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NOTEBOOK

Droit du travail et RH

Missbah HAÏDARA
=>
ISD
Droit du travail et RH. Relations individuelles
Fiches pratiques

FICHE 1 : QU’EST-CE QU’UN CONTRAT DE TRAVAIL ?

En l’absence de définition légale, la jurisprudence a affiné la notion de contrat de travail pour


en dégager les critères permettant sa qualification. Les enjeux sont de taille puisque la
qualification de contrat de travail permettra au travailleur d’accéder à l’ensemble des
avantages attachés au statut de salarié. On peut citer par exemple la protection sociale,
l’indemnisation des congés payés ou encore la protection contre le licenciement. C’est
pourquoi les employeurs peuvent être tentés de se soustraire aux contraintes liées à l’existence
d’un contrat de travail en contestant cette qualification. Ils évitent ainsi le respect des règles
relatives au licenciement, le versement de charges sociales ou encore de tenir compte des
seuils d’effectif concernant la représentation du personnel.

Le juge n’étant pas lié par la qualification des parties, le travailleur pourra obtenir la
requalification de son contrat en contrat de travail sous plusieurs conditions, lesquelles feront
l’objet de cette fiche. Il appartient au travailleur qui invoque un contrat d’en apporter la
preuve, à défaut d’apparence contraire ou de présomption légale.

La jurisprudence définit le contrat de travail comme la convention par laquelle une


personne s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre sous la
subordination de laquelle elle se place moyennant une rémunération : Cass. soc. 22
juillet 1954.

En d’autres termes, le contrat de travail se définit par 3 critères cumulatifs :

– une prestation de travail,


– une rémunération,
– un lien de subordination (critère déterminant qui permet de distinguer le
contrat de travail des autres contrats instaurant une relation de travail par exemple les
travailleurs en free-lance).

1. Une prestation de travail

Ce premier critère ne pose aucune difficulté et sera, la plupart du temps, le plus facile à
caractériser. En effet, toute relation de travail suppose qu’un travail soit effectivement réalisé.
Différenceprestation de Travail/prestation de service

4 Whe prestation de Travail concerne un salarie et


une

↳ la rémunérato estun salaire sur lequel on paiera des

cotisations

prestation de service concerne un client.

↳ donne lieu àun facture sur laquelle il


y aura TVA

fien de subo bien =

hiérarchique

-> Donner desordres, des directives, des consignes de travail


-> fondéà
Il est contrôler l'exécution au travail

-> Pouvoir de sanction

La qualification de contrat
de travail aura un impact.
4 donne des droits au obligations
salarieet pour l'employeur.

uberisato:contourner protection des Salariés


les
exigences de

en recourant
auxauto entrepreneurs.

de Travail
contrat =

salaire minimum

-conges payés

-Application d'une convention collective

-Heures sup

-Protection sociale

-Procedure de licenciement indemnités.


+

Dans le cas Uber it -> indemnitéde travail dissimulé

-indemnitéforfétaire de 6 mois de salaire


Acritères d'anciennetedes indemnités

ADélaide prescription en fonction de la nature au


litige

~ a cances

contrat
de travail=4clauses principales a identification des deux

parties
-Durée au contrat

Objetde la prestation
-

-Rémunération

3 cas de recours amcDD:- remplacer le personnel absent


sucroit d'activité
temporaire
-

-activités saisonières
Toutefois, lorsque la prestation de travail n’est pas accomplie dans les conditions normales de
travail, soit parce qu’il s’agit d’évaluer les aptitudes du travailleur avant son embauche (Cass.
soc. 24 octobre 2001), soit parce qu’il s’agit d’un travail réalisé dans le cadre d’une formation
(Cass. soc. 17 octobre 2000), il n’est pas permis de retenir la qualification de contrat de
travail.

2. Une rémunération

Il suffit que la prestation de travail soit réalisée à titre onéreux ce qui n’implique pas
forcément le versement d’un salaire.

En effet, d’après l’arrêt Labbane du 19 décembre 2000, l’absence de versement d’une


rémunération par l’employeur au salarié n’empêche pas la qualification du contrat en contrat
de travail lorsque la prestation de travail est réalisée à titre onéreux. En l’espèce, il s’agissait
d’un chauffeur de taxi qui percevait le prix de ses courses et reversait un loyer à son
employeur.

Par ailleurs, peu importe la forme de la rémunération (Cass. soc. 3 août 1942).

3. Le lien de subordination : critère déterminant

Le lien de subordination est le critère déterminant qui permet de distinguer le contrat de


travail des autres contrats instaurant une relation de travail (ex. : travailleur en free-lance).

En effet, la prestation de travail et la rémunération sont des éléments que l’on rencontre dans
tous les contrats à titre onéreux, synallagmatiques à exécutions successives. Il en va autrement
du lien de subordination, lequel est caractéristique du contrat de travail.

Comme pour le contrat de travail, le lien de subordination n’a pas été défini par le législateur.
C’est la jurisprudence qui est venue dégager, encore une fois, plusieurs critères permettant de
le caractériser.

D’après la Cour de cassation, le lien de subordination est « caractérisé par l’exécution


d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres, d’en
contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements » : Cass. soc. 6 juillet 1931 (arrêt
Bardou) ; Cass. Soc. 13 novembre 1996.

Solution confirmée par l’arrêt Société Générale du 13 novembre 1996. La définition du lien
de subordination dégagée par l’arrêt est la suivante :

« le lien de subordination se caractérise par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un
employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler
l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. »
En d’autres termes, le lien de subordination est caractérisé par la réunion de trois pouvoirs
entre les mains de l’employeur :

– un pouvoir de direction,
– un pouvoir de contrôle,
– un pouvoir disciplinaire (pouvoir de sanction).

Pour caractériser l’existence de ces trois critères, les juges ont recours à la méthode du
faisceau d’indices.

La subordination résultera pour eux de l’existence d’un ensemble de contraintes par


exemple la fixation d’horaires, du lieu de travail, l’existence de directives ou encore
l’obligation pour le travailleur de rendre des comptes. La fourniture au travailleur des
éléments nécessaires à l’accomplissement de sa prestation permettra également de conclure à
l’existence d’un lien de subordination (ex. : fourniture de matériel ou matière première :
s’il est indispensable à la réalisation de la tâche à accomplir).

Dans la décision du 13 novembre 1996, la Cour de cassation souligne que le travail au sein
d’un service organisé n’est pas le critère du contrat de travail, mais seulement un indice du
seul critère déterminant du contrat de travail à savoir le lien de subordination.

4. Contrat de travail et cas Uber, le Cab ou encore Deliveroo

Actualité :
Soc. 4 mars 2020, n° 19-13.316 : Aff. Uber france, société par actions simplifiée
unipersonnelle ; et autre(s) : lien de subordination : le lien de subordination est caractérisé
par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des
ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son
subordonné. Peut constituer un indice de subordination le travail au sein d’un service organisé
lorsque l’employeur en détermine unilatéralement les conditions d’exécution. Justifie
légalement sa décision une cour d’appel qui, pour qualifier de contrat de travail la relation
entre un chauffeur VTC et la société utilisant une plate-forme numérique et une application
afin de mettre en relation des clients et des chauffeurs exerçant sous le statut de travailleur
indépendant, retient :
1°) que ce chauffeur a intégré un service de prestation de transport créé et entièrement
organisé par cette société, service qui n’existe que grâce à cette plate-forme, à travers
l’utilisation duquel il ne constitue aucune clientèle propre, ne fixe pas librement ses tarifs ni
les conditions d’exercice de sa prestation de transport,
2°) que le chauffeur se voit imposer un itinéraire particulier dont il n’a pas le libre choix et
pour lequel des corrections tarifaires sont appliquées si le chauffeur ne suit pas cet itinéraire,
3°) que la destination finale de la course n’est parfois pas connue du chauffeur, lequel ne peut
réellement choisir librement, comme le ferait un chauffeur indépendant, la course qui lui
convient ou non,
4°) que la société a la faculté de déconnecter temporairement le chauffeur de son application à
partir de trois refus de courses et que le chauffeur peut perdre l’accès à son compte en cas de
dépassement d’un taux d’annulation de commandes ou de signalements de « comportements
problématiques », et déduit de l’ensemble de ces éléments l’exécution d’un travail sous
l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en
contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements et que, dès lors, le statut de
travailleur indépendant du chauffeur était fictif.

Récemment, plusieurs actions en justice ont été intentées contre la société Uber. D’une part,
plusieurs chauffeurs Uber ont intenté une action en requalification de leur contrat Uber en
contrat de travail, ces derniers estimant être des salariés de cette entreprise, d’autre part,
l’URSSAF a introduit une action à la rentrée 2015 afin de faire reconnaître les contrats des
chauffeurs Uber en CDI. Aux États-Unis, des chauffeurs Uber ont intenté une class action en
requalification de leur contrat en contrat de travail et la société Uber a versé une transaction
de 100 millions de dollars pour éviter toute condamnation.

Dans le cadre des contrats qui lient les chauffeurs à Uber, certains indices permettraient de
soutenir qu’il existe un lien de subordination. En effet, chez Uber, il existe un système de
notation des chauffeurs. Lorsque la note est jugée trop basse, les chauffeurs Uber reçoivent un
mail de rappel à l’ordre, qui pourrait s’apparenter à une sanction disciplinaire. Uber a
également la possibilité d’écarter certains chauffeurs ayant une note jugée trop basse ou si la
société Uber estime que ces chauffeurs ne réalisent pas suffisamment de courses. Ces mesures
pourraient se rapprocher d’une procédure de licenciement que les chauffeurs auraient la
possibilité de contester. Par ailleurs, les chauffeurs Uber ne choisissent pas librement les tarifs
pratiqués pour leur prestation, ces tarifs étant fixés par la société Uber. Or, la liberté
d’entreprise, du commerce et de l’industrie voudrait que tout indépendant ait la possibilité de
fixer lui-même le montant de ses prestations. De plus, Uber applique automatiquement une
majoration tarifaire lors des périodes de forte demande, ce qui incite les chauffeurs à se
connecter sur la plate-forme. Ce type de mécanisme pourrait peut-être s’apparenter à
l’application d’une prime exceptionnelle versée aux chauffeurs.

Pour certaines entreprises de livraison de repas, comme Deliveroo, les livreurs ont également
un statut d’indépendant. Toutefois, la question de l’existence d’un lien de subordination se
pose au vu des indices suivants : obligation de porter un uniforme Deliveroo, la société
impose que le livreur travaille 3 jours par semaine, y compris le week-end, les livreurs
doivent effectuer leur prestation dans un délai imposé par Deliveroo…).
Par un arrêt rendu le 28 novembre 2018, la Chambre sociale de la Cour de cassation a statué
pour la première fois sur la qualification du contrat liant un livreur à une plate-forme
numérique.
Pour mémoire et aux termes de l’article L.111-7 I du Code de la consommation, est qualifiée
d’opérateur de plate-forme en ligne toute personne physique ou morale proposant, à titre
professionnel, de manière rémunérée ou non, un service de communication au public reposant
sur (...) la mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente d’un bien, de la fourniture
d’un service ou de l’échange ou du partage d’un contenu, d’un bien ou d’un service.
En l’espèce, la société Take eat easy utilisait une plate-forme numérique ainsi qu’une
application dans le but de mettre en relation des restaurateurs partenaires, des clients passant
commande de repas par le truchement de la plate-forme et des livreurs à vélo exerçant leur
activité sous un statut d’indépendant.
Un coursier a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de requalification de la relation
contractuelle en contrat de travail.
Dans un premier temps, le conseil de prud’hommes puis la cour d’appel s’étaient déclarés
incompétents. Par suite, la liquidation judiciaire de la société Take it easy avait été prononcée
et le liquidateur judiciaire avait refusé d’inscrire au passif de la liquidation les demandes du
coursier en paiement des courses réalisées.
La Chambre sociale de la Cour de cassation devait donc se prononcer sur l’existence d’un lien
de subordination entre un livreur et une plate-forme numérique.
Aux termes de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, le législateur a esquissé une responsabilité
sociétale des plates-formes numériques en insérant les articles L.7341-1 à L.7341-6 dans le
Code du travail prévoyant des garanties minimales pour protéger cette nouvelle catégorie de
travailleurs.
En revanche, le législateur ne s’était pas prononcé sur leur statut juridique et n’avait pas
édicté de présomption de non-salariat.
Dans l’arrêt susvisé, après avoir relevé l’existence d’un système de bonus et de malus
évocateur « de prime abord (...) du pouvoir de sanction que peut mobiliser un employeur », la
cour d’appel avait rejeté la demande de requalification du contrat aux motifs que le coursier
n’était lié à la plate-forme numérique par aucun lien d’exclusivité ou de non-concurrence et
qu’il restait libre chaque semaine de déterminer lui-même les plages horaires au cours
desquelles il souhaitait travailler ou de n’en sélectionner aucune s’il ne souhaitait pas
travailler.
Ce raisonnement est censuré : dès lors qu’ils constataient, d’une part, que l’application
était dotée d’un système de géolocalisation permettant le suivi en temps réel par la
société de la position du coursier et la comptabilisation du nombre total de kilomètres
parcourus, de sorte que le rôle de la plate-forme ne se limitait pas à la mise en relation
du restaurateur, du client et du coursier, et, d’autre part, que la société disposait d’un
pouvoir de sanction à l’égard du coursier, constatations dont il résultait l’existence d’un
pouvoir de direction et de contrôle de l’exécution de la prestation du livreur
caractérisant un lien de subordination, les juges du fond ne pouvaient écarter la
qualification de contrat de travail.

La télévision française des 15 dernières années a été particulièrement marquée par


l’émergence de nombreux programmes de téléréalité en France.

Très vite s’est posée la question du statut des candidats de ces téléréalités.

La jurisprudence a apporté de nombreuses précisions sur cette problématique.

– les arrêts « îles de la tentation »

Cass. soc. 3 juin 2009 ; Cass. soc. 4 avril 2012 ; Cass. soc. 24 avril 2013.

Par un arrêt rendu le 3 juin 2009, la Chambre sociale de la Cour de cassation statue pour la
première fois sur la qualification du contrat liant le participant au producteur de l’un des types
de programmes de « télé- réalité ».
Intitulée « L’île de la tentation », l’émission en cause répondait au concept suivant : « quatre
couples non mariés et non pacsés, sans enfant, testent leurs sentiments réciproques lors d’un
séjour d’une durée de 12 jours sur une île exotique, séjour pendant lequel ils sont filmés dans
leur quotidien, notamment pendant les activités (plongée, équitation, ski nautique, voile, etc.)
qu’ils partagent avec des célibataires de sexe opposé. À l’issue de ce séjour, les participants
font le point de leurs sentiments envers leur partenaire. Il n’y a ni gagnant ni prix ».
Trois des participants de la saison 2003 ont, après la diffusion durant l’été 2003 des épisodes
de la série, saisi la juridiction prud’homale d’une demande de requalification du « règlement
participant » qu’ils avaient signé, en contrat de travail.
Le conseil de prud’hommes, puis la cour d’appel ont accueilli cette demande.

Pour critiquer cette décision, la société de production invoquait les clauses des documents
signés par les participants et soutenait qu’aucun des éléments constitutifs du contrat de travail
n’était caractérisé : ni la prestation de travail, ni le lien de subordination, ni la rémunération.
Le Code du travail ne donne pas de définition du contrat de travail. Il appartient au juge, en
cas de litige sur ce point, de rechercher si les critères du contrat de travail sont réunis.
Répondant à l’argument tiré de la volonté des participants qui, dans l’une des clauses du
document signé, garantissaient « participer au programme à des fins personnelles et non à des
fins professionnelles », la Chambre sociale rappelle que « l’existence d’une relation de
travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles
ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée
l’activité des travailleurs », ce principe résultant d’un arrêt de l’Assemblée plénière de la
Cour de cassation du 4 mars 1983.
Analysant la situation concrète et les conditions du tournage de la saison 3 de L’île de la
tentation, la Chambre sociale relève que les participants avaient l’obligation de prendre
part aux différentes activités et réunions, qu’ils devaient suivre les règles du programme
définies unilatéralement par le producteur, qu’ils étaient orientés dans l’analyse de leur
conduite, que certaines scènes étaient répétées pour valoriser des moments essentiels,
que les heures de réveil et de sommeil étaient fixées par la production, que le règlement
leur imposait une disponibilité permanente, avec interdiction de sortir du site et de
communiquer avec l’extérieur, et stipulait que toute infraction aux obligations
contractuelles pourrait être sanctionnée par le renvoi, et en déduit qu’est ainsi mise en
lumière l’existence d’un lien de subordination, caractérisé par le pouvoir de l’employeur « 
de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les
manquements du subordonné ».
N’ayant pas retenu, comme l’y invitait la société de production, l’argument selon lequel
l’activité des participants, limitée à l’exposition de leur personne et de l’intimité de leur vie
privée sous l’œil des caméras ainsi qu’à l’expression de leurs sentiments, ne pouvait
constituer un travail, la Chambre sociale considère que la prestation consistant pour les
participants, pendant un temps et dans un lieu sans rapport avec le déroulement
habituel de leur vie personnelle, à prendre part à des activités imposées et à exprimer
des réactions attendues, distingue une telle activité du seul enregistrement de leur vie
quotidienne. La Chambre sociale sur avis non conforme de l’avocat général approuve par
voie de conséquence la cour d’appel d’avoir considéré que les participants étaient liés par un
contrat de travail à la société de production.
L’apport de cet arrêt réside dans la confirmation que le lien de subordination constitue le « 
critère décisif » du contrat de travail et que dès lors qu’elle est exécutée, non pas à titre
d’activité privée, mais dans un lien de subordination, pour le compte et dans l’intérêt d’un
tiers en vue de la production d’un bien ayant une valeur économique, l’activité, quelle qu’elle
soit, peu importe qu’elle soit ludique ou exempte de pénibilité, est une prestation de travail
soumise au droit du travail.
La Cour de cassation vient confirmer sa position dans un nouvel arrêt du 4 avril 2012, arrêt
Îles de la tentation II.
Pour retenir l’existence d’un lien de subordination et donc d’un contrat de travail, elle a pris
en compte les éléments suivants :
– l’existence d’une « bible » prévoyant le déroulement des journées,
– la succession d’activités filmées imposées, de mises en scène dûment répétées, d’interviews
dirigées de telle sorte que l’interviewé était conduit à dire ce qui était attendu par la
production,
– le choix des vêtements par la production,
– des horaires imposés allant jusqu’à 20 heures par jour, l’obligation de vivre sur le site et
l’impossibilité de se livrer à des occupations personnelles,
– l’instauration de sanctions, notamment pécuniaires en cas de départ en cours de tournage,
soit, en définitive, l’obligation de suivre les activités prévues et organisées par la société de
production,
– leurs passeports et leurs téléphones leur avaient été retirés.

La Cour de cassation a ainsi jugé que « la prestation des participants à l’émission avait pour
finalité la production d’un bien ayant valeur économique, la cour d’appel, qui a caractérisé
l’existence d’une prestation de travail exécuté sous la subordination de la société TF1
production, et ayant pour objet la production d’une "série télévisée", prestation consistant
pour les participants, pendant un temps et dans un lieu sans rapport avec le déroulement
habituel de leur vie personnelle, à prendre part à des activités imposées et à exprimer des
réactions attendues, ce qui la distingue du seul enregistrement de leur vie quotidienne ».

Elle a de nouveau confirmé sa position dans un arrêt du 24 avril 2013 à propos de la même
émission de téléréalité.
Elle rappelle d’abord que l’application du droit du travail ne dépend ni de la volonté des
parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention. Un rappel qui est donc
évident, mais nécessaire, car il faut le souligner à nouveau, le droit du travail est un droit
protecteur non seulement pour les salariés, mais aussi pour les employeurs. Par conséquent il
doit s’imposer aux parties qui ne peuvent y déroger par contrat.
Puis la Chambre sociale, en reprenant la méthode du faisceau d’indices, caractérise le lien de
subordination comme elle avait fait dans l’arrêt Île de la tentation de 2009 : « attendu
qu’ayant constaté qu’il existait entre les membres de l’équipe de production et les participants
un lien de subordination caractérisé par l’existence d’une « bible » prévoyant le déroulement
des journées et la succession d’activités filmées imposées, de mises en scène dûment répétées,
d’interviews dirigées de telle sorte que l’interviewé était conduit à dire ce qui était attendu par
la production, que ce lien de subordination se manifestait encore par le choix des vêtements
par la production, des horaires imposés allant jusqu’à 20 heures par jour, l’obligation de vivre
sur le site et l’impossibilité de se livrer à des occupations personnels, l’instauration de
sanctions, notamment pécuniaires en cas de départ en cours de tournage, soit, en définitive,
l’obligation de suivre les activités prévues et organisées par la société de production, que les
participants se trouvaient dans un lien de dépendance à l’égard de la société, dès lors,
séjournant à l’étranger, que leurs passeports et leurs téléphones leur avaient été retirés, que la
prestation des participants à l’émission avait pour finalité la production d’un bien ayant une
valeur économique » la cour d’appel, a donc pu caractériser l’existence d’une prestation de
travail exécuté sous la subordination de la société TF1 production.
Cet arrêt est donc parfaitement cohérent avec la jurisprudence adoptée depuis 2009 voire
même depuis l’arrêt Labanne, et vient en même temps confirmer la position de la Chambre
sociale face aux critiques auxquelles elle a pu faire face. On peut donc le rappeler, le lien de
subordination est le critère essentiel pour qualifier l’existence d’un contrat de travail.

5. Conséquences de la requalification en contrat de travail

Actualité : Soc. 2 juin 2021, n° 19-18.080 requalification d’un contrat à durée déterminée :
la requalification d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte
que sur le terme du contrat et laisse inchangées les autres stipulations contractuelles. Doit être
cassé l’arrêt qui, pour fixer une rémunération mensuelle de référence et, par suite, les sommes
dues au salarié en conséquence de la requalification de la relation de travail en un contrat à
durée indéterminée, relève que l’examen des bulletins de paie montre qu’à compter du mois
de janvier 2013 l’employeur a baissé le nombre des jours de travail, et cela jusqu’au 31 mai
2015, alors que la détermination des jours de travail, qui résultait de l’accord des parties lors
de la conclusion de chacun des contrats à durée déterminée, n’était pas affectée par leur
requalification en un contrat à durée indéterminée.

– Compétence du conseil des prud’hommes

L’existence d’un contrat de travail entre les parties constitue une condition première et
essentielle à la compétence prud’homale. Le conseil de prud’hommes ne peut se prononcer
que sur les différends nés à l’occasion du contrat de travail opposant les salariés à leurs
employeurs ou sur les différends entre les salariés. Ainsi, le conseil de prud’hommes est
compétent pour connaître des faits imputés à un salarié et qui se rattachent, par un lien direct,
o
à l’exécution de son contrat de travail (Cass. soc., 29 avr. 2003, n 01-14.540).

– Le paiement d’une indemnité au titre du travail dissimulé

Dans le cas où le chauffeur voit son contrat requalifié en CDI et que ce contrat a été rompu, il
peut demander une indemnité forfaitaire de 6 mois de salaire (articles L. 8221-5 et L. 8223-1
du Code du travail).

– L’application du statut du salarié

Le travailleur qui aura vu son contrat requalifié en CDI pourra se prévaloir de :

Congés payés : 2,5 jours ouvrables acquis par mois ;

SMIC : le salarié a le droit à une rémunération au moins égale au SMIC et à un rappel de


salaire sur la base du SMIC pour la période travaillée ;
Mutuelle d’entreprise : elle doit être obligatoirement proposée par l’employeur depuis le
er
1 janvier 2016 ;

Visite médicale à la médecine du travail : visites médicales d’embauche et périodiques ;


En cas d’arrêt maladie : le salarié pourra prétendre à des indemnités journalières de
sécurité sociale (versées par la CPAM) et à un complément de salaire (s’il remplit les
différentes conditions d’octroi) ;

En cas d’accidents de trajet, accidents de travail et maladie professionnelle : le salarié


pourra bénéficier de tous les droits applicables en cas de survenance d’un de ces
événements : (obligation de déclaration sous 48 h par l’employeur, prise en charge des
frais de soin, visite de reprise à la médecine du travail, reconnaissance éventuelle de la
faute inexcusable de l'employeur…) ;

Respect des durées maximales de travail quotidiennes et hebdomadaires ;

Respect du droit au repos quotidien et hebdomadaire, etc.

– La possibilité de contester la rupture du contrat

Dans le cas où le travailleur voit son contrat requalifié en CDI et que ce contrat a été rompu
par l’entreprise, ce dernier a la possibilité de contester cette rupture qui s’analyse en un
licenciement. Le salarié pourra alors réclamer les indemnités suivantes (sous réserve qu’il
remplisse les conditions d’octroi) :
– Une indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– Une indemnité au titre du non-respect de la procédure de licenciement,
– Une indemnité de préavis,
– Une indemnité de licenciement légale ou conventionnelle,
– Une indemnité compensatrice de congés payés.

6. Actions en justice concernant le contrat de travail : attention aux délais de


prescription

Actualités jurisprudentielles :
30 juin 2021 soc. Action en paiement d’un rappel de salaire, durée de la prescription,
nature de la créance, prescription triennale, convention de forfait en jours : la durée de
la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, l’action en
paiement d’un rappel de salaire fondée sur l’invalidité d’une convention de forfait en
jours est soumise à la prescription triennale prévue par l’article l. 3245-1 du code du
travail.
(société polyclinique saint françois-saint antoine, pourvoi n° 18-23.932)

30 juin 2021 soc. Préjudice résultant d’une discrimination, action en réparation,


prescription quinquennale : au visa de l’article L. 1134-5 du code du travail, l’action en
réparation du préjudice résultant d’une discrimination se prescrit par cinq ans à compter de la
révélation de la discrimination. Les dommages-intérêts réparent l’entier préjudice résultant de
la discrimination, pendant toute sa durée.
(société le crédit lyonnais, pourvoi n° 19-14.543)

30 juin 2021 soc. Contrat de travail, exécution, action en justice, prescription biennale,
contrat de mission, action en requalification, prescription, point de départ : selon
l’article L. 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de
l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, toute action portant sur l’exécution du
contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou
aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.
le délai de prescription d’une action en requalification d’un contrat de mission à l’égard de
l’entreprise utilisatrice en contrat à durée indéterminée fondée sur le motif du recours au
contrat de mission énoncé au contrat a pour point de départ le terme du contrat ou, en cas de
succession de contrats de mission, le terme du dernier contrat. le salarié est en droit, lorsque la
demande en requalification est reconnue fondée, de faire valoir auprès de l’entreprise
utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet
au premier jour de sa mission.
(société xpo supply chain france, pourvoi n° 19-16.655)

30 juin 2021 soc. Principe d’égalité de traitement, violation, durée de la prescription,


nature de la créance, demande de rappel de salaire, prescription triennale : lorsque le
salarié invoque une atteinte au principe d’égalité de traitement, la durée de la prescription est
déterminée par la nature de la créance objet de sa demande.
Lorsque la demande de rappel de salaire est fondée non pas sur une discrimination mais sur
une atteinte au principe d’égalité de traitement, cette demande relève de la prescription
triennale.
(société air corsica, pourvoi n° 20-12.960 et 20-12.962)

30 juin 2021 soc. Contrat de travail à temps partiel, requalification en contrat à temps
plein, demande de rappel de salaire, prescription triennale : au visa de l’article L. 1471-1
du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du
22 septembre 2017, et l’article l. 3245-1 dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14
juin 2013, toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à
compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant
d’exercer son droit. L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à
compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de
l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à
compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des
trois années précédant la rupture du contrat. La durée de la prescription étant déterminée par
la nature de la créance invoquée, la demande de rappel de salaire fondée sur la requalification
d’un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet est soumise à la
prescription triennale de l’article l. 3245-1.
(société a2 propreté, pourvoi n° 19-10.161)

Contrat à durée indéterminée (CDI) avec période d'essai (exemple standard)


(sur papier à en-tête de l’entreprise)

Entre les soussignés :

- la société ...... (dénomination sociale)


Adresse ......
Immatriculation au RCS ......
Numéro URSSAF ......

Représentée par M. ......


agissant en qualité de ......

d’une part,

et :

- M. ......
demeurant à ......
n° de Sécurité sociale : ……
de nationalité ......
libre de tout engagement,

d'autre part.
Il a été convenu ce qui suit :

Article 1 – Engagement
Sous réserve des résultats de la visite médicale d’embauche décidant de l’aptitude de M. ……
au poste proposé, M. ...... est engagé par la société ...... en qualité de ...... (qualification ou
titre).
Ce contrat prend effet à compter du ...... (date) à ...... (heures).
La déclaration préalable à l’embauche de M. ...... a été remise à l’URSSAF de …… (préciser
le nom de la ville).

Article 2 - Convention collective


En application de la Convention collective nationale de ...... (et, le cas échéant, de la
convention collective départementale et ou régionale), M. ...... relèvera du coefficient ......,
position …… (à préciser), niveau …… (à préciser).
L’ensemble des dispositions de la convention sus-indiquée s’applique au présent contrat et
ceci tant que ces dernières resteront opposables de droit à l’entreprise.
Un exemplaire de la présente convention collective est à la disposition de M. ...... au sein de
l’établissement (préciser le service ou le bureau).

Article 3 - Période d’essai


Le présent contrat est conclu pour une durée indéterminée.
Il ne deviendra définitif qu’à l’expiration d’une période d’essai de ...... (jours ou mois).
Il est expressément convenu que la période d’essai s’entend d’un travail effectif.
Si pendant l’exécution de ladite période d’essai, le contrat de travail de M. ...... devait être
suspendu pour quelque motif que ce soit, cette période d’essai serait prolongée d’une durée
identique à la période de suspension.
Jusqu’à cette date, il sera possible à M. ......, comme à l’entreprise, de rompre le contrat de
travail sans indemnité.
(Un délai de prévenance devra alors être respecté par les parties [C. trav., art. L. 1221-25 et
L. 1221-26]).
Si le renouvellement est prévu par la convention collective :
Conformément aux dispositions de la convention collective, cet essai pourra être renouvelé
dans les conditions suivantes : ......
Article 4 - Fonctions
M. ...... en sa qualité de …… (poste occupé) sera plus particulièrement chargé de ......
(préciser).
Cette liste de tâches est non exhaustive et pourra être complétée en fonction des besoins de
l’entreprise.

Article 5 - Lieu de travail


M. ...... exercera ses fonctions sur le site de …… (adresse de l’établissement ou de
l’entreprise). En fonction des nécessités de service, le lieu de travail de M. ...... pourra être
modifié de manière temporaire ou définitive à l’intérieur du secteur géographique
d’implantation de la société.

Article 6 - Horaire de travail


M. ...... est assujetti à l’horaire de travail de l’établissement, soit un horaire de ...... et une
durée hebdomadaire de ...... heures.

Variante
Dans le cadre du présent contrat, M. …… bénéficie d’un horaire individualisé selon les
modalités suivantes ...... (préciser)

La durée hebdomadaire du travail sera de ...... h ......

M. ...... pourra être amené à effectuer des heures supplémentaires à la demande de


la Direction qui seront rémunérées conformément aux dispositions légales et conventionnelles
en vigueur.

Article 7 - Rémunération
La rémunération mensuelle brute sera de ...... euros pour un horaire mensualisé de ...... heures
(vérifier l’adéquation entre le coefficient hiérarchique et les minima conventionnels).
Pour toute heure effectuée au-delà de ......, une majoration sera accordée et calculée
conformément aux dispositions légales et conventionnelles en vigueur.

Article 8 – Discipline et Sécurité


M. ...... reconnaît avoir pris connaissance du règlement intérieur en vigueur dans
l’établissement. Tout manquement au présent règlement pourrait donner lieu à des poursuites
disciplinaires et à un éventuel licenciement pour faute.
M. ...... exercera ses fonctions sous l’autorité et dans le cadre des instructions données par
M. ...... ou de toute personne habilitée à cet effet.
M. ...... s’engage à observer toutes les instructions et consignes particulières de travail qui lui
seront données et à respecter une stricte obligation de discrétion sur tout ce qui concerne
l’activité de l’entreprise.

Article 9 - Congés payés


M. ...... bénéficiera des droits à congés payés conformément aux dispositions légales (ou
conventionnelles) en vigueur.

Article 10 - Avantages sociaux


M. ......, relevant de la catégorie professionnelle des …… (préciser employés, agents de
maîtrise, cadres), sera affilié dès son entrée au sein de la société à :
- ...... (organisme de retraite) ;
- ...... (organisme de prévoyance).

Article 11 - Rupture du contrat (hors essai)


Le présent contrat pourra être rompu :
- à l’initiative du salarié ;
- à l’initiative de l'employeur.
Dans l’un ou l’autre cas, un préavis devra être respecté conformément aux dispositions
légales et conventionnelles en vigueur.
La rupture du contrat par l’employeur, justifiée par une cause réelle et sérieuse, entraînera le
versement d’une indemnité de licenciement si le salarié a au moins 1 an d’ancienneté. Cette
éventuelle rupture entraînera le versement d’une indemnité de licenciement calculée en
fonction du barème le plus avantageux résultant soit de la loi soit de la convention collective.
Cette indemnité n’est pas due en cas de faute grave ou lourde ou en cas de force majeure.
Article 12 – Obligations professionnelles
M. ...... s’engage à informer la société de tout changement le concernant, notamment en cas de
changement de domicile. La nouvelle adresse sera transmise dès que possible au bureau du
personnel.
M. ...... s’engage à déclarer tout accident du travail survenu sur les lieux du travail ou tout
accident survenu sur le trajet dans les 48 heures à l’autorité hiérarchique.
M. …… s’engage à informer sans délai la société de toute absence et de justifier des raisons
de celle-ci dans les 48 heures par tout justificatif utile (certificat médical le cas échéant).
M. …… s’engage à conserver une discrétion absolue sur tous les fichiers et documents
internes à la société pendant toute la durée du présent contrat et après la rupture de celui-ci
quelle que soit la cause.
Fait en double exemplaire à ……, le ......

(Signature des parties précédée de la mention « lu et approuvé »)

Signature du salarié Signature de


l'employeur

Exemple de contrat de travail CDD (exemple standard)


ENTRE :
[Dénomination sociale], société à responsabilité limitée au capital de [Montant du capital en
euros] , inscrite au R.C.S. de [Nom du RCS] sous le numéro [Numéro SIREN], dont le siège
social est situé [Adresse du représentant légal, code postal, ville], représentée par [Prénom du
représentant légal] [Nom du représentant légal] dûment habilité(e),
(ci-après désigné l’« Employeur »)
D’UNE PART,
ET :
[Prénom] [Nom], résidant [Adresse, code postal, ville], de nationalité [nationalité], né(e) le
[date de naissance] à [lieu de naissance],
(ci-après désigné le « Salarié »),
D’AUTRE PART,
(ci-après collectivement désignés les « Parties »),
IL A ETE CONVENU CE QUI SUIT :
Article 1 : ENGAGEMENT ET DUREE DU CONTRAT
Le présent contrat de travail est conclu car l'Employeur souhaite embaucher le Salarié en tant
que [motif du contrat: remplacement d’un salarié, augmentation temporaire de l’activité,
travailleur saisonnier, emploi d’usage]
Le présent contrat est conclu dans le cadre d’un [remplacement d’un salarié, augmentation
temporaire de l’activité, emploi saisonnier, emploi d’usage], l’entreprise exerçant l’activité
suivante : [activité de l'entreprise].
[SI REMPLACEMENT D’UN SALARIE [Motif du remplacement, identité du salarié
remplacé, fonction du salarié remplacé, motif de l’absence]]
[SI AUGMENTATION TEMPORAIRE DE L’ACTIVITE [Motif de la hausse d’activité,
description de la tâche à exécuter]]
[SI CARACTERE SAISONNIER [L’activité de l’entreprise est par nature cyclique pour les
raisons suivantes : [Explication du caractère saisonnier de l'activité]].
[SI EMPLOI D’USAGE [Description de l’activité, description de l’activité]]
Le Salarié est embauché à compter du [date d’embauche] pour [motif du CDD : exemple:
activité saisonnière] afin d’exercer l’activité suivante : [Activité du salarié].
Ce contrat prendra fin automatiquement à l'échéance du terme prévu [date de fin du contrat].
Le présent contrat de travail est soumis aux conditions indiquées ci-après ainsi qu’aux
dispositions légales et réglementaires, en l’absence de convention collective applicable.
Le Salarié déclare être libre à cette date de tout engagement professionnel, de quelque nature
que ce soit.
Toute fausse déclaration à cet égard exposera le Salarié à réparer tout préjudice résultant de
poursuites de la part d’un ancien employeur ou de toute personne à qui le Salarié est lié
contractuellement, ceci en application de l’article L.1237-3 du Code du Travail.
Le présent contrat deviendra définitif sous réserve des résultats de la visite médicale
d’embauche décidant de l’aptitude du Salarié au travail proposé.
Article 2 : STATUT
Le Salarié exercera les fonctions de [titre du salarié], statut
En cette qualité, le Salarié devra notamment réaliser les tâches suivantes : [Fonctions du
salarié].
Le détail des fonctions du Salarié et l'étendue spécifique de ses attributions seront déterminés
et modifiés par l’Employeur en fonction du développement de l'activité et des besoins de
l’Employeur.
Le Salarié rendra compte de ses activités au [Titre du supérieur hiérarchique du salarié] de
l’Employeur, actuellement [Prénom] [Nom], ou à toute autre personne désignée à tout
moment à cet effet qui supervisera et contrôlera ses activités.
Dans le cadre du développement de l’activité de l’Employeur, le Salarié reconnaît et accepte
expressément qu’un changement de supérieur hiérarchique ou de positionnement dans
l’organigramme de l’Employeur ne constituera pas une modification du présent contrat.
Article 3 : PERIODE D'ESSAI
Le présent Contrat deviendra définitif à l'expiration d'une période d'essai de [durée de la
période d’essai] à compter de la date de prise des fonctions. Pendant la période d'essai,
chacune des parties pourra mettre fin au présent Contrat conformément à la loi applicable.
En cas de rupture de la période d’essai, le présent contrat prendra fin après la période de
préavis telle que prévue par les dispositions légales (et le cas échéant, conventionnelles)
applicables.
Article 4 : LIEU DE TRAVAIL ET DEPLACEMENTS PROFESSIONNELS
A titre indicatif, le Salarié exécutera le présent contrat à l’adresse suivante : [Adresse du siège
social, code postal, ville].
Compte tenu de la nature de ses fonctions, le Salarié accepte par la présente, tout changement
de son lieu de travail dans la zone suivante : [Zone d'intervention du salarié].
Dans le cas où, sans motif légitime, le Salarié refuserait d’accepter un tel changement, la
rupture de son contrat de travail pourra être envisagée.
En outre, le Salarié accepte expressément qu’il pourra être amené à effectuer, au titre des
fonctions qui lui seront confiées par l’Employeur, des déplacements tant en France qu’à
l’étranger, pour de courtes ou de longues périodes en-dehors de son lieu de travail.
Article 5 : DURÉE DU TRAVAIL
En sa qualité de cadre dirigeant tel que défini à l’article L. 3111-2 du code du travail, le
Salarié est exclu de la législation applicable au temps de travail. En conséquence, le Salarié
consacrera le temps nécessaire à l’exercice de ses fonctions sans pouvoir prétendre à une
rémunération supplémentaire.
Article 6 : REMUNERATION
En rémunération de ses services, le Salarié percevra une rémunération forfaitaire brute
mensuelle de [rémunération forfaitaire brute en chiffre] euros ([Rémunération mensuelle brute
en lettres] euros).
La rémunération du Salarié sera payable en mensualités égales.
Article 7 : FRAIS PROFESSIONNELS
Les frais professionnels, à savoir les frais de transport et de séjour, qui seront engagés par le
Salarié pour l’exercice normal de ses fonctions et suivant des instructions qui lui auront été
données, seront pris en charge par l’Employeur, sur présentation des justificatifs habituels
dans les conditions actuellement fixées par celui-ci et dont le Salarié a pris connaissance.
Article 8 : CONGES PAYES
Le Salarié bénéficiera des congés payés institués en faveur des salariés de l’Employeur dans
les conditions définies par les dispositions légales.
La période de ces congés sera déterminée par accord entre la Direction et le Salarié, compte
tenu des demandes du Salarié et des nécessités et impératifs de l’Employeur.
Les congés acquis au titre d’une année de référence ne pourront être pris ou reportés au-delà
du terme de l’année de référence suivante qu’avec l’accord écrit de l’Employeur. Les congés
payés seront calculés du 1er juin au 31 mai de l’année suivante. Tout congé non pris pendant
la période légale du fait du Salarié sera définitivement perdu.
Article 9 : MALADIE
En cas de maladie ou d’accident, le Salarié devra faire connaître son immobilisation dès que
possible et au plus tard dans les 24 heures et envoyer dans les 48 heures de la cessation de
travail un certificat médical qui précise la durée de son indisponibilité.
Article 10 : AVANTAGES SOCIAUX
A titre informatif, il est rappelé au Salarié qu’il bénéficie de toutes les prestations sociales
accordées au sein de l’entreprise aux salariés de sa catégorie professionnelle en matière de
régimes de retraite et de prévoyance.
A titre d’information, le Salarié sera affilié aux caisses de retraite complémentaire et de
prévoyance conformément aux dispositions légales, comme suit :
- Retraite complémentaire : [Nom de l'organisme de retraite complémentaire de l'employeur],
[Adresse de l'organisme de retraite complémentaire de l’employeur, code postal, ville]
Les prestations sociales facultatives et supplémentaires ne constituent pas un élément
essentiel du présent Contrat et peuvent être modifiées ou supprimées à tout moment,
notamment concernant l’organisme assureur, les prestations ou les cotisations, par décision
unilatérale de l’Employeur et s’imposeront au Salarié.
Article 11 : SITUATION DU SALARIE
Le Salarié s’engage à faire connaître, sans délai, tout changement qui interviendrait dans sa
situation, concernant notamment son adresse, sa situation de famille, etc.
Article 12 : EXCLUSIVITE ET CONFIDENTIALITE
Le Salarié s'engage pendant la durée du présent Contrat à consacrer à l’Employeur
l’exclusivité de ses services, à porter toute son attention aux affaires de l’Employeur et à
utiliser toutes ses compétences et capacités à promouvoir les intérêts de l’Employeur. Sauf
accord exprès de l’Employeur, le Salarié ne pourra exercer aucune autre activité
professionnelle pour son propre compte ou pour le compte de tiers, même non concurrente
avec les activités de l’Employeur.
Le Salarié reconnaît en outre que ses fonctions au sein de l’Employeur le conduisent à
prendre connaissance, à élaborer, acquérir ou collecter pour l’Employeur des informations ou
des données qui, si elles étaient divulguées, pourraient favoriser les intérêts des concurrents
de l’Employeur, concernant notamment les produits, l’activité ou la situation financière de
l’Employeur, de toute société appartenant au même groupe que l’Employeur ou de leurs
clients (les « Informations Confidentielles »). Le Salarié reconnaît être lié par le secret
professionnel le plus absolu concernant les Informations Confidentielles. Sauf indication
contraire de l’Employeur, le Salarié reconnaît également que toute information concernant
l’Employeur qui n’est pas ouvertement à la disposition du public devra être considérée
comme étant confidentielle.
Le Salarié s'interdit formellement de publier ou d'utiliser pour son compte personnel ou pour
le compte d'une entreprise concurrente l’une quelconque des Informations Confidentielles tant
pendant la durée du présent Contrat qu’après sa résiliation.
Le Salarié s’engage également à prendre toute mesure nécessaire pour empêcher la
publication et la divulgation des Informations Confidentielles à des tiers, notamment par les
personnes qui seraient placées sous son autorité hiérarchique.
L’engagement de confidentialité est valable tant pendant la durée d’exécution du présent
Contrat qu’après sa résiliation, et ce sans limitation de durée.
L’inobservation des engagements d’exclusivité et de confidentialité par le Salarié pourrait être
considérée comme un manquement à ses obligations contractuelles dont l’Employeur pourrait
se prévaloir pour mettre un terme à la relation contractuelle qui le lie avec le Salarié.
En cas de violation par le Salarié de la présente clause d’exclusivité et de confidentialité, le
Salarié devra immédiatement mettre fin aux actes ou faits incriminés sur simple notification
de l’Employeur. De surcroît, toute violation de ces engagements pourrait être sanctionnée par
le paiement d’une indemnité au moins égale à 6 mois du salaire brut moyen perçu par le
Salarié, l’Employeur se réservant le droit de poursuivre le Salarié en paiement de dommages-
intérêts pour le préjudice professionnel, pécuniaire et moral effectivement subi, et de faire
ordonner au Salarié sous astreinte la cessation de ces actes ou faits.
[SI VEHICULE DE FONCTION [Article 13 : VEHICULE DE FONCTION
Pour les besoins du service, l’Employeur mettra à la disposition du Salarié un véhicule de
fonction à compter du [date de la mise à disposition du véhicule].
Les frais suivants, sur présentation de tous justificatifs appropriés et habituels en conformité
avec les pratiques internes de l'entreprise en la matière, seront pris en charge par
l’Employeur :
-les frais d’essence
-les frais d’entretien liés à l’utilisation professionnelle de ce véhicule (révisions, vidanges)
-les frais d’assurance du véhicule
L’Employeur accepte que le Salarié puisse utiliser ce véhicule à titre personnel, en dehors des
périodes de travail sous réserve qu’il supporte les dépenses de carburant correspondant aux
déplacements effectués à titre personnel. Le Salarié reconnaît que l’utilisation à des fins
personnelles de ce véhicule sera qualifiée pour les besoins du calcul de l’impôt et des charges
sociales comme un avantage en nature.
En cas de sinistre ou évènement dont le véhicule ferait l’objet, le Salarié devra informer dans
les 24 heures d’une part l’Employeur et d’autre part la compagnie d’assurance.
Quelle que soit la cause de rupture du présent Contrat, le Salarié s’engage à restituer à
l’Employeur ce véhicule, les clefs et tout autre matériel et accessoire se trouvant dans le
véhicule et appartenant à l’entreprise.]]
Article 14 : PROPRIETE INTELLECTUELLE
Le Salarié reconnaît que les dispositions des articles L. 611-7 et suivants et R 611-1 et
suivants du Code de la Propriété Intellectuelle lui sont applicables.
Article 15 : FIN DE CONTRAT ET RENOUVELLEMENT
Etant conclu pour une durée déterminée, le présent contrat prendra fin automatiquement et
sans formalités à la date qui lui a été assignée ci-dessus à l’article 1. Le Salarié percevra alors
une indemnité de fin de contrat telle que prévue à l’article 16.
Article 16 : INDEMNITE DE FIN DE CONTRAT
A l’expiration du présent Contrat et si les conditions prévues par l’article L. 1243-8 du Code
du travail sont remplies à ce moment-là, le Salarié aura droit à une indemnité de fin de contrat
calculée conformément aux dispositions légales applicables.
Le Salarié reconnaît qu’il ne recevra notamment pas une indemnité de fin de contrat en
application des dispositions légales si il refuse d’accepter un contrat de travail à durée
indéterminée pour occuper le même emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération
au moins équivalente ou si le Salarié poursuit la relation contractuelle avec l’entreprise sous
la forme d’un contrat de travail à durée indéterminée à l’issue du présent contrat.
Article 17 : RUPTURE ANTICIPEE DU CONTRAT DE TRAVAIL
Chacune des deux parties se réserve mutuellement le droit de mettre fin au Contrat
immédiatement en cas de commun accord des Parties, de faute grave ou de force majeure, ou
si le Salarié peut justifier de la conclusion d’un contrat à durée indéterminée.
Dans ce dernier cas, le Salarié devra respecter un délai de préavis dont la durée sera calculée
conformément à l'article L 1243-2 du Code du travail.
Article 18 : LOI APPLICABLE ET COMPETENCE
Le présent contrat est soumis au Droit français et à la compétence des tribunaux français.
Article 19 : PROTECTION DES DONNEES PERSONNELLES
L’Employeur s’engage à n’utiliser les informations personnelles concernant le Salarié qu’à
des fins de bonne administration de ses ressources humaines dans le respect des exigences
légales et réglementaires en vigueur. L’Employeur s’engage également à conserver les
données personnelles du Salarié en conformité avec les règles établies par la Loi n° 78-17 du
6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés (ci-après la « Loi »).
Le Salarié autorise expressément l’Employeur à communiquer, aux entreprises auxquelles il
pourrait sous-traiter certains travaux, les données nécessaires à l’exécution de ceux-ci.
Le Salarié bénéficiera d’un droit d’accès et de rectification des données personnelles le
concernant, conformément aux dispositions de la Loi.
Article 20 : DISPOSITIONS FINALES
Le présent contrat annule et remplace tout autre écrit ou précédent accord verbal entre les
Parties.
Si à un moment quelconque après la date des présentes, une disposition du présent contrat
était déclarée illicite, nulle ou non opposable, elle serait sans effet, mais l’illégalité, nullité ou
inopposabilité de cette disposition n'affectera pas la validité et l'opposabilité des autres
dispositions du présent contrat.
Fait à [Ville], le [date]
En 2 originaux (un pour chaque signataire)

FICHE 2 : LE RECRUTEMENT DU SALARIÉ (problèmes pratiques)

I. LES OBLIGATIONS DE FORME DE L’EMPLOYEUR LORS DE


L’EMBAUCHE

Le recrutement d’un salarié entraîne pour l’employeur certaines formalités vis-à-vis de


l’administration et notamment :

A. La déclaration préalable à l’embauche

L’embauche d’un salarié ne peut intervenir qu’après déclaration nominative accomplie par
l’employeur auprès des organismes de protection sociale désignés à cet effet (URSSAF ou
MSA pour les salariés agricoles), et ce, quelles que soient la durée et la nature du contrat de
travail envisagé. À défaut de déclaration, l’employeur encourt diverses sanctions, notamment
pénales et administratives pour dissimulation d’emploi salarié.

B. Les autres formalités obligatoires

– Inscrire les informations concernant le salarié embauché sur le registre


unique du personnel ;
– S’assurer que l’intéressé possède une autorisation de travail en cours de
validité s’il est étranger.
Embauche enjeuxde =

protection de la vie privee +


lutte contre

la discrimination

Discrimination violation =

au principe d'égalite

si le recruteur se fonde sur des critères non professionnels

D. directe
-

- D. indirecte

-D.
positive v

-D. négative.

4
domaine de discri principale
-
discrimi à l'embauche
-
rémunération
-formato professionnelle
-
evoluto de carrière

cas pratique non

Le contrat
de
peut il
mandat est requalifieen contrat de tro

ouisi bien de subordination.

Principe d'indisponibilitéde la qualificats de contrat

deT+principe réalité le liepar


juge n'est
de
=

pas la

dénomination employée par les parties


·Le conseil de
prucit est-il competent?
Déclaration préalable àl'embauche CDPAE)
4
secue -> URSSAF

cours 34.04
II. LA PROMESSE D’EMBAUCHE

A. La définition

La promesse d’embauche est une offre ferme et définitive adressée par l’employeur au
candidat.

B. Jurisprudence

L’évolution du droit des obligations, résultant de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février


2016, conduit à apprécier différemment, dans les relations de travail, la portée des offres et
promesses de contrat de travail : « l’acte par lequel un employeur propose un engagement
précisant l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction et exprime la volonté de
son auteur d’être lié en cas d’acceptation, constitue une offre de contrat de travail, qui peut
être librement rétractée tant qu’elle n’est pas parvenue à son destinataire ; la rétractation de
l’offre avant l’expiration du délai fixé par son auteur ou, à défaut, l’issue d’un délai
raisonnable, fait obstacle à la conclusion du contrat de travail et engage la responsabilité
extracontractuelle de son auteur (…) » ;

En revanche, la promesse unilatérale de contrat de travail est le contrat par lequel une partie,
le promettant, accorde à l’autre, le bénéficiaire, le droit d’opter pour la conclusion d’un
contrat de travail, dont l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction sont
déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire ; la
révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n’empêche pas la
formation du contrat de travail promis » (Cass. soc. 21 sept. 2017, n° 16-20.103 et 16-20.104,
2 esp.).

III. L’ENTRETIEN D’EMBAUCHE

A. Les questions pouvant valablement être posées par l’employeur au candidat

D’après l’article L1221-6 du Code du travail, les questions doivent avoir un lien direct et
nécessaire avec l’emploi (ce critère joue aussi au cours de l’exécution du contrat de travail
quant à l’obligation ou non du salarié de dévoiler des faits de sa vie privée).

Ainsi, le candidat à l’embauche est tenu de répondre de bonne foi aux seules questions qui ont
un lien direct et nécessaire avec l’emploi. À défaut de lien le salarié peut s’abstenir ou mentir
sans que celui puisse par la suite lui être reproché (articles L1121-1 et L1132-1). Le juge doit
établir si le salarié a été victime d’une discrimination.

Actualité : 22 septembre 2021 Soc. DISCRIMINATION, PREUVE, SALARIE,


DEMANDE DE COMMUNICATION DE PIECES, OFFICE DU JUGE. Il appartient au
juge saisi d'une demande de communication de pièces sur le fondement de l'article 145 du
Code de procédure civile, d'abord, de rechercher si cette communication n'est pas nécessaire à
l'exercice du droit à la preuve de la discrimination alléguée et proportionnée au but poursuivi
et s'il existe ainsi un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de
faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, ensuite, si les éléments dont la
communication est demandée sont de nature à porter atteinte à la vie personnelle d'autres
salariés, de vérifier quelles mesures sont indispensables à l'exercice du droit à la preuve et
proportionnées au but poursuivi, au besoin en cantonnant le périmètre de la production de
pièces sollicitées.
(Société Groupe Canal+, pourvoi n° 19-26.144 [P]

Exemples de questions posées par l’employeur au candidat


➢ nom, prénom, nationalité, date de naissance, adresse téléphone : l’employeur est en
droit de demander au candidat qu’il fournisse son état civil. L’employeur peut
également se renseigner sur la nationalité du salarié, mais il ne pourra pas écarter le
candidat à la procédure de recrutement en raison de sa nationalité en vertu du principe
de non-discrimination (art. L1132-1) ;

Limite : il est impossible pour l’employeur de collecter des informations sur la date d’entrée
en France, date de naturalisation, modalités d’acquisition de la nationalité du salarié :
délibération de la CNIL 21 MARS 2002

➢ formation, expérience professionnelle : l’employeur peut valablement interroger le


candidat sur sa formation et son expérience professionnelle, car cela est en lien direct
et nécessaire avec l’emploi. Il peut demander les diplômes, des attestations de stage ou
encore un certificat de travail, mais pas le dossier scolaire, car celui-ci peut contenir
des éléments de la vie privée sociale et familiale. Seuls les relevés de notes peuvent
être demandés dans les matières qui ont un lien direct avec l’emploi.

Le fait pour un candidat de mentir sur ses compétences (diplôme, expérience pro) lors
d’un entretien d’embauche constitue-t-il une faute justifiant le licenciement du salarié ?
Cass. soc. 17 octobre 1995 : lorsque l’information inexacte à un rôle déterminant dans le
recrutement d’un candidat, les tribunaux condamnent la mauvaise foi de ce dernier.
Limite : Cass. soc. 30 Mars 1999 : toutefois lorsque le mensonge n’a aucune incidence sur les
compétences effectives du salarié et qu’il n’a en rien causé un préjudice à l’employeur, alors
le salarié ne peut être licencié.

➢ « avez-vous subi un test de dépistage HIV ? »


L’employeur n’est pas fondé à prendre en compte l’état de santé du candidat sauf cas
exceptionnel ou un lien direct et nécessaire existe entre l’état de santé et l’emploi offert. Il ne
peut prendre qu’en compte l’aptitude physique du salarié à un poste de travail, laquelle ne
peut être vérifié que par le médecin du travail : les renseignements relatifs à l’état de santé du
candidat à un emploi ne peuvent être confiés qu’au médecin chargé de l’examen médical
d’embauche : Cass. soc. 21 septembre 2005.
Lorsque l’employeur décide que le salarié recruté avec une période d’essai prendra ses
fonctions avant l’accomplissement de cet acte médical, il ne peut se prévaloir d’un prétendu
dol du salarié quant à son état de santé ou de son handicap que ce dernier n’a pas à lui révéler.
➢ Quid des questions relatives aux antécédents judiciaires du salarié ?
Sauf emploi spécifique (ex : employé de banque, car maniement des fonds), l’employeur ne
peut être admis à demander la production du casier judiciaire.

➢ Quid des questions sur la religion du candidat ou encore à son appartenance à


d’un parti politique ou à un syndicat ?
Toute question en rapport avec l’appartenance ou la non-appartenance à une religion ou avec
les opinions politiques sont interdites.
Toutes les questions en rapport avec les activités syndicales sont également interdites, car
discriminatoires.

B. Les tests d’évaluation à l’embauche pour contrôler les compétences du salarié

Les méthodes et techniques d’aide au recrutement ou d’évaluation des candidats doivent être :
– en lien direct et nécessaire avec l’emploi ;
– pertinentes au regard de la finalité poursuivie ;
– portées préalablement à la connaissance du candidat.
En toute hypothèse, les résultats obtenus ne peuvent être divulgués.
Le candidat doit toujours pouvoir demander à avoir accès et à consulter les résultats des tests.

FICHE 3 : LES CLAUSES DU CONTRAT DE TRAVAIL

I. LA CLAUSE DE NON-CONCURRENCE

A. Définition

La clause de non-concurrence a pour objet d’interdire au salarié d’exercer une activité


concurrente après la rupture de son contrat de travail ou d’entrer au service d’une entreprise
concurrente. Privant le salarié de sa possibilité d’exercer pendant un certain temps et en
certains lieux certaines activités professionnelles, la clause de non-concurrence est
d’interprétation stricte.

En l’absence de définition légale de la clause de non-concurrence, c’est la jurisprudence qui a


défini sa nature et son régime juridique.

Sur un plan formel, il résulte de la jurisprudence qu’un écrit s’avère nécessaire pour apporter
la preuve de l’existence d’une clause de non-concurrence que pour en établir ses
caractéristiques. Ce socle juridique peut être soit la convention collective et/ou le contrat de
travail.

Dès lors que la convention collective précitée mentionne la faculté pour l’employeur de
prévoir une clause de non-concurrence, il est impératif de stipuler la clause de non-
concurrence dans le contrat de travail ou dans un avenant ultérieur ; à défaut le salarié ne
serait pas tenu de la respecter (Cass. soc. 5 décembre 1974). Il convient de rappeler que
l’insertion d’une clause de non-concurrence dans un contrat de travail constitue une
modification du contrat de travail, requérant à ce titre l’accord du salarié.

B. Conditions de validité

Depuis des arrêts du 10 juillet 2002 (Cass. soc. 10 juillet 2002, n°99-43334), la validité de la
clause de non-concurrence est subordonnée aux conditions cumulatives suivantes :

- Être justifiée par les intérêts légitimes de l’entreprise :


Il faut que l’entreprise soit susceptible de subir un préjudice réel si le salarié venait à exercer
son activité professionnelle dans une entreprise concurrente : cette exigence doit conduire
l’entreprise à interroger, salarié par salarié ou fonction par fonction, sur son intérêt ainsi que
la réalité et l’importance du risque commercial et économique encouru en cas d’exercice
d’une activité concurrente par un collaborateur et ce, à l’aune de son savoir-faire ou des
informations stratégiques auxquelles il a pu avoir accès ou des liens privilégiés noués avec la
clientèle.

- Être limité dans le temps et dans l’espace :

Cette limitation est très variable et peut être déterminée en tenant compte de l’ensemble des
autres critères de la clause (sous réserve du respect des éventuelles dispositions
conventionnelles en ce sens). À titre indicatif, dans l’hypothèse d’une exacte symétrie entre
l’activité de l’entreprise et celle du salarié, la clause devrait nécessairement être très limitée
dans le temps ; en revanche, lorsque les fonctions exercées par le salarié mettent en œuvre un
savoir-faire ou une technicité indépendante de l’activité exercée par l’entreprise (notamment
des fonctions de cadres de direction), la clause peut être très étendue dans le temps et dans
l’espace.

- Être limitée quant à la nature des activités de concurrence interdites :

En effet, pour être valable, une clause de non-concurrence doit laisser au salarié la possibilité
d’exercer normalement l’activité qui lui est propre ; à défaut, jugé comme étant excessif, son
périmètre pourrait être réduit par le juge. Au vu de la jurisprudence rendue en ce domaine, la
qualification professionnelle du salarié est prise en compte pour déterminer si le salarié peut
exercer normalement ou non l’activité qui lui est propre.

- Obligation d’une contrepartie financière :

Ici, plusieurs remarques peuvent être formulées.

Actualité : 13 octobre 2021 Soc. CLAUSE DE NON-CONCURRENCE,


CONTREPARTIE FINANCIERE, NATURE JURIDIQUE, CLAUSE PENALE (non).
La contrepartie financière de la clause de non-concurrence ayant la nature d'une indemnité
compensatrice de salaire stipulée en conséquence de l'engagement du salarié de ne pas
exercer, après la cessation du contrat de travail, d'activité concurrente à celle de son ancien
employeur, et ne constituant pas une indemnité forfaitaire prévue en cas d'inexécution d'une
obligation contractuelle, elle n'est pas une clause pénale.
(Société Adient Fabrics France, pourvoi n° 20-12.059 [P])

➢ Le montant de la contrepartie financière :

Pour déterminer le montant de la contrepartie financière, peut être mis en œuvre le principe de
proportionnalité en prenant en compte les autres critères (durée, espace…) de la clause.

En effet, cette contrepartie est destinée à compenser le préjudice subi par le salarié qui voit sa
liberté de travailler restreinte. Son montant doit être proportionnel à ce préjudice et aux
revenus antérieurs du salarié : Cass. soc. 24 avril 2013.

À noter qu’une contrepartie financière dérisoire équivaut à une absence de contrepartie.

Cass. soc. 9 avril 2015 :

M. X. a été engagé le 4 octobre 2004, par la société Fidecompta en qualité d’expert-


comptable stagiaire. Le contrat de travail stipulait une clause de non-concurrence dont la
contrepartie était fixée à 25 % en cas de licenciement et à 10 % en cas de démission, de la
rémunération mensuelle perçue en moyenne sur les vingt-quatre derniers mois. Les parties ont
signé une rupture conventionnelle le 4 février 2010. Le salarié a saisi la juridiction
prud’homale en réclamant notamment le paiement de la contrepartie financière de la clause de
non-concurrence.

La cour d’appel a considéré que le salarié qui démissionne et celui qui signe une rupture
conventionnelle manifestent l’un et l’autre une même intention de quitter l’entreprise. Elle a
donc appliqué le taux de 10 % et non celui de 25 %.

Le 9 avril 2015, la Cour de cassation affirme qu’en statuant ainsi, alors que doit être réputée
non écrite la minoration par les parties, dans le cas d’un mode déterminé de rupture du contrat
de travail, de la contrepartie pécuniaire d’une clause de non-concurrence, la cour d’appel, qui
a refusé de faire application de la contrepartie de 25 %, laquelle n’est pas susceptible de
réduction par le juge et ouvre droit à congés payés, a violé le principe fondamental de libre
exercice d’une activité professionnelle.

➢ Le moment du paiement de la contrepartie financière :

Les modalités de versement peuvent être librement déterminées par les parties (soient
versement unique ou périodique).

Le paiement de cette contrepartie financière ne peut intervenir avant la rupture du contrat de


travail, (Cass. soc. 15 janvier 2014). Cette solution n’est pas nouvelle et avait déjà été
dégagée par la Chambre sociale de la Cour de cassation notamment dans les arrêts du 7 mars
2007 (Cass. soc. 7 mars 2007 n°05-45511) et du 17 novembre 2010 (Cass. soc. 17 novembre
2010 n° 09-42389).

La clause qui prévoit que la contrepartie financière à l’engagement de non-concurrence sera


versée mensuellement est nulle.
La contrepartie est due dès que le salarié respecte son obligation de non-concurrence, et ce,
sans qu’il y ait lieu de rechercher l’existence d’un préjudice subi ; en effet, il importe peu que
le salarié ait retrouvé un emploi (Cass. soc. 10 mars 2004, n°01-47350), qu’il perçoive des
allocations chômage (Cass. soc. 13 juin 2007, n°05-43893), qu’il ait pris sa retraite ou que la
rupture du contrat de travail soit consécutive à une inaptitude (Cass. soc. 10 octobre 2001,
n°99-42404). Si l’employeur ne verse pas la contrepartie, le salarié est libéré de son
obligation de non-concurrence (Cass. soc. 3 octobre 1991, n°89-43375).

➢ Nature de l’indemnité de la contrepartie financière

Le paiement d’une contrepartie financière qui aura eu lieu au cours de l’exécution du


contrat de travail s’analyse en un complément de salaire de sorte que postérieurement à
la rupture, l’employeur ne peut en demander le remboursement : Cass. soc. 15 janvier
2014.

Lorsqu’elle est normalement versée postérieurement à la rupture du contrat de travail, il s’agit


d’une indemnité.

➢ Remarque

N’étant pas une clause pénale, elle ne peut être révisée par le juge.

C. Sanctions en cas de violation des conditions de validité de la clause de non-


concurrence

Si les conditions de validité de la clause de non-concurrence ne sont pas remplies, les


sanctions sont les suivantes :

– Le salarié peut agir en nullité

Action en nullité fermée à l’employeur, dès lors qu’il s’agit d’une nullité relative, ouverte au
seul salarié (Cass. soc. 24 février 1982, n°80-40283). Si le juge fait droit à la demande de
nullité, la clause de non-concurrence est considérée comme n’ayant jamais existé ; par
conséquent, si le salarié est délié de son obligation de non-concurrence, il perd le droit à
contrepartie, mais pourra toutefois conserver la contrepartie perçue pour toute la période
précédant l’annulation. En cas d’une clause de non-concurrence illicite, celui-ci peut, outre la
nullité, obtenir des dommages intérêts qu’il ait ou non respecté la clause de non-concurrence.
– La révision de la clause par le juge :
Si le juge estime que la clause est excessive, bien qu’elle respecte les conditions de validité
précitées il pourra modifier la clause, notamment son secteur géographique, durée, activités,
listes des concurrents (Cass. Soc. 18 septembre 2002, n°00-42904). Cette révision peut
notamment intervenir dans l’hypothèse où la clause figurant au contrat de travail est
incompatible avec les stipulations de la convention collective ou encore lorsque le salarié a
commis un acte de concurrence particulièrement caractérisé au détriment de son ancien
employeur (en général, exercice de l’activité concurrente dans un délai très court et dans un
secteur géographique très court).

D. Difficultés liées à la mise en œuvre de la clause de non-concurrence

Quant à la mise en œuvre de la clause de non-concurrence, celle-ci concerne tout type de


rupture du contrat de travail (période d’essai, démission, licenciement, rupture d ’un
CDD…), sauf limitations apportées par le contrat de travail ou la convention collective
(limitations qui n’existent pas à ce jour au sein des deux conventions collectives applicables
aux entreprises adhérentes de la Fnas) et ce, même en cas d’impossibilité pour le salarié de
reprendre une activité concurrentielle (inaptitude, départ à la retraite).

La date de la prise d’effet de la clause de non-concurrence est en principe la date de


cessation effective des fonctions ; cependant, une difficulté peut surgir en cas de dispense de
préavis :
– si le salarié effectue son préavis, la clause de non-concurrence prend effet dès le
lendemain du dernier jour du préavis travaillé,

– si le salarié est dispensé de préavis, la clause de non-concurrence prend effet dès le


départ effectif du salarié (Cass. soc. 19 juin 1991, n°86-45504) de sorte que, jusqu’à
l’expiration du préavis non effectué, le salarié pourra cumuler l’indemnité
compensatrice de préavis et la contrepartie pécuniaire (Cass. soc. 22 juin 2001, n°09-
68762).

E. Renonciation à la clause de non-concurrence

Si l’employeur peut renoncer à la clause de non-concurrence, cette possibilité est strictement


encadrée :

– Elle doit être expressément autorisée par la clause de non-concurrence ;


dans le cas contraire, l’employeur ne pourrait renoncer à la clause de non-concurrence
qu’avec l’accord du salarié (Cass. soc. 17 février 1993, Sté Promo cuisine c/Gillet).

– La renonciation à la clause de non-concurrence doit être expresse et


notifiée individuellement au salarié (Cass. soc. 21 octobre 2009, n°08-40828).
– Quant au délai de renonciation, à défaut de stipulations contractuelles et/ou
conventionnelles en ce sens, et si la rupture intervient à l’initiative de l’employeur,
l’employeur doit renoncer à la clause de non-concurrence au moment du licenciement
(soit au plus tard à la fin du préavis) et, en cas de dispense, à la cessation effective du
travail (Cass. soc. 13 Mars 2013).

– Attention : l’employeur ne peut, sauf stipulation contraire, renoncer unilatéralement


à la clause de non-concurrence avant la rupture du contrat de travail, c’est-à-dire au
cours de l’exécution du contrat de travail : Cass. soc. 11 mars 2015.

– En présence de stipulations contractuelles ou conventionnelles, la renonciation


doit se faire de manière expresse, par écrit et dans les formes et délais prescrits par le
contrat de travail. Effectuée hors délai, la renonciation sera considérée comme tardive
et l’employeur devra acquitter la contrepartie financière.

– La renonciation de l’employeur à la clause de non-concurrence dans la lettre de


licenciement est licite, nonobstant les dispositions de la convention collective : Cass.
soc. 24 avril 2013.

– Quelle est la date de renonciation de la clause de non concurrence en cas de


rupture conventionnelle ? D’après la Cour de cassation, lorsque le contrat de travail
prévoit que l’employeur pourra libérer le salarié de l’interdiction de concurrence, soit
à tout moment au cours de l’exécution du contrat, soit à l’occasion de sa cessation au
plus tard dans la lettre notifiant le licenciement ou le jour même de la réception de la
démission, c’est, en cas de rupture conventionnelle, la date de la rupture fixée par la
convention de rupture qui détermine le respect par l’employeur du délai contractuel :
Cass. soc. 3 mars 2015.

F. Violation de la clause de non-concurrence

Pour caractériser une violation de la clause de non-concurrence et des clauses pénales, seuls
pourraient être retenus des faits de concurrence postérieurs à la rupture du contrat de travail.

Il appartiendra à l’employeur de rapporter par tous moyens la violation par le salarié de la


clause de non-concurrence.

L’ancien salarié qui ne respecterait pas l’interdiction découlant de la clause de non-


concurrence s’expose à quatre types de sanctions :

1. Perte du droit à la contrepartie financière

À ce titre, il convient de distinguer les hypothèses suivantes :

– le salarié manque dès la rupture de son contrat de travail, même momentanément, à


son obligation de non-concurrence ; dans cette hypothèse, il perd droit à indemnité
(Cass. soc. 5 mai 2004, n°01-46261) ; dans cette hypothèse, si une contrepartie a été
indûment perçue par le salarié, il devra la rembourser (Cass. soc. 6 décembre 1995,
n°92-41812).

– dans un premier temps, le salarié respecte la clause de non-concurrence puis


l’enfreint par la suite ; dans cette hypothèse, le salarié ne sera privé que de la seule
partie correspondant à la période à partir de laquelle il y a eu violation de la clause
contractuelle (Cass. soc. 8 février 2003, n°01-40194).

– le salarié a respecté l’obligation de non-concurrence dans un premier temps sans


que l’employeur ne lui verse la moindre contrepartie, puis enfreint par la suite ; dans
cette hypothèse, le salarié ne pourra prétendre au paiement de la contrepartie
pécuniaire que pour la période pendant laquelle il a respecté son obligation, mais
pourra également prétendre à des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi
du fait de l’inexécution par l’employeur de son obligation de verser la contrepartie
(Cass. soc. 15 mars 2006, n°03-45031).

2. Condamnation à des dommages-intérêts envers son ancien employeur

Parfois fixés à l’avance dans une clause pénale, la clause pénale étant entendue comme une
disposition prévoyant que si le salarié ne respecte pas son obligation de non-concurrence, il
devra payer à l’entreprise une somme forfaitaire.

3. Condamnation à cesser son activité concurrente

Et ce, éventuellement par la formation de référé du conseil de prud’hommes si celui-ci


constate l’existence d’un trouble manifestement illicite et en l’absence de contestation
sérieuse.

II. LA CLAUSE DE DÉDIT-FORMATION

La clause de dédit-formation a pour objet d’exiger, de la part d’un salarié ayant bénéficié
d’une formation entièrement financée par l’entreprise, de rester un certain temps à son service
et d’obliger le salarié à restituer les frais de formation engagés en cas de départ anticipé de
l’entreprise.

Par un arrêt du 21 mai 2002, la Cour de cassation s’était déjà prononcée sur ses conditions de
validité en jugeant que, pour être licite, la clause :

– devait constituer la contrepartie d’un engagement pris par l’employeur d’assurer une
formation entraînant des frais réels au-delà des dépenses imposées par la loi ou la
convention collective ;
– que le montant de l’indemnité versé par le salarié en cas de départ prématuré devait
être proportionné aux frais de formation engagés ;

– et que la clause n’ait pas pour effet de priver le salarié de la faculté de


démissionner.
Le 23 octobre 2013, la Chambre sociale de la Cour de cassation va plus loin en jugeant que « 
la clause de dédit-formation qui prévoit qu’en cas de départ prématuré le salarié devra
rembourser les rémunérations qu’il a perçues durant sa formation, est nulle. »

En effet, toute action de formation par un salarié pour assurer son adaptation au poste de
travail constitue un temps de travail effectif et donne lieu pendant sa réalisation au maintien
par l’entreprise de la rémunération. Il en résulte que la clause de dédit-formation, qui prévoit
qu’en cas de départ prématuré le salarié devra rembourser les rémunérations qu’il a perçues
durant sa formation, est nulle.

III. LA CLAUSE DE MOBILITÉ

Traitée à part dans une autre fiche (V. plus loin). S’y reporter.

IV. LA CLAUSE DE RÉSIDENCE OU DE DOMICILE

Comme il a été vu précédemment, toute clause insérée dans un contrat de travail qui se révèle
être attentatoire à un droit ou une liberté fondamentale doit impérativement répondre à deux
conditions successives et cumulatives : elle doit être « justifiée par la nature de la tâche à
accomplir » et « proportionnée au but recherché », l’employeur devant ainsi apporter la
preuve que l’exercice normal de ces droits engendrerait pour l’entreprise un trouble
caractérisé.

Ainsi, la Cour de cassation a eu l’occasion de se prononcer à plusieurs reprises sur la validité


des clauses de résidences, clauses aux termes desquelles l’employeur impose au salarié de
fixer sa résidence dans un certain secteur géographique autour de l’entreprise.

C’est une tentation que l’on comprend évidemment lorsque le poste occupé s’accompagne de
périodes d’astreinte ou que, sans comprendre effectivement une obligation à des astreintes, il
peut conduire à des interventions d’urgence du salarié. Il reste que cette tentation doit être
conciliée avec le droit à la vie privée du salarié, lequel comporte le droit de choisir librement
son domicile.
Les clauses de résidence sont ainsi encadrées de longue date par la jurisprudence depuis
l’arrêt dit Spileers (Cass. soc. 12 janvier 1999, pourvoi n° 96-40.755) et s’insèrent parmi les
libertés dites accessoires, par opposition aux libertés fondamentales ou absolues (sur la
distinction, voir ici), qui admettent des restrictions aux libertés pour autant qu’elles soient
justifiées par « la nature de la tâche à accomplir » et qu’elles soient « proportionnées au but
recherché ».
Il reste que, jusqu’à présent, la jurisprudence admettait les clauses de résidence pour autant
qu’elles étaient indispensables à la « protection des intérêts légitimes de l’entreprise et
proportionnées, compte tenu de l’emploi occupé, au but recherché ».

Cass. soc. 7 avril 2010 : « l’occupation, à la demande de l’employeur, du domicile du salarié


à des fins professionnelles constitue une immixtion dans la vie privée de celui-ci et n’entre
pas dans l’économie générale du contrat de travail ; que si le salarié qui n’est tenu ni
d’accepter de travailler à son domicile, ni d’y installer ses dossiers et ses instruments de
travail, accède à la demande de son employeur, ce dernier doit l’indemniser de cette sujétion
particulière ainsi que des frais engendrés par l’occupation à titre professionnel du domicile. »

Cass. soc. 28 février 2012 : « attendu que toute personne dispose de la liberté de choisir son
domicile et que nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et
collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir
et proportionnées au but recherché. »

En l’espèce, la salariée avait été embauchée par une association hébergeant des majeurs
protégés. Son contrat de travail prévoyait qu’elle devait résider à moins de 200 m de
l’association. La salariée n’était soumise à aucune heure d’astreinte et ses horaires étaient
fixes. Néanmoins, son contrat de travail prévoyait des « heures volantes » aux termes
desquelles la salariée pouvait être amenée à intervenir en urgence au sein de l’association ;
d’où la proximité souhaitée par l’employeur entre le lieu de résidence de la salariée et
l’établissement de l’association.
Se référant à la jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation, la cour d’appel
avait estimé que la clause de résidence était « indispensable à la protection des intérêts
légitimes de l’association et des personnes auprès desquelles la salariée a pour objet
d’intervenir et proportionnée, compte tenu de l’emploi occupé, au but recherché ».

La Chambre sociale censure l’arrêt de la cour d’appel au visa de l’article 8 de la Conv. EDH,
de l’article 9 du Code civil, protégeant le droit à la vie privée, et de l’article L 1121-1 du Code
du travail, mais encore d’un attendu de principe aux termes duquel : « toute personne dispose
de la liberté de choisir son domicile et que nul ne peut apporter aux droits des personnes et
aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la
nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché ».

V. LA CLAUSE DE GARANTIE D’EMPLOI

A. Définition

À la différence des autres clauses facultatives envisagées, la clause de garantie d’emploi crée
une obligation à la charge de l’employeur.
Elle a pour objectif de limiter le droit de l’employeur de rompre le contrat à durée
indéterminée (CDI) pendant un certain temps. En d’autres termes, pendant une durée
déterminée, l’employeur va s’interdire de licencier le salarié.
Avec cette clause, l’employeur va chercher à attirer le salarié, à le fidéliser en lui offrant une
garantie supplémentaire pour qu’il vienne dans l’entreprise. Ces clauses concernent donc
principalement des postes de direction ou des compétences spécifiques.

B. Conditions de validité
Tout comme les autres clauses facultatives du contrat de travail, pour être valable, la clause de
garantie d’emploi se doit de respecter certaines conditions.
Ainsi, elle doit :
- comporter une durée limitée de garantie d’emploi. En d’autres termes, la clause de
garantie d’emploi ne peut pas être illimitée, il est impossible pour l’employeur de
promettre de ne jamais licencier un salarié.
- de plus, la clause ne doit pas transformer la nature du contrat. Elle ne peut donc pas
transformer un CDI en CDD.

C. Comment rompre la clause de garantie d’emploi ?


Il est impossible que la clause de garantie d’emploi empêche totalement l’employeur de
licencier le salarié. Ainsi, même en présence d’une clause de garantie d’emploi, le salarié peut
être licencié pour :
- Faute grave,
- Force majeure,
- Ou accord des parties.
On remarque que ces motifs de rupture de la clause de garantie d’emploi sont les mêmes que
ceux de la rupture anticipée du contrat à durée déterminée (CDD). C’est la raison pour
laquelle la Cour de cassation applique le même régime juridique.
Ainsi, si l’employeur rompt la clause de garantie d’emploi, alors même qu’il n’y a ni accord
des parties, ni faute grave, ni force majeure, il va être condamné à verser au salarié le solde
des salaires restant dus jusqu’au terme de la garantie d’emploi.
Il est précisé que le montant ne peut être réduit par le juge.
Par ailleurs, la clause de garantie d’emploi est parfois assortie d’une clause pénale. Une telle
clause fixe de manière forfaitaire, et par avance, le montant des dommages et intérêts devant
être versés par l’employeur en cas d’irrespect de la clause.
S’il y a rupture de la clause de garantie d’emploi en dehors des cas prévus, le licenciement
est alors sans cause réelle et sérieuse. Le salarié a ainsi droit aux indemnités suivantes :
– indemnité de préavis ;
– indemnité légale de licenciement (ou indemnité conventionnelle si elle est plus
favorable) ;
– indemnité de congés payés ;
– indemnité pour absence de cause réelle et sérieuse.
À noter que le salarié peut cumuler les indemnités de licenciement avec les salaires qu’il
aurait dû percevoir jusqu’à la fin de la période.

D. L’application de la clause de garantie d’emploi


Un problème pratique se pose quant à l’application de cette clause : à partir de quand
précisément le délai qu’elle prévoit arrive-t-il à expiration ?
En d’autres termes, à partir de quelle date le licenciement du salarié malade est-il
envisageable ?
Les juges se sont prononcés sur cette question. Ils considèrent que la clause de garantie
d’emploi met en place une protection du salarié malade en interdisant à l’employeur
d’engager la procédure de licenciement avant la fin du délai prévu.
C’est donc la date de la lettre de convocation à l’entretien préalable qu’il faut retenir, et
non la date de l’entretien, ni celle de la notification du licenciement.
Par ailleurs la Cour a affirmé que « la rupture du contrat de travail ne pouvant intervenir au
cours de la période de garantie d’emploi », l’indemnité de préavis est due au salarié (Cass.
soc. 23 oct. 2007).

E. Sur la clause de garantie d’emploi : Cass. soc. 15 avril 2015 n° 13-21.306


Un contrat comportant une clause de garantie d’emploi ne peut être rompu pendant la période
couverte par cette garantie que par accord des parties, faute grave du salarié ou cas de force
majeure. Ainsi, l’inaptitude médicalement constatée du salarié ne constitue pas un fait
justifiant la rupture du contrat pendant la période couverte par la garantie d’emploi, dès lors
que cette inaptitude trouve son origine dans un harcèlement moral dont le salarié a été
victime.
Dès lors, l’inaptitude n’entre pas dans les cas permettant la rupture du contrat de travail
pendant la période de garantie d’emploi, à savoir : le commun accord des parties, la faute
grave du salarié ou la force majeure.

VI. LA CLAUSE DE CONFIDENTIALITÉ

A. Définition
Indépendamment d’une obligation générale de discrétion, les salariés peuvent être tenus, en
vertu de leur contrat de travail, à des clauses dites de confidentialité qui leur interdisent de
divulguer certaines informations expressément identifiées comme « confidentielles ». Cette
clause s’impose à tous les salariés, même en l’absence de stipulation expresse. Elle est
essentielle et doit être imposée à toute personne susceptible d’avoir accès au savoir-faire.
Concrètement, la clause de confidentialité se rapporte aux secrets de fabrication, aux secrets
d’affaires ou aux secrets liés aux matières personnelles ou confidentielles, dont l’employé
peut avoir connaissance dans le cadre de son activité professionnelle. Et peut-être, plus ou
moins large selon l’emploi occupé. En effet, les salariés de l’entreprise, du moins ceux ayant
accès aux informations stratégiques et à l’innovation, peuvent être tenus d’une obligation de
confidentialité, tant durant leur contrat de travail, qu’après la fin de celui-ci.

B. Sanction en cas de non-respect

L’obligation résultant de la clause de confidentialité est de nature contractuelle, puisqu’elle


consiste en une obligation de ne pas faire, l’exécution forcée n’aurait donc ici aucun intérêt
puisque les conséquences dommageables résulteront de la première divulgation.
Juridiquement, la sanction la plus adéquate est l’allocation de dommages-intérêts. Pour le cas
d’une divulgation du savoir-faire, il serait envisageable de condamner sous astreinte une
cessation des comportements.
Le préjudice peut revêtir la forme pécuniaire et/ou morale. Tout d’abord le préjudice
économique est indéniable au vu de la valeur économique de l’information protégée. Il pourra
s’analyser en un manque à gagner, une perte de chiffre d’affaires. De plus, le préjudice peut
être moral lorsqu’il y a atteinte à l’image, à la réputation, dénigrement. Ces préjudices laissés
à l’appréciation du juge sont très difficiles à évaluer avec justesse.
C. La clause de confidentialité applicable après la rupture du contrat de travail

Dans un arrêt du 19 mars 2008, la Cour de cassation admet la validité d’une clause de
confidentialité se prolongeant après la cessation du contrat de travail. En l’espèce, l’affaire
portée devant les juges opposait un célèbre guide gastronomique à l’un de ses salariés lié par
une telle clause. Menaçant de publier un livre révélant les procédés d’élaboration du guide, le
salarié est licencié pour faute grave en raison notamment « des violations répétées et
délibérées des obligations résultant de son contrat de travail ».
Il intente une action devant le conseil de prud’hommes pour licenciement sans cause réelle et
sérieuse et publie son livre. La société forme alors une demande reconventionnelle en
dommages et intérêts pour violation de la clause de confidentialité insérée dans le contrat de
travail du salarié. La Cour d’appel de Paris approuve le licenciement en raison de la violation
par le salarié de son obligation de discrétion valable pendant l’exécution du contrat de travail.
En revanche, elle rejette la demande de l’employeur au motif que la clause de confidentialité
ne s’applique pas après la rupture du contrat de travail.
La Cour de cassation approuve les juges du fond concernant le motif du licenciement, mais
censure leur décision concernant la clause de confidentialité. La Cour suprême estime, en
effet, qu’une telle clause « peut valablement prévoir qu’elle s’appliquera après la fin du
contrat de travail et que l’inexécution par le salarié de l’obligation de confidentialité
postérieurement à son départ de l’entreprise le rend responsable du préjudice subi par
celle-ci, même en l’absence de faute lourde ». Il est donc clair que la clause de
confidentialité se prolonge même après la cessation de son contrat de travail.

FICHE 4 : LA MODIFICATION DU CONTRAT DE TRAVAIL (et les clauses facilitant


cette modification)

Lorsque l’employeur s’avise de modifier la relation de travail, le salarié est-il tenu de


l’exécuter aux nouvelles conditions ?

Exemple : l’employeur décide de modifier le lieu de travail du salarié ou encore de modifier


ses horaires de travail. Faut-il l’accord du salarié ?

La solution repose sur une distinction entre la modification du contrat de travail et le


changement des conditions de travail.

En effet, depuis l’arrêt Raquin (Soc. 8 octobre 1987 nº 84-41902 Bull. nº 541), il est de
jurisprudence constante que le salarié dispose d’un droit de refus de la modification de son
contrat de travail qui ne peut intervenir sans le consentement exprès du salarié. En revanche,
l’employeur peut imposer, dans le cadre de son pouvoir de direction, un changement des
conditions de travail.

Reste à définir la notion de modification du contrat de travail et celle de changement des


conditions de travail.
C’est la Cour de cassation qui est venue définir et préciser quel élément de la relation de
travail modifié constitue une modification du contrat de travail ou un simple changement des
conditions de travail.

Sont des éléments du contrat de travail dont toute évolution vaut modification du contrat de
travail et exige à ce titre l’accord préalable du salarié :

– Le lieu de travail du salarié (sous conditions),


– La rémunération du salarié,
– La qualification professionnelle du salarié et de ses responsabilités,
– La durée de travail du salarié (sous conditions).

Section 1 : LE LIEU DE TRAVAIL

Il faut distinguer selon que le contrat comprend ou non une clause de mobilité.

I. EN PRÉSENCE D’UNE CLAUSE DE MOBILITÉ

A. Définition de la clause de mobilité :

Il s’agit de la clause d’un contrat de travail par laquelle le salarié accepte à l’avance une
modification de son lieu de travail ou un déplacement ponctuel que l’employeur pourrait
décider.

B. Principe

En présence d’une clause de mobilité et sous réserve que celle-ci soit valable, c’est-à-dire :

– stipulée dans l’intérêt de l’entreprise,


– expresse et acceptée,
– clairement délimitée géographiquement

l’employeur peut unilatéralement décider de transférer le lieu de travail du salarié dans les
limites géographiques prévues par la clause.

La modification du lieu de travail n’est donc pas, dans ce cas, une modification du contrat de
travail et s’impose donc au salarié.

La Cour de cassation a précisé que le fait d’apposer sa signature lors de l’embauche sur un
règlement intérieur contenant une clause de mobilité ne vaut pas acceptation claire et non
équivoque de la part du salarié, de l’insertion d’une telle clause dans son contrat de travail :
Cass. soc. 19 novembre 1997.

C. Exceptions :

Toutefois, cette clause de mobilité ne peut faire l’objet d’une mise en œuvre abusive par
l’employeur (Cass. soc. 2 mars 2005).

Cela suppose :

– Que sa décision soit justifiée au regard de l’intérêt de l’entreprise : Cass. soc. 3


mai 2012 - « n’exécute pas de bonne foi une clause de mutation géographique
un employeur dont la décision de mettre en œuvre cette clause est
essentiellement motivée par des problèmes relationnels avec les membres du
personnel » ;

– Qu’il respecte un délai de prévenance : Cass. soc. 3 mai 2012 : « le salarié dont
le contrat de travail prévoit une clause de mobilité géographique est en droit de
refuser une nouvelle affectation dès lors que l’employeur l’informe de sa
nouvelle affectation la veille seulement de sa prise de poste » ; autre ex. : Un
délai de 4 jours, alors que le salarié concerné a un enfant en bas âge, est
insuffisant (Cass. soc. 19 mars 2003) ;

– Que la mise en œuvre de la clause ne porte pas atteinte au droit du salarié à une
vie personnelle et familiale : Cass. soc. 14 octobre 2008 (ex. : L’employeur
qui impose à un salarié se trouvant dans une situation familiale critique (son
épouse étant enceinte de 7 mois) un déplacement immédiat abuse de son droit
(Cass. soc. 18 mai 1999).

Attention : la bonne foi de l’employeur est présumée : c’est donc au salarié de prouver que
la décision de l’employeur d’appliquer la clause de mobilité a été prise pour des raisons
étrangères à l’intérêt de l’entreprise ou dans des conditions exclusives de la bonne foi
contractuelle (Cass. soc. 23 février 2005).

D. Clauses de mobilité non valables :

Certaines clauses de mobilités ont été jugées comme non valables.


Ces notamment le cas des clauses suivantes :

– Une clause ne peut pas prévoir que le salarié peut être muté dans « toute zone
géographique ». En revanche, est licite la clause qui organise la mutation en « France
métropolitaine » ou encore sur « le territoire français » (même si celui-ci implique les
DOM TOM) : Cass. soc. 9 juillet 2014.

– Une clause ne peut prévoir une modification unilatérale par l’employeur de la zone
géographique. En effet, il n’est pas possible pour l’employeur de se réserver, dans la clause
de mobilité, la possibilité de modifier unilatéralement l’étendue géographique de l’obligation
de mobilité du salarié concerné. Une telle disposition serait inopérante. En conséquence, un
employeur qui souhaiterait modifier le champ géographique d’une clause de mobilité doit
d’abord obtenir l’accord du salarié. Le régime de la modification du contrat de travail
retrouve alors son application (Cass. soc. 7 juin 2006 Cass. soc. 14 octobre 2008).
Par exemple, une clause de mobilité prévoit qu’un salarié « accepte par avance (...) d’être
affecté (...) en fonction des nécessités » de l’employeur. Cette clause n’est pas valable, car elle
donne à l’employeur le pouvoir de modifier unilatéralement sa portée : Cass. soc. 4 octobre
2008.

– Attention examen : la clause par laquelle un salarié accepte par avance un changement de
lieu de travail dans un autre établissement du groupe en métropole ou dans un pays de la
communauté européenne, ne concerne selon les juges que les mutations dans un
établissement existant au jour de la conclusion du contrat : Cass. soc. 12 mai 2004 ;

– Une clause de mobilité ne peut pas stipuler que tout refus du salarié emporte la rupture
automatique du contrat de travail. Si tel est le cas, la sanction est la nullité de cette clause
(Cass. soc. 19 mai 2004)

– Une clause qui prévoit un changement d’employeur anticipé est nulle – Un salarié ne
peut pas accepter par avance un changement d’employeur au nom du principe selon lequel le
contrat de travail est exécuté de bonne foi. La clause de mobilité par laquelle le salarié lié par
contrat de travail à une société s’est engagé à accepter toute mutation dans une autre société,
alors même que cette société appartiendrait au même groupe ou à la même unité économique
et sociale, est donc nulle (Cass. soc. 23 septembre 2009). Exemple : Le contrat d’un
responsable marketing contenait une clause de mobilité stipulant qu’il pourrait être amené à
exercer ses fonctions dans toute autre société du groupe. Celle-ci prévoyait aussi que sa mise
en œuvre donnerait lieu à la rédaction d’un nouveau contrat auprès de la société d’accueil.
Ayant refusé sa mutation, le salarié a été licencié pour non-respect de la clause de mobilité.
Ce refus ne pouvait pas justifier son licenciement puisque la clause était nulle (Cass. soc. 23
septembre 2009).

Ainsi, la clause par laquelle un salarié accepte par avance un changement de lieu de travail
dans un autre établissement du groupe en métropole ou dans un pays de la communauté
européenne, ne concerne selon les juges que les mutations dans un établissement existant
au jour de la conclusion du contrat : Cass. soc. 12 mai 2004 ;

– La clause de mobilité ne peut imposer un partage du temps de travail entre plusieurs


établissements. La clause de mobilité ne permet pas à l’employeur d’imposer à un salarié un
partage de son temps de travail entre plusieurs établissements (Cass. soc. 20 décembre 2006).

– Pour les travailleurs à domicile, la clause de mobilité ne peut imposer un retour dans
l’entreprise au salarié. La clause de mobilité inscrite dans le contrat de travail d’un salarié
qui travaille à temps partiel ou à temps complet à son domicile ne permet pas à l’employeur
d’imposer à ce salarié de revenir travailler dans l’entreprise. Il doit, dans ce cas, solliciter son
accord préalable malgré la clause de mobilité (Cass. soc. 31 mai 2006 ; Cass. soc. 31 octobre
2006).

– la clause de mobilité ne doit pas imposer le changement du domicile : une clause de


mobilité ne permet pas d’imposer au salarié un changement de domicile ou de résidence. Un
tel changement constitue une modification du contrat de travail nécessitant l’accord exprès du
salarié (Cass. soc. 15 mai 2007, n° 06-41277, BC V n° 74 ; Cass. soc. 4 juin 2008).

E. Les conditions d’opposabilité de la clause de mobilité :

1. La clause de mobilité doit être prévue par le contrat de travail

Au moment de la signature ou en cours de contrat – La clause de mobilité peut être insérée


dans le contrat de travail dès sa signature. Elle peut également l’être en cours d’exécution du
contrat, sous réserve de recueillir l’accord du salarié concerné. L’insertion d’une telle clause
constitue en effet une modification du contrat de travail (Cass. soc. 24 novembre 1999).
Domaine strict du contrat de travail. Une disposition relative au changement de lieu de
travail insérée dans le règlement intérieur signé par le salarié lui est inopposable (Cass. soc. 2
octobre 1997).

2. Quid de la clause de mobilité prévue par la convention collective et non par le


contrat de travail ?

Conditions pour une application directe


La mobilité peut être prévue par une convention collective. L’employeur peut imposer à un
salarié de respecter cette clause, sans que celle-ci soit reprise dans le contrat de travail, si :
– Cette disposition se suffit à elle-même et définit précisément sa zone
géographique d’application (Cass. soc. 24 janvier 2008) ;
– Le salarié a été informé de l’existence de cette convention au moment de son
engagement et mis en mesure d’en prendre connaissance (Cass. soc. 30 novembre
2005).
Si l’une de ces conditions manque, l’employeur ne peut imposer l’application de la clause de
mobilité conventionnelle. S’il le faisait, le licenciement du salarié refusant de la respecter
serait sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 24 janvier 2008).

a) Respect des termes de la convention collective instituant une clause de mobilité

La convention collective applicable à l’entreprise peut prévoir des conditions spécifiques


encadrant la mise en œuvre d’une clause de mobilité (ex. : mise en œuvre de la clause de
mobilité possible uniquement pour de sérieuses nécessités de service ; procédure de
concertation à appliquer au préalable). Si l’employeur ne respecte pas ces dispositions, il ne
peut pas imposer la mutation. Un licenciement qui serait fondé sur un refus du salarié
d’accepter sa mobilité dans ces circonstances serait sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 13
octobre 2004).
La convention collective applicable à l’entreprise peut prévoir que la modification du lieu de
travail est subordonnée à l’accord du salarié. Dans ce cas, une clause de mobilité inscrite au
contrat de travail serait inopérante, car moins favorable que la convention collective
applicable (Cass. soc. 4 février 2003).

b) Embauche antérieure à l’entrée en vigueur de la convention collective prévoyant une


clause de mobilité

Dans le cas où l’engagement du salarié est antérieur à la convention collective, cette


convention ne peut, sans modifier le contrat de travail du salarié, imposer à celui-ci une clause
de mobilité qui n’y figurait pas. Dans ce cadre, les refus réitérés du salarié d’accepter sa
mutation ne sont donc pas fautifs (Cass. soc. 27 juin 2002).

F. Bilan sur la modification du lieu de travail du salarié en présence d’une clause de


mobilité

En présence d’une clause de mobilité, le salarié ne peut pas invoquer la modification du


contrat de travail pour refuser la mutation décidée par l’employeur. Il est tenu d’accepter la
mutation, sauf à se rendre coupable d’un manquement à ses obligations contractuelles et à
risquer un licenciement pour cause réelle et sérieuse, sous réserve, cependant, de l’abus de
droit de l’employeur (Cass. soc. 11 mai 2005). Ce manquement du salarié ne caractérise pas,
à lui seul, une faute grave (Cass. soc. 23 janvier 2008).

Si la mise en œuvre de la clause de mobilité entraîne la modification d’un autre élément


essentiel du contrat de travail, alors il s’agit d’une modification du contrat de travail qui
suppose l’accord du salarié (Cass. soc. 15 décembre 2004 ; Cass. soc. 3 mai 2006 ; Cass. soc.
9 juillet 2008).
Il s’agit par exemple de l’hypothèse dans laquelle le salarié est muté à l’intérieur du secteur
géographique prévu par la clause de mobilité, mais à un poste moins bien rémunéré. Dès lors
que l’atteinte à la rémunération constitue une modification du contrat de travail, il faudra alors
l’accord du salarié.
C’est également le cas lorsque l’application d’une clause de mobilité s’accompagne du
passage d’un horaire de nuit à un horaire de jour (ou l’inverse), ou implique une
rétrogradation (Cass. soc. 16 septembre 2009).

Cass. soc., 24 oct. 2018, n° 17-22.600


Lorsque le contrat de travail d’un salarié contient une clause de mobilité, il ne peut refuser un
changement de son lieu de travail en invoquant une modification de son contrat de travail. La
jurisprudence de la Cour de cassation est constante sur ce point, en présence d’une clause de
mobilité, le changement d’affectation du salarié constitue un simple changement de ses
conditions de travail.
Il en ressort que le refus du salarié doit rendre impossible son maintien dans l’entreprise et
caractériser ainsi la faute grave. En l’espèce, le salarié avait non seulement refusé l’affectation
provisoire sur un autre site situé dans la même ville, mais il avait également manifesté sa
volonté de n’accepter pour l’avenir aucun autre poste. Pour la Cour de cassation, qui confirme
la décision des juges du fond, le comportement du salarié rendait impossible son maintien
dans l’entreprise et constituait donc une faute grave.
II. À DÉFAUT DE CLAUSE DE MOBILITÉ

A. Le critère du secteur géographique

À défaut de clause de mobilité, la modification du lieu de travail n’est pas une modification
du contrat de travail sauf si la mutation a lieu en dehors du secteur géographique : Cass. soc.
4 mai 1999.
La règle est donc la suivante :
Si la mutation a lieu à l’intérieur du secteur géographique, il ne s’agit pas d’une modification
du contrat de travail. L’accord du salarié n’est donc pas requis. (Ex : Cass. soc. 25 octobre
2011, mutation du salarié à 19 km de son lieu de travail initial).
Si la mutation a lieu à l’extérieur du secteur géographique, il s’agit alors d’une modification
du contrat de travail : l’accord du salarié est indispensable.

Reste à définir la notion de secteur géographique.


La difficulté réside dans le fait que cette notion n’est définie ni par la loi ni par la Cour de
cassation.
Pour le définir, certains ont parlé de bassin d’emploi ou d’agglomération urbaine. Les arrêts
ont également précisé qu’il faut tenir compte des facilités de communication et des transports
existants.
Exemple de mutation dans le même secteur géographique : une mutation de Paris à Versailles
ou encore de Paris à Créteil.
Exemple de mutation en dehors du secteur géographique : une mutation de Paris à Rennes.
Illustration récente : « ayant relevé que le nouveau lieu de travail était distant de 80 km du
précédent et n'appartenait pas au même bassin d'emploi, la cour d’appel a fait ressortir qu’il
ne se situait pas dans le même secteur géographique et que le salarié n'avait pas commis de
faute grave en refusant sa mutation » (Soc. 20 février 2019 n° 17-24.094 F-D).

D’après la jurisprudence, le secteur géographique s’apprécie en fonction du lieu de travail du


salarié et non par rapport à son domicile. Il s’agit en effet d’une appréciation objective.
Toutefois, derrière l’habillage juridique, les juges du fond vont regarder si le salarié est obligé
de déménager.

Quid du travail à domicile dans le même secteur géographique de l’entreprise ?


L’employeur ne peut solliciter du salarié une mutation de l’entreprise à son domicile sous
réserve de réunir deux conditions :
•• Il faut l’accord du salarié, peu importe si le domicile se situe dans le même
secteur géographique, le domicile relevant de l’intimité de la vie privée. Cass.
soc. 2 octobre 2001 : « Le salarié n’est tenu ni d’accepter de travailler à
domicile ni d’y installer ses dossiers et ses instruments de travail » ;

•• Une indemnité doit être versée au salarié pour compenser l’immixtion dans sa
vie privée : arrêt Nestlé Waters Marketing, Cass. soc. 7 avril 2010
B. L’absence de clause de mobilité, mais la mention d’un lieu de travail dans le
contrat de travail du salarié.

Il arrive que le contrat de travail mentionne un lieu pour l’exécution du contrat de travail.
La question qui se pose est la suivante :
L’employeur peut-il changer ce lieu de travail sans l’accord du salarié ?
D’après la jurisprudence, « lorsque le lieu de travail est prévu par le contrat de travail, la
mention du lieu de travail n’a qu’une valeur d’information, à moins qu’il ne soit stipulé
par une clause claire et précise que le salarié exécutera son travail exclusivement dans ce
lieu » Cass. soc. 3 juin 2003 ; Cass. soc. 26 octobre 2011.
La mention du lieu a valeur informative et donc aucune portée contractuelle. Le salarié ne
peut pas s’opposer à un changement de lieu en invoquant la mention dans son contrat, sauf à
ce qu’il y ait une clause claire et précise en ce sens.

C. L’exception au principe de secteur géographique : la mutation occasionnelle


du salarié

Il existe une hypothèse dans laquelle, alors même qu’il n’y a pas de clause de mobilité,
l’employeur va pouvoir muter le salarié occasionnellement en dehors du secteur géographique
sans son accord :
C’est le cas lorsque les fonctions du salarié impliquent une certaine mobilité : Cass. soc. 22
janvier 2003.
L’affaire met en jeu un chef de chantier, cadre, qui travaille depuis dix ans dans la région
toulousaine. Son employeur décide de l’envoyer pour une mission temporaire de deux mois
à plus de 300 km de Toulouse.
La Chambre sociale de la Cour de cassation a jugé que :
« Un déplacement occasionnel imposé à un salarié en dehors du secteur géographique où
il travaille habituellement ne constitue pas une modification de son contrat de travail dès
lors que la mission est justifiée par l’intérêt de l’entreprise et que la spécificité des
fonctions exercées par le salarié implique une certaine mobilité géographique ».
C’est également le cas lorsque la mutation est motivée par l’intérêt de l’entreprise, qu’elle
est justifiée par des circonstances exceptionnelles et que le salarié a été informé
préalablement dans un délai raisonnable du caractère temporaire de la mutation et de sa
durée prévisible : Cass. soc. 3 mai 2012. (Cette solution s’applique également cas de
mutation à l’extérieur des limites géographiques d’une clause de mobilité).
Enfin, récemment, la Chambre sociale de la Cour de cassation a également admis le
déplacement occasionnel du salarié en dehors du secteur géographique lorsque celui-ci entre
dans le cadre habituel de l’activité du salarié muté : Cass. soc. 2 avril 2014.
Faits de l’espèce : « Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X… a travaillé au service de la
société Dechiron, aux droits de laquelle se trouve la société Vinci construction terrassement,
er
en qualité de chef d’équipe à compter du 1 octobre 1996, puis en qualité d’assistant chef de
er
chantier à compter du 1 août 2009 ; qu’il a été licencié pour faute grave par lettre du
22 septembre 2009, l’employeur lui reprochant ses refus successifs d’affectation sur deux
chantiers d’autoroute, le premier en Gironde et le second dans les Pyrénées-Atlantiques ; que
contestant le bien-fondé de son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud’homale ».
Solution : « Mais attendu qu’ayant constaté que le déplacement refusé par le salarié
s’inscrivait dans le cadre habituel de son activité d’assistant chef de chantier, la cour d’appel,
qui n’avait pas à procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, en a
exactement déduit que le salarié avait manqué à ses obligations contractuelles ; que le moyen
n’est pas fondé ».

Section II : LA RÉMUNÉRATION DU SALARIÉ

I. LE PRINCIPE

La rémunération constitue un élément du contrat de travail du salarié qui ne peut être modifié
sans son accord même de manière minime, même de manière plus favorable : (Cass. soc. 3
mars 98 ; Cass. soc. 23 mai 2013 au sujet d’une prime de pause).

Ainsi, toute modification, opérée directement (par modification de la clause du contrat fixant
la rémunération) ou indirectement (par modification d’un autre élément tel le lieu de travail,
le temps de travail ou la qualification), requiert l’accord du salarié. La clause du contrat qui
permettrait à l’employeur de faire varier librement la rémunération est nulle (Cass. soc. 16
juin 2004).

Actualités : 13 octobre 2021 Soc. ETABLISSEMENTS COMMERCIAUX, PRATIQUE


DU POURBOIRE, CENTRALISATION PAR L’EMPLOYEUR, REVERSEMENT AU
SALARIE. Aux termes de l'article L. 3244-1 du Code du travail, dans tous les établissements
commerciaux où existe la pratique du pourboire, toutes les perceptions faites « pour le service
» par l'employeur sous forme de pourcentage obligatoirement ajouté aux notes des clients ou
autrement, ainsi que toutes sommes remises volontairement par les clients pour le service
entre les mains de l'employeur, ou centralisées par lui, sont intégralement versées au
personnel en contact avec la clientèle et à qui celle-ci avait coutume de les remettre
directement. Ces dispositions ne font pas obstacle à ce qu'il soit décidé que les sommes
reversées par l'employeur au titre d'une rémunération au pourboire avec un salaire minimum
garanti soient calculées sur la base d'une masse à partager supérieure à celle facturée aux
clients au titre du service.
(Société Brasserie l'Européen, pourvois n° 19-24.741 19-24.750 [P])

13 octobre 2021 Soc. INDEMNITE DE CONGES PAYES, REMUNERATION


FORFAITAIRE, INCLUSION, CLAUSE CONTRACTUELLE TRANSPARENTE ET
COMPREHENSIBLE, CONDITIONS D’OPPOSABILITE AU SALARIE. Il résulte des
articles L. 3141-22 et L. 3141-26 du Code du travail, dans leur rédaction antérieure à la loi n°
2016-1088 du 8 août 2016, interprétés à la lumière de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du
Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, que s'il est possible d'inclure
l'indemnité de congés payés dans la rémunération forfaitaire lorsque des conditions
particulières le justifient, cette inclusion doit résulter d'une clause contractuelle transparente et
compréhensible, ce qui suppose que soit clairement distinguée la part de rémunération qui
correspond au travail, de celle qui correspond aux congés, et que soit précisée l'imputation de
ces sommes sur un congé déterminé, devant être effectivement pris. La clause qui n'est ni
transparente ni compréhensible ne peut donc être opposée au salarié.
(Citrix systèmes France, pourvoi n° 19-19.407 [P]

II. LA MODIFICATION DE LA PARTIE VARIABLE DE LA RÉMUNÉRATION


D’après la jurisprudence, le paiement de la partie variable de la rémunération est un élément
du contrat de travail qui ne peut être modifié sans l’accord du salarié : Cass. soc. 8 janvier
2002. La partie variable de la rémunération est donc un élément de la rémunération
contractuelle. La clause du contrat de travail ne peut être modifiée sans l’accord exprès du
salarié, peu important que l’employeur prétende que cette modification avantage l’intéressé :
Cass. soc. 3 nov. 2011.
Mais attention, la rémunération variable ne fait pas nécessairement l’objet d’une clause du
contrat de travail – elle peut avoir été mise en place après la conclusion du contrat de travail
sans que celui-ci soit modifié pour autant et dans ce cas la solution est que : « lorsque les
objectifs sont définis unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de
direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu'ils sont réalisables et qu'ils ont été portés à la
connaissance du salarié en début d'exercice » (not. Cass. soc. 9-5-2019 n° 17-20.767 F-D)

III. LA SUPPRESSION D’UNE PRIME PAR L’EMPLOYEUR

A. Les conditions de suppression d’une prime

À quelles conditions l’employeur peut-il supprimer une prime dont bénéficiait le salarié ?
Faut-il l’accord du salarié ?

3 hypothèses existent :

➢ La prime est prévue par le contrat de travail : dans ce cas on applique la solution
dégagée par l’arrêt Raquin : il s’agit d’une modification de la rémunération donc d’une
modification du contrat de travail. L’accord du salarié est indispensable.

➢ La prime est prévue par une convention collective : d’après les articles L2261-9 et
suivants du Code du travail, l’employeur devra d’abord le dénoncer dans sa totalité en
consultant préalablement le CSE s’il existe. La dénonciation est suivie d’un préavis de 3
mois à compter de la notification de la dénonciation (ou autre délai prévu par l’accord
dénoncé). Au terme du préavis, la période légale de négociation est d’un an. Si à l’issue
de ce délai (3 mois + 1 an soit au total 15 mois) aucun accord de substitution n’est
adopté, les salariés des entreprises concernées conserveront une rémunération, en
application de la convention ou de l’accord dénoncé ou mis en cause, dont le montant
annuel, pour une durée de travail équivalente à celle prévue par leur contrat de travail, ne
peut pas être inférieure à la rémunération versée lors des 12 derniers mois. Auparavant, le
législateur prévoyait que les salariés concernés puissent continuer à jouir de leurs
avantages individuellement acquis.

➢ la prime est prévue par un usage ou par un engagement un unilatéral de l’employeur


ou par un accord atypique : L’employeur ne peut revenir sur un usage, un engagement
unilatéral ou un accord atypique instituant une prime qu’en procédant à sa dénonciation
sous trois conditions :

– Information des représentants du personnel : (Cass. soc. 22 janvier 92). Cette
exigence doit s’interpréter comme celle d’une information préalable du comité d’entreprise,
et, à défaut, des délégués du personnel ;

– Information des personnes « intéressées » par la dénonciation : (Cass. soc. 22


janvier 92). Il s’agit généralement des salariés : une information individuelle de chacun
d’entre eux est alors nécessaire (Cass. soc. 27 novembre 90). Mais l’information du seul
comité d’entreprise peut suffire, s’il est seul créancier de l’engagement pris (Cass. soc. 21
novembre 89).

– Respect d’un délai de préavis suffisant : Ce délai a pour double finalité de


permettre des négociations et de laisser un temps d’adaptation aux salariés concernés. On
peut dès lors penser qu’il court à compter de la réalisation de l’ensemble des informations
susvisées. L’appréciation du délai suffisant est une question de fait appartenant au pouvoir
souverain des juges du fond.

Si l’employeur ne respecte pas ces règles pour dénoncer l’usage qu’il a instauré dans son
entreprise, celui-ci reste en vigueur et les salariés peuvent s’en prévaloir.

Remarque : lorsqu’un accord collectif ayant le même objet que l’usage ou


l’engagement unilatéral est conclu, il s’y substitue : Cass. soc. 28 janvier 1998. L’usage
cesse alors d’être appliqué, même s’il s’avérait plus favorable que l’accord collectif :
Cass. soc. 19 décembre 1990.

Il n’est pas nécessaire que l’accord collectif stipule qu’il remplace l’usage : dès lors qu’ils
ont le même objet, l’accord s’applique mettant ainsi fin à l’usage sans qu’il soit nécessaire
de procéder à sa dénonciation régulière : Cass. soc. 198 novembre 1997. En revanche, s’ils
n’ont pas le même objet, l’accord collectif ne met pas fin à l’usage (Cass. soc. 9 juill. 1996
Régie Régir c/Padieu et a.). Ce nouvel accord peut prévoir le maintien des avantages
acquis antérieurement à son entrée en vigueur. Dans ce cas, l’avantage qui résultait de
l’usage ou de l’engagement unilatéral, lequel a disparu du fait du nouvel accord collectif,
est considéré comme un avantage acquis qui s’incorpore au contrat de travail et dont les
salariés peuvent continuer à bénéficier (Cass. soc, 14 juin 2000. n° 98-41.703. URSSME
c/Dore et a).

B. Rappel des définitions de l’usage, de l’engagement unilatéral de l’employeur et de


l’accord atypique

1. Définition de l’usage

Un usage est une pratique de l’employeur qui confère un avantage aux salariés et qui présente
les caractères de :
– Généralité,
– Constance, stabilité,
– Fixité.
Par généralité, il faut entendre « avantage non individuel ». Pour qu’il y ait usage, l’avantage
doit être collectif. Il doit donc être reconnu soit à l’ensemble des salariés, soit à une catégorie
ou un groupe de salariés déterminés (Cass. soc. 28 févr. 1996, n° 93-40.883. Duprez
c/Bioteau).

Le caractère de stabilité, ou de constance, impose que l’avantage ait été attribué à plusieurs
reprises. La notion même d’usage impose qu’il y ait une répétition et que l’avantage ait été
attribué au moins deux fois même si les tribunaux exigent généralement une répétition plus
importante. L’unique versement d’une prime est insuffisant pour qu’il en résulte un usage
(Cass. soc. 13 févr. 1996. n° 92-45.247. SA SARP c/Morantin). En revanche, une prime
versée pendant quatre années, même si elle n’a jamais été portée sur le bulletin de salaire, est
due (Cass. soc. 28 févr. 1996. n° 93-40.883. Duprez c/Bioteau).

Un usage doit être fixe. Le versement, même régulier, d’une prime qui ne dépend d’aucun
critère fixe et précis et dont le montant a toujours été variable ne peut constituer un usage
(Cass. soc. 13 mars 1996. n° 93-40.782. Ferreira c/Sté Roger Junca). En revanche, l’usage
peut être établi si le mode de calcul de la prime est fixe, mais que son montant est variable
(prime de résultat par exemple). De même, lorsqu’il est constaté que l’entreprise a toujours
accordé des hausses de salaires indexées sur l’évolution du taux des rentes d’accident du
travail, l’existence d’un usage est établie (Cass. soc. 16déc. 1998. n° 95-40.385. FNATH
c/Faurie et a.).

2. Définition de l’engagement unilatéral de l’employeur

L’employeur peut prendre, vis-à-vis des salariés, un engagement de faire (verser une prime
par exemple) ou de ne pas faire (ne pas licencier pendant un certain délai).
De manière générale, il s’agit de toute manifestation de volonté de l’employeur à l’égard de
l’ensemble des salariés.

Cet engagement peut résulter par exemple :

– D’une décision prise devant l’ensemble du personnel (Cass. Soc. 22 janv. 1992. N° 89-
42.841. Sté clinique Saint-Tronc c/lste) ;
– D’une décision prise devant le comité d’entreprise ou une autre institution représentative
du personnel ;
– D’un protocole de fin de conflit ;
– D’une clause de règlement intérieur accordant des droits aux salariés dans une matière
autre que la discipline et l’hygiène et la sécurité (Cass. Soc. 7 juin. 1998. n° 96-42.521.
Rancurel c/Ligue de l’enseignement et de l’éducation permanente) ;
– D’une note de service ou de la direction des ressources humaines.
L’engagement unilatéral doit être appliqué en respectant les conditions qu’il prévoit.
Toutefois, seule une clause précise définissant objectivement l’étendue et les limites de
l’obligation souscrite par l’employeur peut constituer une condition d’application d’un
engagement unilatéral de l’employeur. Ainsi, un employeur ne peut subordonner le versement
d’une prime de fin d’année aux « résultats économiques suffisants » de l’entreprise (Cass.
soc., 27 juin 2000. n° 99-41.926. Kbibech et a. c/SNC Sohito Alliance Trois Rivières).

Quid de l’application volontaire d’une convention collective par l’employeur : s’agit-il


d’un engagement unilatéral ?

L’application volontaire d’une convention collective aux salariés de l’entreprise alors que
l’entreprise n’y est pas normalement soumise, constitue un engagement unilatéral de
l’employeur. L’employeur peut donc y mettre fin en respectant la procédure de dénonciation
des usages et engagements unilatéraux (Cass. soc. 31 janv. 1996. n° 93-41.254. Sté Indre
bureautique services c/Fouquet).
Le fait de dénoncer cet engagement met fin à l’application de la convention aux salariés de
l’entreprise sans qu’il y ait lieu à maintien des avantages individuels acquis (contrairement à
la dénonciation d’un accord collectif).

3. Définition de l’accord atypique

Constitue un accord atypique l’accord signé par l’employeur qui ne répond pas aux
conditions de conclusion d’un accord collectif. Si cet accord ne peut produire les effets
d’un accord collectif, il vaut, en revanche, engagement unilatéral de l’employeur.
Sont des accords atypiques :
– L’accord qui n’a pas fait l’objet d’un écrit. Un accord collectif devant être écrit, s’il est
simplement oral, il ne peut acquérir la force obligatoire d’un accord. En revanche, il peut
constituer un engagement unilatéral de l’employeur dès lors que la volonté de s’engager est
démontrée (Cass. soc., 26 mars 1997. n° 94-43.146. Sté Gadso c/Peyret) ;
– L’accord signé avec des salariés n’ayant pas la qualité de délégués syndicaux (Cass. Soc.
15 juill. 1998. n° 96-41.1 18. Centre de gestion de comptabilité fiscale agricole de l’Oise
c/Delon) ;
– L’accord conclu avec le comité d’entreprise (Cass. soc., 18 mars 1997. n° 93-43.989. Sté
Allianz via assurances/ARD c/Vialle et a.) ou avec des délégués du personnel.

C. Le versement de la prime conditionnée à la présence du salarié dans l’entreprise

L’employeur peut conditionner le versement de la prime à la présence effective du salarié à


une date donnée. Par exemple, il a été admis que l’employeur soit autorisé à ne pas verser une
prime à une salariée absente pour congé maternité le 31 décembre, date du versement de la
prime annuelle, dès lors que la convention collective instituant la prime subordonne son
attribution à la présence du salarié au moment du versement (Cass. soc. 22 juillet 1986 n° 83-
45.528, Cass. soc. 10 juin 1992).

Si la prime ne résulte pas de la convention collective, mais d’un usage, il est souhaitable
d’avoir une note de service dans l’entreprise indiquant clairement les conditions d’attribution
de la prime.

Le paiement d’une prime ou d’un accessoire du salaire peut-il être conditionné à la présence
du salarié l’année suivante ? C’est la question à laquelle la Cour de cassation a répondu dans
son arrêt du 27 mars 2013.
Dans cette affaire, un employeur avait mis en place, par engagement unilatéral, une prime
d’expatriation dont le versement était subordonné à la présence du salarié dans les effectifs de
l’entreprise l’année suivante. Un salarié qui avait passé plusieurs mois à l’étranger avant de
démissionner ne remplissait pas cette condition, mais estimait que cette prime lui était due. Il
a saisi le conseil de prud’hommes pour en obtenir le paiement.
La Cour de cassation décide d’invalider la condition de présence exigée par l’employeur et
d’accorder au salarié sa prime d’expatriation. En effet, elle estime que l’ouverture du droit à
un élément de la rémunération afférant à une période travaillée peut être soumise à une
condition de présence à la date de son échéance, mais que le droit à la rémunération est
acquis lorsque cette période a été intégralement travaillée et ne peut pas être soumis à
une condition de présence à une date postérieure.
Ainsi, l’employeur aurait pu subordonner le versement de la prime d’expatriation au fait que
le salarié mène à son terme la mission à l’étranger, mais pas à la présence du salarié dans les
effectifs l’année suivant la mission.

D. Le versement de la prime au prorata du temps passé dans l’entreprise


L’employeur peut aussi verser la prime au prorata de la présence du salarié sur l’année.
Ainsi, il peut appliquer sur le montant de la gratification un abattement proportionnel au
temps d’absence si celle-ci a pour objet de rémunérer une activité effective ou de récompenser
les services rendus. À moins que l’acte juridique ou l’usage instituant la prime assimile
certaines périodes de suspension à une période de travail effectif. La prime étant versée aux
salariés en contrepartie de son activité, elle s’acquiert nécessairement au fur et à mesure. Le
salarié peut donc prétendre à un règlement de sa prime au prorata de son temps de
présence (Cass. soc. 23 mars 2011 : un salarié quitte l’entreprise avant la fin de
l’exercice annuel et réclame le règlement de sa prime d’objectif au prorata de son temps
de présence dans l’entreprise. La Cour de cassation fait droit à sa demande).

Une prime de fin d’année peut être diminuée, compte tenu des jours d’absence, même si ceux-
ci sont dus à une absence pour congé de maternité (Cass. soc. 11 avril 1991 n° 87-41.975). Il
faut évidemment dans ce cas qu’il n’y ait pas de discrimination, aussi, quelle que soit la
raison de l’absence, le montant de la prime doit alors être proratisé.

E. La privation ou la réduction de la prime en cas de faute du salarié

La privation de la prime pour sanctionner le salarié est illicite, car cela reviendrait à
sanctionner pécuniairement le salarié : Cass. soc. 11 février 2009.

IV. LES CLAUSES DE VARIATION DE LA RÉMUNÉRATION

Les clauses de variation du contrat de travail permettent d’anticiper la modification


d’éléments contractuels intangibles tels que la rémunération et les horaires de jour ou de nuit.

Avec ce genre de clause, le salarié accepte dès la conclusion du contrat de travail de conférer
à l’employeur une prérogative contractuelle exorbitante consistant à lui permettre de modifier
unilatéralement un élément du socle contractuel.
Ces clauses ne sont toutefois que très rarement admises.

Une clause du contrat de travail peut prévoir une variation de la rémunération du salarié sous
trois conditions : Cass. soc. 2 juillet 2002 ; Cass. soc. 10 mai 2007.
– Elle doit être fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de
l’employeur ;
– Elle ne doit pas faire porter le risque d’entreprise sur le salarié ;
– Elle ne doit pas avoir pour effet de réduire la rémunération en dessous des minima
légaux et conventionnels.
Le contrat de travail peut prévoir l’existence de primes de rentabilité dont le montant sera
fixé par l’employeur en fonction de variables déterminées à l’avance et objectives : Cass.
soc. 8 janvier 2002.
« Une clause du contrat de travail ne peut permettre à l’employeur de modifier
unilatéralement la rémunération contractuelle du salarié ». Toute clause du contrat de travail
autorisant à procéder à une modification de la rémunération en fonction de critères imprécis
(Cass. soc. 30 mai 2000) ou unilatéralement fixés par l’employeur est nulle (Cass. soc. 27
février 2001).

Par un arrêt rendu le 14 novembre 2018, la Chambre sociale de la Cour de cassation casse la
décision d’appel au visa de l’article L. 1121-1 du Code du travail, ensemble l’article 1134 du
Code civil dans sa rédaction applicable à la cause. Plus précisément, elle énonce « qu’une
clause du contrat de travail ne peut permettre à l’employeur de modifier unilatéralement le
contrat de travail ». Ayant constaté que les contrats stipulaient que les salariés effectueront des
horaires de soir ou des horaires de nuit et bénéficieraient des primes afférentes, les juges
d’appel ont violé les textes visés.

Pour mémoire : la rémunération contractuelle est sans doute l’élément le mieux protégé du
socle contractuel, l’employeur ne pouvant unilatéralement en faire varier ni le montant (Cass.
soc., 3 mars 1998, n° 95-43.274, Bull. civ. V, n° 109) ni la structure (Cass. soc., 28 janv. 1998,
n° 95-40.275, Bull. civ. V, n° 40). Au contraire, les horaires de travail du salarié ne relèvent
pas du champ contractuel, mais du domaine des conditions de travail (Cass. soc., 22 févr.
2000, n° 97-44.339, Bull. civ. V, n° 67) à moins d’avoir été « expressément précisés et, à la
demande de la salariée, acceptés par l’employeur » (Cass. soc., 11 juill. 2001, n° 99-42.710,
Bull. civ. V, n° 213). La règle de principe a été peu à peu nuancée d’exceptions lorsque le
changement d’horaires implique le passage d’horaires fixes à des horaires variables (Cass.
soc., 14 nov. 2000, n° 98-43.218, Bull. civ. V, n° 365), la privation du repos dominical (Cass.
soc., 2 mars 2011, n° 09-43.223, Bull. civ. V, n° 56) et surtout, pour ce qui nous concerne, le
passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit et vice-versa (Cass. soc., 22 mai 2001, n° 99-
41.146, Bull. civ. V, n° 178), y compris si ce changement est temporaire (Cass. soc., 18 sept.
2013, n° 12-18.065, inédit). Dans ces hypothèses, l’accord du salarié est indispensable.

Cette décision marque un changement du fondement de l’interdiction des clauses de variation


bien qu’il semble difficile de déterminer l’intention exacte de la chambre sociale dans ce
revirement.

Il est constant que l’article L. 1121-1 du Code du travail, qui garantit que nul ne peut « 
apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui
ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but
recherché », soit utilisé pour limiter la mise en œuvre d’une clause contractuelle ou du
pouvoir de direction de l’employeur (sur la mise en œuvre de la clause de mobilité : Cass.
soc., 10 févr. 2016, n° 14-17.576, inédit ; d’une clause de mission : 12 juill. 2010, n° 08-
44.363, inédit ; du pouvoir de changer unilatéralement les horaires de travail : 3 nov. 2011,
n° 10-14.702, Bull. civ. V, n° 246, Semaine sociale Lamy n° 1518, p. 11, note A. Fabre, RDT
2012, p. 31).

Il est en revanche nettement moins fréquent que ce fondement soit invoqué dans le but
d’apprécier la validité d’une clause contractuelle.

Il sera observé que la validité de clauses relatives à la rémunération ou aux horaires de travail
ne trouve pas aisément de fondement sur l’article L. 1121-1 du Code du travail.

La condamnation de la clause relative aux changements d’horaires est prononcée dans cet
arrêt de manière générale, en ce qu’elle ne fait pas égard à la situation spécifique des salariés.

Pourtant, il aurait pu paraître cohérent de défendre que leur droit au repos et à une vie
familiale « normale » sont mieux garantis par un travail de jour que par un travail de nuit.

La rémunération du salarié pourrait sans doute être classée au rang des droits fondamentaux,
ne serait-ce qu’en raison du droit à un salaire décent ou équitable garanti par différentes
conventions internationales (par exemple, l’article 3 de la Convention n° 131 de l’OIT ou
l’article 4 de la Charte sociale européenne révisée).

Il sera enfin rappelé que la chambre sociale n’a jamais condamné les clauses de variation de
la rémunération à ce titre et a toujours préféré une argumentation purement contractuelle
fondée sur l’ancien article 1134 du Code civil.

V. LES CLAUSES D’OBJECTIFS

Rappel : une clause du contrat de travail peut prévoir une variation de la rémunération du
salarié sous trois conditions : Cass. soc. 2 juillet 2002 ; Cass. soc. 10 mai 2007 :
– Elle doit être fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de
l’employeur ;
– Elle ne doit pas faire porter le risque d’entreprise sur le salarié ;
– Elle ne doit pas avoir pour effet de réduire la rémunération en dessous des minima
légaux et conventionnels.
Le contrat de travail peut prévoir l’existence de primes de rentabilité dont le montant sera fixé
par l’employeur en fonction de variables déterminées à l’avance et objectives : Cass. soc. 8
janvier 2002
« Une clause du contrat de travail ne peut permettre à l’employeur de modifier
unilatéralement la rémunération contractuelle du salarié ». Toute clause du contrat de travail
autorisant à procéder à une modification de la rémunération en fonction de critère imprécis
(Cass. soc. 30 mai 2000) ou unilatéralement fixé par l’employeur est nulle (Cass. soc. 27
février 2001).
A. Définition de la clause d’objectif

On parle également de clause de résultat ou encore de clause de quota.


Elle recouvre, dans la pratique, tous les éléments variables de rémunération liés à la
performance du salarié.

B. Conditions de validité des clauses d’objectifs

Pour être valable, elle doit fixer des objectifs raisonnables, dans le sens où ils doivent être
réalistes et réalisables, compte tenu, de première part, de la situation économique du secteur
professionnel dans lequel intervient le salarié, de deuxième part, du niveau de compétence de
ce dernier : Cass. soc. 13 mars 2001.

« Les objectifs peuvent être définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son
pouvoir de direction » Cass. soc. 22 mai 2001 :

Lorsque les objectifs sont définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son
pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu’ils sont réalisables et qu’ils ont été
portés à la connaissance du salarié en début d’exercice (Cass. soc. 2 mars 2011).

En revanche, la contractualisation des objectifs impose à l’employeur de recueillir l’accord du


salarié pour toute modification en cours d’exécution du contrat (conséquence du célèbre arrêt
Raquin).

C. Quelques jurisprudences sur les clauses d’objectif

Cass. soc. 11 juillet 2012 :


Un contrat de travail prévoit une prime sur objectifs dont le versement est subordonné à la
réalisation d’objectifs fixés annuellement d’un commun accord. Si pour l’année X, aucun
accord n’a été fixé entre les parties et que le salarié réclame le versement de sa prime sur
objectifs, elle doit lui être versée. Le montant est fixé par le juge.

Cass. soc. 10 mai 2012 : s’il est prévu que les objectifs sont fixés lors des entretiens
d’évaluation et que l’entretien d’évaluation n’a pas eu lieu alors l’employeur ne peut pas
prendre en compte les objectifs de l’année précédente pour apprécier si le salarié a atteint ou
non les objectifs.

Cass. soc. 9 mars 2011 : quid de la preuve des objectifs atteints ou non ?
D’après la Cour de cassation, « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit
l’extinction de son obligation ».
Il incombe donc à l’employeur (se prétendant libéré…) : « de justifier des éléments
permettant de déterminer si les objectifs fixés au salarié avaient été atteints » et non
l’inverse.

Section III – LA QUALIFICATION PROFESSIONNELLE DU SALARIÉ

I. LE PRINCIPE

L’atteinte à la qualification professionnelle du salarié constitue une modification du contrat de


travail nécessitant son accord : Cass. soc. 16 décembre 1998.
Il en va autrement du poste auquel il est affecté.
Ainsi, un changement de tâche entrant dans la qualification du salarié n’est pas une
modification du contrat de travail : Cass. soc. 17 novembre 2004.
En revanche, un changement de tâche affectant la qualification du salarié constitue une
modification du contrat de travail nécessitant son accord : Cass. soc. 18 janvier 2012.
Dans cette affaire, l’employeur avait fait unilatéralement passer le salarié d’un poste de
téléopérateur chargé de prestations administratives à un poste de prospection
commerciale, ce qui constituait, d’après la Cour de cassation, une modification de la nature
de ses fonctions et donc de sa qualification professionnelle et partant, de son contrat de
travail, qui ne pouvait lui être imposé.

II. L’HYPOTHÈSE PARTICULIÈRE DE LA MODIFICATION SANCTION : LA


RÉTROGRADATION

L’articulation des règles régissant la modification du contrat de travail avec le droit


disciplinaire a été précisée dans un arrêt 16 juin 1998 société Hôtel le Berry : « Une
modification du contrat de travail prononcée à titre de sanction disciplinaire contre un
salarié ne peut lui être imposée. Cependant, en cas de refus du salarié, l’employeur peut,
dans le cadre de son pouvoir disciplinaire, prononcer une sanction autre aux lieu et place de la
sanction refusée ».

Cette construction jurisprudentielle a été parachevée avec l’arrêt soc. 15 juin 2000
Bensoussan c/société Spada (Bull. n° 233), qui précise que le salarié doit consentir
expressément à la modification-sanction de son contrat de travail. Son acceptation,
conformément à la jurisprudence constante de la Chambre sociale de la Cour de cassation en
ce domaine, ne peut résulter de son absence de protestation à la modification ou de la seule
poursuite de l’exécution du contrat modifié.

En outre, l'employeur doit impérativement informer le salarié de sa faculté d’accepter ou de


refuser la modification sanction du contrat de travail comme en témoigne une illustration
jurisprudentielle : « A un caractère disciplinaire la modification du contrat de travail
constitutive d’une rétrogradation, proposée au salarié après l’entretien préalable à une
sanction disciplinaire. Ayant constaté que la sanction mise en œuvre n’avait pas fait l’objet
d’une notification écrite motivée et que l’employeur ne justifiait pas avoir informé le salarié
de sa faculté de l’accepter ou de la refuser, la cour d’appel a pu décider qu'elle devait être
annulée » (Soc., 9 mai 2019, n° 17-20.706 FS-D).

À défaut d’acceptation expresse de la part du salarié de la modification-sanction, l’employeur


pourra réprimer le comportement fautif par une sanction autre. Cette sanction de
remplacement pourra aller jusqu’au licenciement. Toutefois, ainsi que le précise l’arrêt soc.
12 juillet 2000 Bengeloune c/association Les Amis des Ouvrières Isolées, le licenciement
qui fait suite au refus du salarié d’accepter la modification de son contrat à titre de
sanction n’a de cause que si la sanction initiale était justifiée. Et, en tout état de cause, si
le licenciement est uniquement motivé par le refus du salarié d’accepter cette
modification, ce licenciement sera dépourvu de cause réelle et sérieuse puisque ce seul
refus est dépourvu de caractère fautif : Cass. soc. 29 novembre 2000 société SEP
c/Grisard.

III. L’ATTEINTE AUX RESPONSABILITÉS DU SALARIÉ : UNE


MODIFICATION DU CONTRAT DE TRAVAIL

Cass. soc. 29 janvier 2014 :


Par l’arrêt du 29 janvier 2014, la Chambre sociale de la Cour de cassation a considéré que
l’appauvrissement des missions et de ses responsabilités, subi par le salarié, lequel avait vidé
son poste de sa substance, constituait bien une modification imposée de son contrat de travail
justifiant la prise d’acte de ce dernier.
Cette solution n’est pas nouvelle. En effet la Cour de cassation avait déjà jugé que lorsque
l’étendue des fonctions et le niveau de responsabilité du salarié sont fortement réduits, il y a
modification du contrat nécessitant son accord même si sa rémunération ou sa qualification
n’est pas affectée (Cass. soc. 30 mars 2011,n°09-71.824). C’est également le cas lorsque
l’employeur réduit les responsabilités d’un directeur de gestion des risques et l’éloigne de la
sphère dirigeante par une mise à l’écart des réunions stratégiques (Cass. soc. 2 mars 2011,
n°09-40.547), ou qu’il retire à un salarié des tâches importantes pour lui en donner des
moindres, même si cela ne s’accompagne d’aucune baisse de salaire et de qualification (Cass.
soc. 25 mai 2011, no 10-18.994). Idem en cas de retrait d’une délégation de signature
puisque, de fait, le salarié aura des fonctions moins importantes (Cass. soc. 26 oct. 2011, no
10-19.001).

Section IV – LA DURÉE DE TRAVAIL DU SALARIE

I. LE PRINCIPE
La modification de la durée de travail du salarié constitue une modification de son contrat de
travail qui suppose l’accord du salarié : Cass. soc. 20 octobre 1998.
Exemple : passage de 28 heures de travail par semaine à 35 heures : dans une telle hypothèse,
il faudra l’accord du salarié.

II. L’EXCEPTION :
L’exercice des heures supplémentaires, c’est dire des heures dépassant la durée légale de
travail (35 heures de travail par semaine), relève du pouvoir de direction de l’employeur et
s’impose donc au salarié dans la limite du contingent autorisé par la loi (220 heures par an et
par salarié.)
En d’autres termes si l’employeur demande à un salarié d’effectuer des heures
supplémentaires dans le respect des 220 heures par an et par salarié, alors ce salarié n’aura pas
le droit de refuser. Son refus constitue une faute justifiant le licenciement : Cass. soc. 9 mars
99.
Exemple : passage de 35 heures de travail par semaine à 37 heures : ici, les heures
supplémentaires s’imposeront au salarié.

III. QUID DU CHANGEMENT D’HORAIRE ?

A. Le principe :
La modification des horaires de travail ne constitue pas une modification du contrat de travail
et s’impose donc au salarié. Le refus du salarié s’analysera comme une insubordination
pouvant faire l’objet de sanctions disciplinaires.
B. Les exceptions
– si le changement d’horaire s’accompagne d’une modification de la durée de travail, alors il
s’agira d’une modification du contrat de travail nécessitant l’accord du salarié.
– si le changement des horaires est d’une telle intensité qu’il affecte la vie privée et familiale
du salarié, alors l’accord du salarié sera nécessaire.
C’est le cas notamment du passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit, d’un horaire
continu à un horaire discontinu (Cass. soc. 3 novembre 2011) ou encore de la privation du
repos dominical (Cass. soc. 18 janvier 2012).
En toute hypothèse, la décision de l’employeur relative aux horaires, qui vaut en principe
changement des conditions de travail, sera qualifiée de modification du contrat de travail à
partir du moment où la transformation des conditions de travail dépasse un certain seuil
d’intensité.

FICHE 5 : LE RÉGIME JURIDIQUE DE LA MODIFICATION DU CONTRAT DE


TRAVAIL

I. LES ÉTAPES PROCÉDURALES AUXQUELLES L’EMPLOYEUR EST TENU

A- La modification du contrat de travail pour un motif économique

Aux termes de l’article L1222-6 du Code du travail, l’employeur qui entend modifier le
contrat de travail du salarié pour un motif économique devra respecter les étapes procédurales
suivantes :

1. Notifier par LRAR la proposition de modification

La lettre doit contenir la modification envisagée ;

La lettre doit informer le salarié qu’il dispose d’1 mois pour faire connaître son refus et qu’à
défaut il sera réputé avoir accepté ;

La lettre doit informer le salarié de ses nouvelles conditions d’emploi et des éventuelles
mesures accompagnant la proposition ;
La lettre doit être précise (à défaut de quoi le futur éventuel licenciement sera abusif).

2. Délai de réflexion de 1 mois

Le salarié dispose d’un délai de réflexion de 1 mois pendant lequel il peut approuver ou
désapprouver la proposition. Si le salarié ne répond pas, il est considéré avoir accepté.

Cass. soc. 20 février 2013 : Alors qu’une modification de son lieu de travail lui a été
proposée, le salarié n’avait pas clairement refusé la modification, mais simplement signifié à
l’employeur que son contrat de travail stipulait un lieu de travail différent et qu’il bénéficiait
d’une clause de garantie d’emploi. La Cour de cassation a considéré que ces propos
équivalaient à un refus de la proposition. Contrairement au consentement du salarié qui doit
être exprès, son refus peut être beaucoup plus équivoque.

3. Dans tous les cas la modification effective ne doit pas intervenir avant le délai de
1 mois

B- La modification du contrat de travail pour un motif non économique

Si la modification n’a pas une cause économique (ex. : reclassement d’un salarié inapte), la
loi ne prévoit pas de procédure particulière. Cependant l’employeur doit informer le salarié de
sa proposition de modification et lui laisser un délai suffisant de réponse.

L’absence de réponse du salarié au terme de ce délai ne vaut pas acceptation. Le salarié peut
réagir, même longtemps après la mise en œuvre de la modification.

Si le salarié accepte la modification, sa volonté doit être claire et non équivoque (si possible
par avenant).

La procédure à suivre peut également résulter des dispositions de la convention collective


applicable à l’entreprise, à laquelle il conviendra donc, le cas échéant, de se reporter.

ATTENTION : si la modification a un motif disciplinaire (par ex. rétrogradation disciplinaire)


l’employeur devra suivre la procédure disciplinaire normale !

II. LES CONSÉQUENCES D’UN REFUS DU SALARIÉ

A. Le refus du salarié en cas de changement des conditions de travail

Le salarié qui refuse de se soumettre à un changement des conditions de travail


unilatéralement décidé par l’employeur refuse en réalité d’exécuter son contrat. Le refus d’un
changement des conditions de travail est donc un acte d’insubordination. La Cour de
cassation apporte une limite dans l’insubordination du salarié : seul le changement intervenu
dans des conditions caractéristiques de la bonne foi contractuelle et dans l’intérêt de
l’entreprise, ce que la Cour de cassation présume (Cass. soc. 3 octobre 2007), est susceptible
de caractériser l’insubordination du salarié.

B. Le refus du salarié en cas de modification du contrat de travail

Dans l’hypothèse où l’employeur a respecté la procédure dégagée par l’arrêt Raquin, à savoir
qu’il a proposé la modification au salarié avant d’y procéder, il sera confronté :

– Soit à l’acceptation (qui doit être expresse et non équivoque),


– Soit au refus du salarié.

Dès lors qu’elle est claire et non équivoque, l’acceptation du salarié permet à l’employeur de
mettre en œuvre la mesure projetée.

En revanche, lorsque le salarié rejette la proposition de modification, l’employeur ne peut


jamais l’imposer. Le refus emporte la caducité de l’offre. L’employeur qui impose la
modification commet une faute contractuelle. En riposte, le salarié peut demander au juge de
constater la rupture du contrat aux torts de l’employeur par le biais de la prise d’acte (Cass.
soc. 2 octobre 2001) ou de prononcer cette rupture au moyen de l’action en résiliation
judiciaire (Cass. soc. 20 janvier 1998).

Face au refus du salarié, l’employeur est confronté à une alternative :

– Soit il abandonne son projet de modification du contrat (il choisit alors la poursuite
du contrat dans les conditions d’exécution antérieures) ;

– Soit il procède au licenciement du salarié.

S’il opte pour le licenciement, il doit arguer d’un motif de rupture du contrat qu’il ne
trouvera pas dans le refus du salarié (Cass. soc. 23 janvier 2001). Seules les motivations à
l’origine de la proposition de modification du contrat sont susceptibles de conférer une cause
à la rupture du contrat : Cass. soc. 8 juin 2011.

1) Dans le cas d’un refus suite à une modification pour un motif économique

Si le salarié refuse la proposition qui lui est faite, l’employeur doit soit renoncer à la
modification, soit procéder au licenciement du salarié dans le respect des règles de fond et de
forme du licenciement pour motif économique. Le simple refus ne constitue pas une cause
réelle et sérieuse de licenciement.

Il doit donc avoir essayé de reclasser le salarié.

Il revient alors au conseil de prud’hommes d’apprécier la cause économique, conséquences


classiques de la procédure de licenciement.

2) Dans le cas d’un refus suite à une proposition de modification pour un motif non
économique

Le simple fait de refuser ne peut pas être une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Si le salarié reste silencieux ou s’il refuse la proposition qui lui est faite, l’employeur doit soit
renoncer à la modification, soit procéder au licenciement dans le respect des règles de fond et
de forme du licenciement pour motif personnel ou disciplinaire, si la modification est basée
sur un motif disciplinaire.

Attention : le licenciement uniquement fondé sur le fait de refuser une modification du


contrat par le salarié est abusif (exemple : je te licencie parce que tu as refusé ma
demande de modification de ton poste). En revanche, l’employeur peut toujours
licencier sur le motif qui l’a poussé à demander la modification. Si l’employeur opte pour
le licenciement, il doit arguer d’un motif de rupture du contrat qu’il ne trouvera pas dans le
refus du salarié. Seules les motivations à l’origine de la proposition de modification du contrat
sont susceptibles de conférer une cause à la rupture du contrat.

FICHE 6 : L’ÉGALITÉ DE TRAITEMENT ENTRE SALARIÉS

Actualités : 24 juin 2021 soc. Engagement unilatéral de l’employeur, différence de


traitement, raisons objectives, appréciation du juge, rattrapage salarial, sites industriels,
date de recrutement des salaries : une différence de traitement établie par engagement
unilatéral ne peut être pratiquée entre des salariés de la même entreprise et exerçant un travail
égal ou de valeur égale, que si elle repose sur des raisons objectives, dont le juge doit
contrôler la réalité et la pertinence.
Si l’employeur justifie une différence de traitement avec les salariés du site de nettoyage
d’une polyclinique par sa volonté de réduire les disparités entre des salariés dont les contrats
de travail se sont poursuivis sur un autre site de nettoyage (en application d’une garantie
d’emploi instituée par la convention collective des entreprises de propreté) et ceux recrutés
postérieurement sur le même site et placés dans une situation identique, cette différence de
traitement repose sur une justification objective et pertinente.
(société elior services propreté et santé pourvoi n° 19-21.772)

Soc. 5 mai 2021, n° 19-20.547 principe d’égalité de traitement :


Vu le principe d’égalité de traitement et les articles L. 3132-16 et L. 3132-19 du code du
travail :
En application de ce principe, si des mesures peuvent être réservées à certains salariés, c’est à
la condition que tous ceux placés dans une situation identique, au regard de l’avantage en
cause, aient la possibilité d’en bénéficier, à moins que la différence de traitement soit justifiée
par des raisons objectives et pertinentes et que les règles déterminant les conditions
d’éligibilité à la mesure soient préalablement définies et contrôlables.
Il résulte des deux textes susvisés que dans les industries ou les entreprises industrielles,
lorsqu’une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une
convention ou un accord collectif de travail étendu le prévoit, le personnel d’exécution
fonctionne en deux groupes dont l’un, dénommé équipe de suppléance, a pour seule fonction
de remplacer l’autre pendant le ou les jours de repos accordés au premier groupe. La
rémunération des salariés de l’équipe de suppléance est majorée d’au moins 50 % par rapport
à celle qui serait due pour une durée équivalente effectuée suivant l’horaire normal de
l’entreprise.

Le principe demeure que « doivent être traités de façon identique les travailleurs placés dans
une même situation au regard d’un avantage » (cf. Soc. 29 octobre 1996 « Ponsole » nº 92-
43680 Bull. nº 359 – Soc. 30 avril 2009 nº 07-40527 Bull. nº 121 – Soc. 20 février 2008 nº
06-40085 Bull. nº 38).

Mais il est reconnu que les partenaires sociaux peuvent amender ce principe.

Selon la Cour de cassation, dès lors qu’elles « s’opèrent par voie de conventions ou d'accords
collectifs négociés et signés par des organisations syndicales représentatives, investies de la
défense des droits et intérêts des salariés et à l'habilitation desquelles ces derniers participent
directement par leur vote », sont « présumées justifiées les différences de traitement » :

« entre catégories professionnelles » (Soc. 27 janvier 2015 nº 13-14773 Bull. nº 8 – nº


13-22179 Bull. nº 9 – nº 13-25437 Bull. nº 10 PBRI)

« entre des salariés exerçant, au sein d’une même catégorie professionnelle, des
fonctions distinctes » (Soc. 8 juin 2016 nº 15-11324 Bull. en cours – égal. Soc. 26 avril
2017 nº 15-23968 Bull. en cours – Soc. 28 juin 2017 nº 16-12571)

« entre des salariés appartenant à la même entreprise mais à des établissements


distincts » (Soc. 3 novembre 2016 nº 15-18444 PBRI – Soc. 4 octobre 2017 nº 16-
17517 Bull. en cours – Soc. 10 avril 2019 n° 17-20.822)

« entre les salariés dont le contrat de travail a été transféré en application d'une
garantie d'emploi instituée par voie conventionnelle qui résulte de l'obligation à
laquelle est tenu l'employeur de maintenir au bénéfice des salariés transférés les
droits qui leur étaient reconnus chez leur ancien employeur au jour du transfert »
(Soc. 30 mai 2018 nº 17-12782)

- « la différence de traitement entre les salariés dont le contrat de travail a été


transféré en application d'une garantie d'emploi instituée par voie conventionnelle et
les salariés de l'employeur entrant, qui résulte de l'obligation à laquelle est tenu ce
dernier de maintenir au bénéfice des salariés transférés les droits qui leur étaient
reconnus chez leur ancien employeur au jour du transfert, n'est pas étrangère à toute
considération de nature professionnelle et se trouve dès lors justifiée au regard du
principe d'égalité de traitement » (Soc. 10 avril 2019 n° 17-20.864 n° 17-20.822 n°
17-20.857 n° 17-20.866 – Soc. 20 mars 2019 n° 17-19.280).

Ces arrêts laissaient à penser que le principe d’égalité était entièrement dans les mains des
partenaires sociaux qui pouvaient totalement l’amender selon les besoins de leur négociation
collective.

Mais par un arrêt bénéficiant de la plus grande diffusion, la Cour de cassation a tempéré sa
jurisprudence :

Le principe : « La reconnaissance d’une présomption générale de justification de


toutes différences de traitement entre les salariés opérées par voie de conventions ou
d’accords collectifs, de sorte qu’il appartient à celui qui les conteste de démontrer que
celles-ci sont étrangères à toute considération de nature professionnelle, serait, dans
les domaines où est mis en oeuvre le droit de l’Union, contraire à celui-ci en ce
qu’elle ferait reposer sur le seul salarié la charge de la preuve de l’atteinte au
principe d’égalité et en ce qu’un accord collectif n’est pas en soi de nature à justifier
une différence de traitement. En outre, dans ces domaines, une telle présomption se
trouverait privée d’effet dans la mesure où les règles de preuve propres au droit de
l’Union viendraient à s’appliquer. Partant, la généralisation d’une présomption de
justification de toutes différences de traitement ne peut qu’être écartée ».
Le corollaire au cas d’espèce : « Il en résulte qu’ayant retenu qu’un accord collectif
opère, entre les salariés, une différence de traitement en raison uniquement de la date
de présence sur un site désigné, que les salariés sont placés dans une situation
exactement identique au regard des avantages de cet accord dont l’objet est de
prendre en compte les impacts professionnels, économiques et familiaux de la mobilité
géographique impliqués par le transfert des services sur un autre site et
d’accompagner les salariés pour préserver leurs conditions d’emploi et de vie
familiale, la cour d’appel en a déduit à bon droit que, s’agissant d’une différence de
traitement fondée sur la date de présence sur un site, celle-ci ne saurait être présumée
justifiée » (Soc., 3 avril 2019, n° 17-11.970, au Bull. FP-PBRI).

Il était constant que « au regard du respect du principe "à travail égal, salaire égal", la seule
circonstance que des salariés aient été engagés avant ou après l'entrée en vigueur d'un
accord collectif ne saurait suffire à justifier des différences de rémunération entre eux, sauf à
l'employeur à démontrer que ces différences entre les salariés effectuant un même travail de
valeur égale, repose sur des raisons objectives et pertinentes qu'il revient au juge de vérifier »
(Soc. 4 février 2009, nº 07-41406, Bull. nº 35 – Soc. 24 septembre 2014, nº 13-10233, Bull.
nº 200).

Par deux arrêts complémentaires publiés le même jour, la Cour de cassation a précisé que :
« le principe d'égalité de traitement ne fait pas obstacle à ce que les salariés
embauchés postérieurement à l'entrée en vigueur d'un nouveau barème conventionnel
soient appelés dans l'avenir à avoir une évolution de carrière plus rapide dès lors
qu'ils ne bénéficient à aucun moment d'une classification ou d'une rémunération plus
élevée que celle des salariés embauchés antérieurement à l'entrée en vigueur du
nouveau barème et placés dans une situation identique ou similaire » (Soc. 7
décembre 2017 nº 16-14235 Bull. en cours – Soc. 17 octobre 2018 n° 16-26729)

« sauf disposition légale contraire, un accord collectif ne peut modifier le contrat de


travail d'un salarié, seules les dispositions plus favorables de cet accord pouvant se
substituer aux clauses du contrat ; qu'il en résulte que cette règle constitue un élément
objectif pertinent propre à justifier la différence de traitement entre les salariés
engagés antérieurement à l'entrée en vigueur d'un accord collectif et ceux engagés
postérieurement, et découlant du maintien, pour les premiers, des stipulations de leur
contrat de travail » (Soc. 7 décembre 2017 nº 16-15109)

« les salariés engagés postérieurement à l'entrée en vigueur d'un accord de


substitution ne peuvent revendiquer, au titre du principe d'égalité de traitement, le
bénéfice des dispositions prévues par l'accord collectif antérieur ; la cour d'appel, qui
a relevé que l'intéressé avait été engagé postérieurement à l'accord de 1998, qui s'était
substitué à l'ancien accord, et qu'il ne pouvait, en conséquence, revendiquer
l'application de l'ancien accord du 10 mai 1988 » (Soc. 28 juin 2018 nº 17-16499)

FICHE 7 : LE LICENCIEMENT POUR MOTIF PERSONNEL : CONDITIONS DE


FOND

I. LA CAUSE RÉELLE ET SÉRIEUSE

Le licenciement est un acte unilatéral de résiliation du contrat de travail à durée


indéterminée à l’initiative de l’employeur.

Attention, il ne faut jamais parler de licenciement en cas de rupture de CDD, mais de rupture
anticipée !

Contrairement au licenciement pour motif d’ordre économique, le licenciement d’ordre


personnel repose sur la personne du salarié à savoir sur son comportement. Pour être valable,
la cause du licenciement doit à la fois être :

« Réelle » : le licenciement doit reposer sur des faits/motifs objectifs, matériellement


vérifiables, et qui sont les vrais motifs.

« Sérieuse » : la cause revêt une certaine gravité qui rend impossible, sans dommage pour
l’entreprise, la continuation du travail (ministre du Travail en 1973).
La jurisprudence considère que la cause est réelle et sérieuse si les éléments objectifs qui
fondent le licenciement étant établis, la mesure prise n’est pas disproportionnée.

L’atteinte à l’intérêt de l’entreprise doit être suffisamment grave pour justifier un


licenciement.

NB : Soc. 24 mars 2021, n° 19-13.188 : interdiction de licencier un salarié notamment en


raison de son état de santé ou de son handicap : l’article L. 1132-1 du code du travail, qui fait
interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé ou de son
handicap, ne s’oppose pas au licenciement motivé, non par l’état de santé du salarié, mais par
la situation objective de l’entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l’absence
prolongée ou les absences répétées du salarié. Ce salarié ne peut toutefois être licencié que si
les perturbations entraînent la nécessité pour l’employeur de procéder à son remplacement
définitif par l’engagement d’un autre salarié. Ce remplacement doit intervenir à une date
proche du licenciement ou dans un délai raisonnable après celui-ci, délai que les juges du
fond apprécient souverainement en tenant compte des spécificités de l’entreprise et de
l’emploi concerné, ainsi que des démarches faites par l’employeur en vue d’un recrutement.

II. LE MOTIF PERSONNEL

En cas de licenciement pour motif personnel, la cause de la rupture du contrat de travail du


salarié doit être inhérente à la personne du salarié.

Le licenciement pour motif personnel n’est pas nécessairement fondé sur une faute. D’autres
motifs tels que l’insuffisance professionnelle peuvent être à l’origine d’un licenciement.

S’il résulte d’une faute c’est à dire du manquement à la discipline de l’entreprise (exemple :
abandon de poste), le licenciement sera alors de nature disciplinaire et l’employeur devra
respecter la procédure disciplinaire.

A. Les causes tolérées de licenciement

1. L’insuffisance professionnelle

L'insuffisance professionnelle est caractérisée par le fait que le salarié « n'arrivait pas à
mener ses missions » (Soc. 16 mai 2018, nº 16-25.552), par une « insuffisance du salarié dans
l'exécution de ses obligations professionnelles » (Soc. 10 décembre 2015, nº 14-21.852, Bull.
nº 840), par le fait « que le salarié n'exécutait pas correctement les tâches qui lui étaient
confiées » (Soc. 25 septembre 2012, nº 11-10.684, Bull. nº 231) ou par « des manquements et
carences dans l'exécution de ses tâches » (Soc. 8 avril 2009, nº 07-44.068, Bull. nº 114).

En somme, comme le relève le Professeur A. Cristau, « l'insuffisance professionnelle se


caractérise par l'inaptitude du salarié à exécuter correctement le travail pour lequel il a été
embauché » (Répertoire de droit du travail – Contrat de travail à durée indéterminée : rupture
et conditions de licenciement pour motif personnel – A. Cristau § 277-280).

Peuvent constituer une insuffisance professionnelle : erreurs dans le travail, négligences,


objectifs non atteints, non-respect des délais, difficultés à manager des collaborateurs, à
communiquer avec ses collègues ou à assumer ses responsabilités professionnelles.

Ce motif personnel de licenciement largement utilisé par les employeurs a une particularité :
il est exclusif d’une faute du salarié, mais résulte d’un constat, la mauvaise exécution du
contrat de travail par le salarié (Soc. 16 juin 2009 nº 08-40722 Bull. nº 149 – Soc. 9 mai 2000
nº 97-45163 Bull. nº 170 – Soc. 6 avril 1999 nº 96-43467 Bull. nº 162).

Le licenciement pour insuffisance professionnelle ne repose donc pas sur une faute du
salarié, mais sur son incompétence : Cass. soc. 25 janvier 2006.

Attention, l’insuffisance de résultats n’est pas une cause de licenciement et ne doit pas être
confondue avec l’insuffisance professionnelle : « l'insuffisance de résultats ne constitue pas à
elle seule une cause réelle et sérieuse de licenciement ; le juge doit vérifier si une insuffisance
professionnelle ou une faute du salarié sont à l'origine de l'insuffisance de résultats invoquée
par l'employeur pour licencier le salarié » (Soc. 12 février 2002, nº 99-42.878, Bull. nº 65 –
confirmé par Soc. 13 janvier 2004, nº 01-45.931, Bull. nº 3 – déjà Soc. 3 avril 2001, nº 98-
44.069, Bull. nº 117).

Cela étant en pratique, l'employeur va souvent invoquer dans la lettre de licenciement une
insuffisance de résultats qu’il impute à une insuffisance professionnelle du salarié et les juges
du fond vont avoir tendance à caractériser l’insuffisance professionnelle en s’appuyant sur la
conséquence tangible qui en résulte, les résultats insuffisants du salarié.

L’insuffisance professionnelle s’apprécie :

➢ Au regard des résultats passés :


Dans un arrêt du 19 janvier 2012 (n°10-20708), la Chambre sociale de la Cour de cassation a


approuvé la cour d’appel qui pour apprécier l’insuffisance professionnelle reprochée à un
salarié VRP a pris en compte les résultats passés de ce salarié jugés « honorables».

➢ Au regard du caractère réaliste des objectifs fixés :


Dans un arrêt du 18 janvier 2012 (Cour de cassation Chambre sociale n°10-19569), le


salarié contestait son licenciement pour insuffisance de résultats.

D’après la Cour de cassation, le licenciement ne peut être fondé que si l’employeur établit
que :
- les objectifs à réaliser étaient réalistes, raisonnables et compatibles avec le marché ;
- le salarié disposait de moyens suffisants ;
- le fait que les objectifs n’aient pas été atteints résulte des erreurs ou des négligences du
salarié et non pas des difficultés économiques de l’entreprise.

➢ L’insuffisance professionnelle doit être appréciée en fonction d’un ensemble de



données telles que la qualification qui était celle du salarié à l’embauche, les
conditions de travail, l’ancienneté dans le poste, la formation professionnelle reçue.

En toute hypothèse, les faits allégués par l’employeur doivent être objectifs donc vérifiables :

En effet, pour être fondé sur une cause réelle et sérieuse, le licenciement pour insuffisance
professionnelle doit reposer sur des éléments objectifs, c’est-à-dire des éléments
circonstanciés et vérifiables, propres à justifier l’appréciation portée par l’employeur (Cass.
soc. 10 octobre 2001).

Quid de la clause d’objectifs ? : La clause d’objectifs qui prévoirait une rupture automatique
du contrat en cas de non-réalisation de ceux-ci est illicite. Le juge conserve toujours son
pouvoir d’appréciation.

2. La faute disciplinaire

Le licenciement pour motif disciplinaire implique que le salarié ait commis une faute et que
cette dernière présente un caractère de gravité suffisant pour justifier la rupture du contrat de
travail.

Il existe quatre types de fautes : la faute légère, la faute sérieuse, la faute grave et la faute
lourde.

Depuis la réforme législative de 1973, toute faute ne permet pas de légitimer un licenciement,
puisque ce dernier doit reposer sur une cause réelle et sérieuse, laquelle implique un certain
degré de gravité. En application de ce principe, il est interdit à l’employeur de procéder au
licenciement en se fondant sur une faute légère.

➢ Définition de la faute légère :


La faute légère n’est pas définie par le Code du travail. Sa caractérisation relève donc de
l’appréciation souveraine des juges du fond. Généralement, elle correspond à un
comportement inhabituel et ponctuel qui peut être excusé par les circonstances propres à
chaque espèce (ancienneté du salarié, comportement antérieur irréprochable, bonne foi de
l’intéressé) et qui n’affecte pas de façon significative le bon fonctionnement de l’entreprise.

➢ Définition de la faute sérieuse :



La faute sérieuse rend impossible la poursuite de la relation de travail. Toutefois, elle n’est
pas suffisamment grave pour justifier l’éviction immédiate de son auteur. En d’autres termes,
elle ne rend pas impossible, pendant le préavis, le maintien du salarié dans l’entreprise.
Comme le précise la Cour de cassation, « la faute commise par un salarié, bien que
constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement, peut ne pas présenter le
caractère d’une faute grave privative des indemnités de rupture » (Cass. soc. 15 févr.
1978, Bull. civ. V, n 106). Par conséquent, le salarié licencié pour faute sérieuse conserve son
indemnité compensatrice de congés payés et de préavis ainsi que son indemnité de
licenciement.

➢ Définition de la faute grave


La faute grave est une faute sérieuse aggravée. Elle peut procéder d’un fait isolé ou de
l’accumulation de plusieurs faits de moindre gravité. Elle « résulte d’un fait ou d’un
ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations
découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle
rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis »
(Soc., 26 février 1991, n° 88-44.908, Bull. n° 97 – Soc., 8 avril 1992, n° 90-45.669, Bull. n°
257 – Soc., 5 décembre 2007, n° 06-41.313, au Bull. – Soc., 6 octobre 2010, n° 09-41.294, au
Bull.).

Exemples :

Courriel antisémite : le fait pour un salarié d’utiliser la messagerie électronique que


l’employeur met à sa disposition pour émettre, dans des conditions permettant d’identifier
l’employeur, un courriel contenant des propos antisémites est nécessairement constitutif d’une
faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du
préavis (Cass. soc. 2 juin 2004, n 03-45.269).

Comme le rappelle régulièrement la Chambre sociale, la qualification de faute grave ne peut


être retenue « que si l’employeur a prononcé une rupture immédiate du contrat de travail ».
Tel n’est pas le cas lorsque dans la lettre de licenciement l’employeur a reconnu expressément
au salarié son droit au préavis en fixant la rupture du contrat six mois plus tard et en se
bornant à le dispenser de l’exécuter (Cass. soc. 21 nov. 2000). Elle entraîne donc pour le
salarié la perte de son droit à préavis et de son indemnité de licenciement.

La Cour de cassation exerce un contrôle de qualification sur la notion de faute grave. Ce


contrôle porte tout d’abord sur la nature des faits invoqués à l’appui du licenciement. Comme
le rappelle la Chambre sociale, « le licenciement prononcé pour faute grave présente un
caractère disciplinaire ; seul un fait fautif peut le justifier » (Cass. soc. 23 janv. 2001).

Ensuite, les juges du fond ne peuvent s’en tenir à la gravité des faits pour caractériser ou
exclure la faute grave, sans examiner les circonstances de leur commission et leurs
conséquences. Ainsi, ne donne pas de base légale à sa décision la cour d’appel qui retient
l’existence d’une faute grave justifiant le licenciement du salarié, sans rechercher si
l’interruption brutale d’activité et le comportement irrationnel du salarié pendant plus de deux
mois et son hospitalisation deux jours avant le licenciement suivi quelques mois plus tard de
son suicide, n’ôtaient pas aux brusques carences reprochées à l’intéressé leur caractère fautif
(Cass. soc. 23 nov. 1994).

La Cour de cassation a également décidé que les juges du fond ne peuvent retenir qu’une
salariée, responsable des caisses, a commis une faute grave en laissant sans surveillance,
pendant un court laps de temps, deux enveloppes contenant des fonds importants, sur un
bureau situé dans un local aisément accessible, sans se prononcer sur la difficulté des
conditions de travail invoquées par l’intéressée pour expliquer le manquement unique qui lui
est reproché (Cass. soc. 17 déc. 1987).

Chambre sociale, 21 septembre 2022, 20-16.841, société Jung.


La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et
implique son éviction immédiate. La cour d'appel, après avoir constaté qu'il était établi que le
salarié avait donné des coups à M. [Y], sans qu'il soit avéré qu'il se défendait d'une agression,
a retenu que ces faits s'étaient produits hors de l'entreprise, qu'ils avaient opposé l'intéressé à
un tiers et non à un collègue et que l'employeur, comme il l'indiquait dans la lettre de
licenciement, était informé d'une situation de tension entre ces deux chauffeurs. Elle a ensuite
relevé que le salarié avait immédiatement porté plainte le 7 mars 2017, quelques heures après
l'altercation, alors que l'autre chauffeur avait attendu près d'un mois, lors de son audition par
les services de gendarmerie, pour porter plainte et que le salarié, en plus de sept années de
collaboration, n'avait fait l'objet d'aucune sanction. Elle a pu en déduire, sans être tenue de
préciser lequel des deux protagonistes était à l'origine de l'altercation, que les faits ne
rendaient pas impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

Les hypothèses les plus fréquentes de faute grave sont :

- Le vol

Est-ce que le vol constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement et plus
précisément une faute grave ?

D’après la jurisprudence (Cass. soc. 26 février 1991), la faute grave est celle qui rend
intolérable le maintien du salarié dans l’entreprise y compris pendant la période de préavis.
En ce qui concerne le vol, les juges se prononcent au cas par cas en fonction de l’ancienneté
du salarié, de son âge, de son absence d’antécédents disciplinaires, etc.
Les critères dégagés sont les suivants :

- Qui était victime du vol ?

Si la victime du vol n’est pas l’employeur, mais un de ses clients, la Cour de cassation retient
que la faute grave est caractérisée – quelque soit la valeur de l’objet volé, l’ancienneté du
salarié et l’absence de reproches durant sa carrière
Dans un arrêt du 16 janvier 2007 rendue par la Chambre Sociale, la Cour de Cassation
a considéré que « le vol commis par un salarié au préjudice d’un client de
l’employeur caractérise, alors même que l’objet soustrait serait de faible valeur, une
faute grave ».

Soc. 28 mars 2012 N° de pourvoi 11-11981 : « que ces agissements commis au


préjudice d'un client de l'employeur caractérisent une faute grave, alors même que
l'objet soustrait est de faible valeur et que le salarié auquel le manquement isolé est
reproché a une ancienneté importante et n'a fait l'objet d'aucun reproche antérieur ».

En revanche, lorsque la victime du vol est l’employeur, la Cour de cassation estime qu’il faut
tenir compte de la valeur marchande du bien volé et de l’ancienneté du salarié ainsi que de
son comportement antérieur

Soc., 24 janvier 2018, n° 16-21.340 Mais attendu qu'appréciant souverainement


la valeur et la portée des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la
cour d'appel, après avoir examiné le grief visé dans la lettre de licenciement de
vol de deux pneus, a pu décider, abstraction faite des motifs surabondants
critiqués par les trois dernières branches, que, s'agissant du retrait, opéré
ouvertement, d'objets usagés, sans valeur financière, par un salarié très ancien,
ayant agi sans dissimulation, ce comportement ne constituait pas une faute
grave et, usant du pouvoir qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail,
elle a estimé que le grief ne constituait pas une cause réelle et sérieuse ; que le
moyen n'est pas fondé ;
Soc., 13 juillet 2016, n° 15-16.170 Mais attendu que la cour d'appel, après
avoir examiné le grief visé dans la lettre de licenciement de vol d'un parapluie
au préjudice d'une collègue de travail et sans être tenue de se livrer à une
recherche qui ne lui était pas demandée, a pu décider que ce grief, compte tenu
des circonstances, le parapluie se trouvant sur le sol en mauvais état et s'étant
révélé inutilisable, ne constituait pas une faute grave et a estimé, dans l'exercice
des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail que le
licenciement ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est
pas fondé ;

Soc. 31 octobre 2013 n° 12-18993 Qu'en statuant ainsi, alors que la


soustraction de marchandises de faible valeur, par un salarié ayant plus de
vingt-six ans d'ancienneté, n'était pas de nature à rendre impossible son
maintien dans l'entreprise, la cour d'appel a violé les textes susvisés »

Soc. 13 février 2013 N° de pourvoi 11-25991 Qu'en statuant ainsi, alors que la
soustraction d'un tel objet par un salarié ayant plus de six ans d'ancienneté
n'était pas de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise, la cour
d'appel a violé les textes susvisés »

Soc. 25 octobre 2011 N° de pourvoi 10-18542 Mais attendu que la cour


d'appel, qui n'avait pas à effectuer une recherche prétendument omise et qui a
constaté que le vol commis au préjudice de l'employeur portait sur des
marchandises périssables de faible valeur destinées à la destruction, a pu
décider, tenant compte de l'ancienneté de la salariée et de l'absence de tout
manquement antérieur, que ces faits ne justifiaient pas la rupture immédiate
du contrat de travail et ne constituaient pas une faute lourde ; qu'exerçant les
pouvoirs qu'elle tient de l'article 1351-1 du code du travail, elle a estimé qu'ils
ne constituaient pas une cause sérieuse de licenciement ; que le moyen n'est
pas fondé »

Soc. 21 septembre 2011 N° de pourvoi 09-72975 Qu'en statuant ainsi, alors


que le vol d'une batterie, ultérieurement remboursée, par un salarié qui en dix-
sept ans n'avait fait l'objet d'aucun reproche pour un comportement
défavorable, ne pouvait constituer une faute grave rendant impossible son
maintien dans l'entreprise, la cour d'appel a violé les textes susvisés »

Soc. 22 juin 2011 N° de pourvoi 10-14494 Qu'en statuant ainsi, alors que
l'acte isolé de la salariée laquelle justifiait d'une ancienneté de plus de douze
années, portait sur la disparition de pains pour une valeur de 25,25 € et
n'était pas de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise, la cour
d'appel a violé les textes susvisés »

Soc. 21 juin 2011 N° de pourvoi 10-10833 Qu'en statuant ainsi alors que les
seuls faits établis parmi ceux dénoncés par la lettre de licenciement se
résumaient au vol de 6 ou 7 pièces de deux euros ainsi qu'au défaut
d'enregistrement, sur une seule journée, de quelques achats d'une valeur
indéterminée, lesquels, s'agissant d'une salariée ayant neuf années
d'ancienneté, n'étaient pas de nature à rendre impossible son maintien dans
l'entreprise, la cour d'appel a violé les textes susvisés »

Soc. 6 avril 2011 N° de pourvoi 10-15286 Qu'en statuant ainsi, alors que l'acte
isolé du salarié, qui justifiait d'une ancienneté de plus de dix années n'était
pas de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise, la cour
d'appel a violé les textes susvisés »

Soc. 30 juin 2010 N° de pourvoi 09-41049 : « Qu'en statuant ainsi, alors que
l'acte isolé de la salariée, qui justifiait d'une ancienneté de vingt-neuf années
n'était pas de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise, la cour
d'appel a violé les textes susvisés »

Soc. 26 mai 2010 N° de pourvoi 09-40963Qu'en statuant ainsi, alors que ce


vol, compte tenu de sa faible importance et de la très grande ancienneté du
salarié auquel il n'avait été précédemment reproché aucun manquement à la
probité, ne justifiait pas la rupture immédiate de son contrat de travail et ne
constituait pas une faute grave, la cour d'appel a violé les textes susvisés »

Déjà en ce sens - jurisprudence constante : not. Soc. 14 avril 2010 N° de


pourvoi 08-43076 ; 15 décembre 2009 N° de pourvoi 08-44914 ; 2 décembre
2009 N° de pourvoi 08-42655 ; 5 mai 2009 N° de pourvoi 07-45510 ; 29 avril
2009 N° de pourvoi 07-45205 ; 19 novembre 2008 N° de pourvoi 07-43065.

- Quelle était la valeur de bien volé ?


La question de la valeur du bien volé ne se pose donc que si la victime est l'employeur (cf.
supra).
Si l’objet volé est de faible valeur et que la victime est l’entreprise, alors la faute grave n’est
pas caractérisée : Cass. soc. 6 mars 2007 au sujet du vol d’une perte de lunette de 39 euros.

- S’agissait-il d’un acte isolé ?


La question ne se pose que si la victime est l'employeur (cf. supra).
Si oui ce n’est pas une faute grave : Cass. soc. 29 janvier 2008)

- Quelle était l’ancienneté du salarié ?


La question ne se pose que si la victime est l'employeur (cf. supra).
ex. : la seule soustraction de produits alimentaires par une caissière, qui comptait cinq ans
d’ancienneté, ne peut suffire à constituer une faute grave : Cass. soc. 2 novembre 2005.

En conséquence, le vol dont le salarié serait l’auteur ne qualifie pas systématiquement la faute
grave de ce dernier justifiant son licenciement.

•• Les retards répétés du salarié

Des retards minimes, mais répétés peuvent-ils fonder un licenciement ?

Cass. soc. 26 juin 2012 : il faut au préalable un avertissement.

« En l’absence d’avertissement préalable, des retards répétés sur une période d’un mois
de la part d’un salarié comptant trois ans d’ancienneté dans l’entreprise ne suffisent pas
à caractériser une faute grave. »

Des retards répétés pourront être considérés comme une cause réelle et sérieuse de
licenciement s’ils revêtent une certaine importance. Par exemple, les juges ont considéré
que le licenciement d’une salariée était justifié lorsque celle-ci se présente fréquemment avec
15 minutes de retard à son poste de travail et ce, même si elle arrive à l’heure dans
l’entreprise (Cass. soc. 19 décembre 2000 – n° de pourvoi 98-44.418). À l’inverse, les juges
ont estimé que le licenciement d’une salariée, responsable de nombreux, mais minimes
retards et qui, par ailleurs, étaient compensés en fin de journée au-delà de leur durée, n’est pas
justifié (Cass. soc. 8 juillet 1982). Enfin, le licenciement du salarié sera fondé si celui-ci
continue de ne pas respecter les horaires qui lui sont imposés, malgré des avertissements
de son employeur (Cass. soc. 4 février 1981).

Par ailleurs, la fréquence des retards du salarié et leur impact sur le fonctionnement de
l’entreprise sont des éléments qui peuvent amener les juges à reconnaître l’existence d’une
faute grave. Ainsi, ceux-ci ont considéré que les nombreux retards d’un salarié, qui avaient
désorganisé la bonne marche de l’entreprise, étaient constitutifs d’une faute grave (Cass. soc.
19 mars 1987). La faute grave a également été retenue en raison du statut du salarié dans
l’entreprise. Les juges ont en effet estimé qu’un chef d’équipe, auquel étaient reprochés des
retards réitérés, avait manqué aux obligations liées à sa qualité et à son pouvoir de direction et
de contrôle sur les salariés. Ce manquement a été qualifié de faute grave (Cass. soc. 19
décembre 2007 – n° de pourvoi 06-43.983).
•• Autres exemples de fautes graves retenues par la jurisprudence

- Absences et abandon de poste :

Absence, après un refus de l’employeur de toute autorisation d’absence ; Absence de


plusieurs semaines sans autorisation ni justification dans une période d’activité importante
pour l’entreprise ; Prolongation anormale d’une absence, surtout si des mises en demeure sont
restées sans effet ; Salarié qui ne se présente pas sur son lieu de travail à la date fixée de
reprise et les jours suivants, sans donner d’explications à l’employeur ; Absentéisme
systématique d’une salariée.

Mais l’appréciation doit être nuancée et dépend de chaque espèce : par ex. « Ne constitue pas
une faute grave mais une cause réelle et sérieuse de licenciement l'absence injustifiée de 6
semaines du salarié après une visite médicale à l'issue de laquelle il a été déclaré apte à son
poste par le médecin du travail, dès lors que cette absence de l'intéressé, qui rencontrait de
nombreuses difficultés personnelles et de santé et avait plus de 20 ans d'ancienneté, n'avait
pas perturbé le service » (Soc. 26 septembre 2018 n° 17-17.563 F-D)

- Actes de concurrence

Participation directe d’un salarié à la création d’une société concurrente à celle de son
employeur ; Utilisation par un salarié des moyens de commercialisation de son entreprise pour
la vente de produits d’une autre société ; Acceptation d’un mandat d’administrateur dans une
société concurrente.

Ex. : est caractérisée l'intention de nuire constitutive de la faute lourde du salarié qui,
en violation d'une clause d'exclusivité et en concertation avec un autre salarié et alors
qu'il est encore au service de son employeur, a recours à un montage juridique
permettant de dissimuler la création d'une entreprise dont l'activité est concurrente de
celle de son employeur et a débuté avant la rupture de leurs relations contractuelles,
l'intéressé ayant détourné de la clientèle et débauché un salarié de l'employeur (Soc.
15 mai 2019 n° 17-28.943 F-D).

- Déloyauté :

La question de la déloyauté du salarié se pose fréquemment durant la suspension du contrat de


travail.

Le principe : L'exercice d'une activité pendant un arrêt de travail provoqué par la


maladie ne constitue pas en lui-même un manquement à l'obligation de loyauté qui
subsiste pendant la durée de cet arrêt. Pour fonder un licenciement, l'acte commis par
un salarié durant la suspension du contrat de travail doit causer préjudice à l'employeur
ou à l'entreprise. Ayant retenu, d'une part qu'à défaut de preuve que le salarié avait perçu une
rémunération de son activité de gérant de la SARL l'employeur ne pouvait valablement lui
opposer la clause d'exclusivité figurant dans son contrat de travail, d'autre part que
l'implication de l'intéressé dans la constitution de ladite société ne constituait pas une activité
concurrente à celle de l'employeur et n'était pas de nature à lui porter préjudice, la cour
d'appel a justifié sa décision de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc.
21-11-2018 n° 16-28.513 F-D).

Une illustration récente d’acte de déloyauté : « Pendant la période de suspension du contrat de


travail consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, l'employeur peut
seulement, dans le cas d'une rupture pour faute grave, reprocher au salarié des manquements à
l'obligation de loyauté. Ayant retenu que la spécificité du métier de sportif professionnel
obligeait le salarié, en cas de blessure, à se prêter aux soins nécessaires à la restauration de
son potentiel physique, la cour d'appel, qui a constaté que pendant la période d'arrêt de travail
consécutive à son accident du travail, l'intéressé n'avait pas honoré le rendez-vous destiné à
organiser les séances de kinésithérapie prescrites par le médecin traitant de l'équipe et qu'il
n'était pas demeuré à la disposition du kinésithérapeute pour suivre le protocole de soins, a
fait ressortir l'existence d'un manquement à son obligation de loyauté rendant impossible la
poursuite du contrat de travail » (Cass. soc. 20-2-2019 n° 17-18.912 FS-PB).

- Inconduite et injures :

Attitude indécente réitérée d’un salarié à l’égard de ses collègues féminines ; Harcèlement
sexuel d’un salarié par un supérieur hiérarchique ; Salarié prononçant des insultes racistes à
l’égard d’un supérieur hiérarchique ; Salarié tenant des propos injurieux envers un client de
l’entreprise ; Responsable d’atelier tenant des propos racistes, agressifs et méprisants envers
les salariés placés sous son autorité et refusant de mettre à leur disposition des vêtements de
protection, principalement lorsqu’ils étaient d’origine étrangère ; Salarié envoyant un courriel
contenant des propos antisémites.

- Insubordination :

Refus du salarié d’exécuter une tâche entrant dans ses attributions normales, sans aucune
justification ; Refus réitéré du salarié de se soumettre aux instructions de l’employeur ; Refus
d’accomplir un travail à plusieurs reprises alors qu’une sanction avait déjà été prononcée à ce
titre.

- Malversations, manœuvres et détournements :

Détournements de fonds, faux et usages de faux pratiqués et reconnus par un salarié ; Salarié,
responsable des services techniques et de maintenance, ayant demandé à un fournisseur de
surestimer un devis afin de faire financer par son employeur une porte de garage destinée à
son équipement personnel ; Photocopie de documents couverts par le secret professionnel afin
de les utiliser dans un contentieux engagé contre l’employeur.

- Violation des règles d’hygiène et de sécurité :


Salarié fumant dans l’établissement malgré l’interdiction de fumer, l’établissement étant
classé « dangereux de première catégorie » ; chef de chantier ne respectant pas lui-même les
prescriptions élémentaires de sécurité en présence d’ouvriers.

- Violences physiques :

Menaces et violences à l’égard de l’employeur ; Altercations et riposte d’un salarié avec une
violence démesurée, ces faits ayant gravement perturbé la bonne marche de l’atelier.

Attention : la poursuite pour un salarié d’un fait fautif autorise l’employeur à se prévaloir de
faits similaires, y compris ceux ayant déjà été sanctionnés, pour caractériser une faute grave :
Cass. soc. 30 septembre 2004.

➢ Définition de la faute lourde


La faute lourde se distingue des autres fautes par le fait qu’elle traduit « une intention de
nuire du salarié vis-à-vis de l’employeur ou de l’entreprise » (Cass. soc. 29 nov. 1990). Elle
correspond à la faute dolosive du droit de la responsabilité civile. Par conséquent, une faute
d’imprudence ou de négligence ne pourra jamais, quelles que soient ses conséquences
dommageables, caractériser une faute lourde en l’absence d’élément intentionnel. Comme
pour la faute grave, la Cour de cassation exerce un contrôle de qualification sur la faute
lourde. Par conséquent, les juges du fond ne peuvent reconnaître l’existence d’une telle faute
sans rechercher et caractériser l’intention de nuire. À titre d’exemple, la Chambre sociale a
censuré une cour d’appel au motif que « si le délit de vol comporte un élément intentionnel,
celui-ci n’implique pas, par lui-même, l’intention de nuire à l’employeur, caractérisant la
faute lourde du salarié » (Cass. soc. 6 juill. 1999).

La responsabilité pécuniaire d’un salarié à l’égard de son employeur ne pouvant résulter que
de sa faute lourde, « ni la convention collective, ni le règlement intérieur de l’entreprise ne
peuvent instituer un cas de responsabilité pécuniaire de plein droit du salarié » (Cass. soc.
9 juin 1993).

De même, en l’absence de faute lourde, la clause d’un contrat de travail relative à la


responsabilité personnelle du salarié envers son employeur ne peut produire aucun effet.
L’employeur ne peut donc faire supporter à une salariée le montant du dommage causé à un
véhicule de l’entreprise, lors d’un accident de la circulation ne résultant pas d’une faute
lourde de l’intéressée (Cass. soc. 10 nov. 1992).

Si la faute lourde est une condition essentielle pour mettre en œuvre la responsabilité du
salarié, il n’est pas nécessaire qu’un salarié ait commis une faute lourde pour être condamné,
à l’occasion de son licenciement, à verser à son employeur des sommes qu’il avait encaissées
pour le compte de ce dernier et qu’il devait lui restituer conformément à son obligation
contractuelle (Cass. Soc. 19 nov. 2002).
➢ Les circonstances atténuant la faute disciplinaire

- L’ancienneté du salarié :

L’ancienneté du salarié pourra atténuer la gravité y compris d’agissements frauduleux ou


susceptibles d’une qualification pénale.

L’ancienneté du salarié est retenue par la Cour de cassation comme un élément atténuant la
gravité de sa faute et permettant la disqualification de la faute grave en faute simple. Il
s’ensuit alors que le salarié licencié bénéficiera des indemnités de préavis et de licenciement.

Cass. soc. 3 juin 1997 Gouhet Guichot c/Le Printania le fait isolé, pour une veilleuse de
nuit totalisant plus de 14 années d’ancienneté et n’ayant jamais fait l’objet de reproches
pour des faits similaires, de s’endormir momentanément pendant son service, ne peut
suffire à caractériser un manquement rendant impossible son maintien dans l’entreprise
pendant la durée du préavis et n’est donc pas constitutif d’une faute grave. En réalité,
dans cette affaire, il ressortait du dossier que l’employeur cherchait par tous les moyens
à évincer la salariée (ancienne déléguée syndicale) et lui avait tendu un véritable piège
pour se constituer un motif de rupture.

L’ancienneté du salarié pourra atténuer la gravité y compris d’agissements frauduleux ou


susceptibles d’une qualification pénale :

Cass. soc. 22 février 2000 Dudot c/Sté Niro Kestner : arrêt dans lequel la Cour de cassation
censure un arrêt qui avait retenu la faute grave d’un salarié qui se faisait rembourser ses frais
de déplacement suivant le barème applicable aux véhicules d’une puissance fiscale de 11
chevaux alors qu’il utilisait un véhicule de 5 chevaux : qu’en statuant ainsi, à l’égard d’un
salarié justifiant d’une ancienneté de plus de 30 années et qui n’avait fait l’objet d’aucun
grief, la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé un manquement rendant impossible le maintien
du salarié pendant la durée du préavis, a violé les articles L. 122-6 et L. 122-8 du Code du
travail dans leur rédaction applicable au litige.

Cass. soc. 18 juillet 2000 société Elfe c/Roméo : arrêt qui décide que la tentative
d’obtention de commissions indues de la part d’un salarié totalisant 24 années
d’ancienneté n’est pas constitutive d’une faute grave.

- La légèreté blâmable de l’employeur

Cass. soc. 14 mai 1997 Sté Accor c/Poulot : la salariée avait été licenciée pour faute grave
pour avoir refusé de se soumettre à un changement de poste n’entraînant pas de modification
de son contrat de travail. Effectivement, le changement des conditions de travail s’impose au
salarié qui commet une faute grave (en principe) s’il refuse de s’y soumettre. Mais, en
l’occurrence, les juges du fond ont relevé un usage abusif par l’employeur de son pouvoir de
direction à l’effet de provoquer le départ de la salariée : il en résulte que le licenciement
intervenu dans ces conditions est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

B. Les causes exclues de licenciement sauf si elles perturbent le fonctionnement


de l’entreprise

1. La perte de confiance

En principe, la perte de confiance a été rejetée comme cause réelle et sérieuse, car « elle ne
constitue pas en soi un motif de licenciement » : Cass. soc. 29 novembre 1990 ; Cass. soc. 10
mai 2005.

La perte de confiance de l’employeur ne peut jamais constituer en tant que telle une cause de
licenciement même quand elle repose sur des éléments objectifs ; seuls ces éléments objectifs
peuvent, le cas échéant, constituer une cause de licenciement, mais non la perte de confiance
qui a pu en résulter pour l’employeur : Cass. soc. 29 mai 2001.
Néanmoins, par un arrêt du 10 février 2014, le Conseil d’État a validé la perte de confiance
comme motif valable de licenciement : CE, 10 février 2014 :
Le secrétaire général d’une chambre des métiers et de l’artisanat avait exercé,
concomitamment, les mêmes fonctions au sein d’une organisation identique. Son licenciement
pour perte de confiance a été décidé au titre de ce cumul de fonctions. Le requérant a saisi le
juge en vue de l’annulation de cette décision.

Le 10 février 2014, le Conseil d’État rejette la requête en annulation de la décision. Il


rappelle, notamment, qu’aux termes de l’article 24 de la Charte sociale européenne, « en vue
d’assurer l’exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement, les Parties
s’engagent à reconnaître : – a. le droit des travailleurs à ne pas être licenciés sans motif
valable lié à leur aptitude ou conduite, ou fondé sur les nécessités de fonctionnement de
l’entreprise, de l’établissement ou du service – b. le droit des travailleurs licenciés sans motif
valable à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée. À cette fin les parties
s’engagent à assurer qu’un travailleur qui estime avoir fait l’objet d’une mesure de
licenciement sans motif valable ait un droit de recours contre cette mesure devant un organe
impartial ».
Soulignant que ce texte n’a pas pour objet de régir exclusivement les relations entre les États
et qui ne requièrent l’intervention d’aucun acte complémentaire pour produire des effets à
l’égard des particuliers, le Conseil d’État consacre le droit du requérant de l’invoquer pour
fonder ses prétentions. Le Conseil d’État considère que le motif de licenciement pour perte de
confiance, visé par la décision contestée, est, par nature et au regard de la norme européenne,
de nature à motiver un licenciement dont il appartient au juge d’apprécier la justification.
Il ajoute que les dispositions de l’article 11 de la décision attaquée relatives à la procédure de
licenciement pour abandon de poste ne méconnaissent pas le principe constitutionnel de clarté
et d’intelligibilité de la norme en ce qu’elles prévoient l’envoi préalable d’une mise en
demeure par l’établissement, au seul motif qu’elles ne préciseraient pas l’autorité chargée
d’adresser cette mise en demeure.

2. La mésentente entre un salarié et tout ou partie du personnel


Ne peut constituer une cause de licenciement que si elle repose objectivement sur des faits
imputables au salarié concerné empêchant le fonctionnement normal de l’entreprise : Cass.
soc. 12 novembre 2002.

La mésentente pour être retenue comme cause légitime de licenciement, doit reposer sur un
comportement habituel ou répété du salarié. Elle n’est alors pas caractérisée si elle est
imputable à l’employeur : Cass. soc. 21 janvier 1987, ou si elle n’a pas d’incidence sur le
fonctionnement de l’entreprise : Cass. soc. 19 juillet 1989, 27 février 2007.

3. L’incompatibilité d’humeur : (solution identique : Cass. soc. 17


janvier 2001).

4. Le conflit d’intérêts : exclu comme cause de licenciement : Cass. soc.


21 septembre 2006 ; 17 mars 2010.

C. Les causes prohibées de licenciement

1. Le licenciement discriminatoire : article L1132-1 Code du travail

Licenciement ou tout autre mesure fondée sur : son origine, son sexe, ses mœurs, son
orientation sexuelle, son âge, sa situation de famille, sa grossesse, convictions religieuses,
race, opinion politique, activité syndicale, apparence physique, nom de famille, état de santé,
etc.

À défaut, le licenciement est nul.

2. Le licenciement fondé sur des motifs tirés de la vie privée

Il est de jurisprudence constante que, « aucun motif de la vie privée du salarié ne peut justifier
un licenciement » sauf dans deux hypothèses :

1re hypothèse : si le comportement du salarié constitue un manquement à une obligation


découlant de son contrat de travail (ex. : Cass. soc. 28 novembre 2012, Cass. soc. 8
novembre 2011 ; Cass. soc. 3 mai 2011 ; Cass. soc. 10 juillet 2013). Dans ce cas, un
licenciement pour motif disciplinaire pourra être prononcé à son égard.

Exemple : un salarié d’un centre éducatif entretien une relation amoureuse avec une jeune
patiente : la Cour de cassation a dit : manquement du salarié aux règles éthiques de respect et
de correction : donc manquement à ses obligations découlant de son contrat de travail donc
licenciement pour motif disciplinaire possible : Cass. soc. 28 novembre 2012.
2e hypothèse : si le comportement du salarié a créé un trouble objectif caractérisé au
sein de l’entreprise (Cass. soc. 26 septembre 2012). Dans ce cas, un licenciement pour
motif personnel pourra être prononcé à son égard.

Exemple : condamnations pénales des salariés, la Cour de cassation a jugé, dans un arrêt du
26 septembre 2012 que, celle-ci pouvait constituer une cause réelle et sérieuse de
licenciement dès lors qu’elle avait « créé un trouble caractérisé et certain dans l’entreprise ».
Dans cette affaire, le salarié avait été condamné pour un crime à 8 ans d’emprisonnement.

La Cour de cassation avait alors considéré que le licenciement pour motif personnel du salarié
était bien fondé en raison du trouble objectif caractérisé causé à l’entreprise par :

– La publicité de la condamnation qui avait désorganisé le service financier de l’entreprise


dans lequel le salarié travaillait,

– l’intervention à plusieurs reprises de l’employeur auprès des salariés pour prévenir la


propagation de rumeur sur le sujet,

– la forte émotion exprimée par les salariés de l’entreprise sur ce sujet et l’ouverture d’une
cellule psychologique pour assurer un soutien des salariés du service.

3. La suspension du permis de conduire, une cause de licenciement ?

La question relative à la suspension du permis de conduire du salarié comme cause réelle et


sérieuse de licenciement n’est pas nouvelle et a fait l’objet de diverses décisions parmi
lesquelles figure celle du 3 mai 2011, dans laquelle la Chambre sociale de la Cour de
cassation a jugé « qu’un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe
justifier un licenciement disciplinaire, sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une
obligation découlant de son contrat de travail ; que le fait pour un salarié qui utilise un
véhicule dans l’exercice de ses fonctions de commettre, dans le cadre de sa vie personnelle,
une infraction entraînant la suspension ou le retrait de son permis de conduire ne saurait être
regardé comme une méconnaissance par l’intéressé de ses obligations découlant de son
contrat de travail. »

Dans l’arrêt du 12 février 2014, les faits étaient quasi similaires à la seule différence que le
motif de licenciement, à savoir la suspension du permis de conduire, était expressément prévu
par le contrat de travail du salarié. En l’espèce, par suite de la suspension de son permis de
conduire pour excès de vitesse commis au volant de son véhicule de fonction durant un
déplacement privé, un salarié occupant le poste de commercial vendeur, a été licencié pour
cause réelle et sérieuse au visa de l’article 10 de son contrat de travail lequel prévoyait la
rupture du contrat en cas de retrait de permis de conduire. Le salarié a alors saisir le conseil
des prud’hommes en vue d’obtenir la requalification du licenciement en licenciement sans
cause réelle et sérieuse. La cour d’appel l’a débouté de sa demande en considérant d’une part
que l’employeur n’avait fait qu’exécuter les termes du contrat de travail (lequel prévoyait
expressément la rupture du contrat de travail en cas de suspension du permis de conduire du
salarié), d’autre part, que l’impossibilité pour le salarié de poursuivre l’exécution de son
contrat de travail aux conditions et suivant les modalités convenues, avait causé un trouble
objectif caractérisé à l’entreprise justifiant le licenciement pour motif personnel du salarié.
Cette solution n’a pas été suivie par la Cour de cassation qui s’est contentée de préciser
qu’aucune clause du contrat ne peut valablement décider qu’une circonstance
quelconque constituera en elle-même une cause de licenciement.

La Cour de cassation approuve une cour d'appel qui, « s'en tenant aux termes de la lettre de
licenciement, a constaté que le salarié avait manqué aux obligations résultant de son contrat
de travail, qui lui imposait de disposer d'un véhicule, et que ce manquement rendait
impossible la poursuite de ce contrat » (Soc., 28 novembre 2018, n° 17-15.379, au Bull.).

Un parallèle peut être fait avec le licenciement motivé par la suspension du permis de
conduire du salarié. Une telle suspension, qui relève de la vie privée du salarié, peut justifier
le licenciement si elle empêche l'intéressé d'exercer les fonctions pour lesquelles il a été
engagé (Soc. 15 janvier 2014 n° 12-22.117 F-D). En l'espèce, la possession d'un véhicule était
indispensable à l'exécution du contrat de travail et il ne pouvait pas être raisonnablement
exigé de l'employeur qu'il fournisse un véhicule au salarié pour lui permettre de remplir sa
mission.

FICHE 8 : LE LICENCIEMENT POUR MOTIF PERSONNEL : LES CONDITIONS


DE FORME

Tout employeur qui envisage de rompre – après la période d’essai – le contrat de travail à
durée indéterminée d’un salarié pour un motif personnel doit suivre une procédure de
licenciement précise :

I. LES ÉTAPES PROCÉDURALES

re
➢ 1 étape : convocation à un entretien préalable par LRAR ou décharge (art. L

1232-2)

Avant toute décision, l’employeur (ou son représentant) doit convoquer le salarié à un
entretien préalable de licenciement par lettre recommandée ou remise en main propre contre
décharge. La convocation doit mentionner :

- l’objet de l’entretien (c’est-à-dire le projet de licenciement) ;

- la date, le lieu et l’heure de l’entretien : la date de l’entretien doit être fixée au moins 5
jours ouvrables (tous les jours de la semaine sauf dimanche et jours fériés) après la
présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre ;
- la possibilité pour le salarié de se faire assister lors de l’entretien par une personne de
son choix (membre du personnel de l’entreprise ou, en l’absence de représentant du
personnel, conseiller du salarié).

Le défaut d’indication dans la lettre de convocation de la possibilité de se faire assister par un


conseiller du salarié est sanctionné par le versement au salarié d’une indemnité au plus égale à
un mois de salaire.

La lettre doit aussi mentionner sans équivoque qu’un licenciement est envisagé. Les motifs
n’ont pas forcément à être indiqués à ce stade : Cass. soc. 6 avril 2016 N°14-23198.

La convocation doit parvenir au moins 5 jours avant l’entretien.

Attention, dans le cas du licenciement pour motif disciplinaire, la convocation doit être
envoyée le plus rapidement possible et au plus tard dans les 2 mois à compter de la
connaissance du fait fautif.

e
➢ 2 étape : l’entretien préalable

Lors de l’entretien, l’employeur expose les motifs du licenciement envisagé et recueille les
explications. Il ne peut pas donner mandat à une personne extérieure à l’entreprise pour faire
cela.

L’entretien doit permettre :

- à l’employeur, d’indiquer les motifs du licenciement envisagé ;


- au salarié, d’exposer et de défendre ses arguments. Il ne s’agit pas d’une simple
formalité : l’entretien doit être l’occasion d’éclaircir des faits, de trouver des solutions
alternatives au licenciement.

e
➢ 3 étape : la lettre de licenciement

A. Date et forme de l’envoi :

Après l’entretien, l’employeur doit attendre au moins 2 jours ouvrables pour envoyer – en
recommandé avec avis de réception – la lettre de licenciement.
Délai maximum de 1 mois en cas de licenciement disciplinaire.

B. Contenu de la lettre de licenciement :


La lettre de licenciement doit énoncer précisément les motifs de licenciement (art. L 1232-6
X).

Le décret n° 2017-1702 du 15 décembre 2017 indique la procédure destinée à préciser les


motifs énoncés dans la lettre de licenciement (JO 17 dec. 2017), décret applicable aux
licenciements prononcés postérieurement à sa publication. Désormais, dans les 15 jours
suivant la notification du licenciement, le salarié peut, par lettre recommandée avec AR ou
remise contre récépissé, demander à l’employeur des précisions sur les motifs énoncés dans la
lettre de licenciement.

L’employeur dispose à son tour d’un délai de 15 jours après la réception de la demande du
salarié pour apporter des précisions s’il le souhaite. Il communique ces précisions au salarié
par lettre recommandée avec AR ou remise contre récépissé.

Du reste, dans un délai de 15 jours suivant la notification du licenciement et selon les mêmes
formes, l’employeur peut, à son initiative, préciser les motifs du licenciement (C. trav., art. R.
1232-13 et R. 1233-2-2).

Art. L. 1235-2 : « Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement prévue aux articles L.
1232-6, L. 1233-16 et L. 1233-42 peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés
par l’employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié, dans des délais et
conditions fixés par décret en Conseil d’État.
La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l’employeur, fixe les limites du
litige en ce qui concerne les motifs de licenciement.
À défaut pour le salarié d’avoir formé auprès de l’employeur une demande en
application de l’alinéa premier, l’irrégularité que constitue une insuffisance de
motivation de la lettre de licenciement ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause
réelle et sérieuse et ouvre droit à une indemnité qui ne peut excéder un mois de salaire
(…) ».

La seule référence à la gravité des faits reprochés, à une perte de confiance ou à une
insuffisance professionnelle ne constitue pas une raison suffisamment précise.

Cass. soc., 21 nov. 2018, n° 17-11.122 p+b


Un salarié est licencié pour motif personnel. Dans la lettre de licenciement, l’employeur lui
reproche notamment de l’avoir menacé d’engager une procédure judiciaire à son encontre. Le
salarié saisit la juridiction prud’homale d’une demande de nullité de son licenciement,
estimant que l’employeur a violé sa liberté fondamentale d’agir en justice.
Pour l’employeur, seule la référence dans la lettre de licenciement à une action judiciaire
effectivement engagée par le salarié (et non envisagée) serait susceptible de constituer une
atteinte au droit d’ester en justice.
La cour d’appel, confirmée par la Cour de cassation, n’est pas de cet avis : la seule référence,
dans la lettre de licenciement, à l’action judiciaire envisagée par le salarié porte atteinte à la
liberté fondamentale d’ester en justice. Elle entraîne, à elle seule, la nullité du licenciement.
S’agissant des conséquences d’un licenciement nul, le salarié a le droit, en principe, de
réclamer sa réintégration dans son emploi ou, à défaut, dans un emploi équivalent. La
réintégration s’accompagne du versement d’une indemnité d’éviction qui répare le préjudice
subi par le salarié en raison de la perte de salaires, et dont le montant varie suivant l’origine
de la nullité du licenciement. La Cour de cassation rappelle dans cette affaire que, lorsque la
nullité sanctionne la méconnaissance d’une liberté fondamentale, telle la liberté d’ester en
justice, l’indemnité est forfaitaire : elle est égale au montant de la rémunération que le salarié
aurait dû percevoir entre son éviction de l’entreprise et sa réintégration, sans déduction des
éventuels revenus de remplacement dont il a pu bénéficier pendant cette période. Tel est
également le cas du licenciement lié à l’exercice du droit de grève (Cass. soc., 2 févr. 2006,
n° 03-47.481 Bull. civ. V, n° 53 ; Cass. soc., 25 nov. 2015, n° 14-20.527, Bull. civ. V, n° 236),
du licenciement discriminatoire prononcé en raison de l’état de santé du salarié (Cass. soc., 11
juill. 2012, n° 10-15.905, Bull. civ. V, n° 218), ou encore du licenciement discriminatoire
fondé sur les activités syndicales du salarié (Cass. soc., 9 juill. 2014, n° 13-16.434, Bull. civ.
V, n° 186).

C. La lettre de licenciement et les termes du litige :

Cette lettre fixe classiquement les limites du futur litige. Cela signifie que l’employeur ne
pourra plus par la suite invoquer d’autres motifs : Cass. soc. 27 février 2002.
Enfin, « la référence dans la lettre de licenciement aux motifs contenus dans le courrier de
convocation à l’entretien préalable ne constitue pas l’énoncé des motifs exigés par la loi » :
Cass. soc. 27 février 2002.

D. Date de la rupture :

La rupture se situe à la date d’envoi de la lettre.

II. LE PRÉAVIS

Sauf faute grave ou lourde, un préavis doit être observé d’une durée au moins égale à :
– un mois, si l’ancienneté du salarié est comprise entre 6 mois et 2 ans,
– deux mois, pour une ancienneté de 2 années ou plus (L1234-1).
Le préavis débute le jour de la première présentation de la lettre de notification, que le salarié
en accuse réception ou non. La convention collective peut prévoir des dispositions plus
avantageuses.

Pendant le préavis, le salarié continue de :


- travailler normalement,
- percevoir la rémunération habituelle.
Mais l’employeur peut toujours dispenser le salarié d’exécuter – totalement ou partiellement –
le préavis. Précisée par écrit, cette dispense :
– n’avance pas la date de rupture du contrat de travail ;
– est sans incidence sur l’indemnité compensatrice de préavis qui doit être versée.
Sauf en cas de congés payés, d’accident du travail en cours de préavis ou de congé de
maternité ou d’adoption, l’absence du salarié ne prolonge pas le préavis.
La durée du préavis entre dans le calcul des congés payés.
III. SANCTIONS EN CAS DE NON-RESPECT DE LA PROCÉDURE

A. Le schéma traditionnel (avant la réforme Macron du 22


septembre 2017)

Si le licenciement d’un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée, mais
pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l’employeur d’accomplir la procédure
prévue et accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être
supérieure à un mois de salaire. Sauf exception visée ci-dessous, ces dispositions ne sont
toutefois pas applicables au licenciement d’un salarié de moins de deux ans d’ancienneté dans
l’entreprise et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de
11 salariés : dans ce cas, selon la jurisprudence de la Cour de cassation, le salarié peut
prétendre à une indemnité, dont le montant est fixé par le juge, destinée à réparer le préjudice
que lui fait subir l’irrégularité de la procédure.
En cas de méconnaissance des dispositions relatives à l’assistance du salarié par un conseiller,
les dispositions relatives aux irrégularités de procédure s’appliquent même au licenciement
d’un salarié ayant moins de deux ans d’ancienneté et au licenciement opéré dans une
entreprise employant habituellement moins de 11 salariés.

B. Les simplifications résultant de la réforme Macron du 22


septembre 2017

Les sanctions infligées à l’employeur sont amoindries. Ainsi :

Art. L. 1235-2 : « Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement prévue aux articles L.
1232-6, L. 1233-16 et L. 1233-42 peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par
l’employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié, dans des délais et conditions
fixés par décret en Conseil d’État.
La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l’employeur, fixe les limites du litige en
ce qui concerne les motifs de licenciement.
À défaut pour le salarié d’avoir formé auprès de l’employeur une demande en application de
l’alinéa premier, l’irrégularité que constitue une insuffisance de motivation de la lettre de
licenciement ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse et ouvre
droit à une indemnité qui ne peut excéder un mois de salaire.
En l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, le préjudice résultant du vice de
motivation de la lettre de rupture est réparé par l’indemnité allouée conformément aux
dispositions de l’article L. 1235-3.
Lorsqu’une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement
d’un salarié intervient sans que la procédure requise aux articles L. 1232-2, L. 1232-3, L.
1232-4, L. 1233-11, L. 1233-12 et L. 1233-13 ait été observée ou sans que la procédure
conventionnelle ou statutaire de consultation préalable au licenciement ait été respectée, mais
pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une
indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire ».

Art. L. 1235-2-1 : « En cas de pluralité de motifs de licenciement, si l’un des griefs reprochés
au salarié porte atteinte à une liberté fondamentale, la nullité encourue de la rupture ne
dispense pas le juge d’examiner l’ensemble des griefs énoncés, pour en tenir compte, le cas
échéant, dans l’évaluation qu’il fait de l’indemnité à allouer au salarié, sans préjudice des
dispositions de l’article L. 1235-3-1. »

L’article L. 1245-1 du même Code est complété : « La méconnaissance de l’obligation de


transmission dans le délai fixé par l’article L. 1242-13 ne saurait, à elle seule, entraîner la
requalification en contrat à durée indéterminée. Elle ouvre droit, pour le salarié, à une
indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut être supérieure à un mois de salaire. »

L’article L. 1251-40 est complété : « La méconnaissance de l’obligation de transmission dans


le délai fixé par l’article L. 1251-17 ne saurait, à elle seule, entraîner la requalification en
contrat à durée indéterminée. Elle ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité, à la charge
de l’employeur, qui ne peut être supérieure à un mois de salaire. »

FICHE 9 : LE LICENCIEMENT POUR MOTIF ÉCONOMIQUE : LES


CONDITIONS DE FOND

Comme tout licenciement, le licenciement pour motif économique doit être motivé et justifié
par une cause réelle et sérieuse.

Définition du périmètre d’appréciation de la cause économique d’un licenciement : les


difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la
compétitivité de l’entreprise doivent être appréciées au niveau de cette dernière si elle
n’appartient pas à un groupe. Dans le cas contraire, elle s’apprécie au niveau du secteur
d’activité commun au sien et à celui des entreprises du groupe auquel elle appartient sur le
territoire national. Le secteur d’activité est caractérisé, notamment, par la nature des produits
biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, les réseaux et modes de distribution qui se
rapportent à un même marché.
Plus précisément, d’après l’article L1233-3 du Code du travail, « Constitue un licenciement
pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs
non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi
ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail,
consécutives notamment », etc.

En outre, la jurisprudence a dégagé :


– la notion de sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise justifiant la
réorganisation de l’entreprise (réorganisation justifiée par l’intérêt de l’entreprise :
er
Cass. soc. 1 avril 1992 ; puis par la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise :
Cass. soc. Arrêt Vidéocolor ; Cass. soc. 5 avril 1995 ;

– et la cessation d’activité de l’entreprise : Cass. soc. 16 janvier 2001 ;

Dans l’ensemble, pour que le licenciement pour motif économique soit fondé il faut donc :
– un motif non inhérent à la personne du salarié
– une cause économique (difficultés économiques, mutation technologique,
sauvegarde de la compétitivité, cessation d’activité de l’entreprise)
– un impact sur l’emploi
– En outre, le licenciement pour motif économique ne sera valable que si l’employeur
a satisfait à son obligation d’adaptation et de reclassement.

I. UN MOTIF NON INHÉRENT À LA PERSONNE DU SALARIÉ

Le licenciement économique doit reposer sur un motif non inhérent à la personne du salarié,
c’est-à-dire un motif qui ne repose pas sur la personnalité ou le comportement du salarié.

C’est une situation étrangère à la personne du salarié qui doit déclencher le projet de
licenciement. Cette situation est nécessairement une situation économique, que celle-ci
concerne l’entreprise elle-même ou son environnement.

Le salarié ne doit pouvoir avoir aucune prise sur le motif de licenciement. C’est l’idée que la
qualité lato sensu du travail n’entre pas en ligne de compte dans la détermination du caractère
économique du licenciement.

Par exemple ne sont pas des motifs de licenciement du fait de leur caractère inhérent à la
personne du salarié les motifs :

– Disciplinaires.

– Relatifs aux absences prolongées ou répétées du salarié

– L’inaptitude physique ou professionnelle du salarié

– L’âge du salarié : Cass. soc. 24 avril 1990 Folies Bergères.

La Cour de cassation considère que le « défaut de cause réelle et sérieuse du licenciement


ne lui enlève pas sa nature juridique de licenciement économique ». Ainsi, un salarié ne
peut se voir refuser le bénéfice des mesures de reclassement prévues dans le plan de
sauvegarde de l’emploi au motif que son licenciement n’est pas justifié par des difficultés
économiques : Cass. soc. 14 février 2007.

II. UNE CAUSE ÉCONOMIQUE

A. Des difficultés économiques


À l’évidence, le contrôle de la réalité des difficultés, dans le cadre d’une entreprise seule, ne
pose pas, en soi, de problème particulier. Il en va autrement s’agissant des groupes de sociétés
qui, par le truchement des opérations comptables, peuvent priver de fonds une filiale dans
l’unique but d’y ajouter des licenciements économiques.

1. Le cadre d’appréciation des difficultés économiques

– Si l’entreprise n’appartient pas à un groupe : les difficultés économiques sont


appréciées dans le cadre de l’entreprise (et non d’un établissement : Cass. soc 17
juin 1992).

– Si l’entreprise appartient à un groupe, les difficultés économiques doivent être


appréciées au regard du secteur d’activité du groupe auquel appartient l’entreprise
concernée : « Thomson Vidéocolor et TRW Repas », Cass. soc. 5 avril 1995 ;

Exemple : Cass. soc. 28 novembre 2007 : « les difficultés s’appréciant au niveau du secteur
d’activité du groupe auquel appartient l’entreprise qui licencie, la cour d’appel, qui n’est pas
sortie des limites du litige fixées par la lettre de licenciement, n’avait pas à rechercher si les
résultats de la société Ensival-Moret Kestner étaient bénéficiaires ».
Ceci emporte deux conséquences :

– Le licenciement économique peut être justifié dans une entreprise ne supportant pas
de difficultés économiques SI LE SECTEUR D’ACTIVITÉ DU GROUPE
AUQUEL ELLE APPARTIENT EST EN CRISE (espèce TRW Repas).

– Le licenciement peut ne pas être justifié dans une entreprise supportant des
difficultés économiques, mais DONT LE SECTEUR D’ACTIVITÉ DU GROUPE
EST PROSPÈRE (arrêt Thomson).

Il incombe à l’employeur de démontrer l’étendue du secteur du groupe auquel appartient son


entreprise. La Cour de cassation n’a pas livré de définition de la notion de secteur d’activité
du groupe (appréciation souveraine des juges du fond).

Cass. soc. 4 mars 2009 : selon l’employeur, l’activité de sciage de bois de chêne constitue un
secteur d’activité différent de celui du négoce de bois et matériaux de construction. Selon la
Cour : « la cour d’appel qui a constaté que les éléments produits par l’employeur, limités aux
entreprises situées sur le territoire français, ne permettaient pas de déterminer l’étendue du
secteur d’activité du groupe dont relevait la société Bosni, a pu en déduire que la réalité des
difficultés économiques invoquées n’était pas établie ». Dès lors, si l’employeur fait partie
d’un groupe, c’est à lui de communiquer au juge prud’homal les informations nécessaires
pour déterminer la consistance de ce groupe et celle du secteur d’activité concerné.

Par ces ceux arrêts publiés rendus le même jour, la Chambre sociale de la Cour de cassation a
rappelé le principe selon lequel, lorsque l’entreprise fait partie d’un groupe comprenant
d’autres entités qui interviennent sur le même secteur, la cause économique s’apprécie au
niveau du secteur d’activité commun (Cass. soc. 14 décembre 2011 ; Cass. soc. 14 décembre
2011).

2. L’appréciation du caractère réel et sérieux des difficultés économiques

La loi du 8 août 2016 définit avec plus de précisions les difficultés économiques pouvant
entraîner un licenciement économique. Les difficultés économiques rencontrées par
l’entreprise pourront notamment être caractérisées par une baisse des commandes ou du
chiffre d’affaires pendant un certain nombre de trimestres consécutifs, qui varie en fonction
de la taille de l’entreprise. Ce nombre est fixé à l’article L1233-3 du Code du travail :

a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;


b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins onze salariés et de moins de
cinquante salariés ;
c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins cinquante salariés et de moins
de trois cents salariés ;
d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus.

Il suffit que l’entreprise remplisse ces conditions posées par la législation pour que le
licenciement économique soit mis en œuvre. Il sera alors difficile pour un salarié de contester
le motif économique de son licenciement dès lors que ces critères sont réunis. Cette définition
plus précise, avec l’introduction de nouveaux critères, aura également pour effet de réduire le
pouvoir d’interprétation des tribunaux quant aux motifs économiques avancés par l’entreprise
pour justifier le licenciement.

En toute hypothèse, il appartient aux juges du fond d’apprécier la réalité des difficultés
économiques invoquées. Il n’est pas exigé l’existence d’un état de cessation des paiements.
En revanche, le seul fait d’invoquer le coût élevé du travail, l’insuffisante rentabilité du poste
du salarié ne suffit pas à justifier des difficultés économiques (Cass. soc. 16 mars 1994). Il en
est de même de la seule diminution des marges de l’entreprise (Cass. soc. 21 mars 2001). En
revanche, à titre d’illustration, la perte, par l’employeur, de son unique client peut justifier
l’existence de difficultés économiques (Cass. soc. 19 juillet 2000).

Même si les difficultés économiques sont établies, le licenciement sera sans cause réelle et
sérieuse s’il apparaît que l’employeur a fait preuve d’une légèreté blâmable ou a eu une
attitude frauduleuse en organisant des difficultés de l’entreprise.

B. Les mutations technologiques : cause autonome de licenciement pour motif


économique.

Les mutations technologiques dans l’entreprise peuvent constituer une cause de


licenciement économique (article L.1233-3 du Code du travail).
L’introduction de technologies nouvelles suffit à justifier le licenciement, sans qu’il soit
nécessaire pour l’employeur d’invoquer des difficultés économiques ou de prouver la
nécessité d’une sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise : Cass. soc. 9 octobre 2002.

Dans la mesure où « les mutations technologiques constituent un motif économique autonome


de licenciement », peu importe si l’employeur ne démontre pas que « l’adoption d’un procédé
de fabrication par impression numérique, remplaçant le procédé existant d’impression
sérigraphique, participait de la sauvegarde de son entreprise » (Cass. soc. 15 mars 2012).

Cependant, d’une part, les juges vont apprécier si la mutation technologique invoquée par
l’employeur peut véritablement être considérée comme telle (par exemple, sur la question de
savoir si un simple changement de pro logiciel ou logiciel constitue une innovation
technologique en tant que telle : Cass. soc. 13 mai 2003.)

D’autre part, selon l’article L.6321-1 du Code du travail, l’employeur est tenu d’adapter les
salariés aux évolutions prévisibles de leur emploi.
En conséquence, le licenciement pourra être jugé abusif si l’employeur n’a pas au préalable
satisfait à son obligation d’adaptation.

Cette obligation d’adaptation impose à l’employeur d’offrir à ses salariés une période de
formation qui leur permette d’occuper le poste proposé (Cass. soc. 17 février 1998).
Cette obligation a une limite ; si l’employeur est tenu d’assurer l’adaptation des salariés à
l’évolution de leur emploi, au besoin en leur assurant une formation complémentaire, il ne
peut cependant lui être imposé d’assurer la formation initiale qui leur fait défaut (Cass. soc.
10 mars 2009).

L’introduction de nouvelles technologies dans l’entreprise peut constituer une cause


économique même en l’absence de difficultés économiques (Cass. soc. 2 juin 1993). C’est
une cause économique autonome. Par exemple, l’employeur n’a pas à démontrer que ces
mutations technologiques sont nécessaires à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise
(Cass. soc. 9 octobre 2002).

C. La réorganisation de l’entreprise pour sauvegarder la compétitivité

À ces critères liés aux difficultés économiques ou aux mutations technologiques, la


jurisprudence en a ajouté un autre lié à la réorganisation destinée à assurer la sauvegarde de la
compétitivité de l’entreprise ou celle du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient
(Cass. soc. Ass. Plén. 8 déc. 2000).
C’est donc en principe la menace qui pèse sur la compétitivité qui est susceptible de justifier
la réorganisation à l’origine des licenciements.
Pour autant, toutes les réorganisations ne sont pas motivées par une telle sauvegarde de la
compétitivité.
Il y a donc une alternative :
– Soit la réorganisation est motivée par des difficultés économiques ou par des
mutations technologiques, auquel cas elle trouve son origine dans ces difficultés ou
mutations.
– Soit la réorganisation intervient en dehors de toute difficulté économique et de toute
mutation technologique, auquel cas elle ne peut constituer une cause économique
de licenciement « que si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité du
secteur d’activité ». Cass. soc. 5 avril 1995.

« Lorsqu’elle n’est pas liée à des difficultés économiques, une réorganisation ne peut
constituer un motif économique que si elle est effectuée pour sauvegarder la
compétitivité du secteur d’activité » (Cass. soc. 29 mai 2001).
La notion de sauvegarde de la compétitivité est destinée à permettre aux entreprises de
procéder à des licenciements économiques pour prévenir des difficultés économiques qui
n’existent pas au moment du licenciement.
Le licenciement visant à anticiper des difficultés prévisibles est donc possible alors même que
l’entreprise bénéficie, au jour du licenciement, d’une situation financière saine (Cass. soc.
Pages jaunes 11 janvier 2006). Attention, cela ne signifie en aucun cas que des licenciements
économiques soient possibles pour améliorer la rentabilité de l’entreprise. L’employeur
doit toujours être en mesure de démontrer l’existence de menaces véritables pesant sur la
compétitivité de l’entreprise (Cass. soc. 31 mai 2006 Catimini ; Cass. soc. 21 novembre
2006, Dunlop).

Autre exemple jurisprudentiel : Cass. soc. 30 juin 2008.

La Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir retenu que l’entreprise aurait été
confrontée à des difficultés économiques si elle n’avait pas adapté son organisation au
nouveau mode de gestion de son fonds de commerce et donc que la nouvelle organisation
était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise.

Notons que la seule mention de la « réorganisation » suffit à motiver une lettre de


licenciement (Cass. soc 24 septembre 2002).

Remarque : Lorsque les difficultés économiques existent au moment de la rupture du contrat


de travail, la réorganisation est motivée par ces seules difficultés sans qu’il faille se référer à
la question de la compétitivité de l’entreprise, qui devient en quelque sorte une question
secondaire.

Attention :
Tout d’abord, le juge est intransigeant sur l’idée que la cause doit bien relever d’une
« sauvegarde » de la compétitivité et non pas d’une « amélioration » de celle-ci. L’idée étant
qu’aucun licenciement économique ne peut être opéré dans le but d’augmenter les
profits. À l’inverse, le maintien de ces profits, qui n’est pas non plus le maintien de
l’entreprise comme l’avait voulu la loi de modernisation sociale, est parfaitement acceptable.
C’est l’idée qu’il vaut mieux, en amont accepter quelques centaines de licenciements, plutôt
que d’avoir à déplorer, en aval, la survenue de milliers de ruptures de contrats pour motif
économique.

Par ailleurs, le juge doit simplement se borner à constater que l’employeur excipe bien
une cause légale ou jurisprudentielle de licenciement économique.
Plus précisément, il n’appartient pas au juge d’arbitrer entre les différents choix offerts à
l’employeur, dès lors qu’il constate que la mesure critiquée avait pour but de sauvegarder la
compétitivité de l’entreprise : Ass. Plén. SAT 8 décembre 2000, Valéo Vision 17 décembre
2002.
Dans ces affaires, l’employeur avait le choix entre 86, 213 et 318 licenciements selon des
modalités différentes de réorganisation de sa société. Ayant choisi la solution la plus
préjudiciable à l’emploi (318 emplois supprimés), la Cour d’appel de Riom avait décidé que
les licenciements étaient sans cause réelle et sérieuse dans la mesure où l’employeur
sauvegardait sa compétitivité dans les trois options et où il devait prendre en compte dans ses
calculs le « concept de préservation de l’emploi ». Cassant cet arrêt sur la base d’un moyen
soulevé d’office, l’Assemblée plénière de la Cour de cassation a estimé qu’il n’appartient pas
au juge d’arbitrer entre les différents choix offerts à l’employeur, dès lors qu’il constate que la
mesure critiquée avait pour but de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise.

D. La cessation d’activité

La cessation d’activité complète et définitive de l’entreprise constitue un motif économique


sans qu’il soit nécessaire de rechercher la cause de cette cessation d’activité quand elle n’est
pas due à une faute ou à une légèreté blâmable du chef d’entreprise : Cass. soc. 10 mai 2012.

La cessation d’activité de l’entreprise est, en soi, une cause de rupture légitime du contrat de
travail lorsqu’il est conclu pour une durée indéterminée. Toutefois, elle ne libère pas
l’employeur de son obligation de respecter un préavis (article L. 1234-7 du Code du travail) et
de verser l’indemnité de licenciement légalement due (article L. 1234-10 du Code du travail).

Certes, en cas de force majeure, cet arrêt définitif de l’activité emporte dispense de préavis et
d’indemnité de licenciement (article L. 1234-12 du même Code) et, en ce cas, c’est le
personnel qui donc supporte entièrement le risque de disparition de l’entreprise, sans pouvoir
prétendre au paiement d’une indemnité.

Mais les conditions posées pour que la force majeure soit caractérisée (événement extérieur
irrésistible/impossibilité de poursuivre le contrat de travail) réduisent considérablement le
champ d’application de cette cause d’exonération (Cass. soc. 12 février 2003).

Au-delà de cette obligation de prendre en charge le préavis et l’indemnité de licenciement,


l’employeur n’a pas à justifier des raisons qui l’ont déterminé à mettre fin à son activité. La
volonté de mettre fin à l’entreprise est en elle-même une cause de rupture des contrats de
travail. C’est une conséquence de la liberté d’entreprendre, qui implique la liberté de cesser
son activité, ainsi que l’a laissé entendre le Conseil constitutionnel dans sa décision du
12 janvier 2002 (n° 2001-455 DC) relative à la loi de modernisation sociale.

En d’autres termes le risque économique que prend l’entrepreneur prime ici le risque que
constitue, pour son personnel, la disparition des emplois. Comme le jugeait en 1956 la
Chambre sociale, « aucune disposition légale ne fait obligation [à l’employeur] de maintenir
son activité à seule fin d’assurer à son personnel la stabilité de son emploi » (Cass. soc.
31 mai 1956).

Mais cette répartition inégale du risque a une limite : la cessation de l’activité ne constitue pas
une cause réelle et sérieuse de licenciement si elle résulte d’une légèreté blâmable ou d’une
faute de l’employeur (Cass. soc., 16 janvier 2001), des erreurs de gestion ne suffisant pas à
caractériser un tel manquement (Cass. soc. 14 décembre 2005).

Autrement dit, la liberté de dissoudre l’entreprise et de résilier ainsi les contrats de travail ne
permet pas de légitimer une décision qui trouve sa cause dans une faute de l’employeur. Cette
légèreté blâmable pourra notamment consister, pour l’employeur qui fait partie d’un groupe et
dont la situation est prospère, à interrompre son activité et à licencier tout son personnel à la
seule demande de la direction du groupe, dans la mesure où il fait ainsi primer son
er
appartenance au groupe sur l’intérêt de l’entreprise, au détriment de l’emploi (Cass. soc. 1
février 2011).

La liberté de mettre fin à son activité n’est donc pas sans limites.

Par ailleurs, si l’intégration dans le groupe est si poussée qu’une autre société du même
groupe contrôle en réalité les choix et les décisions de l’employeur, notamment dans la
gestion de son personnel, à la faveur d’une confusion d’intérêts, d’activité et de direction, une
situation de co-emploi pourra alors être caractérisée qui ne permettra plus d’invoquer une
cessation d’activité pour justifier le licenciement de tout le personnel de l’une des entités
puisque la cause économique devra exister chez chacun des co-employeurs.

Il faudra en ce cas que les licenciements reposent sur une autre cause économique constituée
au niveau du secteur d’activité du groupe dans lequel interviennent les co-employeurs (Cass.
soc. 18 janvier 2011). Le risque sera alors réparti comme pour toute autre cause de
licenciement pour motif économique.

Quid de la cessation partielle d’activité par exemple la fermeture d’un seul


établissement de l’entreprise ?

D’après la jurisprudence, pour que la cessation d’activité constitue une cause économique
légitime de licenciement, elle doit : (Cass. soc. 18 janvier 2011).
•• concerner l’ensemble des établissements de l’entreprise : Cass. soc. 16 mars 2004.
•• être définitif et non temporaire : Cass. soc. 15 octobre 2002).
•• elle ne doit pas résulter d’une faute de l’employeur ou de sa légèreté blâmable :
Cass. soc. 16 janvier 2001 arrêt Morvant.

En d’autres termes, la cessation partielle d’activité ne justifie pas un licenciement pour motif
économique (Cass. soc. 10 octobre 2006).
La cessation partielle de l’entreprise qui ne concerne qu’un seul établissement ne pourra
justifier un licenciement économique qu’en cas de :
•• difficultés économiques
•• de mutation technologique
•• ou de réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité :
Cass. soc. 10 octobre 2006 ; Cass. soc. 25 septembre 2007.

De la même façon, « lorsque le salarié a pour co-employeurs des entités faisant partie
d’un même groupe, la cessation d’activité de l’une d’elles ne peut constituer une cause
économique de licenciement qu’à la condition d’être justifiée par des difficultés
économiques, par une mutation technologique ou par la nécessité de sauvegarder la
compétitivité du secteur d’activité du groupe dont elles relèvent » (Cass. soc. 18 janvier
2011).

III. UN IMPACT SUR L’EMPLOI

Si un salarié est licencié alors que son emploi est maintenu et occupé par un autre salarié c’est
que le motif de son licenciement se trouvait nécessairement attaché à sa personne et qu’en
conséquence celui-ci ne recouvre pas de caractère économique.

Cass. soc. 24 avril 1990 Voissot : un licenciement motivé par le caractère trop onéreux d’un
salarié n’est pas économique, car est inhérent à sa personne et ne fait pas suite à une
suppression d’emploi.

Le juge va chercher ici à mettre en évidence le lien de causalité entre les difficultés
économiques (causes originelles) et la suppression effective de l’emploi litigieux (Cass. soc.
11 juin 2002). La suppression d’emploi doit être la conséquence des difficultés économiques.
Ainsi, la lettre de licenciement devra clairement faire apparaître les liens entre motif
économique et disparition de l’emploi. Si tel n’est pas le cas, le licenciement est dépourvu de
cause réelle et sérieuse.

IV. L’OBLIGATION D’ADAPTATION ET DE RECLASSEMENT DU SALARIÉ :


article L. 1233-4 du Code du travail

A. PRINCIPES CLASSIQUES

1° L’obligation d’adaptation

Avant d’envisager une procédure de licenciement économique d’un ou de plusieurs salariés,


l’employeur doit réaliser tous les efforts de formation et d’adaptation nécessaires à l’évolution
de leur emploi.
L’employeur n’est cependant pas tenu de proposer une formation initiale au salarié. Il doit
seulement proposer une formation complémentaire, de courte durée et permettant une
adaptation rapide des salariés.
Le non-respect de l’obligation d’adaptation ouvre droit pour le salarié, dans le cadre d’une
procédure judiciaire, à la fois au paiement d’une indemnisation pour licenciement sans cause
réelle et sérieuse, et d’une indemnisation spécifique pour le manquement de l’employeur à
son obligation d’adaptation.

2° L’obligation de reclassement

L’obligation de reclassement est préalable au licenciement (Cass.Soc 21 mars 2001).


L’employeur doit tout mettre en œuvre pour reclasser le salarié avant de notifier le
licenciement.
La jurisprudence a précisé qu’avant tout licenciement pour motif économique, l’employeur
est tenu d’une part de rechercher toutes les possibilités de reclassement existant dans le
groupe parmi les entreprises dont l’activité, l’organisation ou le lieu d’exploitation permettent
d’effectuer des permutations de personnels et d’autre part de proposer au salarié tous les
emplois disponibles de la même catégorie ou à défaut d’une catégorie inférieure : Cass.Soc.24
juin 2008

B. IMPACTS DE LA REFORME MACRON DU 22 SEPTEMBRE 2017

L’article L. 1233-4 du Code du travail prévoit que : « Le licenciement pour motif économique
d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été
réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré sur les emplois
disponibles, situés sur le territoire national dans l’entreprise ou les autres entreprises du
groupe dont l’entreprise fait partie et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation
assurent la permutation de tout ou partie du personnel ».

L’employeur adresse des offres de reclassement de manière personnalisée ou communique la


liste des offres disponibles aux salariés, et le cas échéant l’actualisation de celle-ci, par tout
moyen permettant de conférer date certaine. Ces offres écrites précisent l’intitulé du poste et
son descriptif, le nom de l’employeur, la nature du contrat de travail, la localisation du poste,
le niveau de rémunération ainsi que la classification du poste. En cas de diffusion d’une liste
des offres de reclassement interne, celle-ci comprend les postes disponibles situés sur le
territoire national dans l’entreprise et les autres entreprises du groupe dont l’entreprise fait
partie.
L’absence de candidature écrite du salarié à l’issue du délai de rigueur vaut refus des offres
(Décret n° 2017-1725 du 21 décembre 2017 relatif à la procédure de reclassement interne sur
le territoire national en cas de licenciements pour motif économique : JO 22 déc. 2017).

FICHE 10 : LES CONDITIONS DE FORME DU LICENCIEMENT POUR MOTIF


ÉCONOMIQUE

SECTION 1. LA PROCÉDURE DES GRANDS LICENCIEMENTS ÉCONOMIQUES

Aux termes des articles L1233-38 et suivants du Code du travail, lorsque l’employeur procède
au licenciement pour motif économique de 10 salariés ou plus dans une même période de 30
jours, l’employeur doit respecter la procédure des grands licenciements économiques.
Par ailleurs, il est de jurisprudence constante que les ruptures conventionnelles, lorsqu’elles
ont une cause économique et s’inscrivent dans un processus de réduction des effectifs dont
elles constituent la ou l’une des modalités, doivent être prises en compte pour calculer le
seuil de déclenchement de la procédure des grands licenciements économiques.

Exemple : si l’employeur procède à 9 licenciements pour motif économique et signe une


rupture conventionnelle avec un salarié, alors le seuil de déclenchement de la procédure des
grands licenciements économiques est atteint, car 9 +1=10. L’employeur devra alors élaborer
un PSE intégrant un plan de reclassement sous peine de nullité (Cass. soc. 30 mai 2013).

I. LES ÉTAPES PROCÉDURALES À LA CHARGE DE L’EMPLOYEUR

D’après l’article L1233-38 les étapes procédurales que doit respecter l’employeur sont :

A. Réunion et consultation du comité social et économique. Lorsque l’employeur


procède au licenciement pour motif économique d’au moins dix salariés dans une même
période de trente jours et qu’il existe un comité social et économique dans l’entreprise,
la procédure d’entretien préalable au licenciement ne s’applique pas (C. trav., art. L.
1233-38).

B. Élaboration d’un Plan de Sauvegarde de l’Emploi pour éviter les


licenciements ou les limiter et pour faciliter les reclassements des salariés licenciés
que l’employeur doit faire connaître au représentant du personnel. Le PSE doit intégrer
un plan de reclassement sous peine de nullité (Cass. soc. 30 mai 2013) ;

C. Nouveauté de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi


er
applicable pour les procédures engagées à compter du 1 juillet 2013 : Deux
modalités sont prévues pour l’élaboration d’un PSE : la conclusion d’un accord
majoritaire, ou l’élaboration par l’employeur d’un document unilatéral.

D. Notification du projet de licenciement à l’autorité administrative (L1233-46)


qui est la DREETS (direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des
solidarités) : la notification doit comprendre selon cette loi : le nom et l’adresse de
l’employeur, la nature de l’activité et l’effectif de l’entreprise ou de l’établissement, le
nombre de licenciements envisagés en cas de recours d’un expert-comptable par le CSE
(comité social et économique), mention de cette décision.

E. Validation de l’accord ou homologation du document unilatéral (PSE) par la


DREETS. Le dossier complet comprend les informations permettant de vérifier le PSE,
les modalités d’information et de consultation du CSE (comité social et économique), le
périmètre d’application des critères de l’ordre des licenciements, le calendrier des
licenciements, le nombre de suppressions d’emplois et les catégories professionnelles
concernées et les modalités de mise en œuvre des mesures de formation, d’adaptation et
de reclassement.
F. La notification du licenciement. La lettre de notification du licenciement est
obligatoirement adressée par lettre recommandée avec accusé de réception. Elle doit
obligatoirement mentionner les motifs économiques ou les changements technologiques
invoqués, la possibilité de bénéficier d’une priorité de réembauchage pendant un an à
dater de la rupture du contrat et les conditions de sa mise en œuvre, la proposition
relative au contrat de sécurisation professionnel dans les entreprises de moins de 1 000
salariés, la proposition relative au congé de reclassement dans les entreprises de plus de
1 000 salariés. Dans ces deux derniers cas, il doit être précisé le délai de 21 jours au titre
de la proposition de la CSP et, 8 jours au titre du congé de reclassement (à compter de la
remise du dossier lors de l’entretien préalable, où lors de la deuxième réunion des
représentants du personnel) dont dispose le salarié pour accepter ou refuser le dispositif
proposé.
En cas d’acceptation par le salarié du CSP, le contrat de travail sera réputé rompu d’un
commun accord des parties, sans préavis ni indemnité compensatrice de préavis (dans la
limite de deux mois). La lettre devra également mentionner la possibilité de demander à
bénéficier, pendant le préavis, d’une action de bilan de compétences, de validation des
acquis de l’expérience (VAE) ou de formation dans le cadre de ses droits au titre droit
individuel à la formation (DIF). Droit de contestation portant sur la régularité ou la
validité du licenciement durant :
À peine de nullité, l’employeur ne peut notifier le licenciement qu’après la
notification de la décision de validation ou d’homologation, ou à l’expiration des
délais impartis à l’administration pour se prononcer.

II. LE PLAN DE SAUVEGARDE DE L’EMPLOI

A. Définition

Depuis la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002, le terme de « plan social » a été
remplacé par la notion « plan de sauvegarde de l’emploi ».
Un plan de sauvegarde de l’emploi se définit par un ensemble de mesures qui ont pour but
d’éviter ou limiter le nombre des licenciements pour motifs économiques, et de favoriser le
reclassement des salariés licenciés. Un tel plan doit être mis en œuvre par toute entreprise
d’au moins 50 salariés qui procède au licenciement pour motifs économiques d’au moins 10
salariés sur 30 jours.

B. Modalités de mise en place du PSE

Comme il a été vu précédemment, depuis la loi sur la sécurisation de l’emploi du 14 juin


2013, deux modalités sont prévues pour l’établissement d’un PSE : la conclusion d’un
accord majoritaire, ou l’élaboration par l’employeur d’un document unilatéral.
er
Ce nouveau dispositif s’applique aux procédures de licenciement engagées à compter du 1
juillet 2013.

1. L’accord collectif majoritaire validé par la DREETS


D’après l’article L1233-24-1 du Code du travail, cet accord doit être signé par une ou
plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages
exprimés en faveur d’organisations reconnues représentatives au premier tour des dernières
élections du comité social et économique (CSE), quel que soit le nombre de votants.
L’administration est informée dans délai de l’ouverture d’une négociation en vue de cet
accord.

Cet accord collectif doit déterminer au moins le contenu du plan de sauvegarde de l’emploi,
mais il peut aussi préciser les modalités de consultation du CSE et de mise en œuvre des
licenciements (la pondération et le périmètre d’application des critères d’ordre des
licenciements, le calendrier des licenciements, le nombre de suppressions d’emplois et les
catégories professionnelles concernées, les modalités de mise en œuvre des mesures de
formation, d’adaptation et de reclassement.

La validation de l’accord par la DREETS

Selon l’article L 1233-57-1, l’accord collectif majoritaire est transmis à l’autorité


administrative pour validation. Ici, le contrôle de l’administration est léger puisqu’elle se
contentera de vérifier la présence d’un plan de reclassement dans l’accord ainsi que le respect
des règles d’information-consultation et de consultation de l’accord collectif, tout cela dans
un délai de 15 jours. En effet, selon l’article L 1233 -57-2, l’autorité administrative « valide
l’accord collectif mentionné à l’article L. 1233 -24-1 dès lors qu’elle s’est assurée de :
1° Sa conformité aux articles L. 1233 -24-1 à L.1233-24-3 ;
2° La régularité de la procédure d’information et de consultation du comité social et
économique ;
3° La présence dans le plan de sauvegarde de l'emploi des mesures prévues aux articles L.
1233-61 et L. 1233-63 ;
4° La mise en œuvre effective, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-
57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 ».

2. Ou l’élaboration d’un document unilatéral homologué par


l’administration

D’après l’article L1244-24-1, le PSE peut également résulter d’un document unilatéral
homologué par l’administration.

Selon l’article L 1233-57-1, le document élaboré par l’employeur mentionné à l’article L 1233
-24-4 est transmis à l’autorité administrative pour homologation du document. En
présence d’un document unilatéral, l’administration exerce son contrôle dans un délai de 21
jours.

L’administration contrôle la pertinence du plan et sa proportionnalité aux moyens de


l’entreprise.
C. Le refus de validation de l’accord ou d’homologation du document unilatéral
par l’administration

Selon l’article L 1233-57-4, l’autorité administrative notifie à l’employeur la décision de


validation dans un délai de 15 jours à compter de la réception de l’accord collectif et la
décision d’homologation dans un délai de 21 jours à compter de la réception du document
complet élaboré par l’employeur. Elle la notifie, dans les mêmes délais, au comité social et
économique et, si elle porte sur un accord collectif, aux organisations syndicales
représentatives signataires. La décision prise par l’autorité administrative est motivée. Le
silence gardé par l’autorité administrative pendant les délais prévus au premier alinéa
vaut décision d’acceptation de validation ou d’homologation. Dans ce cas, l’employeur
transmet une copie de la demande de validation ou d’homologation, accompagnée de son
accusé de réception par l’administration, au comité d’entreprise et, si elle porte sur un accord
collectif, aux organisations syndicales représentatives signataires.

En cas de refus de validation ou d’homologation, l’employeur, s’il souhaite reprendre son


projet, devra présenter une nouvelle demande, « après y avoir apporté les modifications
nécessaires » et consulté le comité social et économique.

D. La sanction en cas de non-respect par l’employeur du refus de validation ou


d’homologation par l’administration : la nullité du licenciement

Le licenciement intervenu sans décision administrative de validation ou d’homologation


ou en cas de décision négative est nul.

En cas d’annulation d’une décision de validation ou d’homologation pour absence ou


insuffisance de PSE, la procédure de licenciement est nulle.

L’annulation d’une décision de validation ou d’homologation pour un motif autre que


l’absence ou l’insuffisance de PSE donne lieu, sous réserve de l’accord des parties, à
réintégration du salarié.

E.Les conséquences d’une annulation de la décision de validation ou


d’homologation du plan de sauvegarde de l’emploi (« PSE ») pour insuffisance
de motivation

Dans l’hypothèse où la décision de validation ou d’homologation serait annulée par un juge


en raison d’une motivation jugée insuffisante, la DREETS pourra régulariser la situation dans
un délai de quinze jours calendaires suivant la notification du jugement d’annulation. Elle
devra prendre une nouvelle décision suffisamment motivée.
En outre, l’annulation de la décision de validation ou d’homologation est désormais sans
effet sur les licenciements notifiés sur la base de ladite décision, alors qu’auparavant, les
salariés pouvaient solliciter leur réintégration et/ou des dommages-intérêts pour licenciement
nul.

Actualités.
Soc. 30 septembre 2020 n° 19-13.714 : demande de validation d’un accord collectif ou
d’homologation d’un document de l’employeur fixant le contenu du plan de sauvegarde de
l’emploi :
Il résulte des articles L. 1233-57-5 et L. 1235-7-1 du code du travail que toute demande
tendant, avant la transmission de la demande de validation d’un accord collectif ou
d’homologation d’un document de l’employeur fixant le contenu du plan de sauvegarde de
l’emploi, à ce qu’il soit enjoint à l’employeur de fournir les éléments d’information relatifs à
la procédure en cours ou de se conformer à une règle de procédure prévue par les textes
législatifs, est adressée à l’autorité administrative. Les décisions prises à ce titre ainsi que la
régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l’objet d’un litige distinct
de celui relatif à la décision de validation ou d’homologation relevant de la compétence, en
premier ressort, du tribunal administratif, à l’exclusion de tout autre recours administratif ou
contentieux.
Dès lors, une cour d’appel qui constate que les demandes d’un comité d’entreprise et d’un
syndicat tendent à ce qu’il soit enjoint à l’employeur de suspendre sous astreinte la fermeture
de magasins et toute mise en œuvre d’un projet de restructuration avant l’achèvement de la
consultation des instances représentatives du personnel relative au projet de restructuration et
au projet de licenciement collectif pour motif économique donnant lieu à l’établissement d’un
plan de sauvegarde de l’emploi, en déduit exactement, sans méconnaître le principe du droit
au recours effectif, que ces demandes ne relèvent pas de la compétence du juge judiciaire.

29 septembre 2021 Soc. LICENCIEMENTS POUR MOTIF ECONOMIQUE, PROJET


DE FERMETURE D’UN SITE, JUGE JUDICIAIRE, ATTRIBUTIONS, LIMITES,
RECHERCHE D'UN REPRENEUR. Le juge judiciaire, saisi avant la notification des
licenciements pour motif économique, ne peut faire droit à des demandes tendant à constater
l'absence de cause économique et à enjoindre en conséquence à l'employeur de mettre fin au
projet de fermeture du site et au projet de licenciement économique collectif soumis à la
consultation des instances représentatives du personnel.
Le respect du principe de la séparation des pouvoirs s'oppose à ce que le juge judiciaire se
prononce sur le respect par l'employeur de son obligation de recherche d'un repreneur.
(Syndicat CGT Ford Aquitaine industries de Blanquefort, pourvoi n° 19-23.248 [P]

F.Le contenu du PSE

1. Le PSE doit contenir un plan de reclassement sous peine de nullité y


compris en cas de départs volontaires de l’entreprise.

Le PSE doit prévoit un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés.

Le plan de reclassement collectif est indépendant de l’obligation individuelle de reclassement


qui pèse également sur l’employeur en cas de licenciements collectifs. L’employeur doit donc
rechercher pour un même salarié un reclassement individuel adapté à sa situation tout en lui
proposant des mesures de reclassement collectives issues du plan de sauvegarde de l’emploi.

À défaut de plan de reclassement, le PSE est nul ce qui entraîne la nullité des actes
subséquents à savoir :
➢ les licenciements qui auront été prononcés

➢ les départs volontaires : Cass. soc. 30 mai 2013 (attention examen) :

Par un arrêt du 30 mai 2013, la Cour de cassation rappelle l’obligation pour l’employeur
d’intégrer dans le PSE, un plan de reclassement conformément à l’article L1235-10 du Code
du travail, à défaut de quoi, la procédure de licenciement est nulle ce qui affecte les actes
subséquents et notamment les départs volontaires subséquents.
En effet, le licenciement pour motif économique ne peut intervenir que lorsque le
reclassement de l’intéressé ne peut être opéré ce qui suppose, dans le cadre de grands
licenciements économiques, l’élaboration d’un plan de reclassement intégré au PSE.
La Cour de cassation rappelle cette exigence légale tout en confirmant une jurisprudence
antérieure selon laquelle l’exigence d’intégrer un plan de reclassement dans le PSE joue
également en matière de départs volontaires de salariés inclus dans le PSE.
En 2010, la Haute juridiction a admis que, dès lors que le projet de réduction des effectifs
n’envisage que des départs volontaires et comporte l’engagement exprès de ne procéder à
aucun licenciement, l’employeur soit dispensé de son obligation légale d’établir un plan de
reclassement interne s’intégrant au PSE : Cass. soc. 26 octobre 2010.
Mais en 2012, la Cour de cassation a fait un pas de plus : si l’employeur qui entend
supprimer des emplois pour des raisons économiques en concluant avec les salariés des
accords de rupture amiable, n’est pas tenu d’établir un plan de reclassement interne
lorsque le plan de réduction des effectifs au moyen de départs volontaires exclut tout
licenciement pour atteindre des objectifs qui lui sont assignés en terme de suppression
d’emplois, il en va autrement lorsque le projet de réduction d’effectifs de l’employeur
implique la suppression de l’emploi de salariés qui ne veulent ou ne peuvent quitter
l’entreprise dans le cadre du plan de départs volontaires : Cass. 25 janvier 2012.
En d’autres termes, lorsque le projet de réduction des effectifs implique la suppression de
l’emploi de salariés qui ne veulent ou qui ne peuvent quitter l’entreprise dans le cadre du plan
de départ volontaire, un plan de reclassement interne doit être élaboré.

En toute hypothèse, la nullité du départ volontaire ne sera prononcée que si :

➢ le départ volontaire a une cause économique,


➢ le départ s’inscrit dans un processus de réduction des effectifs donnant lieu à
l’établissement du plan de sauvegarde et de l’emploi annulé.

2. Le PSE doit prévoir les mesures suivantes (Article L1233-62 Code du


travail) :

– des actions en vue du reclassement interne des salariés sur des emplois relevant de
la même catégorie d’emplois ou équivalents à ceux qu’ils occupent ou, sous réserve
de l’accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ;
– des créations d’activités nouvelles par l’entreprise ;
– des actions favorisant le reclassement externe à l’entreprise (notamment par le
soutien à la réactivation du bassin d’emploi) ;
– des actions de soutien à la création d’activités nouvelles ou à la reprise d’activités
existantes par les salariés ;
– des actions de formation, de validation des acquis de l’expérience (VAE) ou de
reconversion de nature à faciliter le reclassement interne ou externe des salariés sur
des emplois équivalents ;
– des mesures de réduction ou d’aménagement du temps de travail ainsi que des
mesures de réduction du volume des heures supplémentaires réalisées de manière
régulière (lorsque ce volume montre que l’organisation du travail de l’entreprise est
établie sur la base d’une durée collective manifestement supérieure à 35 heures
hebdomadaires ou 1 600 heures par an et que sa réduction pourrait préserver tout ou
partie des emplois dont la suppression est envisagée) ;
– les conditions de mise en œuvre du congé de reclassement (lorsqu’il est obligatoire).

En toutes hypothèses, le chef d’entreprise doit faire figurer dans son plan de sauvegarde de
l’emploi un ensemble de mesures concrètes et efficaces afin de favoriser le reclassement des
salariés ou d’éviter leur licenciement (Cass. soc 28 mars 2000 Lasnon).

G.Le contrôle du contenu du PSE : appréciation en fonction des capacités de


l’employeur.

Les moyens mis en œuvre par le plan de sauvegarde de l’emploi doivent être proportionnés
aux moyens dont dispose l’entreprise ou, le cas échéant, l’UES ou le groupe, afin d’éviter des
licenciements ou de favoriser des reclassements.

En effet, une très grande entreprise n’a pas les mêmes moyens matériels et humains qu’une
PME, ce qui implique que le juge apprécie les mesures du plan de sauvegarde de l’emploi au
regard des possibilités et donc de la situation concrète de l’entreprise.

En toutes hypothèses, l’employeur ne peut se contenter de mentionner dans son PSE les
mesures de l’article L1233-62. Les mesures qui figurent dans le PSE doivent être
suffisamment précises.

À titre d’exemple, un plan de l’emploi ne comportant aucune indication sur le nombre et la


nature des emplois qui pouvaient être proposés aux salariés à l’intérieur du groupe n’est pas
suffisamment précis : Cass. soc. Everite 17 mai 1995 ; Cass. soc. 24 septembre 2002.

Le PSE doit en outre indiquer précisément la localisation des emplois offerts dans le cadre du
reclassement interne (Cass. soc. 10 juin 2007) ainsi que les catégories professionnelles
concernées par le projet de licenciement collectif (Cass. soc. 13 février 1997).

Actualité : Soc. 27 mai 2021, n°18-26.744 procédure de licenciement collectif :


Aux termes de l’article L. 1235-7-1 du code du travail, l’accord collectif mentionné à l’article
L. 1233-24-1, le document élaboré par l’employeur mentionné à l’article L. 1233-24-4, le
contenu du plan de sauvegarde de l’emploi, les décisions prises par l’administration au titre de
l’article L. 1233-57-5 et la régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent
faire l’objet d’un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d’homologation
mentionnée à l’article L. 1233-57-4, qui relève de la compétence, en premier ressort, du
tribunal administratif, à l’exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux.
Le juge judiciaire demeure ainsi compétent pour statuer sur les litiges relatifs à l’application
des mesures comprises dans un plan de sauvegarde de l’emploi mais ne peut, dans cet office,
méconnaître l’autorité de la chose décidée par l’autorité administrative ayant validé l’accord
collectif ou homologué le document élaboré par l’employeur par lequel a été fixé le contenu
du plan de sauvegarde de l’emploi, ni l’autorité de la chose jugée par le juge administratif
saisi en application de l’article L. 1235-7-1 du code du travail.
Il en résulte qu’un salarié peut, au soutien de demandes salariales ou indemnitaires formées
contre l’employeur, se prévaloir du défaut de validité de l’accord collectif déterminant le
contenu du plan de sauvegarde de l’emploi, qui résulte des motifs de la décision du juge
administratif annulant la décision de validation de cet accord.

Soc. 30 septembre 2020, n° 19-13.714 : procédure de licenciement collectif : il résulte des


articles L. 1233-57-5 et L. 1235-7-1 du code du travail que toute demande tendant, avant la
transmission de la demande de validation d’un accord collectif ou d’homologation d’un
document de l’employeur fixant le contenu du plan de sauvegarde de l’emploi, à ce qu’il soit
enjoint à l’employeur de fournir les éléments d’information relatifs à la procédure en cours ou
de se conformer à une règle de procédure prévue par les textes législatifs, est adressée à
l’autorité administrative. Les décisions prises à ce titre ainsi que la régularité de la procédure
de licenciement collectif ne peuvent faire l’objet d’un litige distinct de celui relatif à la
décision de validation ou d’homologation relevant de la compétence, en premier ressort, du
tribunal administratif, à l’exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux.
Dès lors, une cour d’appel qui constate que les demandes d’un comité d’entreprise et d’un
syndicat tendent à ce qu’il soit enjoint à l’employeur de suspendre sous astreinte la fermeture
de magasins et toute mise en œuvre d’un projet de restructuration avant l’achèvement de la
consultation des instances représentatives du personnel relative au projet de restructuration et
au projet de licenciement collectif pour motif économique donnant lieu à l’établissement d’un
plan de sauvegarde de l’emploi, en déduit exactement, sans méconnaître le principe du droit
au recours effectif, que ces demandes ne relèvent pas de la compétence du juge judiciaire

H.Les PSE dans les entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire

Dans les entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire, la décision de validation ou


d’homologation par la DREETS peut intervenir après appréciation des moyens de l’entreprise
et non du groupe.

III. L’ORDRE DES LICENCIEMENTS

Étape obligatoire à tout projet de licenciement - individuel ou collectif –pour motifs


économiques : déterminer le ou les salariés susceptibles d’être licencié(s). Pour ce faire,
l’employeur établit un ordre des licenciements tenant compte de critères légaux ou
conventionnels. Le salarié doit, à sa demande, en être informé.

Les règles relatives à l’ordre des licenciements (essentiellement celles de l’article L1233-5 du
Code du travail) sont destinées à garantir que le choix des salariés effectivement licenciés
pour un motif économique sera contrôlable parce qu’effectué en fonction de critères
préétablis.
En l’absence de convention ou d’accord collectif applicable, l’employeur doit fixer l’ordre
des licenciements et les critères retenus afin de les fixer : article L1233-5 et suivants (charges
de famille, ancienneté, statut du salarié, réinsertion).

Ce qu’il faut retenir :

« l'inobservation des règles relatives à l'ordre des licenciements n'a pas pour effet de priver le
licenciement de cause réelle et sérieuse » (Soc. 20 janvier 1998, nº 96-40930, Bull. nº 20 –
Soc. 26 janvier 1999, nº 97-40463, Bull. nº 39 Dr. soc. 1999. 530)

« l'inobservation des règles relatives à l'ordre des licenciements entraîne un préjudice,


pouvant aller jusqu'à la perte injustifiée de l'emploi, qui doit être intégralement réparé, selon
son étendue » (Soc. 14 janvier 1997, nº 95-44366, Bull. nº 16 GADT, 4e éd., n° 112; Dr. soc.
1997. 159, concl. P. Lyon-Caen, note J. Savatier – Soc. 30 mars 1999, nº 97-40695, Bull. nº
145 – récemment Soc. 12 octobre 2016, nº 15-19719 – Soc. 12 octobre 2016, nº 15-19718 –
Soc. 6 avril 2016, nº 14-29820 – Soc. 2 juillet 2015, nº 14-16213 – Soc. 3 avril 2013, nº 11-
27365 – Soc. 23 novembre 2011, nº 10-30768)

« les critères de l'ordre des licenciements doivent faire l'objet d'une mise en oeuvre distincte
par catégorie professionnelle, c'est-à-dire à l'ensemble des salariés qui au sein de l'entreprise
exercent des fonctions de même nature supposant une formation commune » (Soc. 23
septembre 2015 nº 13-28621 – déjà Soc. 8 novembre 2011 nº 10-15160 nº 10-15161 nº 10-
15159)

L’établissement des critères de l’ordre des licenciements est obligatoire en tenant compte de
ceux fixés par la loi et par la convention collective. Ils s’appliquent à l’ensemble du personnel
de l’entreprise (Cass. soc. 24 mars 1993) et par catégorie professionnelle ou catégorie
d’emploi (Cass. soc. 13 février 1997). Néanmoins, « les règles relatives à l’ordre des
licenciements prononcés pour motif économique ne s’appliquent que si l’employeur doit
opérer un choix parmi les salariés à licencier. ». Tel n’est pas le cas lorsque le licenciement
concerne tous les salariés d’une entreprise appartenant à la même catégorie professionnelle
(Cass. soc. 27 mai 97).

SECTION 2. LA PROCÉDURE DES PETITS LICENCIEMENTS ÉCONOMIQUES


(Un seul salarié licencié)

Tout employeur qui envisage de rompre – après la période d’essai – le contrat de travail à
durée indéterminée d’un seul salarié pour un motif économique doit respecter les règles
concernant :

➢ le reclassement du salarié ;
➢ l’ordre des licenciements ;
➢ la convocation du salarié à un entretien préalable avant toute décision ;
➢ la notification du licenciement ;
➢ l’information de la DREETS  ;
➢ le préavis.

Lorsque le licenciement touche un salarié protégé, l’employeur doit obtenir une autorisation
de l’inspecteur du travail pour pouvoir le licencier.

I. LES OBLIGATIONS DE L’EMPLOYEUR EN MATIÈRE DE


FORMATION ET DE RECLASSEMENT PRÉALABLES

Le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque :

– tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés ;

– et que le reclassement du salarié sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il
occupe ou sur un emploi équivalent assorti d’une rémunération équivalente (la rémunération à
prendre en compte est la rémunération globale) ou, à défaut, et sous réserve de l’accord
exprès du salarié, sur un emploi d’une catégorie inférieure ne peut être réalisé dans le cadre de
l’entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient.
Les offres de reclassement ainsi proposées doivent être écrites et précises.

Une procédure spécifique s’applique lorsque l’entreprise ou le groupe auquel elle appartient
dispose d’implantations hors du territoire national. Cette procédure consiste pour l’employeur,
avant de faire des propositions de reclassement à l’étranger, à s’assurer que le salarié concerné
est d’accord pour recevoir de telles propositions et à quelles conditions. Les étapes suivantes
sont prévues :

L’employeur demande au salarié, préalablement au licenciement pour motifs économiques,


s’il accepte de recevoir des offres de reclassement hors du territoire national, dans chacune
des implantations en cause, et sous quelles restrictions éventuelles quant aux caractéristiques
des emplois offerts, notamment en matière de rémunération et de localisation ;

Le salarié manifeste son accord, assorti le cas échéant des restrictions mentionnées ci-dessus
(niveau de rémunération, localisation de l’emploi proposé, etc.) pour recevoir de telles offres,
dans un délai de 6 jours ouvrables à compter de la réception de la proposition de l’employeur.
Le salarié qui ne répond pas dans ce délai est présumé ne pas vouloir recevoir de propositions
de reclassement hors du territoire national.

II. L’ENTRETIEN PRÉALABLE AU LICENCIEMENT

Avant toute décision de licenciement, l’employeur (ou son représentant) doit convoquer le
salarié à un entretien préalable par lettre recommandée ou remise en main propre contre
décharge qui mentionne :
– l’objet de l’entretien (c’est-à-dire le projet de licenciement) énoncé clairement et
sans équivoque ;

– la date, le lieu et l’heure de l’entretien. Il ne peut se dérouler moins de 5 jours


ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre
de la lettre de convocation. Les jours ouvrables sont les jours de la semaine à
l’exception des dimanches et jours fériés. La lettre de convocation à l’entretien
préalable doit également mentionner la possibilité pour le salarié de se faire assister
lors de l’entretien par une personne de son choix, membre du personnel de
l’entreprise. Lorsqu’il n’y a pas d’institutions représentatives du personnel dans
l’entreprise, le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix
appartenant au personnel de l’entreprise, soit par un conseiller du salarié. La lettre
doit préciser l’adresse des services où la liste des conseillers est tenue à la disposition
des salariés.

Le défaut d’indication dans la lettre de convocation de la possibilité de se faire assister par un


conseiller du salarié est sanctionné par le versement au salarié d’une indemnité au plus égale à
un mois de salaire.

Au cours de l’entretien, l’employeur doit :

– indiquer au salarié le ou les motifs de la décision de licenciement envisagée ;


– recueillir les explications de l’intéressé.

C’est également au cours de cet entretien préalable que l’employeur doit informer le salarié
du contenu et des modalités de mise en œuvre des dispositifs spécifiques de reclassement dont
il peut bénéficier : contrat de sécurisation professionnelle (CSP) si l’entreprise compte moins
de 1 000 salariés ou s’il s’agit d’une entreprise en redressement ou liquidation judiciaire quel
que soit son effectif ; congé de reclassement si l’entreprise (ou l’établissement) compte au
moins 1 000 salariés.

III. LA NOTIFICATION DU LICENCIEMENT

La lettre de licenciement mentionne obligatoirement :

– le motif économique à l’origine du licenciement. Si le motif n’est pas énoncé ou


l’est insuffisamment, le licenciement est considéré comme dénué de cause réelle et
sérieuse. Dans le cadre d’un licenciement pour motifs économiques, faire valoir
simplement que la fermeture de l’établissement est insuffisante.

– la priorité de réembauchage dont le salarié peut bénéficier ;

– la proposition de bénéficier d’un congé de reclassement.


IV. L’INFORMATION DE L’AUTORITÉ ADMINISTRATIVE

L’employeur est tenu d’informer la DREETS. Cette information prend la forme d’une lettre
recommandée avec avis de réception qui précise :

– le nom, l’adresse, l’activité et l’effectif de l’entreprise ;


– les nom, prénom, nationalité, date de naissance, sexe, adresse, emploi et qualification du
salarié licencié ;
– la date de notification du licenciement.

V. LE PRÉAVIS

Le préavis commence le jour de la première présentation de la lettre de notification, que le


salarié en accuse réception ou non. Sa durée est au moins égale à :

– 1 mois pour une ancienneté comprise entre 6 mois et 2 ans ;


– 2 mois pour une ancienneté égale ou supérieure à 2 ans.

Des dispositions plus favorables peuvent figurer dans le contrat de travail ou dans la
convention collective applicable à l’entreprise. En outre, des dispositions spécifiques
s’appliquent lorsque le salarié choisit de bénéficier d’une convention de reclassement
personnalisé ou d’un congé de reclassement.

Pendant le préavis, le contrat de travail se poursuit normalement. Si le salarié est dispensé


d’effectuer tout ou partie du préavis à l’initiative de l’employeur, ce dernier doit :

– confirmer cette décision par écrit ;


– verser alors au salarié une indemnité compensatrice équivalente au salaire (y compris les
augmentations, primes, gratifications…) qu’il aurait perçu pendant le préavis travaillé.

Sauf en cas de congés payés, d’accident du travail en cours de préavis ou de congé de


maternité ou d’adoption, l’absence du salarié ne prolonge pas le préavis.

SECTION 3. LA PROCÉDURE DES LICENCIEMENTS ÉCONOMIQUES DE 2 À 10


SALARIÉS

Le licenciement de 2 à 9 salariés sur une période de 30 jours impose à l’employeur le respect


de règles de procédure particulières : consultation des représentants du personnel, ordre des
licenciements, entretien préalable, information de la DREETS. L’employeur doit aussi,
préalablement au licenciement, chercher à reclasser les salariés dont le licenciement est
envisagé.

En cas de licenciement d’un salarié protégé, l’employeur doit en outre obtenir une
autorisation de l’inspection du travail.

I. Le rôle des représentants du personnel

Dans les entreprises dotées d’un CSE central, l’employeur réunit ce dernier ou les CSE
d’établissements intéressés dès lors que les mesures envisagées excèdent le pouvoir du ou des
chefs d’établissement concernés ou portent sur plusieurs établissements simultanément.

L’employeur convoque les représentants du personnel et leur remet d’abord un document écrit
qui précise :

– la ou les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement ;


– le nombre de licenciements envisagés ;
– les catégories professionnelles concernées et les critères proposés pour
l’ordre des licenciements ;
– le nombre de salariés, permanents ou non, employés dans l’établissement ;
– le calendrier prévisionnel des licenciements ;
– les mesures de nature économique envisagées.

Avec ces renseignements est également transmis aux représentants du personnel un document
précisant les conditions de mise en œuvre du congé de reclassement.

L’employeur réunit ensuite les représentants du personnel. Ces derniers émettent un avis sur
le projet de licenciement collectif et sur les mesures sociales d’accompagnement des
licenciements envisagées. Cet avis est transmis à la DREETS par l’employeur.

Le licenciement intervenu dans une entreprise dépourvue de CSE alors qu’aucun procès-
verbal de carence n’a été établi est irrégulier.

II. LES ÉTAPES DE LA PROCÉDURE DE LICENCIEMENT

Une décision de licenciement pour motifs économiques ne peut intervenir que si le


reclassement des intéressés en interne, dans l’entreprise ou le groupe, s’avère impossible.

III. LA DÉFINITION DE L’ORDRE DES LICENCIEMENTS

Afin de déterminer les salariés susceptibles d’être licenciés, l’employeur doit tenir compte des
critères prévus par la convention collective ou, au moins, par le Code du travail.
IV. LA CONVOCATION A UN ENTRETIEN PRÉALABLE

Le salarié est convoqué par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre
décharge.

Cette lettre précise l’objet de l’entretien et la possibilité, pour le salarié, d’être assisté par une
personne de son choix appartenant à l’entreprise, si l’entreprise est dépourvue de
représentants du personnel (délégués du personnel, membres du comité d’entreprise ou
d’établissement, délégués syndicaux), soit par une personne de son choix appartenant au
personnel de l’entreprise, soit par un conseiller du salarié. Dans ce dernier cas, la lettre
précise également les adresses des services auprès desquels consulter la liste de ces
conseillers.
La liste des conseillers du salarié est disponible auprès de la mairie, de la DREETS ou de
l’inspection du travail.

V. L’ENTRETIEN PRÉALABLE

Il ne peut avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée
ou la remise en main propre de la lettre de convocation.

Au cours de l’entretien, le salarié peut être assisté par une personne de son choix appartenant
à l’entreprise. Lorsqu’il n’y a pas d’institutions représentatives du personnel dans l’entreprise,
le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix appartenant au personnel de
l’entreprise, soit par un conseiller du salarié.

L’employeur explique le motif du licenciement et les critères retenus. Il doit également :

– si l’entreprise est soumise à l’obligation de proposer un congé de reclassement, informer le


salarié des conditions de mise en œuvre de ce congé de reclassement ;

– si l’entreprise est soumise à l’obligation de proposer un contrat de sécurisation


professionnelle (CSP) remettre au salarié, contre récépissé, le document écrit d’information
présentant le CSP.

Doivent figurer dans la lettre de licenciement :

– les motifs économiques ou de changements technologiques invoqués à l’appui du


licenciement. L’énoncé des motifs doit être précis : la simple référence à la conjoncture
économique, à un licenciement collectif pour motifs économiques, à une suppression de poste
ne suffit pas. L’absence d’énonciation du motif économique précis dans la lettre de
licenciement équivaut à une absence de motif, donc à un licenciement sans cause réelle et
sérieuse ;

– la proposition du congé de reclassement si l’entreprise est soumise à l’obligation de


proposer un tel congé aux salariés licenciés pour motifs économiques.

– l’existence d’une priorité de réembauche d’une durée d’un an à compter de la rupture du


contrat si le salarié manifeste son désir d’en user, par écrit, dans un délai d’un an à compter de
la rupture du contrat (c’est-à-dire à la fin du préavis).

VI. LA NOTIFICATION DU LICENCIEMENT

La date de la rupture du contrat est celle de la fin du préavis, qu’il soit ou non effectué.

L’employeur doit informer par écrit la DREETS des licenciements prononcés.

FICHE 11 : LES CONSÉQUENCES ET SUITES DU LICENCIEMENT

I. LE PRÉAVIS

Article L 1234-1 du Code du travail

Lors d’un licenciement, la rupture du contrat n’intervient pas immédiatement après sa


notification. Un délai entre la notification du licenciement et la fin du contrat de travail doit
être respecté, qui constitue le préavis.
Tout salarié licencié (que ce soit pour motif personnel ou économique) est tenu d’exécuter un
préavis, sauf dans l’un des cas suivants :
– dispense du préavis par l’employeur,
– licenciement pour faute grave ou faute lourde,
– licenciement pour inaptitude.

Le salarié non dispensé de préavis continue de travailler dans l’entreprise, dans les conditions
habituelles, et de percevoir sa rémunération (salaire, primes éventuelles...).

Durée du préavis
La durée du préavis varie en fonction de l’ancienneté du salarié, dans les conditions
suivantes :
Ancienneté Durée du préavis
Moins de 6 mois Durée fixée :
I. soit par la convention collective,
II. soit par accord collectif,
III. soit par les usages pratiqués dans l’entreprise
ou la profession
Entre 6 mois et 2 1 mois
ans
À partir de 2 ans 2 mois
Des dispositions conventionnelles, collectives ou contractuelles peuvent prévoir une durée du
préavis plus favorable.

En cas de dispense du préavis


Si l’employeur dispense le salarié de préavis, elle s’impose au salarié, qui ne peut s’y opposer.
La dispense du préavis par l’employeur n’avance pas la date à laquelle le contrat prend fin.
Le salarié peut demander à ne pas exécuter son préavis, mais son employeur n’est pas obligé
d’accepter. S’il accepte, le contrat prend fin à la date convenue par le salarié et l’employeur.
Cependant, l’employeur n’est pas tenu de verser l’indemnité compensatrice de préavis pour la
période de préavis non effectuée.
Si la dispense est due à l’employeur, celui-ci doit verser au salarié une indemnité
compensatrice de préavis.
Dès lors que le salarié est dispensé d’effectuer son préavis, il peut se faire embaucher par une
autre entreprise, même si le contrat n’a pas encore atteint son terme (sauf clause de non-
concurrence).
Si le salarié est dans l’impossibilité d’exécuter son préavis (pour cause de maladie,
d’inaptitude, d’incarcération...), l’employeur n’est pas tenu de verser l’indemnité
compensatrice au salarié, sauf si le motif de cette impossibilité lui est imputable (accident du
travail ou maladie professionnelle par exemple).
Point de départ du préavis = réception LRAR

II. LES INDEMNITÉS DE LICENCIEMENT

Réforme résultant de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à


la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail (art. 2)

Les nouvelles règles évoquées ci-dessous s’appliquent aux licenciements postérieurs à la


publication de l’ordonnance, c’est-à-dire depuis le 24 septembre 2017.

Employeurs de 11 salariés et plus. Lorsque le licenciement survient pour une cause qui n’est
pas réelle et sérieuse, c’est-à-dire sans justification, le juge peut proposer la réintégration du
salarié, avec maintien de ses avantages acquis. En cas de refus de cette réintégration par l’une
ou l’autre des parties, le juge accorde au salarié une indemnité à la charge de l’employeur
comprise entre les montants minimaux et maximaux ci-dessous :
Ancienneté du salarié dans Indemnité minimale Indemnité maximale
l’entreprise (en mois de salaire (en mois de salaire
(en années complètes) brut) brut)

0 Sans objet 1

1 1 2

2 3 3,5
3 3 4

4 3 5

5 3 6

6 3 7

7 3 8

8 3 8

9 3 9

10 3 10

11 3 10,5

12 3 11

13 3 11,5

14 3 12

15 3 13

16 3 13,5

17 3 14

18 3 14,5

19 3 15

20 3 15,5

21 3 16

22 3 16,5

23 3 17
24 3 17,5

25 3 18

26 3 18,5

27 3 19

28 3 19,5

29 3 20

30 et au-delà 3 20

Employeurs de moins de 11 salariés. Lorsque le licenciement est mis en œuvre dans une
entreprise qui occupe habituellement moins de 11 salariés, les montants minimaux sont
inférieurs à ceux qui précèdent :

Ancienneté du salarié dans l’entreprise Indemnité minimale


(en années complètes) (en mois de salaire brut)

0 Sans objet

1 0,5

2 0,5

3 1

4 1

5 1,5

6 1,5

7 2

8 2

9 2,5

10 2,5
Cas particulier des licenciements entachés de nullité. Les barèmes indiqués ci-dessus ne
sont pas applicables si le licenciement est entaché de nullité, par exemple s’il présente un
caractère discriminatoire, s’il fait suite à des faits de harcèlement ou s’il résulte de la
violation d’une liberté fondamentale du salarié. Dans ces hypothèses, quand le salarié ne
réclame pas la poursuite de son contrat de travail ou si la réintégration dans l’entreprise est
impossible, le juge lui octroie une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des 6
derniers mois. Cette somme est due sans préjudice, s’il y a lieu, de l’indemnité de
licenciement légale, conventionnelle ou contractuelle.

Amélioration de l’indemnité légale de licenciement. Le salarié titulaire d’un CDI licencié


alors qu’il compte 8 mois d’ancienneté ininterrompus au service du même employeur (au lieu
auparavant d’une année), a droit, sauf en cas de faute grave ou lourde, à une indemnité de
licenciement. Celle-ci est fixée par le pouvoir réglementaire. Un décret du 25 septembre 2017
revalorise l’indemnité légale de 25 %. Elle ne peut pas être inférieure à un 1/4 de mois de
salaire par année d’ancienneté pour les années jusqu’à 10 ans et à un 1/3 de mois de salaire
par année d’ancienneté pour les années à partir de 10 ans (art. R. 1234-2).

La Cour de cassation a validé le plafonnement des indemnités prud’homales, sans pour


autant faire obstacle aux résistances des juridictions du fond. Ainsi :
- Cass. avis 17 juillet 2019, Société Sanofi Pasteur, n° 19-70.010 : « Les dispositions de
l’article L. 1235-3 du code du travail, dans leur rédaction issue de l’ordonnance
n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, qui prévoient notamment, pour un salarié ayant
une année complète d’ancienneté dans une entreprise employant au moins onze
salariés, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse comprise entre
un montant minimal d’un mois de salaire brut et un montant maximal de deux mois de
salaire brut, n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 6, § 1, de la
Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Les
dispositions de l’article 24 de la Charte sociale européenne révisée ne sont pas d’effet
direct en droit interne dans un litige entre particuliers. Les dispositions précitées de
l’article L. 1235-3 du code du travail sont compatibles avec les stipulations de l’article
10 de la Convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail ».

Chambre sociale, 11 mai 2022, 21-15.247. Société FSM, Fives Stein Manufacturing.

D'une part, aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de
l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, applicable au litige, si le licenciement d'un
salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la
réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou
l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la
charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et
maximaux.

Selon l'article L. 1235-3-1 du code du travail, dans sa version en vigueur du 24 septembre


2017 au 22 décembre 2017, l'article L. 1235-3 n'est pas applicable lorsque le juge constate
que le licenciement est entaché d'une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent
article. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de son
contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à
la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Les
nullités mentionnées à l'alinéa précédent sont celles qui sont afférentes à la violation d'une
liberté fondamentale, à des faits de harcèlement moral ou sexuel dans les conditions
mentionnées aux articles L. 1152-3 et L. 1153-4, à un licenciement discriminatoire dans les
conditions prévues aux articles L. 1134-4 et L. 1132-4 ou consécutif à une action en justice,
en matière d'égalité professionnelle entre hommes et femmes dans les conditions mentionnées
à l'article L. 1144-3 et en cas de dénonciation de crimes et délits, ou à l'exercice d'un mandat
par un salarié protégé mentionné au chapitre Ier du titre Ier du livre IV de la deuxième partie,
ainsi qu'aux protections dont bénéficient certains salariés en application des articles L. 1225-
71 et L. 1226-13.

D'autre part, dans la partie I de la Charte sociale européenne, « les Parties reconnaissent
comme objectif d'une politique qu'elles poursuivront par tous les moyens utiles, sur les plans
national et international, la réalisation de conditions propres à assurer l'exercice effectif des
droits et principes » ensuite énumérés, parmi lesquels figure le droit des travailleurs à une
protection en cas de licenciement. Selon l'article 24 de cette même Charte, « en vue d'assurer
l'exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement, les Parties s'engagent à
reconnaître :
a) le droit des travailleurs à ne pas être licenciés sans motif valable lié à leur aptitude ou
conduite, ou fondé sur les nécessités de fonctionnement de l'entreprise, de l'établissement ou
du service ;
b) le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou à une
autre réparation appropriée. A cette fin les Parties s'engagent à assurer qu'un travailleur qui
estime avoir fait l'objet d'une mesure de licenciement sans motif valable ait un droit de
recours contre cette mesure devant un organe impartial. »

L'annexe de la Charte sociale européenne précise qu'il « est entendu que l'indemnité ou toute
autre réparation appropriée en cas de licenciement sans motif valable doit être déterminée
par la législation ou la réglementation nationales, par des conventions collectives ou de toute
autre manière appropriée aux conditions nationales. »

L'article 24 précité figure dans la partie II de la Charte sociale européenne qui indique que «
les Parties s'engagent à se considérer comme liées, ainsi que prévu à la partie III, par les
obligations résultant des articles et des paragraphes » qu'elle contient. Dans la Partie III de
la Charte, il est indiqué que « chacune des Parties s'engage : a) à considérer la partie I de la
présente Charte comme une déclaration déterminant les objectifs dont elle poursuivra par
tous les moyens utiles la réalisation, conformément aux dispositions du paragraphe
introductif de ladite partie ; b) à se considérer comme liée par six au moins des neuf articles
suivants de la partie II de la Charte : articles 1, 5, 6, 7, 12, 13, 16, 19 et 20 ; c) à se
considérer comme liée par un nombre supplémentaire d'articles ou de paragraphes numérotés
de la partie II de la Charte, qu'elle choisira, pourvu que le nombre total des articles et des
paragraphes numérotés qui la lient ne soit pas inférieur à seize articles ou à soixante-trois
paragraphes numérotés. »

Il résulte de la loi n° 99-174 du 10 mars 1999, autorisant l'approbation de la Charte sociale


européenne, et du décret n° 2000-110 du 4 février 2000 que la France a choisi d'être liée par
l'ensemble des articles de la Charte sociale européenne. L'article I de la partie V de la Charte
sociale européenne, consacrée à la « Mise en oeuvre des engagements souscrits » prévoit que
« les dispositions pertinentes des articles 1 à 31 de la partie II de la présente Charte sont
mises en oeuvre par : a) la législation ou la réglementation ; b) des conventions conclues
entre employeurs ou organisations d'employeurs et organisations de travailleurs ; c) une
combinaison de ces deux méthodes ; d) d'autres moyens appropriés. » Enfin, l'annexe de la
Charte sociale européenne mentionne à la Partie III : « Il est entendu que la Charte contient
des engagements juridiques de caractère international dont l'application est soumise au seul
contrôle visé par la partie IV » qui prévoit un système de rapports périodiques et de
réclamations collectives.

Sous réserve des cas où est en cause un traité international pour lequel la Cour de justice de
l'Union européenne dispose d'une compétence exclusive pour déterminer s'il est d'effet direct,
les stipulations d'un traité international, régulièrement introduit dans l'ordre juridique interne
conformément à l'article 55 de la Constitution, sont d'effet direct dès lors qu'elles créent des
droits dont les particuliers peuvent se prévaloir et que, eu égard à l'intention exprimée des
parties et à l'économie générale du traité invoqué, ainsi qu'à son contenu et à ses termes,
elles n'ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent
l'intervention d'aucun acte complémentaire pour produire des effets à l'égard des particuliers.

Il résulte des dispositions précitées de la Charte sociale européenne que les Etats
contractants ont entendu reconnaître des principes et des objectifs, poursuivis par tous les
moyens utiles, dont la mise en œuvre nécessite qu'ils prennent des actes complémentaires
d'application selon les modalités rappelées aux paragraphes 13 et 17 du présent arrêt et dont
ils ont réservé le contrôle au seul système spécifique rappelé au paragraphe 18 (Assemblée
plénière, avis de la Cour de cassation, 17 juillet 2019, n° 19-70.010 et n° 19-70.011 ; 1re Civ.,
21 novembre 2019, pourvoi n° 19-15.890, publié).

C'est dès lors à bon droit que la cour d'appel a retenu que, les dispositions de la Charte
sociale européenne n'étant pas d'effet direct en droit interne dans un litige entre
particuliers, l'invocation de son article 24 ne pouvait pas conduire à écarter l'application
des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail et qu'il convenait d'allouer en
conséquence à la salariée une indemnité fixée à une somme comprise entre les montants
minimaux et maximaux déterminés par ce texte.

Chambre sociale, 11 mai 2022, 21-14.490, Société Pleyel centre de santé mutualiste.

Aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la loi
doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. En application de
l'article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause
qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de
l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux fixés par
ce texte. Pour déterminer le montant de l'indemnité, le juge peut tenir compte, le cas échéant,
des indemnités de licenciement versées à l'occasion de la rupture, à l'exception de l'indemnité
de licenciement mentionnée à l'article L. 1234-9.

Cette indemnité est cumulable, le cas échéant, avec les indemnités prévues aux articles L.
1235-12, L. 1235-13 et L. 1235-15, dans la limite des montants maximaux prévus au même
article. Aux termes de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'Organisation internationale
du travail (l'OIT), si les organismes mentionnés à l'article 8 de la présente convention
arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, et si, compte tenu de la législation
et de la pratique nationales, ils n'ont pas le pouvoir ou n'estiment pas possible dans les
circonstances d'annuler le licenciement et/ou d'ordonner ou de proposer la réintégration du
travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d'une indemnité adéquate ou
toute autre forme de réparation considérée comme appropriée.

Les stipulations de cet article 10 qui créent des droits dont les particuliers peuvent se
prévaloir à l'encontre d'autres particuliers et qui, eu égard à l'intention exprimée des parties
et à l'économie générale de la convention, ainsi qu'à son contenu et à ses termes, n'ont pas
pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l'intervention d'aucun
acte complémentaire, sont d'effet direct en droit interne (voir également : Assemblée plénière,
avis de la Cour de cassation, 17 juillet 2019, n° 19-70.010 et n° 19-70.011).

En effet, la Convention n° 158 de l'OIT précise dans son article 1er : « Pour autant que
l'application de la présente convention n'est pas assurée par voie de conventions collectives,
de sentences arbitrales ou de décisions judiciaires, ou de toute autre manière conforme à la
pratique nationale, elle devra l'être par voie de législation nationale. »

Selon la décision du Conseil d'administration de l'Organisation internationale du travail,


ayant adopté en 1997 le rapport du Comité désigné pour examiner une réclamation présentée
en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT par plusieurs organisations syndicales
alléguant l'inexécution par le Venezuela de la Convention n° 158, le terme « adéquat » visé à
l'article 10 de la Convention signifie que l'indemnité pour licenciement injustifié doit, d'une
part être suffisamment dissuasive pour éviter le licenciement injustifié, et d'autre part
raisonnablement permettre l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi.

A cet égard, il convient de relever qu'aux termes de l'article L. 1235-3-1 du code du travail,
l'article L. 1235-3 de ce code n'est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement
est entaché d'une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article. Dans ce cas,
lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que
sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur,
qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Les nullités mentionnées au
premier alinéa sont celles qui sont afférentes à :
1° La violation d'une liberté fondamentale ;
2° Des faits de harcèlement moral ou sexuel dans les conditions mentionnées aux articles L.
1152-3 et L. 1153-4 ;
3° Un licenciement discriminatoire dans les conditions mentionnées aux articles L. 1132-4 et
L. 1134-4 ;
4° Un licenciement consécutif à une action en justice en matière d'égalité professionnelle
entre les femmes et les hommes dans les conditions mentionnées à l'article L. 1144-3, ou à
une dénonciation de crimes et délits ;
5° Un licenciement d'un salarié protégé mentionné aux articles L. 2411-1 et L. 2412-1 en
raison de l'exercice de son mandat ;
6° Un licenciement d'un salarié en méconnaissance des protections mentionnées aux articles
L. 1225-71 et L. 1226-13.

Selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, la qualification de liberté


fondamentale est reconnue à la liberté syndicale, en vertu de l'alinéa 6 du Préambule de la
Constitution du 27 octobre 1946 (Soc., 2 juin 2010, pourvoi n° 08-43.277 ; Soc., 9 juillet
2014, pourvois n° 13-16.434, 13-16.805, Bull. 2014, V, n° 186), au droit de grève protégé par
l'alinéa 7 du même Préambule (Soc., 25 novembre 2015, pourvoi n° 14-20.527, Bull. 2015, V,
n° 236), au droit à la protection de la santé visé par l'alinéa 11 du même Préambule (Soc., 11
juillet 2012, pourvoi n° 10-15.905, Bull. 2012, V, n° 218 ; Soc., 29 mai 2013, pourvoi n° 11-
28.734, Bull. 2013, V, n° 136), au principe d'égalité des droits entre l'homme et la femme
institué à l'alinéa 3 du même Préambule (Soc., 29 janvier 2020, pourvoi n° 18-21.862,
publié), au droit à un recours juridictionnel en vertu de l'article 16 de la Déclaration de 1789
(Soc., 21 novembre 2018, pourvoi n° 17-11.122, publié), à la liberté d'expression, protégée
par l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales (Soc., 30 juin 2016, pourvoi n° 15-10.557, Bull. 2016, V, n° 140 ; Soc., 19
janvier 2022, pourvoi n° 20-10.057, publié).

En application de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut faire l'objet
d'une discrimination en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de son orientation
sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de
ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation
économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-
appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses
opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat
électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de
son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa
perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que
le français.

Les protections mentionnées aux articles L. 1225-71 et L. 1226-13 du code du travail


concernent la protection de la grossesse et de la maternité, la prise d'un congé d'adoption,
d'un congé de paternité, d'un congé parental, d'un congé pour maladie d'un enfant et la
protection des victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles. Par ailleurs,
selon l'article L. 1235-4 du code du travail, dans le cas prévu à l'article L. 1235-3 du même
code, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de
tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son
licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de
chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes
intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des
indemnités versées.

Il en résulte, d'une part, que les dispositions des articles L. 1235-3 et L. 1235-3-1 du code
du travail, qui octroient au salarié, en cas de licenciement injustifié, une indemnité à la
charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et
maximaux variant en fonction du montant du salaire mensuel et de l'ancienneté du salarié
et qui prévoient que, dans les cas de licenciements nuls dans les situations ci-dessus
énumérées, le barème ainsi institué n'est pas applicable, permettent raisonnablement
l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi.

Il en résulte, d'autre part, que le caractère dissuasif des sommes mises à la charge de
l'employeur est également assuré par l'application, d'office par le juge, des dispositions
précitées de l'article L. 1235-4 du code du travail. Les dispositions des articles L. 1235-3, L.
1235-3-1 et L. 1235-4 du code du travail sont ainsi de nature à permettre le versement d'une
indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l'article 10
de la Convention n° 158 de l'OIT. Il en résulte que les dispositions de l'article L. 1235-3 du
code du travail sont compatibles avec les stipulations de l'article 10 de la Convention
précitée.
Pour condamner l'employeur au paiement d'une somme supérieure au montant maximal
prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail, l'arrêt constate, d'une part, que ce texte
prévoit, pour une ancienneté inférieure à 4 ans, une indemnité de licenciement injustifié
comprise entre 13 211 et 17 615 euros, et, d'autre part, que la salariée justifie, en raison de sa
qualité de demandeur d'emploi jusqu'en août 2019 et déduction faite des revenus perçus de
Pôle emploi, d'une perte supérieure à 32 000 euros.

L'arrêt retient que ce montant représente à peine la moitié du préjudice subi en termes de
diminution des ressources financières de la salariée et ne permet donc pas, compte tenu de la
situation concrète et particulière de la salariée, âgée de 53 ans à la date de la rupture, une
indemnisation adéquate et appropriée du préjudice subi, compatible avec les exigences de
l'article 10 de la Convention n° 158 de l'OIT.

FICHE 12 : LA PRISE D’ACTE (de la rupture du contrat de travail)

I. DÉFINITION ET CONDITIONS DE LA PRISE D’ACTE

La prise d’acte désigne tout acte par lequel le salarié notifie à l’employeur qu’il met fin au
contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, quelle que soit la
dénomination utilisée dans cet acte.

Confronté à une violation par l’employeur de ses obligations, le salarié peut prendre acte de la
rupture de son contrat de travail (Cass. soc. 25 juin 2003).

A. Les conditions classiques

Le juge devra vérifier 2 conditions classiques :

– Que le grief invoqué par le salarié existe à la date de la rupture, qu’il soit réel. À
éviter donc la prise d’acte prématurée, par exemple à l’occasion d’un simple projet de
réduction des salaires : tant que la fiche de paie n’a pas été effectivement amputée
(Cass. soc. 16 mai 2012) ;

– Mais aussi « suffisamment grave » pour justifier la rupture prise d’acte.


Il y a des comportements patronaux autorisant automatiquement la prise d’acte. C’est
notamment le cas :
– des atteintes à la dignité : Cass. soc 7 février 2012.

– de tout ce qui atteint le contrat : une modification imposée du contrat de travail,


une mise au placard « l’employeur ayant l’obligation de fournir le travail convenu ».
– Hypothèse ou l’employeur a obligé son salarié de travailler à son
domicile : Cass. soc. 31 janvier 2012.

– En matière de prévention : « Tenu d’une obligation de sécurité de résultat en


matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, l’employeur
manque à cette obligation lorsqu’un salarié est victime sur le lieu de travail
d’agissement de harcèlement moral ou sexuel exercé par l’un ou l’autre de ses
salariés, quand bien même il aurait pris des mesures en vue de faire cesser ces
agissements » : Cass. soc. 3 février 2010.

– Solution identique pour les violences physiques et morales : Cass. soc. 15


décembre 2010

B. Les précisions apportées par la Cour de cassation sur la notion de « 


manquement suffisamment grave »

Par trois arrêts récents du 26 mars 2014, la Cour de cassation est venue apporter des
précisions sur la « gravité suffisante » des manquements justifiant la prise d’acte du salarié.
Elle a jugé que le manquement suffisamment grave est celui qui rend impossible la
poursuite du contrat de travail.
Reste à savoir ce qu’il faut entendre par manquement « rendant impossible la poursuite du
contrat de travail du salarié ».
À ce sujet, la Cour de cassation a dégagé un faisceau d’indices permettant de juger si oui ou
non, le manquement invoqué par le salarié a pu rendre impossible la poursuite du contrat de
travail de ce dernier :

er
➢ 1 indice : l’écoulement du temps

L’écoulement du temps entre le moment ou l’employeur commet un manquement et celui où
le salarié prend acte de la rupture, peut constituer un indice laissant penser que la poursuite du
contrat de travail était bien possible. À défaut, le salarié aurait pris acte de la rupture
beaucoup plus rapidement.
Toutefois, selon Pierre BAILLY, doyen de la Chambre sociale de la Cour de cassation,
l’écoulement du temps ne permet pas automatiquement de juger la prise d’acte comme
infondée.

Selon lui, « il serait erroné de considérer également qu’une modification ne peut justifier
une résiliation si elle s’est poursuivie pendant longtemps. La faute de l’employeur ne
disparaît pas si le contrat s’exécute avec cette modification ».
➢ 2e indice : la répétition du manquement par l’employeur

Il ressort des arrêts du 26 mars 2014 qu’un manquement isolé de l’employeur ne justifierait
pas la prise d’acte du salarié.

Il faut donc comprendre, a contrario, qu’un manquement récurrent de l’employeur


pourrait justifier la prise d’acte du salarié.

e
➢ 3 indice : l’influence défavorable sur le montant de la rémunération perçue par le

salarié ; critère retenu par l’arrêt du 12 juin 2014.

Par deux arrêts du 12 juin 2014, la Cour de cassation retient comme critère d’appréciation du
manquement grave de l’employeur, « l’effet défavorable sur le montant de la
rémunération perçue par le salarié ».
Dans ces deux affaires, l’employeur avait porté atteinte à la rémunération du salarié.
Parce que cette modification n’avait pas eu d’effet défavorable sur le montant global de la
rémunération perçue par le salarié, alors la Cour de cassation jugeait la rupture à
l’initiative du salarié comme non fondée.

II. DISTINCTION PRISE D’ACTE ET DÉMISSION

Pour distinguer la démission de la prise d’acte, la Cour de cassation cherche l’origine de la


rupture. Pour se faire, elle se réfère aux termes de la lettre rédigée par le salarié : lorsque la
lettre ne comporte aucune réserve et que le salarié ne justifie pas qu’un différend antérieur ou
contemporain de la démission l’a opposé à l’employeur, rien ne permet de remettre en cause
la manifestation de sa volonté claire et non équivoque de démissionner : Cass. soc. 19
décembre 2007 ; Cass. soc. 9 mai 2007.

Pour deux illustrations de démissions non équivoques :

« une cour d’appel peut décider qu’une salariée avait manifesté de façon claire, sérieuse, non
équivoque, et réitérée sur plusieurs jours, sa volonté unilatérale de mettre fin à son contrat de
travail, de sorte que la rupture de celui-ci résultait de sa démission, après avoir relevé que
l'intéressée avait annoncé à des collaborateurs son intention de démissionner le vendredi 21
octobre ; que si lors d'échanges de courriels le dimanche suivant, elle avait évoqué auprès de
son employeur une séparation à l'amiable, elle avait confirmé plus tard dans la soirée sa
volonté de démissionner et avait, le lendemain, annoncé sa démission à ses collaborateurs ;
que les termes du courriel du 25 octobre confirmaient la volonté unilatérale de l'intéressée de
quitter l'entreprise, son message du 28 octobre constituant une rétractation tardive et sans effet
sur la démission » (Cass. soc. 9-11-2017 n° 16-17.962 F-D).

« Une cour d’appel peut retenir que le caractère équivoque de la démission n’est pas établi et
rejeter la demande de requalification de celle-ci en prise d'acte de la rupture aux torts de
l’employeur après avoir relevé : d’une part, que la salariée avait souhaité être réintégrée dans
l’entreprise après une première démission en 2012, ce qu’avait accepté l’employeur, puis que
les messages électroniques de l'intéressée début 2013 traduisaient une volonté claire et
réfléchie de démissionner, que les échanges de messages entre elle et l’employeur évoquaient
une possible embauche par un autre employeur, démontrant une volonté de se consacrer à un
autre emploi ; d’autre part, qu’aucun élément ne permettait de considérer que la salariée
s’était rétractée, qu’elle avait laissé l’employeur sans nouvelle à la suite d’un arrêt de travail,
nonobstant une lettre de l’employeur lui demandant, 5 jours après l'expiration de cet arrêt, de
justifier son absence » (Cass. soc. 9-11-2017 n° 16-18.580 F-D).

La solution est identique en matière de départ à la retraite : ce départ peut être requalifié en
prise d’acte : Cass. soc. 15 mai 2013.
La prise d’acte consomme la rupture du contrat de travail (Cass. soc. 19 décembre 2007) donc
il ne faut pas tenir compte d’une éventuelle lettre de licenciement envoyée postérieurement
par l’employeur.

III. LA REQUALIFICATION DE LA DÉMISSION : LE CHOIX ENTRE PRISE


D’ACTE ET VICE DU CONSENTEMENT

La démission peut également être équivoque et dans ce cas une option s’ouvre au salarié

- il peut soutenir devant le juge que sa démission est entachée d’un vice du
consentement qu’il devra prouver et s’il parvient à le faire la démission sera annulée
par le juge

- sans apporter la preuve d’un vice du consentement, le salarié peut soutenir que sa
démission est équivoque – en ce qu’elle ne procède pas d’une volonté claire sérieuse
du salarié de rompre le contrat de travail – parce qu’en réalité la décision est prise par
le salarié en raison des manquements qu’ils reprochent à l'employeur et, dans ce cas,
la démission est requalifiée en prise d’acte.

L’arrêt de principe qui illustre cette alternative offerte au salarié : « la démission est un acte
unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre
fin au contrat de travail ; lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à
entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou
manquements imputables à son employeur et lorsqu'il résulte de circonstances antérieures ou
contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était
équivoque, le juge doit l'analyser en une prise d'acte qui produit les effets d'un licenciement
sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une
démission » (Soc. 9 mai 2007 n° 05-40.518 Bull. GADT, 4e éd., n° 88).

Pour une illustration récente de requalification d’une démission en prise d’acte : « Une cour
d'appel ne saurait décider que la démission d'un salarié procède d'une volonté libre, consciente
expresse, claire et non équivoque alors qu'elle relève, d’une part que l'acte de démission avait
été rédigé par l'intéressé en même temps qu'un écrit de reconnaissance des faits qui lui étaient
reprochés, en présence du directeur, dans un contexte de grande fatigue, et cela après que le
directeur avait indiqué qu'il allait appeler les gendarmes et porter plainte, d’autre part que la
démission avait été rétractée quelques jours après » (Cass. soc. 23-1-2019 n° 17-26.794 F-D).

IV. LES EFFETS DE LA PRISE D’ACTE : licenciement sans cause réelle et sérieuse
OU démission

Lorsque le juge considère que la prise d’acte est bien fondée, c’est-à-dire lorsqu’il estime
que les griefs invoqués par le salarié sont suffisamment graves, la rupture a les effets d’un
licenciement sans cause réelle et sérieuse : Cass. soc. 25 juin 2003.

Dans certains cas, la prise d’acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail, si elle
est justifiée, produit les effets d’un licenciement nul. Illustration à l’occasion d’une récente
affaire, dans laquelle un salarié avait pris acte de la rupture en raison de faits de harcèlement
moral.

Cass. soc., 20 sept. 2018, n° 16-26.152

Dans cette affaire, la Cour de cassation a retenu que la prise d’acte de la rupture du contrat de
travail par le salarié peut produire les effets d’un licenciement nul.
En l’espèce, un salarié avait pris acte de la rupture de son contrat de travail, s’estimant
victime de faits de harcèlement moral de la part de son employeur (retrait des fonctions qui
lui avaient été attribuées et de son rôle de responsable qualité, mise à l’écart systématique,
attribution de tâches et de fonction ne correspondant pas à son rang hiérarchique, suppression
de son poste de travail et de son bureau, blocage inexpliqué de sa demande de congé parental,
dégradation de son état de santé). Il avait saisi le Conseil des prud’hommes d’une demande de
requalification de la prise d’acte en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Au vu des éléments fournis par les parties, la cour d’appel avait considéré que le salarié avait
rapporté des faits précis permettant de présumer l’existence d’un harcèlement moral, tandis
que l’employeur n’avait pas démontré de son côté que ses agissements n’étaient pas
constitutifs d’un tel harcèlement, ni que sa décision était justifiée par des éléments objectifs
étrangers à tout harcèlement. Les juges en avaient déduit que l’altération de l’état de santé du
salarié était bien en lien avec le comportement de son employeur, les agissements répétés de
ce dernier ayant eu pour effet une dégradation de ses conditions de travail. Ils avaient
alors prononcé par conséquent la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur et fait
produire à la prise d’acte les effets d’un licenciement nul.
Si, lorsqu’elle est justifiée, la prise d’acte produit en général les effets d’un licenciement sans
cause réelle et sérieuse, certaines circonstances peuvent lui faire produire les effets d’un
licenciement nul. Tel est le cas lorsqu’elle est justifiée par des faits de harcèlement, mais
également lorsqu’elle est effectuée par un salarié protégé, un salarié victime d’un accident du
travail ou d’une maladie professionnelle pendant la période de suspension de son contrat, ou
encore par une salariée enceinte.

En revanche, lorsque le juge considère que la prise d’acte n’est pas fondée, c’est-à-dire
lorsqu’il considère que les faits invoqués par le salarié ne sont pas suffisamment graves, alors
la prise d’acte produit les effets d’une démission.
Remarque 1 : seuls les faits invoqués par le salarié à l’appui de sa prise d’acte permettent de
requalifier la rupture du contrat. En revanche la lettre par laquelle le salarié prend acte de la
rupture ne fixe pas les limites du litige : Cass. soc. 29 juin 2005.

Remarque 2 : La prise d’acte à l’initiative de l’employeur n’est pas admise. L’employeur


qui prend l’initiative de rompre le contrat de travail ou qui le considère rompu du fait du
salarié doit mettre en œuvre la procédure de licenciement. À défaut, la rupture s’analyse en un
licenciement sans cause réelle et sérieuse sans que le juge n’ait à rechercher si les faits
reprochés au salarié étaient ou non fondés : Cass. soc. 25 juin 2003 ; Cette solution est
constante depuis l’arrêt La clé des Champs du 13 novembre 2002 dans lequel la Cour de
cassation a affirmé qu’un employeur prenant acte de la soi-disant démission d’un salarié ne se
présentant plus à son travail prononce en droit une rupture d’origine patronale, bref un
licenciement irréfragablement sans cause réelle et sérieuse faute de lettre motivée pour un
CDI ou une rupture avant terme automatiquement fautive pour un CDD, hors faute grave du
salarié.

V. LA PREUVE EN MATIÈRE DE PRISE D’ACTE : qui doit prouver quoi ?

Les manquements invoqués par le salarié doivent être prouvés par celui-ci : Cass. soc. 19
décembre 2007.

On applique donc le droit commun (C. civ., art. 1353) : c’est celui qui allègue un fait qui doit
en rapporter la preuve. Toutefois il existe certains domaines pour lesquels le régime
probatoire est très favorable au salarié : discrimination ou égalité de traitement et obligation
de sécurité qui est une obligation de résultat pour l’employeur :

Cass. soc 12 janvier 2011 : « Il appartient à l’employeur qui considère injustifiée la prise
d’acte de la rupture d’un salarié qui, étant victime d’un accident du travail, invoque une
inobservation des règles de prévention et de sécurité, de démontrer que la survenance de cet
acte est étrangère a tout manquement à son obligation de sécurité de résultat. »
Obligation de sécurité de résultat = l’employeur a forcément fauté puisqu’un accident est
survenu : cette faute permet à n’importe quel accidenté ou salarié en maladie professionnelle
de prendre acte de la rupture.

VI. LA FORME DE LA PRISE D’ACTE

« La prise d’acte de la rupture n’est soumise à aucun formalisme » : Cass. soc. 3 mai 2012

La lettre de prise d’acte ne fixe pas les limites du litige.

VII. LA PRISE D’ACTE DES REPRÉSENTANTS DU PERSONNEL

Comme n’importe quel salarié, un représentant du personnel peut prendre acte de la rupture
de son contrat de travail non seulement au titre des manquements de l’employeur concernant
l’exécution du contrat de travail (ex. : non-paiement du salaire, harcèlement), mais aussi au
titre de son mandat par exemple la non-convocation à des réunions de comité d’entreprise ou
encore le non-versement d’heures de délégation : Cass. soc, 12 avril 2012).

Dans cette hypothèse, cette rupture produit, d’après la Cour de cassation, « un licenciement
nul pour violation du statut protecteur » dont les indemnités seront égales au salaire que le
salarié aurait dû percevoir jusqu’à la fin de la période de protection en cours : Cass. soc. 16
février 2011.

VIII. PRISE D’ACTE ET RESPECT DU PRÉAVIS ?

La mécanique de la prise d’acte en ce qu’elle consomme immédiatement la rupture n’impose


pas au salarié d’exécuter son préavis. En revanche, lorsque la prise d’acte produit les effets
d’une démission, le salarié qui n’a pas accompli son préavis sera tenu de verser à l’employeur
une indemnité pour non-respect du préavis : Cass. soc. 2 juill. 2009, n° 07-42.299.

FICHE 13 : LA RÉSILIATION
JUDICIAIRE DU CONTRAT DE TRAVAIL

La résiliation judiciaire est un mode de rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié.


Elle se distingue de la prise d’acte tant au regard de la procédure qu’au regard des
conséquences.

I. CONDITIONS
Les conditions sont identiques à celles de la prise d’acte :

– Conditions classiques : manquement suffisamment grave de l’employeur.


– Précisions récentes : le manquement grave est celui qui rend impossible la
poursuite du contrat de travail du salarié.

Les indices pour apprécier la gravité du manquement dégagé par la Cour de cassation en mars
et juin 2014 s’appliquent également à la résiliation judiciaire (écoulement du temps,
manquement isolé, etc.).

Cette faculté ouverte au salarié bénéficie aussi au salarié protégé : Cass. soc. 16 mars 2005.
En tant que telle, cette demande est sans incident sur l’existence et le cours du contrat de
travail qui continue à s’exécuter jusqu’à la décision du juge.

II. DISTINCTION RÉSILIATION JUDICIAIRE ET PRISE D’ACTE

➢ Des effets différents de ceux de la prise d’acte



Si le juge considère que la demande est fondée (les manquements de l’employeur sont jugés
d’une gravité suffisante), alors la résiliation judiciaire, tout comme la prise d’acte, produira
les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse : Cass. soc. 17 mars 1998.

Si le juge considère que la demande de résiliation judiciaire n’est pas fondée, alors,
contrairement à la prise d’acte, le contrat de travail se poursuivra.

Remarque 1 : quel choix entre la prise d’acte et la résiliation judiciaire : En cas d’attitude
fautive de l’employeur, il est moins risqué pour le salarié d’opter pour une résiliation
judiciaire puisque, au pire des cas il conservera son emploi. Dans la résiliation judiciaire, le
salarié à la certitude de l’indemnisation ou du maintien dans l’emploi. La prise d’acte quant à
elle apparaît comme plus risquée puisque, si le juge la considère comme non fondée, elle
produira les effets d’un licenciement et donc d’une perte d’emploi.

Remarque 2 : hors les cas où la loi le permet (exemple : CDI en cas d’inaptitude du salarié),
l’employeur n’est plus recevable à demander la résiliation judiciaire du contrat (Cass. soc. 29
juin 2005), fût-ce reconventionnellement (Cass. soc. 3 novembre 2005).

➢ Une procédure qui se distingue de celle applicable en matière de prise d’acte


Prise d’acte et résiliation judiciaire se distinguent également du point de vue procédural.

La prise d’acte met immédiatement fin au contrat de travail en cours.

Dans les faits, cela se traduit par le départ du salarié de l’entreprise (après que ce dernier a
informé son employeur de sa décision de quitter l’entreprise en raison de griefs qu’il lui
impute). Ce n’est que postérieurement à son départ, qu’il saisira alors le conseil des
prud’hommes afin que sa prise d’acte produise les effets d’un licenciement sans cause réelle
et sérieuse.

En matière de résiliation judiciaire, la marche à suivre est tout à fait différente, et pour cause :
le salarié, tout en restant dans l’entreprise, va saisir simultanément le conseil des
prud’hommes d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail. Le dépôt de la
requête pour résiliation judiciaire ne met donc pas fin au contrat de travail qui perdure jusqu’à
ce que le conseil se prononce. Ce n’est que postérieurement et uniquement dans le cas où ce
dernier trancherait en faveur du salarié que le contrat de travail serait alors rompu.
Comme il a été vu précédemment, cette rupture produirait alors les effets d’un licenciement
sans cause réelle et sérieuse.

III. QUID DE LA RÉGULARISATION DE LA SITUATION DU SALARIÉ


AVANT QUE LE JUGE NE SE PRONONCE ?

Le bien-fondé de la résiliation judiciaire du contrat de travail s’apprécie au jour où le


Juge se prononce : Cass. soc. 29 janvier 2014 n°12-24951.
Par l’arrêt du 29 janvier 2014, la Cour de cassation apporte des précisions sur la date à
laquelle le bien-fondé de la résiliation judiciaire doit être apprécié.

En l’espèce, un salarié, après avoir été privé de ses attributions et de ses outils de travail, a
saisi le conseil des prud’hommes d’une résiliation judiciaire de son contrat de travail.
Or, une fois la procédure enclenchée, l’employeur a régularisé sa situation, lui attribuant de
nouveau ses responsabilités et outils de travail dont il disposait auparavant.

La Cour de cassation devait dès lors s’interroger sur la question suivante :

La régularisation de la situation du salarié par l’employeur, postérieurement à la saisine


du conseil des prud’hommes, mais avant que le conseil ne se prononce, peut-elle avoir
une influence sur le bien-fondé de la résiliation judiciaire ?

De manière tout à fait surprenante, la Cour de cassation répond positivement à cette question
et juge « qu’en matière de résiliation judiciaire du contrat de travail, sa prise d’effet ne peut
être fixée qu’à la date de la décision judiciaire la prononçant dès lors que le contrat n’a pas été
rompu avant cette date ; qu’il appartient aux juges du fond d’apprécier les manquements
imputés à l’employeur au jour de leur décision. »

Il faut donc retenir qu’en matière de résiliation judiciaire, le bien-fondé de la rupture du


contrat de travail s’apprécie au jour où le juge se prononce.

De toute évidence, cette solution diffère de celle rendue en matière de prise d’acte dont
l’appréciation se limite aux faits connus lors de la rupture : Cass. Soc. 9 octobre 2013,
pourvoi n°11-24.457, (pièce 18).

A priori, tout fait intervenu postérieurement à celle-ci ne peut être pris en compte pour
apprécier le bien-fondé de la rupture du contrat de travail.
La différence de traitement entre prise d’acte et résiliation judiciaire s’explique sans doute par
des enjeux non comparables. Alors que la prise d’acte non fondée produit les effets d’une
démission, la résiliation judiciaire n’a aucune incidence sur l’exécution du contrat de travail
qui, en cas d’échec, continue à être exécuté. Par ailleurs, dans la prise d’acte, le salarié quitte
l’entreprise sans attendre la décision rendue par le conseil des prud’hommes et prend donc le
risque de se retrouver, du jour au lendemain, sans emploi.

IV. RÉSILIATION JUDICIAIRE SUIVIE D’UNE PRISE D’ACTE

Quelle est la conséquence d’une prise d’acte intervenue après la saisine d’un Juge pour
résiliation judiciaire du contrat de travail ?
Le juge doit-il statuer d’abord sur la demande de résiliation, et seulement ensuite, en cas de
rejet, sur la prise d’acte ?
La prise d’acte de la rupture par le salarié rompant immédiatement le contrat de travail (Cass.
soc. 19 janvier 2005), il est apparu à la Chambre sociale que cette initiative du salarié rendait
sans objet sa demande initiale en résiliation, de sorte que le juge doit seulement se prononcer
sur le bien-fondé de cette prise d’acte, mais - et ce point est important - en prenant en
considération aussi bien les faits invoqués à l’appui de la demande initiale en résiliation que
ceux qui seraient invoqués au soutien de la prise d’acte. Cass. soc. 31 octobre 2006 (3 arrêts
du même jour ont été rendus en ce sens par la Cour de cassation).

Actualité :
Si une salariée saisit le juge prud’homal d’une demande de résiliation judiciaire et qu’au jour
de la saisine elle n’a pas informé son employeur qu’elle était enceinte, la résiliation judiciaire
de son contrat de travail ultérieurement prononcée aux torts de l’employeur produira les effets
d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais en aucun cas celui d’un licenciement nul.
Cass. soc., 28 nov. 2018, n° 15-29.330 P+B

FICHE 14 : LA DÉMISSION

La démission est un acte unilatéral du salarié qui met fin au contrat de travail (article L1237-1
Code du travail). À la différence de la prise d’acte et de la résiliation judiciaire, aucun grief
n’est invoqué par le salarié qui décide simplement de quitter l’entreprise pour des raisons qui
lui sont propres.

I. CONDITIONS
A. Une volonté claire, sérieuse et non équivoque de démissionner

Aucun formalisme n’encadre l’acte de rupture : elle peut être tacite, verbale et n’a pas à être
motivée (sauf dérogations prévues par accords collectifs, usages, contrat de travail).
En revanche la démission suppose une volonté libre, claire, sérieuse et non équivoque de
démissionner. Il faut donc en principe une initiative du salarié : la démission ne se présume
pas.

Exemples jurisprudentiels :

Un départ précipité suite à un incident ne montre pas que le salarié voulait réellement
démissionner.

Quid des absences prolongées ? D’après la Cour de cassation, l’absence injustifiée du salarié,
même de longue durée ne peut caractériser une volonté non équivoque de démissionner. Si la
Cour de cassation n’exclut nullement que des sanctions pouvant aller jusqu’au licenciement
pour faute grave soient prises, elle n’accepte plus que ces absences soient constitutives d’une
démission afin de préserver les droits aux allocations chômage du salarié qui fait vivre une
famille.

re
1 remarque : la volonté du salarié ne vaudra pas démission lorsqu’elle n’a pas été émise
librement. La jurisprudence qualifie la démission de licenciement chaque fois que le salarié a
été contraint par le comportement fautif de l’employeur.

2e remarque : s’agissant des CDD, il ne peut être question ni de démission ni de prise d’acte
comme l’a confirmé la Chambre sociale le 30 mai 2007. Rappelons la règle : en matière de
CDD, la rupture n’est licite qu’en cas de faute grave, de force majeure ou de résiliation
conventionnelle.

3e remarque (attention ! sujet potentiel de cas pratique, déjà tombé à Bordeaux) : En matière
de CDI, la démission expressément motivée par des manquements patronaux constitue en
droit une véritable prise d’acte : « La démission d’un salarié en raison de faits qu’il
reproche à son employeur s’analyse en une prise d’acte qui produit les effets soit d’un
licenciement si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire d’une
démission » : Cass. soc. 13 décembre 2006.

4e remarque : quid du salarié qui démissionne sans invoquer aucun grief et qui plus tard
saisit le juge pour griefs imputables à l’employeur ? Cette démission peut-elle être requalifiée
en prise d’acte ?

4 arrêts ont été rendus le 9 mai 2007 par la Chambre sociale de la Cour de cassation : le
juge doit raisonner en 2 temps :

– Au moment où la démission a été donnée, existaient-ils des « circonstances


antérieures ou contemporaines à la rupture » la rendant équivoque ?

Ex. : contestation visant le temps de travail, les congés payés et le repos


compensateur, situation signalée à l’inspection du travail, etc.

– Si oui, les faits invoqués n’ont-ils pas été invoqués trop tardivement (ex. :
assignation déposée 17 mois après : trop tardif selon la CC) et « justifiaient »-ils la
rupture ?
Ex. : simple erreur sur le taux de majoration des heures supplémentaires = insuffisant : Cass.
soc. 30 mai 2007.

Si ces conditions sont remplies, la démission produira les effets d’un licenciement sans cause
réelle et sérieuse.

B. Le respect du préavis de démission par le salarié

Le salarié ne peut pas mettre fin immédiatement à son contrat de travail. Il doit respecter un
préavis. Cette obligation s’impose aux parties sans mise en demeure préalable. La maladie ou
l’accident professionnel n’en suspend pas l’exécution. En revanche, lorsque le salarié a
démissionné pendant ses congés, il ne court qu’à partir de la date du retour.
Sa durée n’est pas fixée par la loi, mais souvent par accord collectif ou par usage. Le contrat
de travail lui-même ne peut pas prévoir des dispositions moins favorables que celles de ma
er
convention collective applicable même si cette dernière l’y autorise : Cass. soc. 1 juillet
2008.

À défaut de respect du préavis, le salarié pourra être condamné au versement à des dommages
et intérêts dont le montant sera évalué par le juge du fond.

II. LA DÉMISSION ABUSIVE

La rupture abusive est caractérisée lorsque le salarié à la volonté de désorganiser l’entreprise


ou un secteur de celle-ci. Il y a abus lorsque les conditions du départ manifestent l’intention
de nuire ou une légèreté blâmable de la part du salarié : Arrêt Christian Dior Cass. soc. 19
juin 1959 : un mannequin vedette avait volontairement attendu la veille pour indiquer qu’elle
ne viendrait pas au défilé causant ainsi un préjudice important à la société.
La démission abusive ouvre droit également à des dommages et intérêts/article 1237-2 Code
du travail.

D’après la Cour de cassation, « la démission pour exercer une activité concurrente ne
constitue pas en soi un abus du droit de démissionner », mais l’éventuelle clause de non-
concurrence devra bien sûr être respectée, tout comme le remboursement de la somme
figurant dans l’éventuelle clause de dédit-formation.

Débauchage immédiat pour un nouvel employeur : si le salarié s’est rendu coupable de


démission abusive pour se faire embaucher ailleurs, son nouvel employeur est considéré par
la loi comme solidairement responsable du dommage causé au premier par une triple
condition :

– Si ce dernier démontre qu’il est intervenu dans la rupture par des agissements
frauduleux et dans un but déterminé : détournement de clientèle, violation de secret de
fabrication, etc. ;
– Si le nouvel employeur a embauché le salarié en sachant très bien qu’il était encore
lié par un contrat de travail avec le précédent ;
– S’il a continué à occuper le salarié après avoir appris qu’il était encore lié par un
contrat de travail.

III. DÉMISSION FORCÉE ET VICE DU CONSENTEMENT

Comme il a été vu précédemment, la démission doit révéler la volonté de rompre le contrat de


travail, être claire et non équivoque. Elle doit donc être réfléchie et libre. Les démissions
forcées par l’employeur sont donc prohibées.
Exemples : démission obtenue par l’employeur à l’aide de procédés vexatoires sous la
contrainte morale : Cass. soc. 26 septembre 1990 ; démission obtenue par l’attitude et les
pressions de l’employeur de nature à porter atteinte à la dignité du salarié : Cass. soc. 3 avril
2006.

FICHE 15 : LA RUPTURE CONVENTIONNELLE

Contrairement à la plupart des autres modes de rupture, la rupture conventionnelle du contrat


de travail n’est pas justifiée par un motif ou une cause, les raisons pour lesquelles les parties
entendent rompre le contrat sont indifférentes, seule la réalité de leur volonté devant être prise
en considération.

La rupture conventionnelle est régie par les articles L1237-11 et suivants du Code du travail.

I. CONDITIONS

D’après l’article L1227-11 du Code du travail, « La rupture conventionnelle, exclusive du


licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties.
Elle résulte d’une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux
dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des
parties. »

L’article L1237-12 précise que « Les parties au contrat conviennent du principe d’une rupture
conventionnelle lors d’un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié peut se faire
assister :
1° Soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise, qu’il s’agisse
d’un salarié titulaire d’un mandat syndical ou d’un salarié membre d’une institution
représentative du personnel ou tout autre salarié ;
2° Soit, en l’absence d’institution représentative du personnel dans l’entreprise, par un
conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l’autorité administrative.
Lors du ou des entretiens, l’employeur a la faculté de se faire assister quand le salarié en fait
lui-même usage. Le salarié en informe l’employeur auparavant ; si l’employeur souhaite
également se faire assister, il en informe à son tour le salarié.
L’employeur peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de
l’entreprise ou, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, par une personne
appartenant à son organisation syndicale d’employeurs ou par un autre employeur relevant de
la même branche. »

Par ailleurs, d’après l’article L1237-13 « La convention de rupture définit les conditions de
celle-ci, notamment le montant de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle qui ne
peut pas être inférieur à celui de l’indemnité prévue à l’article L. 1234-9.
Elle fixe la date de rupture du contrat de travail, qui ne peut intervenir avant le lendemain du
jour de l’homologation.
À compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d’entre elles dispose d’un
délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation. Ce droit est exercé
sous la forme d’une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l’autre
partie ».

Enfin, d’après l’article L1237-14, « À l’issue du délai de rétractation, la partie la plus
diligente adresse une demande d’homologation à l’autorité administrative, avec un exemplaire
de la convention de rupture. Un arrêté du ministre chargé du travail fixe le modèle de cette
demande.
L’autorité administrative dispose d’un délai d’instruction de quinze jours ouvrables, à compter
de la réception de la demande, pour s’assurer du respect des conditions prévues à la présente
section et de la liberté de consentement des parties. À défaut de notification dans ce délai,
l’homologation est réputée acquise et l’autorité administrative est dessaisie.
La validité de la convention est subordonnée à son homologation.
L’homologation ne peut faire l’objet d’un litige distinct de celui relatif à la convention. Tout
litige concernant la convention, l’homologation ou le refus d’homologation relève de la
compétence du conseil des prud’hommes, à l’exclusion de tout autre recours contentieux ou
administratif. Le recours juridictionnel doit être formé, à peine d’irrecevabilité, avant
l’expiration d’un délai de douze mois à compter de la date d’homologation de la convention. »

II. ECLAIRAGES JURISPRUDENTIELS

La Cour de cassation est venue préciser les contours de ce mode de rupture du contrat de
travail et a notamment rendu les arrêts suivants :

➢ Cass. soc. 3 mars 2015


3 arrêts ont été rendus le même jour par la Cour de cassation :

re
– 1 affaire n°13-20.549 :

er
1 apport : lorsque le contrat de travail a été rompu par l’exercice, par l’une ou l’autre des
parties, de son droit de résiliation unilatérale, la signature postérieure d’une rupture
conventionnelle vaut renonciation commune à la rupture précédemment intervenue.

e
2 apport : lorsque le contrat de travail prévoit que l’employeur pourra libérer le salarié de
l’interdiction de concurrence, soit à tout moment au cours de l’exécution du contrat, soit à
l’occasion de sa cessation au plus tard dans la lettre notifiant le licenciement ou le jour même
de la réception de la démission, c’est, en cas de rupture conventionnelle, la date de la rupture
fixée par la convention de rupture qui détermine le respect par l’employeur du délai
contractuel.
e
– 2 affaire n°13-23.348 :

La signature par les parties d’une rupture conventionnelle ne constitue pas un acte interruptif
de la prescription prévue par l’article L1332-4 du Code du travail (lequel prévoit que « Aucun
fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà
d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que
ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales. »)

e
– 3 affaire n°13-15.551 :

La signature par les parties au contrat de travail d’une rupture conventionnelle, après
l’engagement d’une procédure disciplinaire de licenciement, n’emporte pas renonciation par
l’employeur à l’exercice de son pouvoir disciplinaire. Si le salarié exerce son droit de
rétractation de la rupture conventionnelle, l’employeur est fondé à reprendre la procédure
disciplinaire par la convocation du salarié à un nouvel entretien préalable dans le respect des
dispositions de l’article L1332-4 du Code du travail et à prononcer une sanction, y compris un
licenciement pour faute grave.

III. RUPTURE CONVENTIONNELLE ET SUSPENSION DU CONTRAT DE


TRAVAIL (femme enceinte) Cass. soc. 25 mars 2015

Sauf en cas de fraude ou de vice du consentement, une rupture conventionnelle peut être
valablement conclue en application de l’article L1237-11 du Code du travail au cours des
périodes de suspension du contrat de travail auxquelles la salariée a droit au titre de son congé
de maternité, ainsi que pendant les quatre semaines suivant l’expiration de ces périodes.

IV. RUPTURE CONVENTIONNELLE SUIVIE D’UNE TRANSACTION : Cass.


soc. 26 mars 2014

Dans un arrêt du 26 mars 2014 (n° 12-21136), la Chambre sociale de la Cour de cassation a
jugé qu’un salarié et un employeur ayant signé une rupture conventionnelle ne peuvent
valablement conclure une transaction que si elle a pour objet de régler un différend relatif non
pas à la rupture du contrat de travail, mais à son exécution sur des éléments non compris dans
la convention de rupture.

Le ministre du Travail a rappelé cette solution dans une réponse ministérielle du 2 septembre
2014 (question n°55914) : « Une transaction, dont l’objet serait justement de mettre fin à un
litige lié à une rupture conventionnelle, ne peut intervenir sans remettre directement en cause
l’accord des parties et donc la validité de la rupture elle-même. C’est ce que vient de
confirmer la Cour de cassation dans son arrêt du 26 mars 2014. Rupture conventionnelle et
transaction ne sont compatibles que dans la mesure où elles ont des objets distincts ».
En d’autres termes, n’est pas valable la transaction conclue postérieurement à l’expiration du
contrat à la suite d’une rupture conventionnelle, pour régler de manière amiable les
conséquences de la rupture du contrat. Cette décision peut se comprendre, dès lors que la
rupture conventionnelle est censée intervenir d’un commun accord entre les parties, en
l’absence de tout vice du consentement.

V. RUPTURE CONVENTIONNELLE ET EXISTENCE D’UN DIFFÉREND


ENTRE LES PARTIES

Par un arrêt récent du 23 mai 2013, la Cour de cassation a considéré que l’existence, au
moment de la conclusion, d’un différend entre les parties au contrat de travail n’affecte pas
par elle-même la validité de la convention de rupture conclue en application de l’article
L1237-11 du Code du travail.

VI. LA RUPTURE CONVENTIONNELLE PEUT-ELLE ÊTRE ANNULÉE POUR


VICE DU CONSENTEMENT ?

D’après la jurisprudence, la rupture conventionnelle ne peut être imposée par l’une ou l’autre
des parties. Ainsi, lorsque le consentement du salarié est vicié, la convention est nulle : Cass.
soc. 23 mai 2013.
Dans cette affaire il s’agissait d’une avocate menacée par son employeur de mettre un terme à
contrat de travail en raison des erreurs et manquements de sa part justifiant un licenciement et
incitée, par une pression, à choisir la voie de la rupture conventionnelle.

En outre, dans un arrêt du 30 janvier 2013, la Chambre sociale de la Cour de cassation a


admis la nullité d’une rupture conventionnelle dès lors que le salarié, au moment de la
signature de l’acte de rupture, se trouvait dans une situation de « violence morale du fait du
harcèlement moral qu’il subissait » et « des troubles psychiques qui en sont résultés ».
Elle validait ainsi la solution de la cour d’appel qui, après avoir annulé l’acte de rupture, a
jugé que la rupture devait produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Attention – revirement de jurisprudence sur ce point – par un arrêt publié du 23 janvier


2019, la cour régulatrice retient que « la rupture conventionnelle n'est pas nulle du seul fait
que le salarié est victime de harcèlement moral » (Soc. 23 janvier 2019 n° 17-21550 Bull. -
analyse vidéo https://youtu.be/WiZgw1f94uc).

En revanche par un arrêt du 30 septembre 2013, la Chambre sociale a admis la possibilité de


recours à ce mode de rupture dans un contexte de « souffrance au travail ». Dans cette
affaire, le salarié après plusieurs mois d’arrêt pour maladie avait conclu une convention de
rupture conventionnelle avec son employeur. Il avait ensuite demandé au juge prud’homal
l’annulation de la convention de rupture estimant que « son état dépressif empêchait de
donner un consentement libre et éclairé à la rupture de son contrat de travail ».

En conclusion, le salarié doit apporter la preuve d’un vice du consentement et cette preuve
n’est pas rapportée du seul fait que le salarié serait victime de harcèlement moral.
VII. RUPTURE CONVENTIONNELLE ET NON-REMISE D’UN EXEMPLAIRE
AU SALARIE = NULLITÉ

Cass. soc. 6 février 2013 :

Un salarié ayant signé une rupture conventionnelle de son contrat de travail conteste cette
mesure et reproche notamment à son employeur de ne pas lui avoir remis un exemplaire de la
convention de rupture. En l’absence de dispositions spéciales régissant la forme de la rupture
conventionnelle des articles L. 1237-11 et suivants du Code du travail, l’employeur invoquait
plusieurs arguments tirés du droit commun pour démontrer que l’absence de remise d’un
original au salarié n’affectait pas la légalité de la rupture.
Ils sont tous rejetés par la Cour de cassation. La rupture conventionnelle étant entourée de
garanties formelles, la Haute juridiction décide, en dépit du silence des textes, que la remise
d’un exemplaire de la convention de rupture au salarié est nécessaire à la fois pour que
chacune des parties puisse demander l’homologation de la convention et pour garantir le libre
consentement du salarié, en lui permettant d’exercer ensuite son droit de rétractation en
connaissance de cause. Ainsi, à défaut de remise, la convention de rupture est atteinte de
nullité.

VIII. L’EMPLOYEUR PEUT ÊTRE À L’ORIGINE DE LA RUPTURE


CONVENTIONNELLE

Cass. soc. 15 janvier 2014


M. X. a été engagé à compter du 31 août 1998 par une société en qualité de peintre
automobile. Les parties ont conclu une convention de rupture du contrat de travail,
homologuée par l’autorité administrative le 22 décembre 2009. Le salarié a saisi la juridiction
prud’homale de demandes tendant à la requalification de la rupture conventionnelle en
licenciement sans cause réelle et sérieuse et au paiement de diverses sommes.
Pour faire droit à la demande du salarié de requalification de la rupture conventionnelle en
licenciement sans cause réelle et sérieuse, la Cour d’appel de Versailles a retenu qu’il existait
un différend entre les parties sur l’exécution du contrat de travail, l’employeur ayant infligé
au salarié deux avertissements en raison, selon lui, de la mauvaise qualité de son travail six
mois et trois mois avant l’établissement de la convention de rupture et ayant formulé de
nouveaux reproches à l’encontre du salarié sur l’exécution des tâches qui lui étaient confiées
avant de le convoquer à deux entretiens aux fins d’évoquer l’éventualité d’une rupture
conventionnelle du contrat de travail et de définir les termes de la convention de rupture.
Dans un arrêt en date du 15 janvier 2014, la Cour de cassation a estimé qu’en statuant ainsi,
alors que l’existence, au moment de sa conclusion, d’un différend entre les parties au contrat
de travail n’affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture, la cour d’appel a
violé l’article L. 1237-11 du Code du travail.

IX. RUPTURE CONVENTIONNELLE : UN CADRE QUI S’IMPOSE EN CAS DE


RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL D’UN COMMUN ACCORD

– Cass. soc. 15 octobre 2014


Sauf dispositions légales contraires, la rupture du contrat de travail par accord des parties ne
peut intervenir que dans les conditions prévues par les textes relatifs à la rupture
conventionnelle.

Fiche 16 : Jurisprudence récente en matière de relations individuelles de


travail : les grands classiques

Présomption de non-salariat. Lien de subordination


Chambre sociale, 13 avril 2022, 20-14.870, société Voxtur.
Vu l'article L. 8221-6 du code du travail. Il résulte de ce texte que les personnes physiques,
dans l'exécution de l'activité donnant lieu à immatriculation aux registres que ce texte
énumère, sont présumées ne pas être liées avec le donneur d'ordre par un contrat de travail.
L'existence d'un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque ces personnes fournissent
des prestations dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique
permanente à l'égard du donneur d'ordre. Le lien de subordination est caractérisé par
l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des
ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de
son subordonné. Peut constituer un indice de subordination le travail au sein d'un service
organisé lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution. Pour
dire que M. [T] et la société Voxtur ont été liés par un contrat de travail, l'arrêt retient que le
chauffeur n'avait pas le libre choix de son véhicule, qu'il y avait interdépendance entre les
contrats de location et d'adhésion à la plateforme, que le GPS permettait à la société de
localiser, en temps réel, chaque véhicule connecté, de manière à procéder à une répartition
optimisée et efficace des courses, en termes de temps de prise en charge de la personne à
transporter et de trajet à effectuer, et d'assurer ainsi un contrôle permanent de l'activité du
chauffeur, que la société fixait le montant des courses qu'elle facturait au nom et pour le
compte du chauffeur, et qu'elle modifiait unilatéralement le prix des courses, à la hausse ou à
la baisse en fonction des horaires. L'arrêt ajoute que la société disposait d'un pouvoir de
sanction à l'égard du chauffeur, à travers le système de notation par les personnes transportées
prévu à l'article 3 de son contrat d'adhésion.
En se déterminant ainsi, par des motifs insuffisants à caractériser l'exercice d'un travail au sein
d'un service organisé selon des conditions déterminées unilatéralement par la société Voxtur,
sans constater que celle-ci avait adressé à M. [T] des directives sur les modalités d'exécution
du travail, qu'elle disposait du pouvoir d'en contrôler le respect et d'en sanctionner
l'inobservation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Droit d’expression des salariés


Chambre sociale, 21 septembre 2022. 21-13.045. Vu les articles L. 2281-1 et L. 2281-3 du
code du travail, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 : Il
résulte de ces textes que les salariés bénéficient d'un droit à l'expression directe et collective
sur le contenu, les conditions d'exercice et l'organisation de leur travail. Sauf abus, les
opinions que le salarié émet dans l'exercice de ce droit, ne peuvent motiver une sanction ou
un licenciement. Pour dire le licenciement justifié par une cause réelle et sérieuse, l'arrêt,
après avoir écarté les autres griefs imputés au salarié, retient que lors de la réunion
d'expression collective des salariés du 14 janvier 2015, il a, en présence de la direction et de
plusieurs salariés de l'entreprise, remis en cause les directives qui lui étaient données par sa
supérieure hiérarchique, tentant d'imposer au directeur général un désaveu public de cette
dernière. Il ajoute que le médecin du travail a constaté, deux jours plus tard, l'altération de
l'état de santé de la supérieure hiérarchique. Il en déduit que ce comportement s'analyse en un
acte d'insubordination, une attitude de dénigrement et constitue une cause réelle et sérieuse de
licenciement. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'abus par le salarié
dans l'exercice de son droit d'expression directe et collective, la cour d'appel a violé les textes
susvisés.

Chambre sociale, 20 avril 2022, 20-10.852, société Satisfy. Selon l'article 10 de la


Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, toute
personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté
de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir
ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière. L'exercice de ces
libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités,
conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures
nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou
à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la
santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la
divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du
pouvoir judiciaire. Il résulte de l'article L. 1121-1 du code du travail que, sauf abus, le salarié
jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression, à laquelle seules des
restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché
peuvent être apportées.
Si la rupture du contrat de travail, motivée par les propos tenus par le salarié, constitue
manifestement une ingérence de l'employeur dans l'exercice de son droit à la liberté
d'expression tel que garanti par l'article 10, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales, il appartient cependant au juge de vérifier si,
concrètement, dans l'affaire qui lui est soumise, une telle ingérence est nécessaire dans une
société démocratique, et, pour ce faire, d'apprécier la nécessité de la mesure au regard du but
poursuivi, son adéquation et son caractère proportionné à cet objectif.
De l'ensemble de ces éléments, la cour d'appel qui a fait ressortir que le licenciement, fondé
sur la violation par le salarié d'une clause de son contrat de travail d'animateur, poursuivait le
but légitime de lutte contre les discriminations à raison du sexe et les violences domestiques
et celui de la protection de la réputation et des droits de l'employeur, a exactement déduit,
compte tenu de l'impact potentiel des propos réitérés du salarié, reflétant une banalisation des
violences à l'égard des femmes, sur les intérêts commerciaux de l'employeur, que cette rupture
n'était pas disproportionnée et ne portait donc pas une atteinte excessive à la liberté
d'expression du salarié.

16 février 2022, Soc.


Au visa de l'article L. 1121-1 du Code du travail et l'article 10, § 1, de la CEDH, sauf abus, le
salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression, à laquelle
seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but
recherché peuvent être apportées. Le licenciement prononcé par l'employeur pour un motif lié
à l'exercice non abusif par le salarié de sa liberté d'expression est nul. Les juges ne sauraient
débouter le salarié de sa demande en nullité de son licenciement, après avoir relevé qu'aucun
des éléments versés aux débats ne démontrait que le salarié se fût exprimé dans des termes
outranciers ou injurieux.
(Société générale, pourvoi n° 19-17.871 [P])

19 janvier 2022, Soc. En raison de l'atteinte qu'il porte à la liberté d'expression, en particulier
au droit pour les salariés de signaler les conduites ou actes illicites constatés par eux sur leur
lieu de travail, le licenciement d'un salarié prononcé pour avoir relaté ou témoigné, de bonne
foi, de faits dont il a eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions et qui, s'ils sont
établis, seraient de nature à caractériser des infractions pénales ou des manquements à
des obligations déontologiques prévues par la loi ou le règlement, est frappé de nullité.
Si, d'une part, la lettre de licenciement reproche expressément au salarié d'avoir menacé son
employeur de saisir la compagnie régionale des commissaires aux comptes de l'existence dans
la société d'une situation de conflit d'intérêts à la suite de cas d'auto-révision sur plusieurs
entreprises, situation prohibée par le Code de déontologie de la profession, dont il l'a
préalablement avisé par lettre, et, d'autre part, si la procédure de licenciement a été mise en
œuvre concomitamment à cette alerte et à la saisine par le salarié de cet organisme
professionnel après que l'employeur lui ait refusé toute explication sur cette situation, le
licenciement est nul.
(Société Diagnostic et investissement c/ M. [G] [L], pourvoi n° 20-10.057 [P])

Lettre de licenciement. Réforme Macron


Chambre sociale, 29 juin 2022, 20-22.220, société BNP Paribas
D'abord, aux termes de l'article L. 1235-2 du code du travail dans sa rédaction issue de
l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, les motifs énoncés dans la lettre de
licenciement prévue aux articles L 1232-6, L. 1233-16 et L. 1233-42 du même code peuvent,
après la notification de celle-ci, être précisés par l'employeur, soit à son initiative soit à la
demande du salarié, dans des délais et conditions fixés par décret en Conseil d'État. Selon
l'article R. 1232-13 du code du travail, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-1702 du 15
décembre 2017, le salarié peut, dans les quinze jours suivant la notification du licenciement,
demander à l'employeur des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement.
L'employeur dispose d'un délai de quinze jours après la réception de la demande du salarié
pour apporter des précisions s'il le souhaite. Il communique ces précisions au salarié par lettre
recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Dans un délai de quinze
jours suivant la notification du licenciement et selon les mêmes formes, l'employeur peut, à
son initiative, préciser les motifs du licenciement.
Il en résulte qu'aucune disposition n'impose à l'employeur d'informer le salarié de son droit de
demander que les motifs de la lettre de licenciement soient précisés. Ensuite, ayant constaté
que la lettre de licenciement énonçait un grief tiré d'un comportement et de propos déplacés
de la salariée à l'égard de quatre collaborateurs de nature à mettre en péril leur santé
psychique et à dégrader leurs conditions de travail, la cour d'appel, qui a retenu que ce motif
de licenciement était précis et matériellement vérifiable, en a exactement déduit que cette
lettre répondait à l'exigence légale de motivation.

Barème Macron en cas de licenciement abusif. Validation par la Cour de cassation.


Chambre sociale, 11 mai 2022, 21-15.247. Société FSM, Fives Stein Manufacturing.
D'une part, aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de
l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, applicable au litige, si le licenciement d'un
salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la
réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou
l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la
charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et
maximaux. Selon l'article L. 1235-3-1 du code du travail, dans sa version en vigueur du 24
septembre 2017 au 22 décembre 2017, l'article L. 1235-3 n'est pas applicable lorsque le juge
constate que le licenciement est entaché d'une des nullités prévues au deuxième alinéa du
présent article. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de
son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité,
à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Les
nullités mentionnées à l'alinéa précédent sont celles qui sont afférentes à la violation d'une
liberté fondamentale, à des faits de harcèlement moral ou sexuel dans les conditions
mentionnées aux articles L. 1152-3 et L. 1153-4, à un licenciement discriminatoire dans les
conditions prévues aux articles L. 1134-4 et L. 1132-4 ou consécutif à une action en justice,
en matière d'égalité professionnelle entre hommes et femmes dans les conditions mentionnées
à l'article L. 1144-3 et en cas de dénonciation de crimes et délits, ou à l'exercice d'un mandat
par un salarié protégé mentionné au chapitre Ier du titre Ier du livre IV de la deuxième partie,
ainsi qu'aux protections dont bénéficient certains salariés en application des articles L. 1225-
71 et L. 1226-13.
D'autre part, dans la partie I de la Charte sociale européenne, « les Parties reconnaissent
comme objectif d'une politique qu'elles poursuivront par tous les moyens utiles, sur les plans
national et international, la réalisation de conditions propres à assurer l'exercice effectif des
droits et principes » ensuite énumérés, parmi lesquels figure le droit des travailleurs à une
protection en cas de licenciement. Selon l'article 24 de cette même Charte, « en vue d'assurer
l'exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement, les Parties s'engagent à
reconnaître :
a) le droit des travailleurs à ne pas être licenciés sans motif valable lié à leur aptitude ou
conduite, ou fondé sur les nécessités de fonctionnement de l'entreprise, de l'établissement ou
du service ; b) le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate
ou à une autre réparation appropriée. A cette fin les Parties s'engagent à assurer qu'un
travailleur qui estime avoir fait l'objet d'une mesure de licenciement sans motif valable ait un
droit de recours contre cette mesure devant un organe impartial. » L'annexe de la Charte
sociale européenne précise qu'il « est entendu que l'indemnité ou toute autre réparation
appropriée en cas de licenciement sans motif valable doit être déterminée par la législation ou
la réglementation nationales, par des conventions collectives ou de toute autre manière
appropriée aux conditions nationales. » L'article 24 précité figure dans la partie II de la Charte
sociale européenne qui indique que « les Parties s'engagent à se considérer comme liées, ainsi
que prévu à la partie III, par les obligations résultant des articles et des paragraphes » qu'elle
contient. Dans la Partie III de la Charte, il est indiqué que « chacune des Parties s'engage : a) à
considérer la partie I de la présente Charte comme une déclaration déterminant les objectifs
dont elle poursuivra par tous les moyens utiles la réalisation, conformément aux dispositions
du paragraphe introductif de ladite partie ; b) à se considérer comme liée par six au moins des
neuf articles suivants de la partie II de la Charte : articles 1, 5, 6, 7, 12, 13, 16, 19 et 20 ; c) à
se considérer comme liée par un nombre supplémentaire d'articles ou de paragraphes
numérotés de la partie II de la Charte, qu'elle choisira, pourvu que le nombre total des articles
et des paragraphes numérotés qui la lient ne soit pas inférieur à seize articles ou à soixante-
trois paragraphes numérotés. »
Il résulte de la loi n° 99-174 du 10 mars 1999, autorisant l'approbation de la Charte sociale
européenne, et du décret n° 2000-110 du 4 février 2000 que la France a choisi d'être liée par
l'ensemble des articles de la Charte sociale européenne. L'article I de la partie V de la Charte
sociale européenne, consacrée à la « Mise en oeuvre des engagements souscrits » prévoit que
« les dispositions pertinentes des articles 1 à 31 de la partie II de la présente Charte sont mises
en oeuvre par : a) la législation ou la réglementation ; b) des conventions conclues entre
employeurs ou organisations d'employeurs et organisations de travailleurs ; c) une
combinaison de ces deux méthodes ; d) d'autres moyens appropriés. » Enfin, l'annexe de la
Charte sociale européenne mentionne à la Partie III : « Il est entendu que la Charte contient
des engagements juridiques de caractère international dont l'application est soumise au seul
contrôle visé par la partie IV » qui prévoit un système de rapports périodiques et de
réclamations collectives.
Sous réserve des cas où est en cause un traité international pour lequel la Cour de justice de
l'Union européenne dispose d'une compétence exclusive pour déterminer s'il est d'effet direct,
les stipulations d'un traité international, régulièrement introduit dans l'ordre juridique interne
conformément à l'article 55 de la Constitution, sont d'effet direct dès lors qu'elles créent des
droits dont les particuliers peuvent se prévaloir et que, eu égard à l'intention exprimée des
parties et à l'économie générale du traité invoqué, ainsi qu'à son contenu et à ses termes, elles
n'ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l'intervention
d'aucun acte complémentaire pour produire des effets à l'égard des particuliers.
Il résulte des dispositions précitées de la Charte sociale européenne que les Etats contractants
ont entendu reconnaître des principes et des objectifs, poursuivis par tous les moyens utiles,
dont la mise en oeuvre nécessite qu'ils prennent des actes complémentaires d'application selon
les modalités rappelées aux paragraphes 13 et 17 du présent arrêt et dont ils ont réservé le
contrôle au seul système spécifique rappelé au paragraphe 18 (Assemblée plénière, avis de la
Cour de cassation, 17 juillet 2019, n° 19-70.010 et n° 19-70.011 ; 1re Civ., 21 novembre
2019, pourvoi n° 19-15.890, publié). C'est dès lors à bon droit que la cour d'appel a retenu
que, les dispositions de la Charte sociale européenne n'étant pas d'effet direct en droit
interne dans un litige entre particuliers, l'invocation de son article 24 ne pouvait pas
conduire à écarter l'application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail
et qu'il convenait d'allouer en conséquence à la salariée une indemnité fixée à une
somme comprise entre les montants minimaux et maximaux déterminés par ce texte.

Chambre sociale, 11 mai 2022, 21-14.490, Société Pleyel centre de santé mutualiste.
Validation des barèmes Macron en cas de licenciement abusif.
Aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la loi
doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. En application de
l'article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause
qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de
l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux fixés par
ce texte. Pour déterminer le montant de l'indemnité, le juge peut tenir compte, le cas échéant,
des indemnités de licenciement versées à l'occasion de la rupture, à l'exception de l'indemnité
de licenciement mentionnée à l'article L. 1234-9. Cette indemnité est cumulable, le cas
échéant, avec les indemnités prévues aux articles L. 1235-12, L. 1235-13 et L. 1235-15, dans
la limite des montants maximaux prévus au même article. Aux termes de l'article 10 de la
Convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail (l'OIT), si les organismes
mentionnés à l'article 8 de la présente convention arrivent à la conclusion que le licenciement
est injustifié, et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationales, ils n'ont pas le
pouvoir ou n'estiment pas possible dans les circonstances d'annuler le licenciement et/ou
d'ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner
le versement d'une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme
appropriée. Les stipulations de cet article 10 qui créent des droits dont les particuliers peuvent
se prévaloir à l'encontre d'autres particuliers et qui, eu égard à l'intention exprimée des parties
et à l'économie générale de la convention, ainsi qu'à son contenu et à ses termes, n'ont pas
pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l'intervention d'aucun acte
complémentaire, sont d'effet direct en droit interne (voir également : Assemblée plénière, avis
de la Cour de cassation, 17 juillet 2019, n° 19-70.010 et n° 19-70.011). En effet, la
Convention n° 158 de l'OIT précise dans son article 1er : « Pour autant que l'application de la
présente convention n'est pas assurée par voie de conventions collectives, de sentences
arbitrales ou de décisions judiciaires, ou de toute autre manière conforme à la pratique
nationale, elle devra l'être par voie de législation nationale. »
Selon la décision du Conseil d'administration de l'Organisation internationale du travail, ayant
adopté en 1997 le rapport du Comité désigné pour examiner une réclamation présentée en
vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT par plusieurs organisations syndicales
alléguant l'inexécution par le Venezuela de la Convention n° 158, le terme « adéquat » visé à
l'article 10 de la Convention signifie que l'indemnité pour licenciement injustifié doit, d'une
part être suffisamment dissuasive pour éviter le licenciement injustifié, et d'autre part
raisonnablement permettre l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi. A cet égard, il
convient de relever qu'aux termes de l'article L. 1235-3-1 du code du travail, l'article L. 1235-
3 de ce code n'est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d'une
des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article. Dans ce cas, lorsque le salarié ne
demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est
impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut être
inférieure aux salaires des six derniers mois. Les nullités mentionnées au premier alinéa sont
celles qui sont afférentes à : 1° La violation d'une liberté fondamentale ; 2° Des faits de
harcèlement moral ou sexuel dans les conditions mentionnées aux articles L. 1152-3 et L.
1153-4 ; 3° Un licenciement discriminatoire dans les conditions mentionnées aux articles L.
1132-4 et L. 1134-4 ; 4° Un licenciement consécutif à une action en justice en matière
d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans les conditions mentionnées à
l'article L. 1144-3, ou à une dénonciation de crimes et délits ; 5° Un licenciement d'un salarié
protégé mentionné aux articles L. 2411-1 et L. 2412-1 en raison de l'exercice de son mandat ;
6° Un licenciement d'un salarié en méconnaissance des protections mentionnées aux articles
L. 1225-71 et L. 1226-13.
Selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, la qualification de liberté
fondamentale est reconnue à la liberté syndicale, en vertu de l'alinéa 6 du Préambule de la
Constitution du 27 octobre 1946 (Soc., 2 juin 2010, pourvoi n° 08-43.277 ; Soc., 9 juillet
2014, pourvois n° 13-16.434, 13-16.805, Bull. 2014, V, n° 186), au droit de grève protégé par
l'alinéa 7 du même Préambule (Soc., 25 novembre 2015, pourvoi n° 14-20.527, Bull. 2015, V,
n° 236), au droit à la protection de la santé visé par l'alinéa 11 du même Préambule (Soc., 11
juillet 2012, pourvoi n° 10-15.905, Bull. 2012, V, n° 218 ; Soc., 29 mai 2013, pourvoi n° 11-
28.734, Bull. 2013, V, n° 136), au principe d'égalité des droits entre l'homme et la femme
institué à l'alinéa 3 du même Préambule (Soc., 29 janvier 2020, pourvoi n° 18-21.862, publié),
au droit à un recours juridictionnel en vertu de l'article 16 de la Déclaration de 1789 (Soc., 21
novembre 2018, pourvoi n° 17-11.122, publié), à la liberté d'expression, protégée par l'article
10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (Soc.,
30 juin 2016, pourvoi n° 15-10.557, Bull. 2016, V, n° 140 ; Soc., 19 janvier 2022, pourvoi n°
20-10.057, publié). En application de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne
peut faire l'objet d'une discrimination en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de
son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de
sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa
situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-
appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses
opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat
électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de
son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa
perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que
le français.
Les protections mentionnées aux articles L. 1225-71 et L. 1226-13 du code du travail
concernent la protection de la grossesse et de la maternité, la prise d'un congé d'adoption, d'un
congé de paternité, d'un congé parental, d'un congé pour maladie d'un enfant et la protection
des victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles. Par ailleurs, selon l'article
L. 1235-4 du code du travail, dans le cas prévu à l'article L. 1235-3 du même code, le juge
ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie
des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du
jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé.
Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas
intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.
Il en résulte, d'une part, que les dispositions des articles L. 1235-3 et L. 1235-3-1 du code du
travail, qui octroient au salarié, en cas de licenciement injustifié, une indemnité à la charge de
l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux variant
en fonction du montant du salaire mensuel et de l'ancienneté du salarié et qui prévoient que,
dans les cas de licenciements nuls dans les situations ci-dessus énumérées, le barème ainsi
institué n'est pas applicable, permettent raisonnablement l'indemnisation de la perte injustifiée
de l'emploi. Il en résulte, d'autre part, que le caractère dissuasif des sommes mises à la charge
de l'employeur est également assuré par l'application, d'office par le juge, des dispositions
précitées de l'article L. 1235-4 du code du travail. Les dispositions des articles L. 1235-3, L.
1235-3-1 et L. 1235-4 du code du travail sont ainsi de nature à permettre le versement d'une
indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l'article 10 de
la Convention n° 158 de l'OIT.
Il en résulte que les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail sont
compatibles avec les stipulations de l'article 10 de la Convention précitée. Pour
condamner l'employeur au paiement d'une somme supérieure au montant maximal prévu par
l'article L. 1235-3 du code du travail, l'arrêt constate, d'une part, que ce texte prévoit, pour une
ancienneté inférieure à 4 ans, une indemnité de licenciement injustifié comprise entre 13 211
et 17 615 euros, et, d'autre part, que la salariée justifie, en raison de sa qualité de demandeur
d'emploi jusqu'en août 2019 et déduction faite des revenus perçus de Pôle emploi, d'une perte
supérieure à 32 000 euros.
L'arrêt retient que ce montant représente à peine la moitié du préjudice subi en termes de
diminution des ressources financières de la salariée et ne permet donc pas, compte tenu de la
situation concrète et particulière de la salariée, âgée de 53 ans à la date de la rupture, une
indemnisation adéquate et appropriée du préjudice subi, compatible avec les exigences de
l'article 10 de la Convention n° 158 de l'OIT.

Motif économique du licenciement


Chambre sociale, 21 septembre 2022, 20-18.511, société Viessmann industrie France. Vu
l'article L. 1233-3, 1°, du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8
août 2016. Il en résulte que si la réalité de l'indicateur économique relatif à la baisse du
chiffre d'affaires ou des commandes au cours de la période de référence précédant le
licenciement n'est pas établie, il appartient au juge, au vu de l'ensemble des éléments versés
au dossier, de rechercher si les difficultés économiques sont caractérisées par l'évolution
significative d'au moins un des autres indicateurs économiques énumérés par ce texte, tel que
des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut
d'exploitation, ou tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés. Pour dire que le
motif économique du licenciement du salarié n'est pas avéré et que le licenciement est sans
cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que la société se réfère pour preuve de ses difficultés
aux bilans qu'elle produit des années 2013, 2014, 2015 et 2016 et ne justifie pas de sa
situation à la date du licenciement autrement qu'en évoquant des résultats prévisionnels, en
tout cas n'apporte pas la preuve de la baisse sur trois trimestres consécutifs courant 2016/1er
trimestre 2017 des commandes et/ou du chiffre d'affaires. En se déterminant ainsi, quand
l'employeur invoquait également des capitaux propres inférieurs à la moitié du capital social
et un niveau d'endettement s'élevant à 7,5 millions d'euros à fin décembre 2016, sans
rechercher si ce dernier ne justifiait pas de difficultés économiques caractérisées soit par
l'évolution significative d'au moins un des autres indicateurs économiques énumérés au 1° de
l'article L. 1233-3 du code du travail, soit par tout autre élément de nature à les justifier, la
cour d'appel a privé sa décision de base légale.

Chambre sociale, 1 juin 2022, 20-19.957, Société Children Worldwide Fashion.


Licenciement économique. Notion de motif économique. Baisse des commandes. Selon la
jurisprudence constante de la Cour de cassation, le juge doit se placer à la date du
licenciement pour apprécier le motif de celui-ci (Soc., 21 novembre 1990, pourvoi n° 87-
44.940, Bull. 1990, V, n° 574 ; Soc., 26 février 1992, pourvoi n° 90-41.247, Bull. 1992, V, n°
130). Il en résulte que la durée d'une baisse significative des commandes ou du chiffre
d'affaires, telle que définie par l'article L. 1233-3, 1°, a) à d), du code du travail, s'apprécie en
comparant le niveau des commandes ou du chiffre d'affaires au cours de la période
contemporaine de la notification de la rupture du contrat de travail par rapport à celui de
l'année précédente à la même période. Pour dire le licenciement fondé sur un motif
économique réel et sérieux, l'arrêt retient qu'il convient d'apprécier les difficultés
économiques justifiant les mesures de réorganisations en fonction du nombre de salariés et à
la date du déclenchement de la procédure, et rappelant que la procédure de licenciement
économique collectif a été engagée au second trimestre 2017, l'appréciation des difficultés
économiques doit se faire au regard de l'évolution d'un des indicateurs énumérés par l'article
L. 1233-3 du code du travail connus à ce moment là. Il ajoute que, reprenant les données
comptables relatives au chiffre d'affaires de la société, il convient de se référer à l'exercice
clos 2016, seul le premier trimestre 2017 étant alors connu. Il retient encore qu'il résulte de
l'attestation du commissaire aux comptes de la société CWF que le chiffre d'affaires 2016
était, à la clôture de l'exercice, en recul de 22 835 millions d'euros par rapport à 2015 en
raison notamment de l'arrêt de la commercialisation de la marque Burberry lié à la perte de la
licence d'exploitation, et que le premier trimestre 2017 n'affichait qu'une légère hausse de
0,50 % par rapport au premier trimestre 2016 mais restait très en deçà du chiffre d'affaires du
premier trimestre 2015. Il conclut qu'il est ainsi justifié du recul de quatre trimestres
consécutifs de chiffre d'affaires sur l'année 2016 par rapport à l'année 2015, la modeste
augmentation de 0,50 % du chiffre d'affaires du premier trimestre 2017 par rapport à celui de
2016, n'étant alors pas suffisant pour signifier une amélioration tangible des indicateurs. En
statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la durée de la baisse du chiffre
d'affaires, en comparaison avec la même période de l'année précédente, n'égalait pas quatre
trimestres consécutifs précédant la rupture du contrat de travail pour cette entreprise de plus
de trois cents salariés, la cour d'appel, qui ce faisant n'a pas caractérisé les difficultés
économiques, a violé le texte susvisé.

Décompte du temps de travail


Chambre sociale, 21 septembre 2022, 21-13.552, société Impairoussot. Aux termes de
l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un
service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les
documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et
de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même
code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016,
l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents
permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des
documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie
réglementaire. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à
l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les
éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces
éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction
après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le
décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système
d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable. Il résulte de ces
dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail
accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments
suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de
permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre
utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte
de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et
réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties,
dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement,
sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances
salariales s'y rapportant.

16 février 2022, Soc.


Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du Code du travail, lorsque tous les salariés
occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif,
l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos
compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon
l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-
1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du
travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque
salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont
déterminées par voie réglementaire.
Enfin, selon l'article L. 3171-4 du Code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au
nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à
justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux
fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir
ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le
décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système
d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de
travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments
suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de
permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre
utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte
de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et
réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties,
dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement,
sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances
salariales s'y rapportant.
Les juges ne peuvent pas débouter le salarié de sa demande au titre des heures
supplémentaires et des repos compensateurs, si, d'une part, que le salarié présentait des
éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, d'autre part, si ce
dernier ne produisait aucun élément de contrôle de la durée du travail.
(Société Clear Channel France, pourvoi n° 20-16.171 [P])

Clause de conciliation
Chambre sociale, 21 septembre 2022, 21-14.171, société Cabinet de chirurgie dentaire
Pasteur. Il résulte des articles 122 et 124 du code de procédure civile que les fins de non-
recevoir ne sont pas limitativement énumérées. Licite, la clause d'un contrat instituant une
procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en
oeuvre suspend jusqu'à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir
qui s'impose au juge si les parties l'invoquent.

Contrat de travail des sportifs : CDD successifs


Chambre sociale, 21 septembre 2022, 21-12.590, société Stade Toulousain Rugby.
D'abord, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé que la notion de raisons objectives
doit être entendue comme visant des circonstances précises et concrètes caractérisant une
activité déterminée et, partant, de nature à justifier dans ce contexte particulier l'utilisation de
contrats de travail à durée déterminée successifs. Ces circonstances peuvent résulter
notamment, de la nature particulière des tâches pour l'accomplissement desquelles de tels
contrats ont été conclus et des caractéristiques inhérentes à celles-ci ou, le cas échéant, de la
poursuite d'un objectif légitime de politique sociale d'un Etat membre (CJUE, 26 novembre
2014, C-22/13, C-61/13 et C-448/13, Mascolo et al.). La Cour de justice de l'Union a précisé
que si un Etat-membre est en droit, lors de la mise en oeuvre de la clause 5, point 1, de
l'accord-cadre, de tenir compte des besoins particuliers d'un secteur spécifique, ce droit ne
saurait toutefois être entendu comme lui permettant de se dispenser de respecter, à l'égard de
ce secteur, l'obligation de prévoir une mesure adéquate pour prévenir et, le cas échéant
sanctionner, le recours abusif aux contrats de travail à durée déterminée successifs (CJUE, 26
février 2015, C-238/14, Commission européenne c/ Grand-Duché du Luxembourg). Ensuite,
la Cour de cassation juge de façon constante que s'il résulte de la combinaison des articles L.
1242-1, L. 1242-2 et D. 1242-1 du code du travail que dans les secteurs d'activité définis par
décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, certains des emplois en relevant
peuvent être pourvus par des contrats de travail à durée déterminée lorsqu'il est d'usage
constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée, en raison de la nature de
l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats à
durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l'accord-
cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999 et mis en oeuvre par la
directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999, qui a pour objet, en ses clauses 1 et 5, de
prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de
vérifier que le recours à l'utilisation de contrats successifs est justifié par des raisons
objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature
temporaire de l'emploi (Soc., 23 janvier 2008, n° 06-43.040, Bull. V, n° 16 ; Soc., 17
décembre 2014, n° 13-23.176, Bull. V, n° 295 ; Soc. 4 décembre 2019, n° 18-11.989 ; Soc., 13
octobre 2021, n° 18-21.232, B). La Cour de cassation juge par ailleurs que la détermination
par accord collectif de la liste précise des emplois pour lesquels il peut être recouru au contrat
de travail à durée déterminée d'usage ne dispense pas le juge, en cas de litige, de vérifier
concrètement l'existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de
l'emploi concerné (Soc., 9 octobre 2013, n° 12-17.882, Bull. V, n° 226). Enfin, il résulte de la
clause 8 de l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 19 mars 1999, mis en
oeuvre par la directive n° 1999/70/CE que les Etats membres ou les partenaires sociaux
peuvent maintenir ou introduire des dispositions plus favorables pour les travailleurs et que la
mise en oeuvre de l'accord-cadre ne constitue pas une justification valable pour la régression
du niveau général de protection des travailleurs. En l'état du droit antérieur à la loi n° 2015-
1541du 27 novembre 2015, qui a organisé le recours à un contrat de travail à durée
déterminée spécifique pour l'engagement des sportifs professionnels, la demande de renvoi
préjudiciel propose une interprétation de la directive n° 1999/70/CE de nature à entraîner une
régression du niveau général de protection des salariés concernés. Cette demande de question
préjudicielle n'apparaît donc pas pertinente, faute d'influence sur la solution du litige. Il n'y a,
en conséquence, pas lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question
préjudicielle.
Les dispositions prévues par les articles L. 1242-1 et suivants du code du travail, relatives au
contrat de travail à durée déterminée, ont été édictées dans un souci de protection du salarié,
qui seul peut se prévaloir de leur inobservation. Selon l'article L. 222-2-6 du code du sport,
le règlement de la fédération sportive ou, le cas échéant, de la ligue professionnelle peut
prévoir une procédure d'homologation du contrat de travail du sportif et de l'entraîneur
professionnels et déterminer les modalités de l'homologation ainsi que les conséquences
sportives en cas d'absence d'homologation du contrat. Le contrôle des conditions de recours
au contrat de travail à durée déterminée n'entre pas dans le champ des vérifications effectuées
par une fédération ou une ligue professionnelle, qui, dans le cadre de sa mission de service
public relative à l'organisation des compétitions, procède à l'homologation d'un contrat de
travail.
Aux termes de l'article L. 1242-1 du code du travail, un contrat de travail à durée
déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir
durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. S'il résulte de la
combinaison des articles L. 1242-1, L. 1242-2 et D. 1242-1 du code du travail que dans les
secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu,
certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats de travail à durée
déterminée lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée,
en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces
emplois, et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus
avec le même salarié, l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999
et mis en oeuvre par la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999, qui a pour objet, en
ses clauses 1 et 5, de prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats à durée déterminée
successifs, impose de vérifier que le recours à l'utilisation de contrats successifs est justifié
par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le
caractère par nature temporaire de l'emploi. D'abord, la cour d'appel a retenu, sans encourir le
grief visé par la première branche, que les justifications avancées par l'employeur et relatives
à l'incapacité physique pour un joueur de rugby professionnel d'exercer son métier au-delà
d'un certain âge et les évolutions affectant ses performances, avancées par l'employeur, qui
sont liées à la personne même du salarié et non à l'emploi concerné, n'étaient pas de nature à
établir le caractère par nature temporaire de cet emploi. Ensuite, l'employeur s'étant borné à
invoquer des justifications d'ordre général, tenant notamment aux évolutions du projet
tactique de l'entraîneur et des objectifs sportifs et économiques fixés par la direction du club,
la cour d'appel, qui a retenu que l'employeur n'établissait pas le caractère par nature
temporaire de l'emploi concerné, a pu décider que la relation de travail devait être requalifiée
en contrat à durée indéterminée.
Obligation de fournir un travail au salarié et une rémunération
Chambre sociale, 21 septembre 2022, 21-16.821. Société Ipsos Observer. Vu l'article L.
1221-1 du code du travail et l'article 1315 devenu l'article 1353 du code civil. L'employeur
est tenu de fournir un travail et de payer sa rémunération au salarié qui se tient à sa
disposition. Pour condamner l'employeur à une certaine somme à titre d'un rappel de salaire
outre congés payés afférents… En se déterminant ainsi, sans rechercher si l'employeur
démontrait avoir rempli l'obligation de fournir un travail dont il était débiteur du fait de la
requalification du contrat de travail intermittent en contrat de travail à temps complet et si la
salariée avait, en se déclarant indisponible ou en congés sans solde, refusé d'exécuter son
travail ou de se tenir à sa disposition, la cour d'appel, a privé sa décision de base légale.

Interdiction des discriminations, nullité du licenciement, agissements répétés de


harcèlement moral, office du juge
14 septembre 2022 Soc. Au visa des articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail, aucun
salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe
ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement,
d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou
de renouvellement de contrat, pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de
harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés. Toute
rupture de contrat de travail intervenue en méconnaissance des articles L. 1152-1 et L. 1152-2
du même code, toute disposition ou tout acte contraire est nul.
Les juges ne sauraient dire nul le licenciement d’une salariée et condamner l'employeur à lui
payer diverses sommes au titre de la rupture sans caractériser le fait que la salariée a été
licenciée pour avoir subi ou refusé de subir un harcèlement moral.
(Association Île de la Réunion tourisme, pourvoi n° 20-16.858)

Règles de prescription en matière de salaire


14 septembre 2022 Soc. Selon l'article L. 3245-1 du Code du travail, dans sa rédaction issue
de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, entrée en vigueur le 16 juin 2013, l'action en paiement
ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a
connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur
les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat
est rompu, sur les trois années précédant la rupture du contrat.
(Société Hexaom, pourvoi n° 20-18.906)

Chambre sociale, 9 juin 2022, 20-16.992, société Suez Organique : durée de la


prescription, action en paiement ou en répétition du salaire. La durée de la prescription
étant déterminée par la nature de la créance invoquée, la demande de rappel de salaire fondée
sur la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps
complet est soumise à la prescription triennale de l'article L. 3245-1 du code du travail. Aux
termes de l'article L. 3245-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504
du 14 juin 2013, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à
compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de
l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à
compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des
trois années précédant la rupture du contrat. Il résulte de la combinaison des articles L. 3245-1
et L. 3242-1 du code du travail que le délai de prescription des salaires court à compter de la
date à laquelle la créance salariale est devenue exigible. Pour les salariés payés au mois, la
date d'exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en
vigueur dans l'entreprise et concerne l'intégralité du salaire afférent au mois considéré.

Inaptitude du salarié. Reclassement du salarié


Chambre sociale, 8 juin 2022, 20-22.500, société Finder composants.
Vu les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail, dans leur rédaction issue de la loi
n° 2016-1088 du 8 août 2016 : Il résulte du premier de ces textes que lorsque le salarié
victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est déclaré inapte par le
médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait
précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, et que cette
proposition doit prendre en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions
écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à
exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Selon le second de ces textes, l'employeur
ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un
emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de
l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du
travail que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou
que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi. Il s'ensuit que,
lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis que tout maintien
du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé
du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi, l'employeur, qui n'est pas tenu
de rechercher un reclassement, n'a pas l'obligation de consulter les délégués du
personnel.
Pour condamner l'employeur à payer à la salariée une somme à titre de dommages-intérêts en
raison du défaut de consultation des délégués du personnel, l'arrêt retient que, quelle que soit
l'origine de l'inaptitude, l'employeur a l'obligation de solliciter l'avis du comité économique et
social, anciennement délégués du personnel, en application des article L. 1226-2 et L. 1226-
10 du code du travail dans leur rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, que la
consultation doit être faite même en l'absence de possibilité de reclassement et que le défaut
de consultation des délégués du personnel est sanctionné à l'article L. 1226-15 du code du
travail. En statuant ainsi, par un motif inopérant, alors qu'elle avait constaté que l'avis du
médecin du travail mentionnait que l'état de santé de la salariée faisait obstacle à tout
reclassement dans un emploi, la cour d'appel a violé les textes sus-visés.

2 mars 2022, Soc. Au visa des articles R. 4624-45 et R. 4624-55 du Code du travail dans
leurs dispositions applicables au litige, le premier issu du décret n° 2017-1698 du 15
décembre 2017et le second issu du décret n° 2016-1908 du 27 décembre 2016, en cas de
contestation portant sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications reposant sur
des éléments de nature médicale émis par le médecin du travail mentionnés à l'article L. 4624-
7, le conseil de prud'hommes, statuant en la forme des référés, est saisi dans un délai de
quinze jours à compter de leur notification. Les modalités de recours ainsi que ce délai sont
mentionnés sur les avis et mesures émis par le médecin du travail. L'avis médical d'aptitude
ou d'inaptitude émis par le médecin du travail est transmis au salarié ainsi qu'à
l'employeur par tout moyen leur conférant une date certaine.
Il en résulte que, pour constituer la notification faisant courir le délai de recours de quinze
jours à l'encontre d'un avis d'aptitude ou d'inaptitude, la remise en main propre de cet avis doit
être faite contre émargement ou récépissé.
(Association Vivre et devenir Villepinte Saint-Michel, pourvoi n° 20-21.715 [P])
Conventions (clauses) de forfait de rémunération : validité ou annulation ?
Chambre sociale, 22 juin 2022, 21-10.621, société CGI France
Vu l'article L. 212-15-3 I devenu les articles L. 3121-38 et L. 3121-40 du code du travail dans
leur rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, l'article 3 du chapitre 2 de
l'accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail, étendu, attaché à la convention
collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des
sociétés de conseils du 15 décembre 1987 et l'article 3.2.2 de l'accord sur la réduction et
l'aménagement du temps de travail UES Logica du 30 juin 2008 :Selon l'article L. 215-15-3 I
devenu l'article L. 3121-40 du code du travail, la conclusion de conventions de forfait en
heures sur l'année est prévue par une convention ou un accord collectif de travail étendu ou
par une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement. Cette convention prévoit les
catégories de cadres susceptibles de bénéficier de ces conventions de forfait ainsi que les
modalités et les caractéristiques principales des conventions de forfait susceptibles d'êtres
conclues.
L'article 3 du chapitre 2 de l'accord du 22 juin 1999 intitulé réalisation de missions dispose
que ces modalités s'appliquent aux salariés non concernés par les modalités standard ou les
réalisations de missions avec autonomie complète. Tous les ingénieurs et cadres sont a priori
concernés, à condition que leur rémunération soit au moins égale au plafond de la sécurité
sociale. De plus, en fonction de l'activité de l'entreprise, un accord d'entreprise doit préciser
les conditions dans lesquelles d'autres catégories de personnel peuvent disposer de ces
modalités de gestion. Dans un arrêt rendu le 26 mai 2004 (Soc., 26 mai 2004 n° 02-10.723,
Bull V n° 144), la Cour de cassation a dit que s'analysent en une convention de forfait en
heures assortie de la garantie d'un nombre maximal annuel de jours de travail les dispositions
du chapitre 2, article 3, de l'accord qui prévoient, d'une part, une convention horaire sur la
base hebdomadaire de trente-huit heures trente avec une rémunération forfaitaire au moins
égale à 115 % du salaire minimum conventionnel, d'autre part, un nombre maximum de jours
travaillés dans l'année.
L'accord Logica sur la réduction et l'aménagement du temps de travail daté du 30 juin 2008,
après avoir rappelé en son article 3.2 que les parties signataires reconnaissent l'existence au
sein de l'UES de trois modalités d'organisation du temps de travail qui correspondent aux
définitions de l'accord national du 22 juin 1999, dispose en son article 3.2.2 que la modalité
réalisation de missions s'applique aux salariés non concernés par la modalité standard ou la
modalité en autonomie complète. Plus précisément, elle concerne les ingénieurs et cadres
relevant a minima de la position 2.2 et du coefficient 130 et au plus du coefficient 170, soit la
position 3.1 de la convention collective nationale Syntec, et dont la rémunération au moment
de leur affectation dans la modalité est au moins égale au PASS.
Pour condamner l'employeur au paiement d'heures supplémentaires, l'arrêt, après avoir
rappelé que, pour l'appréciation du caractère plus ou moins favorable entre deux accords
collectifs, il convient de procéder à une comparaison des avantages ayant le même objet ou la
même cause eu égard à l'ensemble des intéressés, et non eu égard à l'un d'entre eux en
particulier, retient que l'accord collectif de réduction du temps de travail annexé à la
convention collective Syntec, à la différence de l'accord collectif d'entreprise, ne précise pas
que la condition de rémunération au moins égale au PASS ne s'applique que pour déterminer
au départ la catégorie dont relève le salarié. Il estime que l'accord d'entreprise ajoute une
condition restrictive, tenant à l'applicabilité dans le temps de ce critère de rémunération
plancher, qui n'est pas expressément posée par l'accord de branche. Il ajoute que, plus
généralement, l'intégration des salariés à la modalité RM emporte des conséquences
dérogatoires au droit commun de la durée légale du travail en ce qu'elle autorise la conclusion
d'une convention de forfait hebdomadaire et que l'intérêt du salarié commande de faire une
stricte application des possibilités de dérogation à la durée légale du travail, en sorte que
favoriser le maintien de la convention de forfait en dépit de la constatation, après l'admission
du salarié dans la catégorie RM, de l'infériorité de sa rémunération par rapport au PASS serait
contraire à l'intérêt du salarié.
Il en déduit que, contrairement à ce que prétend l'employeur, ne serait-ce qu'en ajoutant au
texte de l'accord de branche une condition restrictive qui n'y figure pas, l'accord d'entreprise
du 30 juin 2008 apparaît moins favorable aux salariés que l'accord de niveau supérieur, ce
dont il résulte que l'application de sa clause 3.2.2 susvisée, qui précise que la condition tenant
à une rémunération au moins équivalente au PASS s'apprécie au moment de l'affectation dans
la modalité RM, doit être écartée.
En se déterminant ainsi, sans préciser en quoi la définition par l'accord d'entreprise des
conditions d'éligibilité au forfait en heures, dérogeant aux règles de calcul de droit commun
de la durée du travail, et de leur maintien dans le temps était globalement moins favorable
qu'un décompte de la durée du travail selon les règles de droit commun, la cour d'appel n'a
pas donné de base légale à sa décision.

Chambre sociale, 2 mars 2022, 20-19.832 20-19.837, société Altran technologies.


Lorsqu'une convention de forfait en heures est déclarée inopposable, le décompte et le
paiement des heures supplémentaires doit s'effectuer selon le droit commun, au regard de la
durée légale de 35 heures hebdomadaires ou de la durée considérée comme équivalente.
Après avoir retenu l'inopposabilité de la convention de forfait en heures, la cour d'appel,
recherchant la commune intention des parties, a décidé que celles-ci étaient convenues d'une
rémunération contractuelle fixée pour une durée hebdomadaire de 38 heures 30 et constaté
que cette rémunération de base avait été payée par l'employeur. Elle en a déduit à bon droit
que les salariés ne pouvaient prétendre qu'au paiement des majorations applicables aux heures
supplémentaires effectuées au-delà de la durée légale du travail.
Vu l'article 2224 du code civil. Il résulte de ce texte que la prescription d'une action en
responsabilité civile court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il
est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.
Pour déclarer prescrite l'action des salariés, les arrêts après avoir énoncé qu'en application de
l'article 2224 du code civil, en matière de responsabilité civile, le point de départ du délai de
prescription est la date à laquelle le dommage se manifeste au titulaire du droit, retiennent que
le préjudice allégué, à savoir la restriction des possibilités du salarié de rechercher du travail
du fait de l'application d'une clause dite de loyauté qui serait nulle, s'est manifesté au titulaire
du droit lors de la signature de son contrat de travail contenant ladite clause, date à laquelle il
a eu connaissance de la clause litigieuse, et non pas à la fin de la relation contractuelle. Les
arrêts ajoutent que c'est en effet à n'importe quel moment de l'exécution du contrat que le
salarié peut être amené à rechercher un nouvel emploi, recherche pouvant être limitée du fait
de la clause litigieuse. Ayant constaté qu'il s'était écoulé plus de cinq ans entre la signature du
contrat de travail et la date de saisine de la juridiction prud'homale, ils en déduisent que
l'action des salariés en réparation est prescrite. En statuant ainsi, alors que le dommage causé
par la stipulation d'une clause de loyauté illicite ne se réalise pas au moment de la stipulation
de la clause mais se révèle au moment de sa mise en œuvre, la cour d'appel a violé le texte
susvisé.

26 janvier 2022, Soc. Selon l'article L. 3121-45 du Code du travail dans sa rédaction issue de
la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, le salarié qui le souhaite peut, en accord avec son
employeur, renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d'une majoration de son
salaire. L'accord entre le salarié et l'employeur est établi par écrit. Le nombre de jours
travaillés dans l'année ne peut excéder un nombre maximal fixé par l'accord prévu à l'article
L. 3121-39. A défaut d'accord, ce nombre maximal est de 235 jours. Un avenant à la
convention de forfait conclue entre le salarié et l'employeur détermine le taux de la majoration
applicable à la rémunération de ce temps de travail supplémentaire, sans qu'il puisse être
inférieur à 10 %.
En conséquence et en l'absence de conclusion d'un tel accord, le juge fixe, dans le respect du
minimum de 10 %, le montant de la majoration applicable à la rémunération due en
contrepartie du temps de travail excédant le forfait convenu. Une cour d’appel peut ainsi
estimer le montant des sommes restant dues au salarié en contrepartie des jours travaillés en
dépassement du forfait de 215 jours fixés par la convention individuelle de forfait en jours.
(M. [L] [F] c/ Société Suez international, pourvoi n° 20-13.266 [P])

Transfert de contrat de travail. Entité économique autonome


Chambre sociale, 20 avril 2022, 20-12.444, Caisse autonome nationale de la sécurité
sociale dans les mines. Selon l'article L. 1224-1 du code du travail, lorsque survient une
modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente,
fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en
cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de
l'entreprise. Ce texte, interprété à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001,
ne s'applique qu'en cas de transfert d'une entité économique autonome qui conserve son
identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise. Constitue une entité économique autonome
un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un
objectif économique propre. Le transfert d'une telle entité ne s'opère que si des moyens
corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris,
directement ou indirectement, par un autre exploitant.
Il résulte de ces dispositions que la résiliation, par le propriétaire d'un établissement
constituant une entité économique autonome, du contrat de gestion confié à un prestataire de
services emportant retour de l'entité au propriétaire, celui-ci est tenu de poursuivre les contrats
de travail du personnel attaché à l'entité, dès lors que celle-ci demeure exploitable au jour de
sa restitution par le gestionnaire. Le premier employeur qui, en conséquence du refus du
repreneur de poursuivre les contrats de travail, a procédé au licenciement des salariés attachés
à l'activité transféré, dispose d'un recours en garantie contre celui-ci, lorsque ce refus est
illicite.

Chambre sociale, 23 mars 2022, 20-18.681 20-18.682 20-18.683 20-18.684, société GG


sécurité privée. Changement d’employeur. Transfert contrat de travail. Société entrante.
Sortante.
er
Vu les articles 1 et 2.3.2 de l'avenant du 28 janvier 2011 à l'accord du 5 mars 2002 relatif à la
reprise du personnel annexé à la convention collective nationale des entreprises de prévention
et de sécurité du 15 février 1985. Selon ces textes, les obligations de reprise du personnel
pesant sur l'entreprise entrante s'appliquent au périmètre sortant défini comme le volume de
prestations et la configuration des métiers, emplois, qualifications de l'ensemble des effectifs
réalisant celles-ci, tels que ces deux éléments conjugués existaient précédemment à la
consultation en vue du renouvellement du prestataire. Il n'y a pas lieu de prendre en compte
une éventuelle modification du volume ou des qualifications professionnelles requises au sein
du périmètre entrant. Il en résulte que le périmètre sortant est celui du marché transféré
donnant lieu au renouvellement de prestataire et que l'obligation de reprise des contrats de
travail ne s'impose pas au nouveau prestataire lorsque le renouvellement ne porte pas
sur le marché auquel les salariés étaient affectés.
Pour mettre hors de cause la société sortante et condamner la société entrante à diverses
sommes au titre de la rupture de leur contrat de travail, les arrêts retiennent d'abord que le
périmètre sortant était composé du gardiennage de l'ensemble immobilier du centre
commercial de la tour (lot n° 1) et de la sécurisation des biens communaux et des
manifestations publiques (lot n° 2) et ensuite que la société entrante est devenue attributaire
du marché relatif au gardiennage et à la sécurisation des bâtiments communaux et des
manifestations publiques, relevant précisément du périmètre sortant. Ils ajoutent que le fait
que la ville de [Localité 7] ait décidé de réduire le périmètre du marché entrant ou repris avant
de le rétablir dix mois plus tard ne saurait permettre à la société entrante d'échapper à ses
obligations conventionnelles de reprise de la totalité des salariés transférables affectés au
périmètre sortant. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le marché
attribué à la société entrante ne concernait pas les missions de gardiennage de l'ensemble
immobilier du centre commercial de la tour auxquelles étaient exclusivement affectés les
salariés, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Chambre sociale, 23 mars 2022, 20-21.518, société BNP Paribas. Changement


d’employeur. Transfert contrat de travail.
La convention par laquelle un salarié quitte le poste qu'il occupait dans une entreprise pour
entrer au service d'une autre entreprise appartenant au même groupe, organisant ainsi la
poursuite du contrat de travail, hors application de l'article L. 1224-1 du code du travail,
n'emporte pas la transmission au nouvel employeur de l'ensemble des obligations qui
incombaient à l'ancien employeur, sauf stipulations expresses en ce sens.
La cour d'appel a constaté que la convention tripartie conclue entre la salariée et les deux
employeurs successifs, qui avait pour objet la poursuite du contrat de travail au sein d'une
autre société du groupe, avec maintien de l'ancienneté, de la même qualification et du même
salaire, des droits acquis auprès du précédent employeur au titre des congés payés et du DIF,
n'avait pas prévu une application volontaire des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du
travail, permettant de mettre à la charge du nouvel employeur l'ensemble des obligations de
l'ancien employeur à la date de la modification de la situation juridique, ni ne mentionnait une
reprise par le nouvel employeur de l'ensemble des obligations qui pesaient sur le précédent
employeur au 1er avril 2009.
Elle en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations
rendaient inopérantes, que la salariée n'était pas recevable à former à l'encontre du nouvel
employeur des demandes fondées sur des manquements imputables au premier employeur.

Temps de travail et repos le dimanche


Chambre sociale, 26 octobre 2022, 21-19.075 société Distribution Casino France Selon
l'article L. 3132-31 du code du travail, l'inspecteur du travail peut, nonobstant toutes
poursuites pénales, saisir en référé le juge judiciaire pour voir ordonner toutes mesures
propres à faire cesser dans les établissements de vente au détail et de prestations de services
au consommateur l'emploi illicite de salariés en infraction aux dispositions des articles L.
3132-3 et L. 3132-13 du code du travail.
Il en résulte que ce pouvoir peut s'exercer dans tous les cas où des salariés sont employés de
façon illicite un dimanche, peu important qu'il s'agisse de salariés de l'établissement ou
d'entreprises de prestation de services.
Examinant les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a relevé que
les agents de sécurité de la société Lynx empiétaient sur les activités normalement dévolues
aux salariés des magasins en orientant les clients vers la hotline en cas de dysfonctionnement,
aidaient les clients en difficulté avec la caisse automatique, par exemple en utilisant la
"scanette" ou lors des paiements, rappelaient que les achats ne pouvaient se faire que par carte
bancaire et sans vente d'alcool, renseignaient les clients sur les rayons ouverts ou non,
procédaient au retrait des produits interdits à la vente, procédaient à l'ouverture des barrières
en sortie de caisse si le ticket du client était inopérant, avaient en charge la fermeture du
magasin de [7], rangeaient les paniers, scannaient parfois les produits ou le ticket de parking à
la place des clients, intervenaient directement auprès de l'assistance, procédaient au retrait
d'un produit non acheté, renseignaient les clients dans le magasin ou appelaient un
responsable en raison d'anomalies au niveau des caisses automatiques.
En l'état de ces constatations, dont il résultait que, du fait de la participation des agents de
sécurité aux activités du magasin, les modalités de fonctionnement et de paiement n'étaient
pas automatisées, la cour d'appel a décidé à bon droit que des salariés étaient employés en
violation des règles sur le repos dominical. Ayant constaté que, malgré des engagements de la
société qui, à la suite des premiers contrôles, avait reconnu des manquements au respect des
activités des agents de sécurité et affirmait y avoir remédié, de nouveaux manquements
avaient été relevés par l'inspection du travail, la cour d'appel a, sans encourir le grief de la
troisième branche du troisième moyen, estimé qu'une simple mesure d'injonction de respecter
la législation était insuffisante pour assurer le respect du repos dominical et que la fermeture
des magasins devait être ordonnée.

Chambre sociale, 26 octobre 2022, 21-15.142 syndicat Union départementale CGT du


Var Aux termes de l'article L. 3132-29, alinéa 1, du code du travail, lorsqu'un accord est
intervenu entre les organisations syndicales de salariés et les organisations d'employeurs d'une
profession et d'une zone géographique déterminées sur les conditions dans lesquelles le
repos hebdomadaire est donné aux salariés, le préfet peut, par arrêté, sur la demande des
syndicats intéressés, ordonner la fermeture au public des établissements de la profession ou de
la zone géographique concernée pendant toute la durée de ce repos. Ces dispositions ne
s'appliquent pas aux activités dont les modalités de fonctionnement et de paiement sont
automatisées.
Selon l'arrêté du préfet du Var du 12 février 1969, sur tout le territoire du Var, tous les
magasins d'alimentation ou parties d'établissements sédentaires ou ambulants dans lesquels il
est vendu des denrées alimentaires de toute nature, au détail, à l'exclusion des commerces de
boulangerie, boulangerie-pâtisserie et pâtisserie, seront fermés à la clientèle une journée par
semaine laissée au départ au choix du chef d'établissement, à savoir, soit la journée entière du
dimanche, soit la journée entière du lundi, soit du dimanche midi au lundi midi. C'est par une
exacte application de la loi et sans violer le principe de la séparation des pouvoirs que la cour
d'appel a décidé que la journée de fermeture imposée par l'arrêté préfectoral ne concernait pas
les activités dont les modalités de fonctionnement et de paiement sont automatisées. L'arrêt
relève que le recours à une intervention humaine que ce soit par la hotline ou la présence
d'agents de sécurité ne permet pas de dénier l'automaticité mise en oeuvre par la société dans
l'ouverture et le fonctionnement de ses magasins. L'arrêt ajoute qu'il n'était pas démontré que
les agents de sécurité et de surveillance, lesquels n'étaient pas salariés de la société,
intervenaient aux termes de contrats de prestation de services et bénéficiaient d'une
dérogation légale à la règle du repos dominical, agissaient en dehors de leur fonction afin de
participer au fonctionnement du magasin, pour son rangement ou l'assistance aux caisses. En
l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu décider qu'aucun trouble manifestement illicite
n'était caractérisé.
Chambre sociale, 26 octobre 2022, 21-14.178, société Garage du Poteau de Senlis
dépannage La Cour de justice de l'Union européenne juge que relève de la notion de "temps
de travail effectif", au sens de la directive 2003/88, l'intégralité des périodes de garde, y
compris celles sous régime d'astreinte, au cours desquelles les contraintes imposées au
travailleur sont d'une nature telle qu'elles affectent objectivement et très significativement la
faculté, pour ce dernier, de gérer librement, au cours de ces périodes, le temps pendant lequel
ses services professionnels ne sont pas sollicités et de consacrer ce temps à ses propres
intérêts. Inversement, lorsque les contraintes imposées au travailleur au cours d'une période
de garde déterminée n'atteignent pas un tel degré d'intensité et lui permettent de gérer son
temps et de se consacrer à ses propres intérêts sans contraintes majeures, seul le temps lié à la
prestation de travail qui est, le cas échéant, effectivement réalisée au cours d'une telle période
constitue du "temps de travail", aux fins de l'application de la directive 2003/88 (CJUE 9 mars
2021, C-344/19, D.J. c/Radiotelevizija Slovenija, points 37 et 38).
Pour débouter le salarié de ses demandes à titre d'heures supplémentaires, l'arrêt retient que,
conformément aux dispositions de la convention collective applicable, les dépanneurs de la
société étaient tenus de se tenir en permanence ou à proximité immédiate des ou dans les
locaux de l'entreprise, en dehors des heures et jours d'ouverture, afin de répondre sans délai à
toute demande d'intervention. L'arrêt ajoute qu'il était constitué des équipes de trois ou quatre
dépanneurs, munis d'un téléphone qui intervenaient à la demande du dispatcheur, lequel
contrairement aux autres salariés, était spécialement affecté à la réception continue des appels
d'urgence. L'arrêt en déduit que ces périodes étaient des astreintes et non pas des permanences
constituant un temps de travail effectif. En se déterminant ainsi, alors que le salarié invoquait
le court délai d'intervention qui lui était imparti pour se rendre sur place après l'appel de
l'usager, sans vérifier si le salarié avait été soumis, au cours de ses périodes d'astreinte, à des
contraintes d'une intensité telle qu'elles avaient affecté, objectivement et très
significativement, sa faculté de gérer librement, au cours de ces périodes, le temps pendant
lequel ses services professionnels n'étaient pas sollicités et de vaquer à des occupations
personnelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

Chambre sociale, 23 novembre 2022, 20-21.924, société Etablissements Decayeux. Aux


termes de l'article L. 3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps
pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses
directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles. Aux termes de l'article L.
3121-4 du même code, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, le
temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de
travail n'est pas un temps de travail effectif. Toutefois, s'il dépasse le temps normal de trajet
entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l'objet d'une contrepartie soit sous forme
de repos, soit financière. Cette contrepartie est déterminée par convention ou accord collectif
de travail ou, à défaut, par décision unilatérale de l'employeur prise après consultation du
comité d'entreprise ou des délégués du personnel, s'il en existe. La part de ce temps de
déplacement professionnel coïncidant avec l'horaire de travail n'entraîne aucune perte de
salaire. La Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l'article 2, point 1, de la
directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant
certains aspects de l'aménagement du temps de travail doit être interprété en ce sens que, dans
des circonstances telles que celles en cause au principal, dans lesquelles les travailleurs n'ont
pas de lieu de travail fixe ou habituel, constitue du ''temps de travail'', au sens de cette
disposition, le temps de déplacement que ces travailleurs consacrent aux déplacements
quotidiens entre leur domicile et les sites du premier et du dernier clients désignés par leur
employeur (CJUE, 10 septembre 2015, Tyco, C-266/14).
Certes, ainsi que l'a énoncé l'arrêt précité (points 48 et 49), il résulte de la jurisprudence de la
Cour que, exception faite de l'hypothèse particulière visée à l'article 7, paragraphe 1, de la
directive 2003/88/CE en matière de congé annuel payé, celle-ci se borne à réglementer
certains aspects de l'aménagement du temps de travail, de telle sorte que, en principe, elle ne
trouve pas à s'appliquer à la rémunération des travailleurs.
La Cour de justice considère en outre que la directive ne s'oppose pas à l'application d'une
réglementation d'un État membre, d'une convention collective de travail ou d'une décision
d'un employeur qui, aux fins de la rémunération d'un service, prend en compte de manière
différente les périodes au cours desquelles des prestations de travail sont réellement effectuées
et celles durant lesquelles aucun travail effectif n'est accompli, même lorsque ces périodes
doivent être considérées, dans leur intégralité, comme du ''temps de travail'' aux fins de
l'application de ladite directive, Radiotelevizija Slovenija (Période d'astreinte dans un lieu
reculé), C 344/19, point 58. (CJUE, 9 mars 2021, Stadt Offenbach am Main, C-580/19).
La Cour de cassation a jugé que le mode de rémunération des travailleurs dans une situation
dans laquelle les travailleurs n'ont pas de lieu de travail fixe ou habituel et effectuent des
déplacements quotidiens entre leur domicile et les sites du premier et du dernier clients
désignés par leur employeur relève, non pas de ladite directive, mais des dispositions
pertinentes du droit national et qu'en application de l'article L. 3121-4 du code du travail, le
temps de déplacement qui dépasse le temps normal de trajet, qui n'est pas du temps de travail
effectif, doit faire l'objet d'une contrepartie, soit sous forme de repos, soit sous forme
financière (Soc., 30 mai 2018, pourvoi n° 16-20.634, Bull. 2018, V, n° 97).
Cependant, dans l'arrêt du 9 mars 2021 (Radiotelevizija Slovenija, C-344/19), la Cour de
justice de l'Union européenne retient que les notions de "temps de travail" et de "période de
repos" constituent des notions de droit de l'Union qu'il convient de définir selon des
caractéristiques objectives, en se référant au système et à la finalité de la directive
2003/88/CE. En effet, seule une telle interprétation autonome est de nature à assurer à cette
directive sa pleine efficacité ainsi qu'une application uniforme de ces notions dans l'ensemble
des États membres (point 30). La Cour de justice de l'Union européenne précise que malgré la
référence faite aux "législations et/ou pratiques nationales" à l'article 2 de la directive
2003/88/CE, les États membres ne sauraient déterminer unilatéralement la portée des notions
de "temps de travail" et de "période de repos", en subordonnant à quelque condition ou
restriction que ce soit le droit, reconnu directement aux travailleurs par cette directive, à ce
que les périodes de travail et, corrélativement, celles de repos soient dûment prises en compte.
Toute autre interprétation tiendrait en échec l'effet utile de la directive 2003/88/CE et
méconnaîtrait sa finalité (point 31). Eu égard à l'obligation d'interprétation des articles L.
3121-1 et L. 3121-4 du code du travail à la lumière de la directive 2003/88/CE, il y a donc
lieu de juger désormais que, lorsque les temps de déplacements accomplis par un salarié
itinérant entre son domicile et les sites des premier et dernier clients répondent à la définition
du temps de travail effectif telle qu'elle est fixée par l'article L. 3121-1 du code du travail, ces
temps ne relèvent pas du champ d'application de l'article L. 3121-4 du même code.
La cour d'appel a constaté que le salarié, qui soutenait, sans être contredit sur ce point par
l'employeur, qu'il devait en conduisant, pendant ses déplacements, grâce à son téléphone
portable professionnel et son kit main libre intégré dans le véhicule mis à sa disposition par la
société, être en mesure de fixer des rendez-vous, d'appeler et de répondre à ses divers
interlocuteurs, clients, directeur commercial, assistantes et techniciens, exerçait des fonctions
de ''technico-commercial'' itinérant, ne se rendait que de façon occasionnelle au siège de
l'entreprise pour l'exercice de sa prestation de travail et disposait d'un véhicule de société pour
intervenir auprès des clients de l'entreprise répartis sur sept départements du Grand Ouest
éloignés de son domicile, ce qui le conduisait, parfois, à la fin d'une journée de déplacement
professionnel, à réserver une chambre d'hôtel afin de pourvoir reprendre, le lendemain, le
cours des visites programmées. Elle a ainsi fait ressortir que, pendant les temps de trajet ou
de déplacement entre son domicile et les premier et dernier clients, le salarié devait se
tenir à la disposition de l'employeur et se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer
à des occupations personnelles. Elle a décidé à bon droit que ces temps devaient être
intégrés dans son temps de travail effectif et rémunérés comme tel.

Lutte contre les discriminations : différence injustifiée fondée sur le sexe


Chambre sociale, 23 novembre 2022, 21-14.060, Société Air France. Vu les articles L.
1121-1, L. 1132-1, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2012-954 du 6 août 2012, et L.
1133-1 du code du travail, mettant en oeuvre en droit interne les articles 2, § 1, et 14, § 2, de
la directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006 relative à la
mise en oeuvre du principe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre
hommes et femmes en matière d'emploi et de travail : Il résulte de ces textes que les
différences de traitement en raison du sexe doivent être justifiées par la nature de la tâche à
accomplir, répondre à une exigence professionnelle véritable et déterminante et être
proportionnées au but recherché.
Il résulte par ailleurs de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE,
14 mars 2017, Micropole Univers, C-188/15), que par analogie avec la notion d'‘'exigence
professionnelle essentielle et déterminante'‘ prévue à l'article 4, § 1, de la directive
2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de
l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, la notion d'‘'exigence professionnelle
véritable et déterminante'‘, au sens de l'article 14, § 2, de la directive 2006/54/CE du
Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006, renvoie à une exigence objectivement
dictée par la nature ou les conditions d'exercice de l'activité professionnelle en cause. Il
résulte en effet de la version en langue anglaise des deux directives précitées que les
dispositions en cause sont rédigées de façon identique : ‘'such a characteristic constitutes a
genuine and determining occupational requirement'‘.
Pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts au titre de la discrimination, du
harcèlement moral et de la déloyauté, de ses demandes de rappels de salaire et tendant à la
nullité du licenciement et au paiement de sommes subséquentes, l'arrêt, après avoir constaté
que le manuel de port de l'uniforme des personnels navigants commerciaux masculins
mentionne que ‘'les cheveux doivent être coiffés de façon extrêmement nette. Limitées en
volume, les coiffures doivent garder un aspect naturel et homogène. La longueur est limitée
dans la nuque au niveau du bord supérieur du col de la chemise. Décoloration et ou coloration
apparente non autorisée. La longueur des pattes ne dépassant pas la partie médiane de
l'oreille. Accessoires divers : non autorisés'‘, retient que ce manuel n'instaure aucune
différence entre cheveux lisses, bouclés ou crépus et donc aucune différence entre l'origine
des salariés et qu'il est reproché au salarié sa coiffure, ce qui est sans rapport avec la nature de
ses cheveux.
Il ajoute que si le port de tresses africaines nouées en chignon est autorisé pour le personnel
navigant féminin, l'existence de cette différence d'apparence, admise à une période donnée
entre hommes et femmes en termes d'habillement, de coiffure, de chaussures et de
maquillage, qui reprend les codes en usage, ne peut être qualifiée de discrimination.
L'arrêt énonce encore que la présentation du personnel navigant commercial fait partie
intégrante de l'image de marque de la compagnie, que le salarié est en contact avec la clientèle
d'une grande compagnie de transport aérien qui comme toutes les autres compagnies
aériennes impose le port de l'uniforme et une certaine image de marque immédiatement
reconnaissable, qu'en sa qualité de steward, il joue un rôle commercial dans son contact avec
la clientèle et représente la compagnie et que la volonté de la compagnie de sauvegarder son
image est une cause valable de limitation de la libre apparence des salariés. L'arrêt en déduit
que les agissements de la société Air France ne sont pas motivés par une discrimination
directe ou indirecte et sont justifiés par des raisons totalement étrangères à tout harcèlement.
En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la société Air France avait interdit au salarié
de se présenter à l'embarquement avec des cheveux longs coiffés en tresses africaines nouées
en chignon et que, pour pouvoir exercer ses fonctions, l'intéressé avait dû porter une perruque
masquant sa coiffure au motif que celle-ci n'était pas conforme au référentiel relatif au
personnel navigant commercial masculin, ce dont il résultait que l'interdiction faite à
l'intéressé de porter une coiffure, pourtant autorisée par le même référentiel pour le personnel
féminin, caractérisait une discrimination directement fondée sur l'apparence physique en lien
avec le sexe, la cour d'appel, qui, d'une part, s'est prononcée par des motifs, relatifs au port de
l'uniforme, inopérants pour justifier que les restrictions imposées au personnel masculin
relatives à la coiffure étaient nécessaires pour permettre l'identification du personnel de la
société Air France et préserver l'image de celle-ci, et qui, d'autre part, s'est fondée sur la
perception sociale de l'apparence physique des genres masculin et féminin, laquelle ne peut
constituer une exigence professionnelle véritable et déterminante justifiant une différence de
traitement relative à la coiffure entre les femmes et les hommes, au sens de l'article 14, § 2, de
la directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006, a violé les
textes susvisés.

Gestion du contrat de travail


Chambre sociale, 26 octobre 2022, 20-17.501, M. [J] [V], Vu les articles L. 1233-3 et L.
1235-1 du code du travail, le premier dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2018-217 du 29
mars 2018, le second dans sa rédaction issue de l'ordonnance 2017-1387 du 22 septembre
2017 : Selon le premier de ces textes, constitue un licenciement pour motif économique le
licenciement effectué par un employeur pour un motif non inhérent à la personne du
salarié résultant d'une suppression d'emploi consécutive notamment à la cessation d'activité
de l'entreprise. Selon le second de ces textes, il appartient au juge d'apprécier le caractère réel
et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l'employeur.
Pour prononcer la nullité du licenciement, l'arrêt retient qu'au moment de la notification du
licenciement le 6 décembre 2017, l'employeur était informé de la demande de reconnaissance
de maladie professionnelle par le salarié et de ce que le médecin du travail était saisi par
celui-ci en vue d'une reprise, et que, dès lors, au moment de la notification du licenciement
pour motif économique, l'employeur disposait d'éléments suffisants lui permettant de retenir
que l'état de santé du salarié pourrait faire l'objet d'une inaptitude en lien avec l'activité
professionnelle, et que le véritable motif du licenciement était lié à l'état de santé du salarié.
En se déterminant ainsi, sans rechercher si la cessation d'activité de l'entreprise invoquée à
l'appui du licenciement ne constituait pas la véritable cause du licenciement, la cour d'appel a
privé sa décision de base légale.

Chambre sociale, 26 octobre 2022, 20-17.105, société Oxyria. Est nulle la clause d'un
contrat de travail par laquelle un salarié s'engage à reverser à son employeur les
rémunérations qui lui ont été versées pour des missions pour lesquelles il a été désigné expert
personnellement.

Chambre sociale, 23 novembre 2022, 21-12.125, société Saphif. Vu les articles L. 1332-3,
L. 8252-1 et L. 8252-2 1° du code du travail : Selon le deuxième de ces textes, nul ne peut,
directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque
durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en
France. Selon le troisième, le salarié étranger a droit au titre de la période d'emploi illicite,
au paiement du salaire et des accessoires de celui-ci, conformément aux dispositions légales,
conventionnelles et aux stipulations contractuelles applicables à son emploi, déduction faite
des sommes antérieurement perçues au titre de la période considérée.
Il résulte de ces textes que si l'irrégularité de la situation d'un travailleur étranger constitue
nécessairement une cause objective justifiant la rupture de son contrat de travail exclusive de
l'application des dispositions relatives aux licenciements et de l'allocation de dommages-
intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, elle n'est pas constitutive en soi d'une
faute grave. L'employeur qui entend invoquer une faute grave distincte de la seule irrégularité
de l'emploi doit donc en faire état dans la lettre de licenciement. Seule la faute grave peut
justifier une mise à pied conservatoire et le non-paiement du salaire durant cette période.
Pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un rappel de salaire pour la période
antérieure au licenciement, l'arrêt retient qu'il ressort de la lettre de licenciement que la seule
faute reprochée au salarié est de ne pas avoir produit, en dépit de mises en demeure, un titre
de séjour valable l'autorisant à travailler et que cette absence d'autorisation n'est pas contestée
par l'intéressé, en sorte que l'employeur n'avait d'autre choix que de procéder à son
licenciement. En statuant ainsi, alors qu'elle retenait par ailleurs que l'article L. 8252-2 du
code du travail était applicable et que l'employeur n'avait invoqué aucune faute grave à l'appui
du licenciement, ce dont elle aurait dû déduire que le salarié, en situation d'emploi illicite,
avait droit au paiement du salaire pour la période antérieure à la rupture du contrat de travail,
la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes
susvisés.

Chambre sociale, 23 novembre 2022, 20-19.961 21-10.543, société Karist. Le


licenciement ne peut être rétracté par l'employeur qu'avec l'accord du salarié, peu
important que la rétractation ait été faite à la demande de l'inspecteur du travail d'annuler la
procédure de licenciement engagée et de respecter le statut protecteur. Il en résulte que le juge
judiciaire, quand bien même le licenciement ultérieur du salarié a fait l'objet d'une
autorisation administrative, demeure compétent, sans porter atteinte au principe de la
séparation des pouvoirs, pour apprécier la validité de la rétractation de la mesure de
licenciement notifiée antérieurement.

Chambre sociale, 23 novembre 2022, 21-11.776 21-11.777 21-11.781. société Associated


Press Limited. Aux termes de l'article L. 1224-1 du code du travail, lorsque survient une
modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente,
fusion, transformation de fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en
cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de
l'entreprise. En vertu des articles L. 2414-1 et L. 2421-9 du même code, lorsqu'un salarié
investi d'un mandat représentatif du personnel est compris dans un transfert partiel
d'entreprise ou d'établissement par application de l'article L. 1224-1, le transfert de ce salarié
ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail qui s'assure que le salarié ne
fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire.
L'inspecteur du travail, qui contrôle la matérialité du transfert partiel, l'applicabilité des
dispositions légales ou conventionnelles invoquées dans la demande d'autorisation de transfert
et si le salarié concerné exécute effectivement son contrat de travail dans l'entité transférée,
ainsi que l'absence de lien avec le mandat ou l'appartenance syndicale, ne porte pas
d'appréciation sur l'origine de l'opération de transfert. Il en résulte que le salarié protégé, dont
le transfert du contrat de travail au profit du cessionnaire a été autorisé par l'inspecteur du
travail et qui, à la suite de ce transfert, a été licencié après autorisation de l'autorité
administrative, peut invoquer devant le juge judiciaire, eu égard aux circonstances dans
lesquelles est intervenu le transfert, l'existence d'une fraude aux dispositions de l'article L.
1224-1 du code du travail et solliciter sur ce fondement des dommages-intérêts pour
licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans que cette contestation, qui ne concerne pas le
bien-fondé de la décision administrative qui a autorisé le transfert, porte atteinte au principe
de la séparation des pouvoirs.
La cour d'appel, qui a constaté qu'elle était saisie de demandes des salariés tendant à la
condamnation de la société cédante au paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans
cause réelle et sérieuse en raison d'une fraude aux dispositions de l'article L. 1224-1 du code
du travail, en a exactement déduit que le juge judiciaire était compétent.

Chambre sociale, 23 novembre 2022, 20-23.206, Société Glass Partners Transports. Il


résulte de l'article L. 1221-1 du code du travail que, hors l'existence d'un lien de
subordination, une société faisant partie d'un groupe peut être qualifiée de co-employeur du
personnel employé par une autre s'il existe, au-delà de la nécessaire coordination des actions
économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination
économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette
société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte
totale d'autonomie d'action de cette dernière.
La cour d'appel a d'abord constaté, par motifs propres, qu'à la suite du rachat par la société
Glass Partners Transports de la société Nijman Winnen en février 2010, celle-ci, qui n'avait
plus de client propre, s'était retrouvée sous la totale dépendance économique de la société
belge qui lui sous-traitait des transports et les organisait au travers des ordres de transport, le
salarié, qui était directeur d'exploitation, étant ainsi sous la dépendance des deux responsables
du planning de la société Glass Partners Transports, lesquels prévoyaient les tournées des
chauffeurs salariés de la filiale, allant jusqu'à gérer leurs congés de maladie et prévenant les
clients de leurs heures d'arrivées, de sorte que le directeur d'exploitation n'avait plus de
pouvoir décisionnel. Elle a également relevé que la société Glass Partners Transports s'était
substituée à sa filiale dans la gestion de son personnel dans les relations tant individuelles que
collectives, celle-ci n'ayant plus aucune autonomie dans l'élaboration des tournées des
chauffeurs, leurs plannings, les relations avec les clients et même la gestion des congés de
maladie des chauffeurs ou de leur temps de vote pour les institutions représentatives du
personnel. Elle a enfin retenu, par motifs adoptés, que la gestion financière et comptable de la
filiale était assurée par la société Glass Partners Transports. Elle en a conclu qu'était ainsi
démontrée une ingérence continuelle et anormale de la société mère dans la gestion
économique et sociale de la filiale, allant au-delà de la nécessaire collaboration entre sociétés
d'un même groupe, qui s'était traduite par l'éviction des organes de direction de la société
Nijman Winnen dont faisait partie l'intéressé au profit de salariés de la société Glass Partners
Transports. En l'état de ces constatations, la cour d'appel a ainsi caractérisé une immixtion
permanente de la société mère dans la gestion économique et sociale de la société employeur,
conduisant à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière, ce dont elle a exactement
déduit l'existence d'une situation de coemploi.

Chambre sociale, 23 novembre 2022, 21-16.162. société Solocal. D'une part, aux termes de
l'article L. 1222-6 du code du travail, lorsque l'employeur envisage la modification d'un
élément essentiel du contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à
l'article L. 1233-3, il en fait la proposition au salarié par lettre recommandée avec avis de
réception. La lettre de notification informe le salarié qu'il dispose d'un mois à compter de sa
réception pour faire connaître son refus. A défaut de réponse dans le délai d'un mois, le salarié
est réputé avoir accepté la modification proposée. L'article L. 1233-25 du code du travail
dispose que lorsqu'au moins dix salariés ont refusé la modification d'un élément essentiel de
leur contrat de travail, proposée par leur employeur pour l'un des motifs économiques énoncés
à l'article L. 1233-3 et que leur licenciement est envisagé, celui-ci est soumis aux dispositions
applicables en cas de licenciement collectif pour motif économique. D'autre part, il résulte de
l'article L. 1235-7-1 du code du travail que le juge judiciaire, compétent pour statuer sur les
litiges relatifs à l'application des mesures comprises dans un plan de sauvegarde de l'emploi,
est fondé, lorsque le défaut de validité de l'accord collectif déterminant le contenu du plan de
sauvegarde de l'emploi résulte des motifs de la décision du juge administratif annulant la
décision de validation de cet accord, à écarter l'application des clauses de cet accord.
Il en résulte qu'une modification de contrat de travail intervenue, en application de l'article L.
1222-6 précité, dans le cadre d'un projet de réorganisation ayant donné lieu à l'élaboration
d'un accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi, ne constitue pas un acte
subséquent à cet accord, de sorte que les salariés ayant tacitement accepté cette modification
ne sont pas fondés à se prévaloir du défaut de validité de l'accord collectif déterminant le
contenu du plan de sauvegarde de l'emploi pour obtenir la nullité de leur contrat de travail. Le
moyen, qui soutient le contraire, n'est donc pas fondé en ses trois premières branches. La cour
d'appel ayant ensuite relevé que l'employeur avait informé la salariée légitimement et de
manière licite, des conséquences légales d'un éventuel refus de la proposition de modification
de son contrat de travail et que la négociation et la validation préalables de l'accord
majoritaire portant plan de sauvegarde de l'emploi lui avaient permis d'être parfaitement
éclairée sur les implications de son choix, a, dans l'exercice de son pouvoir souverain, décidé
que le vice du consentement invoqué ne pouvait être retenu.

Chambre sociale, 23 novembre 2022, 21-12.873, Agence économique régionale de


Bourgogne-Franche-Comté. 1) Vu les articles L. 1233-67 et L. 1233-69 du code du travail,
dans leur version issue de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, l'article L. 1234-9 du même
code, dans sa version issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, et l'article 9
du statut des personnels des organismes de développement économique : Il résulte de ces
textes qu'en l'absence de motif économique de licenciement, le contrat de sécurisation
professionnelle n'a pas de cause et l'employeur est alors tenu à l'obligation du préavis et des
congés payés afférents, sauf à tenir compte des sommes déjà versées.
Pour condamner l'employeur à payer au salarié la somme de 45 982 euros à titre d'indemnité
compensatrice de préavis outre les congés payés afférents, l'arrêt retient qu'en application de
la convention collective relative au statut des personnels des organismes de développement
économique du 9 mars 1999, l'intéressé bénéficie d'une indemnité compensatrice de six mois
en sa qualité de directeur. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme l'y invitaient les
conclusions de l'employeur, si celui-ci n'avait pas déjà versé au salarié, dans le cadre de
l'exécution du contrat de sécurisation professionnelle, une somme équivalente à trois mois de
salaire à titre d'indemnité compensatrice de préavis, correspondant à la fraction excédant le
montant de la contribution due à Pôle emploi, la cour d'appel a privé sa décision de base
légale.
2) Vu les articles L. 1234-9 du code du travail, 12 du statut des personnels des organismes de
développement économiques et L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de
l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 : Il résulte des deux premiers textes que
l'indemnité de licenciement, dont les modalités de calcul sont forfaitaires, est la
contrepartie du droit de l'employeur de résiliation unilatérale du contrat de travail. Il résulte
du dernier de ces textes que l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse répare
le préjudice résultant du caractère injustifié de la perte de l'emploi.
Pour condamner l'employeur à payer au salarié la somme de 122 618,56 euros à titre de
dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient qu'en
application de l'article 12 du statut des personnels des organismes de développement
économique du 9 mars 1999, révisé le 12 décembre 2007, l'intéressé bénéfice d'une
indemnisation au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse doublée, étant ajouté
qu'il avait, lors de la rupture de son contrat de travail, une ancienneté de 11 ans 9 mois et 14
jours pour avoir été embauché à compter du 6 mars 2006. En statuant ainsi, alors que l'article
12 des statuts n'est pas relatif aux dommages-intérêts dus en cas de licenciement injustifié
mais prévoit, en ce cas, le doublement de l'indemnité forfaitaire de licenciement, la cour
d'appel a violé les textes susvisés.

Chambre sociale, 7 décembre 2022, 21-16.000, Société d'économie mixte d'aménagement


de la ville de Paris. 1) Il résulte de l'article L. 1234-1 du code du travail, qu'en cas
d'inexécution par le salarié du préavis, l'employeur n'est tenu au paiement d'une indemnité
compensatrice que lorsqu'il a unilatéralement décidé de dispenser le salarié d'exécuter sa
prestation de travail ou lorsque cette inexécution lui est imputable. Selon l'article L. 1231-4
du même code, l'employeur et le salarié ne peuvent renoncer par avance au droit de se
prévaloir des règles du licenciement. La cour d'appel, qui a constaté que la salariée avait
renoncé le 21 avril 2016 à l'exécution du préavis, a exactement retenu que cette renonciation
n'était pas valable comme intervenue avant la notification de son licenciement le 27 mai 2016,
peu important la communication d'un plan de mobilité professionnelle avant cette date.
2) L'employeur est tenu avant tout licenciement économique, d'une part, de rechercher toutes
les possibilités de reclassement existant dans le groupe dont il relève, parmi les entreprises
dont l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de
tout ou partie du personnel, d'autre part, de proposer ensuite aux salariés dont le licenciement
est envisagé tous les emplois disponibles de la même catégorie ou, à défaut, d'une catégorie
inférieure. Il en résulte qu'il ne peut limiter ses recherches de reclassement et ses offres en
fonction de la volonté du salarié, exprimée par avance, en dehors de toute proposition
concrète. Ayant relevé que si la salariée avait indiqué par avance qu'elle bénéficiait d'une
embauche et avait demandé d'enclencher le licenciement, cette circonstance ne pouvait
dispenser l'employeur de ses obligations légales en matière de licenciement pour motif
économique, et fait ressortir qu'il ne lui avait pas proposé les postes disponibles listés dans le
plan de mobilité professionnelle, la cour d'appel a exactement décidé, procédant à la
recherche prétendument omise, qu'il n'avait pas satisfait de façon sérieuse et loyale à son
obligation de reclassement préalable au licenciement.

Protection de la santé du salarié


Chambre sociale, 7 décembre 2022, 21-19.454, Association Aide à domicile aux retraités
Flandre-Métropole. Selon l'article R. 4424-3 du code du travail, lorsque l'exposition des
travailleurs à un agent biologique dangereux ne peut être évitée, elle doit être réduite par la
mise en œuvre de diverses mesures, notamment des mesures de protection collective ou,
lorsque l'exposition ne peut être évitée par d'autres moyens, par des mesures de protection
individuelle. Selon l'article R. 4321-4 du même code, l'employeur met à disposition de ses
salariés, en tant que de besoin, les équipements de protection individuelle appropriés.
La cour d'appel qui a relevé que la fourniture de masques FFP2 et FFP3 n'était pas obligatoire
ou même recommandée dans le secteur de l'aide à domicile au profit de bénéficiaires non
positifs au Covid-19 ou ne présentant pas de symptômes, a pu décider que la mise à
disposition par l'employeur d'un masque FFP2 aux salariés intervenant au domicile d'une
personne positive ou symptomatique était de nature à réduire l'exposition au Covid-19.

Chambre sociale, 7 décembre 2022, 21-12.696, Association Aide à domicile aux retraités
Flandre-Métropole. Aux termes de l'article L. 4111-1, alinéa 1, du code du travail, sous
réserve des exceptions prévues à l'article L. 4111-4, les dispositions de la quatrième partie du
code du travail sont applicables aux employeurs de droit privé ainsi qu'aux travailleurs. Selon
l'article L. 4732-1 du même code, l'inspecteur du travail, lorsqu'il constate un risque sérieux
d'atteinte à l'intégrité d'un travailleur résultant de l'inobservation des dispositions du livre
IV de la quatrième partie du code du travail, peut saisir le juge des référés pour voir ordonner
toutes mesures propres à faire cesser le risque.
Aux termes de l'article R. 4421-1 du même code, les dispositions relatives aux risques
biologiques sont applicables dans les établissements dans lesquels la nature de l'activité peut
conduire à exposer les travailleurs à des agents biologiques. Toutefois, les dispositions des
articles R. 4424-2, R. 4424-3, R. 4424-7 à R. 4424-10, R. 4425-6 et R. 4425-7 ne sont pas
applicables lorsque l'activité, bien qu'elle puisse conduire à exposer des travailleurs,
n'implique pas normalement l'utilisation délibérée d'un agent biologique et que l'évaluation
des risques prévue au chapitre III ne met pas en évidence de risque spécifique. Selon l'article
R. 4421-4 du même code, sont considérés comme agents biologiques pathogènes les agents
biologiques des groupes 2, 3 et 4, dont la liste est fixée par arrêté conjoint des ministres
chargés du travail, de l'agriculture et de la santé. Il résulte du premier de ces textes que toute
personne morale ou entreprise individuelle qui exerce une activité de service à la personne, en
sa qualité d'employeur de droit privé, est soumise aux dispositions relatives à la prévention
des risques biologiques.

Chambre sociale, 7 décembre 2022, 21-23.662, société Ulysse Hervé et fils. Aux termes de
l'article L. 4624-7 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août
2016, si le salarié ou l'employeur conteste les éléments de nature médicale justifiant les
avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail en
application des articles L. 4624-2, L. 4624-3 et L. 4624-4, il peut saisir le conseil de
prud'hommes d'une demande de désignation d'un médecin-expert inscrit sur la liste des
experts près la cour d'appel. L'affaire est directement portée devant la formation de référé.
L'article R. 4624-45 du même code, dans ses dispositions issues du décret n° 2017-1008 du
10 mai 2017, énonce qu'en cas de contestation portant sur les éléments de nature médicale
justifiant les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du
travail mentionnés à l'article L. 4624-7, la formation de référé est saisie dans un délai de
quinze jours à compter de leur notification. Les modalités de recours ainsi que ce délai sont
mentionnés sur les avis et mesures émis par le médecin du travail. La décision de la formation
des référés se substitue aux éléments de nature médicale mentionnés au premier alinéa qui ont
justifié les avis, propositions, conclusions écrites ou indications contestés. Il en résulte que
l'avis émis par le médecin du travail, seul habilité à constater une inaptitude au travail, peut
faire l'objet tant de la part de l'employeur que du salarié d'une contestation devant la
formation de référé du conseil de prud'hommes qui peut examiner les éléments de toute nature
ayant conduit au prononcé de l'avis. En l'absence d'un tel recours, cet avis s'impose aux
parties.

Chambre sociale, 7 décembre 2022, 21-17.927, société Access Assistance. Selon l'article L.
4624-7 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22
septembre 2017, modifiée par la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018, le salarié ou l'employeur
peut saisir le conseil de prud'hommes en la forme des référés d'une contestation portant
sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du
travail reposant sur des éléments de nature médicale en application des articles L. 4624-2, L.
4624-3 et L. 4624-4. Ce texte ajoute que le conseil de prud'hommes peut confier toute mesure
d'instruction au médecin inspecteur du travail territorialement compétent pour l'éclairer sur les
questions de fait relevant de sa compétence et que sa décision se substitue aux avis,
propositions, conclusions écrites ou indications contestées. Selon l'article R. 4624-42 du code
du travail dans ses dispositions issues du décret n° 2016-1908 du 27 décembre 2016, le
médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du travailleur à son poste de travail
que s'il a réalisé au moins un examen médical de l'intéressé, accompagné, le cas échéant, des
examens complémentaires, permettant un échange sur les mesures d'aménagement,
d'adaptation ou de mutation de poste ou la nécessité de proposer un changement de poste, s'il
a réalisé ou fait réaliser une étude de ce poste et une étude des conditions de travail dans
l'établissement et indiqué la date à laquelle la fiche d'entreprise a été actualisée et enfin s'il a
procédé à un échange, par tout moyen, avec l'employeur. Il en résulte que le juge saisi d'une
contestation de l'avis d'inaptitude peut examiner les éléments de toute nature sur lesquels le
médecin du travail s'est fondé pour rendre son avis. Il substitue à cet avis sa propre décision
après avoir, le cas échéant, ordonné une mesure d'instruction.

2
Getting
There

Cas pratiques et corrigés. Relations individuelles

1) Mme Roselyne a été mandatée par M. Robert, agent général d'assurance, en qualité de
sous-agent d'assurances, à compter du 1er avril 1988. M. Robert a notifié à Mme Roselyne la
fin du « mandat de sous-agent » à effet du 31 décembre 2021. Revendiquant l'existence d'un
contrat de travail, Mme Roselyne souhaite saisir la juridiction prud'homale.

Elle vous précise ce qui suit : elle effectue, au-delà des tâches de prospection et
d'encaissement ponctuel de primes d’assurance, des tâches de secrétariat, de gestion des
contrats et des sinistres, sous les directives et le contrôle de M. Robert avec les moyens mis à
disposition par ce dernier. Mme Roselyne travaillait au sein de l'agence de Paris et de l’agence
de Meaux, en ayant à sa disposition des moyens téléphoniques et informatiques la reliant à
l'agence de Paris, commandés par M. Robert et qu'elle a dû restituer à la suite de la rupture du
contrat, ainsi que des supports publicitaires et administratifs mis à sa disposition par la
compagnie d'assurances.

Mme Roselyne produit, en outre, un courrier comportant les objectifs pour l'année 2021,
annexé au contrat de sous-agent, ainsi que des lettres de M. Robert contenant la "synthèse
d'entretien individuel et lettre de mission" indiquant qu'"un point régulier sera effectué à
chaque réunion mensuelle" et qui concluent que : "je souhaite que les résultats dépassent les
objectifs fixés." "les résultats de l'agence et en particulier les tiens. (...)" je te reproche de ne
pas respecter l'objectif fixé. Ce qui me gêne, c'est l'activité commerciale de ton point de vente
(...). Je te rappelle que nous avons signé ensemble, en début d'année, un objectif pour 2021
que je joins à la présente lettre. Nous sommes loin du compte (...). Le ressenti que j'ai de ce
qui précède, c'est l'éloignement de plus en plus flagrant vis à vis de l'agence principale de
Paris, peu de présence à nos réunions, du manque de maîtrise par rapport aux nouveaux
produits et de la méconnaissance des offres commerciales" ; "il est bien évident, dans la
conjoncture actuelle que cela ne peut continuer ainsi. (...) Il reste 4 mois pour obtenir les
objectifs fixés (...)".
Que pouvez-vous conseiller à Mme Roselyne au sujet de l’existence d’un contrat de travail ?

er
2) Mme Laurent a travaillé, à compter du 1 octobre 1993, en qualité de reporter pigiste pour
le compte de la société Luron, agence de presse. Elle dispose d'une carte de presse depuis
1987. Elle bénéficie d'une carte d'identité de journaliste professionnel. Le 31 mars 2022, la
société lui a adressé une lettre lui indiquant que ses besoins ne justifiaient plus de recourir aux
piges qu'elle pouvait lui proposer. Elle exerçait sa profession pour le compte de cette agence
de presse contre rémunération : elle recevait chaque mois un salaire fixe quelle que soit la
quantité d'articles rédigés notamment à compter de 2005 et elle bénéficiait auprès de l’agence
d'un compte épargne salariale abondé par cette dernière.

Mme Laurent a adressé divers courriels à des managers de l'agence entre décembre 2021 et
février 2022 dans lesquels elle posait à son interlocuteur les questions suivantes : "Pourriez-
vous me dire quelles sont les directives rédactionnelles pour les semaines à venir" (courriel du
20 décembre 2021) ; "Si tu n'as trouvé la gentillesse pour me répondre à tous les mails
envoyés au fil de ses 2 derniers mois te demandant sur quels sujets tu souhaiterais que je
travaille" (courriel du 10 février 2022) ; "Pourrais-tu m'orienter sur les sujets à traiter, à
préparer, à creuser pour le service des sports dans les semaines à venir" (courriel du 12 février
2022) ; "Je me trouve face à une problématique que je vous demande de trancher" (courriel du
15 février 2022).

Mme Laurent souhaite saisir la juridiction prud'homale à l'effet de faire constater que la
relation de travail entre l'agence et elle est une relation de travail salarié à durée indéterminée
et démontrer qu’elle a le statut de journaliste professionnel. Que pouvez-vous lui conseiller ?

3) M. Alfred a été engagé par la société SSP en qualité d'agent de prévention et de sécurité,
aux termes de plusieurs contrats à durée déterminée successifs à compter du 1er juillet 2009
jusqu'au 30 juin 2021. Les parties ont conclu une transaction le 5 janvier 2022.

Après avoir employé le salarié selon plusieurs contrats à durée déterminée successifs
ininterrompus pour accroissement temporaire d'activité, l'employeur s'était engagé
er
unilatéralement le 1 octobre 2021 à l'embaucher par contrat à durée indéterminée à compter
du 1er novembre 2021. A l'issue toutefois d’un nouveau contrat à durée déterminée d’un mois
conclu à cette date, les parties ont conclu une transaction le 5 janvier 2022 aux termes de
laquelle le salarié « s'estime rempli de ses droits relatifs à l'exécution et la rupture de tous les
contrats de travail à durée déterminée dont il reconnait le bien-fondé et la régularité, et
renonce notamment à contester la qualification de ces contrats, moyennant le versement de la
somme de 500 euros ».

Contestant la validité de la transaction, le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 28


janvier 2022 et a obtenu gain de cause le 30 juin 2022, avec une annulation de plein droit de
la transaction. Le salarié prétendait que l'employeur lui devait a minima la somme de 4
341,54 euros nets sur l'ensemble des mois sur lesquels il avait effectué des heures
supplémentaires. L’employeur vient vous consulter. Il souhaite interjeter appel de ce
jugement. Que pouvez-vous lui indiquer et conseiller ?

4) M. Hubert a été engagé par la société Roland, à compter du 1er janvier 2002. Son contrat
de travail prévoit une rémunération comprenant une partie fixe et une partie variable sur
objectifs. Invoquant la définition tardive de ses objectifs et un non-paiement de l'intégralité de
ses primes d'objectif sur les années 2020 et 2021 ainsi qu'un harcèlement moral, le salarié
souhaite saisir la juridiction prud'homale. Il vous demande conseil. L’employeur lui reproche
sa mauvaise humeur à la suite de l'arrivée de son nouveau supérieur hiérarchique dont il avait
espéré obtenir le poste. Le salarié vous indique ce qui suit.

D’une part, son contrat de travail initial avait prévu un salaire mensuel de base brut de 10 500
€ et une partie variable constituée d'une prime d'objectif de 42 000 euros par an liée à la
réalisation à 100 % des objectifs définis par sa hiérarchie. A la demande du salarié, un
avenant à son contrat de travail a prévu une modification de sa paye, augmentant la
rémunération mensuelle de base à la somme de 12 066,34 € et diminuant le montant de la
prime d'objectifs à 38 000 € pour un exercice annuel et pour des objectifs atteints à 100 % qui
précise « vos objectifs et les critères afférents au calcul de votre part variable sont définis et
communiqués par votre hiérarchie ».

D’autre part, le salarié reproche à son employeur un harcèlement moral par mise à l'écart
progressive et déclassement ces derniers mois. Dans les années 2017 et 2018, le salarié a
participé à la création d’un centre de service au Maroc et en assumait la responsabilité. A
compter de fin 2019, la société a décidé de mettre un terme à sa mission au Maroc, sans
donner au salarié de motifs à ce changement d'affectation, excepté une « nouvelle
organisation de l’entreprise ». Le salarié se sent victime d'un déclassement et ses aspirations à
retrouver un poste de directeur opérationnel sont régulièrement déçues ; il se plaint d'un
isolement résultant notamment de son absence de participation à des réunions de cadres en
2022, à l'absence de bureau et d'assistante ; il se plaint de ne pas être invité au meeting
« group management » de 2022 et de ne pas être tenu informé des nominations ou événements
de l'entreprise. Il vous signale l'envoi par l’employeur de nombreux courriels professionnels
durant ses congés payés, en méconnaissance du droit au repos du salarié. Il vous indique que
son dossier médical mentionne une souffrance au travail qui est manifestement liée au ressenti
de ce qu'il vit comme un déclassement et une mise à l'écart, les certificats médicaux
mentionnant qu'il se plaint du manque de reconnaissance de l'entreprise et « se sent mis au
placard ». Que pouvez-vous lui conseiller au sujet du paiement de sa rémunération et sur le
grief de harcèlement moral ?

5) Mme Jean a été engagée le 5 septembre 2012 en qualité de gestionnaire par la société
Lubeck & associés, en tant que cadre. Son contrat de travail contient une clause soumettant la
salariée au régime du forfait en jours. La relation de travail est régie par la convention
collective nationale des sociétés financières. L'article 7 du contrat de travail intitulé « Durée
du travail » stipule que la salariée « appartient à la catégorie des cadres autonomes relevant du
forfait jours avec 217 jours par an ».

La convention collective nationale prévoit, en premier lieu, que la charge de travail confiée ne
peut obliger un cadre à excéder une limite de durée quotidienne de travail effectif fixée à 10
heures ni excéder une limite de durée hebdomadaire ; le cadre dispose d'une grande liberté
dans la conduite ou l'organisation des missions correspondant à sa fonction et dans la
détermination du moment de son travail ; le cadre et l'employeur examinent ensemble, afin
d'y remédier, les situations dans lesquelles ces dispositions ne peuvent pas être respectées.
Toutefois, la société n'a pas organisé d'entretien annuel individuel avec Mme Jean.

Après avoir démissionné le 2 juillet 2022, la salariée souhaite saisir la juridiction prud'homale
aux fins notamment de faire prononcer la nullité de la clause de forfait en jours et d'obtenir un
rappel d'heures supplémentaires. Que pouvez-vous lui conseiller ?

6) M. Dimitri a été engagé par la société Lullaby France Sports et Randonnées à compter du
24 septembre 2003 pour occuper un emploi de responsable de rayon, statut cadre. Il souhaite
saisir la juridiction prud'homale en ce qui concerne le paiement de ses heures de travail,
d'heures supplémentaires, de congés payés afférents et d'une indemnité pour absence de
contrepartie obligatoire en repos pour les années 2019 à 2021.
Le salarié a d'abord travaillé dans l'établissement de Bordeaux du 24 septembre 2003 au 31
octobre 2010, où il a été successivement responsable de l'univers « eau », de l'univers « eau et
sports collectifs » et de l'univers « montagne », puis à compter du 14 novembre 2010 dans
l'établissement de Versailles où il est désormais responsable du rayon « randonnée ».

Le salarié produit aux débats pour les années 2019 à 2021, un décompte fondé sur une
amplitude horaire. Que pouvez-vous lui conseiller ?

Corrigés

1)Dossier Roselyne

A.Rappel succinct des faits

Mme Roselyne a été mandatée par M. Robert, agent général d'assurance, en qualité de sous-
agent d'assurances, à compter du 1er avril 1988. M. Robert a notifié à Mme Roselyne la fin du
« mandat de sous-agent » à effet du 31 décembre 2021. Revendiquant l'existence d'un contrat
de travail, Mme Roselyne souhaite saisir la juridiction prud'homale.

Elle effectue, au-delà des tâches de prospection et d'encaissement ponctuel de primes


d’assurance, des tâches de secrétariat, de gestion des contrats et des sinistres, sous les
directives et le contrôle de M. Robert avec les moyens mis à disposition par ce dernier.

Mme Roselyne travaillait au sein de l'agence de Paris et de l’agence de Meaux, en ayant à sa


disposition des moyens téléphoniques et informatiques la reliant à l'agence de Paris,
commandés par M. Robert et qu'elle a dû restituer suite à la rupture du contrat, ainsi que des
supports publicitaires et administratifs mis à sa disposition par la compagnie d'assurances.

Que peut-on conseiller à Mme Roselyne au sujet de l’existence d’un contrat de travail ?

B.La question de droit

Existe-t-il un lien de subordination entre cette dame et M. Robert et le conseil de


prud’hommes est-il compétent dans ce dossier ?

C.La réponse en droit

Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un
employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et
de sanctionner les manquements, que le travail au sein d'un service organisé peut constituer
un indice du lien de subordination (V. par ex., Chambre sociale, 17 novembre 2021, 20-
13.950).
La position retenue par la Cour de cassation est nette : ce lien « est caractérisé par l'exécution
d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des
directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements du subordonné »
sachant que « le travail au sein d'un service organisé peut constituer un indice du lien de
subordination lorsque l'employeur détermine unilatéralement les conditions d'exécution du
ème
travail » (V. par ex., Cass. civ. 2 25 mai 2004, n° 02-31.203 : Bull. 2004, II, n° 233 ; Cass.
ème
civ. 2 17 février 2022, n° 20-19.493). Cette définition est identique au sein de la Chambre
ème
sociale et de la 2 Chambre civile.

Il faut appliquer dans cette affaire la définition du lien de subordination : justifie légalement
sa décision une cour d'appel qui, pour qualifier de contrat de travail la relation entre un
chauffeur VTC et la société utilisant une plate-forme numérique et une application afin de
mettre en relation des clients et des chauffeurs exerçant sous le statut de travailleur
indépendant, retient :

1°) que ce chauffeur a intégré un service de prestation de transport créé et entièrement


organisé par cette société, service qui n'existe que grâce à cette plate-forme, à travers
l'utilisation duquel il ne constitue aucune clientèle propre, ne fixe pas librement ses tarifs ni
les conditions d'exercice de sa prestation de transport,

2°) que le chauffeur se voit imposer un itinéraire particulier dont il n'a pas le libre choix et
pour lequel des corrections tarifaires sont appliquées si le chauffeur ne suit pas cet itinéraire,
3°) que la destination finale de la course n'est parfois pas connue du chauffeur, lequel ne peut
réellement choisir librement, comme le ferait un chauffeur indépendant, la course qui lui
convient ou non,

4°) que la société a la faculté de déconnecter temporairement le chauffeur de son application à


partir de trois refus de courses et que le chauffeur peut perdre l'accès à son compte en cas de
dépassement d'un taux d'annulation de commandes ou de signalements de "comportements
problématiques", et déduit de l'ensemble de ces éléments l'exécution d'un travail sous
l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en
contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements et que, dès lors, le statut de
travailleur indépendant du chauffeur était fictif (Chambre sociale, 4 mars 2020, 19-13.316)

D.La réponse en fait

En l’espèce, Mme Roselyne effectue, au-delà des tâches de prospection et d'encaissement


ponctuel de primes, des tâches de secrétariat, de gestion des contrats et des sinistres, sous les
directives et le contrôle de M. Robert, dans le cadre d'un service organisé, avec les moyens
mis à disposition par ce dernier. Il faut en déduire l'existence d'un lien de subordination
caractérisant un contrat de travail puisque celui-ci lui confie des tâches professionnelles,
contrôle son travail et a le pouvoir de la sanctionner.

Arguments à écarter de M. Robert :

- Mme Roselyne organiserait librement son activité, ne serait pas tenue de rendre un
rapport d'activité, au contraire des salariés de l'agence, elle serait conviée à prendre
part aux réunions organisées si elle le souhaitait, ses objectifs ne seraient pas imposés
par M. Robert mais négociés entre eux et n’auraient donc aucun caractère obligatoire,
de sorte que leur existence ne suffirait pas à caractériser un lien de subordination ;

- le mandat est la convention par laquelle une personne, le mandant, confère à une autre
personne, le mandataire, le pouvoir d'accomplir, en son nom et pour son compte, un ou
plusieurs actes juridiques ; le mandataire devant rendre compte à son mandant de sa
gestion, ce dernier est en droit de contrôler son activité ;

- Mme Roselyne aurait revendiqué tout au long des trente années de collaboration avec M.
Robert sa totale indépendance à l'égard de ce dernier et elle se serait démarquée à
plusieurs reprise des propositions de son mandant, ce qui ne lui aurait pas été possible
si un lien de subordination les liait. Arguments infondés.

2)Dossier Laurent

A.Rappel succinct des faits

er
Mme Laurent a travaillé, à compter du 1 octobre 1993, en qualité de reporter pigiste pour le
compte de la société Luron, agence de presse. Elle dispose d'une carte de presse depuis 1987.
Elle bénéficie d'une carte d'identité des journalistes professionnels. Le 31 mars 2022, la
société lui a adressé une lettre lui indiquant que ses besoins ne justifiaient plus de recourir aux
piges qu'elle pouvait lui proposer.

Elle exerçait sa profession pour le compte de cette agence de presse contre rémunération : elle
recevait chaque mois un salaire fixe quelle que soit la quantité d'articles rédigés notamment à
compter de 2005 et elle bénéficiait auprès de l’agence d'un compte épargne salariale abondé
par cette dernière.

Mme Laurent souhaite saisir la juridiction prud'homale à l'effet de faire constater que la
relation de travail entre l'agence et elle est une relation de travail salarié à durée indéterminée
et démontrer qu’elle a le statut de journaliste professionnel. Que peut-on lui conseiller ?

Deux questions de droit doivent être résolues :


- le problème d’un éventuel statut de journaliste professionnel ;
- le problème de l’existence éventuelle d’un lien de subordination entre l’intéressée et
l’entreprise.

B.Question de droit n°1 : le problème du statut de journaliste professionnel

1.La question de droit

Mme Laurent a-t-elle le statut de journaliste professionnel au sens du Code du travail ?


2.La réponse en droit

Selon les articles L. 7111-3 et L. 7112-4 du code du travail, est journaliste professionnel toute
personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l'exercice de sa profession dans
une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de
presse et qui en tire le principal de ses ressources.

Le correspondant, qu'il travaille sur le territoire français ou à l'étranger, est un journaliste


professionnel s'il perçoit des rémunérations fixes et remplit les conditions prévues ci-dessus.

Toute convention par laquelle une entreprise de presse s'assure, moyennant rémunération, le
concours d'un journaliste professionnel est présumée être un contrat de travail. Cette
présomption subsiste quels que soient le mode de la rémunération ainsi que la qualification
donnée à la convention par les parties (article L. 7112-1 ; Chambre sociale, 17 novembre
2021, 20-15.598 ; article L. 7112-1 du même code).

Dans le cas où l'employeur n'est pas une entreprise de presse ou une agence de presse, la
qualité de journaliste professionnel peut être retenue si la personne exerce son activité dans
une publication de presse disposant d'une indépendance éditoriale.

L'attribution d'un numéro à la publication par la commission paritaire des publications et


agences de presse, destiné uniquement à faire bénéficier la revue de tarifs postaux et
d'abattements fiscaux relevant du régime économique de la presse, ne peut faire présumer que
la publication dispose d'une indépendance éditoriale (Cass. soc. 2 mars 2022, Conseil national
de l'enseignement agricole privé, n° 20-13.272)

3.La réponse en fait

En l’espèce, ne peut avoir la qualité de journaliste professionnel, permettant de se prévaloir de


la présomption de contrat de travail prévue par l'article L. 7112-1 du même code, que celui
qui apporte à l'entreprise de presse une collaboration constante et régulière et qui en tire
l'essentiel de ses ressources.

Peu importe qu’elle dispose d'une carte de presse, qu'elle bénéficie d'une carte d'identité des
journalistes professionnels, qu'elle exerce sa profession pour le compte de l'agence contre
rémunération, qu'elle reçoive chaque mois un salaire fixe quelle que soit la quantité d'articles
rédigés, qu'elle bénéficie auprès de la société d'un compte épargne salariale abondé par
l'agence.

Il faut rechercher si Mme Laurent tire le principal de ses ressources de son activité auprès
d'entreprises de presse. L’énoncé du cas est assez lapidaire sur cette question. Il faut donc
conseiller à cette dame d’établir, à partir de documents probants, que ses ressources
professionnelles proviennent pour l’essentiel de son activité accomplie pour l’agence.

B.Question de droit n°2 : le problème du lien de subordination entre Mme Laurent et


l’agence de presse
1.La question de droit

Existe-t-il un lien de subordination entre l’entreprise de presse et Mme Laurent ?

2.La réponse en droit

Sur le fondement de l'article L. 1221-1 du code du travail, le lien de subordination est


caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de
donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les
manquements de son subordonné (Chambre sociale, 17 novembre 2021, 20-15.598).

Article L. 7112-1 : toute convention par laquelle une entreprise de presse s'assure, moyennant
rémunération, le concours d'un journaliste professionnel est présumée être un contrat de
travail. Cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération
ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties.

3.La réponse en fait

En l’espèce, les courriels en eux-mêmes n’apportent rien de décisif dans ce dossier. Il faut
caractériser l'exercice d'un pouvoir de direction, de contrôle et de sanction de l'agence à
l'égard de Mme Laurent au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail. Le lien de
subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le
pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les
manquements de son subordonné.

Il faut donc conseiller à cette dame d’établir qu’elle devait tenir compte des consignes, des
contrôles et éventuellement des sanctions de l’agence de presse afin d’établir l’existence d’un
contrat de travail.

3)Dossier Alfred

A.Rappel succinct des faits

M. Alfred a été engagé en qualité d'agent de prévention et de sécurité, aux termes de plusieurs
contrats à durée déterminée successifs à compter du 1er juillet 2009 jusqu'au 30 juin 2021.
Les parties ont conclu une transaction le 5 janvier 2022.

Après avoir employé le salarié selon plusieurs contrats à durée déterminée successifs
ininterrompus pour accroissement temporaire d'activité, l'employeur s'était engagé
er
unilatéralement le 1 octobre 2021 à l'embaucher par contrat à durée indéterminée à compter
du 1er novembre 2021.

A l'issue toutefois d’un nouveau contrat à durée déterminée d’un mois conclu à cette date, les
parties ont conclu une transaction le 5 janvier 2022 aux termes de laquelle le salarié « s'estime
rempli de ses droits relatifs à l'exécution et la rupture de tous les contrats de travail à durée
déterminée dont il reconnait le bien-fondé et la régularité, et renonce notamment à contester la
qualification de ces contrats, moyennant le versement de la somme de 500 euros ».

Contestant la validité de la transaction, le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 28


janvier 2022 et a obtenu gain de cause le 30 juin 2022, avec une annulation de plein droit de
la transaction. Le salarié prétendait que l'employeur lui devait a minima la somme de 4
341,54 euros nets sur l'ensemble des mois sur lesquels il avait effectué des heures
supplémentaires L’employeur vient vous consulter. Il souhaite interjeter appel de ce jugement.
Que peut-on indiquer et conseiller à l’employeur ?

B.La question de droit

L'employeur peut-il contester l’annulation de plein droit du protocole transactionnel ? Son but
est évidemment d’éviter d’être condamné à payer au salarié diverses sommes au titre de
l'exécution et de la rupture d'un contrat de travail à durée indéterminée.

C.La réponse en droit

L'article 2044 du Code Civil qui dispose que : "La transaction est un contrat par lequel les
parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat est
rédigé par écrit... ».

Le jugement a vraisemblablement prononcé l'annulation de la transaction au motif que


l'indemnité stipulée était d'un montant dérisoire, tout en écartant l'existence d'un vice du
consentement. Il faut en pratique annuler la transaction en raison du caractère dérisoire de la
concession de l'employeur (Chambre sociale, 4 novembre 2021, 20-16.059).

La jurisprudence précise qu'est nulle la transaction dont l'indemnité transactionnelle est d'un
montant dérisoire (Cass. soc. 18 mai 1999 N° 223).

D.La réponse en fait

En l’espèce, après avoir employé le salarié selon plusieurs CDI successifs ininterrompus pour
accroissement temporaire d'activité, l'employeur s'était engagé unilatéralement à l'embaucher
par CDI.

A l'issue du nouveau CDD, les parties ont conclu une transaction aux termes de laquelle le
salarié s'estimait rempli de ses droits relatifs à l'exécution et la rupture de tous les contrats de
travail à durée déterminée dont il reconnaissait le bien-fondé et la régularité, et renonçait
notamment à contester la qualification de ces contrats, moyennant le versement de la somme
de 500 euros.

La somme stipulée en contrepartie de cette renonciation est manifestement dérisoire. Il vaut


mieux conseiller à l’employeur de ne pas interjeter appel et d’indemniser le salarié.
4)Dossier Hubert

A.Rappel succinct des faits

M. Hubert a été engagé par la société Roland, à compter du 1er janvier 2002. Son contrat de
travail prévoit une rémunération comprenant une partie fixe et une partie variable sur
objectifs. Invoquant la définition tardive de ses objectifs et un non-paiement de l'intégralité de
ses primes d'objectif sur les années 2020 et 2021 ainsi qu'un harcèlement moral, le salarié
souhaite saisir la juridiction prud'homale.

Il nous demande conseil. L’employeur lui reproche sa mauvaise humeur à la suite de l'arrivée
de son nouveau supérieur hiérarchique dont il avait espéré obtenir le poste. Le salarié vous
indique ce qui suit.

D’une part, son contrat de travail initial avait prévu un salaire mensuel de base brut de 10 500
€ et une partie variable constituée d'une prime d'objectif de 42 000 euros par an liée à la
réalisation à 100 % des objectifs définis par sa hiérarchie.

A la demande du salarié, un avenant à son contrat de travail a prévu une modification de sa


paye, augmentant la rémunération mensuelle de base à la somme de 12 066,34 € et diminuant
le montant de la prime d'objectifs à 38 000 € pour un exercice annuel et pour des objectifs
atteints à 100 % qui précise « vos objectifs et les critères afférents au calcul de votre part
variable seront définis et communiqués par votre hiérarchie ».

D’autre part, le salarié reproche à son employeur un harcèlement moral par mise à l'écart
progressive et déclassement ces derniers mois. Il vous indique notamment que son dossier
médical mentionne une souffrance au travail qui est manifestement liée au ressenti de ce qu'il
vit comme un déclassement et une mise à l'écart, les certificats médicaux mentionnant qu'il se
plaint du manque de reconnaissance de l'entreprise et « se sent mis au placard ».

Que peut-on lui conseiller au sujet du paiement de sa rémunération et sur le grief de


harcèlement moral ?

Cette affaire fait apparaitre deux questions juridiques :


- le problème de calcul de la rémunération ;
- l’existence éventuelle d’un harcèlement moral.

B.La question de droit n° 1 : le problème de calcul de la rémunération du salarié


(fixation tardive des objectifs par l’employeur)

1°La question de droit

Invoquant la définition tardive de ses objectifs et un non-paiement de l'intégralité de ses


primes d'objectif sur les années 2020 et 2021, le salarié souhaite saisir la juridiction
prud'homale. La demande du salarié au sujet de sa rémunération est-elle fondée au motif que
les objectifs lui ont été communiqués trop tardivement par l’employeur ?

2°La réponse en droit

Selon l'article 1315, devenu 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation
doit la prouver et, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le
fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Lorsque les objectifs sont définis unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son
pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu'ils sont réalisables et qu'ils ont été
portés à la connaissance du salarié en début d'exercice (V. par ex., Chambre sociale, 17
novembre 2021, 19-24.907).

3°Réponse en fait

En l’espèce, il incombe à l'employeur de démontrer avoir communiqué au salarié ses objectifs


en début d'exercice. Il n’appartient pas au salarié de rapporter la preuve de la communication
tardive des objectifs fixés par sa hiérarchie, afin de ne pas inverser la charge de la preuve.

Lorsque les objectifs sont définis unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son
pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu'ils sont réalisables et qu'ils ont été
portés à la connaissance du salarié en début d'exercice.

Le salarié ne saurait donc être débouté le salarié de sa demande de rappel de salaire au titre de
la rémunération variable. La demande du salarié parait fondée.

C.Question de droit n° 2 : le harcèlement moral est-il caractérisé en l’espèce ?

1°La question de droit

Compte tenu des éléments indiqués par le salarié, celui-ci est-il victime de harcèlement moral
de la part de son employeur ?

2°La réponse en droit

Selon l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés
de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de
travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou
mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En vertu de l'article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à


l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un
emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des
éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne
sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments
objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il
appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en
compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits
matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un
harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail.

Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements
invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par
des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement (V. par ex., Chambre sociale, 17 novembre
2021, 19-24.907). En cas de saisine du conseil de prud’hommes, le juge doit examiner
l'ensemble des faits invoqués par le salarié qui étaye sa demande au titre du harcèlement
moral.

3°La réponse en fait

En l’espèce, le salarié se sent victime d'un déclassement et ses aspirations à retrouver un poste
de directeur opérationnel sont régulièrement déçues ; il se plaint d'un isolement résultant
notamment de son absence de participation à des réunions en 2022, à l'absence de bureau et
d'assistante ; il se plaint de ne pas être invité au meeting « group management » de 2022 et de
ne pas être tenu informé des nominations ou événements de l'entreprise. Il signale l'envoi par
l’employeur de courriels professionnels durant ses congés payés, en méconnaissance du droit
au repos du salarié, etc.

L’employeur doit se justifier en l’espèce, c’est-à-dire expliquer pourquoi il a mis le salarié à


l’écart, par exemple pour des raisons professionnelles.

En cas de saisine du juge par le salarié, la juridiction doit examiner l'ensemble des faits
invoqués par le salarié au titre du harcèlement. Elle ne peut pas rejeter les demandes formées
par le salarié au motif évasif selon lequel aucun élément du dossier n'établirait des faits
répétés laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral. A défaut l’explications de
l’employeur fondées sur des éléments objectifs, le grief de harcèlement parait établi.

5)Dossier Jean

ARappel succinct des faits

Mme Jean a été engagée le 5 septembre 2012 en qualité de gestionnaire par la société Lubeck
& associés, en tant que cadre. Son contrat de travail contient une clause soumettant la salariée
au régime du forfait en jours. La relation de travail est régie par la convention collective
nationale des sociétés financières. L'article 7 du contrat de travail intitulé « Durée du travail »
stipule que la salariée « appartient à la catégorie des cadres autonomes relevant du forfait
jours avec 217 jours par an ».

La convention collective nationale prévoit, en premier lieu, que la charge de travail confiée ne
peut obliger un cadre à excéder une limite de durée quotidienne de travail effectif fixée à 10
heures ni excéder une limite de durée hebdomadaire ; le cadre dispose d'une grande liberté
dans la conduite ou l'organisation des missions correspondant à sa fonction et dans la
détermination du moment de son travail ; le cadre et l'employeur examinent ensemble, afin
d'y remédier, les situations dans lesquelles ces dispositions ne peuvent pas être respectées.
Toutefois, la société n'a pas organisé d'entretien annuel individuel avec Mme Jean.

Après avoir démissionné le 2 juillet 2022, la salariée souhaite saisir la juridiction prud'homale
aux fins notamment de faire prononcer la nullité de la clause de forfait en jours et d'obtenir un
rappel d'heures supplémentaires. Que peut-on lui conseiller ?

B.La question de droit

Faut-il, dans ce dossier, déclarer nulle la clause de forfait en jours et condamner l’employeur
à payer à la salariée un rappel d'heures supplémentaires ?

C.La réponse en droit

Par un arrêt du 12 janvier 2011 (Soc., 12 janvier 2011, pourvoi n° 09-69.679), la Cour de
cassation a statué non pas sur les garanties présentées par une convention collective pour les
salariés ayant conclu une convention individuelle de forfait en jours mais sur la possibilité de
soumettre le salarié partie au litige au régime du forfait en jours, au regard de l'autonomie
dont il dispose.

Par des arrêts du 14 mai 2014 (Soc., 14 mai 2014, pourvoi n° 12-35.033 et Soc., 14 mai 2014,
pourvoi n° 13-10.637), la Cour s'est prononcée sur les dispositions relatives au forfait en jours
de la convention collective nationale des cabinets d'experts-comptables et de commissaires
aux comptes du 9 décembre 1974.

Elle a censuré un arrêt ayant fait application d'une convention individuelle de forfait en jours
pour débouter un salarié de sa demande au titre des heures supplémentaires, en affirmant que
les stipulations conventionnelles n'étaient pas de nature à assurer la protection de la sécurité et
de la santé des salariés concernés et que la cour d'appel aurait dû en déduire que la convention
de forfait était nulle.

Les arrêts précités du 14 mai 2014 ne constituent pas un revirement de jurisprudence. Ils
s'inscrivent dans le cadre d'une jurisprudence affirmant que toute convention de forfait en
jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du
respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires
(Soc., 29 juin 2011, pourvoi n° 09-71.107).

L'article L. 3121-43 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-789 du 20


août 2008, tel qu'interprété par la Cour de cassation à la lumière des articles 17, § 1, et 19 de
la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 et de
l'article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, met en œuvre, d'une
part, les dispositions de cette directive qui ne permettent de déroger aux règles relatives à la
durée du travail que dans le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de
la santé du travailleur, d'autre part, l'exigence constitutionnelle du droit à la santé et au repos
qui découle du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946.

Lorsque les stipulations relatives au forfait en jours de la convention collective applicable ne


sont pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail du salarié concerné restent
raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l'intéressé, et,
donc, à assurer la protection de sa sécurité et de sa santé, la clause de forfait en jours a été
conclue sur le fondement d'un accord collectif ne satisfaisant pas aux exigences légales
précitées.

Le juge peut déclarer nulle la clause du contrat de travail relative au forfait en jours, sans
porter atteinte à une situation juridiquement acquise et ni violer l'article 1er du premier
protocole additionnel à la CEDH (Chambre sociale, 17 novembre 2021, 19-16.756). Si la
clause de forfait en jours est annulée, l’employeur est condamné à payer au salarié des
sommes au titre des heures supplémentaires, des congés payés afférents, de l'indemnité
compensatrice de la contrepartie en repos non pris.

D.La réponse en fait

En l’espèce, la demande de la salariée parait justifiée. Le salarié peut prétendre à ce que les
heures accomplies au-delà de la durée légale du travail soient considérées comme des heures
supplémentaires et rémunérées comme telles.

Le conseil de prud’hommes analyse les pièces produites par chacune des parties, évalue
souverainement l'importance des heures supplémentaires et fixe les créances salariales s'y
rapportant. L'employeur devrait démontrer en l’espèce que des entretiens spécifiques ont été
organisés de nature à permettre le contrôle et le suivi de l'application des dispositions
conventionnelles. Or ces entretiens n’ont pas eu lieu.

Les stipulations de la convention doivent assurer la garantie du respect des durées maximales
de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires ; cette convention collective ou cet
accord collectif doit donc prévoir les catégories de cadre intéressés, les modalités de
décompte des journées ou des demi-journées travaillées et de prise des journées ou demi-
journées de repos, les conditions de contrôle de son application, les modalités de suivi de
l'organisation de travail des salariés concernés, et de l'amplitude de leurs journées d'activité et
de la charge de travail qui en résulte ; il est nécessaire que l'accord collectif prévoit
précisément les modalités de contrôle et de suivi de ces dispositions. Tel ne semble pas être le
cas en l’espèce. La convention de forfait en jours mentionnés dans le contrat de travail (qui
est soumis à la convention collective) est nulle.

Argument de l’employeur devant être écarté : il incomberait au salarié de démontrer que son
employeur n'a pas organisé un entretien annuel individuel portant sur sa charge de travail,
l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie
personnelle et familiale, ainsi que sur sa rémunération, s'il entend se prévaloir de cette
circonstance à l'appui de son action en nullité de la convention de forfait annuel en jours.

6)Dossier Dimitri

A.Rappel succinct des faits

M. Dimitri a été engagé par la société Lullaby France Sports et Randonnées à compter du 24
septembre 2003 pour occuper un emploi de responsable de rayon, statut cadre. Il souhaite
saisir la juridiction prud'homale en ce qui concerne le paiement de ses heures de travail,
d'heures supplémentaires, de congés payés afférents et d'une indemnité pour absence de
contrepartie obligatoire en repos pour les années 2019 à 2021.

Le salarié a d'abord travaillé dans l'établissement de Bordeaux du 24 septembre 2003 au 31


octobre 2010, où il a été successivement responsable de l'univers « eau », de l'univers « eau et
sports collectifs » et de l'univers « montagne », puis à compter du 14 novembre 2010 dans
l'établissement de Versailles où il est désormais responsable du rayon « randonnée ».

Le salarié produit aux débats pour les années 2019 à 2021, un décompte fondé sur une
amplitude horaire. Que pouvez-vous lui conseiller ?

B.La question de droit

La demande en paiement d'heures supplémentaires, de congés payés afférents et d'indemnité


pour absence de contrepartie obligatoire en repos pour les années 2019 à 2021 est-elle
fondée ?

C.La réponse en droit

Selon l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans
un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit
les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis
et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

L'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents


permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des
documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie
réglementaire.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre
d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier
les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par
le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de
besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail
accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-
ci doit être fiable et infalsifiable.
En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient
au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux
heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui
assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses
propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des
exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des
pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence
d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son
calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

La Cour de cassation retient que si le salarié fournit un décompte fondé sur une amplitude
horaire, face à un employeur qui ne produit aucun élément de contrôle de la durée du travail,
la demande du salarié est considérée comme fondée (Chambre sociale, 4 novembre 2021, 19-
23.834).

D.La réponse en fait

En l’espèce, d’une part, le salarié présente vraisemblablement des éléments chiffrés dans son
décompte fondé sur une amplitude horaire pour permettre à l’employeur d’y répondre.
D’autre part, ce dernier ne produit aucun élément de contrôle de la durée du travail. Les juges
ne doivent pas faire peser la charge de la preuve sur le seul salarié.

Est logiquement fondée la demande du salarié au titre des heures supplémentaires, des congés
payés afférents et de l’indemnité pour absence de contrepartie obligatoire en repos. Peu
importe que le salarié communique simplement un décompte fondé sur une amplitude
horaire ; il peut évidemment produire un document répertoriant ses horaires de travail
journaliers mentionnant l’heure à laquelle il a commencé son travail, l’heure à laquelle il a
terminé son travail et son temps de pause. Néanmoins, un décompte fondé sur une amplitude
horaire permet à l’employeur de répondre.

En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient


au salarié d’étayer sa demande par la production d’éléments suffisamment précis pour
permettre à l’employeur d’y répondre et d’apporter, le cas échéant, la preuve des horaires
effectivement réalisés par le salarié. Tel semble être le cas en l’espèce, sous réserve que son
décompte soit suffisamment chiffré.

=>
***************************

Va
2
Ots de droit:La demande rappel d'heures sup
est-elle fondée?

La qualitéde cadre
dirigeant
entrave-t-elle cette demande.

Thomas a til la qualitéde cadre

dirigeant?
Article 1.3111-2 Code du T.

↳ Le salariéayant
la qualitede cadre
dirigeant
west soumis dispositions des titres II et
III.
pas aux

I
Arrêt 31 janvier 2012 seuls
-
les salariés cadre dirigeants
appartenant
à la Direction de l'entreprise he beneficient
pas
des heures sups.

salariés
1)Droit des

au rappel

2) La qualitéde cadre

arrigeant comme

entrave
1) Rappel des faits

Thomas, engagéle 1er octobre 2007-> societeFayat


et

verves
en qualitéde directeur de
fabricate

Le contrat
a pris fin le 27mai2013 sous la
forme licenciement
au
pour faute grave du salarié.

Le salariésouhaite alors réclammer al'entreprise


le paiement
en
rappel alheurs
sups etde conges payes
y afterents.

La societe refuse le paiement


au motif qui est
cadre
dirigeant.

2) Question de droit

La demande d'heures
en paiement sups et
payés y afférents,
de
conges
on salariécadve
dirigeant
est
-elle fondée?

3)La Réponse

En Droit

Article (317-2 exclut


les cadres
dirigeant
du paiement
des nerves sup.

L'article précise 3 conditions de détermination du


statut
de cadre dirigeant.
4 .
responsabilites l'importance
dont
implique une

grande indépendance dans l'organisation de


leur emploian temps.

2. Sont
habilités prendre
à des décisions de façon
largement autonome.

3. Persoiventune rémunération se situant


dans les
les
niveaux plus élevés des systèmes de remmun
pratiques dans leur entreprise ou établissement.

Dans un arrêt Ch. SOC 3 Jan 2012, elle vient


ajouter
42 condition afin de
une restreindre cette exclusion.
En le salarié cadre
effet dirigeant
doit la
participer à

direction de
l'entreprise.
Dans arrêt
cet bien que la salariée

remplissait les 3 conditions, la cour n'a pas retenu

la qualification du statut
de cadre dirigeantan
sens de l'article L. 31-2 c.5 car cette 4condition nietal
pas remplie

Arrêt
* Ch SoC 13 janvier 2009:

Les 3 critères cumulatifs


sont "Le doit
vérifier
juge

précisémentles conditions réelles d'emploi au salarié

concerne peut importantque l'accord collectif


applicable
retiennent
pour la fonction
occupée par le salarié
la qualitéde cadre dirigeant"

La reponse en faits

En l'espèce, le salariesemble avoir exercer des


fonctions
de responsabilitéde facon assez indépendante.
En effet, s'agissant de la were condition.

Position de dirigeant -
gestion du personnel (discp)

autonomie de ses décisions


sans intervent hiérarchique

Salaire le + élevé
EDT libre

Direction de la société seul au site en


:
dirigeant
lien direct avec le président

-
semble montrer qu'il participe la
à directs ae
la soc
Mais he faisant
parti d'aucun conseil de Directo
de la societela considereaw'il
cour
pourrait
assure uniquementle bon fonctionnement
du site

de production sans toutefois


participer la
à

Direction de la sociétédans son ensemble. A quel


cas il ne sera exclu considérécomme
pas
cadre dirigeantau sens de l'art. 1311-2.

La sociétéJunior brothers sera alors tenu de

luipayer ses rappels a'heures sups.

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