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Promotion de 6ème Année de Médecine

2022-2023

Les Intoxications Aiguës

Présenté par
Pr Ag. S M. Medjadi
Anesthésie-Réanimation / CHUT

- Introduction
- Attitude thérapeutique générale d’urgence
- Anamnèse
- Examen clinique
- Examens complémentaires
- Analyse toxicologique
- Traitements spécifiques
- Spécificités selon le toxique
- Orientation du patient
- Conclusion

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I/ INTRODUCTION :

La plupart des substances existant dans la nature ou fabriquées artificiellement sont


susceptibles, à partir d'une certaine quantité, d'être toxiques pour l'organisme. La voie de
pénétration du toxique peut être :

- Digestive (aliment, médicament, produit ménager...)


- Respiratoire (gaz, aérosol...)
- Cutanée (substance passant à travers la peau, produit injecté).
Les intoxications aiguës (mise en contact brutale de l'organisme avec des doses toxiques
importantes) couramment rencontrées peuvent être d'origine volontaire (overdose d'héroïne,
tentative de suicide médicamenteuse...) ou accidentelle (erreur de posologie, enfant qui avale
tout ce qu'il trouve...).

• Les intoxications aigues constituent un problème de santé à travers le monde.


• Elles sont à l’origine d’une activité importante au niveau des services des urgences
médicales et de réanimation.
• 1ère cause d’hospitalisation chez les jeunes de < 30 ans.
• représentent 2% des décès au niveau des services de soins intensifs.
• Volontaires ou accidentelles.
• contrairement à ce que l’on pense, elles sont le + souvent poly médicamenteuses.
• Le diagnostic d’intoxication aigue ne doit être retenu qu’après avoir éliminer toute
autre cause non toxique (traumatique, vasculaire, métabolique, infectieuse, ou
psychiatrique)
• Attention au coma simulé :
Manœuvres d’évitement, examen des paupières ++ et ronflements.

II/ Attitude Thérapeutique générale d’urgence :


Devant toute intoxication aigue, il faut savoir éliminer très rapidement une défaillance grave
des fonctions vitales :

1) Défaillance Neurologique :
• des convulsions.
• des troubles de la conscience allant jusqu’au coma.

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• des complications liées à la perte de connaissance.
Que l’on traitera suivant le cas :
* PLS et oxygénothérapie
* TRT anticonvulsivant
* ventilation artificielle et sédation
* aspirations oro-trachéo-bronchiques
* ressucrage avec du G 30%
* réchauffement prudent
* antidotes à visée diagnostique et thérapeutique

2) Défaillance Cardio-Vasculaire :
• un ACR
• un choc cardiogénique
• une bradycardie importante < 50batt/min
• une tachycardie mal tolérée
• un collapsus
• un trouble du rythme grave, de l’excitabilité ou de la conduction
C.A.T : * RCP
* introduction de drogues vasopressives
* anti cholinergiques: Atropine voir Isuprel
* remplissage aux macromolécules
* traitement anti arythmique voir EES

3) Défaillance Respiratoire :
• Des signes de détresse respiratoire :
Bradypnée, polypnée, pauses respiratoires…
• Spo2 < 90 %
C.A.T : * IOT, ventilation et sédation
* éviter des dommages supplémentaires.

4) Défaillance Thermique :
• une Hypothermie :
Souvent profonde à la suite de l’absorption de psychotropes
• une Hyperthermie :

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Aussi par dérèglement central à suite de la prise de certains médicaments (hyperthermie
maligne des NLP)
C.A.T : * Refroidissement ou réchauffement prudents selon le cas.
* Curarisation
* Dantrolène
Une fois une urgence thérapeutique écartée et/ou patient stabilisé :
Procéder à une anamnèse rigoureuse et un bon examen clinique.

III/ L’interrogatoire :
Faire une enquête minutieuse
• Quoi ? Combien ? Quand ? Comment ?
• Recherche d’emballages vides ou une ordonnance.
• Rechercher une lettre signant un adieu --- IMV
• Anamnèse complète tant que le patient est encore en état de répondre, profession du
patient.
• Voie de pénétration.
• Quelles mesures ont elles déjà été entreprises ?
• Quels symptômes ? S’il y en a !
• notion de prise d’alcool associée.
• position de découverte par la famille ou d’autres témoins.

IV/ L’Examen clinique :


• L’état neurologique :
* agitation, * coma calme, * convulsions ??
L’examen des pupilles :
* myosis serré, * mydriase peu réactive ??
• Conscience GCS (≤ 8/15)
• ROT et Tonus : S.pyramidal ( Hypoglyc, ADT..) ,S.E.Pyramidal (neuroleptiques), et
S.de myorelaxation (BZD, barbituriques lents…)
• T. digestifs: digitaliques…
• T. respiratoires (encombrement, crépitations, bronchospasme, bradypnée)
• T. cardio-circulatoires : * HTA
* bradycardie
• haleine, état cutané (sueurs), diurèse (globe. Vésicale).

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V/ Les examens complémentaires :
• ECG systématique (valeur Dg, Pc et Trt)
ex : * signes d’ischémie myocardique
* élargissement de QRS
* TV
* bradycardie
• Gazométrie artérielle :
Rechercher une acidose métabolique (PH<7,37) et une concentration en HCO3- < 22
mmol/l
• Ionogramme sanguin :
Kaliémie, natrémie, calcémie, calcul du trou anionique
• Urée / créat : à la recherche d’une IRA, et en cas de dialyse ultérieure
• Dosage des CPK et myoglobine : en cas de myoglobinurie
• Rx du poumon : recherche de complications.
• ASP : pour les métaux lourds (arsenic)
• Glycémie : ADO, insuline.

VI/ Analyse toxicologique:

Sera effectuée sur le liquide digestif, les urines ou le sang dans les deux circonstances
suivantes :
* un coma inexpliqué et
* afin de guider notre conduite thérapeutique (Paracétamol & salicylés)

VII/ Traitement spécifique :


Comprend 4 volets :
• 1 Symptomatique :
• corriger des défaillances vitales
• maintenir les principales fonctions.

• 2 Evacuateur (Décontamination digestive)


• le charbon activé (à dose unique / multiples):
Indications: * substances carbo-absorbables à dose toxique

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* délai après ingestion < 2H.
Contre-indications : * T. conscience
* T.HMD et Resp.non stabilisés
* Vomissements
* Produits caustiques ou pétroliers
* V.O et U.G.Aigu.
Posologie: 50 g -------------Adulte (pour la dose unique)
1g/kg -----------Enfant
• Le lavage gastrique:
Indications : * substances non carbo-absorbables et < 2H.
Contre-indications : les mêmes =
• L’irrigation intestinale :
Indication: substance à dose toxique, à résorption retardée et non carbo-absorbables, et >
2H
Contre-indication : la non intégrité du tube digestif
Modalités: introduire par SNG un grand volume d’une solution de polyéthylène glycol----
---------rejet rectal clair.
Adulte: 1500 à 2000 cc/h
Enfant < 6 ans: 500 cc/h
Enfant entre 6 et 12 ans: 1000 cc/h.
En cas de projection cutanée:
• un rinçage immédiat et prolongé à l'eau tiède courante (30 minutes à 2 heures)
est indiqué dans tous les cas, y compris les projections d’acides forts comme l’acide
sulfurique.
• Les brûlures par base demandent un rinçage particulièrement prolongé.
Après rinçage, les brûlures chimiques se traitent de la même manière que les brûlures
thermiques.
• Pour certains produits, il existe un traitement spécifique : les brûlures à l'acide
fluorhydrique se traitent par l’administration de sels de calcium.
• L’existence d’un traitement spécifique ne doit jamais retarder le rinçage à l’eau.
La peau est une voie d’entrée importante pour certains toxiques : certains
pesticides organophosphorés ou carbamates par exemple peuvent entraîner une
intoxication grave par pénétration cutanée.

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• Dans ces cas, une décontamination de la peau par lavage à l’eau et au savon est une
étape importante du traitement.
En cas de projection oculaire :
• un rinçage à l'eau ou au sérum physiologique est toujours
indiqué. Il peut être précédé de l'instillation d'une goutte d'anesthésique local. (Le
recours à l'ophtalmologue doit être systématique en cas de projection oculaire de base
ou d’acide forts).

• 3 Epurateur :
Augmenter l’élimination rénale du toxique et diminuant ainsi la gravité l’intoxication.
• Alcalinisation urinaire:
Indications: intox. Salicylées, pas au stade d’hémodialyse.
Phénobarbital avec coma profond.
C.I : Anurie, IC sévère et cirrhose grave.
Surveillance : diurèse/h, tolérance respiratoire.
Modalités: alterner NaCl 0,9% et HCO3 1,4% --------3 à 6l/j
• Hémodialyse: indiquée pour les intox. aux
* lithium
* salicylés (>1g/l) et éthylène glycol : si IR sévère avec acidose métabolique
* méthanol, si en + des signes oculaires et neurologiques.
• Hémofiltration continue:
Alternative à l’hémodialyse si non disponible ou mauvaise tolérance HMD prévisible.
• Exsanguino-transfusion:
* hémolyse intra-vasculaire sévère
* méthémoglobinémies graves ne répondant pas au traitement symptomatique ainsi qu’au
bleu de méthylène.

 4 Spécifique (Antidotes) :
• Améliore le Pc vital et/ou fonctionnel de l’intoxication, en modifiant soit la cinétique
du toxique soit en réduisant ses effets au niveau des récepteurs ou des cibles
spécifiques.
• Parfois utile dans le Dg étiologique (Flumazénil et Naloxone).
• Vital dans le traitement d’une intox. Grave avec un toxique lésionnel comme le
paracétamol.

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VIII/ Selon le Toxique :
1- Les psychotropes :
 Benzodiazépines : coma calme, dépression respiratoire modérée, hypotonie (tranxène,
témésta, léxomil…)
CAT : carbomix, Anexate et IOT si nécessaire.
• Barbituriques : coma prolongé, dep.resp, état de choc et hypothermie
CAT : carbomix, L.G, D.alcaline, Dialyse.
• Neuroleptiques : coma prolongé, convulsions, synd.malin des NLP, dépression resp. et
choc vasoplégique (haldol, largagtil, droleptan…)
CAT : carbomix, surveillance de la conscience et myorelaxants.
• Antidépresseurs tricycliques : toxicité cardiaque. Coma hypertonique, convulsion,
mydriase, bouche sèche, tachycardie, rétention d’urine (laroxyl, anafranil …)
CAT : carbomix, L.G, lactates molaires et ECG ++
• Sérotoninergiques (ISRS): confusion, agitation, myoclonie, sueur, frisson, fièvre,
mydriase, tension fluctuante, tachycardie, dyspnée, convulsion (prozac, déroxat)
CAT : carbomix et surveiller état de conscience.
• Carbamates : coma hypotonique, hypothermie, collapsus voire choc cardiogénique
(equanil)
CAT : carbomix à répétition, Rempl.prudent, D.V+ ---dialyse
• Lithium : T.digestifs, cardiaques, ioniques et Diabète insipide (téralithe)
CAT : dosage lithémie, dialyse ++, kayexalate

2- Les cardiotropes :
a) Les bétabloquants :
T.rythme, de la conduction, état de choc et hypoglycémie
*Drogues inotropes + , glucagon ( 3mg/IV puis 3mg/H) , EES
B) Les digitaliques :( digitaline, digoxine)
T.rythme, de la conduction, choc cardiogénique, T.digestifs et hyper K+
*Carbomix, isuprel, digidot, EES sous surveillance « scope »
c) Les Inhibiteurs calciques :( tildiem, amlor, isoptine…)
Convulsions, T.rythme et de la conduction, état de choc C
*Carbomix, LG, chlorure de calcium, adrén. +/- insuline

3- Les antalgiques :

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• 1) L’aspirine :
Vertiges, hypoacousie, hyperpnée, hyperthermie, hypoglycémie, acidose métabolique,
DSH, coma
Dose toxique : adulte (>10g), enfant (>100mg/kg)
* CAT : carbomix, diurèse alcaline, dialyse et salicylémie.
• 2) Le paracétamol :
Tableau digestif, neurolog, respiratoire
Dose toxique >150mg/kg
Risque : hépatite aigue
* CAT : carbomix, LG, NAC et paracétamolémie/4h
• 3) Les Opiacés :
Myosis, dépression respiratoire, rétention aigue d’urines, syndrome de sevrage
* CAT : traitement symptomatique + Narcan ( durée d’action 30 min seulement !!)

4- Les organophosphorés (insecticides) :


• toxicité ++
• responsables de 3 syndromes:
Muscarinique : hypersécrétion bronchique, salivaire, lacrymale, sueurs, bronchoconstriction
Nicotinique : crampes, paralysies musculaires et respiratoires.
Central : coma
Toxicité locale suivant la voie de pénétration: oculaire ou cutanée.
CAT: décontamination
Intubation et ventilation
Atropine (contre les effets musc) = 1 à 2mg/ 5 à 10 min
Contrathion (contre les effets nicot).
Corriger les désordres hydro-électrolytiques.

5- Le paraquat (herbicide) :
• Toxicité ++ généralisée, absorption digestive et cutanée
• insuffisance hépatique aigue à J2
• insuffisance rénale organique à J2
• insuffisance respiratoire aigue puis fibrose pulmonaire à J6
CAT: décontamination digestive, cutanée …
Carbomix, Épuration extra rénale, Fibroscopie œsogastrique

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6- Intox. Au monoxyde de Carbone (CO):
• Le CO résulte d’une combustion défectueuse: chauffage, incendies, gaz
d’échappements.
• incolore, inodore et a une affinité 200 à 300 fois + importante pour l’HB que celle de
l’O2.
• T. digestifs, cardiaques et neurosensoriels
• Teinte « rouge cochenille » de la peau / rhabdomyolyse.
• Dosage de la carboxyhémoglobine > 10 %
• Soustraire ++ la victime du milieu intoxiqué
• O2 au masque à haut débit (6H) voir recourir à l’O2 hyperbare (coma, femme
enceinte, enfant, insuff. Coronaire …)
• Déclaration obligatoire.

7- Intox. Aux caustiques :


Aussi fréquente
• Produits ménagers et industriels
• Risque de perforation digestive
• Lié à la quantité et à la concentration du produit
• plusieurs types: *Acides (sulfuriques, chloridriques...)
*Bases (soude, potasse, ammoniaque…)
*Oxydants (eau oxygénée…)
• érosions cutanées et buccales, brulures oro-digestives, agitation, dyspnée laryngée,
hématémèse ----état de choc Hgique
• Fibro et avis chirurgie
• Pas d’ATB que si perforation
• Repos strict, ASP (pneumopéritoine), TTx et à jeun strict
• Intervenir selon résultat de la fibro et l’état clinique général.

8- Intox. Aux OH :
• Devenues très fréquentes (éthanol++)
• Phase excito-motrice, d’incoordination puis vient le coma éthylique calme
• Recherche de lésions associées.
• Risque est lié aux crises convulsives-------inhalation
• Traitement symptomatique.

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9- Autres intox. En bref :
• Valpoate de Na+ ( dépakine)
• Carbamazépine (tégretol)
• Carbamates(Equanil)
• Colchicine
• Les AVK (comme anti.T et raticides)
• Plomb
• Champignons (amanite phalloïde)
• Intox. Cyanhydrique aigue.

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IX/ Orientation du patient :
• IMV sur pulsion plus qu’un désir d’autolyse
• Accidentelle
• Délai > 6H après la prise
• Examen clinique sans particularité
• suivi psychiatrique et sortie du patient

EN REANIMATION SI :

• Altération des fonctions vitales


• Monitorage spécialisé pour surveillance étroite
• Administration d’antidotes
• Epuration extra-rénale

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X/ CONCLUSION :

• Quelle que soit la nature de l'intoxication, le traitement symptomatique demeure


primordial.
• Cependant, dans certaines intoxications, le traitement spécifique doit être mis en route
précocement, y compris chez un patient asymptomatique.
• L'interrogatoire du malade et de son entourage est très important.
• Il faut préciser les circonstances de l'intoxication, la nature du toxique, l'horaire de la
prise et la dose supposée ingérée.
• Reconnaitre une détresse vitale et la traiter en urgence.
• Avoir une bonne organisation au sein du service.
• Prendre en considération la ½ vie de certains toxiques.

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