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Droit des contrats spéciaux

Bibliographie : son livre dans la collection Mallory


Deux directives, transposées il y a quelques mois par une ordonnance de 2021 dans le code de la consommation,
règlementent les mises à jour des applications des smartphones. Cela touche directement au droit des contrats et au droit
des contrats spéciaux.
Dans les smartphones et les ordinateurs sont compris un ensemble d’applications, certaines applications sont gratuites.
Sont-elles des cadeaux du fabricant ? Sont-ce des contrats à titre gratuits, ou actes unilatéraux ? Ce sont des contrats
onéreux, mais qui paye ?
Il faut se souvenir que les applications ont l’obligation de faire ou de donner. Cela correspond à la notion de prestation de
service où l’entreprise vient fournir un service : c’est le contrat d’entreprise. A ce titre, il convient de les réglementer.
De nombreuses activités de services ont été arrêtées pendant plus d’un an et demi, du fait de la pandémie. Ex : restaurant
qui sert un plat, cinéma qui diffuse un film. Ce sont des contrats d’entreprise.
Il va falloir régir ces activités.
Le 30 juin 2022, la Cour de cassation a rendu trois arrêts relatifs au contrat de bail (location d’un bien mobilier ou
immobilier). Le bail est très réglementé. Parmi les baux, il y a les baux d’habitation mais aussi les baux commerciaux. Lors
de la pandémie, les restaurants, cinémas etc ne pouvaient plus payer leur bail. La question s’est posée de savoir si les
locataires devaient payer 100% de leur loyer. Il y a eu des 100aines de procès.
La Cour de cassation a pris trois affaires :
-une sur un agent immobilier
-une sur une grande surface alimentaire
-une sur une résidence fermée
et a décidé que le locataire doit payer le loyer et qu’il n’y a pas de force majeure (imprévisible et irrésistible).
Dans le cas de l’agent immobilier (celui qui trouve les clients pour la vente d’un immeuble), ils ont un statut de
mandataire. C’est celui qui représente une personne, c’est un acte courant dans de nombreux domaines.
Ex : les sportifs ont des agents sportifs, les musiciens ont des agents artistiques…
Dans toute notre vie professionnelle et domestique, les cartes de payement sont alimentées par des dépôts. Les dépôts
bancaires sont des exemples de contrat que l’on trouve partout.
Les contrats de prêts le sont également. On leur donne parfois comme synonyme le nom « crédit ». Les particuliers et
les professionnels l’utilisent.
Les contrats spéciaux sont ancrés dans notre vie économique (professionnelle et/ou domestique). Si on fait le lien
entre la L2 et la L3, on voit que dans ce que l’on a étudié, il y a une volonté de réfléchir et de théoriser sur le mécanisme
des contrats ; mais en réalité la vie quotidienne et pratique, telle que nous l’avons chaque jour, repose dans ces contrats
spéciaux (que l’on vient de nommer).
On les appelle les contrats spéciaux car chacun a sa fonction, son utilité et son nom.
On va étudier, au cours de ce semestre, les principaux contrats spéciaux de façon la plus approfondie possible. Cela permet
d’avoir une perspective générale.
Ces contrats spéciaux étaient assez stables dans notre droit contemporain. Il est envisagé qu’ils soient réformé. Il
y a une réforme sur les contrats avec l’ordonnance de 2016, et il est envisagé qu’elle soit prolongée dans le domaine des
contrats spéciaux. Un projet a été remis en juillet au ministère de la Justice, établi par une commission (dont le Professeur).

Introduction générale
I. Présentation de la matière
Ce sont les romains qui ont inventé le droit spéciaux. Historiquement, ils précèdent la théorie générale du
droit.
Ex : l’erreur sur les qualités essentielles lors de l’achat d’un bien, le dol, les clauses limitatives de responsabilité, l’obligation
de résultat et l’obligation de sécurité…
Pratiquement tous les contrats ont surgi à l’occasion de la formation ou de l’exécution d’un contrat spécial. Les juges
romains, selon leur système, donnait à toutes les actions en justice un nom, une forme et une fonction.
La conceptualisation du droit des contrats est venue tard et a été faite dans l’ancien droit, par Domat. Même en
2022, cela n’a pas vraiment changé ; les grandes catégories sont encore là.
Ex : mettre des photos sur Instagram revient à un dépôt dématérialisé
Par conséquent, il y a une permanence des mécanismes juridiques qui transcendent les millénaires. Lorsque que le
code civil a été rédigé, les rédacteurs ont conçu un plan (au départ celui de Domat) consistant à commencer par la théorie
générale (livre III) et puis traiter des contrats spéciaux à partir du titre 6 au titre 17 du livre III.
La commission de réforme a décidé de ne pas bouleverser le plan du code civil et de le conserver.
Ces contrats spéciaux ont, évidemment, des liens étroits avec la théorie générale du contrat. Ils s’influencent l’un
l’autre.
Ex : la question du prix, doit-il être déterminé dans le contrat ? Peut-il être déterminable ou fixé par le juge ? (Arrêt de
1995 dont on trouve la codification aux articles 1164 et suivants). L’une des parties fixe le prix, cela correspond au contrat
d’entreprise pour une part, mais aussi au contrat de vente.
Ex 2 : la responsabilité des produits défectueux qui prend place dans des contrats de vente (comme la vente de
médicament).
Il y a une alimentation réciproque entre les contrats spéciaux et la théorie générale des contrats.
La question des qualifications.
Ex : on possède tous des fournisseurs d’accès pour les téléphones. A quel contrat obéit cette fourniture d’accès à l’Internet
ou de connexion mobile. C’est un contrat d’entreprise car de prestation. On a alors le régime du contrat et le régime de la
théorie générale du contrat.
Pour tous les contrats spéciaux, il y a deux corps de règles :
-les règles générales
-les règles spéciales
C’est grâce à la qualification et au syllogisme qu’on peut dénouer toutes les situations et leur donner un régime, le
syllogisme étant un mécanisme universel.

II. L’histoire
Ce sont les romains qui ont dressé les principales catégories du contrat, et c’était essentiellement de la
jurisprudence qui a été codifiée dans le Corpus iuris civilis de Justinien (VIème siècle). C’est un plan de contrat
spéciaux : le mandat, le prêt, le dépôt…
Ce droit s’est maintenu jusqu’à la révolution française. Dans les livres de Domat ou Potier, on retrouve en permanence
les références au Corpus iuris civilis de Justinien.
En 2022, à l’occasion d’arrêts de la Cour de cassation, il est facile de retrouver, peu importe le sujet, une racine romaine. Il
y a une continuité historique qui va du droit romain jusqu’à nos jours. Toute codification ou recodification doit avoir
en tête cette continuité.
Ces textes du code civil de 1804, qu’on trouve aux titres VI et suivants, sont des copier-coller de textes romains, de Domat
et Potier. Lorsque le code civil, dans sa partie de contrats spéciaux, a été commenté au XIXème et XXème siècle ; les
auteurs donnent des références aux textes romains.
Une sorte de mouvement récent d’amnésie s’est produit. On oublie les racines du droit des contrats spéciaux pour ne
s’intéresser pratiquement qu’à la jurisprudence.
│Note : Pour l’examen, il ne faut pas sortir des arrêts qui ne sont pas dans le cours ou en TD. Les annotations du code
civil sont faites pour les praticiens (ex : avocats). │
Il y a une permanence des contrats spéciaux jusqu’à une époque récente. Le code a-t-il vieilli ? Quand on parle de
la responsabilité, on voit la jurisprudence créatrice de droit de la Cour de cassation. Dans les contrats spéciaux, un
certain nombre d’arrêts sont venus enrichir, mais cela n’a pas remis en cause les principaux textes.
La jurisprudence vient enrichir, mais cela ne fait pas pour autant un code vieilli.
Ex : pour Portalis, le dépôt est la remise d’une chose entre les mains d’une personne pour qu’elle la garde. A partir de ce
moment, les photos sont des choses immatérielles. Par conséquent, la généralité du texte sur le dépôt de 1804 permet
d’aborder les matières et les technologies les plus sophistiquées.
La loi est une règle générale et abstraite. Plus elle est abstraite, plus elle est appréhendée pour toutes les situations.
Parmi les directives codifiées de 2021, le contrat de la fourniture de service numérique regroupe les plateformes et les
applications. Mais ce sont des contrats d’entreprise, pourquoi créé des nouvelles catégories obscures avec un régime
compliqué ?
Le projet de la chancellerie (commission de réforme) a fait en sorte de résister à ces nouvelles catégories et de codifier ce
qui doit être codifié. Le problème de la codification est le risque de codifier à outrance. La jurisprudence facilite
l’application au court terme, mais que reste-il ensuite. Il faut avoir une distance vis-à-vis de la jurisprudence,
particulièrement quand on est législateur. Il ne faut absolument vouloir codifier la jurisprudence en considérant qu’elle
l’emporte sur tout.

III. La diversité des contrats spéciaux


Pour les classer, un premier classement peut être fait avec la division entre contrats nommés et innommés.

A. Les contrats nommés et innommés


C’est la racine historique des contrats spéciaux. Les juges romains (préteurs) avaient pris l’habitude de
nommer les contrats au sujet desquels les parties se disputaient.
Ex : quelqu’un qui remet une somme d’argent à un autre qui va le lui restituer ensuite est un prêt
Les contrats nommés sont alors qualifiés. Mais cela apporte également un régime. C’est ainsi qu’ils ont procédé, pour la
plupart des contrats.
Ils ont considéré que la pratique invente régulièrement des contrats, de nouveaux contrats, qui ne sont pas dans le code
civil, ni dans le code de commerce, ni dans les autres codes. Ces contrats ont leur donne une catégorie résiduelle : les
contrats innommés. Ils ne sont pas nommés, qualifiés, ni règlementés. Ils sont nés de la pratique.
Ex : pendant longtemps, on avait le contrat de franchisage chez les anglo-saxons (franchising). C’est une entreprise qui
propose à l’autre le droit d’utiliser sa marque, lui propose de former son personnel et de la fournir, et de lui transmettre
son savoir-faire. C’est un contrat riche et complexe (ex : McDonalds). Dans quelle catégorie range-t-on la franchise ? C’est
le type même du contrat innommé.
Ex 2 : les EPHAD. Ces sont des établissements qui accueillent des personnes âgées pour les loger, les nourrir et les
soigner. Est-ce un bail ? Une entreprise ? Un contrat particulier ? C’est également un contrat innommé.
Ces contrats naissent de la pratique et se conforment à leur public. Comment les règlementer ?
Ils ont deux sorts :
- un moment ou un autre, le Législateur s’en empare et le codifie. Le contrat innommé devient nommé. Cela arrive
souvent.
Ex : il y a certains textes qui rattachent le Cloud au dépôt.
- parfois le Législateur n’intervient pas et le contrat va rester innommé.
Ex : la franchise et les EPHAD. Mais ce n’est pas un vide juridique, car le droit est construire de règles générales et
impersonnelles.
Pour ces exemples, la théorie générale du contrat s’applique (vice du consentement, capacité…) et il y a la possibilité
d’aller emprunter, pour chacune des facettes de contrat, à d’autres contrats donnés auxquels il se rattache
(raisonnement analogique).
Ex : la vente pour McDonald, une partie d’entreprise pour la formation du personnel, une partie de propriété intellectuelle
pour le transfert de savoir-faire. Parfois l’entreprise achète les murs pour les relever, le franchiseur est le propriétaire du
local. Un contrat donné peut être régi par un ensemble de règles diverses.
Ex 2 : pour les EPHAD il y a du bail, de l’entreprise…
Tout cela est à peu près codifié dans l’article 1105 du code civil (de 2016) : « Les contrats qu’ils aient ou non
une dénomination propre sont soumis à des règles générales.
Les règles particulières à certains contrats sont établies dans les dispositions propres à chacun d’eux.
Les règles générales s’appliquent sous réserve de ces règles particulières. »
On comprend que la théorie générale s’applique à tous les contrats spéciaux (formation, inexécution…). Les contrats
spéciaux ont leur propre règlementation qui vient s’ajouter, ou déroger au droit général. Il y a, également,
consécration de la distinction contrat nommé et innommé.
Seul reproche du texte : il ne donne pas la solution pour les contrats complexes innommés.
Les rédacteurs du code civil de 1804 avaient ajouté un texte, supprimé en 2016, où ils proposaient pour ces contrats
innommés un raisonnement par analogie entre contrat nommé et innommé. Il n’y a pas, dans l’article 1105, ce texte qui
permettrait d’utiliser les contrats voisins pour garnir le contrat innommé. Mais la jurisprudence peut le faire, et le fait le
plus souvent.

B. Les rapports des contrats spéciaux entre eux


Il y a des liens sur le régime. A l’occasion de la réforme, on a retrouvé ces liens.
Ex : la garantie du bon fonctionnement de la chose par le vendeur. Le dépositaire est garant de la bonne conservation de la
chose, surtout s’il est rémunéré. Tout comme le mandataire pour la bonne exécution de sa mission.
La question s’est posé pour les mandataires et les entrepreneurs. La jurisprudence a dégagé des principes transversaux
entre les contrats.
Ex : l’agent immobilier est un mandataire si le vendeur l’a chargé de trouver un acheteur, de négocier et signer le contrat à
sa place. Mais certains agents ne vont pas jusque-là. Si l’agent ne fait que rapprocher les parties, il est entrepreneur et non
mandataire. Il est cependant également courtier : il rapproche deux parties qui vont directement conclure le contrat.
Il y a, en permanence, des liens entre les contrats avec des problèmes de qualifications sur le lien juridique : comment
identifier un contrat qui s’en rapproche d’un autre ?
Parfois les chevauchements conduisent à des confusions, dans les contrats proposés par les professionnels, voire
dans les raisonnements judiciaires, voire dans la loi.
Ex : le code du tourisme continent un chapitre entier sur la vente de voyage. Mais ce n’est pas de la vente car cela ne
correspond pas au transfert de propriété sur un bien, c’est un service.
Ex 2 : Arrêt CJUE, 31 mars 2022 relatif à la vente de billets de sport et de spectacle. Cela a des influences sur le
régime, en effet ce sont développés des plateformes de revente de billets.
Le problème est que c’est devenu un marché considérable. Et chaque année, des gens prennent plusieurs billets et les
revendent pour la spéculation.
Ces procès sont alors fondés sur le droit des contrats et sur le droit pénal. Les avocats des plateformes ont plaidé le fait
que les biens sont protégés par la Conv. EDH. Un billet est la preuve d’un contrat synallagmatique entre le payeur du billet
et l’organisme. Ce billet n’est pas une chose, donc ce n’est pas une atteinte illégitime à la propriété.
La CJUE a rendu un arrêt donnant la définition de la vente, du contrat d’entreprise, et relevant qu’un billet de spectacle ou
de sport est un contrat et non un bien.
Un autre problème se pose lorsqu’un contrat emprunte à plusieurs contrats.
Ex : Arrêt 3e civ., 3.12.2001 relatif à la question des EPHAD. Ces sont des établissements qui accueillent des personnes
âgées pour les loger, les nourrir et les soigner. Est-ce un bail ? Une entreprise ? Un contrat particulier ?
La première solution est d’appliquer à chaque contrat le régime qui lui revient, c’est l’application distributive. L’autre
solution consiste à n’appliquer qu’un seul régime d’un seul contrat : celui qui touche la prestation caractéristique.
En l’occurrence, il y avait eu un incendie qui avait causé des dommages, le feu avait pris dans la chambre de la personne
âgée. Or, dans le code civil, il y a une présomption de responsabilité qui pèse sur le locataire. C’est ce qu’avaient décidé les
juges du fonds. La Cour de cassation censure et estime qu’il faut appliquer l’autre méthode, la méthode de la prestation
caractéristique, et selon elle c’est l’entreprise, les soins et la restauration.

C. Les sources des contrats spéciaux


1. Echelon national
La source principale est le code civil, avec les titres 6 et suivants du livre III. Depuis 1804, il y a eu peu de
modifications sur les contrats spéciaux.
D’abord, à côté du code civil, il y a le « pullulement des codes », il y a toutes sortes de codes qui sont intervenus dans
lesquels on trouve des dispositions sur les contrats spéciaux.
Ex : le code du tourisme
Ex 2 : le code de la consommation (deux directives de 2019 qui permettent à l’UE de règlementer le droit civil alors qu’elle
n’a pas le droit de toucher au droit civil national) sur la garantie des vices cachés. Elles règlementent la vente de biens au
consommateur et le contrat d’entreprise avec le consommateur.
On voit donc se dessiner un schéma : le schéma des rapports entre le droit commun et les droits spéciaux qui peut
mener parfois à ce que le droit spécial déroge au droit commun ; mais parfois c’est un cumul de règlementations. Il y
a une volonté vertueuse de la part du Parlement, du gouvernement et de l’UE de protéger les gens mais en accumulant des
couches de règlementation sans se soucier de leur cohérence.
Même si les sources foisonnent, le code civil conserve une part de son emprise.

2. Echelon supranational
L’UE s’empare du droit civil par secteur. Dans un certain nombre de cas, il faut se reporter aux directives
transposées ou aux règlements s’ils existent.
Il y a un effet pervers : s’il y a une difficulté d’application d’une directive, d’un règlement ou d’un code tiré d’une
directive, qui va interpréter la CJUE ? On est en train d’assister à une sorte de prise de possession des contrats
spéciaux par la CJUE alors même qu’elle n’a pas de compétence sur les contrats privés.
Ex : arrêt du 31 mars 2022, cela peut avoir du bon
Ex 2 : au sujet des allocations ce n’est pas quelque chose de bénéfique (arrêt sur la nature juridique du contrat par lequel
vous chargez le traitement de texte). Soit on considère que c’est l’entreprise qui fournit et vend, soit on considère que c’est
une licence. La licence est un contrat innommé, au terme duquel une personne met un bien qui peut être immatériel à la
disposition d’un autre pour qu’elle en jouisse. La CJUE considère qu’à partir du moment où il y a un téléchargement, c’est
une vente.

3. Echelon international
On voit que le commerce s’est mondialisé, or c’est pour l’essentiel de la vente. Voilà pourquoi les
organisations internationales se sont intéressées aux contrats spéciaux.
Ex : la convention de Vienne (1980), qui dépend de l’ONU, porte sur la vente internationale de marchandises. Elle a été
transposée dans certains Etats-membres, dans des directives de l’UE, mais elle est aussi d’application directe. C’est le droit
international matériel, ou droit conventionnel.

Partie 1 : Les contrats spéciaux portant sur les biens


Sous-partie 1 : Le transfert de propriété
Ces contrats remontent à la préhistoire. Depuis les temps reculés, les Hommes, y compris dans leur état primitif,
ont transféré la propriété d’objet voire de personnes à d’autres. C’est le contrat d’échange, le premier contrat entre les
êtres humains.
A un moment de la civilisation, durant la Haute-Antiquité, il y a eu, dans la civilisation humaine, l’idée, rattachée à la
notion d’Etat, qu’au lieu de remettre un paquet de viande pour avoir la hache, ou la hache pour avoir un paquet de viande,
il y ait de la monnaie. C’est la vente, le contrat encore dominant en 2022.
Aujourd’hui, l’échange est devenu résiduel. Il y a une résurrection de l’échange du fait que certains citoyens n’ont pas
l’argent suffisant pour acheter des produits. C’est le cas notamment dans les échanges entre particuliers.
Au regard de son importance, les rédacteurs du code civil ont commencé par la vente, et il y a peu d’articles sur l’échange.
La commission de réforme a décidé de faire la même chose en retouchant légèrement les textes.

Titre 1 : La vente
Elle est définie par l’article 1582 du code civil « la vente est une convention par laquelle l’uns s’oblige à
livrer une chose et l’autre à la payer ». On voit que la vente est un contrat synallagmatique, commutatif et à titre
onéreux.
C’est un contrat dont le champ est considérable car la vente peut s’appliquer à toutes les choses, tous les biens (meubles ou
immeubles/ corporel ou incorporel).
Le contrat de vente est, par nature, susceptible de s’adapter à la société.
La vente est un contrat consensuel (article 1583) « la vente est parfaite entre les parties et la propriété acquise de
droit à l’acheteur dès qu’on ait convenu de la chose et du prix quoi que la chose n’ait pas encore été livrée ni le
prix payé ».
Il est évidemment soumis aux règles du droit de la preuve, notamment à l’exigence d’un écrit pour un contrat du plus de
1500 euros.
En 2022, il y a certains contrats qui doivent être conclus devant un notaire, mais ils ne sont pas si nombreux.
Ex : les donations, en matière immobilière à cause de la publicité foncière
Mais le formalisme, qui s’oppose au consensualisme, se retrouve dans des contrats à prirori consensuels car l’Etat, le
gouvernement ou l’UE ont décidé de les solenniser. Ce sont les contrats de consommation. C’est également le cas des
contrats d’adhésion. Sont alors exigés des écrits et même un certain nombre de mentions (garanties, les clauses de non-
responsabilité, les délais de réclamation, les pénalités…).
Cela explique qua dans un certain nombre de domaines, les contrats sont écrits et volumineux. Qui lit ces épaisses clauses,
à fortiori quand elles sont proposées par voie électronique ?

Sous-titre 1 : La formation progressive de la vente : les avant-contrats


Les avant-contrats sont des contrats qui préparent des actes définitifs. Ils peuvent porter sur tous les
contrats spéciaux, pas seulement la vente. Economique et sociologiquement, 95% des avant-contrats sont des ventes.
Ex : en matière immobilière, la vente est précédée souvent d’un avant-contrat (promesse de vente)
Ex 2 : en droit des sociétés, il y a beaucoup de promesses et d’avant-contrat, comme le pacte de préférence
Dans le code de 1804, il y a au moins 1 article sur les promesses, mais à l’époque les avant-contrats n’étaient pas
développés comme aujourd’hui. Il y a donc eu une jurisprudence extrêmement importante.
Les rédacteurs de l’ordonnance de 2016 se sont saisi des avant-contrats, mais il eut été plus logique d’attendre la réforme
des contrats spéciaux. Ils ont alors rédigé 2 articles, les articles 1123 et 1124 du code civil. Ces articles sont, en réalité, la
codification d’un petit point de jurisprudence pour l’un, et un texte venant briser la jurisprudence (Cruz) pour l’autre.
Aujourd’hui, il y a quelques articles, surtout sur les promesses, qui codifient la jurisprudence.
Nous n’étudierons pas la vente à l’essai, autre forme de contrat. Dans celle-ci, aux articles 1587 et suivants du
code civil, l’acheteur teste d’abord et la vente est conclue ensuite. Cela renvoie à la condition suspensive.

Chapitre 1 : Les promesses de vente


Elles sont nombreuses et on les trouve dans tous les secteurs.
Ex : immobilier, droit de sociétés, industries culturelles…
Toutes les choses du commerce peuvent faire l’objet d’une promesse.
Il y a deux sortes de promesses :
-les plus fréquentes sont les promesses unilatérales de vente
-les promesses synallagmatiques
En matière immobilière, on trouve beaucoup de promesses unilatérales, en matière de société c’est équivalent.

I. Les promesses unilatérales de vente


A. Nature et régime de la promesse unilatérale de vente
A l’article 1124 alinéa 1, ils en ont donné la définition, bien que compliquée : « la promesse unilatérale est le
contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l’autre, le bénéficiaire, le droit d’opter pour la conclusion
d’un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le
consentement du bénéficiaire ».
Ex : un propriétaire en contact avec un acheteur potentiel lui promet qu’il lui cède l’appartement pour un prix d’1 million
d’euros. Le bénéficiaire, non engagé, a un délai pour se décider.
Le bénéficiaire peut décider de lever l’option et conclure le contrat de manière définitive. A ce moment-là, il paye et la
vente sera parfaite.
S’il n’a pas l’argent ou décide de renoncer à l’achet pour une raison, la promesse est caduque.
Le promettant ne se peut se rétracter, l’article 1124 le répète dans deux alinéas « la révocation de la
promesse, pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter, n’empêche pas la formation du contrat ». Si le
promettant rétracte son engagement, le bénéficiaire peut former le contrat en levant l’option malgré la rétractation.
La promesse est plus qu’une offre.
Ex : si le promettant s’est rétracté car quelqu’un lui a proposé 1.2 million et qu’il contracte avec le tiers, l’alinéa 3 de l’article
1124 prévoit que « le contrat conclu en violation de la promesse avec un tiers qui en connaissait l’existence est
nulle ».
Il faut que le tiers soit au courant de l’existence du contrat. Le promettant a une double-responsabilité : à l’égard du tiers et
du bénéficiaire.
S’il est de bonne foi, le tiers n’est pas responsable à l’égard du bénéficiaire. Mais la plupart des contrats portant sur les
biens immobiliers sont publiés au registre de la publicité foncière. De ce fait, le tiers achetant un bien immobilier est censé
connaître l’existence de la promesse.
Ex : pour des actions mobilières, le contrat reste valable si le tiers n’est pas au courant. Le bénéficiaire n’aura alors qu’une
action en responsabilité extracontractuelle contre le promettant.
Si le promettant meurt, les héritiers sont engagés. En droit de la succession, les héritiers sont successeurs universels et
reçoivent l’actif et le passif de la personne décédée.
Il peut exister des contrats à durée déterminée, ce sont les plus fréquentes. Mais il peut y avoir des contrats à
durée indéterminée. Le promettant peut attendre longtemps.
Il faut alors appliquer le standard du délai raisonnable : le promettant s’estime libérer au terme d’un délai raisonnable.
Le juge estime cela au regard de l’importance du montant, du bien etc… C’est soumis à la discrétion du juge.
Quand la promesse unilatérale de vente s’est développée dans la pratique, les notaires ont eu l’idée, en application
de la liberté contractuelle, de prévoir, dans le contenu de la promesse unilatérale de vente, une indemnité au profit du
promettant pour compenser le gel de son bien durant la durée du délai. C’est l’indemnité d’immobilisation, peu importe
la nature du bien.
Toujours à titre d’usage, les notaires ont pris l’habitude de prévoir une fraction qui est de 10% du prix de vente envisagé
qui seront déposés à la caisse des dépôts et des consignations en attendant la vente. La Cour de cassation a toujours résisté,
la cause de l’immobilisation du bien pendant une période substantiel est l’indemnisation.
On peut se demander si on est encore dans une promesse unilatérale ou si le contrat est synallagmatique. La majorité de
la doctrine et la Cour de cassation considère que c’est toujours unilatéral car le bénéficiaire n’est pas obligé
d’acheter.
Il y a deux exceptions :
-le code de la consommation contredit le droit commun de la procédure et considère que lorsque le bénéficiaire est un
consommateur, a priori il devrait pouvoir récupérer l’indemnisation. C’est la question de savoir si on est entre
professionnels ou particuliers
-en application de la liberté contractuelle. Comme ce n’est qu’un usage, les parties peuvent stipuler l’absence
d’indemnité
Le bénéficiaire va donner deux fois son consentement. Une première au contrat unilatéral de promesse, et une deuxième
s’il décide d’acheter.

B. Les formes de la promesse


C’est un avant-contrat consensuel, elle peut donc être conclue à l’oral. Elle est obligatoire par écrit pour les
promesses immobilières car il y a intervention d’un notaire.
Pour ce type de contrat, il peut y avoir 1 ou 2 notaires. Dans les grosses ventes, les parties viennent chacune avec leur
notaire et il y a négociation. Dans les promesses plus simples, il ne peut y avoir qu’un notaire, le plus souvent celui du
propriétaire.
L’administration fiscale s’est aperçue qu’un certain nombre de promesses recherchaient la fraude fiscale.
Lorsque les parties conviennent, au moment de la promesse, d’un prix, mais en réalité, dans l’acte de vente, le prix est
différent. Les parties ont fait une simulation.
Le vendeur doit déclarer toutes les opérations de vente à l’administration fiscale pour qu’elle touche le droit de mutation,
proportionnelle au prix.
En matière de fraude fiscale, la contre-lettre est nulle (article 1202 du code civil). Les contrats portant des mutations
sur des biens doivent être enregistrés auprès de l’administration fiscale pour qu’elle connaisse et puisse lever l’impôt.
Les parties se servent ensuite parfois de la promesse comme d’un bien en matière de fraude fiscale. Un tiers peut
lever l’option et a « racheté » l’option. Pour « revendre » ce contrat, le bénéficiaire va le revendre plus cher. Or, c’est
impossible de revendre un contrat. Cela se rapporte au mécanisme de cession de contrat : le bénéficiaire cède l’avant-
contrat à un tiers contre un prix.
L’administration fiscale peut estimer d’imposer la cession de contrat. C’est le mécanisme combiné de la simulation et
la cession de contrat.
Pour lutter contre ces fraudes a été instauré l’article 1589-2 du code civil « est nulle et de nul effet toute promesse
unilatérale de vente afférente à un immeuble, un fonds de commerce si elle n’est pas constatée par un acte
authentique ou par un acte sous seing privé enregistré dans les dix jours. Il en est de même de toute cession
portant sur lesdites promesses ». Les promesses doivent être conclues par acte authentique de notaire ou acte SSP mais
enregistré à l’administration fiscale.

C. Les suites de la promesse


Si la promesse a été conclue devant un notaire, la forme définitive sera conclue devant le même notaire. Il y a un
parallélisme des formes.
Le promettant, entre le moment de la signature de la promesse et le dénouement, ne peut rien faire. Il ne peut
révoquer la promesse et ne peut la vendre à un tiers.
En revanche, dans les hypothèses où le tiers serait de bonne foi (en matière mobilière), le tiers peut invoquer la théorie de
l’apparence. Le tiers peut prétendre conserver la chose et la promesse lui est inopposable.
Ex : article 1199, l’effet relatif du contrat
Ex 2 : article 1276
Le bénéficiaire, le plus souvent, lève l’option en manifestant sa volonté d’acheter. Cela peut être fait par tout
moyen, souvent une simple lettre recommandée avec AR. Les parties se retrouveront alors chez le notaire, en cas de
contrat immobilier, ou entre elle en cas d’acte SSP pour conclure le contrat définitif.
Certains ont cherché d’autres qualifications, et notamment la qualification de clause pénale. Le juge peut réduire la
clause manifestement excessive. La Cour de cassation rappelle que l’indemnité n’est ni une sanction, ni une menace, mais
le prix de l’exclusivité ; donc cela a échoué.
En droit de la consommation, lorsque, la plupart du temps, le bénéficiaire a recours à un crédit pour financer
l’acquisition du bien, le code de la consommation prévoit que si le bénéficiaire n’obtient pas son crédit et le justifie,
l’indemnité d’immobilisation devra être rendue au consommateur. Même s’il l’a consigné, le vendeur devra la rendre.
L’immobilisation aura été gratuite, ce qui n’est pas forcément très juste.
La plupart du temps, dans la promesse, il y a tous les éléments de la vente. Les praticiens, parfois, annexent même le
projet de vente. Lorsque le bénéficiaire lève la promesse, il n’y a plus rien à discuter.
Il peut y avoir des incidents lorsque le bénéficiaire lève l’option.
Ex : Un arrêt du 19 janvier 2022 rendu par la Cour de cassation, il s’agissait d’une promesse unilatérale sur un immeuble
occupé. Quand on vend un bien immobilier, elle est souvent vide, mais il peut y avoir des ventes d’immeubles d’habitation
ou de baux commerciaux qui sont loués. Le bénéficiaire, s’il lève l’option, va retrouver un immeuble qu’il ne pourra pas
occuper personnellement ou faire occuper par des tiers. En 2022, en France, il est quasiment impossible de déloger un
locataire (commercial ou non).
Pendant le délai d’option, le bénéficiaire entre en discussion avec les locataires de l’immeuble et parvient à les faire partir
en leur promettant de les payer. Le jour où il lève l’option, il récupère un immeuble vide, mais le propriétaire considère
qu’il est déloyal de la part du bénéficiaire d’avoir pris en main l’immeuble alors même qu’il n’était pas propriétaire car si le
propriétaire avait su cela, il aurait demandé un prix plus élevé : il reproche une sorte de dol ou déloyauté.
La Cour de cassation retient l’argumentation du propriétaire et considère que le bénéficiaire à faire preuve de mauvaise foi.
Elle approuve la cour d’appel qui a lourdement condamné le bénéficiaire.

D. Les promesses spéciales


On passe de l’immobilier aux sociétés.
La première promesse est la promesse unilatérale d’achat. C’est l’acheteur qui s’engage à acheter le bien, le vendeur est
bénéficiaire. Les positions sont inversées, mais les mécanismes sont les mêmes.
Elles sont souvent utilisées en matière de sociétés. Ex : une entreprise a envie de prendre le contrôle d’une autre.
Ensuite, les promesses unilatérales croisées : un fait une promesse unilatérale de vente et l’autre une promesse
unilatérale d’achat.

II. Les promesses synallagmatiques de vente


Les professionnels dénomment ces avant-contrats « promesses synallagmatiques de vente » pour les opposer
aux promesses unilatérales de vente. Parfois est utilisé le terme « compromis » chez les notaires.

A. Nature
Un texte de 1804, l’article 1589 du code civil « la promesse de vente vaut vente lorsqu’il y a consentement
réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix ».
Il y a toutes sortes de raisons de conclure ce genre de contrat. Des cas où les deux parties ne sont pas totalement sûres de
vouloir s’engager ; mais elles ne pourraient, en théorie, pas pouvoir se rétracter. La plupart du temps, la conclusion de la
vente dépend d’un élément qu’elles ne maîtrisent pas forcément.
Ex : si l’un attend un crédit

B. Régime
Il y a une partie commune à la promesse unilatérale de vente, il y a un délai. Il y a réitération. Les parties se
donnent rendez-vous, la plupart du temps c’est un avant-contrat à durée déterminée.
Il y a un parallélisme des formes, la plupart du temps devant un notaire.
Si le promettant ne veut plus de la promesse, le juge peut le contraindre à une exécution forcée, il n’y a pas de
moyen de se rétracter.
Il peut être vu dans la promesse un mécanisme d’indemnité. Dans le vocabulaire juridique, la dénomination utilisée est
« dédit ». Le code civil et la jurisprudence admettent le dédit, mais il faut laisser la somme à l’autre promettant.
Comme pour la promesse unilatérale de vente, il y a eu des contestations, et des acheteurs, se rétractant sans le pouvoir,
ont essayé de récupérer l’indemnité.
Ex : affaire d’un milliardaire russe qui avait acheté une villa sur la côte d’Azur, et il avait payé un dédit. Pour obtenir le
remboursement, il a utilisé une disposition du code de la construction et de l’habitation qui permet de se rétracter avec un
statut de semi-consommateur. Cette disposition s’applique aux non-professionnels (qui ne sont pas des non-
consommateurs).
Dans l’article 1590 du code civil « Le code prévoit que « si la promesse a été faite avec des arrhes, chacun est maître de son départir,
celui qui les a donné en les perdant, celui qui les a reçu en restituant le double ».
Tout ça suppose un consentement.
Ex : un arrêt de la 3ème chambre civil du 16 septembre 2022. Il s’agit d’une vente d’un immeuble occupé par des locataires
commerciaux. Il y avait des mauvais payeurs parmi les locataires, l’un des plus gros locataires n’était pas loin de
l’insolvabilité. Or, le vendeur ne l’avait pas révélé à l’acheteur. L’acheteur s’aperçoit qu’il manque des loyers et qu’il a fait
une mauvaise affaire. Il y a donc un procès sur le fondement du dol par réticence.
Si une des parties se rétracte, l’autre partie peut préférer recevoir l’exécution forcée plutôt que de recevoir le dédit, le juge
peut alors ordonner l’exécution forcée.
Lorsque la promesse est subordonnée à ce que l’acheteur obtienne un crédit, on retrouve la même règle
que pour la promesse unilatérale de vente. L’acheteur ne sera pas tenu d’exécuter le contrat, ni de verser le dédit ou les
arrhes.

Chapitre 2 : Le pacte de préférence


En 1804, il existait un pacte de préférence mais il n’avait pas pris l’importance économique et sociologique
qu’il a en 2022. Ce mécanisme et le vocabulaire qui s’y rattache viennent de la pratique.
Pacta, en romain, est le contrat. Mais ici, c’est un avant-contrat car il porte sur une préférence. Donner la préférence à
quelqu’un, en économie, c’est choisir celui-ci plutôt que celui-là pour conclure un contrat.
En matière de société, il existe des clauses de préemption, synonyme de pacte de préférence, pour acheter par avance.
Ce terme correspond également à un mécanisme légal : une personne publique achète les biens avant qu’une personne
privée ne prenne sa place.
Ex : dans la loi Climat, il est permis qu’une collectivité publique territoriale, lorsqu’un terrain est vendu.
En droit du travail, il existe également des statuts, qui correspondent à des actes de préférence. Un actionnaire qui quitte la
société ne peut pas vendre à n’importe qui.
Cet avant-contrat donne la préférence à une partie sur un bien corporel ou incorporel.

I. La conclusion et le régime
Les rédacteurs du code civil n’avaient pas envisagé ces conventions, et elles se sont développées par la pratique.
Au cours des siècles, il y a eu des procès et donc une jurisprudence assez abondante.
L’ordonnance de 2016 a jugé bon de règlementer le pacte de préférence, mais avec les mêmes faiblesses :
-il y a un article unique
-c’est seulement un ou deux points du régime du pacte qui ont été traités car ils avaient donné lieu à des progrès
spectaculaires, mais ce n’est pas tout le régime du pacte qui a été règlementé
L’article 1123 du code civil prévoit que le pacte de préférence est l’avant-contrat par lequel « une partie s’engage
à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle voudrait contracter ».
Le propriétaire d’une chose n’est pas sûr de la vendre, mais s’il décide de la vendre c’est au bénéficiaire qu’il devra
proposer le contrat.
Dans la promesse, le propriétaire est engagé fermement. C’est une exclusivité dans l’hypothèse où il y aurait vente.
Ex : en matière de société il y a des clauses de préférence.
Il y a une option sur la tête même du promettant. Au fond, aucune des parties n’est obligé. Le promettant n’est pas
obligé de vendre s’il décide de ne pas vendre.
Dans le contenu de ce pacte, on retrouve un certain nombre d’éléments de la promesse :
- le délai. Le plus souvent il y a un délai, le pacte le mentionne quand c’est un pacte de préférence à durée
déterminée. Mais certains, plus rares, dans lesquels les parties n’ont pas stipulé de délai. Cela peut être dangereux.
Ex : 15 ans, 20 ans après, le propriétaire décidera de vendre et il sera toujours engager, sauf à ce qu’il plaide qu’on est au-
delà du délai raisonnable.
-le prix. Bien souvent, le prix n’est pas mentionné, soit parce que les parties ne le connaissent pas nécessairement (pas
déterminable), soit parce qu’il y aura des offres de contractants, les offres concurrentes. Au moment de la conclusion, le
bénéficiaire devra alors s’aligner.

II. Les suites du pacte de préférence


Si le propriétaire décide de ne pas vendre, il ne va rien se passer. Si le pacte est à durée déterminée et qu’il expire, il
cesse. S’il est à durée indéterminée, c’est plus compliqué.
Si le propriétaire décide de vendre, il va notifier au bénéficiaire qu’il a décidé de vendre et à quelles conditions. Il est
donc tenu dès lors qu’il a pris sa décision. S’il ne respectait pas le pacte, il serait condamné à une exécution forcée.
Ex : arrêt Cass 3è civ, 6 décembre 2018. Il s’agissait d’un cas où le propriétaire avait, pendant la durée d’option, conclu une
PUV avec un tiers. Il attend que la durée du pacte de préférence soit expirée, et une fois que c’est fait, il conclut la vente
avec le tiers. La Cour de cassation estime qu’il est tenu aux droits du bénéficiaire.
Une fois notifié, le bénéficiaire va lever ou non l’option. La plupart du temps, contrairement à la promesse, il n’y a
pas d’indemnité d’immobilisation. C’est logique, car le propriétaire n’est pas engagé de façon aussi contraignante.
Dans l’hypothèse où le promettant décide de vendre à un tiers en violation du pacte, la solution pourrait être identique à
celle de la promesse. A ce moment-là s’applique l’effet relatif des contrats (article 1199) et le tiers qui ignorait le contrat ne
peut pas se le voir opposer. Le contrat n’est opposable au tiers que s’il en a connaissance (article 1200).
Il n’est pas obligatoire de publier les pactes au registre de la publicité foncière, mais le notaire n’a que tout intérêt à publier
le pacte. La publicité est facultative.
Le bénéficiaire devra prouver la mauvaise foi du tiers par tout moyen. Cependant, la Cour de cassation a été saisie
de cette question avant la réforme et avait rendu un arrêt du 26 mai 2006 en chambre mixte. Elle a estimé que, pour que le
bénéficiaire puisse faire annuler le contrat conclu avec le tiers ou qu’il lui soit rendu inopposable, il doit prouver la
mauvaise foi du tiers et que le tiers avait connaissance de son intention d’obtenir le bénéfice du pacte (double
preuve).
Dans l’ordonnance de 2016, le ministère de la justice a codifié cet arrêt, c’est l’alinéa 2 de l’article 1123.
L’intention de se prévaloir du pacte signifie la volonté de lever l’option. Cela se heurte à la sociologie juridique, c’est le
problème de la preuve impossible (ou diabolique).
Dans la plupart des cas, le promettant va conclure le pacte avec le bénéficiaire sans que le tiers en ait connaissance.
L’intention n’arrivera qu’après, et c’est trop tard car il faut que l’intention soit présente au moment de la conclusion du
pacte.
En 2022, la cour de cassation n’a pas bougé et les cas d’annulation sont extrêmement rares. Il y a 2 arrêts depuis 2006 dans
des hypothèses exceptionnelles où le bénéficiaire avait immédiatement était mis au courant et avait notifié au tiers et au
promettant qu’il levait l’option directement.
Ces arrêts sont injustes et immoraux : même si le tiers est de mauvaise foi, il pourra conserver le bénéfice.
Ex : La Cour de cassation réitère cette position dans l’arrêt Cass 3è civ. 4 mars 2021. Il s’agissait d’une entreprise qui
exploitait un supermarché sous l’enseigne Super U. Dans le contrat de l’entreprise avec le commerçant, Super U, il y avait
une clause de préférence au cas où elle vendrait le fonds de commerce ou l’immeuble ou les actions.
La société vend l’immeuble dans lequel est exploitée la grande surface à des sociétés de leasing (contrat de bail mobilier ou
immobilier débouchant sur une vente, le locateur loue un bien et pourra devenir propriétaire au bout d’un certain nombre
d’années) qui le lui reloue aussitôt. Il ne propose pas la chose au bénéficiaire, Super U. Il y a une violation du pacte.
Quelques temps plus tard, il rompt le contrat avec Super U et passe chez Carrefour.
Super U fait un procès et demande l’annulation de la vente. La Cour de cassation rappelle sa jurisprudence (article 1123) en
considérant que le bénéficiaire ne prouve pas que la société de leasing connaisse son intention de lever l’option.
Pour parer à cela les rédacteurs de l’ordonnance 2016 ont prévu quelque chose à l’article 1123 alinéa 3 « le tiers
peut demander par écrit au bénéficiaire, dans un délai qu’il fixe, de confirmer l’existence d’un pacte de
préférence et si l’entend s’en prévaloir. »
C’est l’hypothèse où le tiers a connaissance du pacte, et plutôt que de conclure directement, il va loyalement demander au
bénéficiaire s’il entend se prévaloir du pacte. C’est l’action interrogatoire. C’est très vertueux mais c’est très théorique.
Le pacte de préférence peut être cédé, comme la promesse.
III. Les droits de préemption
C’est la loi qui ordonne au propriétaire de proposer par préférence son bien s’il décide de vendre à une
personne déterminée. Le plus souvent ce sont des personnes publiques.
Le mécanisme de l’offre concurrente ne s’applique pas, la plupart du temps, quand le bénéficiaire est une collectivité
publique. En cas de contestation sur le prix, c’est le juge administratif qui fixera le prix. Ce n’est souvent pas favorable au
propriétaire.
Des droits de préemption sont reconnus aux personnes privées.
Ex : si le propriétaire vend le fond dans lequel le commerce est exploité.

Sous-titre 2 : La formation du contrat de vente


L’incapacité d’exercice est pour tout le monde dans une certaine catégorie (ex : les mineurs). Les incapacités
de jouissance s’appliquent à certains actes, pout toutes les catégories d’individus. C’est le cas notamment pour éviter des
conflits d’intérêts.
Sur le consentement, il y a beaucoup d’arrêts rendus en matière de vente où une partie a méconnu son obligation
d’information et a commis un dol par réticence.

Chapitre 1 : Les formes du contrat de vente


La vente est un contrat commercial. L’article 1592 prévoit que la vente peut être conclue par un acte authentique
ou un acte sous-seing privé.

I. Le formalisme de protection
Depuis quelques années, les textes se sont multipliés dans tous les codes pour protéger l’une des parties et cela
lorsque la vente ressemble à un contrat d’adhésion, qu’elle soit conclue par un consommateur ou un professionnel.
Les articles L.111-1 et suivants du code de la consommation précisent que le contrat doit mentionner le produit, les
caractéristiques, le prix, les garanties, les questions de rétractation…
Il suffit qu’il manque une disposition pour que le contrat soit nul.
Mais parfois, il arrive à la Cour de cassation de rendre le formalisme raisonnable, parfois excessif.
Ex : arrêt Civ 1, 2 juin 2021 au sujet de l’achat de panneaux solaires. La question s’était posée de savoir si le vendeur n’avait
pas dû mentionner, pour chaque élément du contrat, un prix distinct. Le prix doit-il être décomposé ? La Cour de
cassation répond que non, le formalisme a ses limites.

II. La vente aux enchères


Il y a des formes particulières, tirées des usages. Il y a la vente de gré à gré, bilatérale, qui est consensuelle. Mais
également la vente aux enchères.
C’est le propriétaire qui veut vendre au meilleur prix. Il vend à celui qui offrira le prix le plus élevé. Au bout de
l’enchère, c’est au dernier enchérisseur, qui a proposé le plus élevé, que sera adjugé le bien.
Ce système a été doublé par des plateformes en popularisant le mécanisme sans l’intervention d’un officier
ministériel.
Ex : EBay.
C’est la raison pour laquelle ces ventes aux enchères électroniques sont codifiées dans le code de commerce et non dans le
code civil, seulement au moment de la formation et de la détermination du prix.
Pour le reste, c’est le droit de la vente qui va s’appliquer. Ex : livraison du contrat, garanties…
Certaines ventes aux enchères sont spécifiques : les ventes aux enchères judiciaires, qui se passent devant les tribunaux.
Ce sont des ventes de biens saisis, on sort de la décision du propriétaire de vendre, pour rentrer dans l’exécution forcée.
S’applique alors le code des procédures civiles d’exécution.

Chapitre 2 : L’objet du contrat de vente


Il y a deux objets :
-le vendeur d’oblige à transférer la propriété, la chose
-l’acheteur s’oblige à payer le prix
Les juges, en cas de contentieux, vont vérifier que ces éléments sont réunis. Encore faut-il que l’on soit en présence d’une
vente. Certains contrats y ressemblent mais n’en sont pas.
Ex : arrêt Cass com, 9 mars 2022, lorsque les associés constituent une société, certains apportent de l’argent et d’autres des
biens, l’apport en nature. Dans cet arrêt, l’associé avait apporté des actions qu’il détenait d’une autre société, en
contrepartie il avait reçu des actions de la nouvelle société. Le problème est qu’il avait un créancier, mandataire qui devait
percevoir une rémunération attachée au prix de vente du contrat principal.
Est-ce que l’apport est une vente ? Car si c’est une vente, le tiers créancier avait droit à une commission.
La Cour de cassation répond qu’un apport n’est pas une vente.

I. La chose
A. La détermination de la chose
Toutes les choses se vendent. Mais un service ne se vend pas. Dans la plupart des ventes, la chose est déterminée.
Dans le droit du contrat de vente, il y a un certain nombre de ventes avec une détermination particulière :
-la vente en bloc à l’article 1586 du code civil. C’est le vendeur qui cède un ensemble en même temps.
Ex : viticulteur qui cède tout son vin de 2022 à un même moment.
Cela recoupe la qualification de choses de genre.
-la vente à la mesure à l’article 1585 du code civil. Les parties conviennent de mesurer la quantité de ce que l’acheteur va
recevoir.
La différence de régime porte sur le moment du transfert de propriété et la théorie des risques.
Sur le caractère déterminable, il y a la vente sur abonnement. Le prix est payé par avance et la chose est délivrée à
période régulière.

B. L’existence de la chose
La chose doit exister. Si elle atterrie au moment de la conclusion du contrat, la vente est nulle car il n’y a pas
d’objet. Dans la plupart des cas, la chose existe.
Il y a beaucoup de contrats sur des choses qui n’existent pas encore mais qui vont exister : la vente sur chose future. On
peut conclure un contrat sur un objet futur.
Ces ventes sont fréquentes et, par principe, licites. Il n’existe que des exceptions limitées.
Ex : la vente sur un héritage. Mais c’est contraire à l’ordre public, le pacte sur succession futur est nul.
On peut faire deux catégories :
-la plupart sont des ventes commutatives (Emftio rei speratae). C’est l’hypothèse de la chose n’existe pas encore, mais
va forcément exister.
Ex : l’entreprise dans la mode avec des clients qui achètent une chose confectionnée sur mesure qui sera confectionnée
plus tard.
Ex 2 : la vente d’immeuble à construire
-les ventes aléatoires (emftio spei). La chose est espérée mais il n’est pas sûr que l’acquéreur puisse avoir la
livraison, ce qui ne l’empêche pas de payer le prix.
Chaque partie encourt un risque de perte ou une chance de gain, et si la perte est avérée tant pis.
Ex : des restaurants qui concluent des ventes aléatoires pour la fourniture de poisson

C. Les choses dans le commerce


Il faut prendre le mot «commerce » dans son sen le plus large. C’est l’article 1598, « tout ce qui est dans le
commerce peut être vendu lorsque des lois particulières n’en ont pas prohibé l’aliénation ».
En droit des sociétés, la cour de cassation s’est montrée réticente pendant de nombreuses années en estimant qu’on ne
pouvait pas vendre une clientèle. Puis, elle a effectué un revirement de jurisprudence au motif que la clientèle était libre.

D. La vente de la chose d’autrui


Ce n’était pas possible, c’était inscrit à l’article 1599 du code civil « la vente de la chose d’autrui est nulle. Elle
peut donner lieu à des dommages-intérêts lorsque l’acheteur a ignoré que la chose fut à autrui ».
L’utilité pratique de ce texte est que, dans certains cas, la situation soit complexe.
Ex : en matière d’héritage, le patrimoine du défunt passe à ses héritiers et que tant qu’ils n’ont pas partagé, ils ont en
indivision. Si l’un des héritiers est approché par un tiers et vend la propriété, il vend la chose d’autrui. La vente est donc
nulle. Si l’acheteur ne l’a pas su, il pourra obtenir des dommages-intérêts. Le véritable peut propriétaire peut invoquer la
nullité absolue, ou exercer une action en revendication entre les mains du tiers.
Le droit du tiers peut être consolidé dans certains cas.
Ex : l’héritier a vendu un tableau dans la propriété au tiers. La vente est nulle, mais en fait de meubles la possession
vaut titre. Il y aura difficulté à revendiquer pour les propriétaires.
Le véritable propriétaire peut être d’accord.
Ex : le tableau a été vendu par l’héritier à un très bon prix. Si l’héritier leur restitue leur fraction du prix, cela peut leur
convenir. C’est la notion de ratification, le propriétaire peut ratifier la vente nulle.

E. La vente d’une chose litigieuse


La notion de chose litigieuse, inventée par les romains, se trouve aux articles 1699 et suivants du code
civil. Article 1700 « la chose est litigieuse dès qu’il y a procès et contestation sur le fond du droit ».
Ex : le tiers ne sait pas s’il a acheté un bien qui fait 1.5 ou 2 hectares mais il y a contestation sur la taille de la chose. On
attend la décision du juge pour déterminer la taille du terrain. On retrouve la notion d’aléa. Là, au vue de la contestation,
l’acheteur peut demander une réduction du prix, c’est une spéculation.
Cela a pour conséquence que l’acheteur prend la place du vendeur dans le procès.
Ex : dans le domaine des entreprises en difficulté, certaines entreprises ont de multiples débiteurs dont certains contestent
la créance. Pour se refinancer, elles cèdent en bloc des créances qu’elles ont sur des débiteurs, que ceux-ci les contestent
ou non.
Pour éviter la spéculation malsaine de la part de certains acheteurs, le code met en place (repris dans le projet de réforme)
un mécanisme, le retrait litigieux.
Le débiteur qui conteste la propriété peut racheter le bien entre les mains du cessionnaire en lui remboursant le prix qu’il a
payé.
Ex : Si la contestation porte sur l’intégralité du terrain, et si l’acheteur a payé 700 k un terrain qui vaut 900k, le voisin peut
proposer à l’acheteur de lui rembourser ce qu’il a payé.

II. Le prix de vente


C’est la contrepartie payée par l’acheteur. Il est soumis à des conditions.

A. La détermination du prix
Le prix peut être fixé de plusieurs manières. La première manière est la détermination du prix par les parties.
1. La détermination du prix par les parties
Le texte d’origine, récupéré dans le projet de réforme, est l’article 1591 du code civil « le prix de la vente doit
être déterminé et désigné par les parties ». La plupart du temps, le prix est déterminé.
L’auteur Marcadet insiste sur la détermination du prix.
Parfois, le prix est seulement déterminable.
Ex : le vendeur ne connaît pas le coût de fabrication, mais la vente peut être conclue avec un prix de base ou une
fourchette.
Ex 2 : entre professionnels, des parties peuvent s’engager sur plusieurs ventes et sur plusieurs années. La Cour de cassation
a longtemps considéré que la vente était nulle, puis elle a procédé à un demi-revirement de jurisprudence relatif aux
contrats cadres.
Souvent, quand la chose n’est pas déterminée, il est difficile de déterminer le prix.
La Cour de cassation se montre très stricte : le prix doit être fixé au jour du contrat et pas plus tard car il y aurait un
risque que l’une des parties soit soumise à la discrétion de l’autre partie. C’est la question de la potestativité.
Le prix pourrait être déterminable selon des critères plus ou moins précis en permettant à l’une des parties, le vendeur, de
préciser le prix dès qu’il sera en mesure de le faire.
La Commission de réforme a décidé de maintenir le mécanisme rigide de l’article 1591.
2. La détermination du prix par un tiers
L’article 1592 du code civil tient compte des difficultés de fixation du prix et énonce « le prix peut cependant
être laissé à l’estimation d’un tiers ».
C’est une question très pratique, qui existe depuis le droit romain. C’est Domat qui l’a théorisé. Les rédacteurs du code
civil ont repris Domat, et les rédacteurs du projet de réforme également.
C’est une hypothèse pratique lorsque les parties ne parviennent pas s’entendre ou que le prix doit être déterminé plus tard.
Ex : un expert qui donne son avis sur le prix.
Il y a force obligatoire de l’évaluation du tiers s’il y a signature du contrat.
Sauf dans le cas où le tiers commettrait une erreur grossière, son évaluation serait alors nulle.
Les nouveaux rédacteurs du code civil y ont consacré un deuxième article, l’article 1843-4.
3. La détermination du prix attachée au marché
C’est présent dans le droit des sociétés cotées.
Ex : une cession de contrôle sur une société, les parties peuvent-elles prévoir que le prix correspondra à la valeur de
l’action au titre de la vente future ? Le prix n’est pas déterminé, la référence est un prix de vente futur.
Il y a de l’aléa. Pas plus que dans le prix fixé par un tiers il n’y a de potestativité, c’est un prix fixé de manière
objective.
4. La fixation unilatérale du prix par le vendeur
En présence d’une chose future, on ne connaît pas le coût, pour le vendeur, de la chose telle qu’elle sera fabriquée
ou livrée.
Ex : le pétrole, le gaz
On peut considérer que le prix sera réévalué à chaque livraison. Mais cela suppose que ce soit le vendeur, qui connaît
ses coûts, qui fixe le prix. Il faut avoir confiance.
La Cour de cassation a refusé la fixation unilatérale du prix, et considère que le juge du fonds doit annuler les clauses.
L’article 1164 « dans les contrats cadre, il peut être convenu que le prix sera fixé unilatéralement » et l’article 1165
« dans les contrats de prestation de service, le prix peut être fixé par le créancier ».
Mais l’ordonnance de 2016 n’a pas modifié l’article 1591. De sorte, que la majorité de la doctrine et la jurisprudence
continue de considérer que la vente obéit au régime propre de l’article 1591 et ne peut pas être laissé à la fixation du
vendeur.
L’ordonnance de 2016 a codifié à la lettre la jurisprudence de 1995. L’assemblée plénière avait été saisie au sujet de
contrats cadres, en vertu desquels des conventions particulières seraient conclues dans le futur, alors que formellement, il
n’y a qu’un seul contrat de vente qui s’exécute sur une plusieurs périodes.
Ceux qui sont contre la fixation du prix par le vendeur considèrent que cette jurisprudence ne s’applique pas à la lettre.
L’article 1164 joue sur les mots, et les articles 1165 sur les qualifications.
Ce serait d’autant plus facile d’étendre la fixation du prix par le vendeur que, au cas où le vendeur abuserait, il pourrait
être condamné selon la théorie de l’abus de droit. Il n’y a pas de risque de potestativité.
La Cour de cassation pourrait interpréter l’article 1591 comme permettant cela, mais elle ne le fait pas.
5. La fixation du prix par le juge
Les parties ne parviennent pas à s’entendre. En cas de contentieux, rien n’empêche le juge de désigner un
expert qui va lui remettre des éléments d’évaluation et lui donner un chiffre.
Là encore, la Cour de cassation se montre conservatrice et refuse de laisser ce pouvoir d’appréciation au juge. C’est
dommage, d’autant plus que si on se réfère aux principes européens du droit des contrats, il y a un article qui permet au
juge de fixer le prix.
Il y a une distorsion entre le droit français et le pragmatisme du droit international des contrats.

B. Le prix sérieux
La contrepartie de l’obligation des parties, dans un contrat synallagmatique, est le prix. Il y a une
jurisprudence abondante sur ce sujet, qui a été codifiée, pour partie, par l’ordonnance de 2016. C’est l’article 1169 du code
civil « un contrat à titre onéreux est nul lorsqu’au moment de sa formation, la contrepartie convenue est illusoire
ou dérisoire. » C’est la notion de prix dérisoire.
Le prix dérisoire est une distorsion énorme entre la valeur de la chose et le prix proposé. C’est une codification de la
jurisprudence rendue en matière de vente.
Si le juge est saisi d’une demande de nullité, il va devoir déterminer si le prix est illusoire ou dérisoire en désignant un
expert.
Il y a des cas où le prix a l’apparence d’être dérisoire, mais ne l’est pas.
Ex : les actions valent 2 millions d’euros au jour de la vente, et le vendeur les cède à 1 euro symbolique. C’est impossible
selon la Cour de cassation depuis des années, car dans les faits c’est parce que l’entreprise est endettée et que l’acheteur
s’engage à rembourser la dette. Le prix est symbolique car la véritable contrepartie est d’autres obligations acceptées par
l’acheteur. La Cour de cassation a fini par comprendre, il y a eu un revirement de jurisprudence.
Dans le projet de réforme, on a codifié ce revirement de jurisprudence.

C. La lésion
C’est l’hypothèse dans laquelle une partie subit un préjudice économique du fait de la conclusion du contrat
car il y a une disproportion entre ce qu’elle fournit et ce qu’elle reçoit, sans que le prix soit dérisoire.
Ce n’est pas le prix quasiment inexistant, cela peut être un prix conséquent. Le problème est donc celui de l’équilibre du
contrat.
En 2022, y compris avec le projet de réforme, la position des juristes n’a pas changé depuis l’Antiquité. Dans un objectif de
sécurité contractuelle, les rédacteurs des codes successifs ont décidé de ne pas ouvrir l’annulation ou la révision du
contrat sur le fondement de la disproportion entre les objets.
Il y a le risque que l’une des parties, estimant qu’il a fait une mauvaise affaire, cherche à obtenir l’annulation du contrat par
la suite.
Ils ont introduit quelques exceptions.
Ex : l’ouverture de la révision, « la rescision » pour lésion en matière immobilière c’est l’article 1674 du code civil
« si le vendeur a été lesé des 7/12 du prix d’un immeuble, il a le droit de demander l’annulation de la vente ».
Dans l’ancien droit, Domat disait « outre moitié ».
Depuis le droit romain, on s’intéresse sur le fondement de l’ouverture pour lésion. En droit romain, la lésion était
considérée comme le dernier vice du consentement.
Dans l’ancien droit, la valeur des patrimoines était surtout celle des immeubles. En 2022, c’est surtout des actions.
Quelques textes ponctuels prévoient la lésion en matière mobilière.
Ex : dans les ventes en matière d’industrie culturelle, l’auteur peut, s’il a reçu un prix faible, réclamer à l’éditeur ou au
producteur la révision.
Il y a un délai très court de 2 ans pour assigner et faire réviser le contrat. Le juge va donc nommer un collège d’experts qui
vont lui remettre un rapport lui donner les chiffres et lui permettant de calculer la fraction. Si la valeur de la chose est
inférieure aux 7/12 :
-l’acheteur rend la chose et le contrat est annulé
-l’acheteur conserve la chose et doit payer un supplément de prix pour avoir l’équilibre.
Il y a peu de rescision pour lésion en droit des contrats et le projet de réforme ne l’étend pas à d’autres contrats.
Ce ne sont pas toutes les ventes immobilières qui peuvent faire l’objet d’une rescision. Il y a des exceptions.
Ex : la vente aux enchères. La rescision n’est pas possible car, par essence, la vente aux enchères aboutit à un juste prix
Ex 2 : la vente avec rente viagère. « L’aléa chasse la lésion »

Sous-titre 3 : L’exécution de la vente


Chapitre 1 : Les obligations du vendeur
Le vendeur n’a pas une obligation de transférer la propriété, la simple conclusion du contrat entraîne cela. Dans un
certain nombre de contrats, une clause retarde le moment du transfert au jour de la livraison.
En matière de vente, Domat considérait que le contrat doit s’interpréter contre le vendeur. C’est l’article 1602 du code
civil, et qui a été reprise dans le projet de réforme.
Il y a deux obligations, à l’article 1603 :
-la délivrance de la chose
-les garanties

I. L’obligation de délivrance
La délivrance est définie dans l’article 1604 du code civil « La délivrance est le transport de la chose vendue
en la puissance des possessions de l’acheteur ». Délivrer signifie remettre, c’est donc la remise de la chose en la
possession.
Cette définition porte sur tous les biens, y compris pour les biens incorporels.
Ex : remise des titres de propriété, inscription sur un registre…
La délivrance a lieu au lieu défini par les parties. Cela peut avoir un intérêt dans les ventes internationales.
Il existe des régimes dérogatoires, notamment en droit de la consommation, sur le lieu de la délivrance. L’UE a prévu des
règlements sur la délivrance et la sanction de cette dernière.
La délivrance s’étant à la chose, mais aussi à ses accessoires. C’est l’article 1615 du code civil « l’obligation de
délivrer la chose comprend ses accessoires ».
Ex : celui qui vend une ferme, vend le terrain mais aussi ses accessoires (tracteurs, immeubles, animaux…).
Les accessoires peuvent aussi regrouper toute sorte d’éléments, dont certains sont incorporels. La Cour de cassation estime
que, parmi les accessoires, il peut y avoir des créances.
Le vendeur ne peut pas se contenter, pour certains biens, de transférer la propriété sans informer ni conseiller son
acheteur. C’est l’article 1112-1 qui rappelle l’obligation précontractuelle de renseignement.
Dans une jurisprudence sur la vente, la Cour de cassation pose l’obligation pour le vendeur d’informer l’acheteur quant au
fonctionnement, au maniement et au risque d’utilisation de la chose. Cela porte sur toutes les choses surtout les choses
dangereuses.
Ex : Dès les années 1970, la cour de cassation a rempli des arrêts en matière de logiciel. L’entreprise fabricante doit
informer son client quant aux effets indésirables.
La jurisprudence est très sévère sur cette obligation d’information qu’elle a inscrite en tant qu’accessoire intellectuel de
l’obligation de délivrance.
Parfois, elle prend en compte la qualité d’acheteur. Si l’acheteur est un professionnel, l’obligation d’information sera
moins importante.
Ex : celui qui achète un logiciel de comptabilité
Mais selon l’adage, l’acheteur se doit de se montrer curieux. Il y a donc un jeu subtil sur les limites de l’obligation
d’information du vendeur.
L’obligation de conseil connaît aussi ce jeu subtil. Le vendeur ne doit pas apporter un conseil personnalité.
La Cour de cassation n’a pas hésité, elle a créé une obligation de conseil personnalisé dans le sillage de l’obligation de
conseil.
Ex : le pharmacien doit conseiller le client pour être adapté au mal du client
Ex 2 : un arrêt Civ 1, 11 mais 2022 relatif à la vente d’un camping-car. L’acheteur rajoute des accessoires. Dans la facture, il
y a un avertissement du vendeur sur les questions de poids. L’acheteur part en voyage avec des passagers adultes, et se
retrouve avec l’affaissement d’un des essieux. Il y a un procès sur le fondement de la méconnaissance de l’obligation de
conseil.

II. Les garanties


Garantir, c’est assurer. Le vendeur assure l’acheteur que sa jouissance ne sera pas troublée d’une quelconque
façon. Evidemment, il y a des cas où cela se passe mal. Les romains ont identifié des cas et dégagé deux formes de
garanties :
-la garantie d’éviction
-la garantie des vices cachés
Il y a une nouvelle garantie, qui se fonde dans la garantie des vices cachés, qui est intervenue sous l’effet du droit de la
consommation. Le droit spécial de la consommation a tendance à envahir le droit des contrats, notamment sous l’influence
de l’UE. L’UE a créé une troisième garantie qui n’est pas autonome : la garantie de conformité.

A. La garantie d’éviction
Cela provient du latin « vincere », être vainc. L’éviction c’est quand l’acheteur est vaincu dans la possession de
la chose par un évènement extérieur, donc le vendeur est responsable.
C’est une variante de responsabilité contractuelle car elle aboutit à la résolution du contrat, ou à des dommages-intérêts, ou
à une exécution forcée.
Elle est présente aux articles 1626 et suivants du code civil. Le projet de réforme la modifie légèrement mais sans
apporter de nouveautés considérables. « Le vendeur est obligé de droit à garantir l’acquéreur de l’éviction qu’il
souffre dans la totalité ou partie de l’objet vendu ».
C’est l’idée d’un trouble apporté à l’acheteur dans la possession paisible de la chose.
Le trouble a été identifié depuis les romains en deux catégories :
-le trouble peut émaner du vendeur
-le trouble peut émaner du tiers
Si c’est le vendeur, c’est un fait personnel illicite. Il est naturel que le vendeur garantisse à l’acheteur qu’il ne
commettra pas d’acte illicite quel qu’il soit.
1. La garantie du fait personnel du vendeur
Il concerne des situations pratiques et contemporaines. Le vendeur garantit de ne pas troubler par lui-même la
possession de l’acheteur. Dans l’ancien droit, un vieil adage a été forgé, devenu principe général, « Qui doit garantie ne
peut évincer ». Dès lors que le vendeur doit garantie, il doit s’abstenir de tout acte de nature à troubler la jouissance
paisible de son acheteur.
Depuis le droit romain on distingue deux catégories de trouble causé par le vendeur :
-le trouble de droit
-le trouble de fait
a)Le trouble de droit
C’est l’hypothèse où, après la vente, l’ancien propriétaire émet une prétention juridique à l’encontre de son
acheteur. Il invoque des moyens de droit pour troubler la possession de son acheteur.
Ex : arrêt relatif au mannequin Inès de la Fressange (2006). Un mannequin célèbre avaient fondé une maison de
couture. Elle cède à un tiers le contrôle sur sa société. Le nom patronymique est un bien incorporel depuis l’arrêt Bordas.
Elle cède son nom patronymique en application de cette jurisprudence. Quelques années plus tard, elle prétend que
l’acheteur n’a pas correctement exécuté le contrat et tente de récupérer son nom pour fonder un autre commerce. Elle
intente un procès. L’acheteur invoque la garantie d’éviction. La Cour de cassation retient cette garantie, en lui opposant
l’adage.
Ce ne sont pas les plus fréquents.
b)Le trouble de fait
Le vendeur ne prétend rien du tout. Il a un comportement directement illicite troublant la jouissance
paisible de la chose.
Dès le début du XXème, ce sont développées des situations de non-concurrence, notamment à l’occasion de la vente de
fonds de commerce. C’est l’hypothèse simple selon laquelle un vendeur vend son fonds de commerce à un autre libraire
pour se réinstaller à un autre endroit, pas loin. Par conséquent, l’essentiel des clients attachés à sa personne le suit. C’est la
violation de l’obligation de non-concurrence (synonyme de la garantie d’éviction). Ici, sur le fondement c’est
contractuel et non délictuel.
Cela a poussé certains acheteurs à inscrire, dans le contrat de cession de fonds de commerce ou des actions de société, des
clauses de non-concurrence. Le vendeur s’interdit, à l’avenir, de faire concurrence déloyale à son acheteur.
Il s’agit de savoir s’il n’y a pas une limite temporelle à l’obligation de non-concurrence.
Récemment, la Cour de cassation décide un revirement de jurisprudence et s’adonne au contrôle de
proportionnalité dans la garantie d’éviction. C’est l’influence de la CJUE qui conduit à écarter le syllogisme au profit
d’une non-méthode (avis professeur) consistant à écarter la loi pour donner son sentiment personnel. Elle ne
donne pas raison à l’acheteur alors même que le vendeur a violé l’article 1626 du code civil.
C’est l’arrêt Cass. Com., du 10 novembre 2021 : il s’agissait de deux informaticiens qui avaient fondé une entreprise
commercialisant des logiciels. Ils cèdent leur titre à un tiers avec un contrat dans lequel ils vendent leurs actions mais
restent salariés de la société pendant une certaine durée pour percevoir des salaires. Trois ans après, ils démissionnent et
quittent la société. Dans les mois suivants ils fondent une société concurrente et débauche une partie du personnel. Ils
créent alors un logiciel très inspiré de celui qu’ils ont vendu qui vient concurrencer la première société.
L’acquéreur fait un procès à ses deux vendeurs et ils sont condamnés par le juge du fonds. La Cour de cassation reproche
au juge du fonds de ne pas avoir procéder à un contrôle de proportionnalité : la mise en balance de deux droits
fondamentaux. La Cour de cassation donne raison au vendeur en disant que certes, il y a une garantie, mais qu’elle doit être
limitée dans le temps.
Avis professeur : elle commet une erreur de fait et considère que la durée entre le moment de la conclusion et les actes des
vendeurs aurait été de 3 ans ; mais ils sont restés pendant 3 ans après la vente. En réalité, le point de départ est leur
démission, du coup cela ne fait que quelques mois. Illustration de la critique du contrôle de proportionnalité.
On trouve la même situation en droit du travail. Le salarié qui quitte l’entreprise a souvent une clause de non-
concurrence. La chambre sociale a fait des contrôles de proportionnalité, préexistant et influençant la chambre
commerciale.
2. La garantie du fait du tiers
Il y a plusieurs hypothèses.
Ex : une personne est propriétaire d’un terrain et le vend. Le propriétaire voisin prétend que le terrain empiète. Le voisin
fait un procès à l’actuel acheteur. L’acheteur, qui n’a pas été prévenu par son vendeur et assigné en démolition par le
voisin, va appeler en garantie (ou intervention forcée) son vendeur.
C’est la garantie d’éviction du fait des tiers. Il y aura deux défendeurs et deux avocats.
Si le voisin a raison, il y aura condamnation à démolition. L’acquéreur demandera alors la garantie et à ce que les
condamnations portées contre lui soient supportées par son vendeur.
Ex 2 : Un arrêt du 26 janvier 2022, postérieur à l’arrêt du contrôle de proportionnalité. Il s’agit de la cession d’un fonds de
commerce de traiteur. Dans le contrat il y avait une clause de non-concurrence de 5 ans dans un rayon de 20 km. Le gérant
de la société vendeur se fait employeur par un traiteur directement concurrent à l’intérieur des 20km. Les juges du fonds la
déboutent et reproche de ne pas avoir constaté le détournement de clientèle manifeste.
En mettant en parallèle els deux, sachant que l’affaire de novembre est plus grave, il n’y a pas vraiment de différence que
l’obligation résulte d’une loi ou d’une clause sauf dans la méthode. Dans cet arrêt, il y a un syllogisme, dans l’autre un
contrôle de proportionnalité. Il n’y aucune rationalité dans le choix des méthodes.
Si jamais il y a une menace d’éviction et que l’acheteur n’a pas encore payé le prix, le code civil prévoit l’exception
d’inexécution.

B. La garantie des vices cachés


La garantie des vices cachés remonte au droit romain, et le vocabulaire aussi. L’acheteur victime d’un vice caché
jouit d’une action en garantie qui s’appelle aussi l’action rédhibitoire.
Cette pratique est simple chez les romains et dans le code de 1804 (article 1641 et suivants). Mais elle s’est compliquée
par la jurisprudence extrêmement abondante, sous l’influence de l’UE. Elle l’a fait en utilisant le biais des
consommateurs. De nombreuses directives ont été adoptées, dernièrement en 2019. Il y a une garantie des vices cachés qui
n’est pas dans le code civil, mais dans le code de la consommation. Elle a été rebaptisée « garantie de conformité »
(article L217-1 et suivants).
La qualité des parties donne le régime juridique, c’est une nouvelle source de complexité.
La responsabilité du fait des produits défectueux et dangereux (art 2145 et suivant du code civil). Elle s’applique
qu’il y ait un contrat un contrat ou pas. On applique le régime des produits défectueux quand cela porte atteinte à la
sécurité de la personne.
Ex : arrêts sur les vaccins quand certains patients deviennent malades immédiatement après.
Il n’est pas exclu que le droit commun de la formation du contrat s’applique.
Ex : celui qui pensait que la batterie faisait 500km alors que non, il s’est trompé sur les qualités essentielles de la chose.
La Cour de cassation a essayé de dégager une règle distinguant vice caché et obligation de conformité. Le vice caché
est ce qui rendrait la chose impropre (1641), la chose non-conforme est apte à l’usage mais pas complètement.
Ex : j’ai commandé une voiture avec une couleur particulière mais elle est arrivée d’une autre couleur.
Les prescriptions étaient différentes : la prescription des vices cachés est plus courte que celle du droit commun.
L’article 12 du code de procédure civile permet au juge de requalifier le contrat dont il estime que les fondements
donnés sont inexactes. Cet article est souvent en cause dans des actions en garantie des vices cachés.
Le projet de réforme ne pouvait pas unifier la garantie au regard de la complexité et de l’aspect politique
de cette garantie, notamment du fait de l’implication de l’UE.
Le projet envisage la garantie pour vices, sans le terme caché. Mais par définition, il n’y a de garantie que si le vice est
caché.
La garantie est sanctionnée par l’inexécution et donc par la résolution du contrat.
Peu importe la date d’apparition du vice, sous réserve de la prescription, selon la Cour de cassation.
Ex : les termites.
Il n’y a pas de réparation du dommage imprévisible en matière contractuelle, et la prescription n’est pas la même.
1. Les conditions de la garantie des vices cachés
L’article 1641 est un texte les plus connus du code civil « Le vendeur est tenu de la garantie à raison des
défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destinait ou qui diminuent
tellement son usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise ou n’en aurait donné qu’un moindre prix s’il les avait
connu ».
On retrouve la garantie, l’assurance des défauts cachés.
Ex : une voiture fait seulement 200km d’autonomie alors qu’il était indiqué qu’elle en faisait 500.
Ex 1 : un arrêt de la 3ème chambre civile 15 juin 2022 sur la vente d’un terrain en bord de mer (la garantie des vices
cachés s’applique aussi aux choses immobilières, construites ou non). Périodiquement, il y avait des algues qui
envahissaient le terrain. Il y a un débat sur la garantie, sur l’algue. Est-ce que cela rentre dans le champ de la vente ? La
Cour de cassation répond que c’est bien un vice caché.
Ex 2 : arrêt de la chambre commerciale du 29 juin 2022 relatif à des panneaux solaires. Manifestement, il y a eu des
problèmes d’efficacité de ces panneaux au point que l’acheteur a agi sur le fondement de la garantie des vices cachés.
Cet arrêt est aussi important comme illustration de ce que la garantie des vices cachés se manifeste souvent dans le cadre
d’un groupe de contrat.
Ce qui compte, dans toutes ces hypothèses, c’est que le vice soit caché, que l’acheteur l’ait ignoré. L’article
1642 du code civil « le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-
même ».
Ex : arrêt du 15 juin sur les algues. L’acheteur a visité et a vu qu’il y a des algues. Il ne peut donc pas se plaindre.
Lorsqu’il y a des procès, il y a un débat probatoire pour savoir si l’acheteur était au courant ou pas. Dans l’exemple,
l’agent immobilier pourrait témoigner.
Est-ce que le vendeur avait lui-même connaissance du préjudice ?
Le code civil et la jurisprudence répondent que ce n’est pas la peine de prouver que le vendeur avait connaissance. Même
si le vendeur ignorait le vice de la chose, il doit la garantir. C’est une responsabilité objective, pas une responsabilité
pour faute.
La question de la connaissance a une grande importante car la plupart des professionnels inscrivent des clauses
exonératoires ou limitatives de responsabilité en matière de garantie des vices cachés.
Ensuite, la garantie des vices cachés aboutit à la résolution du contrat, mais pas à des dommages-intérêts. Pour qu’il y en
ait, il faut quand même une faute, qui passe par la connaissance. Voilà pourquoi la jurisprudence est aussi penchée sur cette
question de la connaissance du vice.
Ex : Le premier arrêt date des années 1960 (1965), au sujet de la vente de farine d’un boulanger. La farine était défectueuse.
La Cour de cassation a considéré que la société fabricante de farine, étant un professionnel, était censée connaître des vices
de la chose. La Cour de cassation a créé, sans texte, une présomption de connaissance du vice caché par le
vendeur professionnel.
Elle est allée encore plus loin : la Cour de cassation estime que le vendeur professionnel est tenu par une présomption
irréfragable. Avis du professeur : la présomption irréfragable est une fiction. Le législateur a décidé de codifier cette
présomption.
La question s’est posée de savoir si on ne pouvait pas neutraliser par une présomption réciproque pesant sur l’acheteur
professionnel.
La Cour de cassation a répondu de façon embarrassée : elle prend en compte la qualité d’acheteur professionnel dans
le même domaine d’activité, mais pas au point de déclarer l’action irrecevable. Cela peut seulement avoir des
incidences sur les dommages-intérêts, mais pas sur la recevabilité.
C’est une bi-latéralisation de la présomption de connaissance, avec une jurisprudence claire.
Les choses affectées
Le code civil prévoit l’erreur sur les qualités essentielles de la personne, mais pas en vice caché.
Ex : L’arrêt Berton, une jeune femme épouse un homme mais ignorait qu’il était taulard
Il y a une indisponibilité du corps humain, donc cela ne se pose pas en matière d’embryon. Il en est de même pour tous les
produits du corps humain.
Sous ces réserves, toutes les choses peuvent être susceptibles de vices cachés (mobilière/ immobilières et
corporels/incorporels). Le domaine est large mais il se rétrécit avec l’application de textes différents pour les produits
dangereux. Lorsque l’acheteur est un consommateur, toutes les ventes basculent dans le code de la consommation. Enfin,
il existe des responsabilités spécifiques qui se trouvent dans d’autres codes (ex : code de la construction).
Le procès en garantie de vices cachés
On peut apporter la preuve par tout moyen. Le juge saisi par l’acheteur va, dans certains cas, désigner un expert
qui remet un rapport constatant l’existence de vice (ex : en matière immobilière). En matière de droit de la consommation,
il y a une présomption légale de vice.
Il est impossible de quantifier la prescription et de donner un délai. Voilà pourquoi la solution romaine était de poser un
standard : le bref délai, à compter de la découverte. C’est l’importance du point de départ de la prescription : au jour
du contrat de vente ou au jour où le vice apparait ? La solution est celle du jour de la découverte.
L’UE est intervenue parallèlement dans le domaine de la garantie en matière de vente en droit de la consommation. Cela a
influencé la droit français au point qu’il y a eut, sans attendre la réforme, une réforme. C’est l’article 1648 « L’action
résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l’acquéreur dans un délai de 2 ans à compter de la
découverte du vice ».
Ce n’est plus le standard du bref délai. L’avantage de ce dernier était qu’on pouvait avoir un délai plus long au sujet d’un
immeuble car le vice apparaît plus tard. C’est la souplesse des standards du droit. Cela a été abandonné, ce n’est pas bon
(avis du professeur).
En revanche, le point de départ est dit flottant, mais il est maintenu. La prescription ne court qu’au jour où l’acheteur a
connaissance du vice car tant que le vice n’est pas apparu il l’ignorait.
La cour de cassation et la doctrine ont compliqué les délais avec un droit commun et un droit spécial. En garantie des
vices cachés, le délai de prescription est de 2 ans. Mais il y a d’autres délais d’action relatifs aux actions en justice.
L’article 2224 prévoit toutes les actions « les actions mobilières se prescrivent par 5 ans à compter de la
découverte ».
Mais, bien souvent, les actions sont faites contre les commerçants et il y a une prescription spécifique dans le code de
commerce (article L110-4) qui prévoit une prescription de 5 ans mais qui ne donne pas de point de départ. La Cour de
cassation, saisie un garantie des vices cachés contre le commerçant, a estimé qu’on pouvait considérer que la prescription
de la garantie des vices cachés contre un commerçant est de 5 ans avec un point de départ courant à compter de la
conclusion de la vente. De sorte, que cela ne respecte pas les 2 ans et que celui qui découvre le vice plus de 5 ans après la
vente peut être forclos.
De même, dans le code de la consommation, il y avait des règles de prescription différentes.
De sorte que ce sujet est devenu atrocement compliqué.
Il y a un plafond aux actions en garantie. Il y a un texte nouveau, né d’une réforme de 2008 relative à la
prescription qui se retrouve à l’article 2232 du code civil. Ce texte dispose que les actions en justice ne peuvent être
suspendues au-delà d’un délai de 20 ans à compter du jour de la naissance du droit : c’est le délai butoir.
Le point de départ est celui de la découverte, mais si elle se fait plus de 20 ans et un jour à compter de la conclusion du
contrat, l’action sera prescrite.
Des arrêts de la Cour de cassation, antérieurs à cette réforme, permettaient des actions sous 40 ans pour ne pas
sanctionner la personne qui ignorait. Ce point de départ, à compter de la découverte, correspond à une vieille idée qui se
trouvait dans l’ancien droit « Actioni non natae, non praescibitur » (les actions qui ne sont pas encore nées ne peuvent
être prescrites.
C’est la solution qui a été codifiée dans le projet de réforme. Cependant, le délai butoir prévu par la réforme est
spécifique : c’est 10 ans et non pas 20 ans. Certains envisagent de codifier la jurisprudence de la cour de cassation pour la
sécurité du vendeur par la prescription.
En matière de groupe de contrats, la Cour de cassation a été saisie à plusieurs reprises dans l’hypothèse suivante :
le vice caché est découvert par l’acheteur final, plusieurs années après la vente. L’acheteur exerce une action contre le
vendeur, qui exerce lui-même une action récursoire contre son fabricant. Quel est le délai applicable aux actions
successives ?
Plusieurs arrêts de la Cour de cassation, compliqués (et critiquables), ont considéré que l’action récursoire du vendeur
intermédiaire se trouverait enfermée dans la prescription de droit commun du code de commerce (car ils sont
commerçants) : 5 ans. Elle a estimé que ce délai courait à compter de la conclusion du contrat.
Arrêt de la chambre commerciale (16.01.2019) avant le revirement :
Il s’agissant de la charpente d’un bâtiment. Le client avait commandé un nouveau hangar, l’entrepreneur s’approvisionne
auprès d’une entreprise qui fabrique des éléments de charpente. 12 ans après la livraison, des infiltrations apparaissent.
Dans les 2 ans de la découverte, le client agit contre l’entrepreneur. Mais, l’entrepreneur a tout de même acheté les
éléments de la charpente à un fabricant. Il exerce donc une action récursoire pour se faire rembourser en garantie. Le
fabricant lui répond que c’est trop tard.
La cour d’appel condamne en considérant que le délai de l’action récursoire contre le fabricant n’a pas pu courir tant que le
trouble n’est pas apparu. Un pourvoi en cassation est formé.
La Cour de casse au motif que l’action en garantie des vices cachés, même si elle doit être exercée dans les deux ans à
compter de la découverte du vice, est aussi enfermée dans le délai de l’article L110-4 qui court à compter de la vente
initiale.
La chambre commerciale pose deux délais : le délai de la découverte (2 ans) et un délai butoir qui n’est pas celui de
l’article 2232 mais le délai de droit commun des commerçants (5 ans à compter de la première vente).
On ne peut pas faire courir un délai avant que l’action soit née, or l’action en garantie exercée par l’acheteur final n’est née
que du jour où les infiltrations sont apparues.
Arrêt du 29.06.2022 : La Cour de cassation constate que l’action récursoire ne peut pas naître avant que le vice ait été
découvert et que l’action de la victime ait été exercée contre le vendeur intermédiaire. C’est l’arrêt sur les panneaux solaires.
Arrêt du 25.05.2022 : la 3ème chambre civile a pris une décision similaire.
Est-ce que l’action en justice interrompt la prescription ?
Souvent la victime demande une expertise. Si l’expert dépose son rapport 6 mois après et que l’action est encore intentée 6
mois après est-ce qu’on est en dehors des 2 ans ?
L’assignation en justice interrompt le délai d’action : cela repart à 0. Un nouveau délai court et il n’y a pas de
difficulté
2. Les effets de la garanties des vices cachés
Le code civil de 1804 donne à l’acheteur une faculté. C’est l’article 1644 « l’acheteur a le choix de rendre la
chose et se faire restituer le prix ou de la garder et se faire rendre une partie du prix ». Cette option existe depuis le
droit romain.
La première action est l’action rédhibitoire. La deuxième action est l’action estimatoire.
a) L’action rédhibitoire
C’est une variété d’action résolutoire. L’acheteur rend la chose et le vendeur lui rend le prix. Mais il reste la
question des dommages-intérêts.
Cette question est abordée à l’article 1645 « si le vendeur connaissait le vice de la chose, il est tenu, outre la
restitution du prix, de tout dommages-intérêts ». Si le vendeur est de mauvaise foi, il doit rendre le prix et payer des
dommages-intérêts compensatoires.
Cela fait le lien avec la présomption irréfragable de la connaissance du vice par le vendeur professionnel. Le vendeur sera
tenu de dommages-intérêts car il est censé connaître.
L’autre effet est que les clauses limitatives de responsabilité sont inopposables à l’acheteur.
La résolution de droit commun, le juge a option. S’il estime que la violation du contrat n’est pas suffisamment
grave, il peut refuser de résoudre alors même que le demandeur le réclame.
En droit spécial de la vente, il n’y a pas d’option. Le juge est tenu de la prononcer si l’acheteur exerce l’action
rédhibitoire en résolution.
b) L’action estimatoire
C’est l’hypothèse dans laquelle l’acheteur est prêt à conserver la chose quitte à réaliser des réparations. L’action
estimatoire vient du latin estimare, l’acheteur conserve la chose mais veut se faire restituer une partie du prix pour
qu’il ne paye que la valeur réelle.
C’est une action en réduction du prix.
L’acheteur a subi un dommage, il peut donc réclamer des dommages-intérêts que le vendeur devra également payer.
Dans la pratique judiciaire, certains acheteurs se contentent de la réduction du prix.
c) Les groupes de contrats
Souvent, on est en présence de groupes de contrats, de chaînes. La question est de savoir si l’acheteur final n’a pas
lui-même une autre option qui consisterait à exercer une action, non pas contre son propre vendeur, mais aussi contre le
fabricant.
Ex : l’acheteur d’un bateau qui a des fissures va se retourner contre le chantier naval, constructeur du bateau. Mais le
chantier naval a acheté tous les éléments de construction à des vendeurs dans le monde entier. L’acheteur peut-il agir
contre tous les fabricants pour les condamner in solidum ?
La Cour de cassation, dans plusieurs arrêts, a considéré cela en consacrant le phénomène de l’action directe. La victime
du vice caché jouit d’une action directe de nature contractuelle et non pas extracontractuelle à l’encontre de tous les
maillons de la chaîne, jusqu’au fabricant initial.
Mais c’est une faculté : l’acheteur n’est pas obligé de l’exercer et peut seulement se retourner contre son propre vendeur.
Cela étant, la Cour de cassation lui réserve une autre option sur la nature de l’action : la victime peut préférer exercer
une action extracontractuelle qui peut avoir deux fondements.
-ex : si c’est le fabricant chinois de boulons qui est responsable du fait que le bateau coule, l’armateur français n’a aucun
lien avec lui et il peut exercer une action du fait de la responsabilité du fait des choses. C’est le fondement de l’article
1842.
-ensuite, le tiers peut se prévaloir de l’inexécution du contrat (opposabilité du contrat au tiers)

C. La garantie de conformité
Si l’acheteur est un consommateur, ce sera le régime spécial du code de la consommation qui s‘applique.
Paradoxalement, le droit de la consommation, à force de se compliquer, est devenu mois protecteur que le code civil. Il ne
se passe pas une année sans une modification du code de la consommation. Ensuite, sous l’influence de l’UE, une
ordonnance de 2021 a refondu la garantie de conformité de la vente, elle-même transposition d’une directive européenne
de 2019.
Auparavant, comme le droit de la consommation est devenu plus compliqué, avec une certaine sagesse il prévoit que le
consommateur a une option : il peut toujours préférer agir sur le code civil plutôt que sur le code de la
consommation (article L217-30).
La notion même de garantie de conformité se rapporte à la garantie des vices cachés sur la notion de choses impropres à
l’usage auquel la destine le consommateur (L217-5).
Le code prévoit encore une présomption de vice lorsque celui-ci apparait dans les 2 ans de la vente.
Avant 2021, la prescription était beaucoup moins favorable que le droit commun : 2 ans à compter de la délivrance de la
chose.
L’ordonnance de 2021 remédie à cette situation dans l’article L217-3 qui dispose que « le point de départ de la
prescription est le jour de la connaissance ». C’est un alignement sur 1648. Mais au début de cet article il est prévu que
le vendeur réponde des défauts qui apparaissent dans les deux ans à compter de la délivrance. Les deux alinéas sont donc
paradoxaux. L’article n’a pas été nettoyé : c’est un millefeuille d’accumulation des textes.
Ex : que faire si le défaut apparaît dans les 3 ans ?
En droit commun l’acheteur a le choix. En droit spécial, le consommateur n’a pas le choix ; c’est le vendeur
qui a le choix. Le code prévoit aux articles L217-8 et suivants un mécanisme de « hiérarchie des remèdes ».
Ex : l’achat d’un nouveau smartphone et la batterie s’épuise vite. On retourne vers le vendeur pour échanger ou
rembourser le smartphone. Avec ce mécanisme, le vendeur peut d’abord exiger la réparation du smartphone. Ce n’est que
si la réparation n’a pas fonctionné ou n’est pas possible qu’il passe à la deuxième étape et propose le remplacement. Ce
n’est que si la réparation et le remplacement posent de graves difficultés que l’acheteur peut demander la restitution.
Ces textes, issus de l’UE, ont donné lieu à des batailles rangées entre les groupes de pression (associations de fabricants,
associations de consommateurs…).
Ces textes font application du principe de proportionnalité. Mais il y a un autre contrôle de proportionnalité qui
concerne l’exécution du contrat entre parties.
Le code de la consommation prévoit que cette hiérarchie des remèdes est dictée par la proportionnalité : si la
réparation proposée par le vendeur est suffisante, pourquoi résoudre le contrat et l’anéantir ?
La garantie porte sur la chose viciée : c’est une nouveauté de l’ordonnance de 2021. Elle porte sur la chose ; mais
aussi lorsque la chose numérique, sur la mise à jour. Ces textes obligent les vendeurs à mettre à jour les appareils
numériques et à garantir l’efficacité et l’absence de vices dans les mises à jour.
On comprend leur raison d’être : étendre la garantie à la vente de l’objet mais aussi à une exécution successive qui
se prolonge et qui porte sur l’objet et ses accessoires. Une mise à jour est un accessoire de la chose.
Les clauses de non-responsabilité (abusives, obligations essentielles) sont mal vues en droit commun, mais a
fortiori en droit spécial. Elles sont, dans le code de la consommation, réputées non-écrites.
Mais il y a un nouveau paradoxe.
Ex : les conditions générales d’Apple avec deux grosses marges sur la garantie. Il est prévu qu’Apple s’engage à garantir
l’absence de tout vice sur les produits vendus (avec la reproduction des articles 1641 et L217-5). Ce ne sont pas de clauses
limitatives, mais la garantie est limitée dans un délai de 1 an. Le délai de garanti est plus court avec un point de départ à la
délivrance et non à la découverte.
Sous couvert du droit européen, ces conditions sont nulles et inopposables à l’acheteur.

D. Les conventions relatives à la responsabilité pour toutes les garanties de la vente


Le vendeur peut-il aménagé les garanties légales ?
Il peut les aménager en mieux : aménager une garantie supérieure. C’est ce que les professionnelles appellent la garantie
commerciale.
Ex : chez Darty, est proposé, avec un supplément de prix, une réparation gratuite dans les 24h etc…
Par rapport à la garantie du code civil, c’est supérieur de sorte qu’elles sont parfaitement licites.
Les garanties qui se présentent comme commerciales mais qui ne le sont pas.
Ex : le cas des conditions d’Apple qui présente une garantie qui semble plus courte. Le consommateur moyen n’y
comprendra rien, à supposer même qu’il les lise. Si son ordinateur tombe en panne, il est possible que le vendeur lui
oppose cette condition. Est-ce que c’est malhonnête ?
Les clauses limitatives de responsabilité ont un champ restreint en 2022.
Ex : pour les vices cachés, lorsque le vendeur est professionnel, la clause sera systématiquement écartée, y compris avec un
acheteur professionnel.
La clause limitative de responsabilité d’une garantie de vice caché ou d’une garantie d’éviction n’est envisageable que
dans les rapports entre particuliers, sous réserve de l’application de l’article 1170 du code civil.
Il y a encore beaucoup de ces clauses, y compris dans les ventes de professionnel à consommateur.
La Cour de cassation considère que le vendeur ne peut pas s’exonérer de son fait personnel ; peut-être du fait des
tiers, et encore.
En 2022, la liberté contractuelle s’est considérablement rétrécie.

Chapitre 2 : Les obligations de l’acheteur


L’acheteur a principalement deux obligations :
-payer le prix car c’est un contrat synallagmatique
-obligation de retirer la chose, si elle est corporelle
Pour certaines ventes, en matière de droit des sociétés et le droit des marchés financiers, il y a une obligation curieuse : les
ventes avec rachat. Ce sont des ventes spéculatives.
Ex : Le propriétaire des actions d’une grosse société les vend à l’acheteur pour un certain prix. Il est convenu que, le
30.10.2024, l’acheteur lui revendra les actions et le prix est d’ores et déjà fixé. C’est spéculatif : la valeur des actions n’est
pas certaine.
L’obligation de l’acheteur est de restituer la propriétaire à terme.

I. Le payement
L’acheteur doit payer.
Quand ? Pas tout de suite. Parfois le vendeur peut lui donner un délai pour payer plus tard : c’est la notion de vente à
crédit.
Le plus souvent, l’acheteur paye et reçoit en même temps le bien.
Il peut également payer et la livraison sera faite plus tard. C’est un acte de confiance à l’&égard du vendeur qui n’a pas livré
la chose.
Avec quoi est faite la vente ? Des euros, de la monnaie, des bitcoins…
Comment le payement est prouvé ? C’est un fait juridique qui peut être prouvé par tout moyen.
Ex : le relevé de banque, le ticket de caisse (dématérialisé ou non)
Dans un supermarché, le transfert de propriété aurait dû s’effectuer quand on prend l’objet. En réalité, on peut considérer
que le transfert de propriété est différé au moment où on passe à la caisse et reçoit le ticket (preuve).
Est-ce que l’acheteur peut échapper au payement ? Oui, dans certains cas. Quand la chose ne lui a pas été livrée ou quand
elle est affectée d’un vice. C’est l’exception d’inexécution.
Si l’acheteur ne paye pas et n’a aucune cause justificative, le vendeur peut le contraindre par une exécution forcée ou
obtenir la résolution de la vente.
Ce sont les articles 1650 et suivants du code civil.
II. Le retirement
L’acheteur doit prendre livraison de la chose.
Ex : achat d’un scooter électrique et il n’a pas été allé le cherché dans les 10 jours. Le vendeur peut mettre en demeure de
venir le chercher et le cas échéant obtenir la résolution du contrat.

Titre 2 : L’échange
C’est l’ancêtre de la vente, et il a été éclipsée par cette dernière. Mais aujourd’hui, il n’est pas exclu que l’échange
retrouve une nouvelle jeunesse.
Il est défini par l’article 1702 du code civil « l’échange est un contrat par lequel les parties se donnent
respectivement une chose pour une autre ». C’est un transfert de propriété réciproque.
Ex : propriétaire d’un scooter et d’un ordinateur. Il y a un échange entre les deux sans échange d’argent. Si l’ordinateur
vaut 1500 euros et l’ordinateur 1000, il y a un problème. Il n’y a pas de lésion ni en matière d’échange ni en matière
mobilière. Mais les parties peuvent prévoir que celui qui fournit la chose qui vaut le moins va verser, en argent, un
supplément. Les professionnels l’appellent la soulte (du latin solvere).
C’est une opération qui se pratique beaucoup dans les campagnes, au sujet des échanges de terre.
Il s’agit de savoir si on pourrait envisager un échange d’un bien contre un service. L’article 1702 ne le prévoit, il y a peu
de jurisprudences depuis 1804. Mais, on peut se fonder sur les usages. Dans les campagnes, il y a des pratiques au terme
desquelles une partie va remettre (ex : du lait, des céréales) contre des services (ex : travailler à la ferme).
Cela se fait également dans le commerce international.
Dans le projet de réforme, l’échange est étendu aux services. Ce n’est plus du dare contre du dare, mais aussi du dare contre
du facere.

Sous-partie 2 : Les contrats portant jouissance sur un bien


Le principal de ces contrats est le bail. On dit « bail » mais aussi « louage de chose ». C’est un contrat essentiel qui
concerne une large partie de la population : le bail d’habitation (ceux qui louent pour habiter quelque part, cela comprend
les hôtels et les Airbnb). La plateforme Airbnb avait pour idée de mettre en contact quelqu’un qui veut louer avec
quelqu’un propriétaire d’un bien.
Il existe également un bail commercial en droit des sociétés.
Il y a aussi beaucoup de baux ruraux dans les domaines ruraux.
Il existe également des baux portant sur des biens mobiliers.
Ex : location de voiture pendant les vacances
Ex 2 : vélos et trottinettes en libre-service.
Beaucoup loue les choses dont il se serve. Tout se loue, c’est un contrat de premier plan.
On peut également louer des biens incorporels.
Ex : louer un film sur AppleTV pour une durée limitée contre un prix (streaming).
Ex 2 : les laboratoires sont propriétaires de brevet pour les vaccins. Ils ont accordé de contrat de licence à d’autres pays. La
licence est un louage ; on peut louer un brevet.
Ex3 : on peut louer des logiciels. C’est un contrat fréquent dans le commerce international.
Les rédacteurs du code civil n’avaient pas prévu un tel succès, mais ont donné une définition générale, c’est
l’article 1709 « Le louage de chose est un contrat par lequel une des parties s’oblige à faire jouir l’autre d’une
chose pendant un certain temps et moyennant un certain prix que celle-ci s’oblige de lui payer ».
Le génie est que cette définition de 1804 s’applique à l’immeuble, au fonds de commerce, à la voiture, à la licence sur le
vaccin, au streaming etc…
C’est une jouissance : il n’y a pas de transfert de propriété. Dans les travaux de la commission de réforme, certains
voulaient utiliser un vocabulaire différent (mise à disposition à la place de jouissance). La jouissance correspond à l’usus et
au fructus, le propriétaire reste propriétaire. Avec cette définition tous les exemples sont compris.
A partir du moment où le contrat de bail a été révisé, on a rajouté des dispositions (notamment sur les meubles).
Maintenant, l’UE s’est immiscée dans le contrat de bail alors qu’elle n’a pas de pouvoir institutionnel. Dans la
philosophie de l’UE, c’est de l’économie pure. Pour la commission et la CJUE, moins il y a de diversité de contrat mieux
c’est. Pour elles il y a deux types de contrat : celui qui porte sur le transfert de propriété (la vente), et tous les
autres qui sont des contrats de prestation de service. Elles estiment que mettre un bien à la disposition d’une personne
pour qu’elle en jouisse c’est une prestation de service.
Certains auteurs sont convaincus qu’on peut traiter le bail comme une prestation de service.
Avis du professeur : il y a une particularité dans le bail, ce n’est pas un service ni un transfert de propriété. Le bailleur ne
fait de prestation, il met seulement à disposition son bien.
Ex : arrêt dans lequel il s’agissait de savoir si s’appliquait à un contrat de bail d’habitation la loi de 1989 portant sur les baux
d’habitation ou bien le code de la consommation dans ses dispositions générales. Sert-il de légiférer en matière de baux ou
peut-on appliquer les dispositions du code ? La Cour de cassation refuse ce raisonnement et considère qu’un bail est
soumis à ses règles propres.
La CJUE, pour manifester son hostilité au bail, elle a tendance à faire application des dispositions propres au droit de la
consommation sans qualifier, soit il lui arrive de rester dans les qualifications des contrats spéciaux mais de déformer le
bail.
Ex : arrêt CJUE 16.09.2021 relatif aux licences de logiciel. Du point de vue de la qualification c’est un louage et les
contrats conclus par les entreprises informatiques les qualifient de tel. A la fin du contrat, si le licencié ne renouvelle pas le
contrat, il ne restitue pas. La CJUE était saisie au sujet d’une entreprise qui avait chargé un mandataire, un agent
commercial, chargé de prospecter les entreprises. Le contrat prend fin et le mandataire demande une indemnité. Le débat
était de savoir si une directive européenne relative à la vente s’appliquait pour bénéficier de son indemnité. Est-ce que la
licence de logiciel est une vente ? La CJUE a estimé que la licence est une vente.
Dès lors qu’un mécanisme juridique se trouve dans le champ de compétence de l’UE, sa qualification et son régime
appartiennent exclusivement à l’UE : c’est le concept de notion autonome. Et la Cour de cassation ne peut pas rendre
une position différente. Dans l’arrêt, elle considère que peu importe les qualifications qui existaient dans les droits des
Etats-membres, c’est la définition de la CJUE qui l’emporte.
La CJUE va s’intéresser au téléchargement qualifié le louage de vente. Quand on charge une application, il y a un
téléchargement qui fait qu’on l’a sur notre machine. Elle considère que ce téléchargement est une sorte de transfert de
propriété.
Pour les logiciels Microsoft, ils apparaissent sur l’ordinateur. Mais est-ce qu’on est propriétaire du fichier ? Est-ce qu’on
parle de propriété sur des octets d’ordinateur ? La CJUE estime que c’est une vente et que l’agent commercial peut obtenir
le payement de son indemnité.
Avis du professeur : ce serait une sorte de prêt du fichier immatériel pour avoir accès au logiciel.
Portalis et les rédacteurs du code civil avaient une intuition du développement des baux autres. L’article 1713
prévoit le bail sur les meubles et les immeubles. A partir du texte général et abstrait on peut faire rentrer tous les biens.
Avec les méthodes d’interprétation, on peut parfaitement appliquer les dispositions du code civil aux nouveaux baux.

Titre 1 : Le louage d’immeuble


Depuis le droit romain, on peut louer un immeuble ou le vendre. L’avantage de le louer est que cela rapporte de
l’argent. Le louage d’immeuble, depuis lors, s’est considérablement transformé sous des effets sociologiques et
économiques.
Une grande partie de la population n’a pas les moyens d’acheter ou ne peut pas s’endetter (vente à crédit). Assez
rapidement, dans les rapports entre bailleurs et locataires, l’Etat a développé un mouvement de protection de la partie
faible au contrat. La partie faible dont l’existence même peut être dépendante de l’exécution du contrat. Que deviennent
ceux qui ne peuvent plus payer leur loyer ?
Depuis la fin de la WWI, tout un mouvement législatif a tendu à protéger les locataires au détriment des bailleurs de
toute sorte de façon.
Ex : en rendant l’expulsion difficile, en plafonnant les loyers, en rendant la durée du contrat pratiquement indéterminée…
Cela a commencé en 1919 et cela se poursuit encore en 2022. Il y a régulièrement des lois ultra-protectrices des locataires.
Les droits fondamentaux s’en sont mêlés. Un nouveau droit fondamental est né, alors qu’il n’est pas dans la Conv. EDH,
le droit au logement.
Ce mouvement s’est traduit dans la logistique : plutôt que de modifier le code civil, le parlement et le
gouvernement ont décidé de légiférer à part. Il y a un empilement de lois qui sont à part du code civil, dans les codes
commerciaux.
La dernière loi en date, pour les baux d’habitation, est du 6.07.1989, mais elle a été précédé d’autres lois importantes, y
compris après la WWII. C’est une loi très connue de 1948.
Dans la législation récente, les gouvernements les plus engagés ont fait voter des modifications de la loi de 1989 avec la loi
de 2014 et la loi de 2018. Mais toujours dans le même sens.
Les rédacteurs du code civil avaient envisagé le contrat de louage d’immeuble comme un contrat comme les autres. Les
dispositions du code civil sont donc supplétives. La loi de 1989 dispose que les dispositions sont d’ordre public.
Cela produit des effets pervers : il y a de plus en plus de propriétaires qui hésitent à louer.
Le droit des baux d’habitation est devenu ultra-règlementé.
La commission de réforme s’est posé la question : est-ce que cela vaut le coup de moderniser le code civil alors que
l’essentiel se trouve hors du code civil ? La décision a été de laisser le code civil.
Il faut avoir en tête le fait que le droit spécial est devenu le droit impératif.

Chapitre 1 : La formation du bail


I. Les parties
Qui sont les parties ?
Tout d’abord, le bailleur est le propriétaire, c’est lui qui conclut l’acte. Le bailleur peut être une personne physique ou
une personne morale
Le locataire, ou preneur, sera une personne physique (en cas de bail d’habitation). Mais il peut être une personne morale,
car dans les baux d’immeuble il n’y a pas que les baux d’habitation. Ex : le bail professionnel des avocats qui se constituent
sous forme de société civile.
Il peut y avoir plusieurs locataires : c’est la notion de colocation. La colocation est un phénomène sociologique qui se
développe, notamment chez les étudiants en province. C’est la loi de 1989, dans sa dernière version (2018), qui a
règlementé pour la première fois la colocation. Il y a un principe de solidarité, qui doit être stipulé. Un bailleur peut-il
réclamer le payement d’un colocataire non solvable qui a quitté les lieux ?
Le code civil ignorait la colocation entre étrangers. En revanche, il la connait depuis longtemps en matière familiale.
Beaucoup de gens mariés louent ensemble l’appartement qu’ils occupent.
La personne des locataires a un rôle considérable dans le droit des baux d’habitation.

II. La forme
La forme du bail ?
C’est le droit commun qui s’applique. Le bail est un contrat consensuel. S’il est supérieur à 1500 euros, il sera conclu
par écrit. Si c’est une habitation, c’est la loi de 1989 qui s’applique : le bail doit être conclu par écrit à peine de nullité.
Dans son souci de surprotéger le locataire, la loi de 1989 oblige les bailleurs, quelle que soit leur qualité (professionnel
ou non), à reproduire toutes sortes de dispositions d’ordre public. Ce sont des clauses obligatoires.
Il y a un deuxième écrit dans le bail : le contrat d’état des lieux. C’est un document signé par les parties, à part du bail,
qui décrit l’immeuble. Quand le locataire quitte les lieux, il y a un deuxième état des lieux. On comparera l’état de lieux
d’entrée et de sortie pour évaluer la faute du locataire.

III. L’objet
Un standard du droit des biens, que l’on retrouve dans le droit des baux, est très fort : la notion de destination
des lieux. Le locataire peut jouir (fructus et usus) de la chose, conformément à sa destination.
Ex : Le bailleur peut-il contrôler ou prétendre contrôler les gens que le locataire va recevoir chez lui ? Il y a une
jurisprudence concernant les homosexuels. La Cour de cassation a décidé que le bailleur n’a pas à s’en mêler.
Ensuite, concernant la polygamie (chez les musulmans), il n’y a pas de raison que la religion ou les mœurs du locataire ait
une influence sur le bail. C’est la position de la Cour de cassation. Pour cela, elle utilise les droits fondamentaux de la
Conv. EDH et notamment l’article 8 se rapportant à la vie privée.
Ex 2 : Le locataire peut-il faire ce qu’il veut à l’intérieur ?
La destination des lieux correspond à leur intégrité. Le propriétaire doit redonner son consentement pour tout.
Ex 3 : Un locataire d’appartement va souvent à la campagne et décide de sous-louer (groupe de contrat). L’objet du bail est
assez précis, on n’est plus dans le standard de la Conv. EDH.
Ex 4 : Arrêt du 22 juin 2022 dans lequel la cours de cassation visait le respect de la destination des lieux par le colocataire.

IV. La durée
La durée est un élément essentiel des contrats, et spécialement des baux. On revient au fondement quasi-politique
de la législation sur les baux : l’Etat, dans un souci de stabilité sociale, veut que chacun ait son logement quelles
qu’en soient les conditions.
Les rédacteurs du code civil, eux, ont prévu le contrat de bail à durée déterminée ou à durée indéterminée. Ils ont
prévu le cas dans lequel un contrat de bail à durée déterminée n’est pas renouvelé mais le bailleur n’a rien dit et les
locataires continuent de payer : c’est la notion de tacite reconduction. Cela ne suffit pas dans la législation temporelle, et
elle se montre stricte, pas tant sur la durée que sur le renouvellement.
Dans la loi de 1989, sur le quantum, si le bailleur est une personne physique la durée minimum est de 3 ans, et 6
ans s’il est une personne morale. En cas de société civile, le bail sera de 6 ans.
Ce qui pose des difficultés, c’est le renouvellement. Le bail peut être renouvelé et reconduit sans que le bailleur
puisse s’y opposer. C’est une nouveauté et anormalité par rapport au droit civil. Le contrat à durée déterminée qui arrive à
son terme ne peut être renouvelé que si un double-consentement, fut-il tacite.
Dans le bail d’habitation, alors même que le bailleur voudrait récupérer la chose, il ne le peut pas. C’est la notion de droit
au renouvellement. Il pourra y avoir autant de reconduction du bail que le locataire le souhaitera.
Cependant, si, pour une raison, le locataire veut résilier, il peut le faire à tout moment sous réserve d’un préavis (en
générale de 3 mois). Cela rappelle les règles du contrat de travail.
L’Etat vient protéger, voire surprotéger, une des parties au contrat. Cela explique que les propriétaires hésitent parfois à
louer leur bien.
Par ailleurs, le bailleur ne peut mettre fin au contrat à son expiration que pour 3 motifs :
-en cas de faute du locataire. Ex : s’il n’a pas payé son loyer
-lorsque le bailleur justifie qu’il veut reprendre le bien pour y habiter lui-même ou sa famille. Ex : il a un fils
étudiant qui veut récupérer le studio
-lorsque le propriétaire veut vendre le bien. Le locataire jouit alors d’un droit de préemption, il peut acheter le bien qu’il
louait jusqu’à maintenant.
En soit c’est vertueux, mais n’est-ce pas excessif ?
A partir du moment où le contrat va être renouvelé (tacitement ou non), les parties peuvent en modifier les termes
et notamment le prix. Le bailleur contrainte de renouveler le bail peut-il obtenir un supplément de prix ?
La réponde devrait être oui, mais la loi de 1989 encadre, comme en matière de baux commerciaux, et plafonne le
montant du loyer renouvelé.
Cette législation est ultra-dirigiste. Le problème est que tous les propriétaires ne sont pas des gens riches, ni des personnes
morales ; et cela conduit à une certaine inégalité : un renversement de l’inégalité.
Quand il s’agit d’une personne âgée, il est impossible de la mettre dehors, même avec les 3 causes énoncées.
Si le bien plait au locataire et que le loyer est plafonné, pourquoi il n’y resterait pas toute sa vie ?
S’est alors posé la question du contrat perpétuel. Est-ce que ce n’est pas un contrat perpétuel imposé au bailleur ?
Il y a peu de jurisprudence, et la plupart du temps elle est favorable au locataire. Pourtant, le code civil interdit le contrat
perpétuel.
Ainsi, au fonds, certains propriétaires ne pourront jamais récupérer leur bien : n’est-ce pas excessif ?
La question s’est posée de savoir si, lorsque le locataire meurt, le bail ne doit pas être transmis à ses enfants ?
La loi de 1989 en donne une réponse positive. Des baux durent sur plusieurs générations.
La CJUE a estimé que toutes ces contraintes peuvent conduire à une atteinte substantielle au droit de
propriété du bailleur.
Le locataire en cours de bail peut-il céder son bail ?
En droit commun, la réponse est positive. Avis du professeur : cela heurte car le bail est un contrat avec un intuitu
personae.
En droit spécial, ce n’est pas possible ; il faut l’accord du bailleur. Au fonds c’est l’application de la théorie générale :
céder son bail c’est céder un contrat, il faut systématiquement l’accord du bailleur.
Si un nouvel acheteur acquiert le bien, le locataire peut lui opposer le bail. L’article 1743 dispose que « le bail sera
opposable au nouveau propriétaire ». C’est une dérogation à l’article 1199 sur l’effet relatif des contrats.
Pour l’acheteur du bien occupé ce n’est pas forcément une bonne affaire car il ne pourra peut-être pas l’occuper ou le louer
à autrui

V. Le prix
Le prix du bail s’appelle le loyer. Il est fixé par les parties comme elles l’entendent (liberté contractuelle). Le bail se
décompose avec le loyer (périodique) + les charges.
Les charges se sont les frais du propriétaire qu’il engage dans l’intérêt commun et dont il demande
remboursement.
Ex : les charges de chauffage collectif, l’enlèvement des ordures ménagères
La plupart du temps, le loyer est en argent. Mais il pourrait, pour une partie, être en nature.
Comme nous sommes dans des périodes inflationnistes, le coût de la vie peut augmenter. Par conséquent, dans
pratiquement tous les contrats de bail, il y a des clauses d’indexation. C’est un indice qui augmente, la plupart du temps,
en fonction duquel le loyer est réévalué périodiquement. Ces indices sont publiés par l’INSEE.
La loi de 1989 se montre à nouveau dirigiste. Le gouvernement a commencé par plafonner les loyers renouvelés.
C’est un système contraignant visant à saisir une commission des loyers (commission de conciliation) qui va envisager
en fonction d’un certain nombre de critères, notamment les loyers du voisinage, si le bailleur pourra avoir son
augmentation.
Le gouvernement est allé encore plus loin, il y a quelques années. Jusqu’à maintenant, le loyer initial était libre. Maintenant,
dans les grandes villes, il y a une sorte de contrôle des loyers qui fait que le montant initial peut être plafonné. Le
loyer médian est le nouveau standard juridique.
La marge de liberté du bailleur est pratiquement réduite à 0.
En général, les bailleurs ont deux garanties :
-ils réclament un dépôt de garantie (1 ou 2 mois de loyer en général) dont la fonction est, lorsque le locataire s’en ira, de
se servir de cette somme pour faire des réparations si le locataire a fait des dégâts. Cet usage n’a pas été remis en cause,
mais il est ultra limité : au maximum d’un 1 mois.
-si le locataire ne paye plus le loyer mais qui continue d’occuper les lieux, le bailleur doit avoir le concours de la force
publique pour le mettre dehors. Ce n’est pas évident.
Par conséquent, le bailleur recherche un minimum de garantie. Voilà pourquoi il va demander à un tiers de se porter
caution. La caution est une personne qui se porte garante de ce que si le débiteur ne paye pas sa dette, elle le fera à sa
place. Mais il y a un extrême formalisme du cautionnement donné au bailleur.
Dans le droit des baux contemporains, le droit spécial est de plus en plus envahissant et contraignant pour
le propriétaire.

Chapitre 2 : L’exécution du bail


I. Les obligations du bailleur
C’est l’article 1719 du code civil, repris dans le projet de réforme, « le bailleur est obligé de délivrer la chose
louée, de l’entretenir et d’en faire jouir paisiblement le locataire ».
A. La délivrance
Il y a un mécanisme commun de droit de la vente : la remise de la chose. Pour l’immeuble c’est la remise des clés,
avec le plus souvent un état des lieux.
Mais l’article 1720 est plus précis « le bailleur est tenu de délivrer la chose en bon état ». Si le bailleur conclut un
contrat pour un immeuble en très mauvais état, il méconnait son obligation de délivrance. Souvent, le bailleur fait des
travaux avant que le bien ne soit loué.
Sous l’influence des droits fondamentaux, la Cour de cassation et la loi de 1989 ont même créé un nouveau standard : le
logement décent. Dans l’article 1719 « Le bailleur doit délivrer un logement décent ».
C’est un niveau plus élevé que le « bon état », c’est le minimum du minimum.
Ex : dans des arrêts, le logement est infesté par les rats/ les termites. Il y a de la jurisprudence sur des toilettes (WC sur le
palier).
On retrouve les accessoires. Le bailleur est obligé de délivrer les accessoires. Il y a des accessoires incorporels au bail.
Ex : arrêt 1.06.2022. Il s‘agissait d’un bail pour un commerce de pizzas. La Cour de cassation considère que le bailleur a
méconnu son obligation de délivrance.

B. Les garanties
Le bailleur est tenu d’une garantie d’éviction et des vices cachés. C’est le parallèle avec la vente. La garantie
d’éviction est le standard de jouissance paisible.
Il est d’abord garant de son fait personnel, il ne peut pas troubler le locataire d’une quelconque façon.
Ex : s’il fait des travaux qui troublent le voisinage et le locataire, il en sera garant.
Il est aussi garant du fait des tiers.
Ex : la jurisprudence sur les colocataires. Un bailleur est propriétaire de tout l’immeuble et dans l’immeuble il y a beaucoup
d’appartements loués à des étudiants qui font des fêtes tous les soirs. Le bailleur, dès lors qu’il a autorité sur les autres
locataires, doit faire cesser le trouble. Le bailleur est responsabilité du fait de son autorité.
Est-ce que le bailleur est tenu des pertes et destructions qui peuvent entraver la jouissance du locataire ?
C’est le droit commun. En théorie non, c’est la théorie des risques. Mais dans certains cas, il pourra avoir l’obligation de
réparer ou reconstruire.
S’agissant des vices cachés, c’est un raisonnement à fortiori, le bailleur est tenu des vices cachés.
Ex : les termites, le toit qui fuit…
Dès lors qu’il a une obligation de délivrance ou d’entretien, il doit réparer le vice caché. Le contrat ne sera pas forcément
résolu, mais il devra réparer. C’est la différence entre le bail et le vente. Le bail est un contrat à exécution successive et
le vente un contrat instantané. Le locataire n’a pas intérêt à demander la résolution du contrat.
C. Les réparations
C’est une question pratique. Dans un immeuble, les choses peuvent se dégrader. Qui a la charge des réparations ?
Dans les articles 1720 et suivants, il y a un raisonnement analogique avec l’usufruit. Les grosses réparations sont à
la charge du nu-propriétaire et les menues réparations sont à la charges de l’usufruitier.
La loi et la jurisprudence ont procédé à un raisonnement analogique et ont appliqué cette ventilation des charges au bail.
Ex : quand un toit fuit c’est pour le bailleur, quand des joints du lavabo doivent être réparés c’est le locataire
Il y a des cas entre les deux.
Ex : le chauffe-eau ?
Il peut y avoir des contestations entre les parties. Et si elles ne se résolvent pas, c’est le juge qui sera saisi. Avant, c’était le
juge d’instance, maintenant c’est le juge des contentieux de la protection.
La loi de 1989 a repris ce système. Des décrets et des arrêtés présentent des listes des réparations.

II. Les obligations du locataire


Avec la pandémie, il s’agit de savoir si le locataire doit payer ou non la totalité du créancier. Or, la deuxième
chambre civile, dans les arrêts relatifs au Covid, estime que dans le contrat de bail le locataire est créancier de la garantie et
débiteur du loyer.
Avis du professeur : il ne comprend pas ces arrêts et la position de la Cour. Quand est-ce que la force majeure s’applique
au locataire si elle ne s’applique pas pendant la pandémie ? Peut-être que la Cour a voulu limité les procès, mais ce n’est pas
un fondement juridique.

III. Les sanctions du locataire


Il faut se heurter à la sociologie. Dans la sociologie, il est difficile d’obtenir la résiliation. Il faut saisir le juge du
contentieux de la protection, qui peut accorder des délais de grâce au locataire, ou estimer que le manquement n’est pas
assez grave. A supposer cela, le jugement met 1 an-1 an et demi. Ensuite, à supposer que le jugement soit rendu, il faut, si
le locataire refuse de quitter les lieux, le recours à la force publique (réquisition du préfet). Le préfet impose une enquête
sociale pour vérifier que les locataires ne se trouveront pas à la rue, leur relogement etc…
Le bailleur, alors même que le locataire ne paye pas les loyers, ne pourra pas le mettre à la porte.
A cela s’ajoute la période d’hiver (1er novembre au 31 mars) durant laquelle on ne peut expulser personne pour des
raisons humanitaires. De nombreuses contraintes pèsent sur le bailleur.
Ex : arrêt de juin 2022 relatif à la pandémie, les bailleurs sont accablés de plus en plus.
La responsabilité du locataire peut être engagée dans d’autres circonstances. C’est notamment le cas en cas d’incendie, s’il
part de l’appartement il y a une présomption de responsabilité qui pèse sur le locataire.

IV. Le transfert du bail


Le locataire peut-il céder son bail ? La réponse est oui dans les baux commerciaux. Dans les baux d’habitation, la
réponse devrait être non car le bail est un contrat avec un intuitu personae. Mais le code civil précise que le preneur peut
sous-louer ou céder son bail (article 1717). Dans le droit spécial des baux d’habitation, la règle est inverse : le
locataire ne peut ni céder ni sous-louer.
Pour la cession de bail, il faudrait normalement l’accord du bail car c’est une cession de contrat.
Le plus fréquent, la sous-location, arrive quand quelqu’un loue une partie de l’immeuble compris dans son contrat de bail à
quelqu’un.
Ex : Airbnb, dans certaines villes cela remplace les locations habituelles car ce n’est pas les mêmes obligations pour les
propriétaires et les loyers sont plus élevés. De même, pour les locataires, la tentation de sous-louer est forte.
La Cour de cassation s’est prononcée dans un arrêt Civ. 3 du 12.09.2019 (commentaire professeur revue trimestrielle p.8).
La Cour a décidé que le locataire qui mettant en sous-location son immeuble sur Airbnb pouvait se voir sanctionner de
deux façons : par la résiliation du contrat et par la restitution des sous-loyers indument perçus.
Il y a eu un débat sur les fruits. A qui appartiennent les fruits civils ? Il y a eu un débat sur un mécanisme : l’accession. La
Cour de cassation estime que le locataire est, par définition, de mauvaise foi ne peut pas conserver les fruits et doit les
restituer.
Cette position est réaffirmée dans un arrêt du 22.06.2022.
Cependant, il y a encore beaucoup de locations Airbnb non-autorisées. Le droit public a essayé de s’en mêler. Des
textes du droit public interdisent, par exemple, de louer plus de 120 jours en Airbnb par an. Mais ces textes ne portent pas
échec au droit privé qui interdit, par principe, la sous-location, sauf si le bailleur est d’accord.
Lorsque le locataire est commerçant et que son activité, en accord avec le bailleur, est de louer les chambres. C’est un hôtel
et il a donc un fonds de commerce. Si ce n’est pas son activité, il ne peut pas le faire ni au vue du droit commun ni au vue
du droit spécial.
Ex : un étudiant part à l’étranger et cède son appartement. L’étudiant ayant pris sa place n’arrive pas à payer son
loyer. Le bailleur peut-il demander au cédant de se portant garant du cessionnaire et qu’il y aurait une sorte de solidarité ?
C’est une question relative au droit des sûretés, à une sorte de cautionnement.
Outre les enfants et les partenaires mariés ou pacsés, les concubins bénéficient du droit de résidence dans le bail.
La loi parle de « concubin notoire ». Le concubin notoire bénéfice du maintien dans les lieux.

Titre 2 : Le louage de meuble


L’article 1713 prévoit qu’on peut louer des meubles et des immeubles. Effectivement, en sociologie et en
économie, il y a beaucoup de locations de meubles corporels (ex : louer une camionnette pour déménager, louer une
trottinette électrique dans la rue) ou incorporels (ex : fonds de commerce, location-gérance, streaming).
Les rédacteurs du code civil s’étaient contentés d’évoquer la location mobilière sans lui donner un régime. La Cour de
cassation a du déterminer qu’elles sont les règles relatives au louage de meuble. Elle a rendu un grand arrêt de 1882 au
terme duquel le juge peut s’inspirer des règles contenues dans le code civil sur le louage d’immeuble pour les
transposer au louage de meuble. Le projet de la Chancellerie codifie cette jurisprudence de 1882.
Pour le reste c’est le droit commun qui s‘applique.
Ex : les conditions générales du louage de trottinette ou de vélo alors qu’il y a des règles douteuses au regard du droit de la
consommation. Donc le droit de la consommation s’applique.

Sous-partie 3 : Les contrats de restitution


C’est un autre volet des contrats spéciaux, important de la vie sociale et économique. Il y a des contrats qui sont
tournés vers l’usage et la restitution. C’est déjà le cas avec le bail, mais ce sont des contrats qui ont une particularité : ce
sont des contrats d’amis. Les contrats de bienfaisance, à titre gratuit, ont pour caractéristique la restitution d’un bien
qu’on a reçu à titre gratuit, et donc unilatéraux.
Ces contrats sont ensuite réels, qui se forme par la remise de la chose.
Depuis le droit romain, les deux principaux contrats sont :
-le prêt
-le dépôt
Le projet de la chancellerie tend à bouleverser, au moins concernant le prêt, ces distinctions qui nous viennent du droit
romain en codifiant des jurisprudences de la Cour de cassation assez confuses sur les qualifications.
Avis du professeur : il est en désaccord avec cela

Titre 1 : Le prêt
Le professeur Mallory adorait donner des exemples. L’un de ces exemples, donné dans son livre, est l’exemple
d’étudiant préparant son galop qui veut se faire prêter un code civil. Dans cet exemple, il y a toutes les qualifications.
L’article de base, qui n’a pas changé depuis 1804, est l’article 1874 « Il y a deux sortes de prêts, celui des choses dont
on peut user sans les détruire et celui des choses qui se consomment par l’usage qu’on en fait ».
Ex : pour un prêt de 5 euros pour acheter un repas, c’est la même chose que le code civil : un service d’ami à charge de
restituer. Simplement, les 5 euros ont été remis et l’étudiant va s’en servir. L’étudiant devra rendre ; mais, à la différence du
code civil (chose corporelle individualisée), les 5 euros est une chose fongible et consomptible ; 5 euros sous la forme qu’il
souhaite (billet, pièces, virement…).
Il y a un champ considérable pour le prêt.
Le prêt des choses individualisées s’appelle le prêt à usage.
Depuis le droit romain, pendant 2000 ans, le code civil lui donnait un synonyme « le commodat », qui veut dire prêter en
latin. Le gouvernement a trouvé que ce terme était obscur et l’a supprimé.
Dans le projet de réforme, le terme « commodat » est rétabli car les praticiens l’ont intégré et l’ont demandé.
L’autre prêt s’appelle le prêt de consommation, par référence aux catégories du droit des biens.
C’est une catégorie plus vaste, dont le prêt d’argent est le principal prêt. Mais il existe aussi des prêts portant sur des
matières premières.
Pourtant, la Cour de cassation, dans des arrêts obscurs, a fait un fractionnement. Elle a considéré que le prêt à
usage reste le contrat réel, et que le prêt de consommation est un contrat consensuel si c’est un professionnel qui
prête à un particulier. La qualification change au regard de la qualité des parties.
Ex : quand on prête 5 euros, le contrat de consommation se fait de particulier à particulier et est un contrat réel.
Ex 2 : pour un prêt par le banquier, c’est un contrat consensuel.
En réalité, cette disqualification est dictée par une question de régime et d’exécution forcée des promesses de prêt. Pour
obtenir l’exécution forcée d’une promesse de prêt, consentie par un banquier à des particuliers, la Cour a estimé que le
contrat est consensuel et donc susceptible d’exécution forcée.
La commission de réforme a décidé de codifier cette jurisprudence et de faire la distinction entre consensuel et réel.

Sous-titre 1 : Le prêt de consommation


Dans l’article 1892 du code civil, « Le prêt de consommation est un contrat par lequel l’une des parties livre
à l’autre une certaine quantité de chose qui se consomme par l’usage, à charge de lui en rendre autant de même
espèce et qualité ».
Ex : on prend un billet ou des pièces correspondant à 5 euros, on le consomme et on les rend de même espèce (avec
d’autres pièces, d’autres billets, un virement).
C’est lié au mécanisme des choses fongibles et consomptibles. L’emprunter se doit de restituer l’équivalent de la chose
prêtée.
Cela ne pose pas de difficultés dans les rapports entre particuliers.
Dans les rapports entre professionnel et particulier cela pose des difficultés, également dans les rapports entre
professionnels.
Ex : si une entreprise veut opérer des rénovations et va voir un banquier, elle est dans la même situation qu’un particulier
car elle n’est pas un professionnel de la finance.
Voilà pourquoi des dispositions spéciales (code de la consommation) protègent les particuliers et les entreprises
qui empruntent de l’argent. Il y a, à nouveau, un fractionnement du droit.
Evidemment, l’UE s’en est beaucoup mêlée. Des directives posent, régulièrement, des dispositions protectrices
concernant le prêt. Dans les droits spéciaux, le mot prêt est peu utilisé, on utilise le mot « crédit ».
Il y a parfois des subdivisions entre les deux principaux types de crédit, que sont le crédit mobilier (emprunt pour acheter
ou louer des meubles) et le crédit immobilier (emprunt pour acheter ou louer des immeubles), qui ne sont pas présentes
dans le code civil et qui n’ont pas d’intérêt du point de vue juridique.
Dans ces exemples, on entre dans des groupes de contrats. Il y a un premier contrat (prêt) en vue de conclure un
contrat principal (vente ou location).
Il existe ensuite des contrats mixtes qui touchent les particuliers et les entreprises : les contrats de crédit-bail (pour louer
et peut-être acheter à terme du contrat de location). Ce sont des montages contractuels.

I. Forme et conclusion du contrat


En droit commun, le contrat se forme au moment où est remise la chose. C’est un contrat réel, un des rares qui
subsiste en droit français.
Selon la Cour de cassation, il n’y a pas besoin d’écrit pour le contrat réel. Evidemment, si la somme est importante, est-ce
que le contrat se forme par la remise ? Oui, car c’est indépendant de la valeur de la chose. Il n’y a que dans les contrats
consensuels qu’un écrit est exigé pour els sommes importantes. Cependant, dans les usages, un écrit est réalisé.
Ex : si l’emprunteur a reçu 15 k euros et dit que son prêteur lui a donné, un écrit permet de faire preuve.
La Cour de cassation considère que dans les contrats entre professionnel et particulier, c’est un contrat commercial
avec donc un écrit.
Dans le droit spécial, c’est l’obligation d’écrit. Tout contrat de crédit mobilier ou immobilier doit porter les
mentions de nature à informer le consommateur. L’emprunteur a des droits et des obligations. On a des dispositions dans
le code de la consommation, relatives aux deux formes de prêts.
Ces qualifications sont liées à un contrat principal à conclure.
Ex : pour emprunter il faut voir un banquier pour acheter un appartement.
La logique n’est pas partagée par les rédacteurs des textes de l’UE. Il y a beaucoup de copier-coller pour des dispositions
du code de la consommation qui sont relatives au montant du prêt, sa destination, les conditions du remboursement, les
délais (échéancier), clause de pénalité, retard de payement.
Et puis, une particularité du prêt est que, en droit romain c’est un contrat d’ami, mais aujourd’hui ce n’est pas un
contrat de bienfaisance (ex : avec le banquier). C’est donc un contrat à titre onéreux car le prêteur sera rémunéré. Dans
l’économie contemporaine, le contrat d’ami bascule dans les contrats onéreux avec le système de l’intérêt.
Il faudra rembourser des intérêts à côté du capital (somme nominal), c’est un pourcentage de la valeur prêtée.
Une partie des règles, notamment en provenance de l’UE, vient donc encadrer les intérêts.
Il existe d’autres types de contrat de prêt, mais il relève du droit bancaire.
Ex : lorsqu’on est à découvert, le banquier prête et attend que l’on rembourse (délai de 1 mois).
Le code de la consommation et l’UE ont inversé les rôles dans la constitution de l’écrit. Selon le code de la
consommation, l’offrant est le prêteur, alors qu’il n’a rien demandé, et le destinataire est l’emprunteur. Cela n’a pas
de sens juridique, mais un sens économique.
Les autorités nationales considèrent qu'une fois que le client a expliqué ce qu’il voulait dans le prêt, il y a une offre de
crédit faite par l’établissement financier qui est remise au destinataire pour qu’il réfléchisse. Ce dernier a un droit de
rétractation car un emprunt est un acte grave.
On retrouve une philosophie de formalisme protecteur. Si l’écrit n’est pas respecté, le contrat est nul ou, si l’emprunter a
reçu l’argent, le contrat est nul et le banquier perdre sa rémunération, le contrat sera gratuit.
Le banquier a une obligation d’information de l’emprunteur (consommateur ou professionnel), mais également une
obligation de s’informer avant de conclure. Avant de faire son offre de crédit, le banquier doit se renseigner sur la
solvabilité de l’emprunteur (capacité de remboursement et son patrimoine).
En sociologie, il existe des emprunteurs qui multiplient les emprunts. Et le mécanisme de l’emprunt est fondé sur des
renseignements périodiques. Donc au final, l’emprunteur ne pourra mathématiquement plus payer au bout d’un moment.
C’est cette conception que le droit de la consommation a traduit par le mot « surendettement ». C’est celui qui a pris trop
de dettes, donc trop d’emprunts, en même temps.

II. L’interdépendance avec le contrat principal


Le prêt a pour objet de permettre de conclure un contrat principal.
Il y a eu beaucoup de jurisprudence sur ce sujet avec de prêteurs ou des vendeurs qui voulaient rendre étanches ces
contrats. On retrouve le mécanisme de la condition (régime général des obligations).

A. La condition suspensive
Ex : Des gens ont trouvé un appartement et veulent l’obtenir en exclusivité car des concurrents veulent le même.
Ils concluent une promesse synallagmatique de vente au terme de laquelle les parties s’engagent à vendre et acheter à une
date donnée et pour un prix donné l’appartement. Mais l’acheteur n’a pas assez sur son compte bancaire. Il va faire
financer une partie du prix par un crédit immobilier, mais il ne l’a pas encore obtenu.
Si on ne précise pas dans le contrat de vente une condition suspensive de ce que la promesse sera parfaite que si le crédit
bancaire est obtenu, le vendeur peut, au terme de la promesse, réclamer le payement du prix.
La vente ou la promesse synallagmatique sera caduque (était valable mais tombera) si le prêt n’est pas conclu.
Ce système a été généralisé et rendu d’ordre public par le code de la consommation.

B. La condition résolutoire
Ex : le banquier a accordé le crédit de 15k euros remboursable sur 15 ans avec un intérêt de 4%. Mais il y a des
termites dans l’immeuble. L’emprunteur/acheteur agit contre le vendeur et obtient la résolution du contrat en garantie des
vices cachés. Que devient le contrat de prêt ?
Des banquiers considèrent que la vente est peut-être résolue, mais pas le prêt. L’emprunt doit donc arriver à son
terme. Le prêteur a intérêt à poursuivre le prêt pour avoir une rémunération.
Voilà pourquoi le principe du code de la consommation est que si le contrat principal est résolu, le contrat de prêt est
résolu. Il y aura un remboursement anticipé : l’emprunteur se servira de la restitution du prix pour rembourser le prêt.
Ce mécanisme est également appliqué par la Cour de cassation dans les rapports entre professionnels lorsque l’un des
contractants est une entreprise.

III. La durée du prêt et le prix


A. La durée
La plupart des prêts sont à durée déterminée. Des prêts à durée indéterminée peuvent exister.
Ex : un ami des parents prête à un étudiant une somme pour ses études, il remboursera quand il peut. Le contrat est à
durée indéterminée et, exceptionnellement, il est valable (il n’y a pas de potestativité).
Ex 2 : Il existe le prêt étudiant (prêt d’honneur) qui bénéficie à l’étudiant qui remboursera au banquier quand il pourra
(quand il aura un emploi).
Ce sont des exceptions.
Les emprunteurs ont des calendriers d’échéance pour rembourser. Le remboursement est échelonné.
Dans le prêt, on reçoit instantanément l’argent, mais on le rembourse de manière échelonnée.
Pendant la durée d’exécution, peuvent se poser des questions :
1/ L’emprunteur qui n’a pas payé les 6 derniers mois selon l’échéancier prévu est en tort. Le prêteur est en droit de faire
résoudre le contrat et de la réclamer la restitution immédiate de tout l’emprunt restant à restituer.
Le prêt lui a permis d’acheter (maison ou voiture), le banquier impayé va donc saisir la maison ou la voiture ou les autres
biens du débiteur. Il y a une possibilité : les procédures civiles d’exécution, qui peuvent être extrêmement sévères.
Le banquier sera dans son tort si, dans les conditions générales, il existe des clauses abusives.
Le code civil permet au débiteur aux avoirs d’obtenir des délais de payement qui peuvent aller jusqu’à 2 ans. Dans cette
hypothèse de la période de la pandémie, il est demandé à ce que le juge prononce un délai de grâce.
2/ Est-ce que l’emprunteur peut, sans attendre la fin de l’échéancier, rembourser volontairement et de façon anticipée
le crédit ? La réponse devrait être oui, car le prêteur qui reçoit tout de suite ce qui lui ait dû est content. Mais en réalité,
c’est valable pour le prêt d’ami et pas le prêt bancaire. Des établissements refusent le prêt anticipé.
La Cour de cassation a considéré que, au moins quand c’est un consommateur, il y a une sorte de droit à imposer le
remboursement anticipé au prêteur alors même qu’il le refuserait. Cette jurisprudence est codifiée dans le code de la
consommation.

B. La rémunération du prêteur
Baudry-Lacantinerie a fait des pages sur l’historique du prêt. C’est une question sensible, politique et morale. A
l’origine, dans le système du droit romain, le prêt est gratuit ; mais à partir du moment où des citoyens sont allés voir des
gens qui n’étaient pas leurs amis pour leur demander de l’argent, s’est posé la question de savoir si ces personnes (dont
certaines en faisait leur profession) pouvaient réclamer une rémunération.
Assez rapidement, dans l’histoire, la question de savoir si on pouvait maintenir la qualification de prêt tout en assortissant
une rémunération s’est posée.
Aujourd’hui ce n’est pas résolu, c’est la notion de prêt à intérêt. Le prêteur peut-il réclamer une rémunération sous forme
d’intérêt ?
Certains ont considéré, en se fondant sur la religion (catholique, juive, musulmane) que c’est immoral. Au fonds, il n’y a
que deux philosophies sur le prêt :
-la gratuité, d’origine romaine
-même si on rend service, il doit y avoir un minimum de contrepartie
Il y a eu de grands débats dans l’ancien droit. L’Eglise catholique était hostile au prêt à intérêt. Mais cela ne l’a pas empêché
d’être pratiqué sous l’ancien droit.
A la Révolution, avec le principe de laïcité, le prêt à intérêt a été reconnu. C’est l’article 1905 du code civil « il est
permis de stipuler des intérêts pour prêt d’argent ».
Au fonds, le prêt à intérêt est devenu économique et sociologiquement plus important par rapport au prêt d’ami car nous
sommes dans une société de consommation où les besoins d’argent sont de plus en plus importants.
L’article 1907 distingue deux types d’intérêts « l’intérêt est légal ou conventionnel ».
L’intérêt légal est fixé par la loi. L’intérêt conventionnel peut excéder celui de la loi toutes les fois qu’elle ne le prohibe pas.
L’intérêt légal : l’Etat fixe régulièrement le taux de l’intérêt légal pour toutes les créances de somme d’argent.
Aujourd’hui, il est aux alentours de 3%. C’est un intérêt plancher.
L’intérêt conventionnel : les parties à un contrat de prêt déterminent librement le montant de l’intérêt. Evidemment,
les banquiers ne s’intéressent pas à l’intérêt légal car, pour des sommes importantes 3% ne représente pas grand-chose.
D’où la question : il y a-t-il un plafond à l’intérêt conventionnel ?
Il existe des risques, connectés au système des clauses abusives, mais la question est si sensible qu’il y a une législation
spécifique ultra-compliquée concernant le taux d’intérêt conventionnel. Il est plafonné selon un système qui se
trouve dans le code de la consommation aux articles L314-1 et suivants. Avec cette originalité que le plafond du taux
d’intérêts conventionnels s’applique aussi aux prêts aux entreprises, pas que aux consommateurs.
On utilise le terme « d’usure » pour désigner cela. C’est la formule du prêt usuraire, celui qui est totalement excessif, qui
va ruiner le débiteur. C’est interdit par l’Etat. Et pendant des siècles, l’Eglise a lutté contre le prêt sur ce fondement et cette
image du prêt usuraire.
Le système est le suivant : l’ensemble des établissements financiers français détermine des taux d’intérêts moyen et
raisonnables. Tout banquier qui accorde un prêt ne peut dépasser de plus du tiers le montant de l’intérêt moyen
pratiqué par l’ensemble des établissements financiers.
Aujourd’hui, on doit être aux alentours de 8-9% pour le taux effectif moyen.
Le taux qui ne respecte pas ce système est déclaré usuraire. Le contrat est déchu du taux qui sera ramené au taux légal.
Une autre question se pose : à partir du moment où beaucoup de crédits sont à moyen ou long terme, est-ce qu’on
peut fixer aujourd’hui le même taux qui s’applique encore 15 ans après ?
C’est la question de la détermination du prix. L’intérêt est, au fonds, le prix du prêt.
La Cour de cassation, qui s’était montré rigide, a évolué pour accepter que le prêt puisse être à taux variable, qu’il soit
ajusté en cour d’exécutions. C’est en général à la demande du prêteur.
Le prêt à taux variable est lui-même très encadré.

C. Les garanties et contentieux


Entre particulier et professionnel, ce sera les tribunaux de droit commun (commerce ou civil). Mais en cas de
consommateur, c’est le juge des contentieux et de la protection.
En matière de consommation, il y a une prescription spéciale favorable au consommateur. Elle est de 2 ans, au lieu de 5
ans, à compter du premier incident dans l’exécution.
Les contentieux peuvent aussi avoir lieu car le prêteur demande des garanties. Il ne faut pas voir de façon trop
péjorative le prêteur : c’est un métier à risque.
Ex : le banquier qui remet 800 k euros à des gens qui devront le rembourser en 20 ans prend des risques.
Voilà pourquoi les prêteurs doublent le prêt de garanties. Ils peuvent réclamer une caution de la part d’un tiers, ou,
lorsque l’emprunteur est une personne physique, la souscription à une assurance vie. Un assureur prendra la suite et
remboursera, généralement en une fois, le prêt.
La renégociation peut mener à des contentieux. Les parties peuvent renégocier, le droit commun le prévoit à
l’article 1193 (consentement mutuel pour modifier le contrat).
Mais il y a une législation spécifique dans le code de la consommation pour encadrer la négociation qui portera souvent sur
le calendrier de remboursement ou le montant des intérêts.

Sous-titre 2 : Le prêt à usage


C’est le commodat.
L’article 1875 définit le prêt à usage « le contrat par lequel l’une des parties livre une chose à l’autre pour s’en servir
à charge de la rendre ».

I. Caractéristiques
Ex : tu me prêtes ton code civil pour ton interrogation.
C’est une chose individualisée remise à titre gratuit par une personne à une autre. Le prêteur est le commodant et
l’emprunteur le commodataire.
L’article 1878 précise que « tout ce qui est dans le commerce peut faire l’objet d’un prêt ».
Donc les choses corporelles, immobilières (ex : appartement) ou mobilières (ex : vélo, manteau de ski).
La question s’est posée à propos des biens incorporels.
En droit des affaires, la pratique a vite admis le prêt de fonds de commerce et le prêt de valeurs mobilières (le prêt de
titres).
Se pose la question du prêt des livres. Si on retient la façon dont fonction les bibliothèques, quand on emprunte un livre à
charge de le rendre ensuite, c’est un prêt. Avec l’extension de l’Internet, la question s’est posée sur les livres dématérialisés
(et les ENT). La seule question est celle de la restitution.
La CJUE a été saisie de la question et a rendu un arrêt du 10.11.2016. Elle estime que le prêt peut être étendu aux livres
dématérialisés.
L’autre question qui se pose est de savoir si toutes les mises à dispositions gratuites entre dans la définition du prêt
alors même qu’il y a de plus en plus de commerçants qui prêtent. Est-ce que leurs actes sont soumis ?
Mallory, dans le Livre des contrats spéciaux, appelle cela la gratuité d’affaire.
Ex : une grande surface met à disposition un chariot pour mettre les produits.
Ex 2 : les aéroports prêtent des chariots
Ex 3 : des entreprises prêtent un logiciel/ une application pour une durée déterminée
La jurisprudence ne s’est pas prononcée de façon claire.
En revanche la commission de réforme a décidé de créer une nouvelle variété de prêt : le prêt intéressé. Si la
réforme passe, il y aura deux sortes de prêts : le prêt désintéressé (le commodat) et le prêt intéressé avec des règles plus
strictes.
Le prêt est un contrat réel, mais la commission de réforme a considéré que le prêt peut être consensuel dans
certains cas. C’est un contrat réel, il n’y a pas besoin d’écrire le montant. Mais en pratique, il y aura toujours un
écrit.
Ex : les stars à Cannes se voient prêter des parures par le joaillier

II. Les obligations de l’emprunteur


Il a le droit de servir, mais a obligation de prendre soin de la chose. On retrouve le standard de la
personne raisonnable (ancien bon père de famille).
S’il y a lieu d’entretenir la chose, il devra le faire. S’il y a des frais, il devra les conserver pour lui.
S’il use la chose, est ce que le prêteur peut lui demander une indemnité ?
Non normalement, c’est dans la destination du prêt. De ce fait, le prêteur le sait.
Au terme convenu, l’emprunteur rendra la chose. Mais si elle est abimée, perdue, détruite ou volée ; il en sera
responsable.

III. Les obligations du prêteur


Le prêteur est un ami, cela reste un contrat de bienfaisance pour l’essentiel à l’inverse du prêt à la
consommation. Cela peut donc paraître étrange.
Le texte de l’article 1888, tourné vers le moment de la restitution, dispose que « le prêteur ne peut retirer la chose
qu’après le terme convenu ou, à défaut, après qu’elle a servi à l’usage pour lequel elle a été empruntée ».
Les parties n’ont pas à préciser le terme dans des prêts à durée indéterminée. Le prêt à usage peut être à dies
certus (jour certain) ou dies incertus (le jour incertain).
Se pose le problème pratique de la date possible de réclamation du prêteur. Le terme est quand l’emprunteur a fini de s’en
servir, mais quand a-t-il fini de s’en servir ? Quand il le décide ?
Une jurisprudence récente s’est développée sur des cas de prêts immobiliers. Les années passent et l’emprunteur impose le
maintien de l’usage contre la volonté du prêteur.
La question s’est aussi posée pour des emprunteurs en tant que personnes morales, et notamment des associations
cultuelles.
C’est entre amis, il n’y a pas d’écrit. Il y a des procès des dizaines d’années après.
Ex : des prêts de locaux à des syndicats (article 1888).
Il y a-t-il un terme au prêt à usage ? C’est l’article 1889 du code civil que le prêteur peut récupérer le bien
lorsqu’il y a un besoin pressant et imprévu.
Ex : le fils qui doit occuper le studio, ce n’est pas pressé et imprévu
Ex 2 : La volonté de louer le bien n’est pas pressant et imprévu.
La Cour de cassation avait une jurisprudence étroite et restrictive
Sous la pression de la doctrine, la Cour de cassation a prononcé un revirement de jurisprudence. Elle estime qu’à partir
du moment où c’est un contrat à durée indéterminée et que c’est un contrat d’ami, le prêteur peut mettre fin à tout
moment sous réserve d’un préavis raisonnable.
Ex : un arrêt de 2015 relatif à un local prêté pour le culte musulman. L’association cultuelle (personne morale) invoquait la
Conv. EDH qui protège la liberté de religion. La Cour de cassation a considéré que la liberté religieuse n’a rien à voir avec
l’exécution d’un contrat spécial à titre gratuit.

Titre 2 : Le dépôt
Déposer c’est remettre, poser quelque chose. En l’occurrence, poser quelque chose entre les mains d’une
personne physique ou morale.
C’est l’article 1915 du code civil « le dépôt est un acte par lequel on reçoit la chose d’autrui à charge de la garder
et la restituer en nature ».
L’origine historique romaine est le service d’ami. On utilise le terme « garde » qui est consubstantiel au dépôt

Sous-titre 1 : Les caractéristiques du dépôt


Au départ, c’est le service d’ami, mais on le retrouve dans toutes sortes de situations qui peuvent rester
des services intéressés ou désintéressés.
Ex : intéressé : société de garde-meuble. Le dépôt devient même à titre onéreux
Ex 2 : intéressé : le coffre-fort dans la banque
Des dépôts sont souvent attachés à un autre contrat qui fait qu’on a deux contrats attachés ou un contrat mixte.
Ex : le vestiaire d’une boite de nuit (poser le manteau contre un ticket). Le contrat de boîte de nuit est un contrat
d’entreprise (une obligation de faire) auquel est associé un petit contrat de dépôt (vestiaire).
Le champ est considérable.
Ex : une voiture électrique laissée au parking. C’est un contrat de dépôt (laisser la voiture contre un ticket)
Certains dépositaires refusent d’être considérés comme tels.
Ex : les banques dans la location de coffre-fort, ou les parkings. Des banques et exploitants de parking considèrent que ce
n’est pas un dépôt mais un bail mobilier. Dans le bail, le propriétaire se contente d’aller mettre un espace à disposition du
locataire (il ne s’occupe pas de garder), la chose est sous la garde du locataire. Alors que dans le dépôt, la chose est sous la
garde du dépositaire.
De sorte que si le bien est volé, ou habité, selon la qualification du contrat, le propriétaire sera responsable ou pas.
L’obligation essentielle du dépôt est la garde, donc le dépositaire est responsable.
Quelle est l’obligation caractéristique ? Si on met une voiture au parking c’est pour que cela ne soit pas abimé.
Il existe des dépôts incorporels. La question s’est posée avec l’Internet.
Ex : conditions générales de Dropbox.
Le dépôt peut être aussi immatériel.
Ex : vol de photos de JLO sur son cloud. Elle n’a pas fait de procès à Apple car elle a laissé ses photos sur son cloud et le
hacker les a obtenus. Le cloud computing est un contrat de dépôt.
On reçoit la chose d’autrui, mais elle n’est pas qualifiée (corporelle ou incorporelle).
On est passé de l’origine romain du service d’ami à des dépôts intéressés (parking) ou des dépôts qui ont l’air gratuit mais
sont intéressés (ICloud).
Au départ on s’est même demandé si le dépôt était un contrat. Carbonnier, dans des articles, a affirmé que le
dépôt appartient au non-droit (rapports sociaux qui n’ont pas besoin de règles contraignantes prévues par
l’Etat).
Le code civil appelle ce dépôt informel le « dépôt nécessaire ». C’est lorsque la nécessité se manifeste : une personne
demande à une autre de lui garder son bien. Les règles sont encore plus informelles que sur le dépôt classique.
Quoi qu’il en soit, le dépôt est un contrat réel. Le contrat se forme par la remise de la chose, quelles que soient ses
circonstances.
L’article 1920 distingue le dépôt volontaire et le dépôt nécessaire.
Ex : le dépôt volontaire= poser sa voiture au parking
Ex 2 : le dépôt nécessaire= déposer le bien car on est indisponible.

Sous-titre 2 : La conclusion du contrat de dépôt


I. La preuve du dépôt
C’est un contrat réel qui se forme par la remise de la chose, mais elle résulte du consentement des parties.
Ce consentement peut être express ou tacite.
Pour les dépôts immatériels, il y a un contrat avec des conditions générales et donc un écrit.
En revanche, ce n’est pas tant la preuve que de l’existence du contrat, qui peut se faire par tout moyen (ex : la boîte de
nuit avec le ticket), que la preuve du contenu et de l’objet du dépôt.
Ex : une remise d’un manteau en boîte de nuit, mais le manteau est perdu. Il y a eu un dépôt (ticket), mais quelle était la
chose déposée ? Qui croire ? Le dépositaire ou le déposant ?
Ex 2 : dans le coffre-fort, on peut mettre plein de choses différentes. Le banquier ne contrôle pas le contenu car cela relève
de la vie privée et du secret du dépôt. Si la banque est cambriolée, il faut demander l’indemnisation. Selon le contenu, cela
peut être un dommage économique considérable ou faible. Qui croire ?
Le code contient des règles de preuve originale. Il y a une sorte de présomption de confiance à l’égard du
dépositaire. L’article 1924 du code civil institue une présomption de confiance qui permet au dépositaire d’être « cru
sur sa déclaration ».
C’est exceptionnel qu’on puisse prouver sa propre affirmation, « nul ne peut se faire preuve par soi-même ».
Le dépositaire peut prévoir des plafonds d’indemnisation si la chose a été perdue ou volée.
Ex : système de Dropbox.
En outre, la plupart des dépositaires souscrivent à des assurances (assurance de responsabilité civile).
La preuve est libre : elle peut aussi se faire par témoignage.
Ex : des camarades peuvent attester du fait que le manteau était neuf. La liberté de la preuve contrebalance la confiance
accordée au dépositaire.
Il y a une sorte de liberté respective car il n’y a pas le choix. Dans certains dépôts, le contenu même du dépôt est ignoré.

II. L’objet du dépôt


L’objet peut être un meuble corporel ou incorporel. Il n’existe, par définition, par de dépôt immobilier. On ne
peut pas remettre un immeuble.
On peut remettre les clés et demander à quelqu’un de garder l’immeuble : on retrouve la garde de la chose. Mais les
rédacteurs du code civil n’ont pas voulu aller aussi loin.
Ex : le gardiennage n’est pas un dépôt même s’il aurait pu l’être.
Le dépôt peut porter sur des corps certains, mais aussi sur des choses de genre.
Ex : le dépôt bancaire est un dépôt à vue. Le banquier garde l’argent, à charge de le restituer. Cela pose des questions de
droit civil. L’argent est une chose de genre, il se fond de tous les dépôts réalisés par tous les clients. On appelle aussi cela
un dépôt irrégulier. La conséquence est que le banquier est censé en devenir propriétaire. Ces contrats de dépôt sont
réglementés par d’autres codes que le code civil.
Le projet de réforme, sur le dépôt incorporel, mentionne explicitement ces derniers. Mais il suffisait d’interpréter
l’article 1915.
Sans même attendre, il y a eu des réformes récentes dans le code de la consommation et dans le code des postes et
télécommunications électroniques. Il y a une sorte d’impatience du gouvernement et des professionnels de règlementer les
dépôts immatériels. A donc été créé un nouveau contrat nommé : le coffre-fort numérique. Le cloud computing est un
coffre-fort numérique.
C’est un enjeu car nos données peuvent être détournées et dérobées par des hackers.
Certains auteurs considèrent que le coffre-fort numérique est plutôt un contrat d’entreprise. Il y a une promesse d’une
personne morale de garder des choses à charge de les conserver.
L’espace de stockage correspond à la dépose que quelque chose quelque part.
Pour estimer que le dépôt incorporel ne compte pas, il faudrait voir les méthodes d’interprétation. AU sens de l’article
1915, le mot « incorporel » n’est pas prononcé, mais « corporel » non plus. Si les données sont endommagées, le
dépositaire est responsabilité peu importe la qualité des fichiers.
Sous-titre 3 : L’exécution du contrat de dépôt
I. Les obligations du dépositaire
La principale de ses obligations est la garde.

A. La garde
Cela constitue l’obligation caractéristique (ou essentielle) du contrat.
Ex : si on remet le manteau c’est pour pouvoir le récupérer.
C’est un standard du droit civil, avec l’arrêt Franck. Le dépositaire va avoir le contrôle de la chose tout le long du
contrat avant de la restituer au déposant.
Quelle est l’étendue de l’obligation du dépositaire ? Est-ce une obligation de moyen ou de résultat ? La charge de la preuve
est au déposant en cas d’obligation de moyen, et il y a une présomption de faute en cas d’obligation de résultat.
L’article 1927 du code civil dispose que « le dépositaire doit apporter dans la garde de la chose les mêmes soins que
dans la garde des choses qui lui appartiennent ». L’article 1928 précise que cette obligation « doit être appliquée
avec plus de rigueur quand le dépôt est rémunéré ».
Pour la Cour de cassation, il y a une présomption simple de responsabilité pesant sur le dépositaire si la chose est
endommagée, perdue ou volée. Mais ce n’est pas une obligation de résultat. Le dépositaire pourra prouver qu’il n’a
pas commis de faute.
Cette présomption sera appréciée plus ou moins sévèrement selon que le dépôt ait été gratuit ou rémunéré.
Dans certains cas, le dépôt est accolé à un autre contrat.
Ex : chez le garagiste on remet la voiture pour une vérification, et la rend deux jours après. L’intervention ne prend pas 2
jours, le reste du temps, la voiture est rangée dans un espace. La Cour de cassation estime qu’avant la réparation et après la
réparation il y a un contrat de dépôt. Comme c’est un professionnel, la présomption est appliquée sévèrement.
Si on applique ce système de la présomption au professionnel, on voit que l’exploitant, dont c’est l’activité, voit sa
responsabilité fondée sur le dépôt. De sorte que s’il y a un problème, le dépositaire sera responsable.
Ex : inondation ou hold-up dans le coffre-fort
Le professeur André Tunc a fait sa thèse sur le contrat de garde et a considéré qu’on devrait requalifier les
baux et les dénommer « garde » car c’est la caractéristique fondamentale.
Le dépositaire n’a pas le droit de se servir de la chose. C’est un rôle de pure garde.

B. La restitution
L’article 1932 du code civil dispose que le « dépositaire doit rendre identiquement la chose même qu’il a
reçu ». C’est la chose et non pas une autre chose à la place.
Sauf dans l’hypothèse où c’est un dépôt de genre.
Ex : le compte en banque avec une chose fongible et consumptible.
A qui la chose devra être restituée ?
Au déposant et s’il est mort, à ses héritiers. C’est une question pratique qui vaut pour les personnes physiques (coffre-
fort). Les héritiers doivent donc fournir des preuves du contrat de dépôt et de leur qualité d’héritier. Mais cela vaut aussi
pour les personnes morales.
Quand le dépôt doit-il être restitué ?
A tout moment, quand le déposant le souhaite.
Ex : pour la boîte de nuit, on récupère quand on sort de la boîte de nuit.
Certains contrats peuvent être à durée indéterminée et être longs.
Ex : dépôts faits pendant la WWII par des juifs et des spoliations.
Garde et restitution sont liées. Si le dépositaire rend la chose endommagée, ou qu’elle a été perdue ou volée ; on
revient à la présomption de responsabilité.

C. Les clauses de non-responsabilité


Ces clauses font partie de la théorie des obligations contractuelles (JP Chronopost). En matière de dépôt, cette
question est essentielle quel que soit les modes de dépôt.
Ex : en boîte de nuit, bar ou restaurant ; sur le ticket il peut y avoir de clauses, ou sur une affiche « La maison n’est pas
responsable des pertes. Il existe aussi des conditions générales.
Les clauses exonératoires ou limitatives de responsabilité sont-elles valables ?
A priori oui, sous réserve de la faute lourde ou dolosive.
Ex : le hacker qui va sur le compte d’une vedette pour y dérober des fautes, la plateforme a-t-elle commis une faute
lourde ?
La clause qui porte sur l’obligation essentielle sera réputée non-écrite (article 1170).
Pour les droits spéciaux, notamment le droit de la consommation, une clause exonératoire qui serait abusive sera
réputée non-écrite.
Les mécanismes d’exonération sont assez fragiles.
Est-ce que c’est injuste ?
Tout cela dépend du caractère gratuit ou onéreux du dépôt. La jurisprudence sur les parkings, antérieure à Chronopost,
porte sur la limitation de la responsabilité dans les cas où la voiture est volée ou s’il y a une inondation. La Cour de
cassation estime que la clause est réputée non-écrite.

II. Les obligations du déposant


Normalement il n’y en a pas, c’est un contrat d’ami et réel. Mais il y a au moins une obligation qui est de
rembourser ses frais au dépositaire.
Si le dépositaire a pris des précautions (engager un gardien, système d’alarme), même si c’est un dépositaire à titre gratuit, le
minimum est de la rembourser de ses frais.
Tant qu’il ne l’a pas remboursé de ses frais, le dépositaire peut lui opposer une exception d’inexécution prenant la
forme d’une rétention de la chose. C’est la notion de droit de rétention.
C’est, pour une personne, le droit de retenir la chose jusqu’à ce que l’autre personne exécute ses propres obligations.
Ex : j’ai installé un système d’alarme pour garder un scooter et cela a couté 800 euros. Je ne rends pas le scooter tant que
les 800 euros n’ont pas été payés.

Sous-titre 4 : Les dépôts spéciaux


I. Le dépôt nécessaire
Un dépôt nécessaire extrêmement fréquent et règlementé par le code civil est le dépôt hôtelier.
Ex : dormir à l’hôtel dans lequel on laisse ses affaires. Si la chambre a été volée, la question s’est posée de savoir si on n’est
pas en présence d’un dépôt.
Le contrat d’hôtel est un contrat d’entreprise (mélange bail et entreprise) : je mets à disposition un local pour y dormir et
un service de restauration. Il y a un dépôt dans le fait de laisser les affaires, d’où l’idée de dépôt nécessaire. Qui séjourne
dans un hôtel et vient sans rien ?
Il n’y a pas de recherche de dépôt. L’hôtel doit accepter, alors même que ce n’est pas l’objet du contrat, de les garder
quand le client est absent.
Le code civil, aux articles 1952 et suivants, règlemente le dépôt nécessaire.
Des hôtels proposent un coffre-fort, il y a manifestement un consentement sur le dépôt qui vient se greffer sur le contrat
principal d’hôtel.
Le code civil prévoit un système de responsabilité de l’hôtel (de la société), nonobstant les clauses limitatives de
responsabilité, mais avec un plafonnement. On retrouve l’originalité des règles de preuve : il y a un plafonnement de
l’indemnisation. C’est le prix de la chambre multiplié par un multiple qui donne une indemnité forfaitaire. Quelle que soit
la valeur des objets déposés, l’indemnisation est plafonnée.
Il reste la question du contenu du dépôt. On retrouve les problèmes pratiques du contrat de dépôt.
Le code, et les usages, étend la question du dépôt nécessaire aux parkings. Bien souvent, les hôtels proposent des
places de parking.

II. Le séquestre
C’est un mot polysémique. Pour le commun, c’est du droit pénal. Mais en droit civil, le séquestre porte non pas sur
les personnes mais sur les choses.
« Le séquestre est conventionnel ou judiciaire » (article 1955 du code civil). Il y a deux sources : le contrat et le juge.
« Le séquestre conventionnel est le dépôt fait par une ou plusieurs personnes d’une chose contentieuse entre les
mains d’un tiers qui s’oblige de la rendre après la contestation terminée » (article 1956 du code civil).
Le séquestre conventionnel
Ex : deux héritiers s’opposent sur la propriété d’un tableau et prétendent d’avoir reçu le tableau de celui qui est mort. Le
juge ne s’est pas prononcé : il y a une dispute sur la propriété. Ils vont remettre à un tiers (ami, banque etc…) le tableau
litigieux en attendant que le juge rende sa décision sur qui est le propriétaire.
Le séquestre est un dépôt sur une chose litigieuse.
En droit des sociétés, il y a souvent des séquestres, notamment sur les valeurs mobilières, pourtant ce sont des choses
incorporelles.
Ex : deux personnes s’opposent sur la propriété de titres et conviennent que c’est un tiers qui va conserver les titres le
temps que le juge se prononce. Les titres donnent lieu à des rémunérations. Ces rémunérations seront encaissés par le
séquestre, à charge de les restituer ensuite à celui que le juge déclare propriétaire.
Dans le séquestre judiciaire, c’est l’hypothèse dans laquelle des parties ne s’entendent pas. L’une d’elle va demander au
juge, souvent par référé, de désigner un tiers le temps que le litige soit tranché ou que les parties finissent par s’entendre
avec une transaction.
Parmi les personnes souvent désignées comme séquestre, il y a régulièrement des notaires.
Ex : il y a une vente et découverte d’un vice caché dans les jours qui suivent. L’acheteur n’a pas payé le prix, il ne remettra
pas l’intégralité du prix au vendeur garant des vices cachés. De sorte que soit il propose au vendeur de faire nommer un
expert et désignent tous les deux le notaire comme séquestre. Soit, si le vendeur le menace, il peut saisir le juge en référé et
demande la désignation d’un séquestre.

Partie 2 : Les conventions impliquant principalement des personnes


Ce titre n’est pas clair.
Avis du professeur : il préfère ne pas utiliser la terminologie trop vague de l’UE et revient aux qualifications. L’UE
considère que dès lors qu’un contrat ne porte pas sur un transfert de propriété, c’est un contrat de prestation de service. Ce
serait réduire des conventions qui ont leur identité propre depuis le droit romain et qui persistent en 2022.
Pour le démontrer, on va commencer par l’un de ces principaux contrats : le mandat.

Sous-partie 1 : Le mandat
C’est un contrat défini, aujourd’hui, par l’article 1984 du code civil « Le mandat, ou procuration, est un acte
par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom ».
Le mandat est celui qui donne le pouvoir, le mandataire celui qui le reçoit.
Le code utilise le mot « mandat » mais aussi le mot « procuration ». Etymologiquement, « procuration » (procuracio) veut dire
mandat. Dans le vocabulaire commun, c’est utilisé pour la procuration de vote.
Dans le projet de réforme, le mandat a été étendu (par codification des usages) pour l’étendre à des actes qui ne sont
pas nécessairement des contrats.
Ex : charger un contrat d’aller voter à l’assemblée générale des étudiants pour élire les représentants. C’est une sorte d’acte
unilatéral.
Le mandat est un contrat en vue de conclure un autre contrat ou d’émettre un acte unilatéral.

I. Les caractéristiques du mandat


C’est un contrat extrêmement fréquent.
Ex : les agents de voyage, qu’ils soient dans des commerces physiques (immeubles) ou en ligne (plateforme internet) sont
des mandataires. L’agent va réserver les places d’avions, la chambre d’hôtel. L’agent, mandataire, va conclure une série
d’actes au nom du client.
Ex 2 : dans la copropriété immobilière, le syndic est un mandataire. Il représente les copropriétaires, il conclue les contrats
avec le gardien, les entreprises d’entretien de l’immeuble etc…
Ex 3 : l’imprésario (agent artistique) qui s’occupe de la carrière d’un chanteur a un statut qui fait l’objet d’une législation
spécifique dans le code du travail. Les agents sportifs ont un statut soumis au code du sport.
Ex 4 : les agences de publicité. Quand on va sur une plateforme internet et qu’il y a des publicités, cela s’est fait par des
contrats part le propriétaire de la marque qui charge un agent de publicité de démarcher les supports (cinéma, télévision,
plateforme internet…).
Ex 5 : il y a des mandataires en matière boursière, dans les marchés financiers. Ce sont les prestataires d’investissement
dont le statut est règlementé par le code de commerce.
Ex 6 : les avocats. Quand une partie veut agir en résolution d’un contrat contre une autre partie, il charge un avocat de
rédiger une assignation et d’aller la placer : c’est un mandat.
Un des synonymes du mot mandat est « représentation ». Tous les mandats sont des actes de représentation.
Les rédacteurs de l’ordonnance de 2016 ont cru bon d’insérer aux articles 1154 et suivants des dispositions sur la
représentation conventionnelle. Il y a deux sortes de représentations :
-légale (ex : parents pour enfants)
-conventionnelle (ex :le mandat)
Ils ont confondu les deux.
La commission de réforme est revenue sur cela, en renforçant le régime du mandat, contrat spécial.
Le mandat doit se distinguer d’autres contrats spéciaux qui sont proches de lui, notamment le contrat
d’entreprise.
Ex : Une obligation de facere : aller négocier la rémunération du footballer par un agent sportif est un mandat car il s’agit
d’un contrat. Aller voter : ce n’est pas un contrat, mais cela reste un acte juridique.
Le mandat porte sur les conclusions d’actes juridiques.
Le contrat d’entreprise permet de rendre des services purs et simples, pas de conclure des actes juridiques. La
distinction n’est pas simple.
Ex : l’avocat est à la fois mandataire (quand il délivre l’assignation), mais aussi entrepreneur. Il conclut un contrat unique
avec une partie mandat et une partie entreprise. Quand l’avocat plaide et s’exprime pour convaincre le tribunal, il n’y a pas
de conclusion d’acte donc c’est un contrat d’entreprise.
Certains auteurs considèrent que l’agent immobilier n’est pas vraiment un mandataire. Sociologiquement, l’agent
immobilier se contente de rapprocher un propriétaire et un acquéreur éventuel, de les aider à négocier, les aider à rédiger le
contrat mais il ne signe pas le contrat.
La plupart des règles du contrat d’entreprise sont communes au mandat. Donc cela a peu de conséquences.
Pour l’agent immobilier, le contrat d’entreprise a une qualification particulière : le courtage. Le courtier est celui qui
rapproche les parties sans conclure l’acte.
Il n’avait pas de statut dans le code civil. Dans le projet de réforme, il y a un paragraphe pour distinguer le courtage
du mandat.
Dans certains cas, il y a des mandataires qui sont dénommés courtiers.
Ex : l’agent sportif est un courtier car c’est le footballer qui signe le contrat. Mais l’agent artistique est un mandataire.
Le représentant donne le consentement à la place du représenté. Le mandataire a le pouvoir qui lui a été
donné par son mandant. Sa personne s’efface totalement.
Il y a une forme de fiction qui fait le contrat, même matériellement négocié et signé par le mandataire, est censé
avoir été conclu directement par le mandant.
Dans un arrêt récent (critiqué par PY Gautier), la chambre mixte, le 29.10.2021, est revenue sur les effets de la
représentation.
Il s’agissait de droit des sociétés, les actionnaires d’une société (une famille) qui avait donné mandat à un représentant pour
trouver un acquéreur immobilier au meilleur prix. Le mandataire avait commis un dol par réticence : il n’avait pas livré les
informations à l’acquéreur qui aurait pu le dissuader d’acheter ou payer un prix plus faible. Cela peut donner lieu à une
action en nullité, mais la victime du dol a une option : elle peut finalement décider de ne pas faire annuler le contrat. Dans
ce cas, elle se contente de réclamer des dommages-intérêts.
Dans cette espèce, la victime conserve le contrat et demande des dommages-intérêts. Les vendeurs disent qu’ils n’ont pas
commis de faute et que c’est la faute du mandataire.
La chambre civile faisait jusque-là application de la théorie de la représentation (article 1142 alinéa 5) : le représenté est
responsable.
Dans cet arrêt, il y a un revirement de jurisprudence sous l’influence du Pr. Levener et du Pr. Jourdain qui considèrent que
s’il n’y a pas de faute du représenté, il n’y a pas de responsabilité.
Avis du professeur : C’est une négation de la théorie de la représentation. Ce n’est pas une question de faute personnelle.
Le mandant aurait dû mieux choisir son mandataire. On est dans le contrat, donc ce n’est pas délit.
Il existe quelques contrats voisins du contrat de mandat, comme la convention de portage. Elle correspond à la
simulation ou le prête-nom : une partie se dissimule derrière une autre en utilisant un prête-nom.
C’est assez courant en matière de société et ce n’est pas interdit dès lors qu’il n’y a pas de fraude. Un actionnaire
engage donc un mandataire qui va porter ses actions.
Puis, la commission est aussi un contrat voisin. C’est un mandat mais le commettant n’apparaît pas. Le mandataire
conclut le contrat pour le compte du commettant mais en son nom propre.
C’est un contrat fréquent en matière de transport.
Ex : faire venir des ordinateurs depuis Singapour par bateaux et voiture. Des intermédiaires vont conclure avec la
compagnie aérienne, les douanes et les transporteurs routiers sans donner le nom du mandant.

II. La conclusion du contrat de mandat


A. La capacité
Le mandataire est frappé d’une incapacité de jouissance : il ne peut pas conclure l’acte (contrat principal) à
son propre bénéfice.
Ex : le propriétaire d’une maison qui charge un agent de trouver un acquéreur. L’agent ne peut pas conclure le contrat car
il y a une présomption de méfiance que le mandant influence le mandataire pour avoir un prix lésionnaire.
Cela pose la question du conflit d’intérêts.
Les rédacteurs du code civil ont inscrit, dans le code civil, des dispositions sur cela à l’époque où cela n’existait pas. L’idée
est qu’il risque d’y avoir un conflit d’intérêts si le mandataire fait passer ses intérêts personnels avant celui du mandant.
S’est également posé la question du double-mandat (arrêt du XIXème siècle de la Cour de cassation).
Un propriétaire charge un agent de trouver un acquéreur pour sa maison, il est chargé également de trouver une nouvelle
maison à un acquéreur. Une même personne peut-elle être chargée par les mêmes parties ? La cour de cassation répond
que c’est possible mais s’il y a une information des deux parties.
L’ordonnance de 2016 a voulu briser cette jurisprudence avec l’article 1161, mais la rédaction est particulière. Il semble
que le double-mandat puisse désormais être conclu.
Le mandat en blanc permet au mandant de donner un pouvoir au mandataire de conclure l’acte ou pas.
Cela vaut surtout pour les votes, dans les sociétés.
Ex : il y a une AG extraordinaire pour voter, les actionnaires peuvent directement s’y rendre et s’ils ne peuvent pas ils
donnent un mandat. Beaucoup d’actionnaires font confiance au mandataire pour voter : il vote comme il veut.
C’est un usage général de la vie des affaires et de la vie civile qui existe depuis des siècles, et dans le projet de réforme le
système de mandat en blanc est codifié.

B. La preuve
Le mandat est un contrat consensuel, il obéit donc aux règles de l’écrit au-dessus de 1500 euros. Mais il existe des
dispositions spécifiques encore plus libérales que le droit commun. L’article 1985 dispose que « le mandat peut être
aussi donné verbalement » et cela même au-dessus de 1500 euros.
Mais cela reste théorique, la plupart du temps il y a un écrit.
Ex : si on appelle un agent de voyage et qu’on demande la réservation pour des billets d’avion (+ de 1500 euros). L’agent
peut invoquer, si on est de mauvaise foi et qu’on a dit qu’il n’y a pas de mandat, le fait qu’on l’ait dit par téléphone.
Il existe des mandats solennels (écrits à peine de nullité) en général par méfiance à l’égard du locataire.
Ex : l’agent immobilier est soumis à une loi de 1970 (non-intégrée dans le code civil) car il y une grande méfiance. Il faut
donc un écrit à peine de nullité et des mentions d’information sur l’objet du mandat, la rémunération etc…
Ex 2 : pour les agents sportifs et artistiques
Parfois, même le mandat doit être conclu devant un notaire : c’est le mandat authentique.
Ex : l’hypothèque, lorsqu’un créancier qui doit être remboursé par son débiteur se fait conclure une sûreté sur l’immeuble
de sorte que si le débiteur ne rembourse pas à l’échéance le créancier peut saisir le bien et se fait rembourser sur le prix. Le
mandat d’hypothèque doit être conclu devant un notaire.
Peut-il y avoir une pluralité de mandants chargeant un mandataire d’une mission déterminée par écrit ?
La réponse est oui. La Cour de cassation s‘est prononcée dans une affaire de mandat d’assigner (agir en justice) des
avocats. Et les mandans étaient au nombre de 55 000. Il y a donc eu 55 000 mandats donnés au même mandataire. La
Cour de cassation a considéré que rien n’empêcher d’avoir la conclusion d’une massez considérable de mandants.
L’importation récente de la class-action en droit français n’a donc pas d’intérêt : les rédacteurs des textes sur l’action
de groupe peuvent faire réaliser cette action via un mandataire.
Depuis le droit romain, l’acceptation par le mandataire peut être tacite par l’exécution du contrat. C’est une
possibilité sauf dans les contrats limités énoncés par les textes.
III. L’objet du mandat
Il peut y avoir toutes sortes de mandat, c’est ce qu’énonce l’article 1987 et 1988 du code civil. Ils ont été
légèrement modifiés par le projet de réforme.
Le mandat peut être général ou spécial, mais la plupart des mandats sont spéciaux.
Ex : le vote
Mais les mandats généraux sont plus dangereux et plus difficiles.
Ex : la gestion de patrimoine (family office) d’un banquier pour une famille.
Il est logique que l’objet du contrat principal soit bien déterminé par les parties ; mais que s’il y a un doute, le
mandat s’interprète restrictivement. C’est la règle que la Cour de cassation a déduite des textes relatifs au mandat.
Ex : Affaire Taittinger avec le droit de céder une société de champagne accordé à un mandataire.
L’intuitu persona est une notion qui est la considération de la personne. Le mandant choisit le mandataire pour
sa personne. Le mandat est un de contrats où la personne du cocontractant joue un rôle essentiel.
Ex : Arrêt Com. 29.06.2022. Dans cet arrêt, le mandat peut être confié à une personne physique ou une personne morale.
Par définition, une personne morale et une fiction, donc quand le mandant doit foi à une société (ou une association), en
réalité c’est parce que le dirigeant ou la dirigeante est celui ou celle en qui il a confiance. La confiance est orientée vers le
dirigeant, alors que formellement le mandataire est la société.
Dans cet arrêt, le dirigeant était actionnaire majoritaire de la société. Le dirigeant avait changé, il y avait eu une cession de
contrôle. Le mandant n’en avait pas été informé. Or, les relations avec le nouvel actionnaire ayant pris le contrôle n’étaient
pas excellentes. Le mandant a pu obtenir la constatation que le mandataire avait manqué à ses obligations, notamment de
bonne foi et de loyauté.
Souvent, dans les contrats de mandat, il y a une clause pour renforcer l’intuitu personae. En cas de tout changement
duc contrôle du capital de la société, et/ou du dirigeant d’entreprise, le mandat doit en être personnellement informé.
C’est parce que le mandat a confiance dans les qualités du mandataire qu’il espère que le contrat principal sera conclu dans
de bonnes conditions.
Ex : arrêt Taittinger (2018). La famille a décidé de céder le capital de la société à un repreneur. Les membres de la famille
confie mandat au patriarche (membre de la famille) pour céder les actions au meilleur prix. Il trouve un preneur, négocie
un bon prix, mais le preneur a une exigence : éviter que les membres de la famille, après avoir céder l’entreprise, aillent
créer une entreprise concurrente dans le même secteur (cf affaire Inès de la Fressange). Les vendeurs doivent renoncer à
utiliser leur nom patronymique (cf Bordas) pour ne pas faire concurrence à l’acheteur. Or, une des filles décide de monter
sa société en matière de champagne, mais sans créer de confusion en ajoutant son prénom. Cela ne suffit pas à l’acheteur
qui lui fait un procès. Elle répond qu’elle n’est pas engagée à ne pas utiliser le nom patronymique. Le mandat comportait la
mission de vendre les actions, mais n’autorisait pas à renoncer à l’usage patronymique. Donc le mandataire avait excédé ses
pouvoirs.
L’objet du mandat est normalement circonscrit. Et il y a une interprétation stricte : il ne faut pas abuser de la
représentation.
Le mandat peut être conclu pour une durée déterminée ou indéterminée ; pour une opération particulière
ou une série d’opérations.
S’il est à durée déterminée, il est renouvelable. Certains mandats sont même nécessairement à durée déterminée.
Ex : les agents immobiliers ont des mandats très courts, avec un renouvellement obéissant à un formalisme spécifique.
Le mandat peut être exclusif ou non exclusif.
Ex : un propriétaire d’un appartement veut le vendre. Il peut le confier à une seule agence immobilière= mandat exclusif,
en espérant que cela motive l’agence. Ou alors, il peut confier la recherche d’un acheteur à 3 agences en même temps=
mandat non-exclusif.
Selon les usages et les secteurs ils sont exclusifs ou non-exclusifs. En matière immobilière, c’est plutôt non-exclusif. En
matière d’agent sportif ou artistique, c’est plutôt exclusif.
Il y a des conséquences sur l’exclusivité qui sont importantes.
Ex : si le fameux appartement a été visité par des possibles acquéreurs par les soins d’une première agence (Prima). Mais
que finalement, ils vont acheter avec une deuxième agence, dont la commission est moins importante. On peut envisager
une sorte de malhonnête du vendeur. Si le mandat est non-exclusif il n’y a rien à dire. Mais pour ‘l’agence ayant donné ses
diligences, il peut y avoir un procès contre le mandant et l’autre agence.
Ex 2 : le mandat est exclusif pour un an. Le mandat expire, mais quelques jours plus tard, les acquéreurs présentés par
l’agent achètent. Le propriétaire fait l’économie de la rémunération du mandataire.
IV. La rémunération du mandataire
A. Le prix
Pour les mandataires, le mot est « honoraire ». Les honoraires peuvent être, selon le droit commun,
prédéterminés ou déterminables.
Quand ils sont prédéterminés, il y a un montant forfaitaire qui peut être prévu par les parties.
Mais souvent, les honoraires sont déterminables et correspondent alors à une fraction, un pourcentage, du prix
mentionné dans le contrat principal.
Ex : l’agent immobilier percevra 5% du prix de vente de l’appartement. Il y a le taux de la rémunération mais pas le prix
exact.
Ex 2 : les agents artistiques sont rémunérés au pourcentage. Mais comme l’Etat est méfiant, il y a une règle impérative dans
le code du travail qui pose un plafond : pas plus de 10% de ce que va percevoir le comédien ou le chanteur.
Si le contrat principal n’est pas conclu, le mandataire a-t-il droit à sa rémunération ?
Tout va dépendre des circonstances et des usages.
Ex : quelqu’un donne mandat à un avocat de négocier un contrat très difficile. Finalement, le contrat n’est pas conclu.
L’avocat y a passé des 100aines d’heures, il ne serait pas normal qu’il ne soit pas rémunéré. On ne peut donc pas considérer
comme une règle fondamentale que le mandataire soit privé de rémunération alors qu’il n’a pas conclu le contrat.
Si les honoraires sont trop élevés ?
Beaucoup de procès entre avocats et clients contestent les honoraires de l’avocat.
Ex : l’avocat vient avec une feuille de temps avec 200h. L’avocat prend 500 euros/heure, mais le contrat n’a même pas été
conclu. Les contestations sont portées devant le bâtonnier, et c’est une loi particulière qui donne des critères permettant au
bâtonnier de réviser à la baisse le montant des honoraires. C’est la notion de révision du prix.
Dans le code civil, aucun texte ne permet la révision de la rémunération du mandataire. A partir de textes généraux,
comme l’article 1104 ou 1194, la Cour de cassation, assez tôt, a considéré que le juge a le pouvoir de réviser l’honoraire
excessif.
Elle s’est fondée sur une autre théorie qui a été développé par H. Capitant développé dans son livre sur la cause. Il
considérait que la cause ne s’appliquait pas qu’à la formation du contrat, mais aussi à son exécution. De sorte que si la
cause ne s’applique pas suffisamment par rapport à ce qu’attendait le cocontractant, le juge peut réviser le contrat.
Ex : le contrat principal n’a pas été conclu, l’avocat demande une somme importante. Si c’est le stagiaire qui a fait les
recherches, est-ce que cela vaut ?
La Cour de cassation a reconnu l’application de cette théorie dans tous les domaines, tous les cas où il y a un mandat.
Le projet de réforme a décidé de codifier cette jurisprudence sur la révision des honoraires.
Si le mandat révoque le mandat ou si la durée déterminée est expirée et qu’il ne le renouvelle pas juste avant que
l’affaire soit conclue ?
Ex : du client trouvé par l’agent immobilier et la vente conclue après l’expiration du mandat.
Ex 2 : le contrat de cession de contrôle des actions de la société a été conclu 3 mois après la fin du mandat de l’avocat, et
finalisé par un autre avocat qui va profiter des diligences du premier.
D’abord, on peut envisager cela avec les quasi-contrats : l’enrichissement sans cause.
Ensuite, des décisions peuvent admettre la condamnation au titre de la faute contractuelle ou post-contractuelle de
l’ancien mandant.
Les moyens juridiques ne manquent pas pour sanctionner. Maintenant, des décisions libérales permettent au mandant de
faire ce qu’il veut. Avis du professeur : cela ne parait pas juste.
A quoi sera condamné le mandant ?
Ex : l’agent immobilier peut-il réclamer ses 5% ? Avis du professeur : oui, il faut que le mandant paye la rémunération.
Mais de nombreux arrêts estiment que le mandataire n’a le droit, qu’au mieux, à des dommages-intérêts. Le juge va donc,
assez naturellement, raisonner sur un paramètre : le gain manqué, qui ne peut être qu’une fraction de l’avantage
espéré. L’agent n’aura donc pas 5%, mais ce que les juges décident souverainement.
Si le mandataire va au-delà de sa mission dans l’intérêt du mandant ? A-t-il droit à une rémunération ou un
remboursement de ses frais ?
Ex : le syndic de copropriété. Chaque année, les copropriétaires votent le budget du syndic, qui est mandataire. Un syndic a
épuisé les 100k euros votés avant la fin de l’exercice civil, mais il reste des choses à payer (gardien, électricien…). Le syndic
décide alors de payer de sa poche, et demande le remboursement de ses frais et une rémunération pour ses diligences. La
Cour de cassation estime que, ayant dépassé son mandat, personne ne lui avait demandé de dépenser plus et il ne
sera donc pas rémunéré.
Avis du professeur : c’est injuste, et c’est une méconnaissance des règles des quasi-contrats, la gestion d’affaire. L’utilité des
diligences du gérant pour le maître de l’affaire alors que celui-ci n’a pas donné le consentement devrait prévaloir. Cette
solution est celle de Pothier dans le Traité du mandat.
Il y a une formule, le ducroire, qui a une incidence sur le mandat. C’était un usage en droit des affaires et chez les
avocats. C’est le cas où le mandataire garantit, grâce au prix qu’il perçoit, au mandant que le tiers avec lequel le contrat
principal sera conclu exécutera celui-ci. Le mandataire est garant de la bonne exécution du contrat principal avec le
tiers.
Dans la commission de réforme, cet usage est codifié car très répandu.

B. Les comptes
A partir du moment où le mandant a confiance dans le mandataire pour la conclusion du contrat principal, qu’il le
rémunère, le mandataire est tenu à la reddition des comptes : communiquer des documents comptables justifiant des
frais et de la rémunération.
Le mandataire, l’agent, a peut être avancé des frais. Il devra donc venir avec ses factures justifiant ses frais.
Pour la rémunération, de plus en plus d’avocats fonctionnent selon le système du taux-horaire. Ils ont donc des logiciels
qui permettent d’entrer le temps passé sur le dossier.
Il y a des textes dans le code civil et une jurisprudence assez sévère qui permettent de vérifier que le mandataire ne raconte
pas n’importe quoi. Ainsi, l’article 1993 du code civil dispose « tout mandataire est tenu de rendre compte de sa
gestion ».

V. Les effets du mandat


A. La représentation
Si le mandataire est resté dans l’objet de sa mission, c’est comme si le mandant avait signé
personnellement l’acte.
Ex : l’affaire Taittinger, la fille avait donné mandat à son père. Le père a conclu en son nom et pour son compte ; elle est
donc engagée. La force obligatoire du contrat (1103) s’applique et le mandataire s’efface.
Ex 2 : arrêt 29.10.2021, le contrat a été conclu par le dol. Le mandant doit subir les conséquences de la faute du
mandataire.
L’acte est inopposable au mandant car il n’a pas donné de pouvoir. La représentation suppose un pouvoir, une
mission. Cela sous réserve d’une exception : le mandat apparent.
Ex : les commissaires-priseurs n’ont qu’un mandat de vente, souvent le mandant lui dit qu’il ne pas el vendre en dessous
d’un certain prix. Cela s’appelle le prix de réserve. Le commissaire-priseur doit dire que l’enchère débute à ce prix. Si cela
ne marche pas et les enchérisseurs sont prêts à acheter à un prix inférieur : le commissaire doit retirer. C’est la notion de
retrait de la vente car sinon il sortirait de sa mission et engagerait sa responsabilité civile.

B. Les responsabilités
1. La responsabilité du mandant
Si le mandataire a commis un dol et que le tiers ne demande pas la nullité du dol mais des dommages-intérêts, le
mandant doit indemniser le tiers des manœuvres de son mandataire.
La responsabilité du mandant c’est surtout dans l’hypothèse où il voudrait faire des économies sur la commission.
Ex : il conclut l’acte avec le tiers directement, dans ce cas il engage sa responsabilité civile et contractuelle car il viole le
mandat. Il y a perte de chance du mandataire d’avoir conclu le contrat.
Le Cour de cassation est partagée à ce sujet.
Avis du professeur : dès lors qu’il y a une faute du mandant elle doit être sanctionnée.
Ex 2 : Le mandant conclut un contrat non-exclusif et passe l’affaire à un autre mandataire ou a attendu la fin du mandat
pour confier l’affaire à un autre mandataire qui vient avec le même client que celui du premier mandataire.
Dans cet arrêt, la Cour de cassation se fonde sur la liberté du mandant de révoquer le contrat, l’ancienne philosophie
romaine du mandat (service d’ami). Or, on est dans le mandat professionnel.
2. La responsabilité du mandataire
Le mandataire n’est pas responsable des fautes du mandant.
Ex : Si le contrat a été conclu (ex : cession de contrôle), mais le mandant ouvre une entreprise directement concurrente de
celle qui a été cédée à l’acheteur. Le tiers peut-il reprocher au mandataire le comportement du mandant ? Sauf à prouver
que le mandataire était au courant du projet du mandant, il n’est pas responsable.
Si le tiers prouve (charge de la preuve) que le mandataire a commis une faute personnelle, celui-ci est engagé à
son égard (article 1240 du code civil). Il n’y a pas de lien entre le mandataire et le tiers cocontractant donc c’est une
responsabilité extracontractuelle.
Ex : le gérant d’une boîte de nuit, mandataire social, pour faire des économies, décide de ne pas payer les auteurs de la
musique. Les auteurs font un procès en condamnation à la société exploitant la boîte de nuit. Peuvent-ils agir en
responsabilité personnelle du gérant ? Oui, car il a commis une faute personnelle et détachable.
Vis-à-vis du mandant, le mandataire a une responsabilité contractuelle. C’est ce qui dispose l’article 1992 du
code civil « le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu’il commet dans sa gestion ».
Quelle est l’étendue de l’obligation du mandataire ?
Le mandataire a une obligation de moyen s’il s’agit de conclure un contrat avec un tiers.
Ex : l’agent immobilier ne sait pas si le tiers va acheter. C’est l’aléa.
Mais il existe des cas où c’est une obligation de résultat.
Ex : mandat de vote.
Même dans les obligations de moyen, de la jurisprudence considère que, lorsque le mandataire est professionnel, on
peut présumer la responsabilité de celui-ci.
Ex : le client a donné à l’agent immobilier un mandant exclusif avec une partie de la rémunération forfaitaire qu’il a payé
dès le début du contrat. Au bout d’un an, il n’a toujours personne qui est venu visiter. Il n’est pas exclu qu’on puisse
présumer la faute de l’agent.
Est-ce que les mandataires ne peuvent pas inscrire des clauses exonératoires ?
Les clauses limitatives sont valables sous réserve de la faute lourde ou de ce qu’on ne soit pas dans un contrat d’adhésion
(clause abusive) et de ce que cela ne porte pas atteinte à une obligation essentielle. Enfin, sous réserve qu’on ne soit pas en
droit de la consommation.
Les clauses limitatives sont de plus en plus réduites.
La Cour de cassation n’a pas hésité à raccrocher au mandataire d’autres obligations qui ne figurent pas dans le
code civil.
Notamment, une obligation de conseil.

C. Le sous-mandat
Lorsqu’un cocontractant conclut avec le bénéficiaire pour le décharger de toute ou partie du contrat. En
principe, il faut l’accord de l’autre partie : ce n’est pas qu’une cession de contrat. Ici, il reste partie mais délègue un morceau
de sa mission.
Ex : pour un voyage en Nouvelle-Zélande, l’agence de voyage de France va entrer en contact avec une agence locale pour
s’occuper des prestations locales et de conclure les contrats.
Faut-il l’accord du mandant pour que le mandataire principal confère une mission à un sous-mandataire ?
Oui, car c’est faire rentrer un tiers dans l’exécution du contrat. Que sait-on du sérieux du sous-mandataire ?
On peut aussi dire non car il n’a pas besoin du consentement du mandant. Les usages suppléeraient.
Cette deuxième vision est la position de la Cour de cassation.
Avis du professeur : la première vision en application de l’intuitu personae.
Y a-t-il des liens entre le mandant et le sous-mandataire ?
Les rédacteurs du code civil ont consacré l’article 1994 à cette question. Cet article prévoit que même si le mandataire a
accordé un sous-mandant, il reste garant du sous-mandataire. Par conséquent, le mandant a une action contre le
mandataire principal.
Cela fait penser à un mécanisme : la délégation imparfaite. Dans la délégation, le débiteur transmet son obligation à un
tiers mais reste garant à l’égard du créancier de la bonne exécution par le tiers délégué.
L’article 1994 évoque cette garantie, tout particulièrement lorsque le mandant n’avait pas donné son accord au choix du
sous-mandataire. Dans l’alinéa 2, est évoqué l’action directe « le mandant peut agir directement contre la personne
que le mandataire s’est substituée ».
Ex : le mandant peut agir contre l’agence locale néozélandaise.
Si l’action directe peut aller dans l’autre sens : le sous-mandataire contre le mandant ?
Ex : l’agence locale n’a pas fait cela gratuitement. Elle avait convenue d’une commission avec l’agence française. L’agence
ne l’a pas payé.
Cela n’est pas prévu par le code civil. L’action directe n’est pas bilatéralisée.
Mais la Cour de cassation, sans texte, a bilatéralisée l’action et reconnaît l’obligation du sous-mandataire de se faire
payer par le mandant.
La Cour de cassation a estimé que le mandant doit payer une deuxième fois, même si le mandant a déjà payé.
Avis du professeur : ce n’est pas logique.
Donc la Cour de cassation a procédé à un revirement de jurisprudence : le sous-mandataire a une action tant que
le mandant n’a pas payé la totalité des honoraires.
C’est cette nouvelle jurisprudence qui est codifiée dans le projet de réforme.

D. Le mandat apparent
C’est le cas où le pseudo mandataire n’était pas mandataire ou n’avait pas le pouvoir de conclure le
contrat.
En droit des sociétés, la question du mandat apparent est extrêmement importante. Le dirigeant est un mandataire social,
que ce passe-t-il si le mandataire social conclut un acte au-delà des pouvoirs qui sont les siens ?
Il y a des dispositions précises dans le code de commerce et le code civil sur le dépassement de pouvoir.

1. Le dépassement de pouvoir
Ex : Un dirigeant social (gérant) conclut un gros emprunt auprès d’une banque au nom de la société. En réalité, les
statuts prévoient que pour conclure un contrat de ce montant, il faut une décision en assemblée générale. Il a commis un
acte extrastatutaire. La société refuse de rembourser, la banque assigne la société.
La Cour de cassation s’est prononcé dans un arrêt Ass. Plé. de 1962. Elle a considéré que, alors même que le dirigeant
social n’avait pas le pouvoir statutaire ou légal de conclure le contrat, le tiers n’a pas à vérifier ses pouvoirs. Le tiers peut se
fier au dirigeant. C’est le standard de la croyance légitime : le tiers a légitimement cru que le dirigeant avait le pouvoir.
Cet arrêt a été codifié, pour une bonne part, en matière de droits des sociétés ; mais avec certains plafonds.
Cette théorie a été étendue à toutes sortes de domaines.
Ex : affaire Taittinger, l’acquéreur, au regard du fait que le père négociait et que la renonciation à faire concurrence est dans
le sillage de la cession, n’aurait pas pu invoquer la théorie de la croyance légitime ?
Ex 2 : un emprunt bancaire où celui qui vit en couple a récupéré tout l’argent en disant qu’il représente sa concubine. Le
banquier aurait dû demander un pouvoir, la production d’un écrit d’une procuration.
Cette jurisprudence a été codifiée par l’ordonnance de 2016 à l’article 1156 du code civil qui dispose « l’acte
accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs est inopposable au représenté, sauf si le
tiers a légitimement cru en la réalité des pouvoirs du représentant ».
C’est sur la croyance légitime que la Cour accepte ou refuse la théorie du mandat apparent. Celui qui a cru mais qui s’est
montré négligent ou imprudent ne va pas bénéficier de la théorie du mandat apparent car c’est faire violence au représenté
qui n’a pas donné le pouvoir.

2. Les cas où il n’y avait pas de pouvoir


Ce cas est visé dans l’article 1156. C’est l’hypothèse du mandataire qui n’a pas de pouvoir. C’est le cas où le
mandataire n’est pas mandataire. Il n’y a pas de dépassement de pouvoir car il n’a pas de pouvoir.
S’il n’a pas de pouvoir, est-il mandataire ? Peut-être mais on ne peut pas admettre que le pseudo-mandant soit engagé alors
qu’il n’a donné aucun pouvoir.
Des arrêts considèrent néanmoins que, même sans pouvoir, le tiers peut obtenir le bénéfice du mandat apparent.
Ex : 3 enfants sont héritiers de la maison de famille et l’un d’entre eux loue ou vend à un tiers. S’il vend, le mandat
apparent peut être invoqué. Mais s’il loue, il faut une unanimité. Le locataire pourrait opposer aux deux autres propriétaires
la théorie du mandat apparent.
Le juge fait produire un effet à l’apparence.
En outre, l’article 2276 protège l’acquéreur.
VI. La fin du mandat
A. Les principes
Le mandat est un contrat, par conséquent à durée déterminée ou indéterminée. S’il arrive à son terme, il peut
ensuite être renouvelé ou non.
Mais dans le droit spécial du mandat il y a une règle liée au fait que le mandat était un contrat d’ami, et en considération de
la personne du mandataire : le mandat peut être révoqué unilatéralement par la seule volonté du mandant alors
même qu’il est à durée déterminée.
On ne peut pas résilier un CDD avant son terme, mais il existe des exceptions pour protéger une partie.
Ex : le bail avec le preneur
Ex 2 : le salarié qui peut démissionner
L’origine de la règle spéciale du mandat s’exprime dans le vocabulaire révocation « ad nutum » (hochement de tête).
Ex : un agent artistique ou sportif conclut un contrat pour 2 ans. Le joueur de foot peut résilier le contrat avec cet agent
(primus) et conclure avec un autre agent (secundus).
Cela s’applique dans le droit commun du mandat, les contrats civils et commerciaux et en droit des affaires.
Pour éviter la révocation ad nutum, un mandataire peut faire inscrire des clauses dans son contrat pour éviter celle-ci. La
révocation ad nutum tient plutôt du supplétif que de l’impératif.
L’article 2003 du code civil dispose que le mandat s’achève par la révocation du mandataire. Le mandataire
pourrait exiger des motifs, mais l’article ne le prévoit pas.
Ex : congédier dans un e-mail, un SMS…
C’est unilatéral donc il n’y a pas non plus d’acceptation.
Ensuite, le mandataire peut exiger que sa charge est trop lourde et renoncer au mandat (article 2003 alinéa 2).
C’est très exceptionnel.
Le mandat finit par la mort du mandant ou du mandataire (article 2003 alinéa 3). C’est logique car le mandat est un
contrat avec un fort intuitu personae.
Les rédacteurs du code civil ont prévu que le mandataire peut être une personne morale. La mort de la personne morale
est la liquidation ou la dissolution.
Il y a-t-il des limites ?
Le client mandant a le droit de révoquer ad nutum, mais s’il commet un abus ? Cette théorie de l’abus s’applique à tous
les droits. C’est envisageable mais la Cour de cassation ne l’a pas beaucoup appliqué.
Ex : la révocation d’un agent immobilier pour confier à un deuxième agent la vente de la maison ne pose pas de problème.
Mais il y a abus de droit ou fraude si c’est pour que le deuxième agent récupère les clients.
L’une des façons de remédier à cette révocation serait sans texte. Le juge peut obliger le mandant à motiver la
révocation.
Ex : le licenciement doit être motivé
Ex 2 : dans les contrats de distribution, il y a une invitation à ce que le juge exige la motivation de la révocation.

B. Le mandat d’intérêt commun


Cependant, la Cour a elle-même apporté des correctifs dans certains mandats. Aidée par la doctrine, elle a créé un
principe qui n’est pas dans l’article 2003 : la notion de mandat d’intérêt commun.
L’origine romaine du mandat n’est plus appliquée aujourd’hui. Le mandat s’est professionnalisé, et ils sont accomplis
par des professionnels rémunérés.
Cette notion s’applique si le mandataire et le mandant ont tous les deux intérêts au contrat. La Cour de cassation a posé
la règle suivante : lorsque le juge constate l’existence d’un mandat d’intérêt commun et que le mandant le révoque
unilatéralement et abusivement, il engage sa responsabilité contractuelle et peut être condamné mais seulement
à des dommages-intérêts. L’article 2003 s’applique et la révocation est valable.
Cette question est parvenue à la discussion de la chancellerie.
Avis du professeur : il veut que dans le mandat d’intérêt commun, il ne puisse pas révoquer sans l’accord du mandataire.
Mais la commission a décidé de codifier le mandat d’intérêt commun mais à refuser de revenir sur la réflexion ad
nutum. Il y a une volonté de rester dans la tradition.
Cette question est très pratique.
Ex : les kiosques à journaux. Le statut des kiosquiers est celui de mandataire d’un distributeur de presse. Dans de
nombreux cas, le distributeur de presse a décidé de mettre à la porte le kiosquier en révoquant unilatéralement le mandat.
La Cour de cassation retient le mandat d’intérêt commun.
Certains mandataires ont décidé d’inscrire dans leur contrat une clause d’irrévocabilité. C’est la clause au terme de
laquelle le mandat est irrévocable sans l’accord du mandataire.
Le problème est le même en doctrine et en jurisprudence : la sanction. Il est considéré que le mandant qui viole la clause
d’irrévocabilité pour aller conclure avec un tiers engage de plein droit sa responsabilité, mais la révocation est quand
même valable.
Ex : arrêt Com du 29.06.2022 sur l’intuitu personae. En droit des sociétés, le terme intuitu personae a été adapté « intuitu
societatis » ou « intuitu firmae ». Dans cet arrêt, un statut spécial des agents commerciaux (cf code de commerce) prévoit
qu’à la fin du contrat, l’agent commercial sera indemnisé sauf s’il a commis une faute grave. Il ne remet pas en cause la
révocation unilatérale. Dans l’arrêt de 2022, il y avait une faute grave du mandataire.
Il y a encore des débats sur le critère du mandat d’intérêt commun.
Ex : la jurisprudence sur les kiosquiers permet de voir que l’intérêt du mandataire à continuer le contrat est le fait qu’il a
développé une clientèle locale avec lequel il est en contact. Sa rémunération prend la forme d’un pourcentage sur le chiffre
d’affaire du mandant, il a donc un intérêt économique.
Dans la commission est utilisé le terme de « richesse commune ».
Ex : les vendeurs de téléphones mobiles (SFR) sont soit des franchisés, soit des mandataires. Une entreprise résilie le
mandat pour confier la revente du téléphone et l’abonnement de ses box à une boutique qui est à 100 mètres. La clientèle
va aller dans l’autre boutique.
La Cour de cassation a été saisie du point de savoir si l’ensemble des contrats de distribution, y compris les franchises,
pouvait se voir appliquer la jurisprudence sur le mandat. Elle a répondu que non.
Avis du professeur : critique.

Hors plan : Les contrats aléatoires


Ce sont, comme leur nom l’indique, des contrats fondés sur l’aléa.
Ex : le jeu et les paris sportifs. Cela se déchaîne sur Internet avec les plateformes et applications.
Ex 2 : l’assurance. Le bon conducteur, celui qui paye sa prime pour sa voiture depuis 15ans et qui n’a jamais eu d’accident,
est le bénéfice absolu pour l’assureur. L’assureur n’aura rien déboursé pour lui.
A l’inverse, le conducteur qui a causé un accident verse à la victime une indemnisation mais l’assureur verse encore plus.
L’aléa est alors défavorable à l’assureur.
Ex 3 : la rente viagère. Le propriétaire dont l’appartement vaut 1.5 millions est âgé et vend en viager à un acheteur, contre
le payement d’une rente mensuelle de 10 k euros. Il meurt au bout de 5 mois. L’acheteur aurait payé 50k euros pour un
appartement qui en vaut 1.5 millions. Il n’y a pas lésion.
Dans le projet de chancellerie cette question a été discutée.
Avis du professeur : le jeu s’est démocratisé. Que reste-t-il de l’interdiction du jeu. Le code civil prévoit un principe
d’immoralité du jeu, par un copier-coller de Pothier. Pothier détestait le jeu, et cela a été maintenu par les rédacteurs du
code civil.

Sous-partie 2 : Le contrat d’entreprise


Introduction
Il y a des questions de qualification car le contrat d’entreprise est proches d’autres contrats.
Ex : un architecte est chargé de construire une maison.
Ex 2 : le contrat de travail.
L’entrepreneur est le professionnel indépendant qui est chargé par son client de faire quelque chose.
On désignait avant ce contrat par l’expression « louage d’ouvrage ». Locatio opeirs signifie louer ses bras ou louer son
travail.
Dans le projet de réforme il a été décidé de codifier les usages et d’appeler ce contrat « contrat d’entreprise ».
Ce contrat peut porter sur des choses matérielles ou intellectuelles.
Matérielles= hôtelier, profession libérale, architecte. Mais attention certains contrats sont complexes, et mélangent le
contrat d’entreprise et le mandat.
Intellectuelles = l’avocat, le médecin, le professeur consulté sur un point de droit.
Ex : Arrêt Wisler concernant le peintre chargé de faire le portrait de la femme de son client et qui décide de ne pas livrer.
C’est un contrat d’entreprise.
Souvent le contrat d’entreprise est mêlé à d’autres contrats, ici la vente. Une fois que la toile est terminée, il la livre et la
vend.
Ex 2 : Une jeune fille qui va bientôt se marier et va chez un tailleur. C’est un contrat d’entreprise. Les parents viennent
payer la robe, c’est une vente.
Les rédacteurs du code civil avaient aligné le bail sur le contrat d’entreprise.
Le contrat de travail est encore dans le code civil : c’est un contrat spécial. La différence entre le bail et le contrat de
travail se fait par l’existence d’un lien de subordination.
Ex : les livreurs Uber sont surveillés et les forcer à accepter de conclure des contrats d’entreprise (ce qu’ils sont censés
faire), c’est forcer les qualifications et cela ne marche pas. Le juge peut requalifier le faux contrat d’entreprise en vrai
contrat de travail.
Le bail est la mise à disposition d’un bien, s’il intègre des services rémunérés et si ces services sont plus importants que la
mise à disposition du bien, c’est un contrat d’entreprise.
Ex : l’EPHAD. L’aspect « entreprise » est plus important que la mise à disposition de la chambre.
Ex 2 : l’hôtel, cela dépend des services.
Il y a une autre expression qu’utilisent la CJUE et le code de la consommation : « prestation de service ». L’UE
voudrait imposer la qualification de contrat de prestation de service.
La commission de réforme a tenu cette discussion sur la terminologie.
Avis du professeur : cela ne veut rien dire. D’autant plus que le bail est un contrat de prestation de service.
Le contrat d’entreprise est celui par lequel une personne, l’entrepreneur, s’engage à exercer de façon
indépendante pour une autre personne, maître de l’ouvrage ou client, un travail matériel ou intellectuel contre
rémunération.
Dans la terminologie de 1804 on utilise le mot « maître de l’ouvrage ». C’est celui a commandé. Mais ce n’est pas
contradictoire avec le fait qu’il n’y a pas de lien de subordination.
Aujourd’hui, on dit « client ».
Il y a encore une question de qualification sur la qualification même du travail. Il y a eu beaucoup de jurisprudence
et de doctrine sur le point de savoir comment distinguer la vente de chose future du contrat d’entreprise.
Ex : commande d’un scooter électrique. Souvent, la voiture n’est pas encore créée. Est-ce une vente ou un contrat
d’entreprise ? La Cour de cassation a opté pour le critère suivant : c’est une vente si l’objet fabriqué puis livré est un
objet standard. C’est une entreprise si la chose est adaptée spécifiquement aux demandes du client.
Cela s’applique notamment en matière de logiciel.
Ex : quand on commande un nouvel ordinateur, ce sont des logiciels standards. En revanche, des contrats conclus à la
demande de clients portent sur des logiciels adaptés à la demande du client.

I. La formation du contrat
Il n’y a pas que dans la vente qu’il faut des avant-contrats. On en trouve un dans le contrat d’entreprise : le devis.

A. Le devis
Ex : l’ordinateur montre des signes de faiblesses. Il faut donc aller chez un prestataire informatique pour le faire
réparer. Par prudence, on demande au professionnel d’établir un devis.
Le devis est l’estimation par l’entrepreneur du coût de sa prestation de service/ de ses diligences.
Les anglais disent « estimate ».
Le prix n’a pas à être prédéterminé. C’est né de la pratique.
Le devis annonce les prestations et l’évaluation. On peut indiquer un chiffre précis, soit une fourchette de prix.
Le devis est une promesse unilatérale d’entreprise.
Mais il y a des particularités par rapport à la PUV :
-le devis est gratuit. Avant de faire son devis, il se déplace ou examine pour le faire. Il a passé du temps dessus. En
matière d’architecture, certains architectes font payer le devis (c’est la liberté contractuelle), mais ce n’est pas l’usage.
-le devis est facultatif en droit commun selon les usages. Mais il y a des exceptions en droit de la consommation. Il y a eu
des abus, notamment de la part d’entreprises de dépannage expresse.
Cet avant-contrat a une grande importance dans l’entreprise. C’est la raison pour laquelle la commission de réforme a
décidé de le codifier.

B. La forme du contrat d’entreprise


Il se forme par l’échange des consentements, c’est un contrat consensuel. La preuve est écrite au-delà de 1500
euros. Mais il faut y ajouter des usages. Il y a donc une grande souplesse.
Ex : arrêt TJ Versailles concernant un professeur de droit des sociétés, un avocat lui demande une consultation. Le
professeur lui remet son avis écrit et cela n’avait pas plu au client et le client avait refusé de payer. Le professeur assigne le
client et son avocat. Le client et l’avocat invoquent l’absence d’écrit. La Cour dit que c’est un contrat consensuel et que la
remise du professeur prouvait l’accord entre eux.
Ex 2 : La règle devrait être la même avec les avocats, d’autant plus qu’il y a une part de confiance et d’intuitu personae dans
le contrat d’entreprise. Faut-il un écrit quand un client demande à son avocat de s’occuper d’un dossier ?
La loi Macron énonce qu’il est obligatoire ad validitatem qu’un contrat conclut un écrit avec son client avant de prendre
son dossier.
Ex 3 : en matière de sous-traitance. La sous-traitance est un sous-contrat. L’architecte est chargé par le maître de l’ouvrage
de désigner et faire construire la maison. L’architecte va engager, souvent, un entrepreneur, l’entrepreneur principal. Mais
cet entrepreneur principal va conclure des contrats avec des plombiers, des architectes d’intérieur etc…
Sous-traiter c’est confier une partie d’un marché à un tiers.
Cela va créer des liens directs entre le contractant et le sous-traitant. Par prudence, alors que la sous-traitance n’est pas
inclus dans le code civil, une loi spéciale du 31.12.1975 légifère sur ce sujet. Elle impose l’écrit à peine de nullité.
Dans le projet de réforme, une partie de la loi de 1975 est « rapatriée » dans le code civil.

C. Le prix
Il n’y a pas de disposition générale sur le prix dans le contrat d’entreprise. Il y a des dispositions spécifiques.
Les rédacteurs du code civil ont laissé la détermination du prix à la liberté contractuelle.
Ils se sont montrés libéraux, et, en suivant la doctrine de Pothier, ils se sont abstenus de codifier.
Pothier explique qu’encore plus que le mandat, et a fortiori la vente, il ne serait pas sérieux d’obliger l’entrepreneur à fixer
un prix prédéterminé dans le contrat car il n’a pas encore fait le travail.
Le contrat d’entreprise est fondé sur la confiance et l’indétermination de l’objet, ce n’est que lorsque le contrat sera réalisé,
le prix sera liquidé.
Ex : il ne vaut mieux pas que l’avocat donne directement ses honoraires, il vaut mieux qu’il donne un taux-horaires.
Le prix n’a pas à être prédéterminé.
Mais s’il y a un abus, il y aura toujours la possibilité de recourir à l’abus de droit.
Ex : honoraires trop importants. Le juge pourra réduire les honoraires sur le fondement de l’abus de droit.
La jurisprudence s’est fixée dans le sens de la libéralité et du correctif par le juge en cas d’abus. Comme pour le
mandat, les rédacteurs de l’ordonnance de 2016, sans attendre la réforme des contrats spéciaux, ont voulu codifier cette
jurisprudence.
C’est l’article 1165 du code civil « dans les contrats de prestation de service, à défaut d’accord des parties avant
l’exécution, le prix peut être fixé par le créancier à charge pour lui d’en motiver le montant en cas de
contestation. En cas d’abus, le juge peut être saisi d’une demande de dommages-intérêts et le cas échéant de
résolution du contrat ».
Avis du professeur : c’est une terminologie européaniste. Ce n’est pas totalement une codification de la jurisprudence car le
client ne veut pas obtenir la résolution du contrat ou des dommages-intérêts, il veut la révision du prix. Mais le texte ne le
prévoit pas.
│Questions :
Indemnités pour les avant-contrats : pour les avant-contrats en matière de vente, il y le versement de l’indemnité
d’immobilisation si le bénéficiaire de la PUV ne lève pas l’option, puis on applique le mécanisme des acomptes dans les
promesses synallagmatiques. LE client paye à l’avance, et s’il se dédit (renonce au contrat), il devra renoncer au dédit. Le
dédit peut être remboursé si ce n’est pas un professionnel qui signe la promesse.
Garantie des vices cachés : question du bref délai. La plupart du temps, ce sont des groupes de contrats, mais l’acheteur va
ratisser large et assigner tout le monde. Cela enferme les parties dans le délai du code de commerce, mais ce n’est qu’une
faculté. La jurisprudence Bootshop (client se présente comme un tiers en invoquant l’inexécution du contrat) est aussi
applicable. Cela ne change que la prescription qui n’est plus de 2 ans, mais de 5 ans.
Le professeur n’est pas sûr : si l’acheteur se prononce comme un tiers, le prof pense qu’il ne peut pas avoir plus de droits
que le cocontractant victime de l’inexécution.
Caractère obligatoire du devis : même si le plombier s’aperçoit que les travaux prennent le double du temps, quand le devis
est levé, le plombier est lié. │
La réforme a prévu une disposition codifiant la jurisprudence. Avis du professeur : il voulait supprimer l’article 1165.
Sur la charge de la preuve, la Cour de cassation considère que lorsque le client trouve que c’est trop cher que
l’entrepreneur doit prouver que le prix est raisonnable.
C’est difficile, la charge de la preuve devrait incomber au client.
Mais il y a toujours une présomption de méfiance. Cette présomption de méfiance a été codifiée par la loi Macron. Le
juge saisit de la contestation sur les honoraires devra vérifier s’ils sont manifestement excessifs et la loi Macron pose des
critères précis : diligence de l’avocat, difficulté du procès, fortune du client, notoriété de l’avocat. C’est le juge qui
détermine la valeur du travail.
Les rédacteurs du code ont prévu à l’article 1793, relatif aux architectes et entrepreneurs. Cet article prévoit de
pouvoir conclure un contrat partiellement aléatoire. C’est encore l’aléa dans le contrat. Ce texte prévoit que lorsque les
parties concluent un marché à forfait, l’architecte ou l’entrepreneur « ne peut demander aucune augmentation
de prix, ni sous le prétexte de l’augmentation de la main-d’œuvre ou des matériaux, ni sous celui de changement
s’ils n’ont pas été autorisés par écrit avec le propriétaire ».
Ex : des particuliers font construire une maison à Nice, ou une entreprise des bureaux à Nanterre. Il peut y avoir la
formule du devis, une formule combinant le devis mais dans le contrat définitif la possibilité d’augmenter le montant du
prix, notamment en cas d’imprévu.
Pour la construction d’un immeuble à la défense, le contrat a été conclu et le devis a été fait. Les travaux ont commencé
mais il y a eu des problèmes. Avec la guerre en Ukraine, il y a une augmentation de prix de la matière première. Le budget
inscrit dans le devis est déjà dépassé, et pourtant il reste 8 mois de travaux. L’architecte et l’entrepreneur peuvent
demander, s’il y a une clause, une augmentation du budget, et, s’il n’y a pas de clause, l’imprévision. Ce n’est pas possible si
le maître d’ouvrage a exigé que soit conclu un marché à forfait. C’est l’acceptation par avance de maintenir le prix tel qu’il a
été fixé alors même que des changements ont eu lieu. Des entrepreneurs trouvent ça dur car cela peut les conduire à la
faillite.
Cette année il y a eu plusieurs procès devant la Cour de cassation et le Conseil d’Etat. Ces derniers ont finalement
interprétés l’article 1793 en considérant que si le coût des travaux supplémentaires a été demandé, et que le maitre
d’ouvrage est à l’origine ou a connu les changements et les a acceptés tacitement ; il peut être fait exception à l’aléa et
l’entrepreneur aura droit à un supplément du prix sous contrôle du juge.
La Cour de cassation pose une limite à la souplesse de principe dans la détermination.
D’abord, dans la révision. Lorsque le contrat n’a pas été conclu, le prix n’est pas déterminé. En cours de réalisation,
l’entrepreneur peut exiger la facture. Si le maître d’ouvrage conteste, le juge pourra ou non réviser. Mais si le client a reçu la
facture et payer et qu’il ne conteste que quelques mois après, la Cour de cassation considère que c’est trop tard. Il y a une
acceptation tacite résultant du payement
Arrêt Civ 2 du 16.07.2020 : un avocat n’avait pas respecté les dispositions de la loi Macron et avait émis des factures
irrégulières. La Cour de cassation a estimé qu’il y a un minimum : si l’avocat a effectué des diligences, il doit être payé alors
même que les factures sont irrégulières.

D. La durée du contrat et sa résiliation


Dans les entreprises on ne raisonne pas sur CDD ou CDI. Le terme extinctif du contrat d’entreprise est
l’exécution du travail, de la prestation.
Ex : L’avocat a fini de plaider, on attend le jugement.
Ex 2 : le taxi a acheminé au lieu de destination.
Les parties peuvent prévoir des dates indicatives, sauf en matière immobilière.
Ex : s’il est prévu que la tour devra être livrée le 15.04.2023 et qu’elle est alors toujours en chantier, il y a des clauses
pénales dans la plupart des contrats. Cela fait pression sur le débiteur pour qu’il s’exécute.
Comment sanctionner ? La Cour de cassation dans son arrêt de 1900, Wisler, distingue clairement les dommages-
intérêts et le fait de le forcer à finir le tableau. Elle a estimé que cela ne peut être qu’une indemnisation.
Avis du professeur : il utilise le précèdent et l’analogie du contrat de construction immobilière. Le peintre doit terminer le
portrait et s’il ne le fait pas, il y a une clause pénale.
Il y a une disposition exceptionnelle : l’article 1794 du code civil. Il dispose que « le maître peut résilier par sa seule
volonté le marché à forfait quoi qu’ouvrage soit déjà commencé en dédommageant l’entrepreneur de toutes ses
dépenses et de tout ce qu’il aurait pu gagner dans cette entreprise. »
Ex : le client au regard de la conjonction désastreuse décide d’abandonner son projet. Il peut alors résilier unilatéralement
son contrat, mais il va devoir indemniser l’entrepreneur de ses dépenses et de tout ce qu’il aurait pu gagner dans
l’entreprise. Cela permet de surmonter la jurisprudence qui considère que la perte de chance ne peut être réparée que pour
une fraction. C’est parce que c’est original et sévère que les clients n’utilisent jamais ce texte.
La Cour de cassation s’est montrée très restrictive.
Ex : affaire sur la construction d’une sculpture monumentale par Dubuffet. C’est la société Renaud qui avait commandé
cela pour son siège. En cours de réalisation, Renaud a renoncé et proposé d’indemniser. La Cour considère que 1793 ne
s’applique pas aux œuvres d’art.

II. Les obligations de l’entrepreneur


A. L’accomplissement du travail
L’entrepreneur doit exécuter ce qu’il a promis, son obligation de facere. Il doit le faire dans les règles de l’art.
Ce terme est un terme spécifique au contrat d’entreprise. Et il ne doit pas être pris au sens littéral, c’est un standard au
terme duquel celui qui accomplit un travail doit le faire conformément aux règles habituelles, aux meilleurs
usages du secteur considéré.
La formule est spondet peritiam artis= l’entrepreneur répond de la connaissance (de la pratique) de son art. Il s’applique
à tous les contrats.
│Questions :
La détermination du prix : Lorsque l’entrepreneur effectue un travail et vend la chose, il y a le principe de liberté ; mais
lorsqu’il s’agit principalement d’une vente, le prix peut être déterminé par tranche.
La vente dans l’état futur d’achèvement : au fur et à mesure que la chose se construit, les parties conviennent des prix
(article 1601-3) « l’acquéreur est tenu d’en payer le prix à mesure de l’avancement des travaux ». │
Ex : arrêt concernant les architectes Civ 3 du 03.10.2022. L’architecte est engagé pour restaurer un château, mais il n’a pas
demandé de permis de construire. Or, l’état français est dirigiste en matière d’urbanisme, il faut donc un permis de
construire quel que soit le terrain. La définition du permis de construire (cf code de l’urbanisme) est générale et la
jurisprudence est stricte. Même si ce n’est qu’une question de restauration, il faut un permis de construire.
La Cour de cassation a estimé que l’architecte était responsable.
Quelle est l’étendue de l’obligation de l’entrepreneur ? Moyen ou résultat ?
Il faut distinguer contrat par contrat.
Ex : le TGV s’engage à ce qu’on arrive à Lyon à 12h52, c’est une obligation de résultat.
Ex 2 : le tailleur qui s’est engagé à livrer la robe de mariée 6 jours avant le mariage, c’est une obligation de résultat.
Ex 3 : le médecin ne peut pas s’engager au résultat de la guérison. Dans l’arrêt W (Mercier) de 1936, la Cour de cassation
a considéré que le médecin doit déployer tout son talent dans les règles de l’art, mais qu’il ne peut pas promettre le résultat
car il y a un aléa.
Ex 4 : les avocats. Les avocats sont mandataires et entrepreneurs. L’avocat ne peut pas promettre que le procès sera gagné,
il y a un aléa judiciaire. On ne sait jamais, même avec le meilleur dossier.
Cependant, ce n’est pas parce que c’est une obligation de moyen, que l’avocat ne doit pas se monter diligent. La Cour de
cassation a distingué un nouveau standard des règles de l’art : le devoir de compétence (arrêt Civ 1 14.05.2019).
Il s’agissait d’un avocat qui plaidait dans une affaire pour un préposé qui avait commis un dommage causé à un tiers et qui
avait été assigné en responsabilité extracontractuelle en même temps que son commettant. Le problème est que c’était
plaidé 1 an après l’arrêt Costedoat qui affirmait que le préposé n’est pas responsable sauf faute pénale. L’avocat plaide
sous l’ancienne jurisprudence et son client se fait condamné. Les juges auraient pu relever d’office, mais ils ne l’ont pas fait.
Les avocats sont obligés de prendre une assurance de responsabilité civile, et l’avocat de l’avocat plaide que ce n’est qu’une
obligation de moyen. La Cour de cassation répond que l’avocat a comme devoir de compétence de se tenir au courant de
l’évolution de la jurisprudence.
Avis du professeur : c’est justifié. Cela montre à quel point on ne peut pas traiter d’un sujet sans prendre connaissance du
droit.
Il y a une limite : si l’arrêt a été rendu peu de temps avant (3 semaines ou le mois dernier), avec Internet et les revus
juridiques, le professionnel peut avoir connaissance des actualités. Le délai est donc de 15 jours.
La Cour de cassation a aussi affirmé une nuance : s’il y a eu un revirement de jurisprudence imprévisible.
Tout cela suppose que le client s’aperçoive du fait que l’avocat n’ait pas travaillé correctement.
Ex : les notaires. Il peut y avoir d’actions en responsabilité contre les notaires pour le droit ou pour les faits (documents).
Dans les ventes immobilières, la loi impose d’annexer toute sorte de document concernant la pollution, la vente, les termes
etc… Or, il se peut que le notaire du vendeur ou de l’acheteur n’ait pas été vigilant. Il y a des condamnations de notaires
qui ne se sont pas suffisamment informés ou renseignés.
Il y a des professions entre les deux où on ne sait pas trop bien.
Ex : arrêt Civ 1 11.05.2022 sur les garagistes. Il s’agissait de la vente d’une voiture d’occasion, et manifestement il y avait
des vices cachés. L’acheteur commence par la faire réparer à plusieurs reprises pour ensuite se retourner contre son
vendeur. Il obtient une indemnisation par le contrat de transaction, mais il agit en responsabilité contre le garagiste. Le
garagiste aurait dû faire cesser le vice et ne pas réparer inutilement et faire facturer. Il est débouté par les juges du fonds et
la Cour de cassation censure.
Cet arrêt rappelle que certains entrepreneurs ont une obligation de moyen, mais la victime demanderesse est
dispensée de prouver la faute, ou il existe une présomption de faute. A la différence des obligations de résultat
(écartées que par la preuve d’une cause étrangère, d’une force majeure), dans ce type de présomption, le débiteur peut
s’exonérer par la preuve de son absence de faute. La cour de cassation a créé une présomption de responsabilité (garagiste,
teinturier…).
Avis du professeur : la cause des pannes était le vice caché de la vente, et ce n’est pas du fait du garagiste. Pour un
professionnel, ce vice caché aurait pu être décelé, mais peut-on présumer sa faute ? Comment peut-il en être exonéré ? La
Cour de cassation est très sévère.
La tentation pour les professionnels est d’insérer des clauses limitatives ou exonératoires de responsabilité ;
mais si celles-ci sont valables, leur champ d’application est de plus en plus restreint (clauses abusives, droit de la
consommation, obligation essentielle).
Pour ceux tenus par des obligations de résultats (ex : SNCF), ils peuvent s’exonérer par la preuve d’une force majeure
(droit commun), mais les juges ont une conception stricte de la force majeure.
Dans ce type de situation, les professionnels n’insèrent pas des clauses limitatives de responsabilité, mais proposent des
indemnisations. C’est une sorte de clause limitative de responsabilité.
Ex : si la SNCF rembourse 25 euros, alors que le retard empêche quelqu’un de passer un examen qu’il ne pourra repasser
que l’année prochaine, le dommage est estimé à plus de 25 euros.
L’autre moyen de s’exonérer est l’information. L’information est un devoir mais aussi une façon de limiter leur
responsabilité (original).
Ex : les médecins ont une obligation de moyen mais les juges se montrent sévères. Pour une opération (quelle que soit sa
nature), les médecins informent les patients des risques et conséquences possibles de l’opération.
La Cour de cassation ne doit pas oublier que la responsabilité dans les contrats spéciaux est une responsabilité
contractuelle. Il y a donc le manquement (fut-il présumé), le dommage et le lien de causalité.
Parfois, elle le retient.
Ex : Arrêt de 2016 concernant la profession de diagnostiqueur. Au moment de la vente, le vendeur ou l’acheteur, ou les
deux nomment un expert immobilier qui va faire un diagnostic. Si le toit s’effondre, le diagnostiqueur a commis une faute.
Mais si c’est parce qu’il y avait des microfissures, c’est un vice caché dont le vendeur est responsable. Le diagnostiqueur
n’est pas sûr qu’il doive être responsable.
Ex 2 : arrêt 2022 avec la voiture qui tombe en panne. Le garagiste est-il à l’origine du dommage causé à l’acheteur.

B. Garanties et risques attachés au contrat


Dans un grand nombre de contrats d’entreprise, l’entreprise débouche sur une vente.
Ex : la construction de la maison est une entreprise (assembler la maison etc…), mais à l’issue de la construction cela va
déboucher sur une vente.
Il y a donc une garantie des vices cachés.
En matière immobilière, la loi veut protéger spécialement l’acheteur-maître de l’ouvrage. C’est la raison pour laquelle il y a
des articles spécifiques en matière de vente immobilière (article 1792 et suivant).
Article 1792 « tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit envers le maître ou l’acquéreur des
dommages résultant d’un vice du sol et qui le rendent impropre à sa destination. La responsabilité n’a pas lieu si
le constructeur prouve la cause étrangère ». Le constructeur comprend l’architecte et tous les entrepreneurs. Il y a une
présomption de responsabilité et une obligation de résultat.
Attention : ce ne sont pas que les vices du sol. D’autres textes évoquent la construction elle-même (le gros œuvre). Ex :
murs, toiture, canalisations etc… Cette garantie porte sur le sol et la construction dans ses éléments essentiels. C’est
une garantie spécifique : garantie des vices cachés importé dans le contrat d’entreprise en matière immobilière.
Cette garantie est spécifique du point de vue du délai.
En vice caché, c’est 2 ans à compter de la découverte du vice.
En matière immobilière c’est 10 ans à compter de la réception des travaux. On parle de garantie décennale qui
débouche sur une assurance obligatoire. La réception des travaux est la délivrance de la chose, quand la construction est
terminée avec un acte solennel de réception où sont présents les constructeurs et les clients. Ce n’est pas très favorable, car
des vices cachés peuvent apparaitre après 10 ans.
Les textes, pour les éléments d’équipement (ex : installations électriques), prévoient une garantie biennale (2 ans)
à compter de la réception.
Au moment de la réception, si le client s’aperçoit qu’il y a des vices, il doit le dire dans un délai de 1 an (garantie
annale).
La charge des risques est une notion important à partir du moment où il y a une construction.
Ex : Civ 16.03.2022 relatif à des billets de banques pour le compte d’un état étranger. En cours de fabrication, les billets
sont volés. Dans ces conditions, l’entrepreneur doit indemniser le client. A ce titre, il est assuré (assurance de responsabilité
civile). La question était de connaître le montant de l’indemnité.
Le propriétaire était-il devenu par accession propriétaire des billets, cela avait une incidence sur le montant de
l’indemnisation. La Cour décidé qu’il n’y a pas de propriété par accession.

C. Les clauses exonératoires de responsabilité


Elles peuvent être de toute sorte et porter sur la charge des risques.
L’entrepreneur a tendance à s’exonérer de sa responsabilité ou à la plafonner par des sortes de clauses pénales
dérisoires.
Les arrêts Chronopost (1996) et suivants portaient précisément sur un contrat d’entreprise. Transporter un plu
urgent d’un endroit à un autre est un contrat d’entreprise.
C’est cet arrêt qui est codifié dans l’article 1170 du code civil.
Ce champ s’est réduit considérablement. Est-ce qu’en 2022 il n’est plus possible d’insérer des clauses ?
Avis du professeur : non, il faut pouvoir conserver un minimum de liberté contractuelle.
La clause peut porter sur n’importe qu’elle obligation : la livraison ou la garantie.
Un certain nombre de professionnels inscrivent les clauses dans leurs conditions générales, peu importe qu’elles soient
valables ou non. Il y a une résistance des usages professionnels au droit.
En revanche, certains entrepreneurs ont renoncé aux clauses exonératoires.
Ex : en matière médicale, pas d’exonération de responsabilité en cas de dommage corporel.

III. Les obligations du maître de l’ouvrage


La première est le payement du prix : rémunération convenue ou annocnée par l’entrepreneur une fois le travail
fait.
S’il considère que le prix est trop élevé, on entre dans le processus de révision.
L’autre obligation propre au contrat d’entreprise est la réception des travaux. C’est l’acte par lequel le maître de
l’ouvrage reçoit de l’entrepreneur la chose terminée. Elle existe en matière immobilière (plus d’importance) ou en
matière mobilière.
En immobilier, c’est presque solennel, il y a un rendez-vous pris entre le maître de l’ouvrage et les clients. Quand la
construction est terminée, il y a une visite, une inspection et le dressement d’un procès verbal. C’est dans ce procès-
verbal que s’il y a des vices, le maître els indique et que l’entrepreneur, dans un délai imparti, fasse les réparations.
Le procès-verbal constitue le point de départ des délais de prescription.
S’il n’y a pas de réception expresse, la jurisprudence considère qu’il peut y avoir une réception tacite. Ce n’est donc pas si
solennel. La réception tacite se fait par la prise de possession et l’usage du maître sans protestation.
La réception a une utilité au sujet du risque : à partir de la réception, les risques passent au maître de l’ouvrage.
Cette réception ne purge pas le bien des vices cachés. Par définition, s’il y a un vice caché, ce n’est pas à la réception
que le maître va s’en apercevoir, même si des maîtres viennent parfois inspecter avec des experts.
Dans ce cas, le délai est de 10 ans. Il y a un autre délai et point de départ.
En matière mobilière, il n’est pas obligé de dresser un procès-verbal de réception, cela peut intervenir autrement (vente,
réception de la chose…).

IV. La sous-traitance
Il est fréquent que l’entrepreneur, dans un certain nombre de domaines (notamment immobilier) recourt à des
sous-traitants. Il délègue alors une partie de sa mission (facere) à des tiers.
Elle est pratiquement systématique en matière immobilière dans les chantiers importants. Par définition, pour cette activité
matérielle, on retrouve les groupes de contrats.
On peut la rencontrer en matière mobilière (ex : voiture).
Les rédacteurs du code civil ne l’avait pas prise en compte, car, à l’époque, elle n’était pas très développée. Ce n’est que
tardivement qu’une loi est intervenue pour règlementer une partie de la sous-traitance : loi du 31.12.1975.
Cette loi n’a pas été intégrée dans le code civil, elle est en dehors.
La commission de réforme a décidé d’intégrer la sous-traitance dans le code civil.
L’article 1er de la loi définit la sous-traitance « c’est l’opération par laquelle un entrepreneur confie par un
sous-traité et sous sa responsabilité à une autre personne, appelée sous-traitant, l’exécution de tout ou partie du
contrat d’entreprise. »
Le champ est extrêmement vase, car la sous-traitance existe aussi beaucoup en matière de contrats administratifs.
L’entrepreneur peut confier l’intégralité de la tâche
Avis du professeur : si on confie l’intégralité de la mission, ce n’est pas un sous-contrat mais cela devient une cession de
contrat.
La sous-traitance s’applique aussi bien en matière mobilière qu’immobilière.
Le contrat d’entreprise ne serait pas intuitu personae alors pourtant que le choix de l’entrepreneur est essentiel.
Il faut donc rechercher le régime, qui va payer le sous-entrepreneur ? Qui va donner la garantie ?
La loi de 1975 a posé un certain nombre de règles.
L’entrepreneur principal doit faire accepter le sous-traitant par le maître. La loi utilise le mot « agrément ».
Grâce à cet agrément, il va y avoir un lien direct, une action directe, entre le maître de l’ouvrage et le sous-traitant.
Si le sous-traitant n’est pas payé il exigera le payement par le maître et inversement. Ils ont des actions directes de nature
contractuelle.
L’agrément est-il un acte solennel ?
L’entrepreneur principal doit faire consentir expressément et par écrit le maître pour les sous-traitants qui vont travailler.
Normalement l’agrément doit être express, sans que la loi exige des formes particulières.
Ex : courriers électroniques.
Mais, comme pour la réception, en l’absence d’agrément express, peut-il y avoir un agrément tacite ?
S’il n’y a pas d’agrément, le maitre de l’ouvrage peut considérer que le contrat de sous-traitance ne lui ait pas opposable
(1195 du code civil).
La jurisprudence a estimé que l’agrément peut être tacite et résulter, par exemple, d’une visite de chantier. D’un autre
côté cela suppose d’identifier le sous-traitant.
La loi permet au sous-traitant de mettre en demeure l’entrepreneur principal de le faire agréer par le maître.
A partir du moment où un chantier coûte de l’argent et que c’est l’entrepreneur principal qui reçoit les payements
de la part du maître pour les redistribuer (ventiler) entre les différents sous-traitants, il y a un risque qu’il ne paye pas. Soit
parce qu’il est malhonnête, soit parce qu’il a des dettes et qu’il est insolvable.
C’est la raison pour laquelle plusieurs mécanismes sont mis en place pour protéger le sous-traitant et le maître :
-assurance de responsabilité obligatoire pour l’entrepreneur principal et les sous-traitants
-l’entrepreneur principal doit souscrire une caution et en justifier auprès du maître de l’ouvrage. C’est une
personne qui garantit que le débiteur principal payera la dette à l’échéance.
Il n’y a pas de méfiance à l’égard de l’entrepreneur principal, mais des garanties prises par la loi.
Que se passe-t-il si le sous-traitant ne reçoit pas le payement ?
Si le maître a payé, on ne peut pas le faire payer 2 fois. Il faut une vigilance de la part de l’ensemble des parties quant aux
questions du payement du prix.

Sous-partie 3 : La transaction
Introduction
Etymologiquement, transaction vient de trans agere (aller au-delà). C’est un vocabulaire symbolique : deux
adversaires décident d’aller au-delà de leur dispute.
C’est la définition qu’avait donné les rédacteurs du code civil à l’article 2044 du code civil (copiée-collée du droit
romain) « La transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une
contestation née ou préviennent une contestation à naître. »
« Contestation » a un rapport étroit avec le droit processuel et les MARD (modes alternatifs de règlement des différends).
Les parties mettent fin à un procès (litige, contentieux, différend) ou de le prévenir.
Ex : il y a beaucoup de transaction en droit du travail. Un employeur a licencié pour faute grave un salarié car il considère
qu’il utilise trop son téléphone au travail. Le salarié s’apprête à saisir le conseil des prud’hommes pour demander les
indemnités légales (avec des dommages-intérêts), cela donne 80k euros. L’employeur choisit un avocat qui va demander le
renversement (revirement de jurisprudence) et considéré que le téléphone au travail est une faute. Il va faire une demande
reconventionnelle. Chaque partie a une chance de gagner et un risque de perte, sachant que le procès va durer longtemps.
Les parties décident de transiger : l’employeur versera 30k euros immédiatement et ils se désisteront de leur action.
On trouve la transaction dans tous les domaines.
Ex : le mandant révoque le contrat et le mandataire estime que c’était un contrat d’intérêt commun.
Ex 2 : le vendeur assigné pour vices cachés paye une indemnité
Tous les secteurs de la vie économique sont concernés.
Les parties vont chercher à concilier, la transaction va être le résultat de cette transaction. Si elle échoue, il n’y aura
pas de transaction et il y aura procès.
On ne peut pas prévoir dans une clause de transaction dans un contrat.
Les transactions sont encouragées depuis le droit romain. C’est l’idée qu’il vaut mieux s’entendre que combattre.
D’où l’adage « Mieux vaut une mauvaise transaction qu’un bon procès ». Cet adage exprime que les parties seront
peut-être frustrées. Il y a une double frustration par rapport à ce qu’on peut espérer obtenir.
Ex : si le salarié aurait pu obtenir ses 80k, mais il risquait aussi de ne rien avoir. C’est l’aléa judiciaire.
Certains disent que la transaction est un contrat à l’envers, on commence par le procès et on arrive à l’échange des
consentements.
Il peut y avoir des risques ou des abus. Les rédacteurs du code civil, reprenant la tradition du droit romain, ont mis
un encadrement strict.
Ce contrat n’a pas été touché jusqu’à un arrêt récent. Il y a eu une loi, très pompeuse : la loi pour la justice au XXIème
siècle. Ceux qui ont rédigé la loi ont consacré un morceau à la transaction.
La commission estime que la transaction n’est pas un contrat spécial et qu’elle a déjà été modifié. En outre, ce contrat est à
cheval sur la procédure civile.
Avis du professeur : la transaction est un contrat spécial avec un champ d’application sans limite.

I. La formation du contrat de transaction


L’article 2044 comporte un alinéa 2 « ce contrat doit être rédigé par écrit ». Se pose alors la question de savoir si
cela ne fait pas double emploi avec l’article 1359 (écrit au-dessus de 1500 euros), car la plupart des transactions portent sur
des montants supérieurs à 1500 euros.
On retrouve le fait que l’écrit est nécessaire ad validatem et pas ad probitem.
Dans la transaction, parfois il y a un titre « Transaction » sur la première page, parfois il n’y en pas.
Ex : « Protocole d’accord »
A l’intérieur, il y a le rappel des éléments de la transaction. Le juge déduit du contenu la nature du contrat.
La transaction est un acte de disposition. En effet, il y a une renonciation à un droit, c’est renoncer au droit
d’agir en justice ou le désistement.
Le désistement est un acte grave, il faut donc la capacité de disposer pour transiger.
La question des vices du consentement. Comme dans les autres contrats, il peut y avoir dol erreur ou
violence.
D’abord, une des parties peut être trompée par l’autre : dol, qu’il soit par réticence ou par des manœuvres.
Ex : arrêt en matière de droit du travail o le salarié licencié avait prétendu qu’il n’avait pas trouvé de travail et qu’il fallait
qu’il déménage pour augmenter le montant de l’indemnité.
La transaction entre l’employeur ou l’employé pose souvent un rapport de force. Il y a un risque de violence moral.
Ex : transaction en matière d’harcèlement moral ou sexuel.
La commission estime qu’il suffisait de renvoyer au droit commun du contrat, et que des dispositions particulières ne sont
pas nécessaires.
Si une de ces questions se pose, c’est le droit commun qui s’applique.
En droit commun, hormis en droit spécial de la vente immobilière, il n’y a pas de rescision pour lésion. LE
raisonnement vaut a fortiori pour la transaction.
Par définition, il y a un aléa : les parties ne peuvent pas savoir ce que valent leurs prétentions respectives, quel que soit
l’objet du procès.
On retrouve l’adage « l’aléa chasse la lésion ».
Les parties ne peuvent pas prétendre avoir été victimes d’une lésion : avoir trop donné et pas assez reçu.
C’est un contrat synallagmatique et à titre onéreux. Le juge contrôle donc les obligations respectives des
parties.
C’est obligations ont un vocabulaire spécifique et des particularités qui ne se retrouvent pas dans d’autres contrats. Ce
vocabulaire est la notion de concession réciproque. C’est une terminologie propre à la transaction.
C’était déjà dans le droit romain, notamment chez Ulpien. Il raisonnait de façon moderne : pour qu’il y ait validité du
contrat, chaque partie doit avoir fait un effort.
Chacune des parties parie sur ses chances de gain ou de perte.
Cela ne passe pas aussi simplement : parfois les concessions sont inégales. L’une des parties va alors sacrifier plus que
l’autre. Faut-il à chaque fois rechercher les sacrifices réciproques ?
Domat s’était porté en rupture avec le droit romain : ce qui compte c’est que les parties mettent fin au procès, le juge n’a
pas à contrôler les concessions réciproques.
Les rédacteurs du code civil avaient décidé que cette condition des concessions réciproques n’entrait pas dans la définition.
Le juge doit-il contrôler ?
La Cour de cassation décide, alors même que le code ne le contient pas, qu’il faut un contrôle du juge. C’est le pouvoir
créateur du juge.
Cette obligation de concession réciproque a été introduite par la loi Justice 21.
Avis du professeur : sans concession réciproque il y a un problème.
Que se passe-t-il lorsque les concessions ne sont pas si réciproques ?
Ex : l’employeur a proposé au salarié 10k au salarié.
Si ce n’est pas une concession réciproque, l’objet est nul. Cela conduit la Cour à contrôler a minima la question des
concessions réciproques. La Cour, dans l’exemple, a estimé que des « concessions d’inégale valeur peuvent néanmoins
constituer dans concessions réciproques ». Si le juge estime qu’elle est valable, il va tenir de ce qu’aurait pu être la
décision du juge si les parties étaient allé jusqu’au bout.
Il existe des cas de responsabilité extracontractuelle.
Ex : arrêt au sujet du naufrage de l’Erika. La compagnie pétrolière est responsable de la pollution des côtes. Il y a eu
plusieurs procès (préjudice écologique), mais certains ont transigé. Dans un de ces cas de transactions, un pêcheur avait été
indemnisé par l’assureur de la compagnie. L’assureur s’en était bien tiré car il avait fait un chèque de 1800 euros. La Cour
de cassation estime qu’e c’est valable car le pêcheur a évité « une procédure longue et couteuse ».
Certaines transactions sont des contrats d’adhésion. Il y a un intérêt que le juge ne se montre pas trop libéral.
Ex : un arrêt Civ 1 du 16.6.2021 sur les trésors. Il s’agissait d’un chantier pour la construction d’un immeuble et un des
ouvriers (ou plusieurs) en creusant le sol avait trouvé 34 lingots d’or. Ils se sont disputés avec le propriétaire du terrain.
L’article 716 du code civil dispose « le trésor appartient pour moitié à celui qui l’a découvert et pour l’autre au propriétaire du fonds ».
Dans ce cas, le juge a contrôlé les concessions.
Cela peut porter sur tous les biens, même extrapatrimoniaux ? Oui, on peut transiger sur toute chose même
extrapatrimoniale.
Ex : dans des faits d’harcèlement, on peut transiger
Ex 2 : dans une atteinte à la dignité, on ne peut pas transiger.
Les transactions peuvent contenir des clauses.
Ex : le journaliste PPDA avait été licencié. Il y a eu un procès et les parties transigent. Il y a une clause au terme de laquelle
il s’interdit de s’exprimer dans les médias et sur les réseaux, or il publie un livre. Il invoque l’article 10 de la CEDH et se
pose la question de la compatibilité des contrats spéciaux et des droits fondamentaux. La cour estime que cela ne porte pas
atteinte au droit d’expression : ce sont les clauses de dénigrement.
Ex 2 : les clauses de confidentialité. Une des parties ne veut pas que le public connaisse le contenu de la transaction.

II. L’exécution du contrat de transaction


A. L’interprétation
Comment les transactions s’interprètent-elles ?
En 1804, les rédacteurs du code se contentaient des dispositions générales sur l’interprétation des conventions (articles
1188 et suivants).
Mais ils ont décidé que la transaction mettait des règles spécifiques d’interprétation, et y ont consacré deux articles.
C’est exceptionnel (dans le mandat, il n’y en a qu’un, de même que pour la vente). Ces textes ont été repris du droit
romain, notamment d’Ulpien, puis ensuite de Domat.
D’abord c’est l’article 2048 « les transactions se renferment dans leur objet : la renonciation qui est faite à
tout droit, action et prétention ne s’entend que de ce qui est relatif aux différends qui y a donné lieu ».
C’est une règle d’interprétation stricte parce que les parties renoncent à une fraction de leur droit.
Ex : le salarié avait le droit, en théorie, à 80k euros s’il avait gagné. Il renonce à son moyen et ses 80k euros ; de même pour
l’employeur qui renonce à faire débouter.
C’est donc une règle assez naturelle. Cela conduit à soigneusement rédiger les termes de la transaction.
Il y a beaucoup de jurisprudence en matière du droit du travail. Pratiquement 2-3 arrêts de la chambre sociale/ an sur
l’interprétation des transactions.
En effet, dans la contestation (ex : à l’occasion d’un licenciement), il peut y avoir toutes sortes de questions qui se posent
dont les parties n’ont pas forcément discuté et qui ne se retrouvent pas dans le texte de la transaction.
Ex : arrêt Ass. Plén. 1997. Il s’agissait d’un salarié qui avait conclu un contrat avec son ex-employeur et il avait renoncé à
demander ses indemnités, dont l’indemnité de licenciement et de non-concurrence. En revanche, les parties n’avaient pas
discuté et mentionné dans la transaction la question du payement d’une prime (il avait le droit à une prime à laquelle il
n’avait pas renoncé expressément dans la transaction). Quelques années plus tard, il réclame le payement de cette prime.
L’employeur estime que la transaction est forfaitaire et que toute nouvelle contestation est comprise dans les termes
généraux de la contestation. Le salarié se retranche derrière l’article 2048 du code civil.
La Cour de cassation a estimé qu’il n’a pas le droit à sa prime, la transaction vaut pour tous les droits, même s’il n’est
pas mentionné. Ce droit à la prime est compris implicitement. C’est une interprétation raisonnable et pas stricte.
C’est une nouvelle illustration du pouvoir créateur, l’extrême liberté, dont jouit le juge dans l’interprétation des textes.
Ex 2 : Arrêt Soc 2013. Un cadre avait été licencié pour faute grave. Les parties concluent une transaction, et il perçoit une
certaine somme. Quelques temps plus tard, il réclame une indemnité fondée sur la discrimination sexuelle dont il aurait été
victime en raison de son orientation sexuelle. L’employeur estime que cela n’a pas lieu au titre de payement d’une somme
forfaitaire qui comprend ce grief.
Les juges du fonds, soutenus par la Cour de cassation, reviennent à l’application stricte de 2048 : pas de mention de
l’indemnisation relative à la discrimination sexuelle. L’ex-salarié peut demander une indemnité.
Ex 3 : Arrêt Soc 17.02.2021. Il y a licenciement d’une salarié qui été affectée aux RH. Dans son contrat de travail, il y avait
une clause de non-concurrence et une indemnité prévue. Les parties concluent une transaction et l’employeur paye une
somme forfaitaire. Est-ce que l’indemnité de la clause de non-concurrence était comprise dans la transaction ? Si elle ne
l’était pas, le salarié pouvait-il la réclamer par la suite ?
Il y a beaucoup de procès sur cela car, de nos jours, il y a cette multitude des droits des salariés qui font que les
revendications sociales collectives et individuelles sont fortes.
Le salarié convainc les juges du fonds qui s’appuient sur des précédents (arrêt de 2013) et l’article 2048, qui estiment qu’il y
a droit. Mais, la Cour de cassation casse cet arrêt au visa des articles 2044 et 2048, et 2049 du code civil. La motivation
de la Cour de cassation est la considération de ce que les parties ont voulu mettre fin à leur différend de façon
forfaitaire et définitive. Que les parties aient fait une liste des griefs respectifs ou non, et que cette liste soit complète ou
non, c’est leur volonté qui doit primer.
La Cour de cassation aurait pu citer l’article 1188 ou l’article 1104 (sur la bonne foi), car celui, qui a accepté un règlement
forfaitaire et définitif et qui ensuite vient faire un procès, n’est pas forcément de bonne foi.
L’article 2049 du code civil énonce « les transactions ne règlent que les différends qui s’y trouvent
compris, soit que les parties aient manifesté leurs intentions par des expressions spéciales ou générales, soit que
l’on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé ».
Cet article peut avoir l’allure d’un doublon car c’est la même règle d’interprétation stricte que 2048. Pourquoi avoir répété
la même chose ?
Le terme « suite nécessaire » rappelle l’article 1194 du code civil « les contrats obligent non seulement à ce qui est exprimé, mais
encore à toutes les suites que leur donnent l’équité, l’usage ou la loi ». C’est une formule analogue. Or la Cour de cassation s’est
fondée sur ce texte pour trouver des obligations du contrat qui ne figuraient pas dans le code civil.
Ex : obligation d’information.
C’est l’interprétation large, et non pas stricte. De sorte, que 2049 se contredit. L’explication se trouve dans Domat, qui
évoque successivement l’interprétation stricte et l’interprétation large sans avoir vraiment conscience de la contradiction.
Les rédacteurs du code civil, dans leur copier-coller, ont inséré l’article 2049 sans voir la contradiction.
La Cour de cassation est face à ces deux articles : cela explique une certaine incohérence des arrêts.
Avis du professeur : ce ne sont pas des revirements, juste des incohérences. C’est de la casuistique favorisée par les deux
textes qui se contredisent. Ce qui compte c’est rechercher l’interprétation réelle et faire respecter le principe de
bonne foi. Même si le salarié n’a pas mentionné l’indemnité ou la prime, le payement dès lorsqu’il est conséquent
(concession réciproque) purge l’ensemble des prétentions. On applique de façon privilégiée la dernière phrase de l’article
2049.
Si on fait une synthèse, c’est dans le contrat de transaction qu’il y a le plus de contentieux.

B. La force obligatoire
L’exécution se traduit par la force obligatoire du contrat de transaction.
Les rédacteurs auraient pu se contenter d’un renvoi à l’article 1103 « les contrats légalement formés tiennent lieu de
loi à ceux qui les ont fait ».
Mais ils ont voulu adopter une règle spéciale. C’est l’article 2252 (avant sa suppression par la loi Justice 21) « les
transactions ont, entre les parties, l’autorité de la chose jugée en dernier ressort ». C’est l’expression de l’originalité
profonde de la transaction : c’est comme un jugement. Les parties, sans attendre le juge, tranche leur différend. Les
romains ont posé le fait que, dès lors que les parties concluent une transaction, il y a une res judicata (chose jugée).
Cela s’explique par le fait que la transaction, contrairement aux autres contrats spéciaux « ordinaires et soumis à 1103, est
un contrat de litige. Il y a une sorte de solennisation de la transaction, c’est une assimilation à un jugement.
(Cela fait penser au jugement de Salomon).
Cette tradition forte à des incidences sur l’exécution : les parties peuvent encore moins remettre en cause ce contrat
que les autres contrats spéciaux. C’est comme un jugement définitif.
Cette originalité s’est prolongée jusqu’en novembre 2016 et la loi Justice 21.
L’auteur du texte a estimé que, dans le même esprit de suppression des règles spécifiques des vices du consentement de la
transaction, la force obligatoire de l’article 1103 suffit pour la transaction.
Cette règle de l’autorité de la chose jugée a été supprimée au profit d’un nouveau texte « la transaction fait obstacle à
l’introduction ou à la poursuite entre les parties d’une action en justice ayant le même objet ».
Le texte n’est pas très clair, la formule est obscure. On comprend que c’est l’équivalent de l’autorité de la chose jugée
(article 1355 du code civil).
Il y a un paradoxe : l’auteur du nouvel article a paraphrasé 1355 qui porte sur l’autorité de la chose jugée. Fallait-il la
remplacer ?
Dans tous les domaines du droit (8/10 des cas), à la fin de la transaction est inscrit « la présente transaction vaut autorité
de la chose jugée ». Donc, alors que cela fait 5 ans que cela a été modifié, les professionnels continuent d’utiliser ce
standard car cela leur semble le plus approprié au contrat spécial de la transaction.
C’est une leçon d’humilité donnée par les professionnels.

C. Les effets de la transaction


Le jugement rétroactif est celui qui revient en arrière, et qui vaut pour le passé. En revanche, les jugements
constitutifs ne valent que pour l’avenir.
Ex : Cela dépend des décisions. Le jugement d’adoption qui créé un lien entre un enfant et deux parents, ou un parent
adoptif seul, est un jugement définitif qui ne vaut que pour l’avenir.
La transaction est déclarative. C’est un lien, rompu avec la loi Justice 21.
Les transactions éteignent le contentieux entre les parties : il n’y aura plus de procès. On revient à l’autorité de
la chose jugée. On revient aux renonciations.
Lui aussi participe d’un jugement car le jugement éteint la contestation et a autorité de la chose jugée dès qu’il est
prononcé.
Cependant, la transaction reste un contrat. De sorte que se pose la question de son inexécution.
Il existe des transactions minoritaires où l’une des parties n’exécute pas. C’est la différence avec un jugement car il n’y aura
pas d’huissier ni d’astreinte.
Il y a deux manières :
-premièrement on relève que c’est un contrat de sorte que la partie victime peut saisir le juge et demander la résolution
du contrat, voire prononcer elle-même la résiliation du contrat. Elle peut également saisir le juge d’une demande
d’exécution forcée.
-les textes (code civil et code de procédure civile) prévoient une procédure originale, dite d’homologation de la
transaction. Cela relève de la juridiction gracieuse, on demande au juge de prononcer une décision sur requête. Parmi les
procédures sur requête, la procédure d’homologation sur transaction se trouve aux articles 1565 à 1567 du code de
procédure civile.
Ces textes prévoient que le juge peut être saisi afin d’homologuer la transaction. Ce n’est pas pacifique aux transactions, on
la trouve dans d’autres matières (ex : homologation de la convention des époux par le juge au moment du divorce,
l’homologation du plan de sauvegarde de l’entreprise par le tribunal de commerce). Le juge appose le sceau de la justice
sur un acte privé afin de lui donner la force exécutoire, on fait exécuter par un huissier la décision de justice par la
partie. La transaction homologuée par le juge va donner force exécutoire comme un jugement à un acte entre parties. C’est
un avantage considérable.
Ex : l’employeur n’a pas payé, le salarié demande l’homologation. La transaction devient comme un jugement de sorte que
l’employé pourra procédure à une saisie du compte bancaire de l’employeur.
Il y a deux titres exécutoires : le jugement ou l’acte notarié.
L’acte homologué est une exception.
Ex : Civ 2- 03.02.2022. Il s‘agissait d’une dette par un débiteur et la créance avait fait l’objet de plusieurs transferts. Le
dernier cessionnaire avait fait procéder à l’homologation et à une saisine. L’huissier, lorsqu’il a fait la saisine, a produit le
jugement de l’homologation et pas la transaction. Le débiteur a invoqué la nullité et l’impossibilité de se prévaloir de la
transaction comme titre exécutoire sans l’avoir.
La Cour estime qu’il n’y a pas besoin de joindre au jugement d’homologation la transaction dès lors que le jugement
mentionne le montant de la créance qui est le fondement de la saisine. On voit cette résurgence du formalisme.
Les transactions sont confidentielles : les parties ne veulent pas que les tiers en aient connaissance, et encore
moins du contenu. Le seul problème est que dans cette volonté de débarrasser les tribunaux de cette procédure, une loi
récente a libéralisé les transactions et la force exécutoire.
C’est une loi de procédure civile qui a été inscrite dans le code des procédures civiles d’exécution.
Cette modification prévoit que, pour avoir la force exécutoire de la transaction, il n’est même pas besoin de saisir le juge
des requêtes, mais il suffit de demander au greffier d’apposer lui-même la formule exécutoire dans les cas dans
lesquels la transaction a été contresignée par un avocat.
L’acte contresigné est issu d’une réforme : c’est l’avocat, qui n’est pas officier ministériel mais auxiliaire de justice, qui a la
confiance de la loi pour apposer sa signature sur un acte sous seing privé qui prend alors une valeur plus importante.
Ex : en matière de divorce, l’acte doit être signé par le notaire et les parties. Maintenant, le greffier peut mettre le sceau à la
place du juge lors d’une transaction en matière de divorce.
Ex : la question s’est posée de savoir si, après l’homologation, l’une des parties invoquant une erreur, d’un dol, ou d’une
violence peut demander l’annulation au juge alors que la transaction a été homologuée.
On retrouve cette considération que la transaction reste un contrat. Ce qui s’applique au contrat (vices de
consentement) s’applique à la transaction.

D. Les effets de la transaction à l’égard des tiers


Ex : une victime a été renversée, et une voiture et une trottinette sont impliqués. La victime décide d’agir contre le
conducteur de la voiture. Le conducteur de la voiture agit contre le conducteur de la trottinette au titre de ‘l’obligation in
solidum. Est-ce que le conducteur de la trottinette peut opposer à la victime la transaction qu’elle a pu conclure avec le
conducteur de la voiture ? Est-ce que le tiers co-responsable peut opposer à la victime la transaction qu’elle a conclue avec
un autre responsable ?
L’article 2051 énonce que « la transaction faite par l’un des intéressés ne lie point les autres, et ne peut être
opposée par eux ».
Cela rappelle l’effet relatif des contrats (article 1199) et l’effet relatif de la chose jugée (qu’entre les mêmes parties).
La question s’est posée, avant l’ordonnance de 2016 de savoir si cet effet relatif peut interdire d’opposer à un tiers ou que
le tiers oppose à l’une des parties les termes de la transaction ?
La réponse de la Cour de cassation est positive. La jurisprudence a été codifiée dans l’article 1200 du code civil « les
tiers doivent respecter la situation juridique créée par les contrats. Ils peuvent s’en prévaloir pour apporter la
preuve d’un fait ».
Le jugement, même rendu entre des parties différentes, peut être opposé à ou par un tiers à titre de preuve. L’ordonnance
de 2016 a voulu mettre un article pour atténuer cela : effet relatif atténuer par la preuve. Mais cela n’a pas été fait.
Avis du professeur : cela aurait dû être fait.
A ce jour, la commission de réforme n’a pas voulu travailler sur la transaction donc il n’y a pas de texte.
Mais le juge n’a pas besoin de texte. Il a un pouvoir créateur. C’est pourquoi la Cour de cassation a affirmé cela, dans des
arrêts récents (2018). C’était un arrêt relatif à un accident de cheval, et la victime veut obtenir la réparation intégrale (se
faire payer deux fois). La Cour de cassation estime que les autres responsables peuvent opposer la transaction
alors qu’ils n’y sont pas partis.

Conclusion générale
Au fond, nous n’avons fait, cette année, qu’approfondir et illustrer le cours de 1ère année. L’essentiel du droit des
contrats spéciaux repose sur la qualification au regard du choix des parties.
D’autant plus, qu’à chaque occasion elles déboucheront sur un régime particulier.
Tant que les deux écueils provenant des ordres juridiques européens ne submergent pas le droit des contrats spéciaux :
1. Contrôle de proportionnalité
2. La suppression des qualifications de contrats spéciaux
Le risque que nous avons c’est l’affaiblissement des contrats spéciaux et des droits civils nationaux au profit d’une
simplification extrême du droit des contrats fondu dans une sorte de théorie générale des contrats internationale.
C’est pour cela que la commission de réforme a voulu lutter. Si ce projet avait une utilité majeure, c’est son symbole
politique.
Un droit aussi technique peut être très politique. Ce projet est une réponse pour montrer que le droit français continue
cette tradition pluridisciplinaire au profit de la jurisprudence.

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