissance des monticules profonds liés au dégazage
 MONTICULES WAULSORTIENS
 MONTICULES MICRITIQUES FRASNIENS
 BIOSTROMES GIVETIENS
 XII. LES SEDIMENTS ORGANIQUES
 INTRODUCTION
 LES SEDIMENTS ORGANIQUES ACTUELS
 LES SEDIMENTS ORGANIQUES ANCIENS
 LES CHARBONS
 LES SCHISTES BITUMINEUX
 LE PETROLE
 XIII. DEPOTS VOLCANO-SEDIMENTAIRES
 INTRODUCTION
 ROCHES PYROCLASTIQUES
 AUTRES DEPOTS VOLCANO-SEDIMENTAIRES
 DIAGENESE DES DEPOTS VOLCANO-SEDIMENTAIRES

Lexique de géologie sédimentaire

I. Avertissement
Ce cours fait suite au cours de "Processus sédimentaires", centré sur l'étude des processus d'altération, érosion, transport, dépôt, diagenèse.
L'optique ici est d'identifier les différents types de roches sédimentaires et de comprendre leur genèse et le contexte paléogéographique de
cette genèse.

Puisqu'en sédimentologie comme en bien d'autres domaines mieux vaut avoir la tête bien faite que bien pleine, ces notes ne se veulent
certainement pas encyclopédiques. Si elles couvrent brièvement l'essentiel des types de sédiments et de roches sédimentaires, une certaine
accentuation est mise sur le monde des carbonates. J'ai en effet choisi de traiter plus en détail les bioconstructions, qu'elles soient de type

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récifal, microbien ou algaire. Ces bioconstructions diffèrent par leur géométrie, les communautés organiques qui les édifient, leur mode de
stabilisation et la source d'énergie primaire utilisée (soleil, matière organique, méthane,...). Outre leur intérêt intrinsèque, le choix d'illustrer
particulièrement les bioconstructions est justifié par le fait que nous en possédons, en Belgique, de multiples et splendides exemples
paléozoïques.

L'approche théorique sera complétée, au cours des travaux pratiques, par l'étude de lames minces et par des journées d'excursion (ces
excursions correspondent aussi au cours de géologie régionale).

Enfin, chaque chapitre est suivi d'une sélection bibliographique ("pour en savoir plus"). La lecture de certains de ces ouvrages, suivant l'intérêt
personnel, est recommandée.

Pour en savoir plus:

Quelques ouvrages généraux de sédimentologie:

 H. Chamley, 1990. Sedimentology. Springer-Verlag, 285 pp. Un bon ouvrage, clair et précis, centré plus sur les sédiments détritiques que sur les carbonates. Pas de photographies,
mais de bons schémas.
 I. Cojan & M. Renard, 1999. Sédimentologie. Dunod, 418 pp. Un bon ouvrage récent (en français) de sédimentologie intégrant les derniers développements (analyse séquentielle,
diagenèse, etc.). Pas de photographies, mais de bons schémas.
 D. Prothero & F. Schwab, 1998. Sedimentary geology (an introduction to sedimentary rocks and stratigraphy). Freeman & Co, 422 pp. Très bel ouvrage, récent, bien illustré de
schémas et photographies.
 H.G. Reading, 1996. Sedimentary environments: processes, facies and stratigraphy. Blackwell, 688 pp. Bon ouvrage, très complet.
 M. Tucker, 2001. Sedimentary petrology (3rd edition). Blackwell, 262 pp. Une des meilleures introduction à la pétrologie sédimentaire, bien illustrée.

II. Introduction
LES ROCHES SEDIMENTAIRES

Les roches sédimentaires font partie inhérente du cycle géologique, puisque leurs constituants (grains ou ions solubles) résultent de l'altération
de roches ou de sédiments préexistants, que ces constituants ont subi un certain transport et qu'ils se sont déposés ou ont été précipités dans un
bassin de sédimentation. L'évolution post-dépôt de ces sédiments (diagenèse) les transforme en roches sédimentaires. Ces roches peuvent subir
un métamorphisme et être à leur tour soumises à l'altération lors de leur passage à la surface des continents.

Il est possible de classer les roches sédimentaires en quatre grandes classes génétiques:

- les roches détritiques: elles sont formées de particules minérales issues de l'altération de roches préexistantes. Comme il s'agit de matériel
issu des continents, on les appelle aussi "terrigènes". Ces particules sont transportées par l'eau, la glace, le vent, des courants de gravité et se
déposent lorsque la vitesse de l'agent de transport diminue (ou lors de la fonte de la glace). Lorsque les roches détritiques sont essentiellement
constituées de fragments de quartz, on les appelle aussi "siliciclastiques". Les roches détritiques sont généralement classées en fonction de la
granulométrie de leurs constituants (conglomérats, grès, siltites, argilite, voir ci-dessous). Elles forment près de 85% de l'ensemble des roches
sédimentaires;

- les roches biogéniques, biochimiques ou organiques: elles sont le produit, comme leur nom l'indique, d'une activité organique ou
biochimique. L'altération fournit, outre les particules solides entrant dans la constitution des roches terrigènes, des substances dissoutes qui
aboutissent dans les mers, les lacs et les rivières où elles sont extraites et précipitées par des organismes. Dans certains cas, l'action des
organismes modifie l'environnement chimique et le sédiment est précipité directement à partir d'eaux marines ou lacustres sursaturées. Dans
d'autres, les organismes utilisent les carbonates, phosphates, silicates pour constituer leurs tests ou leurs os et ce sont leurs restes qui
constituent les roches sédimentaires. Les plantes accumulent des matériaux carbonés par photosynthèse et sont directement à l'origine du
charbon. D'autres types de sédiments carbonés comme les schistes bitumineux, le pétrole sont générés par des bactéries. Les roches
biogéniques forment près de 15% des roches sédimentaires;

- les roches d'origine chimique résultent de la précipitation (purement physico-chimique) de minéraux dans un milieu sursaturé. Les évaporites
(anhydrite, halite, gypse, sylvite,...) en sont le meilleur exemple: elles se forment par évaporation de saumures. L'importance relative de ces
roches est faible: de l'ordre du %;

- une dernière classe est consacrée aux "autres roches sédimentaires" dont l'origine n'est pas liée à l'altération: les pyroclastites, les roches liées
aux astroblèmes, les cataclastites (liées à des phénomènes de bréchification par collapse, tectonique, glissements de terrain, etc.).

L'ETUDE SEDIMENTOLOGIQUE: REMARQUES GENERALES

La phase initiale d'une étude sédimentologique est bien évidemment une campagne de terrain. Ce travail peut prendre de nombreux aspects,
depuis la récolte d'échantillons de sédiment actuel en mer jusqu'au levé d'une coupe paléozoïque en bord d'autoroute... Il est bien sûr
impossible d'envisager la démarche à suivre dans des circonstances aussi variées, mais il faut garder à l'esprit quelques règles de "bon sens
géologique":

- toujours se remémorer le principe de la hiérarchie des échelles d'observation: ne pas passer de l'échelle de l'affleurement à celle du
microscope à balayage;

- bien localiser les prises d'échantillons: à la fois dans le temps (position dans une succession lithologique) et dans l'espace (position de la
coupe, du domaine sédimentaire au sein du bassin);

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- ne pas oublier l'importance des documents d'observation: ce sont les documents de base et les seuls qui sont résolument objectifs... Ils
doivent pouvoir servir à d'autres. Il n'est pas rare que des affleurements disparaissent: les seules traces que nous en possédons alors sont les
levés des géologues des générations précédentes;

- bien faire la différence entre un document de base et un document de synthèse: outre leur caractère simplificateur (parfois simplement pour
une question d'échelle), ces documents de synthèse servent toujours à montrer quelque chose, ils sont orientés. Je donne comme exemple la
coupe de Vaucelles (Fig. II.1): à gauche le document de base, à droite la synthèse destinée à être réduite pour publication et tendant à mettre
en évidence les niveaux repères: biostromes et laminites.

On trouvera dans les notes de cartographie géologique quelques conseils quant au levé banc par banc et la réalisation d'une colonne
lithologique.

Fig. II.1: synthèse d'une colonne lithologique de terrain (calcaires). Exemple de Vaucelles, Formation de Trois-Fontaines, Givétien, bord sud
du Synclinorium de Dinant.

III. Les sédiments détritiques


INTRODUCTION

Les sédiments et roches détritiques sont les plus abondants des dépôts sédimentaires. Au sein de ces dépôts, ce sont les variétés dont les grains
sont les plus fins qui dominent: argiles/silts: 63%; sables, graviers: 22%.

Une première distinction parmi les roches détritiques est fondée sur l'état d'aggrégation des particules sédimentaires: on oppose les roches
meubles et les roches plastiques aux roches dures ou cohérentes. Dans les roches meubles, les grains détritiques sont entièrement indépendants
les uns des autres: ils forment un assemblage en équilibre mécanique dont les espaces intergranulaires (pores) représentent une fraction
importante du volume de la roche. Dans les roches plastiques, la présence de minéraux argileux en quantité importante permet une
déformation sous la contrainte. Dans les roches cohérentes, les constituants sont intimement soudés les uns aux autres et la roche garde sa
forme aussi longtemps que des contraintes ne viennent la briser. La transformation du sédiment meuble en roche indurée résulte soit de
l'introduction d'un ciment entre les grains, soit de la compaction du sédiment, soit encore de la déshydratation des constituants argileux. On
appelle diagenèse l'ensemble des processus physico-chimiques responsables de la transformation d'un sédiment meuble en une roche indurée.

Un même critère général sert à la classification des roches meubles et cohérentes: c'est la dimension des particules détritiques. On admet
généralement trois grandes classes ganulométriques:

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Diamètre des Brongniart


Grabau (1904) sédiments meubles sédiments indurés
particules (1813)
> 2 mm pséphite rudite gravier conglomérat, brèche
de 2 mm à 62 µm psammite arénite sable grès
de 62 µm à 4 µm silt de 62 µm à 4 µm siltite
<62 µm pélite lutite
< 4 µm argile < 4 µm argilite
Tableau III.1: classification des roches détritiques.

Au sein des roches pélitiques meubles, la limite de 4 µm correspond à l'apparition de la plasticité. Il faut noter que les mots pséphite, psammite
sont des termes généraux; malheureusement, les géologues de l'Ardenne appellent psammite un grès particulier du Famennien du Condroz,
caractérisé par un grain fin, un zonage net et un débitage aisé suivant des joints de stratification couverts de paillettes de micas.

L'étude des sédiments détritiques est relativement différente selon que l'on s'intéresse à des roches meubles ou consolidées. Dans le cas des
sédiments meubles, elle débute sur le terrain par une description minutieuse des affleurements, elle se poursuit par un échantillonnage qui
exige souvent des précautions spéciales (enrobage, carottage,...) Elle se termine au laboratoire par des analyses très variées dont les principales
sont les suivantes:

 analyses granulométriques;
 analyses morphoscopiques (forme des grains, état de leur surface);
 analyses minéralogiques (ex: minéraux lourds);
 analyses pétrographiques sur sédiment enrobé.

Dans le cas des roches cohérentes par contre, c'est l'analyse pétrographique en lame mince qui est l'outil privilégié et qui va permettre de
déterminer la composition minéralogique du sédiment et les relations structurelles de ses différents constituants. Cette technique est surtout
d'application pour les grès et les siltites.

SABLES, GRES ET CONGLOMERATS

LES GRES

Généralités

Les grès sont l'équivalent consolidé des sables, c-à-d. des roches dont les constituants détritiques ont une granulométrie comprise entre 2 mm
et 62 µm. L'examen montre d'une part une phase granulométrique principale, la plus grossière, qui comporte les grains du grès et d'autre part,
soit une matière intersticielle qui réunit les grains et qu'on appelle le liant, soit des fluides comme de l'eau, du pétrole, de l'air.

Ce liant peut être de nature chimique et représenter une précipitation in situ de matière minérale (silice sous forme d'opale, de calcédoine ou de
quartz, carbonate de calcium ou plus rarement hématite, goethite, gypse, anhydrite, etc.): on parlera dans ce cas du ciment de la roche. Si l'on
observe au contraire qu'une phase détritique plus fine occupe les interstices entre les grains de la phase grossière, on parlera d'une matrice
intergranulaire, représentant une infiltration mécanique de particules fines entre des grains jointifs (en trois dimensions!).

Si les grains les plus gros ne sont pas jointifs, on doit considérer que l'on a affaire à un sédiment mal classé où les particules grossières et fines
ont été déposées en même temps: on distinguera alors entre un simple empâtement des gros grains dans la matrice silteuse ou argileuse
(structure empâtée, caractéristique des "wackes", voir ci-dessous) ou une franche dispersion des gros grains au sein de la matrice (structure
dispersée).

Dans les structures jointives, on peut avoir un simple ciment de contact, conservant à la roche une porosité importante, mais le plus souvent, le
ciment comble la totalité des interstices entre les grains. Dans les "quartzites", les grains de quartz s'entourent d'une auréole d'accroissement
formée de quartz, de même orientation optique que le grain détritique. Le phénomène de croissance syntaxique peut être mis en évidence
lorsque les grains du sable primitif possédaient un mince revêtement ("coating") d'oxydes de fer.

Composition minéralogique

On peut envisager la composition minéralogique des grès sous des aspects très différents:

 selon la nature minéralogique du liant: grès à ciment siliceux, calcaire, ferrugineux, etc.; et d'après la présence de constituants
minéraux exceptionnels (grès glauconifères, micacés,...);
 on peut aussi opposer les constituants stables (quartz, débris de chert et de quartzite) aux constituants instable, c-à-d; aisément
altérables comme les feldspaths, les micas, les débris de roches en général. Cette distinction conduit à la notion de maturité des
sédiments qui se traduit non seulement par la disparition progressive des constituants instables mais également par l'élimination de la
matrice argileuse, par l'amélioration du classement granulométrique et par l'augmentation du degré d'arrondi des grains.

Passons en revue les constituants majeurs des grès:

 le quartz: c'est, en raison de sa résistance à l'altération, de loin le constituant le plus fréquent des grès. Diverses tentatives ont été
réalisées quant à la détermination de la provenance des quartz, mais en général, les résultats ont été décevants. On peut dire néanmoins
que les quartz monocristallins à extinction ondulante proviendraient de précurseurs plutoniques ou métamorphiques, alors que les
quartz à extinction uniforme proviendraient de roches volcaniques ou de grès recyclés. Les quartz provenant de grès recyclés possèdent

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souvent une relique d'un ciment syntaxique précipité durant un ancien épisode de lithification. La cathodoluminescence peut également
aider à distinguer entre quartz de provenances différentes (Götte & Richter, 2006, p. ex.);
 les feldspaths: suite à leur fragilité (clivage) et leur grande altérabilité, les feldspaths forment rarement plus de 10 à 15% des grès. Une
proportion importante de feldspaths dans un grès doit donc être considérée comme "anormale". Elle peut indiquer soit un climat où
l'altération chimique est faible (aridité, gel permanent), soit la présence de reliefs, responsables d'un transit rapide des sédiments vers le
bassin;
 les fragments lithiques: comme les roches plutoniques ont tendance à se désagréger avant leur incorporation dans le sédiment, les
fragments lithiques les plus fréquents sont des morceaux de roches volcaniques, de schistes, de cherts;
 les micas et les minéraux des argiles: les micas sont fréquents dans les grès. Leur granulométrie les range dans les fractions silteuse et
sableuse. Les argiles forment la matrice. Il est généralement difficile de déterminer si leur minéralogie est originelle (matériel
détritique) ou est le résultat de la diagenèse.

Granulométrie

Plusieurs méthodes existent suivant les classes granulométriques et le fait que l'on étudie un sédiment meuble ou consolidé. Dans ce dernier
cas, en dehors de situations exceptionnelles où il est possible de désagréger le sédiment sans l'altérer (grès à ciment calcaire soluble dans
l'HCL), il faut renoncer à faire des analyses granulométriques par tamisage; on ne peut que procéder à des comptages linéaires sous le
microscope, de la façon suivante:

 le long d'une ligne, on mesure les longueurs interceptées par tous les grains dont la longueur apparente La est égale ou supérieure à une
valeur donnée;
 la somme des longueurs interceptées, pour une même gamme de longueurs apparentes (par exemple: de 0,1 à 0,2 mm; de 0,2 à 0,3 mm,
etc.) représente la fréquence de cette catégorie.

Les résultats obtenus par cette méthode sont cependant entachés d'erreurs dues au caractère aléatoire des sections de grains et à l'accroissement
des grains par précipitation syntaxique. Au terme d'une étude comparative des granulométries apparentes et réelles de différents sédiments,
Friedman (1962) a établi un graphique permettant de comparer la distribution apparente d'un grès sous le microscope à celle qui serait
déterminée par tamisage du sable correspondant.

Actuellement, l'utilisation de méthodes automatiques basées sur l'analyse d'image permet des développements intéressants dans ce domaine
(augmentation de la précision, du nombre d'analyses,...).

Classification

La plupart des classifications modernes font intervenir la composition minéralogique du grès et sa teneur en matrice fine. La classification la
plus utilisée semble être celle proposée par Dott en 1964 (Fig. III.1). Pour combiner la composition minéralogique des grès (évaluée sur un
diagramme triangulaire quartz-feldspath-fragments lithiques) avec la teneur en matrice fine (<30 µm), Dott a choisi de diviser les grès en trois
grands groupes: les arénites, les wackes et les mudrocks.

Fig. III.1: classification des grès suivant Dott (1964). Le petit triangle à droite suggère une classification des greywackes lithiques sur base de
la nature des fragments rocheux.

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Sans nier l'intérêt de cette classification, il faut néanmoins souligner les points suivants:

 il s'agit d'une classification pétrographique; elle ne tient pas compte de toutes les données de terrain, souvent très importantes dans
l'interprétation d'un grès: structures sédimentaires, géométrie du corps sédimentaire, autres faciès associés latéralement et
verticalement;
 elle requiert normalement un comptage de points (500 points en général);
 les grains autres que le quartz, les feldspath et les fragments lithiques ne sont pas pris en compte;
 la matrice est définie comme la fraction inférieure à 30 µm. A vrai dire, une matrice représente la fraction granulométrique plus fine
comblant les interstices entre les plus gros grains d'un sédiment. Le terme implique donc une taille relative et une disposition
particulière et non pas une granulométrie particulière;
 les teneurs limites en matrice qui délimitent les domaines des arénites, des wackes et des mudrocks ont été choisies arbitrairement et
varient en conséquence d'un auteur à l'autre. Il est clair que ces valeurs arbitraires deviendraient inutiles si l'on prenait en considération
la structure d'agrégat: structure jointive pour les arénites et structure empâtée pour les wackes.

Nonobstant ces remarques, cette classification a l'avantage d'être très utilisée et elle permet de distinguer quatre grandes familles de roches,
correspondant à des origines distinctes, les arénites quartziques, les arkoses, les arénites lithiques et les wackes.

Les arénites quartziques sont constituées essentiellement de grains de quartz, chert, quartzite associés à quelques minéraux lourds résistants.
Leur couleur est claire. Ce sont des sédiments matures, c-à-d débarrassés des constituants instables, généralement bien triés et dont les grains
possèdent un bon arrondi. Ce type de sédiment s'observe depuis la base de la zone d'action des vagues de tempête jusqu'au milieu continental:
plages, dunes, barrières, rides, etc... Le matériau provient typiquement de l'érosion de zones continentales stables à relief faible.

Les arkoses ou arénites feldspathiques sont composées principalement de quartz et de feldspath. Ce sont des roches claires, souvent roses ou
rougeâtres. L'orthose et le microcline sont plus abondants que les plagioclases quand la croûte continentale représente la source principale du
sédiment; dans le cas contraire, une source volcanique doit être suspectée. On y observe aussi des micas et des fragments de roches. Les
arkoses ne sont pas des sédiments aussi matures que les arénites quartziques: elles sont généralement plus grossières et moins bien triées que
ces dernières (sauf certaines arkoses éoliennes de milieu désertique). Beaucoup d'arkoses sont des sédiments continentaux, de type cône
alluvial, "point bar" de rivière, voire plage. La présence du feldspath implique, comme dit plus haut, un climat aride (désertique ou arctique)
et/ou un relief accusé (soulèvements récents, failles actives). Certaines arkoses sont des "reliques", accumulées en tout début de transgression
marine et surmontées par des arénites quartziques.

Les arénites lithiques sont constituées de fragments de quartz et de roches diverses. Le mélange de quartz et de débris divers leur donne un
aspect "poivre et sel". Les feldspath sont généralement peu abondants, les micas sont communs. Ces sédiments s'observent aussi bien dans des
cônes alluviaux que des turbidites. Il s'agit de dépôts immatures, à proximité de reliefs vigoureux.

Les wackes (graywackes): ce sont des roches généralement sombres, constituées d'une matrice et de grains de quartz, de chert, de calcaire, de
roches volcaniques, de schiste, de feldspath (souvent anguleux). Il s'agit de sédiments immatures, mis en place par des courants de turbidité.
On y retrouve en effet les granoclassements et les autres structures sédimentaires produites par ce type d'agent de transport et de dépôt. Il faut
faire attention au caractère primaire de la matrice et veiller, pour l'interprétation, à ce qu'il ne s'agisse pas plutôt d'une arkose dont les grains de
feldspath ont été complètement altérés.

Pour les sédiments "mixtes", comprenant à la fois des grains de quartz et de carbonate ou de la boue calcaire et siliciclastique, la classification
de Mount (1985) est recommandée.

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Exemples de roches détrtiques en lame mince. A: quartzophyllade; noter la réfraction de la schistosité (S1) et la stratification (S0), soulignée
par un lit plus grossier; B: schiste à chlorite (flèche); C: arénite quartzique à structure quartzitique; D: quartzwacke.

LES SABLES

Ce qui a été dit au sujet de la composition minéralogique, de la classification et de l'interprétation environnementale des grès est évidemment
valable pour les sables.

En ce qui concerne les analyses granulométriques, on consultera le cours de "processus sédimentaires".

CONGLOMERATS ET BRECHES

Les conglomérats (appelés aussi poudingues) sont des roches cohérentes constituées de galets arrondis à subanguleux d'un diamètre supérieur
à 2 mm et d'un liant. Le terme brèche s'applique non seulement aux brèches sédimentaires constituées d'accumulations d'éléments anguleux,
mais aussi aux roches broyées le long des accidents tectoniques (brèche de faille ou brèche cataclastique) et aux projections volcaniques
grossières recimentées (brèches pyroclastiques).

Les conglomérats et brèches ne représentent qu'un à deux % des roches détritiques et sont généralement d'extension limitée (dans le temps et
l'espace). La corrélation stratigraphique de ces unités est difficile, car elles manquent en général à la fois de macro- et de microfossiles.

Composition

Suite à la grande taille des constituants (plus grande que la taille moyenne des cristaux de la plupart des roches), ce sont les fragments
lithiques qui dominent. Comme dans le cas des grès, on peut classer ces fragments en fonction de leur résistance décroissante à l'altération:
quartzite, quartz filonien, rhyolite, roches plutoniques et métamorphiques, calcaire, schiste. La présence de constituants instables indique un
faible transport/altération.

Texture

Les études texturales sont effectuées directement sur le terrain (pour la granulométrie, par exemple: même méthode que pour les grès, avec
une ligne matérialisée par une ficelle).

Le classement est généralement moins bon que dans le cas des grès. De plus, beaucoup de conglomérats présentent une distribution
granulométrique bi- ou polymodale. C'est le cas par exemple des conglomérats d'origine fluviatile qui ont un mode pour la matrice sableuse et
un mode pour la fraction grossière. Ces deux modes correspondent à deux types de transport différents: traction pour les galets et suspension
pour les sables. Les conglomérats très riches en matrice sont encore plus mal classés: ceci reflète leur mise en place par des agents de transport
à faible pouvoir de classement tels que glace, courants de turbidité, écoulements en masse.

La forme: d'une manière générale, la forme des débris reflète plus la nature des roches que le type d'agent de transport (granites, grès,...
donnent des galets grossièrement équidimensionnels; schiste, gneiss, des galets allongés). Deux exceptions: les galets striés transportés par les
glaciers et les fameux "dreikanter" façonnés par le vent du désert.

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L'arrondi: le degré d'arrondi dépend évidemment de la nature du matériau de départ, du type d'agent de transport et de la durée du transport.
On a montré que des fragments de calcaire sont bien arrondis après quelques dizaines de km de transport fluviatile. Même des roches aussi
résistantes que des quartzites sont bien arrondies après un transport d'une centaine de km.

La morphologie de surface: contrairement aux sédiments plus fins, où l'étude de la surface des grains exige le MEB, le microrelief des galets
est aisément observable. Il inclut les striations (glaciers), les marques d'impact (croissants), les impressions (au cours de la compaction,
diagenèse), le poli (éolien).

La fabrique ou organisation tridimensionnelle des éléments: les éléments de certains conglomérats possèdent une orientation d'ensemble
spécifique: on l'appelle "imbrication". Les conglomérats d'origine fluviatile, glaciaire, marine, montrent généralement ce type d'imbrication
(souvent parallèle, rarement perpendiculaire à la direction de transport), contrairement aux conglomérats et brèches issus d'écoulements
gravitaires.

Classification

Les conglomérats (et brèches) peuvent être qualifiés d'après la dimension de leurs constituants (pisaire, ovaire, céphalaire, etc.), d'après la
diversité lithologique plus ou moins grande des galets (conglomérats polymictiques ou polygènes d'une part; conglomérats oligomictiques ou
monogènes d'autre part), selon la provenance locale ou lointaine des cailloux (conglomérats intraformationnels ou extraformationnels) ou
encore suivant la nature du liant ou sa proportion (orthoconglomérats: moins de 15% de matrice, structure jointive; paraconglomérats, plus de
15%, structure empâtée à dispersée).

Prothero & Schwab (1996) proposent une classification dichotomique d'application aisée sur le terrain (Fig. III.2). Ce schéma distingue
d'abord (1) les conglomérats et brèches intra- et extraformationnels, sur base de la provenance des constituants. Il faut noter que dans le cas
d'un conglomérat intraformationnel, c-à-d formé pratiquement sur place, la matrice et les cailloux ont pratiquement la même lithologie.
Exemples de brèches ou conglomérats intraformationnels: conglomérats littoraux à éléments calcaires issus du remaniement de copeaux de
dessiccation; conglomérats à éléments argileux formés par des augmentations brutales de la vitesse de courants dans des rivières ou des
canyons sous-marins.

On distingue ensuite (2), sur base de la teneur en matrice (valeur-pivot: 15%), les ortho- des paraconglomérats. Les premiers sont mis en place
par des écoulements d'eau qui opèrent un classement des débris. Les galets sont déposés en période d'écoulement rapide, tandis que la matrice
fine est déposée lors de phases de ralentissement de l'agent de transport et elle s'infiltre entre les cailloux (exemples: rivières, plages). Les
paraconglomérats par contre, sont généralement déposés par la glace ou les glissements en masse.

L'étape suivante (3) consiste à distinguer au sein des conglomérats (extraformationnels), les conglomérats polymictiques des conglomérats
oligomictiques. Ces derniers sont formés presqu'exclusivement de quelques variétés de roches très résistantes: quartz filonien, quartzite, chert.
Dans les conglomérats polymictiques, on observe des éléments de roches moins stables à l'altération comme des basaltes, des schistes et des
calcaires. Comme dans le cas des grès, ceci implique un relief vigoureux et/ou une altération chimique faible.

Les paraconglomérats sont subdivisés (4) sur la base de la nature et de la fabrique de leur matrice. Ainsi, on observe des paraconglomérats à
matrice argileuse ou argilo-silteuse laminaire dans lesquels les galets, blocs, déforment les laminations proches. Ces blocs sont des
"dropstones", c-à-d. soit des éléments amenés par des icebergs ou des débris flottants qui tombent ensuite (fonte, pourrissement du support)
sur les sédiments fins du fond marin ou lacustre, soit encore des bombes volcaniques. Les paraconglomérats à matrice non laminaire sont soit
des tillites (d'origine glaciaire donc associés à des galets striés, dépôts varvaires, etc.), soit des tilloïdites (formées par des glissements en
masse).

Fig. III.2: classification des conglomérats et brèches d'après Prothero & Schwab (1996).

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A: orthoconglomérat oligomictique; B: paraconglomérat à matrice non laminaire: tillite.

LES SEDIMENTS ARGILEUX ET SILTEUX

Ces sédiments représentent entre 50% et 80% de la colonne stratigraphique. Leur étude pétrographique et leur classification est moins avancée
que celle des grès et des calcaires, en raison de leur granulométrie très fine, en partie sous le pouvoir de résolution du microscope. Leur
importance économique est cependant grande, avec des applications industrielles multiples comme la fabrication des ciments, des briques, des
céramiques, etc.

COMPOSITION

La composition des roches silto-argileuses est relativement constante: le shale (voir ci-dessous) moyen comprendrait 30% de quartz, 10% de
feldspath et 50% de minéraux argileux (ou de micas), avec les 10% restants constitués de carbonates ou d'oxydes de fer.

Les minéraux argileux sont le produit de l'altération de roches sédimentaires, métamorphiques et ignées. Ces dernières ne contiennent pas de
minéraux argileux préexistants, mais un de leurs constituants, les feldspaths, sont aisément dégradables en argiles.

La nature des minéraux argileux (diffraction X) des roches détritiques a souvent été utilisée comme indicateur de paléoenvironnement ou de
diagenèse (voir ci-dessous).

CLASSIFICATION

Ces roches appartiennent au grand groupe des "mudrocks" (littéralement "roches de boue") des géologues anglais. Ce groupe comprend tous
les sédiments siliciclastiques constitués majoritairement d'éléments de la taille des silts (1/16 à 1/256 mm ou 0,062 à 0,004 mm) et des argiles
(< 1/256 mm ou 0,004 mm).

Le tableau suivant est une proposition de classification, basée sur les commentaires de Lundegard & Samuels (1980):

sédiments faible métamorph. plus


indurés
meubles métamorphisme élevé
silt siltite quartzite
2/3 silt

NON LAMINAIRE: mudstone, siltite


argileuse? argillite (pas de
CLIVAGE: slate, clivage)
mud schiste silto-argileux CLIVAGE: schist,
LAMINAIRE et FISSILE (// à S0): ardoise, phyllade
mudshale, siltite argileuse?

1/3 silt

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NON LAMINAIRE: claystone, argillite (pas de


argilite? CLIVAGE: slate, schiste clivage)
clay (argile) CLIVAGE: schist,
LAMINAIRE et FISSILE (// à S0): argileux
clayshale ardoise, phyllade

Tableau III.2: classification des "mudrocks" (les termes français sont en italique)

Ce tableau montre que le vocabulaire français est moins précis que le vocabulaire anglo-saxon: nous manquons de mots pour désigner les
shales et les mudstones (notons que ce terme anglais peut amener la confusion avec les mudstones calcaires).

Les shales sont donc des argiles compactées, plus ou moins riches en silts, présentant une fissilité parallèlement à la stratification. En
Belgique, on utilise souvent sur le terrain, le terme "schiste" (="slate") qui doit s'appliquer à une roche indurée de granulométrie fine, affectée
d'une schistosité (c-à-d d'un clivage dû à une dissolution et une simple réorientation des minéraux sous l'effet des pressions tectoniques ). Les
termes ardoise ou phyllade par contre, impliquent un métamorphisme: la plus grande partie des minéraux ont recristallisé, des espèces
nouvelles sont apparues. Les minéraux ainsi développés sont allongés dans des plans perpendiculaires à la pression tectonique ou lithostatique.
Parallèlement à ces plans, la roche se débite en fines plaquettes luisantes, d'aspect finement cristallin .

L'analyse granulométrique proprement dite ne peut être pratiquée que sur des sédiments meubles. La détermination des différentes classes est
basée sur des techniques appliquant la loi de Stokes.

A la classification granulométrique des sédiments s'ajoutent d'autres caractéristiques, celles-ci résultant soit d'analyses microscopiques, soit
d'observations macroscopiques:

- la coloration, en cassure fraîche pour les roches indurées (utiliser éventuellement une échelle de teintes). Il s'agit d'une caractéristique
importante qui renseigne sur l'état d'oxydation du fer (Fe3+ rouge; Fe2+ vert) et sur la présence de matière organique (schistes noirs);

- la présence de bioturbations, de laminations;

- la minéralogie de la fraction silteuse (quartzitique, feldspathique, micacée, chloritique).

LES ENVIRONNEMENTS DE DEPOT DES ROCHES DETRITIQUES

Il ne s'agit ici que d'une introduction. Des traités entiers sont consacrés à l'identification des milieux de dépôt des sédiments détritiques.

Cette démarche interprétative est d'une certaine manière plus délicate encore que dans le cas des environnements carbonatés car manquent
souvent ici les informations importantes livrées par l'écologie des communautés organiques. Dans de nombreux cas, seules des informations
issues de l'interprétation des figures sédimentaires, de la granulométrie, de la géométrie des corps sédimentaires seront disponibles. Une
grande prudence s'impose donc: des sédiments presque analogues, issus d'environnements différents ne sont pas rares. Tout est dans le
"presque"...

ARGILES ET SILTS

Sédiments résiduels

Ces dépôts continentaux sont rares dans l'histoire géologique, car ils sont en général remaniés au cours des épisodes transgressifs.

On en connaît cependant un certain nombre d'exemples, dont l'identification est importante, car ce sont des marqueurs d'émersion relativement
prolongée. Il s'agit, en milieu siliciclastique, des silcretes. Les structures déterminantes de ce type de formation (rhizocrétions, nodules,
marmorisation, etc.) sont les mêmes que celles des calcretes (voir cours de processus sédimentaires). Un bon exemple de ces sols sont les
niveaux à radicelles au mur des veines de charbon dans le Houiller. Ces niveaux sont généralement assez massifs et contiennent des radicelles
et des nodules de sidérite. Certaines variétés plus sableuses peuvent être lessivées et fortement enrichies en silice, donnant naissance à des
quartzites très durs, appelés "ganister" en Wallonie.

La nature minéralogique des argiles des sols est fréquemment utilisée comme indicateur paléoclimatique.

Sédiments détritiques

La grande majorité des siltites et argilites provient de l'érosion continentale. Ces matériaux fins sont transportés en suspension par les rivières
et déposés dans des environnements calmes (plaines d'inondation, lacs, deltas, océan).

Le vent est aussi un agent de transport important, remaniant des matériaux issus d'environnements désertiques (déserts chauds ou froids) et les
déposant en milieu continental sous la forme de loess ou dans les océans. Le transport par la glace est à la base de la formation des tillites.

(1) En milieu continental, on distingue assez facilement les boues de plaine d'inondation fluviale des boues lacustres:

- les boues des plaines alluviales sont associées à des corps sableux (chenaux) et montrent souvent des indices de pédogenèse (nodules,
racines, etc.);

- il existe un grand nombre de types de boues lacustres, en fonction de la géochimie des lacs, du climat, de la nature des apports, de la

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productivité organique. Une caractéristique commune est néanmoins la présence d'une lamination millimétrique. Ces sédiments laminaires
sont appelés varves. La rythmicité peut être due à des proliférations planctoniques ou des apports saisonniers de sédiments. Comme dans le
cas des bassins océaniques, des black shales peuvent se former dans des lacs dont les eaux profondes sont déficitaires en oxygène.

(2) En environnement marin, les sédiments fins se déposent dans des zones de bathymétrie très différente: depuis la côte, en milieu protégé ou
le long de "muddy coastlines" jusqu'à l'océan profond.

- Les "muddy coastlines" sont adjacentes à des estuaires de grands fleuves, amenant d'importantes quantités de matériaux fins. Un grand
nombre de sous-environnements sont possibles, suivant la morphologie, le climat, etc: par exemple: "tidal flats", mangroves,... Des boues
inter- à supratidales sont également déposées dans des fonds de baies (exemple: baie du Mont St-Michel) ou dans des lagunes, protégées des
vagues par une barrière (exemples anciens: Marnes de Strassen, Formation d'Evieux).

Critères d'identification des boues côtières


- présence de chenaux de marée remaniant éventuellement des sédiments plus grossiers;
- lentilles sableuses avec stratification entrecroisée bidirectionnelle ("herringbone"), formées par
les courants de marée;
- sédiments mixtes sablo-argileux avec structures en "flaser bedding";
- structures liées à l'émersion: polygones de dessiccation, galets mous, etc;
- flore et faune caractéristiques (voire adaptées à des milieux saumâtres ou hypersalins);
- horizons pédogénétiques, traces de racines.

- Au-delà des sables côtiers, en direction de la pleine mer et à partir d'une certaine profondeur (sous la zone d'action des vagues "normales"),
on trouve une vaste aire occupée par des boues détritiques ("nearshore mud belt"). La position de cette ceinture dépend bien sûr du caractère
plus ou moins énergique de la houle. Pour des côtes nettement exposées, la ceinture boueuse peut être fortement déplacée vers le large. On
peut utiliser les critères d'identification suivants:

Critères d'identification des boues de plate-forme (nearshore mud belt)


- boues généralement bioturbées, riches en épifaune et endofaune (avec un caractère normal, c-à-
d. non restreint);
- organismes pélagiques fréquents;
- des passées plus grossières traduisent des augmentations temporaires de l'agitation: ce sont les
tempestites (Figs. III.8A et B). Selon leur éloignement relatif du rivage, leur fréquence et leur
épaisseur diminue. Un très bel exemple de boues à tempestites est la Formation de la Famenne et
la Formation d'Esneux. De la base vers le sommet de cette grande séquence, l'évolution des
tempestites souligne une progradation côtière;
- ces boues passent souvent verticalement, par progradation, à des corps sableux (barrière, plage).

- Les sédiments déposés en eaux plus profondes, en milieu océanique, sont appelées boues hémipélagiques. Ce type de dépôt couvre une part
importante de la plate-forme externe, des talus et des bassins océaniques. Dans l'océan actuel, des eaux froides, denses et bien oxygénées
plongent au niveau des régions polaires et diffusent vers les latitudes moins élevées: ces courants sont responsables d'une bonne oxygénation
des fonds marins. Les boues hémipélagiques possèdent généralement les caractères suivants:

Critères d'identification des boues hémipélagiques


- les seuls organismes présents sont pélagiques: diatomées, foraminifères planctoniques,
coccolithes (Mésozoïque-Actuel), radiolaires (Paléozoïque-Actuel), céphalopodes (Paléozoïque
supérieur-Mésozoïque), graptolites (Paléozoïque inférieur);
- on y observe des turbidites et des écoulements de débris ("débris flows") (Fig. III.10). Le
Cambro-Ordovicien belge est riche en formations turbiditiques: citons en exemple les Formations
de Tubize (Massif de Brabant) et de Jalhay (Massif de Stavelot);
- des encroûtements de fer et de manganèses sont parfois présents;
- on peut observer des remaniements, des érosions, des graviers ("lag-deposits") dûs à des
courants de fond;

Les argiles sont un constituant important des boues hémipélagiques (voir Fig. V.1). Les espèces minérales les plus abondantes sont l'illite, la
smectite et la kaolinite; la chlorite et certains interstratifiés sont également assez répandus. D'une manière générale, ces minéraux sont issus
des terres émergées et reflètent de manière assez précise la nature des argiles compris dans les formations continentales superficielles. De fait,
si l'on examine la Fig. III.3, on constate:

 une augmentation de la kaolinite dans les sédiments proches des zones équatoriales, au débouché des grands fleuves; en effet, la
kaolinite est riche en Al et ne contient pas de cations solubles comme K, Ca, Na. Ceci indique que ce minéral se forme dans des
conditions d'altération particulièrement intenses, où l'Al se concentre après exportation des autres éléments. Ces conditions
correspondent à des sols acides et bien draînés en milieu tropical;
 une prépondérance de la chlorite dans les zones froides où l'altération physique est prédominante (et où affleurent des roches Fe-Mg,
évidemment);
 beaucoup d'illite là où l'apport terrigène est important: latitudes élevées, embouchures de grands fleuves, zones à fort apport éolien
comme le Pacifique N (vents d'ouest); l'illite est le principal produit d'altération des feldspaths et des micas en climat tempéré; elle est

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abondante dans les sols neutres ou légèrement alcalins;


 une dominance de la smectite (contenant du Fe et du Mg) à proximité de zones relativement arides où un faible drainage autorise la
rétention de Mg, Ca, Na; on l'observe communément dans les produits d'altération des roches ferromagnésiennes; on la trouve aussi le
long des rides médio-océaniques (altération des basaltes);
 la présence de palygorskite dans des sédiments issus du remaniement de caliches ou d'évaporites.

Ces observations sont valables pour l'océan actuel: à partir d'un certain degré d'enfouissement, le cortège argileux évolue par diagenèse vers un
assemblage illite-chlorite. L'utilisation des argiles comme indicateur climatique est donc à manier avec précaution.

- Dans certains bassins isolés, où la circulation des eaux est trop faible pour renouveler l'oxygène du fond, la matière organique s'accumule
dans le sédiment et donne naissance à des "black shales". Certains de ces dépôts peuvent être riches en hydrocarbures. Ces black shales sont
dépourvus d'endofaune et on n'y observe que des fossiles d'organismes pélagiques. Ils sont souvent riches en Cu, Pb, Zn, Mo, V, U et As. Ces
éléments sont adsorbés sur les argiles et la matière organique. Une tendance anoxique peut résulter d'une diminution de la circulation des eaux
mais aussi d'une augmentation de l'apport en matière organique (accroissement de productivité des eaux de surface). Des exemples actuels
sont les fjords, la Mer Noire, certaines fosses océaniques. Dans l'Ancien et proche de nous, on peut citer les schistes noirs de la Formation de
La Gleize (Cambrien du Massif de Stavelot) et de la Formation de Matagne (Frasnien du bord sud du Synclinorium de Dinant)..

Fig. III.3: répartition des argiles dans l'océan actuel.

Sédiments d'origine volcanique

Les sédiments fins générés par l'altération des roches volcaniques sont appelés bentonites si la montmorillonite est le constituant principal et
tonstein si la kaolinite est dominante. Des zéolites peuvent aussi se former. La reconnaissance de ces sédiments est basée sur la présence de
pseudomorphes de verre volcanique (aiguilles, bulles,...), de cristaux euhédraux (zircon, par exemple) et sur la composition géochimique.

SABLES ET GRAVIERS

Les sédiments détritiques grossiers se déposent dans une grande variété d'environnements, depuis les dunes éoliennes jusqu'aux fonds
océaniques (dépôts gravitaires). Ils sont cependant particulièrement caractéristiques des environnements côtiers, ou l'hydrodynamisme permet
leur transport et leur dépôt. Passons ces divers milieux en revue.

Dépôts de cônes d'éboulis

Avant leur mobilisation par le vent, le ruissellement ou les torrents, les fragments de roche détachés de leur substrat par l'érosion subissent un
transport sous la forme d'avalanche de débris. Ces cônes d'éboulis se mettent en place au pied de reliefs jeunes et sont caractérisés par un
classement et une maturité très faibles.

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A: avalanche de débris au pied d'un relief; Piau Engaly, France. B: détail montrant la faible maturité des dépôts: grande variété lithologique,
mauvais classement, faible émoussé.

Dépôts éoliens

Les dunes sableuses sont évidemment de bons indicateurs de climat aride: la plupart des déserts sont confinés entre 20° et 30° de latitude
(ceinture des hautes pressions) ou derrière des chaînes montagneuses qui jouent un rôle d'écran pour les perturbations (Andes, par exemple).

Comme l'air a une densité un millier de fois inférieure à l'eau, sa capacité de transport est beaucoup plus faible et les matériaux grossiers sont
laissés sur place, formant un "pavement". Le vent possède par contre un bon pouvoir de classement et le transport s'effectue essentiellement
par saltation et collisions intergranulaires des grains sableux, avec le matériau fin exporté plus loin. Ceci explique l'homogénéité
granulométrique des dépôts éoliens. Contrairement à leurs équivalents marins, les courants aériens n'ont pas la limitation imposée par la
surface de la mer et les dunes éoliennes ne sont limitées en hauteur que par la force des vents et l'apport en sable. On peut considérer les
critères suivants comme diagnostiques de dunes éoliennes:

Elements diagnostiques des dépôts éoliens


- géométrie: les champs dunaires peuvent couvrir des centaines de km2 et former d'épaisses unités
sableuses de grande continuité latérale. La pente des stratifications entrecroisées éoliennes peut
atteindre 35° (en moyenne 25°-30°) et les unités individuelles ("cross-bed sets") peuvent avoir
une épaisseur de l'ordre de 30 m;
- il n'y a pas de séquence type comme c'est le cas en milieu marin (progradation, par exemple);
- faciès associés: graviers de déflation, fentes de dessiccation (lac temporaire, oued);
- pétrographie: il s'agit de sables quartzeux très bien classés, avec un bon arrondi. Au MEB,
encroûtements d'oxyde de fer, aspect "grêlé";
- fossiles: rares, hormis quelques terriers, des traces de racines et des empreintes de pattes.

En conclusion, il faut remarquer que comme pour tous les dépôts continentaux, les dépôts éoliens ont peu de chance d'être préservés dans
l'histoire géologique (sauf dans des bassins à subsidence rapide).

Dunes éoliennes fossiles, Pléistocène supérieur, Hergla (Tunisie); le schéma à droite, souligne le pendage élevé des stratifications.

Dépôts fluviatiles

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En contexte fluviatile, les premiers corps sédimentaires à se former sont les cônes alluviaux ("alluvial fans"). Ces cônes se développent
(principalement en milieu désertique ou montagnard) au débouché d'un canyon dans une vallée, quand le courant fluviatile ralentit
brutalement. Au fur et à mesure de sa décélération, le courant perd sa capacité de transport et dépose sa charge sédimentaire.

Ce type de système fluviatile, avec une charge abondante forme un réseau anastomosé ("braided stream", "réseau en tresse") (Fig. III.4). Outre
le transport par les eaux fluviales, les sédiments des cônes alluviaux sont également mobilisés par des écoulements en masse (debris flows).
Dans les régions désertiques, ces écoulements en masse ont souvent un caractère catastrophique ("flash flood") et peuvent transporter des
blocs de plusieurs tonnes: les sédiments qui en résultent sont extrêmement mal classés et non stratifiés.

Une coupe dans un cône alluvial donnerait une séquence typique d'alternances de debris flows mal classés et de conglomérats
(="fanglomérats") et sables fluviatiles. On y observe une granocroissance générale vers le sommet du corps sédimentaire, due à l'avancée du
cône avec les faciès distaux relativement fins surmontés par des faciès proximaux plus grossiers.

Si le cône alluvial débouche directement en milieu marin, on a ce que l'on appelle un "fan delta" où les matériaux grossiers d'origine alluviale
peuvent être mêlés à des sédiments marins plus fins. Il faut noter que cônes alluviaux et fan deltas sont caractéristiques de zones
tectoniquement actives, avec un rajeunissement permanent du relief. Quelques éléments sont diagnostiques:

Eléments diagnostiques des cônes alluviaux


- contexte tectonique actif, proximité de reliefs jeunes;
- géométrie: en forme de cône; la puissance peut être énorme si la subsidence est continue
(plusieurs km);
- faciès: conglomérats fluviatiles, grès à stratification entrecroisée, debris flows non classés.
Matériaux anguleux, immatures. Lignes de courant divergentes à partir du sommet du cône. Pas
de fossiles.

Dans la partie supérieure de leur cours, beaucoup de systèmes fluviatiles possèdent un réseau anastomosé (Fig. III.4). Leur charge
sédimentaire est importante et grossière, leur débit est extrêmement variable. Toutes ces caractéristiques sont à l'origine de la rapide migration
des chenaux.

Fig. III.4: schéma d'un système fluviatile à chenaux anastomosés et exemple d'une séquence de comblement.

Eléments diagnostiques des systèmes fluviatiles anastomosés


- comme pour les cônes alluviaux, relief jeune. Les réseaux anastomosés sont localisés dans la
partie amont du système fluviatile;
- faciès: corps sablo-graveleux allongés, relativement rectilignes, passant latéralement aux dépôts
plus fins de la plaine alluviale. Au sein de ce corps, les faciès sableux et sablo-graveleux sont
dominants. Contrairement aux systèmes fluviatiles à méandres (cf. ci-dessous), silts et boues sont
rares. Les stratifications entrecroisées en festons et en auges ("trough cross stratification") et les
stratifications planes (vitesse de courant maximale) sont communes. Peu ou pas de fossiles,
hormis des traces de plantes.
- séquences relativement courtes et amalgamées: c'est une conséquence du caractère éphémère
des chenaux; la séquence complète est la suivante (Fig. III.4): gravier (="lag deposit"), chenal
(stratification en auges), éventuellement bancs sableux (stratification inclinée), sables boueux

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avec traces de racines (séquence de type "fining upward").

Grès et conglomérat dans un chenal fluviatile. Frankenbourg, Permien.

Dans leur partie inférieure, les systèmes fluviatiles possèdent un profil à gradient faible et la plupart des matériaux grossiers ont été déjà
déposés. Leur tracé devient plus sinueux et l'on y observe des méandres. L'érosion ne se manifeste plus par la formation de nouveaux chenaux
(comme dans le cas des réseaux anastomosés), mais plutôt par l'élargissement des chenaux existants. Mais revenons un peu plus en détail sur
les "chenaux".

Les chenaux sont des structures érosives, concaves vers le haut, pouvant atteindre des dimensions latérales importantes (de l'ordre de la
centaine de m). Leur remplissage sédimentaire, d'épaisseur métrique à décamétrique, est souvent plus grossier que les sédiments qu'ils
entaillent. L'érosion se produit le long de la rive concave. Le comblement se fait par accrétion latérale sur la rive convexe (Fig. III.5) avec
production de stratifications obliques à grande échelle ("point bars" ou "lobes de méandre"), ou encore par couches horizontales ou concaves
vers le haut (festons, auges). Dans le sédiment remplissant le chenal, différents types de structures sédimentaires peuvent exister: rides de
courant, lamination horizontale, groove marks, slumps, figures de charge. La base érosive des chenaux est localement surmontée d'un dépôt
grossier de galets mous ou de coquilles ("chanel lag"). Les chenaux sont présents dans de nombreux types d'environnements : alluvial, mais
aussi littoral.

Fig. III.5: séquence classique de remplissage d'un chenal par progradation latérale d'un lobe de méandre (temps t1, t2, t3 et t4).

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"Point bar" ou "lobe de méandre" dans un coude de la Chavratte (Lorraine belge).

Voici quelques éléments caractéristiques des systèmes fluviatiles à méandres:

Eléments diagnostiques des systèmes fluviatiles à méandres


- les rivières à méandres sont localisées dans la partie basse des cratons. Elles sont entourées de
vastes plaines d'inondation à sédiments laminaires fins;
- faciès: proches des systèmes anastomosés avec cependant une proportion beaucoup plus
importante de sédiments fin, des séquences mieux développées et surtout des lobes de méandre
(Figs. III.5, 6). Des lacs (méandres abandonnées) sont fréquent de même que tout le cortège des
phénomènes de pédogenèse dans la plaine alluviale.

Fig. III.6: schéma d'un système fluviatile à méandres et exemple d'une séquence de comblement. Sable en beige, argile et silt en vert, tourbe
en gris et paléosols en rouge.

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Fig. III.7: photo et schéma interprétatif d'une coupe dans un système fluviatile triassique (L'Escalette, Larzac, France). (1) rides et mégarides
sableuses en milieu deltaïque; (2) remplissage argileux d'un chenal après recoupement et abandon du méandre; alternance de chenaux à
remplissage sableux (3) et d'argiles bordeaux de plaine d'inondation (4).

Dépôts côtiers

Généralement, la transition entre environnement fluviatile et environnement côtier est assez graduelle. Un certain nombre d'environnements
peuvent être considérés comme mixtes, reflétant des influences à la fois marines et continentales: c'est le cas des deltas, des lagunes, des "tidal
flats" et des mangroves.

En fonction du rapport apport fuviatile-érosion marine, on peut distinguer plusieurs types d'embouchures, différents morphologiquement (cf.
Strahler & Strahler, 1983 par exemple) (Fig. III.8).

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Fig. III.8: différents types d'embouchures. A: delta digité avec développement de chenaux en éventail bordés de levées sableuses (ls); lors de
la rupture de ces levées se forment des dépôts de "crevasse splay" (cs); aux extrémités des chenaux se déposent des barres d'embouchure (be),
suite à la décélération des courants fluviatiles; ce type de delta se forme lorsque les apports fluviatiles sont dominants. B: estuaire avec
barres sableuses linéaires (bs), formées par les courants tidaux; ce type d'embouchure se développe lorsque les courants de marée sont
dominants.C: estuaire avec flèche sableuse (f) et cordons sableux en bordure de plage; ce type d'embouchure se forme lorsque les effets de la
houle (h) sont dominants et génèrent une dérive littorale.

Les deltas se développent lorsque les rivières amènent au milieu marin plus de sédiment que ce que l'érosion marine peut mobiliser (Fig. III.8
A).

Dans une première approche, on peut subdiviser un delta en plusieurs sous-environnements: la plaine deltaïque avec son système fluviatile et
son complexe littoral; le front deltaïque fortement incliné; et le pro-delta qui fait la transition avec la plate-forme marine. Comme les lobes de
méandre, les deltas progradent latéralement et les lignes-temps sont parallèles à la surface du front deltaïque (Fig. III.9).

Comme l'eau douce possède une densité moindre que l'eau salée, le courant fluviatile se propage au-dessus de l'eau de mer, parfois à grande
distance du delta (plusieurs centaines de km dans le cas de l'Amazone...). Ce courant ralentit progressivement et dépose sa charge sédimentaire
sous la forme de levées latérales ou de barres d'embouchure perpendiculaires au courant ("mouth bars"). En conséquence, beaucoup de deltas
apparaissent comme une formation silto-argileuse (décantation de boues dans les lagunes, la plaine deltaïque, le pro-delta) dans lequel sont
dispersés des corps sableux discontinus: chenaux, barres d'embouchure, dunes, etc.

Eléments diagnostiques des deltas


- les deltas sont situés en contexte de marge passive; ils sont associés à des dépôts fluviatiles et à
des sédiments littoraux. Grossièrement triangulaires en plan et en forme de coin en coupe, leur
superficie peut atteindre des miliers de km2 pour une puissance parfois pluri-kilométrique;
- faciès: contrairement aux séquences de comblement fluviatile qui sont du type fining-upward,
les séquences deltaïques sont de type coarsening-upward, avec le passage de boues pro-deltaïques
à des sables de barres ou de chenaux et ensuite éventuellement de type fining upward en passant à
des boues ou des sédiments riche en matière organique (charbon) de la plaine deltaïque
(Fig. III.9). Les sables montrent des stratifications entrecroisées. Les levées et la plaine deltaïque
sont constituées de boues laminaires à bioturbées. Les boues pro-deltaïques contiennent des
niveaux sableux occasionnels correspondant à des crues fluviales. Slumps et déformations syn-
sédimentaires sont fréquents suite à l'inclinaison du front deltaïque;
- la matière organique végétale est très abondante dans la plaine deltaïque (marais, mangrove).
Des organismes de milieux palustre peuvent y pulluler. La faune des boues pro-deltaïques montre
un caractère marin plus affirmé.

Fig. III.9: A: coupe simplifiée dans un delta. B: séquence sédimentaire produite par la progradation d'un delta; l'épaisseur d'une telle

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séquence dépend de l'apport sédimentaire, de la subsidence, des variations eustatiques. La partie supérieure de la séquence (fining upward)
peut être très variable en fonction de la localisation des chenaux.

Le long des côtes où l'apport sédimentaire des rivières est faible ne se forment pas de deltas. La sédimentation est dominée par l'influence des
marées et/ou des courants côtiers (Fig. III.8 B, C).

Dans la partie supérieure du littoral (zone supratidale), se forment des marais maritimes ("schorre" ou "herbus"), inondés lors des grandes
marées. Ces marais maritimes, couverts d'une végétation herbacée, sont des environnements exigeants où ne survivent que des organismes
tolérants à de grandes variations de salinité (exemples: Verdronken Land van Saeftinge, Zwyn, Baie de Somme,...). Le sédiment est riche en
matière organique (boues réductrices) et souvent intensément bioturbé.

Marais maritimes. A: vue générale du marais, recoupé par un chenal à marée basse (Ile Grande, Bretagne); B: détail d'un chenal à marée
haute (Paimpol, Bretagne).

Alternance de dépôts argilo-sableux (gris) et de tourbe (noir) dans un sondage recoupant l'Holocène de la plaine maritime belge. Il s'agit de
dépôts de marais maritime.

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Colonisation progressive de l'estran (zone de balancement des marées) par une végétation halophile; il s'agit ici de salicornes. La présence
de cette végétation va favoriser l'ensablement en fixant les sédiments et la zone des herbus (supratidal) va s'étendre. Baie de Somme, France.

La zone de balancement des marées (ou zone intertidale ou estran) peut voir le développement de "tidal flats" ("slikke"), zones à très faible
relief, recoupées par des chenaux divaguant. Les marées impriment un cachet unique à ce domaine: un cycle -courant de flux-courant de
jusant-exhondaison- répété tous les jours. Ce cycle produit ce que l'on appelle le "tidal bedding", à savoir la succession d'une lamine sableuse
pour le flot, une lamine de boue pour l'étal de marée haute, une lamine sableuse pour le jusant et à nouveau une lamine de boue pour la marée
basse. Souvant, les lamines sableuses montrent des stratifications inclinées en sens opposé, matérialisant les deux directions de courant
("herringbone"). Une autre caractéristique des tidal flats est le "flaser bedding" et le "lenticular bedding": ces structures se forment par dépôt
de boue dans les espaces entre les rides de courant. Si les courants de flux et de reflux ne sont pas parallèles, des rides d'interférence peuvent
se former; si les vitesses des deux courants sont différentes, deux systèmes de rides de longueur d'onde différentes se développent.

Tidal bedding, Holocène, plaîne côtière belge.

Eléments diagnostiques des schorres et slikkes


- côtes à marées de forte amplitude;
- faciès: sédiments fins dans la partie supérieure des tidal flats et marais maritimes, relativement
grossiers dans la partie inférieure et dans les chenaux. Nombreuses structures sédimentaires
typiques: herringbone, flaser et lenticular bedding, rides d'interférence. Bioturbation et matière
organique (tourbe, charbon) dans les marais maritimes;

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- séquences: la séquence de progradation est de type "fining upward": sables à stratifications


entrecroisées, flaser ou lenticular bedding (boues et sables), boues noires bioturbées;
- fossiles: faune et flore tolérants aux changements de salinité: certains crustacés, huîtres,...

Des barrières, complexes sableux allongés parallèlement à la côte et séparés de celle-ci par des lagunes, se forment le long de côtes où l'apport
sédimentaire est important et où le marnage est suffisamment faible (<3m en général) pour que l'influence des courants de dérive littorale soit
prépondérante sur celle des courants de marée. Ces barrières isolent des lagunes où domine la sédimentation boueuse. Le long d'un transect
perpendiculaire à la plage, en progressant vers le large, on observe une diminution progressive de la granulométrie des sédiments et une
grande variété de structures sédimentaires.

Sur les côtes exposées aux fortes houles (et où existe un stock sédimentaire suffisant) peuvent se mettre en place des cordons de galets,
localisés en haut de plage. Le transport a lieu lors des tempêtes.

A: cordon de galets en haut de plage; la mer est à gauche de l'image; B: détail du cordon reposant sur le sable de la plage; remarquer les
marques de ruissellement ("rill marks") sur le sable. Erquy, Bretagne.

La zone du littoral s'étendant depuis la basse plage jusqu'à la base des vagues de beau temps ("shoreface", zone subtidale) montre des rides
d'oscillation de vagues symétriques et bifurquées, des stratifications en auges, des stratifications planes. Plus au large, entre la base de la zone
d'action des vagues de beau temps (ZAVBT ou en anglais "Fair Weather Wave Base") et de tempête (ZAVT ou "Storm Wave Base"), on
observe des niveaux sableux avec des stratifications en auges et mamelons (HCS, "hummocky cross stratification"), les tempestites
(Fig. III.11).

A: stratification plane de plage. B: passage latéral entre des rides de courant et une stratification plane, Zuydcoote.

Eléments diagnostiques des plages et barrières


- association avec d'autres faciès côtiers, ainsi qu'avec des faciès de mer ouverte;
- faciès: sédiments sableux matures (quartz), occasionnellement minéraux lourds. Stratification
plane, herringbone, entrecroisée en auges, rides d'oscillation. Les fossiles sont généralement
brisés; lumachelles;
- la séquence de progradation est de type coarsening upward et comprend les termes suivants:
sables fins bioturbés, stratifications HCS (ZAVT-ZAVBT), sables bien classés avec stratifications
planes et entrecroisées (auges, oscillation, courant).

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Dépôts de plate-forme

La profondeur de la plate-forme peut varier entre 10 et 200 m (un bon exemple actuel de plate-forme siliciclastique est la Mer du Nord, mais
la majeure partie des matériaux sont des reliques d'environnements glaciaires, fluviatiles ou côtiers, formés avant la transgression flandrienne).

Les sédiments de plate-forme subissent l'action des courants tidaux et des courants et des vagues de tempêtes. On distingue en général deux
grands types de plates-formes (Fig. III.10): les plates-formes où les processus sédimentaires sont dominés par l'action des vagues ("weather
dominated"=WD) et les plates-formes où ces processus sont dominés par l'action des marées ("tide-dominated"=TD).

- Les courants tidaux modérés induisent la formation de rides sur les fonds sableux et les courants forts (>60 cm/s), de mégarides ou dunes
sous-marines ("megaripples"). Ces dunes peuvent atteindre une quinzaine de mètres de hauteur pour une longueur d'onde de 500 m. La
stratification est inclinée (avec "foresets") ou entrecroisée en auges. Dans le cas des rides, l'épaisseur des unités ("sets") est inférieure à 4 cm,
dans le cas des mégarides, elle peut atteindre 1 m (très beaux exemples dans le Sinémurien de la Lorraine belge). Des structures herringbone
sont souvent présentes. Le sédiment sableux est bien classé.

- Le sédiment peut être également transporté par des courants générés par des tempêtes (courants de densité). Les plus grandes des structures
ainsi produites peuvent ressembler aux rides de courants tidaux, avec stratifications entrecroisées. Un certain nombre de différences permet
cependant d'effectuer la distinction:

 on n'observe pas de changements périodiques dans la direction des courants (herringbone);


 des stratifications en auge et mamelons (hummocky cross stratification) sont présentes.

Eléments diagnostiques des dépôts sableux de plate-forme


- association avec des dépôts côtiers, voire des dépôts de bassin;
- faciès: corps sableux lenticulaires (parfois de grande dimension) au sein de sédiments plus fins
(argiles, shales). Sédiments matures, souvent bien classés: quartz, fragments de coquilles,
glauconite. Nombreuses figures sédimentaires dont: HCS, stratification inclinée à grande et petite
échelle, lits granoclassés (tempestites), etc.
- la séquence progradante type est la suivante: boues bioturbées, boues à niveaux sableux de
tempêtes, sables à HCS, mégarides à stratifications en auges ou inclinée;
- fossiles: caractère marin ouvert, non restreint.

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Fig. III.10: quatre séquences typiques de plate-forme siliciclastique. A: plate-forme progradante de type "storm-dominated"; B: plate-forme
rétrogradante de type "storm-dominated"; C: plate-forme rétrogradante de type "tide-dominated"; D: plate-forme aggradante de type
intermédiaire.

Les tempestites

Ces corps sédimentaires développés sur des plates-formes ouvertes, soumises à des tempêtes périodiques, montrent à la fois une évolution
verticale, sur quelques cm à quelques dm (séquence dite de tempestite, Fig. III.11) et une évolution latérale, depuis des dépôts proximaux
jusqu'à des dépôts distaux.

La séquence idéale de tempestite se caractérise par les éléments suivants (de bas en haut):

- des sillons (" furrows ") plus ou moins érosifs à la base, témoins de l'augmentation brutale de la vitesse des vagues et des gouttières d'érosion
("gutter casts"). Les sillons sont des figures de base de banc, concaves, de largeur supérieure à 50 cm ; les gouttières peuvent être droites ou
sinueuses, ont de 2 à 25 cm de largeur pour une profondeur pouvant atteindre 15 cm. Leur surface peut comporter de nombreux "tool marks"
et leurs parois latérales peuvent être abruptes;

- un premier dépôt grossier très souvent constitué de coquilles et débris;

- un sable avec des laminations planes parallèles, passant vers le haut à des stratifications en mamelons ("hummocky cross stratification"), puis
éventuellement des stratifications de rides de vagues;

- des sédiments plus fins, souvent bioturbés: ces derniers dépôts correspondant à la sédimentation de "beau temps", avec une diminution de la
vitesse de sédimentation et de la granulométrie.

Cette séquence est la plus complète. En zone plus distale, les sillons sont de moins en moins marqués et finissent par disparaître vers le large.
En ce qui concerne la séquence sédimentaire, elle se réduit latéralement d'abord aux sables à stratification en mamelons, ensuite à des "strates
granoclassées" laminaires d'épaisseur centimétrique, enfin à des sphéroïdes. Les sphéroïdes sont des objets ovoïdes cm à dm, déposés en lits,
le grand axe dans la stratification. Ils sont souvent laminaires ou présentent des stratifications entrecroisées.

Il faut noter aussi qu'une caractéristique importante des tempestites est leur caractère amalgamé. Ceci signifie qu'une tempestite peut remanier

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une bonne part de la tempestite précédente, détruisant ainsi la partie supérieure de la séquence (sables à rides de vague, dépôt de beau temps).

Dans les séquences sableuses cycliques, on doit toujours rester attentif à faire la distinction entre tempestite et turbidite

Eléments diagnostiques des tempestites


- contexte général de plate-forme;
- absence de figures de base de banc de type flute casts et au contraire la présence de sillons;
- absence de granoclassement vertical;
- présence de stratifications en mamelons et souvent absence de rides de courant.

Fig. III.11 A: position relative des trois principaux faciès des tempestites au sein d'un épandage sableux (la source d'alimentation n'est pas
nécessairement le littoral: il peut s'agir de barres sous-aquatiques ou même de dépôts de tempêtes antérieurs. L'évolution distal-proximal ne
s'effectue donc pas nécessairement par rapport à la côte). B: séquences élémentaires à l'échelle de la strate pour plusieurs types de
tempestites. Les tempestites amalgamées résultent de la superposition de plusieurs tempestites avec érosion basale des dépôts antérieurs.

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Tempestite gréso-carbonatée. Durnal, Famennien.

Dépôts de bassin

Les sédiments de bassin sont surtout des sédiments boueux. Les principaux sédiments grossiers qu'ils contiennent sont les turbidites
(Fig. III.12) et les debris flows. Il faut noter (Shanmugam, 1997) que l'appellation "turbidite" doit être restreinte à des dépôts dont le mode de
transport est un courant de turbidité, c-à-d. un fluide où les particules sont maintenues en suspension par la turbulence seule. A ceci s'opposent
les debris flows, qui sont des écoulements plastiques où les particules sont supportées par une matrice. Les turbidites vraies sont granoclassées
et constituées de sédiments fins, à la différence des debris flows qui peuvent inclure des débris de toute taille.

Fig. III.12: modèles de turbidites.

Les tsunamites

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Les événements dramatiques de décembre 2004 ont rappelé l'importance des tsunamis. Avec une fréquence moyenne dans la nature actuelle
d'un tsunami majeur tous les 20 ans , on peut considérer qu'il s'agit de phénomènes susceptibles d'apparaître communément dans
l'enregistrement sédimentaire. Or, les mentions de "tsunamites" sont rares. Il s'agit vraisemblablement d'un problème d'identification de ces
dépôts, encore mal connus. Une possible source de confusion vient du fait que les énergies libérées par les tsunamis sont colossales et que leur
influence peut se marquer dans tous les environnements marins, depuis la zone littorale jusqu'à plusieurs kilomètres de profondeur dans les
bassins océaniques. L'enregistrement sédimentaire d'un tsunami peut donc correspondre à un niveau grossier en zone supratidale, à un corps
ressemblant à une tempestite sur la plate-forme et à une turbidite dans le bassin (Fig. III.13).

Les phénomènes susceptibles de déclencher un tsunami sont de quatre types:

- tremblement de terre sous l'océan: un mouvement vertical le long d'une faille déplace toute la colonne d'eau de la valeur du rejet; c'est ce qui
s'est produit en décembre 2004 dans l'Océan Indien. Les tsunamis généré par les tremblements de terre se propagent très loin
(http://www.noaanews.noaa.gov/video/tsunami-indonesia2004.mov) mais l'amplitude des vagues reste relativement faible, à peu près égale au
rejet de la faille (jusqu'à 13 m pour le tsunami de 2004: http://www.asiantsunamivideos.com);

- un glissement de terrain ou une avalanche: dans ce cas, une masse importante de roche ou de sédiment déplace un même volume d'eau.
L'amplitude du tsunami est grossièrement proportionnelle à la hauteur de la masse déplacée. Ces phénomènes génèrent des vagues très hautes,
mais dont la propagation est faible (en 1958, une avalanche de rochers dans la Baie de Lituya en Alaska a généré une vague de 500 m de
haut);

- une explosion volcanique: un des exemples les plus célèbres est l'explosion du Santorin en Crête (vers 1500 av. JC). Le tsunami généré par
l'explosion a ravagé tous les rivages de Mediterrannée et provoqué la formation d'une méga-turbidite;

- un impact de météore ou de comète dans l'océan: dans le cas de météores de diamètre kilométrique, la hauteur du tsunami est égale à la
profondeur de l'océan et sa propagation est mondiale. Outre la vague générée par le déplacement de la masse d'eau lors de l'impact, d'autres
tsunamis secondaires se forment par des processus de rebond lors du remplissage de la cavité transitoire, par des glissements de terrains et des
tremblements de terre.

Une fois généré, le tsunami se déplace dans l'océan, parfois sur des milliers de kilomètres, à des vitesses de l'ordre de 600 à 800 km/h. Son
amplitude est faible, de l'ordre de quelques dm à quelques m, mais sa longueur d'onde peut atteindre des centaines de kilomètres. Comme
l'ensemble de la colonne d'eau est affectée, il semble que des sédiments de bassin de la gamme des silts puissent être déplacés. Lorsque le
tsunami pénètre sur la plate-forme, sa vitesse diminue par frottement jusqu'à des valeurs de 30 à 60 km/h et sa hauteur augmente. Enfin,
lorsqu'il arrive sur la plage, il ralentit jusqau'à une vingtaine de km/h et sa hauteur atteint un maximum. C'est à ce moment que sa force érosive
est maximale. Des sillons profonds peuvent être creusés et du matériel venant de l'ensemble de la plate-forme peut être érodé et transporté.
Une unité basale est formée, très grossière, comprenant localement des blocs de taille plurimétrique, des organismes de milieu marin ouvert et
quelques stratifications indiquant un courant orienté du large vers le continent. Cette unité peut se mettre en place jusqu'à plusieurs km à
l'intérieur des terres.

Après le passage de la vague, l'eau qui a envahi le continent commence à se retirer; une partie des sédiments déposés peut être remise en
suspension et redéposée, mêlée à des débris venant du continent (plantes, artefacts,...) et avec des stratifications indiquant un courant de retour.
Les vitesses de courant atteintes peuvent être très grandes, d'autant que cet écoulement de retour est généralement chenalisé. Lors du calme
relatif qui suit , des sédiments plus fins peuvent commencer à s'accumuler, avant le passage éventuel d'une seconde vague, puisque la
fréquence des tsunamis est de l'ordre de plusieurs dizaines de minutes, voire d'une heure. Comme dans le cas des tempestites, la mise en place
de tsunamites amalgamées est donc possible.

En bordure de plate-forme et dans les bassins, le passage d'un grand tsunami peut s'accompagner du déclenchement d'écoulements gravitaires
(debris flows et turbidites). Des dépôts de type debris flows peuvent s'observer également sur la plate-forme et même en zone littorale si la
mise en suspension de sédiments conduit à la formation d'un écoulement visqueux.

Eléments diagnostiques des tsunamites


- granulométrie plus grossière que les sédiments encaissants;
- association avec des sédiments déformés (seismite);
- érosion basale profonde;
- sédiments mal classés; présence de blocs de grande taille, d'éléments remaniés de la plate-forme;
- changement de sens des stratifications entrecroisées (flux et reflux);
- stratifications entrecroisées de grande longueur d'onde (de l'ordre de la dizaine de m);
- présence de débris (végétaux, artefacts) venant du continent;
- avancée importante du niveau sédimentaire sur le continent.

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Fig. III.13: modèles de tsunamites.

Pour en savoir plus

Sur la classification des roches détritiques:

 P. Lundegard & N. Samuels, 1980. Field classification of fine grained sedimentary rocks. J. of Sedimentary Petrology, 50, 781-786.
 J. Mount, 1985. Mixed siliciclastic and carbonate sediments: a proposed first-order textural and compositional classification.
Sedimentology, 32, 435-442.
 E.J. Pettijohn, 1975. Sedimentary rocks. Harper international edition, 628 pp.

Sur les structures sédimentaires:

 H.-E. Reineck & I.B. Singh, 1980. Depositional sedimentary environments. Springer-Verlag, 549 pp.

Sur les turbidites, les tsunamites et les "debris flows":

 D.A.V. Stow (edt.), 1992. Deep-water turbidite systems. Reprint series vol. 3 of the Int. Assoc. of Sedim. Blackwell, 473 pp.
 G. Shanmugam, 1997. The Bouma sequence and the turbidite mind set. Earth-Science Reviews, 42, 201-229.
 T. Shiki, M. Cita & D. Gorsline (eds.), 2000. Sedimentary features of seismites, seismoturbidites and tsunamites. Sp. Issue ,
Sedimentary Geology, 135, 320 pp.

Des exemples "belges" de systèmes côtiers siliciclastiques:

 E. Goemare, E. Catot, L. Dejonghe, L. Hance & P. Steemans, 1997. Sédimentologie des Formations de Marteau, du Bois d'Ausse et de
la partie inférieure de la Formation d'Acoz (Dévonien inférieur) dans l'est de la Belgique, au bord nord du Massif de Stavelot. Mem.
Geological Survey of Belgium, 42, 168 pp.
 J. Thorez, E. Goemare & R. Dreesen, 1986. Tide- and wave-influenced depositional environments in the Psammites du Condroz
(Upper Famennian) in Belgium. In de Boer et al., éds.: Tide-influenced sedimentary environments and facies. Reidel Publ. Co, 389-
415.
 J. Thorez, M. Streel, J. Bouckaert & M.J.M. Bless, 1977. Stratigraphie et paléogéographie de la partie orientale du Synclinorium de
Dinant (Belgique) au Famennien supérieur: un modèle de bassin sédimentaire reconstitué par analyse pluridisciplinaire
sédimentologique et micropaléontologique. Meded. Rijks Geol. Dienst, N.S. 28 (2), 17-32.

Sur l'utilisation des cortèges argileux dans la reconstitution des paléoenvironnements:

 H. Chamley, J-N. Proust, J-L. Mansy & F. Boulvain, 1997. Diagenetic and paleogeographic significance of clay and other sedimentary
components in the middle Devonian limestones of Western Ardennes, France. Palaeogeography, Palaeoclimatology, Palaeoecology,
129, 369-385.

Sur l'origine du quartz:

 T. Götte & D.K. Richter, 2007. Cathodoluminescence characterization of quartz particles in mature arenites. Sedimentology, 53, 1347-
1359.

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IV. Les évaporites


INTRODUCTION

Les évaporites sont des sédiments résultant de l'évaporation de l'eau et de la précipitation des sels qui y sont dissous. Les minéraux principaux
en sont le gypse, l'anhydrite et la halite. D'autres minéraux, quoique moins fréquents, peuvent être des constituants importants de certains
dépôts salins. Le tableau IV.1 en donne une liste.

minéraux des minéraux des évaporites


évaporites marines non marines
halite NaCl halite, gypse, anhydrite
sylvite KCl epsomite MgSO4.7H2O

carnallite KMgCl3.6H2O trona Na2CO3.NaHCO3.2H2O

kainite KMgClSO4.3H2O mirabilite Na2SO4.10H2O

anhydrite CaSO4 thenardite NaSO4

gypse CaSO4.2H2O bloedite Na2SO4.MgSO4.4H2O

K2MgCa2(SO4)
polyhalite gaylussite Na2CO3. CaCO3.5H2O
4.2H2O

kieserite MgSO4.H2O glauberite CaSO4.Na2SO4


Tableau IV.1: principaux constituants des évaporites.

Les évaporites ont une grande importance économique. En particulier, elles forment le toit imperméable de certains des plus grands gisements
pétroliers du monde. Au point de vue sédimentologique, leur reconnaissance est essentielle puisqu'elles sont de bons marqueurs climatiques
(climat aride, où l'évaporation excède de loin les précipitations, c-à-d dans la ceinture tropicale des hautes pressions, entre 10° et 30° de
latitude).

Pour comprendre la genèse et la constitution des dépôts évaporitiques, il est nécessaire de revenir à la composition chimique des eaux de mer
et de rivière, exprimée au tableau IV.2. On voit rapidement que si les rivières contiennent principalement HCO3- et CO3=, avec une proportion
moindre de Ca++, H4SiO4, SO4=, Cl-, Na+, Mg++ et K+, les océans contiennent en grande quantité de SO4=, Cl-, Na+ et K+. Ces différences
reflètent en fait la manière dont les sels dissous sont extraits de l'eau de mer et incorporés dans les sédiments. Le tableau IV.3 donne les temps
de résidence des principaux ions de l'eau de mer (temps de résidence en années=masse totale d'un ion dans les océans / apport annuel des
rivières).

eau de rivière moyenne eau de mer moyenne

(% du résidu solide) (% du résidu solide)


HCO3- et CO3= 48,6 0,4

Ca++ 12,4 1,2


H4SiO4 10,8 <0,01

SO4 =
9,3 7,7
Cl- 6,5 55
Na+ 5,2 30,6
Mg++ 3,4 3,7
K+ 1,9 1,1
Fe++ et Fe+++ 0,6 <0,01
Al(OH)4- 0,2 <0,01
NO3- 0,8 <0,01
total 99,7 99,7
salinité 121 ppm 35.000 ppm
Tableau IV.2: abondance relative des ions dissous dans l'eau de mer et l'eau de rivière (d'après Mason, 1966 et Livingston, 1963,
respectivement).

temps de résidence (années) principaux types de sédiments


Cl- ∞ évaporites

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Na+ 260.000.000 évaporites


Mg++ 12.000.000 évaporites, dolomite
K+ 11.000.000 argiles, évaporites
SO4= 11.000.000 évaporites
Ca++ 1.000.000 carbonates
-
HCO3 et CO3 =
110.000 carbonates
H4SiO4 8000 cherts, dépôts siliceux
Mn++ 7000 nodules
Fe++ et Fe+++ 140 sédiments riches en Fe
Al(OH)4- 100 argiles
Tableau IV.3: temps de résidence et devenir des principaux ions dissous dans l'eau de mer. D'après Prothero & Schwab.

Le sodium et le chlore sont très abondants dans l'eau de mer car d'une part, ils ne sont pas utilisés par les organismes et incorporés au sédiment
sous la forme de tests comme le calcium, la silice, les carbonates et d'autre part, ils n'entrent pas dans le réseau des argiles au cours de la
diagenèse comme l'aluminium et le fer. Seule l'évaporation de l'eau de mer, dans des circonstances forcément exceptionnelles, permet leur
extraction des océans.

Si l'on observe l'apparition progressive des précipités lorsque l'on fait évaporer de l'eau de mer (salinité 3,5%), on a la séquence suivante:

- dans certaines circonstances, de la calcite ou de l'aragonite précipitent lorsque le volume de l'eau est réduit de 50%;

- le gypse et l'anhydrite commencent à précipiter lorsque le volume de l'eau de mer n'est plus que 35% du volume initial;

- lorsque le volume de l'eau n'atteint plus que 10% du volume de départ, des minéraux plus solubles comme la halite et la sylvite cristallisent;

- enfin, lorsque l'évaporation est presque totale, des borates et nitrates précipitent.

Si l'on examine les dépôts évaporitiques naturels, on constate que cette séquence idéale est rarement réalisée. Des répétitions, des cycles
tronqués sont fréquents: c'est le signe d'une évolution plus mouvementée du bassin évaporitique, alternant remplissage, périodes d'évaporation,
nouveau remplissage avec dissolution d'une partie des espèces précédemment précipitées, etc.

Les évaporites s'observent depuis le Précambrien jusqu'à l'époque actuelle, mais leur répartition spatiale et temporelle est inégale: elles sont
particulièrement représentées au Cambrien, au Permien et au Trias. On classe généralement les évaporites en trois grands types: les évaporites
continentales, les évaporites marines de milieu peu profond et les évaporites marines profondes.

EVAPORITES CONTINENTALES

Ces dépôts s'accumulent dans des lacs endorhéiques en région aride ou semi-aride. La minéralogie de ces évaporites est relativement variable
puisqu'elle dépend de la composition des eaux fluviales, elle-même dépendante de la géologie régionale.

On observe en général une répartition horizontale concentrique des différents dépôts (gypse-halite-nitrates) en fonction de leur degré de
solubilité, les plus solubles étant localisés au centre, lorsque l'extension du lac en cours d'assèchement était la plus restreinte. Cette structure
particulière, la présence d'autres types de sédiments continentaux, certaines espèces minérales rares en environnement marin comme le borax,
l'epsomite, le trona , la gaylussite et la glauberite permettent de reconnaître des évaporites continentales.

EVAPORITES MARINES PEU PROFONDES

Ces évaporites comprennent les dépôts inter- et supratidaux comparables à ceux qui se forment actuellement le long du Golfe Persique, de
certaines zones de la côte d'Afrique du Nord, etc. et les dépôts subtidaux de plate-forme, dont nous ne connaissons pas encore d'équivalent
actuel.

- Les premiers sont aussi appelés évaporites de sabkhas (Fig. IV.1). Ces sabkhas sont des plaines côtières développées le long de zones
continentales arides. Outre les évaporites, les sédiments de sabkha comportent des éléments détritiques provenant du continent (amenés par les
vents, les cours d'eau) et des sables et boues provenant de la plate-forme, transportés lors de tempêtes. Au point de vue hydrologique, les
sabkhas sont des systèmes assez complexes avec une recharge due aux inondations marines périodiques, mais aussi aux apports souterrains à
partir de la nappe phréatique marine.

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Fig. IV.1: localisation et coupe dans la sabkha El Melah.

Les minéraux typiques des évaporites de sabkha sont l'anhydrite, le gypse et la dolomite. La dolomitisation de particules calcaires est courante
et est une conséquence du haut rapport Mg/Ca (suite à la précipitation des sulfates de calcium) des solutions intersticielles. La dolomitisation
elle-même libère des ions Ca++ qui favorisent une poursuite de la formation de gypse et d'anhydrite. Le gypse est le plus commun des
précipités (cf. les roses des sables par exemple), surtout en climat semi-aride. Si l'évaporation est très intense, le gypse est progressivement
remplacé par de l'anhydrite. La morphologie originale des cristaux de gypse (lentilles, chevrons) est conservée si le sédiment est suffisamment
cohérent. Souvent, une précipitation continue d'anhydrite refoule progressivement les sédiments carbonatés ou détritiques interstratifiés, avec
comme conséquence ultime la formation de la structure bien connue appelée "chicken wire" (nodules d'anhydrites séparés par de minces
lamines de sédiment). Une autre structure courante est appelée "entérolithes": il s'agit de lits d'anhydrite à aspect irrégulièrement contourné
(Fig. IV.2).

Structure en "chicken wire" dans la Formation de Martinrive à Chanxhe.

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Dépôt de halite dans la Sabkha El Melah, Tunisie; on observe un système de conduits où circulent des eaux à caractère réducteur.

Les sédiments de sabkha possèdent fréquemment une nature cyclique: au cours de la progradation (comblement progressif) de la plaine
littorale, la sabkha s'avance en direction de la mer, surmontant des sédiments de type stromatolithique, des boues lagonaires bioturbées, des
corps oolithiques.

Fig. IV.2 A: Photo aérienne de la plaine d'accrétion à Abu Dhabi. a: chenal de marée sous-aquatique; b: lagune infra-tidale; c: zone
intertidale à peloïdes; d: tapis algaire; e: zone supratidale (sabkha) évaporitique avec nombreuses traces d'accroissement. B: séquence type
de sabkha, montrant la progradation de la plaine littorale depuis un milieu subtidal jusqu'à l'émersion.

- Certaines formations évaporitiques de grande extension ne peuvent être expliquées par des dépôts de sabkha. Il s'agit vraisemblablement de
plates-formes isolées par un seuil permettant une recharge continuelle par les eaux océaniques. Dans ce cas, du gypse précipite sur le fond
marin, en cristaux généralement de forme prismatique, dressés comme le sont les brins d'herbe d'une prairie ("gazon" sélénitique). A ces
niveaux s'associent diverses structures sédimentaires comme des cristaux cassés et redéposés, des péloïdes, des niveaux à stromatolithes, etc.

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A: couches plissées (slump) formées de croûtes de gypse ("gazon sélénitique"); B: détail montrant les cristaux prismatiques. Messinien,
Heraklea Minoea, Sicile.

EVAPORITES PROFONDES

Certains types d'évaporites, souvent laminaires, sont associées à des critères indiscutables d'environnement profond: grande continuité latérale
des lamines individuelles, turbidites, slumps, absence d'algues,... Dans ces évaporites, les lamines de gypse, d'anhydrite, de halite, alternent
avec des lamines de micrite ou de matière organique. Ce caractère pratiquement varvoïde est attribué à des variations saisonnières
(température, humidité, "bloom" de certaines espèces).

DIAGENESE

Si la diagenèse est souvent responsable de la déshydratation du gypse et de sa transformation en anhydrite (à partir d'une profondeur de 700 m
suivant certains auteurs), le processus inverse peut se produire lors du passage de couches d'anhydrite dans la zone phréatique météorique, au
cours par exemple d'un soulèvement régional. Le gypse secondaire se présente alors sous la forme de porphyrotopes et d'albâtre. Les
porphyrotopes sont de grands cristaux de gypse, dispersés au sein de l'anhydrite. L'albâtre consiste en masses de gypse à bordure cristalline
irrégulière, à extinction ondulante. On peut observer aussi (Keuper du sondage de Latour, par exemple), des veines de gypse fibreux dont les
fibres sont perpendiculaires aux épontes. Ces veines sont probablement créées par fracturation hydraulique.

A: dolomie et gypse en rosettes. B: célestite. C: baryte. D: de gauche à droite, successivement: dolomite (d); gypse (g); anhydrite (a). Nicols
croisés.

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Pour en savoir plus

 M.E. Tucker, 1991. Sedimentary petrology. An introduction to the origin of sedimentary rocks. Blackwell Sc. Publ., 260 pp.

Sur les évaporites du Viséen de la Belgique:

 T. De Putter, J-M. Rouchy, A. Herbosch, E. Keppens, C. Pierre, E. Groessens, 1994. Sedimentology and palaeo-environment of the
Upper Visean anhydrite of the Franco-Belgian Carboniferous basin (Saint-Ghislain borehole, southern Belgium). Sedimentary
Geology, 90, 77-93.
 J-M. Rouchy, E. Groessens & A. Laumondais, 1984. Sédimentologie de la formation anhydritique viséenne du sondage de Saint-
Ghislain (Hainaut, Belgique). Implications paléogéographiques et structurales. Bull. Soc. belge Géologie, 93, 105-145.

V. Les sédiments siliceux


INTRODUCTION

Les américains utilisent le mot "chert" comme terme générique pour qualifier l'ensemble des roches siliceuses massives à cassure conchoïdale,
constituées de calcédoine fibreuse, d'opale amorphe ou de quartz microcristallin. En Europe, ce terme s'applique aux concrétions, nodules et
lits siliceux intercalés dans les calcaires ante-Crétacé. En Belgique, on l'utilise uniquement pour les accidents siliceux des roches paléozoïques.
Le mot "silex" est réservé aux accidents siliceux de la craie mésozoïque. "Porcelanite" se rapporte à des roches siliceuses à grain fin, de
texture comparable à celle de la porcelaine non vernie. On pourrait utiliser comme terme général englobant toutes les roches siliceuses le mot
"silicite"

Les silicites (ou cherts au sens large) sont généralement subdivisées en deux grandes catégories: les silicites nodulaires et les silicites litées.
Ces dernières sont généralement considérées comme primaires et seraient les équivalents des boues océaniques actuelles à diatomées et
radiolaires. Les silicites nodulaires, fréquentes dans les calcaires et, dans une moindre mesure, les shales et les évaporites, seraient elles
d'origine diagénétique. Les sédiments siliceux s'observent en milieu marin aussi bien que lacustre.

PETROGRAPHIE

Les cherts (s.l.) comprennent quatre sortes de silice: le microquartz, le mégaquartz, les formes fibreuses et l'opale:

- le microquartz consiste en cristaux équigranulaires de quartz, de quelques microns de diamètre. Ils se forment à partir de solutions impures,
sursaturées en silice dissoute;

- le mégaquartz, comme son nom l'indique, est constitué de cristaux beaucoup plus grand, dépassant 20 µm et montrant des formes cristallines
bien développées. Ces cristaux réguliers apparaissent lorsque les solutions siliceuses sont diluées et pauvres en cations;

- les formes fibreuses (terme général: calcédoine) où les cristaux ne sont plus individualisables au microscope optique et s'empilent pour
former des fibres. Elles comprennent plusieurs espèces suivant les caractères optiques:

 la quartzine, à allongement positif, dont les fibres forment des sphérolites ou des éventails (divergence des fibres à partir d'un point);
on observe la quartzine en remplacement des évaporites, mais aussi dans les cavités et dans de nombreux autres types de silicification;
 la lutécite, dont les fibres, groupées en faisceaux, ont un allongement positif et se rejoignent, non pas en un point central mais suivant
des droites, en dessinant des chevrons; l'extinction est oblique; on la rencontre essentiellement en produit de remplacement des
sulfates;
 la calcédonite est fibreuse comme les précédentes, mais possède un allongement négatif. Elle semble se former en l'absence d'ions
SO42-;
 la lussatite: il ne s'agit plus ici exactement d'une forme fibreuse du quartz, mais plutôt d'une opale dotée d'une certaine cristallinité
(opale-CT, voir ci-dessous). Au microscope, elle montre un indice faible, voisin de 1,45, un aspect fibreux, une biréfringence très
faible, une extinction droite et un allongement positif.

- l'opale est une forme amorphe et hydratée de la silice (contenant jusqu'à 10% d'eau), constituant (entre autre) le squelette des diatomées, des
radiolaires et les spicules d'hyalosponges. L'opale est métastable, de sorte que son abondance décroît au cours du temps: elle est absente des
roches paléozoïques. L'opale biogénique amorphe (appelée opale-A) se transforme au cours du temps en opale-CT, déjà cristalline (il s'agit
d'un interstratifié cristobalite/tridymite), puis en quartz et calcédoine. L'opale précieuse est constituée d'un empilement régulier de sphères
dont le diamètre varie entre 150 et 350 νm, constituant ainsi une sorte de réseau cristallin à grande échelle dont l'ordre de grandeur est proche
de celui de la lumière visible; la diffraction de la lumière blanche produit des irisations qui varient en fonction de l'angle d'incidence.

- la lechatelliérite, forme amorphe assez rare, se rencontre dans les roches quartzeuses vitrifiées par l'impact de la foudre (fulgurites) ou par les
impacts de météorites. On en observe aussi dans les geyserites.

Insistons sur le fait que d'une manière générale, les formes fibreuses de la silice à allongement positif, remplacent des sulfates. Les formes à
allongement négatif par contre, apparaissent dans les roches où l'ion S042- est absent au moment de la silicification. Elles remplissent des
cavités et sont les plus courantes dans la nature.

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A: radiolarite; les radiolaires sont cimentés par de la calcédonite et du mégaquartz, la matrice par du microquartz; noter la présence d'épines
de radiolaires dans la matrice. B: spiculite totalement silicifiée; C: lutécite dans un calcaire partiellement silicifié. D: fracture remplies par
du quartz et de la calcédonite; la matrice est remplacée par du microquartz.. Nicols croisés.

GEOCHIMIE

La solubilité des différentes formes de silice est variable. La silice biogénique est très peu stable et possède une solubilité de 50 à 80 ppm à 0°
C, atteignant 100 à 140 ppm à 25°C. La forme la plus stable, le quartz, est aussi la moins soluble des formes de silice: 6 à 14 ppm. Les
calcédoines sont intermédiaires entre la silice biogénique et le quartz, mais plus proches du quartz. L'opale a une solubilité variable, supérieure
aux calcédoines et inférieure à la silice biogénique dès qu'une organisation cristalline apparaît.

L'eau de mer est très nettement sous-saturée par rapport à la silice (environ 1 ppm). La silice amenée par les eaux fluviales (altération
continentale des feldspaths), fournie par l'altération sous-marine des basalte et injectée directement par l'hydrothermalisme est immédiatement
utilisée par les organismes. Ceci se marque notamment dans la variation de la concentration de la silice dans l'océan en fonction de la
profondeur: moins de 1 ppm dans la zone photique, jusqu'à 11 ppm au-delà de 2 km de profondeur.

La solubilité de la silice dans l'eau n'est que très peu influencée par le pH entre 2 et 9, bien qu'elle soit un peu plus soluble en milieu acide
qu'en milieu faiblement alcalin. En solution fortement basique par contre, sa solubilité croît considérablement: elle atteint 4000 ppm à pH 11,
par exemple (cas de certains lacs évaporitiques). Mais tout ceci n'est vrai qu'à nature d'ion constante. En effet, la solubilité de la silice n'est pas
fonction du seul pH, mais aussi des ions en présence. C'est ainsi que Fe3+ en solutions acides (pH 1,5 à 3) produit une dissociation de la silice
bien plus importante que Ca++ ou NH4+ dont les solutions ont des pH faiblement acides, neutres, voire alcalins. Parmi les autres ions, seuls
Al+++ et Mg++ affectent la solubilité en l'abaissant. Il se formerait une mince couche protectrice de silicate d'aluminium ou de magnésium. Les
organismes siliceux marins ne semblent échapper à la dissolution durant leur vie qu'en adsorbant des ions Al ou Mg ou en formant des
complexes organo-siliciques.

Enfin, il faut bien noter qu'en terme de stabilité, la silice se dissout si le carbonate précipite et vice-versa: ceci explique la disparition très
rapide des spicules d'éponges dans les récifs carbonatés. Hartman (1977) cite même des exemples actuels où les spicules siliceux de
sclérosponges sont déjà en voie de dissolution alors même qu'ils sont incorporés dans le squelette aragonitique basal de l'éponge.

CHERTS ET SILEX LITES

Les boues à radiolaires et à diatomées s'accumulent actuellement sur les fonds océaniques, sous les zones de haute productivité des eaux de
surface (grâce aux upwellings). Les boues à diatomées sont typiques des hautes latitudes, tandis que les boues à radiolaires s'observent en zone
équatoriale.

L'accumulation des tests siliceux est la plus manifeste dans les zones où les sédiments siliceux ne sont pas dilués par un apport en carbonates
et/ou en terrigènes, c'est-à-dire loin des embouchures fluviales et sous la zone de compensation des carbonates (CCD) (Fig. V.1). Des
équivalents anciens de ces boues siliceuses, sous la forme de cherts lités, sont fréquemment observés. Dans ces cherts, les radiolaires sont mal
conservés et on ne remarque généralement plus que quelques moules de tests, emplis de mégaquartz, isolés dans une matrice de microquartz.
Certains de ces cherts lités montrent un granoclassement et des laminations entrecroisées ou planes parallèles. Il s'agit dans ce cas de turbidites

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remaniant des boues siliceuses provenant de zones en surélévation.

Les cherts lités sont souvent associés avec des pillow lavas, des black shales, des ophiolites, ou encore des turbidites siliciclastiques ou
carbonatées, suivant le contexte paléogéographique général.

Fig. V.1: carte de répartition des différents types de sédiments océaniques. Les boues siliceuses s'observent au niveau des zones de haute
productivité planctonique (équateur et hautes latitudes), les boues carbonatées au-dessus de la CCD (voir ci-dessous, ch. VIII), les sédiments
terrigènes au débouché des grands fleuves et les sédiments glacio-marins au large de l'Antarctique et du Groenland.

A: radiolarites, Sumeini Group (Ladinien, Trias), Wadi Shu'yab, UAE-Oman. B: radiolarites, Al Jil Formation (Capitanien, Permien), Wadi
Hawasina, UAE. Photos A-C. da Silva.

CHERTS ET SILEX NODULAIRES

Ces accidents siliceux sont fréquents dans les carbonates. Il s'agit de nodules, de rognons siliceux, généralement concentrés le long de certains
plans de stratification. Ces nodules peuvent ête coalescents et former des bancs, ressemblant dès lors aux cherts lités. On observe ces nodules
aussi bien dans des calcaires de plate-forme que dans des calcaires pélagiques.

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A: niveaux de cherts, parallèles à la stratification, dans les calcaires de la Formation de Leffe, Rocher Bayard; B: silex moulant des terriers
(flèche) dans la craie, sur une surface de stratification, Etretat.

Diverses hypothèses ont été émises quant à leur origine. On considère généralement que la silice disséminée dans le sédiment (spicules en
environnement peu profond, radiolaires en environnement pélagique,...) se dissout et précipite sous la forme d'opale-CT à proximité de germes
de croissance (fossiles, grains détritiques) dans des zones favorables (terriers, souvent). La transformation diagénétique de l'opale en
microquartz et calcédoine se fait ensuite progressivement de manière centripète. On a remarqué aussi que le microquartz remplace les
carbonates, tandis que la calcédoine et le mégaquartz sont plutôt des remplissages de cavités.

SILICITES NON MARINES

Des sédiments siliceux peuvent se former en milieu lacustre, par exemple par accumulation de diatomées (diatomites), ou encore par
évaporation d'eaux riches en silice dissoute (eaux à pH >9). Dans ce dernier cas, celui de certains lacs temporaires très riches en
phytoplancton, quartz et minéraux des argiles sont dissous lors des proliférations planctoniques ("blooms") et la silice précipite ensuite sous la
forme d'un gel lors de l'évaporation. On trouve aussi des enrichissements en silice dans les "silcrete", qui résultent d'une pédogenèse en milieu
très riche en silice instable (sols sur rhyolithes, volcaniclastites).

Pour en savoir plus

- F. Arbey, 1980. Les formes de la silice et l'identification des évaporites dans les formations silicifiées. Bull. Centres Rech. Explor.-Prod. Elf-
Aquitaine, 4, 1, 309-365.

VI. Les phosphorites


INTRODUCTION

Beaucoup de roches sédimentaires contiennent des quantités mineures de phosphates. Les phosphorites (dépôts sédimentaires de phosphates,
caractérisés par une teneur en P2O5 de l'ordre de 20% ou plus) sont par contre relativement rares. Le phosphate des roches sédimentaires se
présente essentiellement sous la forme de fluorapatite (Ca5(PO4)3F), dont une part du phosphate peut être remplacée par du carbonate ou du
sulfate, dont le fluor peut être remplacé partiellement par OH- ou Cl- et dont le calcium peut être substitué par Na, Mg, Sr, U et des terres
rares. les variétés cryptocristallines et isotropes d'apatite sont appelées "collophane".

Dans la plupart des sédiments, le phosphate est disséminé sous la forme de quelques fragments d'apatite (minéral dense), de coprolites ou
d'ossements. Par quel mécanisme de concentration en arrive-t-on aux énormes gisements de phosphorites que l'on connaît actuellement?

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Débris phosphatés (orangés) dans un packstone bioclastique (Jurassique, Lorraine belge); à gauche, lumière naturelle, à droite, nicols
croisés.

CLASSIFICATION

On classe en général les phosphorites en trois grandes catégories:

- les phosphorites nodulaires ou litées forment généralement des dépôts de grandes dimensions. Ces phosphorites semblent être les équivalents
actuels des accumulations de phosphate qui se forment le long de la bordure océanique de certaines plates-formes. Le mécanisme responsable
de telles accumulations est la présence de courants d'upwelling, riches en nutrients, favorisant des proliférations de phytoplancton. On peut
supposer que périodiquement, ces proliférations provoquent une mortalité massive des poissons, avec apport d'os et de matière organique riche
en phosphore dans le sédiment. D'un point de vue plus général, il semble que ce type de dépôt phosphaté soit lié à des périodes de haut niveau
marin, voire de transgressions. Durant les périodes transgressives, un certain déséquilibre de la sédimentation peut se produire, déséquilibre
qui se manifeste par des baisses de l'apport en terrigènes et la formation de fonds durcis. Dans ce cas, il est facile d'expliquer la concentration
des débris phosphatés par un arrêt de la dilution par la sédimentation détritique.

- les "bone beds": ce sont des niveaux plus ou moins enrichis en os et écailles de poissons. Ces graviers se forment lorsque les courants de
vague ou de marée concentrent les éléments les plus lourds sous la forme de "lag deposits". En lame mince, le phosphate des éléments
squelettiques se distingue par sa coloration jaune à brunâtre, la présence de structures d'origine biologique (lignes de croissance, canaux) et
son caractère isotrope ou faiblement anisotrope. Associés à ces bone beds, on observe souvent des coprolites riches en collophane. Au cours
de la diagenèse, une phosphatisation plus poussée des sédiments (croissance de nodules autour des fragments osseux, cimentation par de la
collophane,...) peut avoir lieu. Un bon exemple d'un de ces bone beds est le niveau graveleux de la Formation de Mortinsart (Rhétien), visible
en Gaume, dans la coupe de Grendel. Le lecteur intéressé peut consulter les références ci-dessous.

- le guano: les déjections d'oiseaux et, dans une mesure moindre, de chauves-souris, peuvent dans certaines circonstances, former des
gisements de phosphate d'intérêt économique. La percolation dans le soubassement carbonaté des solutions dérivées du guano peut être
responsable d'une phosphatisation secondaire.

Pour en savoir plus

Sur un bone-bed rhétien en Gaume:

 C.J. Duffin, P. Coupatez, J.C. Lepage & G. Wouters, 1983. Rhaetian (Upper Triassic) marine faunas from "Le Golfe du Luxembourg"
in Belgium (preliminary note). Bull. Soc. belge Géol., 92 (4), 311-315.
 C.J. Duffin & D. Delsate, 1993. The age of the Upper Triassic vertebrate fauna from Attert (province of Luxembourg, Belgium). Serv.
Géol. Belgique Prof. Papers, 264, 33-44.

VII. Les sédiments ferrifères


INTRODUCTION

Comme dans le cas des phosphates, la plupart des roches sédimentaires contiennent une proportion mineure de fer. Ne sont actuellement
considérés comme minerais que les roches où la teneur en fer dépasse 15%. Comme le fer existe sous deux degrés d'oxydation, Fe++ (l'ion
ferreux) et Fe+++ (l'ion ferrique), son comportement est contrôlé par la géochimie des environnements sédimentaire et diagénétique.

La majorité des gisements ferrifères semblent s'être formée en milieu marin et beaucoup sont fossilifères. Un grand problème est cependant le
manque d'équivalents actuels: les seuls grands dépôts ferrifères actuels sont les nodules métallifères des grands fonds océaniques et le fer des
marais ("bog-iron") qui semblent être de peu d'importance géologique.

On distingue généralement deux grands types de dépôts ferrifères: les "banded iron formations" du Précambrien (BIF's) et les sédiments
ferrifères phanérozoïques. Les premiers sont typiquement d'épaisses séquences constituées de sédiments ferrifères alternant avec des cherts

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noirs, déposés dans de grands bassins intracratoniques; les seconds sont d'extension plutôt réduite et forment des unités plus minces,
généralement de nature oolithique.

D'une manière très générale, on observe que la formation de sédiments ferrifères est favorisée par de faibles taux de sédimentation, souvent
liés à des épisodes transgressifs, et par une forte altération chimique continentale (climat tropical). Il semble également qu'une corrélation
existe entre une faible concentration d'oxygène dans l'atmosphère et les époques de formation des gisements ferrifères: cette relation est
vérifiée pour le Précambrien, l'Ordovicien, le Dévonien, le Jurassique. Ce phénomène est la conséquence d'un apport accru de Fe++ à l'océan
par des eaux moins oxygénées.

GEOCHIMIE ET PETROGRAPHIE

On considère actuellement que la principale source de fer pour le bassin océanique est l'altération continentale des roches basiques et des sols
latéritiques. Dans les conditions Eh et pH de la majorité des eaux de surface, le fer est à l'état Fe+++, largement insoluble. Sa concentration en
solution est dès lors très faible, de l'ordre de 1 ppm pour l'eau de rivière et de l'ordre de 0,003 ppm pour l'eau de mer. Trois mécanismes de
transport du fer sont envisageables:

- sous la forme de films d'oxyde sur des particules détritiques;

- en liaison avec la matière organique;

- sous la forme de suspensions colloïdales d'hydroxydes qui précipitent par flocculation lors du mélange des eaux fluviales et marines.

Une fois déposé, le fer peut être remis en solution dans le sédiment si les conditions Eh-pH sont appropriées et être ensuite reprécipité sous la
forme de minéraux ferrifères. La Fig. VII.1 donne les conditions de stabilité de ces minéraux en fonction de l'Eh, du pH, de l'activité de S=
(pS2- =-log [S2-]) et de la pression partielle de CO2. (Rappelons qu'un des principaux facteurs affectant l'Eh des eaux est la teneur en matière
organique: sa décomposition bactérienne consomme de l'oxygène et génère des conditions réductrices). D'après ces diagrammes, on peut voir
que l'hématite est la forme stable dans des conditions modérément à fortement oxydantes, c-à-d dans un sédiment pauvre en matière
organique. Pour les minéraux comprenant du fer ferreux, les champs de stabilité sont fortement dépendants de la PCO2 et de la pS2- de la
solution. Dans les sédiments marins, le soufre est généralement disponible par la réduction bactérienne des sulfates et c'est la pyrite ou la
marcassite qui se forment; les carbonates de fer sont rares.

4 FeOOH + 4 SO4= + 9 CH2O → 9 HCO3- + H+ + 6 H2O + 4 FeS

FeS + H2S → H2 + FeS2

En environnement météorique (eaux douces), ce n'est pas le cas et les carbonates de fer sont plus fréquents. Cependant, même en milieu marin,
si tout le soufre est consommé, de la sidérite peut aussi se former. Un bon exemple est la cristallisation de sidérite dans certains marais
intertidaux actuels. Le développement des silicates de fer (glauconite,...) est encore sujet à hypothèses. Ajoutons enfin que beaucoup de ces
réactions d'oxydation et de réduction sont catalysées par la présence de populations microbiennes.

Figure : VII.1A: diagramme Eh-pH de stabilité du fer ferrique, du fer ferreux, de l'hématite, de la sidérite, de la pyrite et de la magnétite. Ce
diagramme montre que l'hématite est le minéral stable dans les environnements modérément à fortement oxydants. Pour des minéraux comme
la pyrite, la sidérite et la magnétite, stables en environnement réducteur, les champs de stabilité sont fortement dépendants du pH, mais aussi

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des concentrations en CO32- et S2-. Le cas illustré par le diagramme est celui d'une solution riche en CO32-et pauvre en S2-. Dans le cas
inverse, le champ de stabilité de la pyrite s'étend pour occuper la presque totalité de la partie inférieure du diagramme.Lorsque à la fois
CO32-et S2- sont en faible concentration, c'est le champ de la magnétite qui s'accroît. Bet C: champs de stabilité des minéraux ferrifères en
fonction (B) de l'Eh et de pS2- (-log de l'activité de S2- ) et en fonction (C) de l'Eh et de PCO2. D'après Krauskopf (1979) et Berner (1971),
cités par Tucker (1991).

D'un point de vue pétrographique, l'hématite (rouge vif en réflexion) se présente surtout en ooïdes et imprégnations secondaires de fossiles,
sauf dans les BIF's où elle peut former des lamines ou des niveaux massifs. La goethite (couleur jaune brunâtre) forme en général des ooïdes.
La limonite, un mélange de goethite, d'argiles et d'eau, est un produit de l'altération subaérienne des oxydes de fer.

La sidérite remplace généralement des ooïdes et des bioclastes et peut former des ciments. On observe soit des cristaux de grande taille à
clivage rhomboédrique (comme la calcite), soit des micro-rhomboèdres de taille micronique, soit encore des fibres regroupées en sphérulites.

La pyrite est facilement reconnaissable par ses cristaux cubiques et sa couleur jaune vif en réflexion; elle peut former des agrégats de
microcristaux appelés "framboïdes". La marcassite n'est fréquente qu'en nodules dans les craies et les charbons.

Les silicates de fer: les plus importants sont la berthierine-chamosite, la greenalite et la glauconite. La berthierine est un phyllosilicate du
groupe des serpentines (espacement réticulaire de 7 Å), riche en fer, tandis que la chamosite est une chlorite (espacement réticulaire de 14 Å),
avec Fe++ comme cation principal dans les sites octahédriques. La berthierine est un minéral primaire qui se transforme en chamosite à partir
de 120-160°C. Donc, si les sédiments ferrifères les moins anciens contiennent souvent de la berthierine, à partir du Paléozoïque, on ne trouve
plus que la chamosite. Berthierine et chamosite (toutes deux vertes et à faible biréfringence) forment souvent des ooïdes dans les sédiments
ferrifères phanérozoïques. Contrairement aux ooïdes aragonitiques, ces corpuscules paraissent être demeurés mous au cours de la diagenèse
précoce. On observe en fait fréquemment des ooïdes fortement déformés, voire même des fragments d'ooïdes déformés formant le nucleus
d'autres ooïdes. Les conditions de formation de ces ooïdes sont mal connues, mais on pense que la berthierine précipite directement dans le
sédiment en milieu anoxique pauvre en soufre.

La greenalite est un minéral probablement très proche de la berthierine-chamosite, verte et isotrope. on la trouve généralement en péloïdes,
mais on ne sait pas s'il s'agit d'un minéral primaire.

La glauconite est un alumino-silicate de fer et potassium avec un rapport Fe+++/Fe++ élevé. Certaines glauconites (dites ordonnées) sont des
phyllosilicates de type illites, mais la plupart forment des interstratifiés avec la smectite. La glauconite est généralement observée sous la
forme de péloïdes, de couleur verte, souvent pléochroïque et d'aspect microcristallin. La glauconite est fréquente dans les sables et grès et elle
se forme actuellement sur beaucoup de plates-formes continentales, à des profondeurs de quelques dizaines à quelques centaines de mètres,
dans des zones à sédimentation ralentie (au point de vue séquentiel, elle souligne souvent les " surfaces d'inondation maximales "). Comme
pour les autres silicates de fer, il s'agirait d'un milieu anoxique pauvre en soufre

FORMATIONS FERRIFERES PRECAMBRIENNES

Ces formations, de grande importance économique, se retrouvent sur les boucliers anciens de la plupart des continents. D'après des études
effectuées au Canada, deux types de gisements peuvent être distingués:

- un type lenticulaire, d'extension géographique relativement faible et associé à des roches volcaniques et des graywackes, d'âge 2500 à 3000
Ma;

- un type de grande extension régionale, déposé en contexte de plate-forme stable, d'âge 1900 à 2500 Ma.

Sur la base des minéraux ferrifères présents, il est possible de distinguer quatre faciès: (1) oxydé (hématite-magnétite), (2) silicaté (greenalite),
(3) carbonaté (sidérite) et (4) sulfuré (pyrite). Les minéraux primaires seraient respectivement un composé amorphe de type Fe(OH)3, la
berthierine, la sidérite et la pyrite en fonction des conditions géochimiques. On peut d'ailleurs observer, suivant l'augmentation de la
paléobathymétrie, une zonation oxyde et silicate-carbonate-sulfure. Un des faciès les plus spectaculaires consiste en laminations
millimétriques à centimétriques d'hématite alternant avec du chert. Certaines de ces laminations ont une extension de 30.000 km2.

Le gros problème de ces BIF's concerne le transport et l'origine du fer. On suppose que l'atmosphère précambrienne était pauvre en oxygène et
plus riche en dioxyde de carbone. La plus grande richesse en CO2 aurait diminué le pH des eaux de surface, avec comme conséquence une
altération continentale plus efficace. Le dépôt des lamines ferrifères pourrait être la conséquence d'upwellings, amenant des eaux anoxiques
riches en fer sur la plate-forme plus oxygénée, de précipitation microbienne ou encore, de phénomènes saisonniers de mélange d'eaux
(turnover) dans un océan ordinairement stratifié. Les lamines de chert pourraient quant à elles résulter de proliférations périodiques
d'organismes siliceux (blooms).

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Hématite et chert dans un BIF. Belo Horizonte, Brésil.

FORMATIONS FERRIFERES PHANEROZOÏQUES

Les plus importantes de ces formations sont les oolithes ferrifères, constituées d'hématite-chamosite dans le Paléozoïque et de goethite-
berthierine dans le Mésozoïque. On en recense deux épisodes majeurs, durant l'Ordovicien et le Jurassique. Il s'agit de périodes caractérisées
toutes deux par un haut niveau marin, de larges zones pénéplanés et un climat chaud et humide, responsable d'une importante altération
chimique continentale.

Un exemple fameux et proche de nous de ces oolithes ferrifères est la Minette de Lorraine et du Luxembourg. D'âge aalénien, sa puissance
varie de 15 à 65 m et on y observe plusieurs séquences.

En Belgique, la minéralisation est nettement moins développée. A Halanzy, l'Aalénien a 4,8 m de puissance et 4,5 m dans la région de
Musson-Grand Bois. On y constate l'existence de deux couches de minerai sous lesquelles apparaît une troisième lentille vers le milieu de la
concession de Musson. En limite des concessions de Musson et Halanzy, la couche supérieure a 2,15 m de puissance, la moyenne 1,35 m,
séparée par 0,4 m de marne ferrugineuse. Le minerai est constitué par des oolithes ferrugineuses rougeâtres à brun rouge, avec grains de quartz
émoussés. Le tout est dans un ciment argileux ou limoniteux, voire calcaire. Parfois, on trouve des débris coquilliers en calcite. On aurait
observé en outre la présence de glauconie au toit de la couche supérieure dans le centre des oolithes. Les stériles différent seulement par la
rareté ou l'absence d'oolithes ferrugineuses.

Modèle génétique de la Minette: "Le territoire où se situe le gisement lorrain représentait à la fin du Toarcien la bordure littorale d'une mer
couvrant le bassin de Paris. Du NE, par la dépression eifelienne, arrivaient un ou plusieurs fleuves importants. Le bassin ferrifère se situait à
l'emplacement de leur embouchure. On peut représenter (...) le paysage comme une aire très plate soumise à l'influence des marées. Les eaux
fluviatiles se frayent un chemin vers la mer (...) Dans ces chenaux s'opère, au rythme des marées, la rencontre des eaux marines et fluviales.
Les courants ne sont intenses qu'en certains endroits entre lesquels apparaissent des bancs de sable à stratification oblique (...) En dehors des
chenaux, sur les aires plates, les sédiments sont soumis à un mouvement de va et vient, avec exondation temporaire: c'est la slikke vaseuse. Le
courant marin sur le flanc de la lentille, où son action est dominante, apporte des sédiments marins et en particulier des débris de coquille et
des grains de quartz. Les courants fluviatiles apportent le fer qui précipite dans cette zone en oolithes ferrugineuses. La phase qui précipite a
donc une origine continentale (hydroxyde de fer). Les processus diagénétiques transforment la limonite en hématite, sidérose puis magnétite,
lorsque la limonite est en excès; en chlorite et sidérose dans un sédiment fin et argileux (Waterlot et al., 1973). Signalons que d'après Teyssen
(1984), la minette s'est formée en environnement subtidal, sous la forme de rides sableuses montrant une séquence de type coarsening upward
(boue-faciès de transition-minette-faciès coquillier). Ces séquences sont également caractérisées par une augmentation du contenu bioclastique
et par une diminution de la bioturbation.

Accessoirement, dans les formations ferrifères phanérozoïques, il faut encore citer les argilites et shales riches en sidérite, correspondant
vraisemblablement à des environnements lagunaires, estuariens, voire deltaïques. La sidérite peut s'y manifester en cristaux dispersés, en
nodules ou en bancs plus ou moins continus.

Ooides hématitiques, Formation de Presles, Frasnien, Tailfer.

FORMATIONS FERRIFERES ACTUELLES

FER DES MARAIS

Les seuls dépôts ferrifères de quelqu'importance (avec les nodules océaniques) à se développer de nos jours sont donc les "bog iron ores". Ces
sédiments s'observent dans les lacs et marais des latitudes moyennes à élevées, comme l'Amérique du Nord, l'Europe et l'Asie.

La nature du minerai est assez variable, variant depuis des ooïdes et des pisoïdes jusqu'à une forme terreuse. Le minéral prédominant semble
être la goethite, suivie par la sidérite. Contrairement à la plupart des autres formations ferrifères, le contenu en manganèse est assez élevé,
atteignant fréquemment 40%. Le fer des marais se forme lorsque des aquifères acides se déversent dans des lacs et marais relativement mieux
oxygénés. L'augmentation de Eh et pH qui en résulte est reponsable de la précipitation du fer ferreux en solution, sous la forme d'hydroxydes
de fer.

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A: précipitation d'hydroxydes de fer à l'intervention de bactéries (filaments) dans un marécage (Islande); B: nodule polymétallique.

NODULES POLYMETALLIQUES

Les nodules polymétalliques, appelés aussi "nodules de manganèse" s'observent dans différents types d'environnements océaniques profonds,
situés souvent à quelques centaines de m sous la CCD et caractérisés par une vitesse de sédimentation très faible. Il s'agit de concrétions de 1-
10 cm de diamètre, constituées d'oxydes de Fe et Mn, accompagnés de Ni, Cu et Co (ces nodules constituent d'ailleurs -hélas- d'importantes
réserves de ces métaux). On constate aussi la présence d'argile et de tests d'organismes planctoniques. Le nucleus des concrétions est
habituellement un fragment d'origine organique (dent de poisson, etc.) Beaucoup de nodules ont leur partie supérieure (au contact des eaux
océaniques) enrichie en Fe et Co et leur partie inférieure (au contact du sédiment), riche en Fe et Mn ce qui suggère des échanges chimiques
entre les nodules et leur environnement. De plus, la composition des nodules est variable selon leur localisation (les nodules Pacifiques sont
plus riches en Mn, Co et Cu, au contraire des nodules Atlantiques qui sont plus riches en Fe).

La vitesse de croissance des nodules polymétalliques est extraordinairement lente, de l'ordre de quelques mm par million d'années! C'est
beaucoup plus lent que la vitesse de sédimentation des sédiments océaniques sur lesquels on les observe et cela pose évidemment le problème
de leur présence en surface. Plusieurs hypothèses ont été proposées pour expliquer ce paradoxe: dissolution-reprécipitation à l'interface eau-
sédiment; érosion des sédiments par des courants de fond; migration des nodules vers la surface par l'effet de la bioturbation. Le mécanisme de
formation des nodules lui-même est encore peu connu: précipitation sous l'effet de conditions oxydantes (arrivée d'eaux oxygénées); activité
bactérienne (ce seraient dans ce cas des "oncoïdes Fe-Mn"); recyclage et remontée en surface de solutions formées dans des zones plus
réductrices du sédiment. Signalons enfin que beaucoup de nodules montrent des signes de déplacement (orientation préférentielle, cassures,
granoclassement,...)

densité environ 2
porosité 30-50%
concentration (zones d'intérêt économique) 7 kg/m2
Mn 29,5% Al 1,12%
Fe 6,34% K 0,8%
Si 4% Ti 0,3%
Na 2,92% Co 0,25%
Mg 2,88% S 0,23%
Ca 1,44% P 0,14%
Ni 1,40% Zn 0,14%
Cu 1,16% Mo 0,06%
Tableau VII.1: données générales concernant les nodules polymétalliques (d'après Chamley, 1990).

Pour en savoir plus

Sur l'influence microbienne dans la précipitation de minéraux ferrifères:

 D. Fortin & S. Langley , 2005. Formation and occurrence of biogenic iron-rich minerals. Earth-Science Reviews, 72, 1-19.
 F. Boulvain., C. De Ridder., B. Mamet, A. Préat, & D. Gillan, 2001. Iron microbial communities in Belgian Frasnian carbonate
mounds. Facies, 44, 47-60.

Sur la Minette de Lorraine:

 T. Teyssen, 1984. Sedimentology of the Minette oolitic ironstones of Luxembourg and Lorraine: a Jurassic subtidal sandwave
complex. Sedimentology, 31, 195-211.
 G. Waterlot, A. Beugnies et J. Bintz, 1973. Ardenne-Luxembourg. Guides géologiques régionaux, Masson, 206 pp.

Sur les oolithes ferrugineuses du Famennien du Massif de la Vesdre:

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 R. Dreesen, 1987. Event-stratigraphy of the Belgian Famennian (Uppermost Devonian, Ardennes shelf). In: A. Vogel, H. Miller, R.
Greiling (eds.): The Renish Massif, Vieweg, 22-36.

VIII. Les grands environnements de dépôt des carbonates


INTRODUCTION

Comme dans les autres domaines de la sédimentologie, un fondement essentiel de l'interprétation des paléoenvironnements carbonatés se
trouve dans l'étude approfondie des modèles actuels. Le but du présent chapitre est d'introduire brièvement les grands environnements de
dépôt des carbonates. Certains de ces environnements seront traités plus en détail aux chapitres suivants.

Dans une première approche d'ensemble, deux grands domaines s'individualisent de part et d'autre du trait morphologique important qu'est le
rivage: le domaine continental et le domaine marin.

LE DOMAINE CONTINENTAL

Le domaine continental se caractérise par des dépôts souvent très localisés. Bien que ce domaine ne présente en général que peu de sédiments
carbonatés, on citera les dépôts lacustres, fluviatiles, glaciaires (moraines,...), désertiques, karstiques, de grottes. Il est en outre soumis à
l'action des phénomènes météoriques, ce qui est à l'origine d'importantes transformations diagénétiques (voir ce chapitre). Un chapitre spécial
sera réservé dans la suite du cours à la pédogenèse.

CARBONATES LACUSTRES

Les carbonates lacustres (eaux douces et salées) sont le résultat de précipitations inorganiques ou d'accumulations algaires ou coquillières.

- Les précipitations inorganiques peuvent être liées à une soustraction de CO2 (photosynthèse,...), à un mécanisme d'évaporation ou encore au
mélange d'eaux à pH différents (lac/rivière, par exemple). L'équation suivante est une notation simplifiée de l'équilibre des carbonates:

CaCO3 + H2O + CO2  Ca++ + 2 HCO3-

Le rapport Mg/Ca détermine le minéral précipité: Mg/Ca<2 précipitation de calcite (ex. Lac de Constance); Mg/Ca de 2 à 7 calcite Mg (Lac
Balaton); Mg/Ca de 7 à 12 calcite Mg et dolomite par transformation de calcite Mg; Mg/Ca>12 aragonite.

- Les carbonates algaires sont le résultat de:

 la biocorrosion d'un substrat carbonaté par des cyanophycées, des chlorophycées, des rhodophycées, des champignons ou des lichens,
donnant naissance à des sédiments carbonatés de la taille des silts;
 des phénomènes de piégeage de sédiments et de précipitation par des mousses et des stromatolithes;
 la formation d'oncoïdes (cyanophycées et algues vertes non squelettiques) avec incorporation de coquilles et débris carbonatés;
 des accumulations d'oogones de charophytes (gyrogonites).

- Les accumulations de coquilles (gastéropodes, lamellibranches) sont du même type qu'en milieu marin. Elles ne forment jamais qu'une faible
proportion des carbonates lacustres.

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A: Calcaire de Ventenac (Eocène, Minerve); un niveau de lignite interrompt la sédimentation lacustre. B: oncolithe fluviatile (Eocène,
Coustouge).

TUFS ET TRAVERTINS

Au débouché de certaines sources, ou plus rarement en rivière, se forment des précipitations de calcite. Ces accumulations peuvent être
constituées de lamines denses et régulières (travertin) ou de matériau très poreux et irrégulier (tuf) Un bel exemple de tuf est visible en
Lorraine belge: la "Cranière" de Lahage. Il semble admis que les processus de précipitation inorganiques dominent dans le cas des travertins
(perte de CO2) tandis que les tufs se forment par précipitation de calcite sur des mousses ou des algues.

Cranière de Lahage; A: vue générale du dépôt; B: production actuelle de travertin.

GROTTES

Les concrétions aragonitiques de grottes (speleothems) peuvent être identifiées, même après leur transformation en calcite, par leur
morphologie (planchers, stalactites, stalagmites, pisoïdes) et par l'alternance de lamines de fibres peu allongées et de fibres très allongées,
atteignant plusieurs centimètres.

CALICHES, CALCRETES, voir également le cours de "processus sédimentaires".

On appele "caliche" ou "calcrete" un paléosol en environnement carbonaté. L'identification des paléosols est importante dans l'analyse des
bassins sédimentaires: leur présence témoigne en effet d'une émersion de longue durée. Une série de critères permet leur mise en évidence. Il
faut garder cependant à l'esprit qu'en général, la présence d'un seul de ces critères n'est pas une preuve définitive d'émersion ou de pédogenèse.
N'oublions pas aussi que les témoins d'émersion sont rarement conservés dans l'enregistrement sédimentaire: ils sont souvent remaniés par la
transgression marine qui suit l'épisode continental.

Les critères d’émersion tirés de la littérature ont été classés en cinq catégories: les critères sédimentologiques, pédogénétiques,
paléontologiques, diagénétiques et géochimiques. Certains critères sont observables macroscopiquement (M) et d’autres microscopiquement
(m).

Critères sédimentologiques d'émersion

 Discontinuité angulaire et/ou érosion;


 changements brutaux de faciès (M et m);
 présence de chenaux et/ou de remaniements (M);
 faciès continentaux (palustres, lacustres, fluviatiles,…) (M et m);
 présence d’évaporites ou de pseudomorphoses d'évaporites (M et m);
 présence dans la roche sus-jacente d’intraclastes perforés et/ou minéralisés, ainsi que de bioclastes remaniés;
 horizons bauxitiques;
 surface karstique.

Critères pédogénétiques

 Bréchification (M); les niveaux bréchiques sont une caractéristique importante des paléosols et sont liés à des alternances de périodes
sèches et humides;
 horizons carbonatés massifs ou horizons carbonatés laminaires (M);
 marbrures et nodules (M);
 enduits minéralisés et cailloux noirs (M);
 fissures de dessiccation (M);
 traces de racines (M et m);
 présence de Microcodium (m);
 "circumgranular cracks" et "syneresis cracks" (m); les fractures courbes autour de certains clastes témoignent d’une précipitation

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carbonatée en milieu aquatique, suivie d'une phase de dessiccation qui engendre les structures courbes autour des clastes, suivie à
nouveau d'une immersion avec précipitation de ciment;
 microsparitisation (m);
 calcite en micro-fibres (m);
 structures alvéolaires (m);
 traces d'illuviation (migration et concentration des argiles vers les horizons inférieurs); la présence de "coulées" argileuses,
caractéristiques du phénomène d'illuviation, est propre aux paléosols (M et m);
 concentrations locales de pelloïdes (glaebules) (m); leur présence résulterait de la fragmentation de la micrite par dessiccation;
 minéralisations diverses: principalement pyrite et hématite (M et m);
 pisolites (m);
 cimentation vadose (m).

Critères paléontologiques

 Présence de charophytes et d’ostracodes d’eau douce (m) indiquant le développement de lacs sur la plate-forme de faible profondeur
d’eau, partiellement émergée;
 analyse micropaléontologique fine qui indiquerait une lacune sédimentaire (m).

Critères diagénétiques

 Différence de compaction des roches sous- et sus-jacentes;


 cimentation vadose (m);
 présence d’argile verte dans la roche sous-jacente, essentiellement de l’illite, qui serait liée à la transformation d’un matériel
pédogénique.

Critères géochimiques

 δ18O: les rapports isotopiques de l’oxygène de l’eau varient selon le climat et le taux d’évaporation. Une évaporation importante
conduit à des rapports isotopiques plus élevés au sein des zones où cette évaporation est active (sebkhas, marais salants, ….). Par
contre, les eaux météoriques résultant de cette évaporation montreront des valeurs plus faibles;
 δ13C: les rapports isotopiques du carbone sont essentiellement en relation avec les processus organiques, dont la photosynthèse. Ainsi,
le carbone organique montre des rapports isotopiques faibles et les carbonates marins des valeurs plus élevées. Des rapports
isotopiques très bas peuvent être produits par un processus de fermentation conduisant à la formation de méthane. Le lessivage de sols
conduit également à des rapports isotopiques faibles;
 variations de susceptibilité magnétique; une émersion peu conduire à un remaniement des sédiments et à la remobilisation de toute une
série de minéraux magnétiques, qui produiront un signal de susceptibilité plus élevé. De plus, les transformations pédogénétiques
peuvent conduire à la formation de minéraux tels que la magnétite, l’hématite et la pyrite qui augmenteront également le signal
magnétique.

LE DOMAINE MARIN

On y distingue essentiellement un milieu de plate-forme et un milieu de bassin séparés par un talus. La différenciation de ces termes est
morphologique, mais en gros, d'un point de vue bathymétrique, on peut dire que la profondeur varie de 0 à environ 200 m sur la plate-forme;
le bassin étant caractérisé par des profondeurs plus importantes.

La morphologie des plates-formes est sujette à variation, de même que la nature et la géométrie des corps sédimentaires qui s'y déposent. Une
nette distinction sédimentologique peut être effectuée entre plates-formes carbonatées tropicales et plates-formes carbonatées tempérées. Lees
& Buller (1972) opposent un modèle CHLOROZOAN à un modèle FORAMOL (Fig. VIII.1).

LES PLATES-FORMES CARBONATEES TEMPEREES

Ces dernières sont actuellement nettement moins connues que leurs homologues tropicales. Certaines de ces plates-formes (sud de l'Australie,
ouest de l'Irlande) couvrent pourtant des milliers de km2 de fonds marins.

D'après Lees & Buller (1972), les principaux groupes d'organismes représentés dans les sédiments y sont: les mollusques, les foraminifères
benthiques, les échinodermes, les bryozoaires, les barnacles, les ostracodes, les spicules (calcaires) d'éponges, les tubes de vers et les coraux
ahermatypiques pour les animaux, les algues rouges (Lithothamnium) pour les plantes. Les foraminifères et les mollusques étant généralement
dominants, cette association est appelée "foramol". En eau tropicale, cette association s'enrichit notablement en coraux et/ou algues vertes
calcaires (ex: Halimeda), tandis que la contribution des bryozoaires et barnacles diminue considérablement: on a l'association
"chlorozoan" (chlorophytes + zoanthaires).

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Concrétions calcaires dues à des Lithothamnium (flèches) dans une mare côtière (Ile Grande, Bretagne).

En ce qui concerne les grains non squelettiques (peloïdes, ooïdes, aggrégats,...), ils semblent être largement liés à l'association chlorozoan,
sauf peut-être pour les péloïdes qui peuvent déborder sur l'association foramol. La micrite est constituée d'aragonite et de calcite magnésienne
dans le domaine tropical, tandis qu'en domaine tempéré, l'aragonite devient beaucoup plus rare. La cimentation est faible en milieu tempéré.

Signalons que dans l'océan actuel, le carbonate de précipitation chimique est l'aragonite (suite à un rapport Mg/Ca élévé, cf. compléments de
sédimentologie). Ceci ne veut évidemment pas dire que toute boue calcaire d'origine marine est aragonitique puisque la dégradation des tests
des organismes fournit une part importante des sédiments fins et que ces tests peuvent être calcitiques. Le tableau VIII.1 donne la composition
des test des principaux organismes calcaires.

Calcite (mol% Aragonite et


TAXON Aragonite MgCO3) calcite
ALGUES CALCAIRES
rouges 10-20
vertes oui
coccolithes 5
FORAMINIFERES
benthiques rare 5-15
planctoniques 5-17
EPONGES rare 10-20
STROMATOPORES oui 5?
COELENTERES
rugueux 5
tabulés 5
scléractiniaires oui
alcyonaires rare 10-20
BRYOZOAIRES rare 5-17 rare
BRACHIOPODES 5-10
MOLLUSQUES
chitons oui
lamellibranches oui 5-10 oui
gastéropodes oui 5-10 oui
ptéropodes oui

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céphalopodes oui
bélemnites 5
ANNELIDES oui 5-17 oui
ARTHROPODES
décapodes 7-12
ostracodes 5-10
barnacles 5-10
trilobites 5
ECHINODERMES 7-17
Tableau VIII.1: types de carbonates précipités par les principaux groupes d'organismes. D'après Scholle (1978), modifié.

Concernant la répartition des deux associations, il semble que chlorozoan soit limitée aux latitudes inférieures à 30°, tandis que foramol puisse
s'étendre entre 60° et l'équateur. Une étude plus fine des facteurs limitant chlorozoan montre que c'est en conjugant une température océanique
minimale supérieure à 14-15°C et une température moyenne annuelle supérieure à 23°C que l'on cerne le mieux l'aire de répartition. Il ne faut
pas oublier évidemment que sous la zone photique, l'association chlorozoan disparaît.

Fig. VIII.1: répartition des assemblages "foramol" et "chlorozoan" dans l'océan mondial et comparaison avec la répartition de grains
caractéristiques.

LES PLATES-FORMES CARBONATEES TROPICALES

Les facteurs du milieu

L'action différentielle de certains facteurs de l'environnement sur les plates-formes carbonatées permet de définir un certain nombre de sous-
environnements (Fig. VIII.4). Ces facteurs particuliers sont la morphologie, l'hydrodynamisme, le chimisme (salinité, oxygénation) et la
pénétration de la lumière. Les multiples possibilités de variation de ces facteurs expliquent la diversité des plates-formes carbonatées. Il ne
faut donc pas raisonner à partir d'un modèle figé.

- La morphologie de la plate-forme: contrôlée essentiellement par l'existence, l'absence ou la localisation variable d'une barrière ou d'un haut-
fond plus ou moins continu (Fig. VIII.2). Cette barrière revêt une géométrie et une nature variable et complexe. L'existence d'un relief a une
influence directe sur le niveau d'énergie, le chimisme des eaux (salinité, oxygénation) et l'activité biologique: il entraîne la distinction entre un
milieu de plate-forme interne et un milieu de plate-forme externe ou de bassin. En l'absence de rupture de pente nette, la profondeur augmente
de façon progressive depuis le littoral jusqu'au bassin: on parle alors de rampe.

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Fig. VIII.2: morphologie des rampes et plates-formes carbonatées.

Il est à noter que le vocabulaire anglais est plus précis: les "carbonate platforms" regroupent à la fois les "ramps" (sans rupture de pente) et les
"shelves" (avec rupture de pente). En français, nous ne disposons que du terme plate-forme que l'on doit donc opposer à rampe. On peut
éventuellement regrouper rampe et plate-forme s.s. au sein des "plates-formes s.l."...

PLATE-FORME AVEC BARRIERE RAMPE


rupture de pente pas de rupture de pente
présence d'une barrière continue pas de barrière continue
énergie forte près de la barrière, diminue vers le énergie forte près du rivage, formation de
rivage bancs ("shoals")
bioconstructions=surtout bafflestones,
barrière=surtout framestones
bindstones
turbidites, blocs exotiques provenant de la
peu de turbidites, pas d'olistolithes, tempestites
barrière
sédiments lagunaires cycliques de grande sédiments restreints peu étendus, non
extension géographique cycliques.
Tableau VIII.2: exemples de différences sédimentologiques entre rampe et plate-forme s.s.

- Les facteurs dynamiques: ils comprennent vents, courants de vagues et de marées. Leur résultat est surtout un tri granulométrique. La
granulométrie des sédiments et certains types de figures sédimentaires donnent donc des informations importante quant au niveau d'énergie du
milieu, souvent en relation avec la profondeur et le degré de protection.

- Le chimisme des eaux: la sursalure, le manque d'oxygénation des eaux entraînent de profondes modifications dans le contenu faunistique, ce
qui peut conduire à distinguer:

 un milieu ouvert: la circulation des eaux marines n'est pas entravée;


 un milieu restreint: la circulation des eaux marines est entravée et en conséquence leur qualité subit des modifications plus ou moins
importantes.

Ces distinctions s'entendent même en dehors de toute considération morphologique du type barrière, par exemple dans le cas d'une plate-forme
très étendue.

Le contenu en nutriments des eaux est aussi un paramètre très important. Ce paramètre permet de distinguer des environnements
oligotrophique, mésotrophique, eutrophique et hypertrophique (Fig. VIII.3). En milieu oligotrophique, relativement pauvre en nutriments, les
processus de recyclage de la nourriture sont essentiels et les organismes capables d'utiliser plusieurs sources d'énergie sont favorisé (exemple:
les coraux hermatypiques qui outre leur caractère hétérotrophe, profitent de la photosynthèse de leurs algues symbiotiques); le facteur limitant
dans ce type d'environnement est l'apport de nutriments. En milieu mésotrophique, l'apport de nutriments est plus important et d'autres
organismes interviennent: algues, faune benthique plus riche; le facteur limitant est la compétition pour l'espace disponible. En milieu

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eutrophique, l'apport en nutriment est suffisant pour que se développe largement le phytoplancton; le facteur limitant est la lumière et la
profondeur de la zone photique et enfin, en milieu hypertrophique, le développement de phytoplancton et l'accumulation de la matière
organique sont tels que la dégradation de cette matière consomme une bonne part de l'oxygène du sédiment, limitant la vie benthique; dans ce
dernier cas, le facteur important est la teneur en oxygène.

Fig. VIII.3: communautés organiques et nutriments dans les eaux tropicales et équatoriales.

- L'influence de la lumière: la pénétration de la lumière permet également de distinguer deux domaines entre lesquels les conditions
biologiques varieront considérablement: un domaine photique et un domaine aphotique. L'absorption de la lumière par l'eau est sélective: les
infrarouges sont absorbés dans le premier mètre, tandis que les longueurs d'ondes plus courtes (bleu) pénètrent relativement profondément
dans l'océan (plus de 100m). Les différents organismes n'utilisant pas les mêmes longueurs d'onde en fonction de leur pigment (algues rouges
et algues vertes, par exemple), l'étendue de la zone photique est variable suivant les communautés considérées.

Il est évident que certains facteurs ne sont pas indépendants les uns des autres et que l'édification d'un accident topographique continu
(barrière, banc, récif, seuil) aura une incidence sur le chimisme des eaux et sur leur dynamique. Dès ce moment, la plate-forme interne sera à
circulation restreinte. Si la barrière est de nature algaire (algues vertes, cyanobactéries) ou récifale (coraux, algues rouges), elle ne pourra
s'établir que dans le domaine photique. Même si les eaux sont peu turbides et claires, les profondeurs d'implantation n'excéderont pas quelques
dizaines de mètres.

Les grands environnements de dépôt

L'action des facteurs du milieu est à l'origine de la différentiation des environnements au sein des plates-formes. Pour les mers où la marée est
sensible, on distingue sur la plate-forme interne (Fig. VIII.4):

 un milieu supratidal: très épisodiquement envahi par les hautes marées de vives eaux. Différents types de milieux particuliers
s'inscrivent dans ce domaine, tels que: sebkha, étangs côtiers,... Les dépôts que l'on y trouve sont plus ou moins développés en fonction
du profil de la côte. Leur nature est fortement influencée par le climat (par exemple: climat aride=possibilité de sebkha, climat
humide=platier algaire). La présence à la fois d'eaux douces et salées en font un milieu particulièrement favorable à la diagenèse
précoce;
 un milieu intertidal: correspondant à la zone de balancement des marées. Les périodes d'exhondaison et d'ennoyage se marquent par
des dépôts et des faciès typiques (birdseyes, etc.), parfois rythmiques. C'est un milieu où la vie est généralement abondante, mais où les
conditions écologiques sont extrêmement difficiles du fait des alternances entre émersion et immersion, des variations de température,
d'insolation, de salinité, de pH, de chimisme des eaux. Seuls des organismes spécialement adaptés peuvent y survivre. L'influence du
climat est toujours importante, par exemple en ce qui concerne le développement des tapis algaires, localisés dans l'intertidal en climat
aride, dans le supratidal en climat plus humide (voir chapitre XII). C'est dans ce milieu intertidal que l'on rencontre les estrans, plages,
chenaux de marée, levées, mangroves, etc. C'est aussi avec le milieu supratidal un environnement privilégié de la diagenèse précoce.
L'énergie des dépôts y est généralement élevée; toutefois, suivant l'ampleur des marées, la direction des vents et des courants, la
présence ou non d'une barrière, les caractères propres à ce milieu tendront à s'estomper et à se confondre avec ceux du milieu subtidal;
 un milieu subtidal: dans ce milieu, l'énergie est variable en fonction de la profondeur. La diversité des faciès, liée au gradient
hydrodynamique, reste importante. La faune et la flore y sont variées. Des organismes comme les éponges et les échinodermes
deviennent plus abondants. On observe également l'apparition de quelques formes pélagiques. Au point de vue chimique, aux faciès
carbonatés et évaporitiques peuvent s'ajouter des faciès enrichis en silice, phosphates, oxydes de fer,...

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A: sebkha en milieu supratidal (El Melah); les bords rebroussés des polygones métriques sont dûs à la croissance d'évaporites dans le
sédiment; B: mangrove et palétuviers en milieu intertidal; observer les échasses servant à assurer la stabilité des arbres dans la boue
carbonatée (Laing), photo A. Herbosch.

La barrière isole ensuite la plate-forme interne de la plate-forme externe où l'environnement est beaucoup plus stable et homogène, en liaison
avec le milieu océanique. Les organismes pélagiques deviennent prépondérants et les sédiments sont généralement fins, situés sous la zone
d'action des vagues. La teneur des eaux en nutriments contrôle la productivité organique.

Fig. VIII.4: répartition des environnements sur une plate-forme avec barrière.

Critères de caractérisation des milieux de dépôt

- Critères liés aux facteurs biologiques: le type de communauté organique renseigne sur la bathymétrie par la présence ou l'absence
d'organismes photosynthétiques , sur l'agitation du milieu (formes robustes ou délicates), sur la température (foramol-chlorozoan) et sur la
teneur des eaux en nutriments (Fig. VIII.3).

Dans le cas d'un profil complexe, à barrière, les critères biologiques peuvent contribuer à distinguer les zones internes par rapport au reste du
profil. Le rôle d'écran joué par la barrière (organismes coloniaux constructeurs) permet généralement de différencier le milieu subtidal interne
(organismes spécialisés) du milieu marin ouvert qui est le domaine de vie des organismes pélagiques. L'utilisation (réfléchie) de modèles de
répartition de la faune et de la flore trouve ici sa pleine justification (voir exemples).

Si le profil est plus simple (sans barrière), la distinction entre plate-forme interne et externe est parfois difficile. Le passage peut être graduel et
correspondre à une limite d'énergie entre un milieu peu profond et un milieu plus profond. La distinction entre ces milieux différents est alors
basée sur la fréquence et l'oligospécificité d'organismes benthiques, plus forte en plate-forme interne et sur la fréquence des algues, également
plus grande en plate-forme interne.

- Critères liés aux facteurs physiques (dynamisme des eaux): le niveau d'énergie est estimé en général en fonction de la taille, de la densité et
de l'angularité des grains d'une part et de la présence ou non d'un matériau fin d'autre part (absence ou présence de boue primaire). Cependant,
à la différence des séries détritiques, l'origine même des carbonates joue évidemment un rôle important et ne permet pas d'établir un rapport
direct entre le niveau d'énergie et le faciès. Les variations du niveau d'énergie seront donc définies par estimation de la proportion relative du
matériau fin et des grains, en relation avec leurs caractéristiques morphologiques initiales. Il faut toujours se rappeler que les éléments pris en
considération doivent être critiqués en fonction d'autres facteurs possibles: taille des bioclastes et angularité fonction de leur origine, micrite
d'origine secondaire, par microsparitisation d'un grainstone par exemple. Ceci permet en général de déterminer si les sédiments étudiés se sont
déposés en eau calme ou agitée, sans indication d'environnement particulier. Dans le cas d'un profil de plate-forme complexe, le gradient des
niveaux d'énergie est discontinu: la plate-forme externe et la barrière présentent des niveaux d'énergie forts, comparables à ceux de l'intertidal,
alors que ceux de la plate-forme interne sont faibles. Un niveau d'énergie faible peut être significatif d'un dépôt en eau profonde, sous la zone
d'action des vagues ou bien, au contraire, caractériser un dépôt en eau très peu profonde dans un domaine protégé par la présence d'une
barrière.

LE TALUS

L'étude détaillée des talus est loin d'être achevée. Outre les plongées profondes, ce domaine exige l'emploi de méthodes sismiques lourdes.

Le talus possède une pente moyenne de 0,7 à 1,3 m par km et s'étage d'environ 130 m à environ 2000 m, c'est-à-dire sous la zone photique et
sous la zone d'action des vagues. Une sédimentation déclive complexe caractérise donc les talus: mise en place de turbidites par glissements

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liés à la gravité, à des cisaillements mécaniques ou à des contraintes tectoniques, séismes, etc. Ces épandages sont accompagnés de coulées de
sédiments, slumps, blocs, olistholithes,... Le talus est de ce fait essentiellement une zone de transit des sédiments. A la base des talus, les
dépôts du glacis continental sont étalés sous la forme d'éventails deltaïques profonds. Ce sont des prismes détritiques bathyaux, coincés contre
la base du talus et s'épandant vers les fonds océaniques moyens. Leur superficie est parfois considérable, avec chenaux d'épandages,
interfluves, ravinements intraformationnels et slumps.

LE BASSIN

La température des eaux y est pratiquement constante et comprise entre -1° et 4°C. Au point de vue biologique, on y observe une dominance
des organismes pélagiques. Le benthos est réduit, sauf pour certaines communautés spécialisées: certains types de crinoïdes, récifs profonds à
Lophelia (ch. XI). On note l'absence totale d'algues, naturellement.

Par rapport aux eaux baignant les plate-formes, en général bien oxygénées par l'agitation due aux vagues et la production photosynthétique
d'oxygène, les eaux plus profondes peuvent présenter des phénomènes de sous-oxygénation. Un élément important est la présence de la zone
d'oxygène minimale (ZOM), résultant de la consommation d'oxygène par la respiration des organismes et surtout par la décomposition de la
matière organique. Cette ZOM se développe dans l'océan actuel entre -500 et -1200 m environ. Les fonds baignés par des eaux sous-
oxygénées se caractérisent par des sédiments anoxiques (sombres et non bioturbés). Rappelons qu'au contraire, la présence d'eaux arctiques ou
antarctiques de fond, froides, denses et salées, contribue à l'oxygénation des fonds océaniques.

En ce qui concerne l'équilibre des carbonates, le degré de saturation de la calcite est inversément proportionnel à la profondeur, quel que soit
le type d'océan concerné. L'augmentation de la pression et l'abaissement de la température augmentent le taux de solubilité du CaCO3, d'où
une tendance à la décalcification générale des sédiments à partir d'une profondeur critique appelée "lysocline" (on note une très brusque
diminution du CaCO3 vers -4000 à -5000 m). Dans les sédiments, la lysocline peut être définie par le passage d'un faciès à organismes
carbonatés bien préservés à un faciès à organismes partiellement dissous (Fig. VIII.5). Inversément, le contenu en SiO2 et phosphates
augmente progressivement avec la profondeur. Des concentrations en Fe et Mn, sous l'influence de mécanismes bactériens, sont également
possibles.

Il faut remarquer que la dissolution des tests carbonatés est sélective et dépend de paramètres comme la minéralogie (par résistance croissante:
aragonite-calcite Mg-calcite), la taille, la présence éventuelle d'enduits organiques, la présence de courants de fond froids qui favorisent la
dissolution. Cette particularité permet de subdiviser la lysocline en plusieurs zones caractérisées par la nature des tests préservés (exemple: de
bas en haut: lysocline des coccolithes, lysocline des foraminifères).

En conséquence, les sédiments océaniques profonds ne peuvent être constitués de boues carbonatées qu'au-dessus de la lysocline. Il s'agit alors
essentiellement de débris d'organismes planctoniques: coccolithes, foraminifères (globigérines), ptéropodes. Au-dessous ou à des latitudes non
favorables, s'observent des boues à radiolaires et diatomées (eupélagique) et des boues terrigènes (hémipélagique) auxquelles s'ajoutent des
turbidites (Fig. V.1). Il semble qu'un autre facteur important de la formation de carbonates profonds soit la précipitation de ciments (calcite
Mg et surtout calcite) dans des zones à sédimentation très ralentie.

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Fig. VIII.5: profondeur de la CCD dans l'océan mondial et relation entre lysocline et CCD.

Pour en savoir plus

 J.J. Fornos & W.M. Ahr, 1997. Temperate carbonates on a modern, low-energy, isolated ramp: the Balearic platform, Spain. J. of
Sedimentary Research, 67, 364-373.
 A. Lees & A.T. Buller, 1972. Modern temperate-water and warm-water shelf carbonate sediments contrasted. Marine Geology, 13,
M67-73.
 M. Mutti & P. Hallock, 2003. Carbonate systems along nutrient and temperature gradients: some sedimentological and geochemical
constraints. Int. J. Earth Sci., 92, 465-475.
 B.H. Purser, 1980. Sédimentation et diagenèse des carbonates néritiques récents. Tome 1: les éléments de la sédimentation et de la
diagenèse. Ed. Technip, 367 pp.
 B.H. Purser, 1983. Sédimentation et diagenèse des carbonates néritiques récents. Tome 2: Les domaines de sédimentation carbonatée
néritique récents; application à l'interprétation des calcaires anciens. Ed. Technip, 389 pp.
 A.N. Strahler & A.H. Strahler, 1983. Modern physical geography. John Wiley & Sons, 532 pp.
 J.L. Wray, 1979. Paleoenvironmental reconstructions using benthic calcareous algae. Bull. Cent. Rech. Explor. Prod. Elf-Aquitaine, 3
(2), 873-879.
 http://www.ig.uit.no/~bjarne/Rafaelsen&Nielsen_2005_ver_1_01.html

IX. Description et interprétation des paléoenvironnements carbonatés


CLASSIFICATION DES ROCHES CARBONATEES

Les roches carbonatées peuvent être classées en fonction de leur composition chimique ou minéralogique, de propriétés physiques comme leur
porosité ou encore en fonction de leur texture, matrice ou ciment et grains. Actuellement, les classifications les plus utilisées font appel à des
paramètres accessibles sur échantillon ou en lame mince tels que proportion matrice-ciment-grains.

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Un consensus semble s'être progressivement établi au sein de la communauté des sédimentologues quant à la classification la plus commode:
il s'agit de la classification proposée par Dunham (1962) et complétée par Embry & Klovan (1972) et Tsien (1981). La classification de Folk
(1959) possède également des adeptes.

Classification de Folk (Fig. IX.1)

On considère que les constituants majeurs des calcaires sont:

- les "allochems" (grains, corpuscules, éléments figurés):

 les intraclastes: sédiments remaniés;


 les pellets: grains ovoïdes de micrite de taille inframillimétrique;
 les oolithes;
 les fossiles, bioclastes et grains squelettiques;

- la matrice (micrite);

- le ciment (sparite).

Les appelations obtenues par combinaison d'un préfixe (intra-, pel-, oo-, bio-) et d'un suffixe (-micrite ou -sparite) peuvent être complétées par
l'adjonction du terme "rudite" pour les grains dont la taille est supérieure à 4 mm (exemple: "biosparrudite" décrit un calcaire à grands
bioclastes ou fossiles cimentés par de la sparite).

Fig. IX.1: classification des roches calcaires selon Folk (1959).

Classification de Dunham complétée par Embry & Klovan et Tsien (Fig. IX.2)

Cette classification est basée essentiellement sur la texture de la roche et sur le type de liaison entre les grains. Les différents termes de la
classification sont ensuite combinés avec les noms des types de grains les plus abondants. On a:

- avec matrice micritique:

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 mudstone: moins de 10% de grains;


 wackestone: plus de 10% de grains, mais texture non jointive ("mud-supported");
 packstone: texture jointive, c'est-à-dire empilement des grains en équilibre mécanique ("grain-supported")

- avec ciment sparitique:

 grainstone: texture jointive;

- "boundstones", constructions récifales, c'est-à-dire roches dont les éléments étaient liés d'une manière ou d'une autre dès le dépôt:

 bafflestone: organismes érigés piégeant le sédiment en suspension par ralentissement de l'écoulement du fluide transporteur (exemple:
bryozoaires);
 coverstone: organismes lamellaires ou tabulaires stabilisant le sédiment par leur simple présence (exemple: tabulés lamellaires des
monticules frasniens);
 bindstone: organismes stabilisant le substrat par encroûtement (exemple: algues corallines);
 framestone: organismes édifiant une charpente rigide (exemple: coraux constructeurs actuels);

- contenant plus de 10% d'éléments > 2 mm:

 floatstone: texture non jointive;


 rudstone: texture jointive.

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Fig. IX.2: classification des roches calcaires selon Dunham (1962) et Embry & Klovan (1972).

DESCRIPTION DES PALEOENVIRONNEMENTS CARBONATES: LA NOTION DE FACIES

A la base de cette notion coexistent à la fois un souci de simplification et de standardisation de la description sédimentologique et une volonté
de clarifier l'interprétation. Détaillons ces deux aspects.

- Il est évidemment possible, pour décrire une succession de types de sédiment, de reprendre à chaque banc, niveau, etc. une caractérisation
détaillée de ce que l'on observe. Si certains de ces types de sédiment sont "raisonnablement" identiques, il est beaucoup moins fastidieux de
définir une série de "sédiments-types" (faciès) et de représenter leur succession en regard de la coupe.

- Dans l'esprit de la plupart des sédimentologues, on trouve l'espoir qu'à un type de sédiment corresponde un environnement bien précis. Des
exceptions à cette relation s'observent, bien entendu, mais si des types de sédiment analogues existent, ceux-ci, par des études plus
approfondies, devraient voir leur individualité propre se dessiner de plus en plus nettement.

La description synthétique envisagée ici est aussi une aide à l'interprétation des paléoenvironnements dans la mesure où elle permet de détecter
une organisation à grande échelle des types de sédiment dans un corps sédimentaire. Cette organisation à grande échelle est souvent une des
clés de l'interprétation. Précisons maintenant ces fameux "types de sédiment".

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Le lithofaciès: ce terme a été défini pour la première fois par Krumbein (1948, p. 1909) comme "the sum total of the lithological
characteristics of a sedimentary rock", incluant donc outre la lithologie, la nature, l'abondance des organismes s'ils sont caractéristiques de la
roche en question. Ce terme est descriptif et ne doit contenir aucun élément interprétatif. Il est donc, pour prendre un exemple, injustifié de
parler de "lithofaciès de mer ouverte" pour ce qui devrait être appelé "lithofaciès des calcaires argileux gris beige à brachiopodes".

Le microfaciès: c'est la correspondance microscopique du lithofaciès. Flügel (1982, p. 1) en propose la définition suivante: "Microfacies is the
total of all the paleontological and sedimentological criteria which can be classified in thin-sections, peels, and polished slabs". Il va sans dire
que cette notion est elle aussi purement descriptive.

L'utilisation conjointe des notions de lithofaciès et de microfaciès permet de respecter le principe de la gradation des échelles d'observation
(on ne passe pas directement de la photo satellite au microscope à balayage...). L'expérience montre qu'en général, à chaque lithofaciès
correspondent un ou plusieurs microfaciès. A chaque microfaciès ne correspond qu'un lithofaciès.

L'assemblage fossile: c'est la somme des constituants biotiques d'un sédiment. Cette notion à coloration plus directement écologique est donc
incluse dans la notion de faciès. Un micro- ou lithofaciès est caractérisé à la fois par la nature, la texture,... du sédiment et par un assemblage
fossile.

LES MICROFACIES STANDARDS DE WILSON-UN MODELE DE PLATE-FORME CARBONATEE

Afin d'une part d'arriver à une plus grande objectivité et homogénéité dans la description sédimentologique et d'autre part de faciliter
l'interprétation des paléoenvironnements, un certain nombre d'auteurs ont proposé une série de "microfaciès standards", localisés dans un
modèle général de plate-forme carbonatée.

Le plus connu et le plus utilisé de ces modèles est celui de Wilson (1975), basé sur 24 "standard microfacies types" ("SMF"), intégrés dans un
système de neuf ceintures de faciès ("standard facies belts", "SFB") correspondant à des grands environnements de dépôt: "basin (SFB1)-open
sea shelf (SFB2)-deep shelf margin (SFB3)-foreslope (SFB4)-organic buildup (SFB5)-winnowed edge platform sands (SFB6)-shelf lagoon,
open circulation (SFB7)-shelf and tidal flats, restricted circulation (SFB8)-sabkhas with evaporites salinas (SFB9)". Voici ces microfaciès,
avec successivement leur abréviation, leur nom et éventuellement une brève description et enfin, la ceinture de faciès où ils peuvent être
observés (Fig. IX.3).

Fig. IX.3: microfaciès standards "SMF" et ceintures de faciès "SFB" de Wilson (1975) (hauteurs fortement exagérées).

 SMF1: spiculite: mudstones ou wackestones argileux sombres, riches en matière organique et/ou spicules d'éponges. SFB1, bassin.
 SMF2: packstones microbioclastiques: grainstones et packstones à très petits bioclastes et péloïdes. SFB1, SFB2, SFB3.
 SMF3: mudstones et wackestones à organismes pélagiques (exemple: globigérines, certains lamellibranches, etc.). SFB1, SFB3.
 SMF4: microbrèche ou packstones à lithoclastes et bioclastes: mono- ou polymictique; peut inclure également du quartz ou chert.
SFB3, SFB4, avant-talus.
 SMF5: grainstones/packstones ou floatstones à éléments récifaux; géopètes et structures d'ombrelle dûs à l'infiltration de sédiments
fins. SFB4, flanc récifal.
 SMF6: rudstones à éléments récifaux; gros fragments de constructeurs, peu de matrice. SFB4, talus d'avant-récif.
 SMF7: boundstone: organismes constructeurs en position de vie. SFB5, environnement de haute énergie, récif.
 SMF8: wackestones et floatstones avec fossiles bien conservés, quelques bioclastes. SFB2, SFB7, plate-forme ou lagon ouvert, sous la
zone d'action des vagues.
 SMF9: wackestones bioclastiques bioturbés; les bioclastes peuvent être micritisés. SFB2, SFB7, plate-forme ouverte peu profonde,
près de la zone d'action des vagues.
 SMF10: packstones/wackestones avec bioclastes dégradés et encroûtés. SFB2, SFB7, grains provenant d'environnements à forte
agitation, déposés en milieu calme.
 SMF11: grainstones à bioclastes encroûtés. SFB5, SFB6, corps sableux dans la zone d'action des vagues, éventuellement en bordure de
plate-forme.
 SMF12: grainstones/packstones/rudstones bioclastiques, avec prédominance de certains types d'organismes (crinoïdes, bivalves,
dasycladales,...). SFB5, SFB6, bordure de plate-forme.
 SMF13: grainstones à oncoïdes et bioclastes. SFB6, agitation assez importante, profondeur très faible.
 SMF14: "lags": grains dégradés et encroûtés, localement mélangés à des oolithes et des péloïdes, voire des lithoclastes; phosphates,
oxydes de fer. SFB6, accumulation lente de matériaux grossiers dans des zones agitées.

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 SMF15: grainstones à oolithes, à stratification entrecroisée. SFB 6, bancs, dunes, cordons oolithiques en milieu agité.
 SMF16: grainstones à péloïdes, souvent mélangés à quelques bioclastes (ostracodes, foraminifères,...). SFB7, SFB8, environnement
très peu profond à circulation modérée.
 SMF17: "grapestone": grainstones à grains agrégés (lumps, bahamite), quelques péloïdes, et grains encroûtés. SFB7, SFB8, plate-
forme à circulation restreinte, "tidal flats".
 SMF18: grainstones à foraminifères ou dasycladales. SFB7, SFB8, cordons littoraux, chenaux lagunaires.
 SMF19: loférite: mudstones/wackestones laminaires à péloïdes et fenestrae, passant à des grainstones à péloïdes; ostracodes, quelques
foraminifères, gastéropodes et algues. SFB8, mares et lagons à circulation restreinte.
 SMF20 & 21: mudstones à stromatolithes. SFB8, SFB9, mares intertidales.
 SMF22: wackestones à oncoïdes. SFB8, environnement calme, souvent en arrière-récif.
 SMF23: mudstones homogènes, non fossilifères; évaporites possibles. SFB8, SFB9, mares hypersalines.
 SMF24: packstones/wackestones à lithoclastes de micrite non fossilifère. SFB8, "lag deposit" de fond de chenaux tidaux.

L'utilisation des microfaciès standards peut aider lors d'une première approche et possède le mérite certain de structurer les observations. Dans
un deuxième temps, l'affinement des observations doit permettre de mieux préciser les environnements de dépôt et de modifier en
conséquence le modèle standard.

LE MODELE DE RAMPE

On a vu dans le chapitre précédent que les différences sédimentologiques entre plate-forme et rampe carbonatées sont importantes,
particulièrement en ce qui concerne la répartition des niveaux d'énergie. Les "SMF" et "SFB" de Wilson s'intègrent clairement dans un modèle
de plate-forme avec barrière récifale. Il est donc nécessaire de considérer également la répartition des microfaciès au long d'un modèle de
rampe. Ce modèle a été proposé par Burchette &Wright (1992) (Fig. IX.4).

Fig. IX.4: répartition des faciès "RF" sur un modèle de rampe carbonatée (hauteurs fortement exagérées).

La rampe externe est localisée sous la zone d'action des vagues de tempête, à une profondeur de plusieurs dizaines à plusieurs centaines de
mètres. On y observe des sédiments carbonatés fins, autochtones ou allochtones, associés à des dépôts hémipélagiques. Les bioconstructions y
sont de type "monticule micritique".

 RF1: monticule micritique: bioconstruction isolée, riche en matrice calcaire et comprenant des éponges et des microbes; tous les
organismes sont en position de vie.
 RF2: marno-calcaires: mudstones et wackestones argileux microbioclastiques alternant avec des argiles; la faune est benthique,
nectonique, planctonique avec un net caractère ouvert: bryozoaires, éponges, foraminifères planctoniques, échinodermes, mollusques.
La bioturbation est présente.
 RF3: tempestites distales: minces niveaux granoclassés dans des sédiments fins. Ces niveaux un peu plus grossiers peuvent inclure des
sédiments remaniés issus de zones moins profondes de la rampe.

La rampe médiane correspond à la zone située entre la base de la zone d'action des vagues de beau temps et la base de la zone d'action des
vagues de tempête. La profondeur y est de quelques dizaines de mètres. Les tempestites sont les dépôts dominants, associés souvent à des
niveaux intraclastiques.

 RF4: monticules squelettiques et récifs: il s'agit de bioconstructions à faune plus diversifiée, incluant des niveaux à organismes en
position de vie et d'autres remaniés par l'action des vagues; les constructeurs comprennent des bryozoaires, coraux, éponges,
échinodermes, algues rouges,...
 RF5: "shoals": grainstones et packstones à bioclastes remaniés (bryozoaires, crinoïdes, brachiopodes,...), stratifications obliques.
 RF6: tempestites proximales, souvent amalgamées: sédiments granoclassés, transportés, structures HCS, grainstones et packstones. Les
éventuelles périodes de calme sont représentées par des sédiments plus fins, de type wackestone, bioturbés.

La rampe interne comprend la zone située entre la plage et la base de la zone d'action des vagues de beau temps. Cette portion de rampe est
située dans la zone photique et le fond marin est remanié pratiquement en permanence par les vagues et les courants. On observe les faciès
suivants:

 RF7: récifs: biostromes et patch-reefs à coraux, lamellibranches, rudistes, stromatopores; les constructeurs sont rarement en position de
vie; nombreux remaniements.
 RF8: packstones et grainstones à bioclastes variés.

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 RF9: shoals oolithiques et bioclastiques; grainstones et packstones à stratification entrecroisée; oolithes, péloïdes, bioclastes (algues
vertes, foraminifères, mollusques, échinodermes,...)
 RF10: "plage" et "mares": grainstones et packstones bien classés à stratification plane et/ou mudstones et wackestones bioturbés à
faune et flore plus réduite. Les bioclastes gardent un caractère varié et partiellement "ouvert".

INTERPRETATION DES PALEOENVIRONNEMENTS CARBONATES: UNE BREVE ANALYSE DES METHODES UTILISEES

L'interprétation d'un faciès en terme de paléoenvironnement est basée bien entendu sur une comparaison avec la nature actuelle. Si la
continuité des processus sédimentaires peut être garantie en première approximation pour des échelles de temps relativement grandes en ce qui
concerne les processus physiques de la sédimentation (viscosité et température des fluides, pression, teneur en oxygène,...), ce n'est
évidemment pas le cas dès qu'intervient la vie, en constante évolution. L'application de l'actualisme doit alors être tempérée suivant
l'ancienneté des environnements étudiés.

- L'actualisme appliqué aux organismes: cette méthode d'actualisme strict n'est applicable que pour des environnements très récents, où les
espèces sont identiques. Au-delà du Miocène, la proportion d'organismes possédant des équivalents actuels tend vers zéro au niveau de
l'espèce, puis du genre et enfin de la famille. L'étude de l'Actuel nous montre que des espèces différentes d'un même genre peuvent occuper
des niches écologiques très différentes.

- L'analyse morpho-fonctionnelle: il s'agit de déduire des implications écologiques de la morphologie et des diverses adaptations d'un
organisme. Cette méthode est à appliquer avec précaution. Exemple: les épines: il peut s'agir d'un moyen de défense contre des agresseurs,
mais aussi d'un instrument de fixation au substrat; voir également les nombreux essais d'interprétation en terme de bathymétrie de la
morphologie des organismes constructeurs (lamellaires, branchus, etc.);

- L'actualisme appliqué aux processus physico-chimiques: revenons-y pour souligner que pour de grandes échelles de temps, des modifications
générales de ces paramètres sont possibles: exemples: la teneur plus élevée en CO2 de l'air au Carbonifère est peut-être à l'origine de la taille
plus importante des libellules (densité de l'air plus élevée); autre exemple: les "Red Banded Ironstones" du Précambrien impliquent une
atmosphère différente de notre atmosphère actuelle. D'une manière générale, cependant, cette démarche est extrêmement fructueuse pour
l'interprétation des innombrables structures sédimentaires d'origine physique (types de stratification, granoclassements,...);

- L'actualisme appliqué à la structure des populations: cette méthode est centrée sur le fait que dans toute population, même si les organismes
ont évolué au cours du temps, des analogies de fonctionnement demeurent: il faut alors identifier la fonction, la "niche écologique" (herbivore,
suspensivore, mucophages, détritivores, etc.) de chaque membre de l'assemblage fossile et interpréter le paléoenvironnement en comparant
avec des peuplements actuels de même type (exemple: peuplement saumâtre, récifal, etc.). Pour citer un exemple, une communauté à éponges,
bryozoaires et brachiopodes sera systématiquement localisée en milieu plus profond qu'une communauté à algues et coelentérés constructeurs
et ce, aussi bien au Silurien (récifs de l'Arctique canadien, Narbonne & Dixon, 1984 p. 47) qu'au Frasnien (Canning Basin, Australie, Playford,
1981, p. 13) ou qu'à l'époque actuelle (Golfe d'Aqaba, Hottinger, 1984).

Le principal écueil de cette méthode réside dans la dégradation au cours du temps de l'information disponible. Cette dégradation se produit en
plusieurs étapes; détaillons-les:

 entre sa mort et son enfouissement, l'organisme peut se décomposer (disparition des organismes "à corps mou"); exemple: Nereis: ces
peuplements peuvent représenter jusqu'à 90% de la biomasse d'une communauté. Ces organismes sans test disparaissent cependant
totalement lors de la fossilisation. Seule la découverte de leurs terriers peut témoigner de leur présence. Autre exemple: les éponges
dont la présence peut n'être révélée que par les stromatactis (voir plus loin);
 de même, les tests résistants peuvent se désarticuler par disparition des tissus qui maintenaient leur cohésion (crinoïdes,...) ou être
désagrégés par abrasion mécanique ou chimique (usure, transport, ingestion, oxydation, dissolution,...); exemple: il est souvent difficile
d'identifier avec certitude la provenance d'un sable corallien: madréporaires ou mollusques?
 après l'enfouissement, le test peut être fortement dégradé par la compaction et la diagenèse: remplacement (pyritisation, silification,
dolomitisation, inversion des carbonates) ou dissolution;
 lors de l'inventaire des fossiles, plusieurs biais peuvent être introduits: on ne récolte souvent que les "beaux" specimens; dans les séries
dures, les fossiles sont plus difficiles à récolter que dans les roches tendres; le recensement des organismes dépend aussi de la
spécialisation du géologue, de sa minutie et de son expérience...

Le résultat de tout ce qui précède constitue un assemblage fossile qui n'est en fait, sauf cas exceptionnel, qu'une fraction dérisoire de la
communauté originale: mais c'est notamment sur ce témoignage que seront construits les modèles interprétatifs. De toute manière, pour bien
appréhender un peuplement, il faut garder à l'esprit que la plupart sont organisés de la façon suivante:

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Fig. IX.5: pyramide écologique.

Avec un rapport de 10 entre chaque niveau de la pyramide alimentaire. Les fossiles appartiennent la plupart du temps au groupe des
consommateurs primaires (2) ou secondaires (3). La découverte d'un fossile du groupe (3) implique donc que le peuplement original comptait
une dizaine de (2) et une centaine de (3)!

Autres pièges à éviter dans l'interprétation d'un assemblage:

 les mélanges de populations: exemple du Zuiderzee: après la construction du barrage, la faune benthique a évolué d'un peuplement de
milieu salé à un peuplement d'eau douce; les récoltes actuelles de coquilles font cependant penser à un peuplement mixte. Ceci est tout
simplement la conséquence d'un taux de sédimentation plus faible que le taux d'accumulation des coquilles. Le même résultat peut être
provoqué par une intense bioturbation qui mélange les fossiles issus de deux couches distinctes à l'origine (Fig. IX.6) ou encore par le
dépôt en un même milieu d'organismes provenant de communautés différentes;
 le problème plus général de l'inégale connaissance du milieu actuel: on connaît particulièrement bien les littoraux... et les grands fonds;
en ce qui concerne les bioconstructions, ce sont les récifs algocoralliens tropicaux qui ont été surtout étudiés...;
 le problème encore plus général de la représentativité du milieu actuel (on touche là aux limites de l'actualisme): l'Holocène est une
période de crise, liée à la montée eustatique post-glaciaire. Beaucoup des peuplements que nous examinons sont des peuplements
jeunes, qui n'ont pas forcément atteint leur maturité, au contraire d'exemples anciens correspondant à des périodes de stabilité
eustatique et/ou climatique.

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Figure IX.6: mélanges de peuplements et interprétation des paléoenvironnements. Une fausse interprétation de peuplement mixte peut être le
résultat de la succession de deux populations dans une zone à sédimentation ralentie, de la bioturbation ou encore d'un transport.

En conclusion, il faut être persuadé que l'interprétation d'un faciès en terme de paléoenvironnement ne peut être basée que sur un faisceau
d'évidences, issues de l'analyse morpho-fonctionnelle, d'analogies avec des peuplements actuels, de l'interprétation des structures
sédimentaires, etc. Toutes ces évidences doivent faire l'objet d'un examen approfondi. Un argument négatif ne peut être écarté qu'après
discussion. L'utilisation de modèles doit toujours être réfléchie: quels sont dans le modèle choisi, les éléments transposables tels quels, les
analogies possibles, les dissemblances et pourquoi... Enfin, toute interprétation d'un faciès en terme de paléoenvironnement devra finalement
tenir compte de l'interprétation que l'on aura donnée aux faciès qui lui sont géométriquement liés au sein de l'édifice sédimentaire et
stratigraphiquement contemporains au sein du bassin de sédimentation...

Dans la suite du cours, nous allons examiner différents types de bioconstructions, échelonnées du littoral aux bassins océaniques. Nous
verrons que leur localisation, leur composition, leur morphologie dépendent d'un paramètre fondamental: leur source d'énergie.

Pour en savoir plus

- T.P. Burchette & V.P. Wright, 1992. Carbonate ramp depositional systems. In B.W. Sellwood (Ed.), Ramps and Reefs, Sediment. Geol., 79,
3-57.

- E. Flügel, 1982. Microfacies analysis of limestones. Springer-Verlag, 633 pp.

- J.L. Wilson, 1975. Carbonate facies in geologic history. Springer Verlag, 471 pp.

X. Tapis algaires, stromatolithes & Co


TAPIS ALGAIRES ET STROMATOLITHES ACTUELS

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INTRODUCTION

Avec les études de Logan, Playford, Purser et autres, c'est un peu les bases de la sédimentologie des carbonates actuels qui ont été jetées. Ces
études étaient surtout consacrées à ce qui était accessible -relativement- facilement: les zones inter- et supratidales des plates-formes
carbonatées. Un vif intérêt s'est rapidement fait sentir pour les sédiments algaires et cyanobactériens qui représentent sans aucun doute un
marqueur bathymétrique (proximité de la ligne de rivage) et comme on le verra plus loin, climatique. L'application de cet outil dans l'Ancien
n'en est plus à ses débuts.

Le caractère commun et fondamental des communautés algaires et cyanobactériennes est leur autotrophie: leur source d'énergie est le soleil.

CLASSIFICATION ET DESCRIPTION DES CALCAIRES ALGAIRES

D'une manière générale, on peut classer l'ensemble des dépôts formés par des algues en trois grandes catégories: les accumulations d'algues
squelettiques, les tufs algaires et les carbonates cryptalgaires, c'est-à-dire les sédiments carbonatés où la minéralisation est essentiellement
d'origine allochimique (piégeage de grains carbonatés, dégradation de la matière organique,...) et où les algues et les cyanobactéries jouent un
rôle de piégeage de matériau.

Au sein des carbonates cryptalgaires (aussi dits "microbiens"), on distingue aisément des sédiments laminaires et des sédiments non
laminaires.

- On range dans les sédiments cryptalgaires non laminaires essentiellement les thrombolites, définis par Aitken (1967, p 1164) comme des
"...cryptalgal structures lacking lamination and characterized by a macroscopic clotted fabric". Les thrombolites sont essentiellement restreints
aux milieux subtidaux et intertidaux inférieurs; ils sont caractérisés par une croissance algaire rapide par rapport à la sédimentation
bioclastique, et par l'absence de phénomènes périodiques du type exposition-immersion (d'où l'absence de lamination).

A: Edifices thrombolitiques bordant un chenal (Formation de Romaine, Ordovicien, Mingan); B: détail (coupe).

- les sédiments cryptalgaires laminaires (aussi appelés spongiostromates) comprennent les stromatolithes s.l. et les oncolithes.

Les stromatolithes s.l.

On classe dans les stromatolithes s.l. les formes possédant un relief (stromatolithes au sens de Logan et al, 1964 p 69): "stromatolites are
laminated structures composed of particulate sand, silt, and clay-size sediment, which have been formed by the trapping and binding of detrital
sediment particles by an algal film (...) stromatolites may be columnar, clubshaped, undulose or spheroïdal in form") et les formes planes
appelées par divers auteurs "laminites cryptalgaires" ou "laminites".

La classification et l'étude des stromatolithes a longtemps souffert du dualisme existant entre la tendance "paléontologique" de l'école russe, et
la tendance "écologique" de l'école anglo-saxonne. Nous utilisons ici, bien évidemment, une classification de type morphoécologique, qui est
particulièrement bien adaptée à l'étude des paléoenvironnements. Cette classification est celle de Logan et al. (1964), complétée par Aitken
(1967) et Kendall & Skipwith (1968) de façon à y intégrer les laminites cryptalgaires et les tapis algaires à polygones de dessiccation. Cette
classification comprend donc brièvement les types illustrés à la Fig. X.1.

Toutes ces formes peuvent évoluer de l'une à l'autre suivant l'évolution des conditions du milieu. Ces morphologies existent à différentes
échelles (aspect fractal) et s'imbriquent pour donner des stromatolithes complexes.

Les oncolithes

Les oncolithes sont des formes libres, détachées du substrat, généralement de forme subsphérique, limitées à la zone subtidale.

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Oncolithes dans la Formation de La Vieille, Silurien, Québec.

Figure X.1: types de stromatolithes (d'après Logan et al., 1964, modifié).

Stromatolithes LLH-S, Barrémien, Bale, Croatie.

QUELQUES CARACTERISTIQUES DES STROMATOLITHES

Biologie

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Les tapis algaires à l'origine des stromatolithes peuvent être considérés comme des communautés complexes composées de bactéries
autotrophes, d'algues eucaryotes, de bactéries hétérotrophes et d'algues bleu-vert ou cyanobactéries, ces dernières étant les organismes de loin
les plus abondants.

Les cyanobactéries sont des procaryotes; sans entrer dans les détails, précisons qu'elles sont classées en deux grands groupes: les unicellulaires
ou coccoïdes, qui se reproduisent par spores, et les pluricellulaires ou filamenteuses, qui se reproduisent par fragmentation des filaments ou
trichomes (Fig. X.2).

Une des caractéristiques importantes des cyanobactéries est leur faculté de secréter du mucilage, ce qui augmente leur résistance à la
dessiccation, et leur mobilité en cas d'ensablement par le sédiment.

La capacité des cyanobactéries à résister à certaines contraintes du milieu leur a permis d'occuper des niches écologiques inaccessibles à
d'autres formes de vie (tableau X.1). La compétition avec les métaphytes et les métazoaires les ayant par ailleurs éliminées d'environnements
plus favorables au cours du Phanérozoique.

algues
Facteur du milieu cyanobactéries bactéries hétérotrophes
eucaryotes
température max. 70-73°C >99°C 56°C
température min gel gel gel
pH maximum >10,5 (?) >10,5 (?) >10,5 (?)
pH minimum 4-5 <1 <1
salinité maximale >250%o >250%o >250%o
intensité lumineuse
2000 lux
minimale
croissance anaérobie oui oui non (?)
Tableau X.1: tolérance de quelques types de microorganismes aux facteurs de l'environnement. D'après Brock, 1976, modifié.

Le fort échauffement provoqué par l'ensoleillement paraît être le principal facteur responsable de l'élimination des algues eucaryotes des
plaines maritimes tropicales, bien plus que la salinité. Des différences du même ordre dans les tolérances aux facteurs du milieu
(ensoleillement, mais aussi pH, Eh, teneur en CO2 O2...) expliquent la stratification biologique constatée dans la plupart des tapis algaires
actuels, les cyanobactéries occupant en général la zone la plus superficielle et les bactéries hétérotrophes, la zone la plus éloignée de la
surface.

Figure X.2: surface d'un tapis cyanobactérien; les filaments piègent les grains détritiques.

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A: tapis algaires aux abords de la sebkha El Melah, Tunisie. La lamination est due à l'alternance de tapis algaires et de dépôts détritiques.
Noter le caractère réducteur du sédiment, favorisant la conservation de la matière organique. B: bulles d'oxygène produites par
photosynthèse à la surface d'un tapis algaire; ces bulles, une fois recouvertes de sédiment donnent naissance aux "birdseyes"; la flèche
indique une cicatrice d'érosion dans le tapis.

Origine de la lamination

La lamination, qui peut être répétitive, alternante ou cyclique, enregistre un phénomène périodique qui affecte la population algaire et/ou les
facteurs de l'environnement (Fig. X.3).

Parmi les divers phénomènes pouvant être à l'origine de la lamination; les principaux sont:

 une différence de croissance algaire au cours d'un cycle jour-nuit;


 un changement périodique de 1'algue dominant la population lié à une variation périodique des facteurs du milieu (humidité,
salinité...);
 une calcification périodique de la partie superficielle du tapis;
 un afflux périodique de matériel détritique;
 une diagenèse différentielle (dolomitisation des niveaux algaires liée à la concentration du Mg dans le mucilage par exemple);
 un alignement de corpuscules;
 un alignement de "birdseyes";
 une stratification biologique au sein du tapis liée à des tolérances différentes aux facteurs du milieu (particulièrement l'insolation).

Figure X.3: types de laminations et exemple de stratification biologique au sein d'un tapis algaire actuel

Ecologie

Les tapis algaires actuels colonisent la zone intertidale des plateformes carbonatées, avec une extension possible vers les zones supratidale et
subtidale (Purser, 1980). Leur répartition et leur étendue dépendent de facteurs climatiques, biologiques et mécaniques:

 l'action des broûteurs et des fouisseurs qui, présents en zone intertidale ou/et subtidale, y détruisent les tapis algaires;
 la possibilité de cimentation précoce qui, en consolidant le stromatolithe, limite l'action des organismes fouisseurs et broûteurs et
permet donc l'extension en zone subtidale;
 l'hypersalinité, qui élimine ou restreint la faune marine, permettant ainsi aux tapis de s'étendre vers la zone subtidale. L'hypersalinité a
également pour effet d'éliminer les tapis algaires de la zone supratidale (cristallisation d'évaporites au sein des tapis avec destruction
des tissus);

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 l'action destructrice des vagues et des courants qui limite l'extension des tapis vers la mer et de même, la déflation éolienne s'exerçant
sur les tapis séchés et craquelés qui limite leur extension vers le continent;
 l'humidité du climat (les précipitations) qui favorise l'extension des tapis algaires en zone supratidale.

Ces facteurs, sauf l'action érosive des vagues, des courants et du vent, sont interliés et dépendent in fine du climat, et particulièrement de son
aridité.

Notre connaissance des tapis algaires actuels s'appuie sur des études menées dans un certain nombre de régions à sédimentation carbonatée
dominante. Parmi ces régions, citons entre autre:

 l'île d'Andros (Fig. X.4);


 la Floride;
 diverses régions du Golfe Persique, (Fig. X.5);
 le golfe de Spencer (sud de l'Australie);
 la Baie des Requins (ouest de l'Australie);
 la lagune de Boca Jewfish, sur l'île de Bonaire (Antilles néerlandaises);
 la lagune Mormona, en péninsule de Californie.

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Figure X.4: A: l'île d'Andros et le banc des Bahamas, avec la localisation de la Fig. B. B: détail de la zone de "Three Creeks" montrant la
répartition des environnements. C: coupe schématique E-W dans la zone de "Three Creeks".

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Figure X.5A: carte schématique de la répartition des principaux types de sédiments dans le Golfe Persique. D'après Purser (1983), modifié.
B: détail montrant la distribution des sédiments sur la côte d'Abu Dhabi. D'après Purser (1984), modifié.

De ces travaux, on peut retenir très schématiquement les points essentiels suivants:

 l'aridité du climat et le confinement (isolement par rapport à la mer ouverte) conditionnent la salinité du milieu; la salinité du milieu,
par le contrôle qu'elle exerce sur la faune, conditionne l'extension des tapis algaires (notons que même sous un climat semi-aride, une
bonne circulation de l'eau marine peut avoir comme effet le maintien d'une salinité normale: 35 o/oo dans la lagune de Boca Jewfish).
Prenons deux cas extrêmes:
 dans un environnement hypersalin, les tapis s'étendront de la partie inférieure de la zone intertidale à la zone subtidale (cas de

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la Baie des Requins);


 dans un environnement à salinité à peu près normale, les tapis s'étendront de la zone supratidale à la partie supérieure de la zone
intertidale (cas du NW de l'île d'Andros, Fig. X.4);
 l'action des vagues et des courants conditionne d'une part l'extension des tapis vers la zone subtidale (action érosive) et, d'autre part, la
morphologie externe des stromatolithes; on constate en effet que:
 dans un environnement calme, les tapis algaires ont une morphologie d'ensemble généralement plane (type "P"); c'est le cas de
Gladstone Bay, zone protégée de la Baie des Requins;
 dans un environnement agité, se développent des rides et des dômes stromatolithiques à fort relief (types "SH"); c'est le cas de
certaines zones exposées de Hamelin Pool, Baie des Requins.

L'explication la plus plausible de cette différence morphologique est que l'action des vagues et des courants ainsi que l'accumulation de
sédiments détruit localement le tapis, limitant la croissance algaire à des zones légèrement surélevées, à l'abri relatif des apports sédimentaires.
Au fil du temps, le relief tend à s'exagérer, et a former une ride ou une colonne stromatolithique. Il est intéressant de remarquer que la genèse
de stromatolithes à relief n'est possible qu'en environnement hypersalin: pour que les tapis algaires puissent enregistrer par leur morphologie
l'action des vagues et des courants, qui n'est sensible que dans les zones intertidale et subtidale, il faut évidemment que ces zones leur soient
accessibles, et pour cela, que la salinité élevée inhibe le développement d'une faune de broûteurs. Il faut également qu'une cimentation précoce
consolide ces structures érigées;

- la composition taxonomique des tapis algaires a une influence sur leur morphologie et leur distribution sur le littoral; on constate
(heureusement!) que cette composition est très constante dans les exemples étudiés (on rencontre essentiellement des tapis à Schizothrix,
Lyngbya, Microcoleus et Scytonema);

- la lamination résulte le plus souvent de l'alternance tissus algaire/sable ou silt bioclastique;

- le matériel sableux déposé, généralement en lentilles, sur les tapis algaires provient de la zone subtidale: "...subtidal zone is vital to the tidal
flat system, because it is the source of sediment needed for accretionary growth..." (Shinn, 1983 p. 190). Le transport de ce matériel ne
s'effectue en général qu'à l'occasion de tempêtes ou de grandes marées;

- la nature et la composition du matériel silteux dépendent de la faune et de la flore présentes en zone subtidale, qui approvisionnent le "stock"
de bioclastes. Cette faune et flore est directement liée à la salinité des eaux, elle-même dépendante du climat et du confinement. On constate
en effet que:

 le matériel silteux composant les lamines "détritiques" des tapis algaires d'Andros comprend des débris d'algues vertes (dasycladacées
surtout), des débris de mollusques, des foraminifères;
 le matériel silteux composant les lamines détritiques des tapis algaires du Golfe Persique et de la Baie des Requins ne comprend que
des foraminifères, des pellets et des débris de coquilles.

Le tableau X.2 reprend, pour les cas particuliers de la Baie des Requins, de l'Ile d'Andros et du Golfe Persique certaines des caractéristiques
énumérées ci-dessus.

morphologie répartition climat microflore fines


Golfe surtout aride, pellets, débris
surtout P réduite,cyanobactéries
Persique intertid. évaporites moll., foram.
Baie des P, LLH, SH intertid.- aride, réduite,
idem
Requins selon agitation subtid. évaporites cyanobactéries
diversifiée,
intertid. semi-aride, surtout
cyanobactéries,algues
Andros surtout P sup. surtout pluviosité pell.+débris
vertes
supratid. saisonnière algaires
(dasycladales)
Tableau X.2: caractérisation sommaire des stromatolithes de l'île d'Andros, de la Baie des Requins et du Golfe Persique.

Reste un problème essentiel: des conclusions et des lois basées sur des observations de l'Actuel sont-elles transposables au passé? Dans le cas
particulier des stromatolithes, les modèles actuels sont-ils transposables jusqu'au Paléozoïque ?

En fait, on peut dire que les facteurs restreignant l'extension des tapis algaires au littoral des plates-formes carbonatées existaient dès le début
du Paléozoïque (ce sont essentiellement les animaux broûteurs et fouisseurs: ils sont à l'origine de "l'exil des stromatolithes"). De même, le
degré de saturation des océans en CaCO3 n'a plus varié dans de grandes proportions depuis la fin du Protérozoïque, n'autorisant plus la
précipitation extracellulaire qu'en environnement hypersalin. On peut donc considérer que les stromatolithes érigés du type SH, qui nécessitent
pour leur édification une lithification précoce, n'ont pu prospérer qu'en milieu hypersalin depuis l'aube du Phanérozoïque (ce qui n'a pas été
nécessairement le cas durant le Précambrien). Il faut également souligner l'extrême lenteur évolutive des cyanobactéries au cours du
Phanérozoïque.

Pour en savoir plus

 J.D. Aitken, 1967. Classification and environmental significance of cryptalgal limestones and dolomites, with illustrations from the
Cambrian and Ordovician of SW Alberta. J. of Sedimentary Petrology, 37, 4, 1163-1178.
 T.D. Brock, 1976. Environmental microbiology of living stromatolites. In M.R. Walter, éd.: Stromatolites. Developments in
Sedimentology, 20, Elsevier, 141-148.

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sedimentologie Page 70 sur 95

 C.D. Gebelein, 1976. The effects of the physical, chemical and biological evolution of the earth. In M.R. Walter, éd.: Stromatolites.
Developments in Sedimentology, 20, Elsevier, 499-515
 S. Golubic, 1976. Organisms that build stromatolites In M.R. Walter, éd.: Stromatolites. Developments in Sedimentology, 20, Elsevier,
113-126.
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diagenèse. Ed. Technip, 367 pp.
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TAPIS ALGAIRES GIVETIENS

cf. excursions

XI. Les récifs


GENERALITES - TERMINOLOGIE

Les récifs ont toujours suscité un intérêt remarquable et une confusion terminologique tout aussi exceptionnelle. La littérature est encombrée
de définitions variées des termes "récifs", "complexe récifal", "mud mound", etc.

Fig. XI.1: "récifs": concepts élémentaires. D'après James & Macintyre (1985), modifié.

Dans un souci d'efficacité, je propose d'utiliser en première approche la classification suivante:

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Choisissons d'abord le terme "bioconstruction" comme terme général regroupant toutes les structures construites d'origine organique. Elles se
distinguent des "bioaccumulations" où des facteurs physiques sont responsables du dépôt (lumachelles, etc.). On peut ensuite, au sein des
bioconstructions, faire la part des:

Récifs : toute bioconstruction, normalement d'eau peu profonde, dont les constituants édifient une charpente rigide (susceptible de résister à
l'action des vagues ou des courants). Exemple: les récifs tropicaux actuels.

Monticules récifaux: toute bioconstruction, de forme grossièrement lenticulaire, sans charpente rigide. Ces monticules récifaux peuvent être
subdivisés en monticules cryptalgaires ou microbiens ("microbial mounds"), monticules micritiques ("mud mounds") et monticules
squelettiques ("skeletal mounds"). On ne range pas dans les monticules les accumulations hydrodynamiques de boue, même si cette boue est
piégée/stabilisée par des algues ou autres organismes. Réservons donc le terme de monticule aux accumulations de boue (accompagnée
éventuellement d'autres constituants) produite en grande partie in-situ. Passons en revue ces différents types de monticules (Fig. XI.2A).

 Les monticules cryptalgaires ou microbiens comprennent deux termes: les monticules à stromatolithes (tapis de cyanobactéries
laminaires) et les monticules à thrombolithes (cyanobactéries à structure péloïdique ou grumeleuse, ou encore riche en fenestrae).
Toutes les formes de transition sont évidemment possibles. Exemple: le "cœur" gris des monticules du Membre du Petit-Mont.
 Les monticules micritiques sont constitués principalement de micrite (à l'origine, boue, gel?) (exemple: certains faciès des monticules
waulsortiens). Parfois, ces monticules sont constitués de boue et d'éponges (exemple: partie inférieure à stromatactis des monticules du
Membre du Petit-Mont). Comme les éponges sont des organismes à corps mou, elles ne sont en général mises en évidence que par les
cavités qu'elles laissent après leur disparition (et les réseaux spiculaires).
 Les monticules squelettiques comprennent une fraction non négligeable d'organismes à tests calcaires (coraux, crinoïdes, bryozoaires,
algues,…) qui ne forment cependant pas de charpente rigide. Exemple: la plus grande part des monticules du Membre du Lion.

Il faut noter qu'à ces types simples de monticules s'ajoutent toute une variété de formes intermédiaires: la plupart des monticules micritiques
comprennent aussi des éléments squelettiques. De plus, des transitions évolutives sont fréquentes: beaucoup de monticules micritiques
évoluent au cours de leur développement vers des monticules squelettiques et même vers des monticules microbiens (cas des monticules du
Membre du Petit-Mont), voire des récifs.

Exemples de faciès issus des édifices du Membre de Petit-Mont dans la région de Philippeville. A: calcaire rouge à stromatactis (monticule
micritique); B: calcaire rouge à coraux, crinoïdes, brachiopodes (monticule squelettique); C: calcaire gris à coraux, stromatopores et
cyanobactéries (monticule cryptalgaire).

Devant la relative difficulté d'utilisation de cette classification sur le terrain, on emploie souvent en première approximation des termes comme
"bioherme" et "biostrome". Ce mots sont descriptifs et ne possèdent aucune connotation génétique.

Le mot "bioherme" désigne un corps lenticulaire, bioconstruit, souvent encaissé de sédiments de nature différente. Ce terme s'oppose à
"biostrome" qui désigne un corps bioconstruit stratifié, non lenticulaire. Les biostromes se différencient des bioaccumulations ou lumachelles
par le caractère constructeur des organismes présents et leur faible transport. Un remaniement périodique par des tempêtes peut faire alterner
des épisodes où beaucoup d'organismes sont en position de vie et des épisodes de démantèlement.

STABILISATION-MINERALISATION

L'établissement et la croissance d'une bioconstruction nécessitent une production de carbonate in-situ et une certaine stabilisation du substrat,
sans même parler de la construction d'une charpente résistante à l'action des vagues. Trois grands processus de production de boue et/ou de
ciment carbonaté ont été recensés dans la nature: la cimentation, la biominéralisation et l'organominéralisation (Fig. XI.2B). La cimentation est
le processus "classique" de précipitation physico-chimique de carbonate, sans qu'interviennent des processus organiques (hormis certains
effets indirects comme l'extraction de CO2 par photosynthèse, par exemple); la biominéralisation correspond à une précipitation sous le
contrôle de processus vitaux, à l'intérieur ou à l'extérieur de cellules vivantes (exemple: la formation d'un test carbonaté); enfin,
l'organominéralisation est la précipitation de carbonate à l'intervention de molécules issues de la dégradation de la matière organique. Dans ce
dernier cas, la vie n'intervient que comme productrice de matière organique. Ici encore, les différents processus peuvent agir dans une même
bioconstruction, souvent avec une certain décalage dans le temps. La biominéralisation est active dans la pellicule vivante, superficielle du
monticule, alors que l'organominéralisation se produit au sein du sédiment. Au cours de l'évolution d'une bioconstruction, l'importance relative
des différents processus de production carbonatée peut varier (Fig. XI.2B). On constate par exemple que les processus d'organominéralisation
dominent dans les monticules micritiques alors que la biominéralisation et la cimentation sont la règle dans les récifs.

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Fig. XI.2: A: types de bioconstructions; B: les différents processus de production/cimentation carbonatée. La flèche rouge correspond à un
changement dans l'importance relative des processus de production carbonatée au cours de l'évolution d'un monticule micritique vers un
récif.

EVOLUTION AUTOGENIQUE-EVOLUTION ALLOGENIQUE

La plupart des récifs, biohermes, monticules ne sont pas homogènes au point de vue faciès: ils présentent une évolution, souvent à
prédominance verticale: on y observe une succession ou un renouvellement des communautés dominantes. Deux modèles coexistent dans la
littérature pour expliquer l'évolution des communautés écologiques: il s'agit du modèle "autogénique" de Walker & Alberstadt (1975) auquel
on oppose en général un modèle "allogénique" inspiré des travaux de Lecompte (1959 notamment).

Très brièvement, on peut dire que Lecompte considère la succession observée dans les biohermes (et en particulier dans les biohermes du
Frasnien belge, voir ci-dessous) comme une adaptation des communautés à une diminution de la profondeur, marquée principalement par une
diminution de la turbidité et une augmentation de la turbulence.

A ce modèle de succession écologique déterminé entièrement par des variations du milieu, extrinsèques à la communauté biohermale, répond
le modèle autogénique où intervient une notion de structuration écologique, basée sur le développement de modes de plus en plus complexes
de circulation de l'énergie et d'utilisation de l'espace. Walker & Alberstadt (1975) distinguent trois types d'espèces sur base de leur "stratégie
vitale": il s'agit des espèces caractéristiques qui sont typiques d'une certaine communauté bien déterminée (il s'agit souvent de "stratèges K",
suivant Hottinger, 1984); des espèces intergraduelles qui peuvent apparaître dans une communauté de manière accessoire mais sont typiques
d'une communauté adjacente et des espèces ubiquistes qui se retrouvent dans plusieurs communautés mais ne sont caractéristiques d'aucune
d'elles en particulier (il s'agit de "stratèges r").

Sur base de cette classification et après avoir étudié un certain nombre de biohermes (Ordovicien au Crétacé), Walker & Alberstadt
distinguent les phases suivantes dans l'édification d'une bioconstruction:

- la stabilisation: cette phase correspond à la fixation du substrat par un certain nombre d'espèces ubiquistes (crinoïdes, bryozoaires branchus,
éponges...);

- la colonisation: c'est une phase de courte durée, marquée par l'apparition d'espèces constructrices, certaines déjà caractéristiques;

- la diversification: on observe une nette augmentation du nombre d'espèces et l'apparition de communautés différenciées et spécialisées; cette
phase forme la majeure partie des édifices;

- la domination: cette phase surmonte abruptement la phase de diversification et est caractérisée par une nette diminution du nombre d'espèces.
Quelques organismes, généralement encroûtants dominent.

On observe parallèlement à l'évolution des communautés, une variation de certains paramètres comme la spécialisation, la diversité spécifique,
la production organique etc... (Fig. XI.3).

Il faut remarquer que Walker & Alberstadt ne rejettent pas une action du milieu sur l'évolution des bioconstructions, mais estiment que pour
expliquer cette évolution, de la phase de colonisation à la phase de diversification, il n'est nullement nécessaire de faire intervenir un processus
allogénique. La phase de domination par contre semble toujours liée à l'entrée de l'édifice dans une zone bathymétrique où il subit nettement
l'action des vagues.

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Figure XI.3: variation des principaux paramètres écologiques des communautés récifales en fonction de leur degré de maturité, suivant le
modèle de Walker & Alberstadt.

LES RECIFS DANS L'HISTOIRE GEOLOGIQUE

L'histoire des récifs a ceci de commun avec une pièce de théâtre, qu'au cours des temps, les acteurs changent mais le récit/f demeure. De fait,
au long des temps géologiques, on distingue plusieurs périodes au cours desquelles des groupes de métazoaires constructeurs différents ont
édifié des récifs vrais, dotés d'une charpente résistante aux vagues: les bryozoaires, stromatoporoïdes et tabulés au cours de l'Ordovicien, les
stromatoporoïdes, rugueux et tabulés au cours du Silurien et du Dévonien, les stromatoporoïdes et les coraux à la fin du Trias et au cours du
Jurassique, les rudistes au Crétacé supérieur et enfin les coraux scléractiniaires depuis l'Oligocène. En dehors de ces périodes, les seules
bioconstructions étaient les monticules récifaux. Notons que même au cours des époques à récifs, des monticules se développaient, mais exilés
dans des milieux moins favorables (plus profonds, moins oxygénés, etc.). Très brièvement, passons en revue les différentes étapes de cette
histoire (Fig. XI.4).

- Les bioconstructions à stromatolithes du Précambrien: leur développement est lié à l'absence de métazoaires broûteurs. Généralement
localisés en bordure de plate-forme, ces édifices pouvaient atteindre une taille importante et montrent une zonation écologique et des
séquences comme les bioconstructions à organismes squelettiques.

- Les monticules du Cambrien inférieur: il s'agit d'édifices assez complexes, biohermes et biostromes, composés d'une superposition de petites
lentilles micritiques à archaeocyathes, éponges, Renalcis, Epiphyton, entourés de sables bioclastiques riches en crinoïdes et brachiopodes. Ces
lentilles possèdent des cavités de croissance emplies par des ciments précoces et des sédiments internes. La bioérosion est relativement
importante.

- A partir du Cambrien moyen, avec l'extinction des archaeocyathes, les monticules sont principalement constitués de cyanobactéries
(monticules stromatolithiques et thrombolitiques). Au cours du Cambrien supérieur et jusqu'à l'Ordovicien inférieur, ces monticules
cyanobactériens vont progressivement s'enrichir en éponges et en formes primitives de stromatoporoïdes et coraux (Pulchrilamina,
Lichenaria).

- De l'Ordovicien moyen au Dévonien supérieur, s'ouvre une période très favorable au développement de complexes récifaux: température
élevée, formation de vastes plates-formes carbonatées (Canning Basin, Australie; Golden Spike reef, Canada; monticules et récifs belges).
D'une manière générale, la séquence d'édification de ces complexes commence par un monticule récifal à stromatactis avec quelques éléments
squelettiques (bryozoaires au Siluro-Ordovicien, coraux et algues au Dévonien) et se poursuit par des récifs à coraux et stromatoporoïdes. Les
flancs des édifices sont généralement colonisés par des pelmatozoaires. La présence de talus bioclastiques et de fractures synsédimentaires
témoignent de la rigidité de ces récifs (Canning Basin).

Contrairement à l'extinction de la fin de l'Ordovicien, l'extinction tardi-frasnienne a particulièrement touché les communautés récifales: des
stromatoporoïdes ne subsisteront que quelques genres, les tabulés et les rugueux disparaîtront pratiquement totalement.

- Durant le Dinantien, période caractérisée par des températures plus fraiches et des fluctuations glacio-eustatiques, on observe peu ou pas
d'organismes constructeurs. La niche écologique des coraux et des stromatoporoïdes est occupée par les bryozoaires et les pelmatozoaires. Les
seules bioconstructions importantes sont les "récifs waulsortiens", des monticules micritiques à péloïdes (témoins de tapis microbiens) et
stromatactis, avec quelques crinoïdes et bryozoaires (édifices atteignant une centaine de mètres de relief avec un pendage des flancs de l'ordre
de 50°).

- Au cours du Namurien et au Westphalien-Stéphanien, de nouveaux organismes constructeurs apparaissent qui évolueront jusqu'à la fin du
Trias: algues phylloïdes (Archaeolithophyllum, Eugoniophyllum, Ivanovia) et surtout Tubiphytes, un constructeur énigmatique très important
depuis le Carbonifère jusqu'au sommet du Jurassique (maximum au Permien, Trias et Jurassique). Les édifices à phylloïdes sont relativement
modestes, avec un relief d'une trentaine de mètres et des flancs atteignant environ 25° de pente. D'autres constructeurs sont également
fréquents: foraminifères tubulaires, petits stromatoporoïdes branchus (Komia), calcisponges et Archaeolithoporella (algues corallines?).

- Les édifices permiens sont toujours essentiellement des biohermes à phylloïdes, avec une participation de plus en plus importante de
Tubiphytes et d'Archaeolithoporella, associés à des bryozoaires et d'autres algues calcaires (Solenopora, Parachaetetes). Ciments précoces et

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talus bioclastiques sont bien développés et on observe de véritables barrières récifales (Capitan reef, Texas), caractérisées par une grande
variété de niches écologiques dont de nombreux habitats cryptiques.

De manière un peu surprenante, tous ces constructeurs semblent avoir été peu affectés par la grande extinction tardi-permienne, au contraire
des organismes associés: on passe en effet d'un assemblage à brachiopodes-bryozoaires-pelmatozoaires à un assemblage plus "moderne" à
mollusques-crustacés-osteichythes.

- Après un arrêt du développement des bioconstructions au cours du Trias inférieur, dès le Trias moyen réapparaissent des petits monticules
relativement profonds avec de rares bryozoaires et coraux. Ensuite, se réinstallent de grands complexes récifaux à Tubiphytes, calcisponges,
quelques stromatoporoïdes et d'assez nombreux coraux. Il s'agit cette fois de scléractiniaires, nos coraux actuels, caractérisés par leur
association symbiotique avec des algues photosynthétiques.

- Au cours de la fin du Trias se développent des récifs à coraux, calcisponges, algues calcaires et stromatoporoïdes. Les coraux se localisent
plutôt dans les zones à forte énergie, les éponges et les stromatoporoïdes en environnement plus protégé (zone interne du récif). Pour la
première fois, la bioérosion par des algues et des bivalves devient un agent important de la dégradation des communautés récifales.

- Les récifs jurassiques connaissent un maximum de développement au cours de la fin de l'étage. Leur morphologie varie de patch-reefs en
environnemment de plate-forme interne à des récifs barrières étendus. La communauté dominante est à coraux et stromatopores, avec des
algues vertes (dasycladacées) et des algues rouges (Solenopora). Les codiacées modernes et les corallinacées articulées apparaissent pour la
première fois dans ces édifices. Les éponges y occupent un habitat cryptique. L'intensité de la bioérosion atteint progressivement le niveau
actuel. On observe également des monticules récifaux profonds, à relief assez important (centaine de mètres), constitués d'éponges siliceuses,
de foraminifères tubulaires et associés à des bryozoaires et des brachiopodes.

- La communauté récifale tardi-jurassique persiste au cours du Crétacé inférieur. A la même époque, un groupe de mollusques, les rudistes,
évolue rapidement et devient un constructeur important dès le Crétacé moyen. Ces bivalves envahissent tous les types de récifs, depuis les
patchs de lagons jusqu'aux édifices croissant sur les marges continentales. Au cours du Crétacé supérieur, les rudistes dominent complètement
les coraux et les algues encroûtantes. Ils édifient des biostromes sur les plates-formes et des biohermes sur leurs marges.

L'extinction bien connue de la fin du Crétacé frappe durement les communutés récifales: les rudistes disparaissent totalement, les coraux sont
sévèrement touchés, avec perte de 60 genres sur 90, les calcisponges et les stromatoporoïdes sont également très affectés.

- Au cours du Cénozoïque se mettront en place les communautés récifales actuelles, dominées par les coraux scléractiniaires et les algues
corallines. Solenopora (algue coralline) disparaît à la fin du Paléocène. Halimeda (codiacée) ne devient importante comme constituant des
sables coralliens qu'à partir du Miocène moyen.

Figure XI.4: récifs et monticules récifaux au cours de l'histoire géologique. La largeur de la colonne lithologique schématise l'importance du

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développement récifal; les étoiles noires représentent les extinctions majeures. D'après James, 1984, modifié.

Pour en savoir plus

 Álvaro J.J, Aretz M, Boulvain F., Munnecke A., Vachard D. & Vennin E., 2007. Palaeozoic Reefs and Bioaccumulations: Climatic and
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D.W.J., Bridges, P.H., and Pratt, B.R. (eds.): Carbonate Mud-Mounds, their origin and evolution. International Association of
Sedimentologists, Spec. Publ. 23, p. 3-9.
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Geologie und Paläontologie Abhandlungen, 5, 272-283.
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répartition. Geobios, Mém. sp. 8, 241-249.
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RECIFS ALGO-CORALLIENS DES EAUX SUPERFICIELLES TROPICALES

INTRODUCTION

Entrent dans cette catégorie les bioconstructions holocènes résistantes aux vagues, érigées principalement par des coraux scléractiniaires et des
algues corallines. Ce sont les édifices popularisés par les études océanographiques, nombreuses depuis le célèbre voyage du "Beagle". Aux
données véhiculées par la littérature géologique en général s'ajoute un grand nombre d'études biologiques, certaines très détaillées
(recensements exhaustifs de la faune et de la flore m² par m², études minutieuses de la structure des populations, etc.). La compréhension que
nous avons donc de ces récifs est sans commune mesure avec ce que nous savons de l'Ancien.

Les coraux scléractiniaires peuvent être subdivisés en deux groupes: les coraux hermatypiques et les coraux ahermatypiques.

- Les coraux hermatypiques sont caractérisés par la présence, au sein de leurs tissus, de symbiotes photosynthétiques: les zooxanthelles. La
densité de ces algues unicellulaires peut atteindre plusieurs millions par cm² de polype. Leur rôle est double: d'une part, elles fabriquent des
glucides (au départ d'énergie lumineuse et de sels nutritifs) dont une fraction importante est fournie au corail par transfert interne et d'autre
part, elles contribuent à la calcification du squelette corallien. Grâce à ces symbiotes, on peut dire que, bien qu'une colonie corallienne puisse
compléter ses besoins nutritifs par capture de proies planctoniques, son fonctionnement est essentiellement autotrophe. Ceci explique peut-être
le paradoxe de la formidable productivité de l'écosystème corallien (au sommet du classement planétaire: fixation > 1 kg de carbone/m²/an)
alors que les courants qui baignent les récifs sont clairs et contiennent peu de plancton et de sels nutritifs (fixation dans les plaines péri-
récifales < 50 g de carbone/m²/an). Par ailleurs, dans une colonie corallienne en bonne santé, la densité de zooxanthelles peut doubler tous les
dix jours, ce qui excède largement le taux de croissance des polypes. Ceux-ci expulsent alors la fraction excédentaire au rythme de plusieurs
milliers d'algues/heure/m². Cette expulsion de zooxanthelles constitue la base de la chaîne alimentaire récifale. Il faut donc garder à l'esprit
qu'un récif corallien actuel est avant tout une association symbiotique performante entre un animal et des micro-algues monocellulaires.

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Productivité et richesse de l'écosystème récifal.

Cette association limite cependant l'aire de répartition des coraux hermatypiques (du fait des exigences photiques des algues symbiotiques)
aux eaux peu profondes. Les larves des coraux (organismes libres et nageurs) ne supportant pas des températures moyennes inférieures à 18°
C, cela restreint les récifs coralliens aux eaux peu profondes tropicales (Fig. XI.5).

Fig. XI.5: températures océaniques de surface en hiver. D'après Sverdrup et al., 1942, modifié.

Paramètres écologiques des coraux hermatypiques:

 profondeur: moins de 100 m; optimum, moins de 20 m;


 température: plus de 16-18°; moins de 36°; optimum: 25-29°;
 salinité: 27 à 40 o/oo ; optimum: 36 o/oo ;

La Fig. XI.6 montre qu'il existe une zone, centrée sur l'équateur, où le nombre de genres de coraux hermatypiques est supérieure à 50. Cette
"zone sanctuaire" comprend les îles et archipels suivants: Bornéo, les Célèbes, la Papouasie, les Salomon, le nord de la Grande Barrière de
Corail d'Australie, le Vanuatu. Dès que l'on s'éloigne de ces régions, le nombre de genres diminue. L'explication principale de ce phénomène
paraît être les glaciations: la zone sanctuaire de Bornéo-Vanuatu, proche de l'équateur, aurait été épargnée par le refroidissement des eaux et
aurait réapprovisionné en larves coralliennes ses abords proches. Seules les régions les plus lointaines de ce foyer de repeuplement sont restées
relativement pauvres en genre du fait de leur éloignement.

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Fig. XI.6: répartition du nombre de genres de coraux hermatypiques. D'après Stoddart, 1969, modifié.

- Les coraux ahermatypiques ne possèdent pas de symbiotes algaires: leurs exigences écologiques sont donc moindres et leur aire de
répartition plus vaste. Leur taux de croissance est cependant nettement inférieur à celui des coraux hermatypiques et ils ne sont pas
compétitifs. Ils se développent soit en habitat cryptique (cavités, zones obscures) dans les récifs algo-coralliens, soit sous forme de récifs en
eaux profondes et/ou froides (fjords norvégiens, par exemple). Des exemplaires ont été observés jusqu'à 6000 m de profondeur, dans des eaux
de -1,1°C. Dans ces habitats, ils peuvent atteindre une taille métrique (Lophelia).

GENERALITES: MORPHOLOGIE DES RECIFS D'EAUX PEU PROFONDES ACTUELS

On distingue sur base de la géométrie des corps récifaux, de leur taille et de leur relation avec le continent les grands types suivants (Fig.
XI.7):

- les récifs frangeants: ces édifices se développent directement le long de la ligne de rivage;

- les bancs récifaux: ces récifs linéaires, généralement parallèles au rivage, ressemblent aux récifs barrière, mais sont localisés dans le lagon,
en arrière d'un vrai récif barrière. Ces récifs peuvent être coalescents avec des récifs frangeants;

- les patch reefs: il s'agit de petits édifices croissant en milieu lagonaire;

- les récifs-barrières: ce sont des récifs sensiblement linéaires, localisés à la bordure de la plate-forme. Ces édifices, souvent de taille
importante, délimitent un lagon de plate-forme en direction du continent. La Grande Barrière d'Australie est le plus grand récif barrière actuel:
il possède une largeur de 300 à 1000 m et s'étend sur près de 1950 km de longueur;

- les atolls: ces récifs océaniques de forme annulaire délimitent un lagon. Leur dimension est très variable: de moins de 2 km à plus de 32 km
de diamètre (détail ci-dessous);

- récifs tabulaires: récifs océaniques sans lagon intérieur.

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Fig. XI.7: types de constructions récifales. D'après James & Macintyre, 1985, modifié.

UN EXEMPLE: LES ATOLLS

Quelques définitions: atolls, îles hautes carbonatées

Les atolls sont donc des anneaux de terre ferme de quelques centaines de m de large, ceinturant une étendue d'eau marine d'une quarantaine de
m de profondeur au plus appelée lagon (et non lagune). La couronne atollienne comprend les zones suivantes, de l'océan vers le lagon (Fig.
XI.8, Tuamotu du NW):

 récif externe avec coraux vivants;


 ride à lithothamniées;
 platier externe;
 beach rock exhumé (voir ci-dessous);
 plage;
 motu avec cocoteraies alternant avec hoa; parfois, passes;
 levée sédimentaire avec éventuellement stromatolithes;
 talus sédimentaire se raccordant au plancher du lagon; dans la zone supérieure, nombreux coraux vivants, souvent de grande
dimension.

Motu: terme issu du vocabulaire polynésien désignant une île sableuse: aussi "caille", "key"; hoa: terme polynésien désignant une zone de
largeur très variable de la couronne d'un atoll, de quelques m à plusieurs km, permettant le passage de l'eau à marée haute de l'océan vers le
lagon, mais ne permettant pas le passage des bateaux; passe: interruption de la couronne atollienne permettant le passage d'un bateau et de
l'eau du lagon vers l'océan.

Les îles hautes carbonatées sont constituées de carbonates de plate-forme qui présentent des formes d'érosion concentrique avec un anneau
périphérique. Ces îles hautes ne sont pas des atolls soulevés comme on l'a cru quelquefois et leur forme d'érosion annulaire est due uniquement
à la karstification.

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Fig. XI.8: coupe dans une couronne atollienne. D'après Bourrouilh, 1996, modifié. Lors d'un tsunami, le mécanisme mis en jeu est le suivant:
(1) abaissement du niveau de la mer avec arrachement et vidange des sédiments; (2) arrivée de la vague avec arrachement et transport de
blocs; (3) écoulement de l'inondation, piégeage des sédiments sur les motu et transport dans le lagon via les hoa.

Fonctionnement

Au point de vue du budget nutritif: malgré le fonctionnement partiellement autotrophe de l'écosystème corallien, il semble difficile de
comprendre l'existence de récifs très productifs au sein d'eaux océaniques tropicales qui le sont très peu. L'hypothèse de l'endo-upwelling
géothermique permet de résoudre ce paradoxe (Rougerie & Wauthy, 1990). Ce phénomène correspond à la remontée d'eaux océaniques
profondes riches en nutriments, au sein de la structure récifale poreuse, à la faveur du flux géothermique subsistant à l'interface volcan-récif.
Les eaux profondes réchauffées remontent par convection et diffusent dans le haut de l'atoll. L'arrivée de ces eaux riches en surface
s'accompagne d'un double processus de précipitation: une précipitation organique résultant du métabolisme des coraux et des algues (dont la
prospérité est assurée par l'apport de nitrates, phosphore et silice contenus dans les eaux profondes) et une précipitation inorganique due aux
propriétés intrinsèques de ces eaux. L'eau profonde est en effet riche en gaz carbonique dissous, sous-saturée en CaCO3 (forme aragonite),
avec un pH de l'ordre de 7,8 ce qui facilite la pénétration à la base de l'atoll par dissolution des flancs calcaires. Pendant son réchauffement et
sa montée par convection, le produit de solubilité du carbonate de calcium diminue. Des précipitations carbonatées se produisent alors à
l'intérieur de la matrice calcaire, cimentant et consolidant l'édifice. Ces précipitations sont favorisées par la diminution de la pression partielle
de CO2 due au dégazage en surface et à la photosynthèse qui utilise le CO2; l'ensoleillement et la forte évaporation, habituelle par petit fond en
zone tropicale, sont également des facteurs favorables. Ce modèle rend ainsi compte de la présence de grandes quantités de ciment dans la
structure récifale et de son éventuelle dolomitisation. En effet, le passage de grandes quantités d'eau sous-saturée en CaCO3 mais toujours
saturée en carbonate de magnésium ne peut que favoriser les échanges Ca/Mg qui transforment la matrice calcaire en calcite magnésienne puis
en dolomite. Il faut remarquer que sur le plancher du lagon, la sédimentation de particules fines diminue la perméabilité du substrat et ne
permet pas la sortie d'eaux "endo-upwellées" (d'où la rareté des coraux). Suivant la belle expression de Rougerie & Wauthy (1990, p. 838),
"les nutrients pénétrant la structure poreuse diffusent lentement vers le haut de l'atoll: affleurant à la surface océanique, la vasque récifale
fonctionne ainsi de façon analogue à une lampe à pétrole; la photosynthèse brûle les nutrients qui apparaissent à la base du lagon après avoir
migré dans le socle corallien (la mèche) à partir du riche réservoir océanique profond".

Sans faire appel à la convection, des études récentes ont montré (par exploration endoscopique des cavités des récifs) que l'eau des cavités se
renouvelait en quelques minutes par effet de pompe induit par les vagues. Ces cavités (1 m2 de récif correspondant à 5 m2 de surface
"interne"!) sont habitées principalement par des éponges qui filtrent 60% du phytoplancton contenu dans l'eau; les sels minéraux et substances
nutritives libérés par la digestion du phytoplancton représenteraient près de 20% des besoins nutritifs de l'ensemble de la communauté récifale.

Au point de vue sédimentaire: l'essentiel de la production carbonatée est localisée au récif qui apparaît comme une véritable "usine à
carbonates" grâce aux nombreux organismes qui le composent et qui fabriquent soit de l'aragonite, soit de la calcite magnésienne. Ces
carbonates sont ensuite triturés par les poissons broûteurs de corail ou perforés par les lithophages. Les particules calcaires ainsi créées vont
sédimenter dans des zones plus ou moins proches du récif: turbidites carbonatées dans les plaines abyssales environnant les récifs, cordons de
sable et de gravier sur les îles, accumulation de boue et de débris coralliens dans le lagon. Ces transports sédimentaires se font en général sous
l'action d'événements hydrodynamiques de très haute énergie, cyclones ou tsunamis. Les conséquences écologiques et sédimentologiques de
ces événements sont très grandes pour les récifs: les vagues engendrées peuvent dépasser 10 m d'amplitude et déplacer des blocs cyclopéens
résultant du démantèlement de la dalle du platier. Il semble également que la succession des motu et hoa soit le résultat de l'action des
tsunamis et ouragans.

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Gravier calcaire formé principalement de fragments de coraux, platier corallien, Seychelles.

L'origine de la morphologie typique des atolls a été d'abord interprétée par Darwin comme la conséquence de la subsidence d'un édifice
volcanique supportant un récif frangeant. Cette subsidence aurait induit la croissance verticale de ce récif afin de demeurer dans sa zone de
prospérité. Actuellement, les auteurs semblent s'orienter vers un héritage à la fois eustatique et diagénétique: les baisses du niveau marin
seraient à l'origine du développement d'une morphologie karstique par installation d'une lentille d'eau douce; la dissolution des carbonates
étant maximale au centre des îles. Ensuite, après ennoiement, la présence d'une aire déprimée (lagon) au centre de l'édifice persisterait suite à
l'absence de lithification en milieu lagonaire et à l'exportation de sédiments lors des événements de forte énergie (tempêtes, tsunamis).

Evolution morphologique récente (Fig. XI.9): exemple des Tuamotu du NW (Bourrouilh-Le Jan, 1996). A: vers 14.000 ans BP les atolls sont
tous émergés et dominent de 120 à 140 m le paléoniveau marin. B: la transgression holocène est très rapide et dépasse vers 4000 ans BP le
niveau actuel: tous les atolls sont submergés. La biocénose récifale se réinstalle et édifie les platiers actuels ("catch-up"). C: entre 4000 ans BP
et maintenant, le niveau de la mer baisse jusqu'au niveau actuel. D1 et D2 illustrent les deux morphologies possibles de la couronne atollienne
des Tuamotu; D1: le motu entouré d'un beach-rock exhumé d'âge mi-holocène formé durant la phase C et D2: une petite lagune (eaux
saumâtres à stromatolithes) formée à la suite de l'excavation de matériel sédimentaire sous l'effet des événements de forte énergie.

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Fig. XI.9: évolution morphologique récente d'une couronne atollienne (lagon vers la gauche du schéma). Tuamotu du NW. D'après
Bourrouilh, 1996, modifié.

UN AUTRE EXEMPLE: LE RECIF BARRIERE

Par comparaison, la Fig. XI.10 montre la zonation écologique et la morphologie d'un récif barrière. Il s'agit de Carrie Bow Cay, récif de Belize
(Caraïbes) (James & Macintyre, 1985).

- Lagon: ce lagon de plate-forme comporte deux zones distinctes: une prairie à Thalassia testudinum ("herbe à tortues") sur un substrat silto-
sableux; en direction du large, les herbes à tortues disparaissent et le substrat devient sablo-graveleux avec quelques buissons d'Acropora
cervicornis.

- Arrière-récif: la profondeur s'y échelonne de 1 m à l'émersion (partie interne de la crête récifale). On y observe également deux zones: la
première est la zone des "patch-reef" avec des coraux comme Montastrea annularis, Diploria labyrinthiformis, Acropora cervicornis et
Porites astreoides. Une bonne moitié de la surface de ces patch-reef est encroûtée par des algues dont des algues corallines. Les oursins y sont
abondants. La seconde zone est la zone des graviers et pavement, avec apparition progressive au milieu des sables et cailloux d'un substrat
induré (le pavement). Ce substrat rocheux est un conglomérat de fragments de coraux, mollusques et algues corallines dans une matrice
sableuse cimentée par de la calcite magnésienne. Les coraux qui se développent sur ce fond durci sont principalement Porites astreoides, avec
quelques Siderastrea siderea, Agaricia agaricites, Diploria clivosa, Acropora cervicornis et A. palmata.

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A: platier récifal à marée basse avec Acropora (remarquer la coloration verte due aux algues symbiotiques), île de Laing; B: Halimeda, une
algue verte calcaire dont la contribution à la production des sables carbonatés est très importante. Photos A. Herbosch.

A: platier récifal séparant la plage de la mer; B: bloc de grande taille (fragment récifal), arraché et déposé sur la côte par une tempête ou un
tsunami. Iles Ryukyu, Japon; photos A-C. da Silva.

- Récif: la bordure interne de la crête récifale consiste en un réseau ("framework") de coraux morts (environ 60%) encroûtés par des algues.
Les coraux sont représentés principalement par Acropora palmata, Agaricia agaricites et Porites astreoides. En direction de l'océan, ce réseau
passe progressivement à une barrière dense de Millepora complanata, suivie en eau un peu plus profonde par des buissons d'Acropora
palmata. Latéralement ces bioconstructions peuvent passer à des accumulations de cailloux et blocs.

- Avant-récif interne: à partir d'une profondeur d'environ 2 m, s'observent des "pinnacles" de Millepora complanata, A. palmata et Agaricia
tenuifolia. Ces constructions coalescent en direction de l'océan pour former les spectaculaires éperons de la zone des "éperons et
sillons" ("spur and grooves") qui s'élèvent d'environ 7 m au-dessus des sillons emplis de sable et gravier. Du sommet des éperons aux sillons,
on observe la succession Acropora palmata et A. cervicornis, ensuite Agaricia tenuifolia, Millepora complanata et Porites porites et enfin
Agaricia agaricites, Diploria strigosa et Montastrea annularis avec quelques octocoralliaires.

La zone des éperons et sillons passe vers 10 m de profondeur à une zone où les éperons sont moins élevés (relief de 1 m au plus) avec
Montastrea annularis, M. cavernosa, Diploria strigosa et des octocoralliaires. Le remplissage sableux des sillons diminue et un substrat
induré colonisé par des octocoralliaires et des coraux massifs apparaît.

- Avant-récif externe: sa bordure interne est marquée par une nette augmentation de la pente du récif jusqu'à environ 25°: c'est le talus récifal
interne qui s'échelonne de 15 à 22 m et qui est couvert de buissons d'Acropora cervicornis et Montastrea annularis. Vers la base, les colonies
columnaires de M. annularis prennent une morphologie lamellaire et sont accompagnées de Agaricia tenuifolia, Porites astreoides et
Siderastrea siderea. Le talus récifal interne s'achève dans un fossé à remplissage sablo-graveleux où s'observent quelques pinnacles avec
Montastrea annularis et Acropora cervicornis.

Une ride à relief prononcé (environ 10 m de haut) délimite la partie externe du fossé sableux. Sur le flanc interne de cette ride croissent
Acropora cervicornis et une variété de coraux massifs dont Montastrea annularis, Diploria labyrinthiformis et Porites astreoides. Le flanc
externe de la ride descend ensuite assez abruptement. La partie supérieure de cette pente, le talus d'avant-récif, à pente variant entre 50 et 70°,
est caractérisée par une communauté à coraux lamellaires, dominée notamment par Montastrea annularis, M. cavernosa, Agaricia fragilis et
Leptoseris cucullata. Sous cette communauté récifale, qui semble pouvoir s'étendre jusqu'à 70 à 80 m, s'observe un escarpement (falaise sous-
marine) plongeant jusqu'à -120 m. Cette falaise est constituée de calcaire récifal et a été érodée durant les périodes de bas niveau marin du
Pléistocène. Elle est colonisée par des éponges, des crinoïdes et des coraux ahermatypiques.

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Figure XI.10: zonation écologique et morphologie d'un transect dans le récif barrière de Carrie Bow Cay (Caraïbes). D'après James &
Macintyre (1985), modifié.

Rôle des paramètres physiques sur la répartition et la morphologie des coraux

Par ordre décroissant d'importance, on peut citer la nature du substrat, l'intensité d'éclairement, les effets hydrodynamiques (Geister, 1980).

- La nature du substrat: pour se développer, la plupart des coraux ont besoin d'un substrat dur. La période la plus critique est leur première
phase de vie après la fixation des larves: dans des sédiments trop meubles, le petit polype risque d'être recouvert. C'est ce qui explique la rareté
des coraux dans les lagons ou sur les côtes très calmes. Certaines espèces spécialisées ont cependant développé des caractères originaux leur
permettant de se développer en l'absence de substrat induré: c'est le cas des colonies non fixées de Siderastrea radians roulant à la surface des
sédiments. Certains coraux d'espèces ramifiées (Acropora cervicornis), qui vivent normalement fixés sur substrat dur, peuvent former des
colonies mobiles sur le sable. Ces colonies naissent par régénération de branches brisées durant les tempêtes. Ces branches, déposées sur des
sédiments meubles, ne peuvent se fixer. En conséquence, elles sont basculées et roulées périodiquement au gré des courants. Leur croissance
phototropique pendant les phases de calme engendre progressivement des colonies grossièrement sphériques.

- L'intensité d'éclairement: conséquence évidente de la symbiose avec les zooxanthelles. On observe une diminution progressive du nombre
d'espèces avec la profondeur (Fig. XI.11). Ce modèle correspond à des eaux océaniques limpides. Dans des eaux plus turbides, l'extension
bathymétrique des coraux est réduite.

Figure X.11: zonation bathymétrique de coraux fréquents. D'après Geister (1980).

On peut également remarquer une variation morphologique au sein d'une même espèce: des coraux massifs en eau peu profonde adoptent une

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morphologie de plus en plus aplatie à partir de 20 m de profondeur. Les branches de certaines espèces ramifiées (Acropora cervicornis)
deviennent plus minces et moins fourchues au-delà de 15 à 20 m, de manière à augmenter la surface illuminée.

- L'action des vagues: l'intensité de cette action est très variable en fonction de la profondeur, de l'orientation par rapport à la houle dominante,
etc. Cette variation induit des adaptations morphologiques des coraux et des modifications dans la composition des communautés.

Au point de vue morphologique, on observe que les colonies branchues d'Acropora cervicornis deviennent plus touffues en milieu plus agité.
Certaines espèces tendent également à développer une morphologie encroûtante (A. palmata) et à croître parallèlement à la direction de
propagation des vagues.

En comparant les associations des organismes colonisant les crêtes récifales, on peut noter une forte différentiation selon le degré d'exposition
aux vagues. La Fig. XI.12 représente les types récifaux principaux observés en mer des Caraïbes.

Figure XI.12: conséquences de l'agitation de l'eau et de la bathymétrie sur la distribution des communautés récifales. D'après Geister (1980).

Ce modèle est différent pour les récifs exposés fréquemment aux tempêtes. Dans ce cas, les espèces ramifiées sont généralement remplacées
par des espèces hémisphériques ou encroûtantes. Partant de ces observations, on peut classer les espèces suivant leur plus ou moins grande
sensibilité aux dégâts provoqués par les tempêtes. Des plus résistants aux plus fragiles, on a: colonies encroûtantes (Diploria clivosa, Porites
astreoides), colonies massives (Montastrea annularis, Diploria strigosa), colonies branchues avec base vivante (régénération plus facile après
bris: Millepora, Acropora palmata) et enfin colonies branchues avec base nécrosée (Acropora cervicornis, Porites porites). On a constaté
aussi que des tempêtes fortes et fréquentes inhibent la formation d'une charpente récifale (framestone). Dans ce cas, les rudstones dominent
(Braithwaite et al., 2000).

Pour en savoir plus

 F. Bourrouilh-Le Jan, 1996. Plates-formes carbonatées et atolls du centre et sud Pacifique. Stratigraphie, sédimentologie, minéralogie
et géochimie. Diagenèses et émersions: aragonite, calcite, dolomite, bauxite et phosphate. Documents du BRGM, 249, 365 pp.
 C.J.R. Braithwaite, L.F. Montaggioni, G.F. Camoin, H. Dalmasso, W.C. Dullo & A. Mangini, 2000. Origins and development of
Holocene coral reefs : a revisited model based on reef boreholes in the Seychelles, Indian Ocean. International Journal of Earth
Sciences, 89, 431-445.
 J. Geister, 1980. Morphologie et distribution des coraux dans les récifs actuels de la mer des Caraïbes. Annali del l'Università di
Ferrara, Sez IX, Vol. VI, 28 pp.
 E.G. Purdy & E. Gischler, 2003. The Belize margin revisited: 1. Holocene marine facies. Int. J. Earth Sci., 92, 532-551.
 F. Rougerie & B. Wauthy, 1990. Les atolls oasis. La Recherche, 223, 832-842.

MONTICULES RECIFAUX A CORAUX AHERMATYPIQUES

LES LITHOHERMES

Découverts dans les années '70 le long de la marge orientale du "Little Bahama Bank", par des profondeurs de 600 à 700 m, ces édifices
couvrent une superficie de plusieurs milliers de km2 (Fig. X.3A). Il s'agit de monticules de morphologie grossièrement elliptique, allongés
parallèlement aux courants de fond (2 à 7 cm/s), de taille variable (quelques centaines de mètres de longueur pour une cinquantaine de mètres
de hauteur). Les flancs des grands édifices sont relativement abrupts, avec des pentes moyennes atteignant 20° à 30° (la pente d'équilibre de
sédiments fins non cimentés ne dépasse pas 6°). Récemment, Paull et al. (1998), ont observé une ride de 4,4 km de long pour 150 m de haut,
allongée parallèlement à la pente et établie au niveau d'une rupture de pente, formée par coalescence d'édifices plus petits.

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La surface supérieure de ces monticules apparaît très irrégulière: elle est constituée de croûtes de sédiments indurés de 10 à 30 cm d'épaisseur.
Des accidents (cassures, érosions,...) permettent d'observer par endroit la structure interne de ces "lithohermes": les croûtes se superposent de
manière régulière, séparées les unes des autres par des niveaux de sédiment meuble, souvent excavé par des organismes fouisseurs. La
structure générale des lithohermes paraît donc être "en pelure d'oignon".

La surface des lithohermes est intensément perforée par une endofaune très développée. D'assez fortes différences apparaissent entre les divers
édifices: certains sont partiellement couverts de sédiments meubles, d'autres montrent une surface rocheuse, d'autres encore sont
complètement recouverts de buissons coralliens.

La faune est généralement dominée par les coraux branchus ahermatypiques Lophelia et Enallopsammia, les éponges et les crinoïdes non-
érigés (Comatulidés), associés à des éponges endolithiques. Une zonation écologique, par rapport aux courants, se manifeste: les coraux sont
situés sur la face exposée, tandis que les crinoïdes se développent "à l'arrière" des bioconstructions. L'essentiel du piégeage de sédiment
semble réalisé par les coraux et l'édifice prograde en direction du courant. Le caractère relativement fin des sédiments des lithohermes
s'oppose au caractère plus grossier des sédiments situés en dehors des édifices. Ceci suggère que la fraction fine est emportée par les courants
de fond au niveau des interbiohermes et piégée par les organismes sur les lithohermes (bafflestone).

D'un point de vue pétrographique, le sédiment meuble est constitué pour la fraction sableuse de foraminifères planctoniques et de tests de
ptéropodes avec une contribution mineure de grains exportés de la plate-forme peu profonde (oolithes, Halimeda). La fraction graveleuse
comprend essentiellement des fragments de coraux. La minéralogie globale des sédiments meubles est dominée par l'aragonite. Les sédiments
lithifiés sont par contre constitués principalement de calcite Mg (14 moles % MgCO3), avec de rares concentrations de micrite aragonitique.
La texture est variable, depuis des rudstones et floatstones à coraux jusqu'à des wackestones/packstones à foraminifères, péloïdes et
ptéropodes.

La nature exacte du mécanisme de lithification sous-marine est encore mal comprise: Neumann et al. (1977) suspectent une interaction entre
un régime océanographique particulier (courant de fond ascendant, entraînant une diminution de pression et une augmentation de température)
associé à un apport important de micrite aragonitique peu stable issue du "Little Bahama Bank".

A gauche, fragment de lithoherme (Blake Plateau) montrant les nombreuses perforations affectant le sédiment. Echantillon C. Neumann; à
droite, colonie de Lophelia actuelle, Atlantique nord.

LES MONTICULES CORALLIENS PROFONDS

Exemple des Bahamas

Ces monticules ont été observés par 1000-1300 m de fond, sur le talus nord ("lower slope", avec une pente de l'ordre de 1°) du "Little Bahama
Bank" où ils couvrent une superficie de 2500 km2. Les courants de fond sont de l'ordre de 50 cm/s, la température de l'eau se situe entre 4 et 6°
C, avec une salinité normale de l'ordre de 34,5 à 35,5 o/oo.

Les édifices ont un relief de 5 à 40 m, une morphologie elliptique à circulaire (diamètre de 50 à 200 m), avec des flancs relativement raides.
Contrairement aux lithohermes, leur surface n'est pas lithifiée, mais est constituée de sédiment fin, colonisé par une communauté relativement
diversifiée de coraux ahermatypiques (généralement solitaires et de petite taille), de gorgones, hyalosponges et calcisponges, de bryozoaires,
de vers serpulidés et de crinoïdes. A cette communauté fixée se joignent quelques mollusques, échinodermes et arthropodes. Comme dans le
cas des lithohermes, le caractère fin des sédiments biohermaux (20% sable et gravier) contraste avec le caractère plus grossier des sédiments
interbiohermaux (entre 50% et 90% de sable et gravier). Ceci suggère encore un mécanisme de piégeage par les organismes sur les
monticules. L'analyse détaillée de la fraction grossière montre que les éléments graveleux proviennent essentiellement du remaniement des
organismes colonisant les monticules, alors que la fraction sableuse consiste surtout en foraminifères pélagiques et ptéropodes. La
composition minéralogique du sédiment est la suivante: 50% aragonite, 15% calcite Mg et 35% calcite. L'aragonite semble provenir des
coraux et des ptéropodes et aussi de boue issue du "Little Bahama Bank", la calcite provient des foraminifères planctoniques et de coccolithes
et enfin, la calcite Mg dériverait de fragments d'échinodermes et de foraminifères benthiques.

Le développement de ce type d'édifice semble correspondre à la séquence suivante:

 colonisation d'un substrat dur (fond durci, bloc allochtone,...) par des coraux pionniers;
 ces premières colonies piègent le sédiment en suspension; en même temps, la destruction des colonies coralliennes par des organismes

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endolithiques fournit un substrat stable pour l'installation de nouvelles larves;


 le monticule se développe par la combinaison d'un processus de piégeage de sédiment en suspension et de production in-situ de
matériel plus grossier.

Critères de reconnaissance des monticules récifaux profonds dans l'histoire géologique

- Absence d'algues;

- diversité spécifique moins élevée: 60 à 100 espèces de coraux en milieu récifal peu profond actuel pour 1 à 16 pour les biohermes profonds;

- microperforations souvent parallèles à la surface du substrat; en environnement peu profond, ces microperforations sont généralement
perpendiculaires au substrat;

- contexte général très différent: les récifs peu profonds sont associés à des environnements lagonaires, intertidaux, tandis que les monticules
profonds se développent dans un contexte de talus; de même, la nature de la fraction sableuse est totalement différente, avec des grains de type
"peu profond" (oolithes, agrégats, algues,...) pour les récifs et "profond" pour les monticules à coraux ahermatypiques (organismes pélagiques
et planctoniques).

- teneur en éléments traces différente: les coraux ahermatypiques ont une teneur en Sr et U plus élevée que les coraux hermatypiques.

Mud mound ("kesskess") emsiens, Hmar Lakdad (Maroc). Il s'agit de monticules profonds à éponges, coraux et crinoïdes.

Exemple des monticules de l'Atlantique nord

Très récemment, suite à l'exploration pétrolière détaillée de l'Atlantique nord, de très nombreux monticules coralliens profonds ont été
découverts. Ces édifices sont généralement localisés entre 500 et 1500 m de profondeur (500 m semble être leur profondeur minimale, elle
correspond à la séparation entre les eaux atlantiques de surface chaudes et les eaux arctiques froides). Certains de ces monticules peuvent
atteindre une extension horizontale kilométrique et un relief de près de 200 m. Comme dans le cas des autres bioconstructions profondes, la
diversité spécifique des communautés organiques est faible et le corail ahermatypique Lophelia semble dominer.

Une hypothèse intéressante est que ces écosystèmes profonds seraient liés à des arrivées en surface de méthane ("cold seepage"), alimentant
une communauté de bactéries chémolithotrophiques (dégradation du méthane). Ces bactéries formeraient ainsi la base d'une pyramide
alimentaire non photosynthétique. A l'appui de cette hypothèse, outre de nombreuses structures sédimentaires probablement liées au dégazage
et outre des arrivées de méthane mesurées en surface, on a découvert des récifs annulaires, véritables "atolls" profonds, centrés autour d'un
évent.

Critères de reconnaissance des monticules profonds liés au dégazage

Pour distinguer les monticules profonds liés au dégazage ("cold seep mounds" dont la pyramide écologique est basée sur le méthane) des
autres monticules profonds ("marine mounds" dont la pyramide écologique est basée sur les nutriments en suspension dans l'eau marine),
Peckmann, Reitner & Neuweiler (1998, in "Carbonate mud mounds and cold water reefs") proposent les critères suivants:

- texture: les sédiments des "cold seep mud mounds" sont toujours fortement bréchifiés: ceci est dû à des accumulations gazeuses ou à la
croissance dans le sédiment d'hydrates de méthane;

- faune: les "cold seep mud mounds" semblent caractérisés par des accumulations de grands bivalves (dans la nature actuelle: Bathymodiolus,
Calyptogena,...) ou de tubes de vers (Lamellibrachia, Escarpia,...). Sont également associés: décapodes et éponges. Dans le cas des "marine
mounds", la faune est dominée par des filtreurs: bryozoaires, éponges, coraux avec quelques brachiopodes, foraminifères encroûtants. Une
zonation bathymétrique est souvent perceptible;

- diagenèse précoce: l'aragonite semble souvent associée aux "cold seep mounds". D'un point de vue isotopique, les valeurs de 13C sont très
basses, atteignant -30 o/oo (PDB).

Une fois ces critères établis, l'étude d'une bioconstruction conduira à l'identification des communautés, de sa bathymétrie et surtout de
son mode de fonctionnement (Fig. XI.13): s'agit-il de la photosynthèse seule (tapis algaires et cyanobactériens, cf. ch. X), d'un mélange
d'hétérotrophie et de photosynthèse (récifs à coraux hermatypiques), d'hétérotrophie seule (lithohermes, monticules des bahamas) ou
enfin de chemolithotrophie ("seepage mounds")? Le mode de production/stabilisation de la boue carbonatée est également un
paramètre lié au type de bioconstruction, même si plusieurs modes sont généralement actifs au sein d'un même édifice. La cimentation

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et la biominéralisation sont les processus principaux dans les récifs algo-coralliens, tandis que l'organominéralisation semble
prépondérante dans les édifices plus profonds.

Nous allons envisager maintenant un certain nombre d'exemples anciens.

Fig. XI.13: principales caractéristiques des différents types de bioconstructions.

Pour en savoir plus

 C. Dullo & J-P. Henriet, 2007. Carbonate mounds on the NW European margin: a window into Earth history. International Journal of
Earth Sciences, Sp. Issue, 96, 213 pp.
 A.C. Neumann, J.W. Kofoed & G.H. Keller, 1977. Lithoherms in the Straits of Florida. Geology, 5, 4-10.
 H.T. Mullins, C.R. Newton, K. Heath, H.M. Vanburen, 1981. Modern deep-water coral mounds north of Little Bahama Bank: criteria
for recognition of deep-water coral bioherms in the rock record. Journal of Sedimentary Petrology, 51 (3), 999-1013.

LES MONTICULES WAULSORTIENS

cf. excursions

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LES MONTICULES MICRITIQUES FRASNIENS

cf. excursions

LES BIOSTROMES GIVETIENS

cf excursions

XII. Les sédiments organiques


INTRODUCTION

Même dans les milieux où la production primaire de matière organique est élevée, sa conservation dans les sédiments et son insertion dans le
cycle géologique est problématique. Si l'on prend l'exemple de l'océan, la matière organique produite par le phytoplancton dans la zone
photique est en grande partie recyclée dans la chaîne alimentaire. Une partie réduite de cette matière organique tombe à travers la colonne
d'eau vers le fond marin en subissant encore des processus de décomposition et enfin, dans le sédiment, une part importante de la matière
organique sera détruite par oxydation dans la tranche bioturbée (Fig. XII.1). On considère qu'il y a en général un rapport de 1 à 100 entre
production primaire et matière organique arrivant sur le fond marin.

Fig. XII.1: Flux de la matière organique depuis sa production dans la zone photique jusqu'à son enfouissement dans le sédiment.

La dégradation aérobie de la matière organique correspond schématiquement à la réaction suivante:

C6H12O6 + 6 O2 → 6 CO2 + 6 H2O

C'est en fait la réaction inverse du processus mis en oeuvre dans la production primaire de sucre par la photosynthèse. Dans les sédiments
bioturbés donc, la matière organique est oxydée. Dans les milieux déficitaires en O2, la décomposition de la matière organique est incomplète
et certains composés relativement stables peuvent être préservés. Les conditions menant à une diagenèse précoce anaérobie sont:

- une production de matière organique tellement importante que sa dégradation consomme tout l'oxygène disponible; c'est le cas de certaines
zones océaniques à haute productivité (upwellings,...);

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- la présence d'eaux anoxiques au contact du sédiment: c'est le cas de bassins stratifiés comme la Mer Noire; c'est aussi le cas lorsque le fond
marin est baigné par la "zone d'oxygène minimum";

- un taux de sédimentation élevé, inhibant la présence d'endofaune;

- une granulométrie fine, limitant les échanges entre le sédiment et les eaux oxygénées.

A titre d'exemple, les grès contiennent en moyenne 0,05% de matière organique, les calcaires 0,3% et les roches pélitiques 2%.

Les principaux sédiments organiques sont les schistes bitumineux, le pétrole, le gaz, le charbon, la lignite et son équivalent actuel, la tourbe.
Passons les en revue.

LES SEDIMENTS ORGANIQUES ACTUELS

Les types principaux en sont l'humus, la tourbe et le sapropel. L'humus consiste en matière organique fraîche, en voie de dégradation, localisée
dans la partie superficielle des sols. Au cours du temps, la plus grande partie de l'humus est oxydée et n'est pas conservée dans les formations
géologiques. Sa présence est cependant importante au travers de l'action exercée par les acides humiques sur les minéraux des sols. La tourbe
est une accumulation de débris végétaux dans des zones marécageuses où les conditions anaérobies inhibent la dégradation de la matière
organique. Enfin, le terme sapropel se réfère à des sédiments organiques, dérivés du phytoplancton et déposés dans des bassins lacustres ou
marins.

LES SEDIMENTS ORGANIQUES ANCIENS

On les classe en deux groupes principaux: les sédiments organiques formés in-situ comme la tourbe et l'humus (groupe humique) et les
sédiments constitués de matière organique transportée ou déposée en suspension comme les sapropels (groupe sapropélique). La plupart des
lignites et charbons appartiennent au groupe humique, avec des contenus en matière inorganique inférieurs à 33% (argile, silt, sable) alors que
les schistes bitumineux et certains charbons ("cannel coals", "boghead", formés principalement de débris allochtone de plante et d'algues) font
partie du groupe sapropélique; leur contenu en matière inorganique peut dépasser 33%.

Les sédiments organiques anciens peuvent aussi être secondaires et résulter de la migration de composés organiques à partir d'une roche-mère
vers un sédiment poreux (pétrole, gaz).

LES CHARBONS

Les charbons sont issus de l'évolution diagénétique de débris végétaux. Ainsi, les charbons humiques forment une série continue depuis la
tourbe jusqu'à l'anthracite, en passant par le lignite et le charbon bitumineux. On appelle "houillification" les processus physico-chimiques et
organiques intervenant au cours de la transformation de la tourbe en charbon et "rang" un stade déterminé de cette évolution. Un rang croissant
indique une teneur croissante en carbone et décroissante en H2O, CO 2, CH4, N2 (Tab. XII.1).

De manière simplifiée, on peut dire que la diagenèse conduit des tourbes aux lignites (dans lesquelles les débris de plantes sont toujours
visibles) jusqu'à environ 1000 m d'enfouissement. Jusqu'à 5000 m de profondeur (soit 100-200°C) se forment ensuite des charbons de plus en
plus bitumineux, dans lesquels un processus de gélification fait disparaître les cellules végétales au profit de la vitrinite. Enfin, les anthracites
apparaissent dans l'anchizone du métamorphisme.

On reconnaît l'anthracite à son aspect brillant et sa cassure conchoïdale. Il faut noter que lors de la transformation du charbon bitumineux en
anthracite, du méthane est libéré; c'est le "grisou", si dangereux dans les mines de charbon.

Rang C (%) volatiles (%) valeur calorifique (KJ/g)


tourbe <50 >50
lignite 60 50 15-25
charbon sub-bitumineux 75 45 25-30
charbon bitumineux 85 35 30-35
semi-anthracite 87 25 30-35
anthracite 90 10 30-35
graphite >90 <5
Tab. XII.1: rang et caractéristiques des charbons de la série humique.

Depuis la fin du Dévonien (prolifération de la végétation sur les continents), du charbon se forme dans les zones climatiques humides. On
distingue deux types d'environnements de formation de charbon: les milieux paraliques et les milieux limniques. La plupart des charbons
westphaliens (exemple: Belgique) se sont développés dans des environnements paraliques, probablement de type deltaïque côtier, alors que
plus tard, au Stéphanien, prédominent les charbons de milieux limniques, correspondant à des lacs, souvent localisés dans des fossés
d'effondrement de la chaîne varisque (exemple: Montagne Noire, France).

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A: mine de charbon à ciel ouvert de Graissessac (Montagne Noire, France); les veines de charbon alternent avec des grès fluviatiles; l'échelle
est donnée par le personnage (flèche). B: détail montrant un tronc préservé dans une des veines. Stéphanien.

Dans les charbons de type paralique, la séquence type est constituée d'une succession de sédiments pélitiques à fossiles marins, suivie de
pélites, siltites et éventuellement grès fluviatiles, puis de la veine de charbon. Le charbon surmonte un sol caractérisé par des traces de racines.
Dans le cas des sols développés sur sable, le grès évolue souvent en quartzite très dur ("ganister"); dans le cas de sols sur sédiments plus fins,
ce sédiment contient des nodules de sidérite.

Dans beaucoup de séries houillères, on observe des niveaux de cendres volcaniques: tonsteins riches en kaolinite et bentonites riches en
smectites. Ces niveaux, de même que les niveaux marins à fossiles servent à dater ces séries.

LES SCHISTES BITUMINEUX

Il s'agit de sédiments fins contenant de 4 à 50% de bitume ou de kérogène. On y observe une fine lamination, faisant alterner lamines
organiques et lamines détritiques. L'origine de la matière organique semble être algaire. Ces deux observations permettent de supposer que ces
schistes bitumineux se forment dans des corps d'eau stratifiés, où des blooms algaires en surface donnent lieu à des apports massifs et
périodiques de matière organique sur le fond anoxique. Ceci peut se produire en environnement lacustre aussi bien qu'en milieu marin.

LE PETROLE

Le pétrole est un mélange de solides (bitumes), de liquides (huiles) et de gaz. Sa formation résulte de l'évolution, au cours de l'enfouissement,
de la matière organique piégée dans des sédiments (roches-mères). Cette matière organique à l'origine du pétrole est appelée "kérogène". A
partir de ce kérogène, des réactions thermocatalytiques produisent des alkanes et des naphtènes, les principaux constituants du pétrole. Au fur
et à mesure de l'enfouissement et de l'augmentation de température, la production de pétrole augmente, passe par un maximum ("fenêtre à
huile", entre 70 et 100°C) et diminue ensuite (Fig. XII.2). A plus grande profondeur, la production de pétrole décroît au profit de la production
de gaz (craquage naturel du pétrole en hydrocarbures plus légers); il s'agit d'abord de "gaz humides" puis, au-dessus de 150°C, de "gaz secs".
Le résidu de ce craquage est appelé kérabitume.

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Fig. XII.2: formation du pétrole. Les profondeurs sont indicatives et dépendent du gradient géothermique.

La formation d'un gisement de pétrole nécessite aussi un mécanisme de migration. La plupart des roches-mères sont en effet des sédiments
fins dont il n'est pas possible d'extraire le pétrole. Une première migration a lieu sous l'effet de la compaction des sédiments (migration
primaire); ensuite, le pétrole est amené au réservoir par des drains (migration secondaire) sous l'effet de la gravité (le pétrole est moins dense
que l'eau). La roche jouant le rôle de réservoir peut posséder une micro-porosité (sable, grès, craie, dolomie) ou une porosité en grand
(calcaire). La géométrie des réservoirs peut résulter de la tectonique (anticlinaux, failles, diapirs) ou de la sédimentation (discontinuité,
onlap,...). Enfin, pour que le pétrole demeure dans le réservoir, il faut que celui-ci soit surmonté d'une barrière imperméable. Les roches-
barrières les plus fréquentes sont les argiles et les évaporites.

Pour en savoir plus

 Gluyas, J. & Swarbrick, R.E., 2001. Petroleum geoscience, Blackwell, 400 pp.
 Lyons, P.C. & Alpern, B. (Eds.), 1989. Coal. Elsevier, 678 pp.
 Whateley, M.K.G. & Spears, D.A. (Eds.), 1995. European coal geology. Sp. Publ. 41, Geol. Soc. London, 500 pp.

XIII. Dépôts volcano-sédimentaires


INTRODUCTION

Précisons d'abord le sens des termes utilisés. D'une manière générale, le terme "volcano-sédimentaire" pourrait s'appliquer à n'importe quel
sédiment renfermant du matériel volcanique en proportion importante. Mais on réserve plutôt le terme aux dépôts élaborés par des processus
où le volcanisme est dominant. C'est ce sens que nous utiliserons dans la suite du chapitre; il implique donc la contemporanéité de la
sédimentation et du phénomène volcanique. Le terme "pyroclastique" s'applique aux roches résultant de l'accumulation de débris volcaniques
provenant de l'expulsion de matériaux volcaniques.

L'importance des dépôts volcano-sédimentaires reflète plus que leur simple abondance crustale, déjà remarquable (environ le quart des roches
sédimentaires). Ces sédiments sont en effet essentiels pour comprendre la dynamique des orogènes; de plus, beaucoup de dépôts volcano-
sédimentaires sont associés à des minéralisations d'importance économique et enfin, il n'est pas nécessaire d'insister sur l'importance des
manifestations volcaniques sur l'activité humaine. Malgré cela, ces sédiments ont été peu étudiés, probablement par suite de leur identification
malaisée et de leur sensibilité à l'altération, mais aussi du fait de leur caractère mixte, impliquant à la fois des processus sédimentaires et
magmatiques (les spécialistes des deux disciplines se renvoyant la balle et hésitant à s'aventurer dans des matières qu'ils maîtrisent plus
difficilement).

Les dépôts volcano-sédimentaires ont ceci de particulier qu'ils échappent à la distribution zonale ou bathymétrique de beaucoup de sédiments :
ils peuvent donc être associés à n'importe quel type de faciès : glaciaire, éolien, bathyal, littoral, etc. En outre, leur vitesse d'accumulation est
très rapide : entre 103 et 106 fois plus que la sédimentation normale, d'où une oblitération des caractères du milieu ambiant.

Les différents matériaux impliqués dans une manifestation volcanique comprennent les fractions solides (cendres, lapilli, bombes), les
solutions hydrothermales (enrichies en Si02, Mn, Fe, Al, Cu, As, P, Pb, Zn,...) et les émanations gazeuses (H2O, CO, CO2, NH3, H2S, HCl,
SO3,...). Il faut aussi insister sur le fait que les matériaux éjectés durant les processus volcaniques ont un caractère réducteur. Par conséquent,

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tous les éléments susceptibles d'être réduits vont l'être (Fe++, Mn++,...). De plus, si H2S est présent, les éléments lourds vont migrer sous forme
de sulfures (ce qui est tout à fait différent des processus de l'altération superficielle).

Notons également qu'au cours d'une éruption volcanique subaérienne, seuls les produits solides sont incorporés dans la sédimentation
environnante, tandis que les solutions hydrothermales sont diluées par les eaux météoriques et que les émanations gazeuses sont dispersées
dans l'atmosphère, alors que dans le cas des éruptions sous-marines ou sous-lacustres, c'est la totalité de l'apport magmatique qui sera impliqué
dans la sédimentation.

Dans ce chapitre, nous allons passer rapidement en revue les différents types de dépôts volcano-sédimentaires en insistant sur leur genèse.

A: dépôts volcanosédimentaires déformés par la chute d'une bombe volcanique (Laacherzee); B: dépôts volcanosédimentaires décalés par un
jeu de failles et recoupés par un dyke (Causse du Larzac).

ROCHES PYROCLASTIQUES

Ces roches sont le résultat de la lithification des tephra. Le terme "tephra" est synonyme de dépôt volcanoclastique, c'est-à-dire
d'accumulation de matériaux éjectés par une éruption. Comme pour les roches détritiques, une classification granulométrique est utilisée (Tab.
XIII.1). Cette classification ne tient pas compte de la composition des tephra.

Taille des constituants Equivalent détritique Tephra Roche pyroclastique


>62 mm galets, blocs blocs (anguleux) brèche volcanique
bombes (arrondies1) agglomérat
2-62 mm graviers, granules lapilli tuf à lapilli
62 µm-2 mm sable cendre grossière tuf grossier
<62 µm silt et argile cendre fine tuf fin
Tableau XIII.1 : classification granulométrique des roches pyroclastiques. 1les blocs anguleux sont des fragments de lave refroidie avant leur
éjection; les bombes sont des paquets de lave qui se figent durant leur projection.

D'autres classifications sont basées sur des critères pétrographiques, c'est le cas par exemple de la classification de Friedman et al. (1992) qui
utilise un diagramme triangulaire (Fig. XIII.1). Ce diagramme permet de subdiviser les tufs en fonction de la proportion relative de trois
constituants : les débris lithiques, les cristaux (surtout des feldspaths et du quartz, euhédraux et zonés) et les fragments de verre volcanique.
Les tufs à fragments de verre volcanique sont issus de la désagrégation de laves, les tufs cristallins se forment quand une partie du magma a
commencé à cristalliser avant l'éruption et les tufs lithiques sont constitués de fragments de roche volcanique ou de l'encaissant remaniés au
cours de l'éruption. Les deux classifications citées ci-dessus sont souvent combinées pour donner des noms du type "tuf lithique à lapilli", "tuf
cristallin grossier", etc.

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Fig. XIII.1: classification des roches pyroclastiques.

Envisageons maintenant la genèse des différents types de roches pyroclastiques.

Les retombées pyroclastiques (" pyroclastic air-fall deposits ") se forment à proximité des volcans avec un granoclassement latéral (les
éléments les plus grossiers se situant le plus près des centres d'émission) et une épaisseur variable, fonction de la distance au volcan.
L'extension des dépôts pyroclastiques est largement dépendante du volume des ejecta et des caractéristiques des vents dominants. Chaque
retombée peut être grossièrement granoclassée, avec les dépôts les plus fins au sommet. Les tephra peuvent être plus ou moins soudés entre
eux, en fonction de leur température au moment de leur dépôt.

Les ignimbrites sont produites par des nuées ardentes. Celles-ci sont des nuages d'un mélange de tephra chauds (fragments de verre, cristaux
et débris lithiques) et de gaz, se propageant sous l'effet de la gravité à des vitesses atteignant 200 km/h. Ce sont en fait des courants de densité
dont les grains sont maintenus en suspension sous l'effet des chocs interparticulaires et de l'échappement des gaz. D'un point de vue textural,
les ignimbrites montrent une grande variété de granulométrie, les éléments les plus grossiers étant généralement concentrés vers le haut (il
s'agit donc d'un granuloclassement inverse). Une des caractéristiques importantes des ignimbrites est la présence de grains soudés par la
chaleur dans leur partie la plus interne et le caractère plan de la surface supérieure des dépôts: contrairement aux retombées pyroclastiques, les
ignimbrites ne nappent pas le relief préexistant mais s'écoulent dans les dépressions, à la manière des fluides (Fig. XIII.2).

Les dépôts de "pyroclastic surge" sont également des écoulements de matériaux pyroclastiques, mais à la différence des ignimbrites, ils sont
plus fins et montrent des laminations planes, en auge, des antidunes, etc. Ils possèdent un granoclassement modéré à faible, avec une
décroissance granulométrique rapide lorsqu'on s'éloigne de la source. On pense que les "pyroclastic surge" sont des écoulements gravitaires de
faible densité, dont les particules sont maintenues en suspension par la turbulence d'un fluide (gaz, eau). Ils se forment lors du collapse d'un
panache volcanique saturé en vapeur d'eau (en fait, ce phénomène a été mis en évidence lors des premières explosions nucléaires) ou lorsqu'un
magma entre en contact avec de l'eau. Les pyroclastic surges ont tendance à napper les reliefs, mais montrent quand même une épaisseur plus
importante dans les dépressions (Fig. XIII.2).

Dépôts volcanosédimentaires au Cap d'Agde. A: "pyroclastic surge" avec antidunes. B: cendres remaniées par les courants marins (noter les

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rides montantes).

Les lahars sont des mudflows constitués d'une majorité de matériel volcanique. Ils se forment lorsque des dépôts pyroclastiques non
consolidés sont mis en mouvement sur le flanc d'un volcan suite à de fortes pluies ou lors d'une éruption sous-glaciaire. Ces lahars possèdent
les caractères des autres mudflows comme leur richesse en matrice et leur très faible classement (sauf un grossier granoclassement inverse,
voire un granoclassement inverse à la base de l'unité, suivi d'un granoclassement normal à son sommet). Les lahars peuvent être distingués
facilement des pyroclastic surges par l'absence de stratifications et par la présence de matériaux divers comme des troncs d'arbre, branches,
etc.

Fig. XIII.2: géométrie de différents types de dépôts volcano-sédimentaires par rapport au relief préexistant.

AUTRES DEPOTS VOLCANO-SEDIMENTAIRES

D'autres types de roches sédimentaires sont liés à une activité magmatique autre qu'une éruption volcanique. Citons essentiellement les
brèches autoclastiques qui sont dues au refroidissement et à la bréchification de la partie supérieure d'une coulée de lave en mouvement et
surtout les hyaloclastites qui résultent de la fragmentation d'un verre volcanique par contact avec l'eau. Beaucoup de pillow-lava sont
associées à des hyaloclastites.

Revenons aussi sur les émanations gazeuses et les solutions hydrothermales qui se propagent dans la mer ou dans les lacs lors des éruptions
sous-aquatiques. La silice, différents composés de Fe, Mn, Al ou des éléments mineurs comme As, Ba,... vont précipiter pour former une
partie du sédiment. Le processus de précipitation de ces composés est apparemment purement chimique et non biochimique comme dans la
sédimentogenèse "normale".

Des changements dans le milieu physico-chimique de secteurs où se manifestent des éruptions sous-aquatiques peuvent provoquer une
précipitation chimique temporaire et des phénomènes locaux particulier. Relevons entre autre:

 beaucoup de CO2 et parfois du HCl, HF et SO3 sont injectés dans le milieu de sédimentation dont ils abaissent le pH. Ceci retarde
inévitablement la précipitation carbonatée (avec une remontée éventuelle de la lysocline);
 quand des solutions hydrothermales dépourvues d'oxygène sont injectées dans l'océan, de grandes masses d'eau peuvent acquérir un
caractère réducteur, provoquant la précipitation de carbonates et de silicates de Fe et Mn ;
 lorsque de grandes quantités de H2S sont émises, des conditions favorables à la précipitation des sulfures de Fe, Pb, Zn à partir des
eaux marines sont réalisées.

Ainsi, les émanations volcaniques provoquent l'apparition locale de minéraux qui, dans les conditions normales de la sédimentogenèse, ne se
formeraient que durant la diagenèse ou dans des environnements très riches en matière organique.

DIAGENESE DES MATERIAUX VOLCANO-SEDIMENTAIRES

Les verres volcaniques sont métastables: dans la plupart des cas, ils ne sont pas observés dans des roches plus anciennes que le Tertiaire. De ce
fait, les dépôts volcano-sédimentaires anciens sont souvent difficiles à mettre en évidence. Les produits de l'altération des verres volcaniques
sont les argiles, les zéolites et la palagonite (altération sous-marine des basaltes).

Les argiles issus de la diagenèse des verres volcaniques sont la montmorillonite, la saponite et la kaolinite. Les bentonites sont des lits riches
en smectite issus de l'altération de cendres volcaniques. L'équivalent riche en kaolinite est appelé tonstein. Outre la nature minéralogique des
argiles, la présence de (pseudomorphes de) fragments de verre et de cristaux euhédraux zonaires de quartz, feldspath ou de pyroxène peuvent

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aider à identifier l'origine volcano-sédimentaire d'un niveau argileux.

En ce qui concerne la palagonite, c'est un matériau amorphe, translucide, orangé, souvent observé en bordure des grains d'hyaloclastite. Il
s'agit d'une altération du verre volcanique par hydratation, oxydation du fer, augmentation du K et Fe et perte de Na et Mg. La palagonite n'est
pas un minéral, mais un mélange de montmorillonite et de phillipsite.

Enfin, beaucoup d'hyaloclastites sont cimentées par de la calcite.

F. Boulvain, 2007

AUTRES COURS EN LIGNE proposés par le Laboratoire de Pétrologie sédimentaire:

cartographie géologique

géologie de la Wallonie

excursions

processus sédimentaires

une brève histoire de la géologie

compléments de pétrologie sédimentaire

notes de TP de pétrologie sédimentaire

AUTRES SITES (sélectionnés par L. Hauregard):

 http://www.epoc.u-bordeaux.fr/fr/eqsedimento.htm (Equipe "Sédimentologie et Géologie Marines")


 http://www.shom.fr/index.htm (Service Hydrographique et Océanographique de la Marine-Activités scientifiques-Géosciences-Sédimentologie)
 http://www.unifr.ch/geoscience/geologie/welcome.html (University of Fribourg, Switzerland: Department of Geosciences-Geology and paleontology-
Research-Sedimentology)
 http://www.unibas.ch/earth/sedi/index.htm (Geological & Paleontological Institute: Sedimentology Group)
 http://www.blackwell-science.com/~cgilib/jnlpage.asp?journal=sed&file=sed&page=aims (Blackwell Science: Sedimentology)
 http://www.blacksci.co.uk/uk/society/ias/ (International Association of Sedimentologists)
 http://darkwing.uoregon.edu/~dogsci/dorsey/SedResources.html (Web Resources for Sedimentary Geologists)
 http://www.palmod.uni-bremen.de/FB5/geochron/index.htm (Bremen University Geosciences: Stratigraphy and Sedimentology)
 http://www.dur.ac.uk/~dgl0mew/BSRG/index.html (The British Sedimentological Research Group)

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Date de dernière mise à jour : 19/6/2007
Pétrologie sédimentaire, B20, Université de Liège, B-4000 Liège

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