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Droit du travail et RH
Missbah HAÏDARA
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ISD
Droit du travail et RH. Relations individuelles
Fiches pratiques
Le juge n’étant pas lié par la qualification des parties, le travailleur pourra obtenir la
requalification de son contrat en contrat de travail sous plusieurs conditions, lesquelles feront
l’objet de cette fiche. Il appartient au travailleur qui invoque un contrat d’en apporter la
preuve, à défaut d’apparence contraire ou de présomption légale.
Ce premier critère ne pose aucune difficulté et sera, la plupart du temps, le plus facile à
caractériser. En effet, toute relation de travail suppose qu’un travail soit effectivement réalisé.
Différenceprestation de Travail/prestation de service
cotisations
hiérarchique
La qualification de contrat
de travail aura un impact.
4 donne des droits au obligations
salarieet pour l'employeur.
en recourant
auxauto entrepreneurs.
de Travail
contrat =
salaire minimum
-conges payés
-Heures sup
-Protection sociale
~ a cances
contrat
de travail=4clauses principales a identification des deux
parties
-Durée au contrat
Objetde la prestation
-
-Rémunération
-activités saisonières
Toutefois, lorsque la prestation de travail n’est pas accomplie dans les conditions normales de
travail, soit parce qu’il s’agit d’évaluer les aptitudes du travailleur avant son embauche (Cass.
soc. 24 octobre 2001), soit parce qu’il s’agit d’un travail réalisé dans le cadre d’une formation
(Cass. soc. 17 octobre 2000), il n’est pas permis de retenir la qualification de contrat de
travail.
2. Une rémunération
Il suffit que la prestation de travail soit réalisée à titre onéreux ce qui n’implique pas
forcément le versement d’un salaire.
Par ailleurs, peu importe la forme de la rémunération (Cass. soc. 3 août 1942).
En effet, la prestation de travail et la rémunération sont des éléments que l’on rencontre dans
tous les contrats à titre onéreux, synallagmatiques à exécutions successives. Il en va autrement
du lien de subordination, lequel est caractéristique du contrat de travail.
Comme pour le contrat de travail, le lien de subordination n’a pas été défini par le législateur.
C’est la jurisprudence qui est venue dégager, encore une fois, plusieurs critères permettant de
le caractériser.
Solution confirmée par l’arrêt Société Générale du 13 novembre 1996. La définition du lien
de subordination dégagée par l’arrêt est la suivante :
« le lien de subordination se caractérise par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un
employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler
l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. »
En d’autres termes, le lien de subordination est caractérisé par la réunion de trois pouvoirs
entre les mains de l’employeur :
– un pouvoir de direction,
– un pouvoir de contrôle,
– un pouvoir disciplinaire (pouvoir de sanction).
Pour caractériser l’existence de ces trois critères, les juges ont recours à la méthode du
faisceau d’indices.
Dans la décision du 13 novembre 1996, la Cour de cassation souligne que le travail au sein
d’un service organisé n’est pas le critère du contrat de travail, mais seulement un indice du
seul critère déterminant du contrat de travail à savoir le lien de subordination.
Actualité :
Soc. 4 mars 2020, n° 19-13.316 : Aff. Uber france, société par actions simplifiée
unipersonnelle ; et autre(s) : lien de subordination : le lien de subordination est caractérisé
par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des
ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son
subordonné. Peut constituer un indice de subordination le travail au sein d’un service organisé
lorsque l’employeur en détermine unilatéralement les conditions d’exécution. Justifie
légalement sa décision une cour d’appel qui, pour qualifier de contrat de travail la relation
entre un chauffeur VTC et la société utilisant une plate-forme numérique et une application
afin de mettre en relation des clients et des chauffeurs exerçant sous le statut de travailleur
indépendant, retient :
1°) que ce chauffeur a intégré un service de prestation de transport créé et entièrement
organisé par cette société, service qui n’existe que grâce à cette plate-forme, à travers
l’utilisation duquel il ne constitue aucune clientèle propre, ne fixe pas librement ses tarifs ni
les conditions d’exercice de sa prestation de transport,
2°) que le chauffeur se voit imposer un itinéraire particulier dont il n’a pas le libre choix et
pour lequel des corrections tarifaires sont appliquées si le chauffeur ne suit pas cet itinéraire,
3°) que la destination finale de la course n’est parfois pas connue du chauffeur, lequel ne peut
réellement choisir librement, comme le ferait un chauffeur indépendant, la course qui lui
convient ou non,
4°) que la société a la faculté de déconnecter temporairement le chauffeur de son application à
partir de trois refus de courses et que le chauffeur peut perdre l’accès à son compte en cas de
dépassement d’un taux d’annulation de commandes ou de signalements de « comportements
problématiques », et déduit de l’ensemble de ces éléments l’exécution d’un travail sous
l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en
contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements et que, dès lors, le statut de
travailleur indépendant du chauffeur était fictif.
Récemment, plusieurs actions en justice ont été intentées contre la société Uber. D’une part,
plusieurs chauffeurs Uber ont intenté une action en requalification de leur contrat Uber en
contrat de travail, ces derniers estimant être des salariés de cette entreprise, d’autre part,
l’URSSAF a introduit une action à la rentrée 2015 afin de faire reconnaître les contrats des
chauffeurs Uber en CDI. Aux États-Unis, des chauffeurs Uber ont intenté une class action en
requalification de leur contrat en contrat de travail et la société Uber a versé une transaction
de 100 millions de dollars pour éviter toute condamnation.
Dans le cadre des contrats qui lient les chauffeurs à Uber, certains indices permettraient de
soutenir qu’il existe un lien de subordination. En effet, chez Uber, il existe un système de
notation des chauffeurs. Lorsque la note est jugée trop basse, les chauffeurs Uber reçoivent un
mail de rappel à l’ordre, qui pourrait s’apparenter à une sanction disciplinaire. Uber a
également la possibilité d’écarter certains chauffeurs ayant une note jugée trop basse ou si la
société Uber estime que ces chauffeurs ne réalisent pas suffisamment de courses. Ces mesures
pourraient se rapprocher d’une procédure de licenciement que les chauffeurs auraient la
possibilité de contester. Par ailleurs, les chauffeurs Uber ne choisissent pas librement les tarifs
pratiqués pour leur prestation, ces tarifs étant fixés par la société Uber. Or, la liberté
d’entreprise, du commerce et de l’industrie voudrait que tout indépendant ait la possibilité de
fixer lui-même le montant de ses prestations. De plus, Uber applique automatiquement une
majoration tarifaire lors des périodes de forte demande, ce qui incite les chauffeurs à se
connecter sur la plate-forme. Ce type de mécanisme pourrait peut-être s’apparenter à
l’application d’une prime exceptionnelle versée aux chauffeurs.
Pour certaines entreprises de livraison de repas, comme Deliveroo, les livreurs ont également
un statut d’indépendant. Toutefois, la question de l’existence d’un lien de subordination se
pose au vu des indices suivants : obligation de porter un uniforme Deliveroo, la société
impose que le livreur travaille 3 jours par semaine, y compris le week-end, les livreurs
doivent effectuer leur prestation dans un délai imposé par Deliveroo…).
Par un arrêt rendu le 28 novembre 2018, la Chambre sociale de la Cour de cassation a statué
pour la première fois sur la qualification du contrat liant un livreur à une plate-forme
numérique.
Pour mémoire et aux termes de l’article L.111-7 I du Code de la consommation, est qualifiée
d’opérateur de plate-forme en ligne toute personne physique ou morale proposant, à titre
professionnel, de manière rémunérée ou non, un service de communication au public reposant
sur (...) la mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente d’un bien, de la fourniture
d’un service ou de l’échange ou du partage d’un contenu, d’un bien ou d’un service.
En l’espèce, la société Take eat easy utilisait une plate-forme numérique ainsi qu’une
application dans le but de mettre en relation des restaurateurs partenaires, des clients passant
commande de repas par le truchement de la plate-forme et des livreurs à vélo exerçant leur
activité sous un statut d’indépendant.
Un coursier a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de requalification de la relation
contractuelle en contrat de travail.
Dans un premier temps, le conseil de prud’hommes puis la cour d’appel s’étaient déclarés
incompétents. Par suite, la liquidation judiciaire de la société Take it easy avait été prononcée
et le liquidateur judiciaire avait refusé d’inscrire au passif de la liquidation les demandes du
coursier en paiement des courses réalisées.
La Chambre sociale de la Cour de cassation devait donc se prononcer sur l’existence d’un lien
de subordination entre un livreur et une plate-forme numérique.
Aux termes de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, le législateur a esquissé une responsabilité
sociétale des plates-formes numériques en insérant les articles L.7341-1 à L.7341-6 dans le
Code du travail prévoyant des garanties minimales pour protéger cette nouvelle catégorie de
travailleurs.
En revanche, le législateur ne s’était pas prononcé sur leur statut juridique et n’avait pas
édicté de présomption de non-salariat.
Dans l’arrêt susvisé, après avoir relevé l’existence d’un système de bonus et de malus
évocateur « de prime abord (...) du pouvoir de sanction que peut mobiliser un employeur », la
cour d’appel avait rejeté la demande de requalification du contrat aux motifs que le coursier
n’était lié à la plate-forme numérique par aucun lien d’exclusivité ou de non-concurrence et
qu’il restait libre chaque semaine de déterminer lui-même les plages horaires au cours
desquelles il souhaitait travailler ou de n’en sélectionner aucune s’il ne souhaitait pas
travailler.
Ce raisonnement est censuré : dès lors qu’ils constataient, d’une part, que l’application
était dotée d’un système de géolocalisation permettant le suivi en temps réel par la
société de la position du coursier et la comptabilisation du nombre total de kilomètres
parcourus, de sorte que le rôle de la plate-forme ne se limitait pas à la mise en relation
du restaurateur, du client et du coursier, et, d’autre part, que la société disposait d’un
pouvoir de sanction à l’égard du coursier, constatations dont il résultait l’existence d’un
pouvoir de direction et de contrôle de l’exécution de la prestation du livreur
caractérisant un lien de subordination, les juges du fond ne pouvaient écarter la
qualification de contrat de travail.
Très vite s’est posée la question du statut des candidats de ces téléréalités.
Cass. soc. 3 juin 2009 ; Cass. soc. 4 avril 2012 ; Cass. soc. 24 avril 2013.
Par un arrêt rendu le 3 juin 2009, la Chambre sociale de la Cour de cassation statue pour la
première fois sur la qualification du contrat liant le participant au producteur de l’un des types
de programmes de « télé- réalité ».
Intitulée « L’île de la tentation », l’émission en cause répondait au concept suivant : « quatre
couples non mariés et non pacsés, sans enfant, testent leurs sentiments réciproques lors d’un
séjour d’une durée de 12 jours sur une île exotique, séjour pendant lequel ils sont filmés dans
leur quotidien, notamment pendant les activités (plongée, équitation, ski nautique, voile, etc.)
qu’ils partagent avec des célibataires de sexe opposé. À l’issue de ce séjour, les participants
font le point de leurs sentiments envers leur partenaire. Il n’y a ni gagnant ni prix ».
Trois des participants de la saison 2003 ont, après la diffusion durant l’été 2003 des épisodes
de la série, saisi la juridiction prud’homale d’une demande de requalification du « règlement
participant » qu’ils avaient signé, en contrat de travail.
Le conseil de prud’hommes, puis la cour d’appel ont accueilli cette demande.
Pour critiquer cette décision, la société de production invoquait les clauses des documents
signés par les participants et soutenait qu’aucun des éléments constitutifs du contrat de travail
n’était caractérisé : ni la prestation de travail, ni le lien de subordination, ni la rémunération.
Le Code du travail ne donne pas de définition du contrat de travail. Il appartient au juge, en
cas de litige sur ce point, de rechercher si les critères du contrat de travail sont réunis.
Répondant à l’argument tiré de la volonté des participants qui, dans l’une des clauses du
document signé, garantissaient « participer au programme à des fins personnelles et non à des
fins professionnelles », la Chambre sociale rappelle que « l’existence d’une relation de
travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles
ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée
l’activité des travailleurs », ce principe résultant d’un arrêt de l’Assemblée plénière de la
Cour de cassation du 4 mars 1983.
Analysant la situation concrète et les conditions du tournage de la saison 3 de L’île de la
tentation, la Chambre sociale relève que les participants avaient l’obligation de prendre
part aux différentes activités et réunions, qu’ils devaient suivre les règles du programme
définies unilatéralement par le producteur, qu’ils étaient orientés dans l’analyse de leur
conduite, que certaines scènes étaient répétées pour valoriser des moments essentiels,
que les heures de réveil et de sommeil étaient fixées par la production, que le règlement
leur imposait une disponibilité permanente, avec interdiction de sortir du site et de
communiquer avec l’extérieur, et stipulait que toute infraction aux obligations
contractuelles pourrait être sanctionnée par le renvoi, et en déduit qu’est ainsi mise en
lumière l’existence d’un lien de subordination, caractérisé par le pouvoir de l’employeur «
de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les
manquements du subordonné ».
N’ayant pas retenu, comme l’y invitait la société de production, l’argument selon lequel
l’activité des participants, limitée à l’exposition de leur personne et de l’intimité de leur vie
privée sous l’œil des caméras ainsi qu’à l’expression de leurs sentiments, ne pouvait
constituer un travail, la Chambre sociale considère que la prestation consistant pour les
participants, pendant un temps et dans un lieu sans rapport avec le déroulement
habituel de leur vie personnelle, à prendre part à des activités imposées et à exprimer
des réactions attendues, distingue une telle activité du seul enregistrement de leur vie
quotidienne. La Chambre sociale sur avis non conforme de l’avocat général approuve par
voie de conséquence la cour d’appel d’avoir considéré que les participants étaient liés par un
contrat de travail à la société de production.
L’apport de cet arrêt réside dans la confirmation que le lien de subordination constitue le «
critère décisif » du contrat de travail et que dès lors qu’elle est exécutée, non pas à titre
d’activité privée, mais dans un lien de subordination, pour le compte et dans l’intérêt d’un
tiers en vue de la production d’un bien ayant une valeur économique, l’activité, quelle qu’elle
soit, peu importe qu’elle soit ludique ou exempte de pénibilité, est une prestation de travail
soumise au droit du travail.
La Cour de cassation vient confirmer sa position dans un nouvel arrêt du 4 avril 2012, arrêt
Îles de la tentation II.
Pour retenir l’existence d’un lien de subordination et donc d’un contrat de travail, elle a pris
en compte les éléments suivants :
– l’existence d’une « bible » prévoyant le déroulement des journées,
– la succession d’activités filmées imposées, de mises en scène dûment répétées, d’interviews
dirigées de telle sorte que l’interviewé était conduit à dire ce qui était attendu par la
production,
– le choix des vêtements par la production,
– des horaires imposés allant jusqu’à 20 heures par jour, l’obligation de vivre sur le site et
l’impossibilité de se livrer à des occupations personnelles,
– l’instauration de sanctions, notamment pécuniaires en cas de départ en cours de tournage,
soit, en définitive, l’obligation de suivre les activités prévues et organisées par la société de
production,
– leurs passeports et leurs téléphones leur avaient été retirés.
La Cour de cassation a ainsi jugé que « la prestation des participants à l’émission avait pour
finalité la production d’un bien ayant valeur économique, la cour d’appel, qui a caractérisé
l’existence d’une prestation de travail exécuté sous la subordination de la société TF1
production, et ayant pour objet la production d’une "série télévisée", prestation consistant
pour les participants, pendant un temps et dans un lieu sans rapport avec le déroulement
habituel de leur vie personnelle, à prendre part à des activités imposées et à exprimer des
réactions attendues, ce qui la distingue du seul enregistrement de leur vie quotidienne ».
Elle a de nouveau confirmé sa position dans un arrêt du 24 avril 2013 à propos de la même
émission de téléréalité.
Elle rappelle d’abord que l’application du droit du travail ne dépend ni de la volonté des
parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention. Un rappel qui est donc
évident, mais nécessaire, car il faut le souligner à nouveau, le droit du travail est un droit
protecteur non seulement pour les salariés, mais aussi pour les employeurs. Par conséquent il
doit s’imposer aux parties qui ne peuvent y déroger par contrat.
Puis la Chambre sociale, en reprenant la méthode du faisceau d’indices, caractérise le lien de
subordination comme elle avait fait dans l’arrêt Île de la tentation de 2009 : « attendu
qu’ayant constaté qu’il existait entre les membres de l’équipe de production et les participants
un lien de subordination caractérisé par l’existence d’une « bible » prévoyant le déroulement
des journées et la succession d’activités filmées imposées, de mises en scène dûment répétées,
d’interviews dirigées de telle sorte que l’interviewé était conduit à dire ce qui était attendu par
la production, que ce lien de subordination se manifestait encore par le choix des vêtements
par la production, des horaires imposés allant jusqu’à 20 heures par jour, l’obligation de vivre
sur le site et l’impossibilité de se livrer à des occupations personnels, l’instauration de
sanctions, notamment pécuniaires en cas de départ en cours de tournage, soit, en définitive,
l’obligation de suivre les activités prévues et organisées par la société de production, que les
participants se trouvaient dans un lien de dépendance à l’égard de la société, dès lors,
séjournant à l’étranger, que leurs passeports et leurs téléphones leur avaient été retirés, que la
prestation des participants à l’émission avait pour finalité la production d’un bien ayant une
valeur économique » la cour d’appel, a donc pu caractériser l’existence d’une prestation de
travail exécuté sous la subordination de la société TF1 production.
Cet arrêt est donc parfaitement cohérent avec la jurisprudence adoptée depuis 2009 voire
même depuis l’arrêt Labanne, et vient en même temps confirmer la position de la Chambre
sociale face aux critiques auxquelles elle a pu faire face. On peut donc le rappeler, le lien de
subordination est le critère essentiel pour qualifier l’existence d’un contrat de travail.
Actualité : Soc. 2 juin 2021, n° 19-18.080 requalification d’un contrat à durée déterminée :
la requalification d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte
que sur le terme du contrat et laisse inchangées les autres stipulations contractuelles. Doit être
cassé l’arrêt qui, pour fixer une rémunération mensuelle de référence et, par suite, les sommes
dues au salarié en conséquence de la requalification de la relation de travail en un contrat à
durée indéterminée, relève que l’examen des bulletins de paie montre qu’à compter du mois
de janvier 2013 l’employeur a baissé le nombre des jours de travail, et cela jusqu’au 31 mai
2015, alors que la détermination des jours de travail, qui résultait de l’accord des parties lors
de la conclusion de chacun des contrats à durée déterminée, n’était pas affectée par leur
requalification en un contrat à durée indéterminée.
L’existence d’un contrat de travail entre les parties constitue une condition première et
essentielle à la compétence prud’homale. Le conseil de prud’hommes ne peut se prononcer
que sur les différends nés à l’occasion du contrat de travail opposant les salariés à leurs
employeurs ou sur les différends entre les salariés. Ainsi, le conseil de prud’hommes est
compétent pour connaître des faits imputés à un salarié et qui se rattachent, par un lien direct,
o
à l’exécution de son contrat de travail (Cass. soc., 29 avr. 2003, n 01-14.540).
Dans le cas où le chauffeur voit son contrat requalifié en CDI et que ce contrat a été rompu, il
peut demander une indemnité forfaitaire de 6 mois de salaire (articles L. 8221-5 et L. 8223-1
du Code du travail).
Dans le cas où le travailleur voit son contrat requalifié en CDI et que ce contrat a été rompu
par l’entreprise, ce dernier a la possibilité de contester cette rupture qui s’analyse en un
licenciement. Le salarié pourra alors réclamer les indemnités suivantes (sous réserve qu’il
remplisse les conditions d’octroi) :
– Une indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– Une indemnité au titre du non-respect de la procédure de licenciement,
– Une indemnité de préavis,
– Une indemnité de licenciement légale ou conventionnelle,
– Une indemnité compensatrice de congés payés.
Actualités jurisprudentielles :
30 juin 2021 soc. Action en paiement d’un rappel de salaire, durée de la prescription,
nature de la créance, prescription triennale, convention de forfait en jours : la durée de
la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, l’action en
paiement d’un rappel de salaire fondée sur l’invalidité d’une convention de forfait en
jours est soumise à la prescription triennale prévue par l’article l. 3245-1 du code du
travail.
(société polyclinique saint françois-saint antoine, pourvoi n° 18-23.932)
30 juin 2021 soc. Contrat de travail, exécution, action en justice, prescription biennale,
contrat de mission, action en requalification, prescription, point de départ : selon
l’article L. 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de
l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, toute action portant sur l’exécution du
contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou
aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.
le délai de prescription d’une action en requalification d’un contrat de mission à l’égard de
l’entreprise utilisatrice en contrat à durée indéterminée fondée sur le motif du recours au
contrat de mission énoncé au contrat a pour point de départ le terme du contrat ou, en cas de
succession de contrats de mission, le terme du dernier contrat. le salarié est en droit, lorsque la
demande en requalification est reconnue fondée, de faire valoir auprès de l’entreprise
utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet
au premier jour de sa mission.
(société xpo supply chain france, pourvoi n° 19-16.655)
30 juin 2021 soc. Contrat de travail à temps partiel, requalification en contrat à temps
plein, demande de rappel de salaire, prescription triennale : au visa de l’article L. 1471-1
du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du
22 septembre 2017, et l’article l. 3245-1 dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14
juin 2013, toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à
compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant
d’exercer son droit. L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à
compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de
l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à
compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des
trois années précédant la rupture du contrat. La durée de la prescription étant déterminée par
la nature de la créance invoquée, la demande de rappel de salaire fondée sur la requalification
d’un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet est soumise à la
prescription triennale de l’article l. 3245-1.
(société a2 propreté, pourvoi n° 19-10.161)
d’une part,
et :
- M. ......
demeurant à ......
n° de Sécurité sociale : ……
de nationalité ......
libre de tout engagement,
d'autre part.
Il a été convenu ce qui suit :
Article 1 – Engagement
Sous réserve des résultats de la visite médicale d’embauche décidant de l’aptitude de M. ……
au poste proposé, M. ...... est engagé par la société ...... en qualité de ...... (qualification ou
titre).
Ce contrat prend effet à compter du ...... (date) à ...... (heures).
La déclaration préalable à l’embauche de M. ...... a été remise à l’URSSAF de …… (préciser
le nom de la ville).
Variante
Dans le cadre du présent contrat, M. …… bénéficie d’un horaire individualisé selon les
modalités suivantes ...... (préciser)
Article 7 - Rémunération
La rémunération mensuelle brute sera de ...... euros pour un horaire mensualisé de ...... heures
(vérifier l’adéquation entre le coefficient hiérarchique et les minima conventionnels).
Pour toute heure effectuée au-delà de ......, une majoration sera accordée et calculée
conformément aux dispositions légales et conventionnelles en vigueur.
L’embauche d’un salarié ne peut intervenir qu’après déclaration nominative accomplie par
l’employeur auprès des organismes de protection sociale désignés à cet effet (URSSAF ou
MSA pour les salariés agricoles), et ce, quelles que soient la durée et la nature du contrat de
travail envisagé. À défaut de déclaration, l’employeur encourt diverses sanctions, notamment
pénales et administratives pour dissimulation d’emploi salarié.
la discrimination
Discrimination violation =
au principe d'égalite
D. directe
-
- D. indirecte
-D.
positive v
-D. négative.
4
domaine de discri principale
-
discrimi à l'embauche
-
rémunération
-formato professionnelle
-
evoluto de carrière
Le contrat
de
peut il
mandat est requalifieen contrat de tro
pas la
cours 34.04
II. LA PROMESSE D’EMBAUCHE
A. La définition
La promesse d’embauche est une offre ferme et définitive adressée par l’employeur au
candidat.
B. Jurisprudence
En revanche, la promesse unilatérale de contrat de travail est le contrat par lequel une partie,
le promettant, accorde à l’autre, le bénéficiaire, le droit d’opter pour la conclusion d’un
contrat de travail, dont l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction sont
déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire ; la
révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n’empêche pas la
formation du contrat de travail promis » (Cass. soc. 21 sept. 2017, n° 16-20.103 et 16-20.104,
2 esp.).
D’après l’article L1221-6 du Code du travail, les questions doivent avoir un lien direct et
nécessaire avec l’emploi (ce critère joue aussi au cours de l’exécution du contrat de travail
quant à l’obligation ou non du salarié de dévoiler des faits de sa vie privée).
Ainsi, le candidat à l’embauche est tenu de répondre de bonne foi aux seules questions qui ont
un lien direct et nécessaire avec l’emploi. À défaut de lien le salarié peut s’abstenir ou mentir
sans que celui puisse par la suite lui être reproché (articles L1121-1 et L1132-1). Le juge doit
établir si le salarié a été victime d’une discrimination.
Limite : il est impossible pour l’employeur de collecter des informations sur la date d’entrée
en France, date de naturalisation, modalités d’acquisition de la nationalité du salarié :
délibération de la CNIL 21 MARS 2002
Le fait pour un candidat de mentir sur ses compétences (diplôme, expérience pro) lors
d’un entretien d’embauche constitue-t-il une faute justifiant le licenciement du salarié ?
Cass. soc. 17 octobre 1995 : lorsque l’information inexacte à un rôle déterminant dans le
recrutement d’un candidat, les tribunaux condamnent la mauvaise foi de ce dernier.
Limite : Cass. soc. 30 Mars 1999 : toutefois lorsque le mensonge n’a aucune incidence sur les
compétences effectives du salarié et qu’il n’a en rien causé un préjudice à l’employeur, alors
le salarié ne peut être licencié.
Les méthodes et techniques d’aide au recrutement ou d’évaluation des candidats doivent être :
– en lien direct et nécessaire avec l’emploi ;
– pertinentes au regard de la finalité poursuivie ;
– portées préalablement à la connaissance du candidat.
En toute hypothèse, les résultats obtenus ne peuvent être divulgués.
Le candidat doit toujours pouvoir demander à avoir accès et à consulter les résultats des tests.
I. LA CLAUSE DE NON-CONCURRENCE
A. Définition
Sur un plan formel, il résulte de la jurisprudence qu’un écrit s’avère nécessaire pour apporter
la preuve de l’existence d’une clause de non-concurrence que pour en établir ses
caractéristiques. Ce socle juridique peut être soit la convention collective et/ou le contrat de
travail.
Dès lors que la convention collective précitée mentionne la faculté pour l’employeur de
prévoir une clause de non-concurrence, il est impératif de stipuler la clause de non-
concurrence dans le contrat de travail ou dans un avenant ultérieur ; à défaut le salarié ne
serait pas tenu de la respecter (Cass. soc. 5 décembre 1974). Il convient de rappeler que
l’insertion d’une clause de non-concurrence dans un contrat de travail constitue une
modification du contrat de travail, requérant à ce titre l’accord du salarié.
B. Conditions de validité
Depuis des arrêts du 10 juillet 2002 (Cass. soc. 10 juillet 2002, n°99-43334), la validité de la
clause de non-concurrence est subordonnée aux conditions cumulatives suivantes :
Cette limitation est très variable et peut être déterminée en tenant compte de l’ensemble des
autres critères de la clause (sous réserve du respect des éventuelles dispositions
conventionnelles en ce sens). À titre indicatif, dans l’hypothèse d’une exacte symétrie entre
l’activité de l’entreprise et celle du salarié, la clause devrait nécessairement être très limitée
dans le temps ; en revanche, lorsque les fonctions exercées par le salarié mettent en œuvre un
savoir-faire ou une technicité indépendante de l’activité exercée par l’entreprise (notamment
des fonctions de cadres de direction), la clause peut être très étendue dans le temps et dans
l’espace.
En effet, pour être valable, une clause de non-concurrence doit laisser au salarié la possibilité
d’exercer normalement l’activité qui lui est propre ; à défaut, jugé comme étant excessif, son
périmètre pourrait être réduit par le juge. Au vu de la jurisprudence rendue en ce domaine, la
qualification professionnelle du salarié est prise en compte pour déterminer si le salarié peut
exercer normalement ou non l’activité qui lui est propre.
Pour déterminer le montant de la contrepartie financière, peut être mis en œuvre le principe de
proportionnalité en prenant en compte les autres critères (durée, espace…) de la clause.
En effet, cette contrepartie est destinée à compenser le préjudice subi par le salarié qui voit sa
liberté de travailler restreinte. Son montant doit être proportionnel à ce préjudice et aux
revenus antérieurs du salarié : Cass. soc. 24 avril 2013.
La cour d’appel a considéré que le salarié qui démissionne et celui qui signe une rupture
conventionnelle manifestent l’un et l’autre une même intention de quitter l’entreprise. Elle a
donc appliqué le taux de 10 % et non celui de 25 %.
Le 9 avril 2015, la Cour de cassation affirme qu’en statuant ainsi, alors que doit être réputée
non écrite la minoration par les parties, dans le cas d’un mode déterminé de rupture du contrat
de travail, de la contrepartie pécuniaire d’une clause de non-concurrence, la cour d’appel, qui
a refusé de faire application de la contrepartie de 25 %, laquelle n’est pas susceptible de
réduction par le juge et ouvre droit à congés payés, a violé le principe fondamental de libre
exercice d’une activité professionnelle.
Les modalités de versement peuvent être librement déterminées par les parties (soient
versement unique ou périodique).
➢ Remarque
N’étant pas une clause pénale, elle ne peut être révisée par le juge.
Action en nullité fermée à l’employeur, dès lors qu’il s’agit d’une nullité relative, ouverte au
seul salarié (Cass. soc. 24 février 1982, n°80-40283). Si le juge fait droit à la demande de
nullité, la clause de non-concurrence est considérée comme n’ayant jamais existé ; par
conséquent, si le salarié est délié de son obligation de non-concurrence, il perd le droit à
contrepartie, mais pourra toutefois conserver la contrepartie perçue pour toute la période
précédant l’annulation. En cas d’une clause de non-concurrence illicite, celui-ci peut, outre la
nullité, obtenir des dommages intérêts qu’il ait ou non respecté la clause de non-concurrence.
– La révision de la clause par le juge :
Si le juge estime que la clause est excessive, bien qu’elle respecte les conditions de validité
précitées il pourra modifier la clause, notamment son secteur géographique, durée, activités,
listes des concurrents (Cass. Soc. 18 septembre 2002, n°00-42904). Cette révision peut
notamment intervenir dans l’hypothèse où la clause figurant au contrat de travail est
incompatible avec les stipulations de la convention collective ou encore lorsque le salarié a
commis un acte de concurrence particulièrement caractérisé au détriment de son ancien
employeur (en général, exercice de l’activité concurrente dans un délai très court et dans un
secteur géographique très court).
Pour caractériser une violation de la clause de non-concurrence et des clauses pénales, seuls
pourraient être retenus des faits de concurrence postérieurs à la rupture du contrat de travail.
Parfois fixés à l’avance dans une clause pénale, la clause pénale étant entendue comme une
disposition prévoyant que si le salarié ne respecte pas son obligation de non-concurrence, il
devra payer à l’entreprise une somme forfaitaire.
La clause de dédit-formation a pour objet d’exiger, de la part d’un salarié ayant bénéficié
d’une formation entièrement financée par l’entreprise, de rester un certain temps à son service
et d’obliger le salarié à restituer les frais de formation engagés en cas de départ anticipé de
l’entreprise.
Par un arrêt du 21 mai 2002, la Cour de cassation s’était déjà prononcée sur ses conditions de
validité en jugeant que, pour être licite, la clause :
– devait constituer la contrepartie d’un engagement pris par l’employeur d’assurer une
formation entraînant des frais réels au-delà des dépenses imposées par la loi ou la
convention collective ;
– que le montant de l’indemnité versé par le salarié en cas de départ prématuré devait
être proportionné aux frais de formation engagés ;
En effet, toute action de formation par un salarié pour assurer son adaptation au poste de
travail constitue un temps de travail effectif et donne lieu pendant sa réalisation au maintien
par l’entreprise de la rémunération. Il en résulte que la clause de dédit-formation, qui prévoit
qu’en cas de départ prématuré le salarié devra rembourser les rémunérations qu’il a perçues
durant sa formation, est nulle.
Traitée à part dans une autre fiche (V. plus loin). S’y reporter.
Comme il a été vu précédemment, toute clause insérée dans un contrat de travail qui se révèle
être attentatoire à un droit ou une liberté fondamentale doit impérativement répondre à deux
conditions successives et cumulatives : elle doit être « justifiée par la nature de la tâche à
accomplir » et « proportionnée au but recherché », l’employeur devant ainsi apporter la
preuve que l’exercice normal de ces droits engendrerait pour l’entreprise un trouble
caractérisé.
C’est une tentation que l’on comprend évidemment lorsque le poste occupé s’accompagne de
périodes d’astreinte ou que, sans comprendre effectivement une obligation à des astreintes, il
peut conduire à des interventions d’urgence du salarié. Il reste que cette tentation doit être
conciliée avec le droit à la vie privée du salarié, lequel comporte le droit de choisir librement
son domicile.
Les clauses de résidence sont ainsi encadrées de longue date par la jurisprudence depuis
l’arrêt dit Spileers (Cass. soc. 12 janvier 1999, pourvoi n° 96-40.755) et s’insèrent parmi les
libertés dites accessoires, par opposition aux libertés fondamentales ou absolues (sur la
distinction, voir ici), qui admettent des restrictions aux libertés pour autant qu’elles soient
justifiées par « la nature de la tâche à accomplir » et qu’elles soient « proportionnées au but
recherché ».
Il reste que, jusqu’à présent, la jurisprudence admettait les clauses de résidence pour autant
qu’elles étaient indispensables à la « protection des intérêts légitimes de l’entreprise et
proportionnées, compte tenu de l’emploi occupé, au but recherché ».
Cass. soc. 28 février 2012 : « attendu que toute personne dispose de la liberté de choisir son
domicile et que nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et
collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir
et proportionnées au but recherché. »
En l’espèce, la salariée avait été embauchée par une association hébergeant des majeurs
protégés. Son contrat de travail prévoyait qu’elle devait résider à moins de 200 m de
l’association. La salariée n’était soumise à aucune heure d’astreinte et ses horaires étaient
fixes. Néanmoins, son contrat de travail prévoyait des « heures volantes » aux termes
desquelles la salariée pouvait être amenée à intervenir en urgence au sein de l’association ;
d’où la proximité souhaitée par l’employeur entre le lieu de résidence de la salariée et
l’établissement de l’association.
Se référant à la jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation, la cour d’appel
avait estimé que la clause de résidence était « indispensable à la protection des intérêts
légitimes de l’association et des personnes auprès desquelles la salariée a pour objet
d’intervenir et proportionnée, compte tenu de l’emploi occupé, au but recherché ».
La Chambre sociale censure l’arrêt de la cour d’appel au visa de l’article 8 de la Conv. EDH,
de l’article 9 du Code civil, protégeant le droit à la vie privée, et de l’article L 1121-1 du Code
du travail, mais encore d’un attendu de principe aux termes duquel : « toute personne dispose
de la liberté de choisir son domicile et que nul ne peut apporter aux droits des personnes et
aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la
nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché ».
A. Définition
À la différence des autres clauses facultatives envisagées, la clause de garantie d’emploi crée
une obligation à la charge de l’employeur.
Elle a pour objectif de limiter le droit de l’employeur de rompre le contrat à durée
indéterminée (CDI) pendant un certain temps. En d’autres termes, pendant une durée
déterminée, l’employeur va s’interdire de licencier le salarié.
Avec cette clause, l’employeur va chercher à attirer le salarié, à le fidéliser en lui offrant une
garantie supplémentaire pour qu’il vienne dans l’entreprise. Ces clauses concernent donc
principalement des postes de direction ou des compétences spécifiques.
B. Conditions de validité
Tout comme les autres clauses facultatives du contrat de travail, pour être valable, la clause de
garantie d’emploi se doit de respecter certaines conditions.
Ainsi, elle doit :
- comporter une durée limitée de garantie d’emploi. En d’autres termes, la clause de
garantie d’emploi ne peut pas être illimitée, il est impossible pour l’employeur de
promettre de ne jamais licencier un salarié.
- de plus, la clause ne doit pas transformer la nature du contrat. Elle ne peut donc pas
transformer un CDI en CDD.
A. Définition
Indépendamment d’une obligation générale de discrétion, les salariés peuvent être tenus, en
vertu de leur contrat de travail, à des clauses dites de confidentialité qui leur interdisent de
divulguer certaines informations expressément identifiées comme « confidentielles ». Cette
clause s’impose à tous les salariés, même en l’absence de stipulation expresse. Elle est
essentielle et doit être imposée à toute personne susceptible d’avoir accès au savoir-faire.
Concrètement, la clause de confidentialité se rapporte aux secrets de fabrication, aux secrets
d’affaires ou aux secrets liés aux matières personnelles ou confidentielles, dont l’employé
peut avoir connaissance dans le cadre de son activité professionnelle. Et peut-être, plus ou
moins large selon l’emploi occupé. En effet, les salariés de l’entreprise, du moins ceux ayant
accès aux informations stratégiques et à l’innovation, peuvent être tenus d’une obligation de
confidentialité, tant durant leur contrat de travail, qu’après la fin de celui-ci.
Dans un arrêt du 19 mars 2008, la Cour de cassation admet la validité d’une clause de
confidentialité se prolongeant après la cessation du contrat de travail. En l’espèce, l’affaire
portée devant les juges opposait un célèbre guide gastronomique à l’un de ses salariés lié par
une telle clause. Menaçant de publier un livre révélant les procédés d’élaboration du guide, le
salarié est licencié pour faute grave en raison notamment « des violations répétées et
délibérées des obligations résultant de son contrat de travail ».
Il intente une action devant le conseil de prud’hommes pour licenciement sans cause réelle et
sérieuse et publie son livre. La société forme alors une demande reconventionnelle en
dommages et intérêts pour violation de la clause de confidentialité insérée dans le contrat de
travail du salarié. La Cour d’appel de Paris approuve le licenciement en raison de la violation
par le salarié de son obligation de discrétion valable pendant l’exécution du contrat de travail.
En revanche, elle rejette la demande de l’employeur au motif que la clause de confidentialité
ne s’applique pas après la rupture du contrat de travail.
La Cour de cassation approuve les juges du fond concernant le motif du licenciement, mais
censure leur décision concernant la clause de confidentialité. La Cour suprême estime, en
effet, qu’une telle clause « peut valablement prévoir qu’elle s’appliquera après la fin du
contrat de travail et que l’inexécution par le salarié de l’obligation de confidentialité
postérieurement à son départ de l’entreprise le rend responsable du préjudice subi par
celle-ci, même en l’absence de faute lourde ». Il est donc clair que la clause de
confidentialité se prolonge même après la cessation de son contrat de travail.
En effet, depuis l’arrêt Raquin (Soc. 8 octobre 1987 nº 84-41902 Bull. nº 541), il est de
jurisprudence constante que le salarié dispose d’un droit de refus de la modification de son
contrat de travail qui ne peut intervenir sans le consentement exprès du salarié. En revanche,
l’employeur peut imposer, dans le cadre de son pouvoir de direction, un changement des
conditions de travail.
Sont des éléments du contrat de travail dont toute évolution vaut modification du contrat de
travail et exige à ce titre l’accord préalable du salarié :
Il faut distinguer selon que le contrat comprend ou non une clause de mobilité.
Il s’agit de la clause d’un contrat de travail par laquelle le salarié accepte à l’avance une
modification de son lieu de travail ou un déplacement ponctuel que l’employeur pourrait
décider.
B. Principe
En présence d’une clause de mobilité et sous réserve que celle-ci soit valable, c’est-à-dire :
l’employeur peut unilatéralement décider de transférer le lieu de travail du salarié dans les
limites géographiques prévues par la clause.
La modification du lieu de travail n’est donc pas, dans ce cas, une modification du contrat de
travail et s’impose donc au salarié.
La Cour de cassation a précisé que le fait d’apposer sa signature lors de l’embauche sur un
règlement intérieur contenant une clause de mobilité ne vaut pas acceptation claire et non
équivoque de la part du salarié, de l’insertion d’une telle clause dans son contrat de travail :
Cass. soc. 19 novembre 1997.
C. Exceptions :
Toutefois, cette clause de mobilité ne peut faire l’objet d’une mise en œuvre abusive par
l’employeur (Cass. soc. 2 mars 2005).
Cela suppose :
– Qu’il respecte un délai de prévenance : Cass. soc. 3 mai 2012 : « le salarié dont
le contrat de travail prévoit une clause de mobilité géographique est en droit de
refuser une nouvelle affectation dès lors que l’employeur l’informe de sa
nouvelle affectation la veille seulement de sa prise de poste » ; autre ex. : Un
délai de 4 jours, alors que le salarié concerné a un enfant en bas âge, est
insuffisant (Cass. soc. 19 mars 2003) ;
– Que la mise en œuvre de la clause ne porte pas atteinte au droit du salarié à une
vie personnelle et familiale : Cass. soc. 14 octobre 2008 (ex. : L’employeur
qui impose à un salarié se trouvant dans une situation familiale critique (son
épouse étant enceinte de 7 mois) un déplacement immédiat abuse de son droit
(Cass. soc. 18 mai 1999).
Attention : la bonne foi de l’employeur est présumée : c’est donc au salarié de prouver que
la décision de l’employeur d’appliquer la clause de mobilité a été prise pour des raisons
étrangères à l’intérêt de l’entreprise ou dans des conditions exclusives de la bonne foi
contractuelle (Cass. soc. 23 février 2005).
– Une clause ne peut pas prévoir que le salarié peut être muté dans « toute zone
géographique ». En revanche, est licite la clause qui organise la mutation en « France
métropolitaine » ou encore sur « le territoire français » (même si celui-ci implique les
DOM TOM) : Cass. soc. 9 juillet 2014.
– Une clause ne peut prévoir une modification unilatérale par l’employeur de la zone
géographique. En effet, il n’est pas possible pour l’employeur de se réserver, dans la clause
de mobilité, la possibilité de modifier unilatéralement l’étendue géographique de l’obligation
de mobilité du salarié concerné. Une telle disposition serait inopérante. En conséquence, un
employeur qui souhaiterait modifier le champ géographique d’une clause de mobilité doit
d’abord obtenir l’accord du salarié. Le régime de la modification du contrat de travail
retrouve alors son application (Cass. soc. 7 juin 2006 Cass. soc. 14 octobre 2008).
Par exemple, une clause de mobilité prévoit qu’un salarié « accepte par avance (...) d’être
affecté (...) en fonction des nécessités » de l’employeur. Cette clause n’est pas valable, car elle
donne à l’employeur le pouvoir de modifier unilatéralement sa portée : Cass. soc. 4 octobre
2008.
– Attention examen : la clause par laquelle un salarié accepte par avance un changement de
lieu de travail dans un autre établissement du groupe en métropole ou dans un pays de la
communauté européenne, ne concerne selon les juges que les mutations dans un
établissement existant au jour de la conclusion du contrat : Cass. soc. 12 mai 2004 ;
– Une clause de mobilité ne peut pas stipuler que tout refus du salarié emporte la rupture
automatique du contrat de travail. Si tel est le cas, la sanction est la nullité de cette clause
(Cass. soc. 19 mai 2004)
– Une clause qui prévoit un changement d’employeur anticipé est nulle – Un salarié ne
peut pas accepter par avance un changement d’employeur au nom du principe selon lequel le
contrat de travail est exécuté de bonne foi. La clause de mobilité par laquelle le salarié lié par
contrat de travail à une société s’est engagé à accepter toute mutation dans une autre société,
alors même que cette société appartiendrait au même groupe ou à la même unité économique
et sociale, est donc nulle (Cass. soc. 23 septembre 2009). Exemple : Le contrat d’un
responsable marketing contenait une clause de mobilité stipulant qu’il pourrait être amené à
exercer ses fonctions dans toute autre société du groupe. Celle-ci prévoyait aussi que sa mise
en œuvre donnerait lieu à la rédaction d’un nouveau contrat auprès de la société d’accueil.
Ayant refusé sa mutation, le salarié a été licencié pour non-respect de la clause de mobilité.
Ce refus ne pouvait pas justifier son licenciement puisque la clause était nulle (Cass. soc. 23
septembre 2009).
Ainsi, la clause par laquelle un salarié accepte par avance un changement de lieu de travail
dans un autre établissement du groupe en métropole ou dans un pays de la communauté
européenne, ne concerne selon les juges que les mutations dans un établissement existant
au jour de la conclusion du contrat : Cass. soc. 12 mai 2004 ;
– Pour les travailleurs à domicile, la clause de mobilité ne peut imposer un retour dans
l’entreprise au salarié. La clause de mobilité inscrite dans le contrat de travail d’un salarié
qui travaille à temps partiel ou à temps complet à son domicile ne permet pas à l’employeur
d’imposer à ce salarié de revenir travailler dans l’entreprise. Il doit, dans ce cas, solliciter son
accord préalable malgré la clause de mobilité (Cass. soc. 31 mai 2006 ; Cass. soc. 31 octobre
2006).
À défaut de clause de mobilité, la modification du lieu de travail n’est pas une modification
du contrat de travail sauf si la mutation a lieu en dehors du secteur géographique : Cass. soc.
4 mai 1999.
La règle est donc la suivante :
Si la mutation a lieu à l’intérieur du secteur géographique, il ne s’agit pas d’une modification
du contrat de travail. L’accord du salarié n’est donc pas requis. (Ex : Cass. soc. 25 octobre
2011, mutation du salarié à 19 km de son lieu de travail initial).
Si la mutation a lieu à l’extérieur du secteur géographique, il s’agit alors d’une modification
du contrat de travail : l’accord du salarié est indispensable.
•• Une indemnité doit être versée au salarié pour compenser l’immixtion dans sa
vie privée : arrêt Nestlé Waters Marketing, Cass. soc. 7 avril 2010
B. L’absence de clause de mobilité, mais la mention d’un lieu de travail dans le
contrat de travail du salarié.
Il arrive que le contrat de travail mentionne un lieu pour l’exécution du contrat de travail.
La question qui se pose est la suivante :
L’employeur peut-il changer ce lieu de travail sans l’accord du salarié ?
D’après la jurisprudence, « lorsque le lieu de travail est prévu par le contrat de travail, la
mention du lieu de travail n’a qu’une valeur d’information, à moins qu’il ne soit stipulé
par une clause claire et précise que le salarié exécutera son travail exclusivement dans ce
lieu » Cass. soc. 3 juin 2003 ; Cass. soc. 26 octobre 2011.
La mention du lieu a valeur informative et donc aucune portée contractuelle. Le salarié ne
peut pas s’opposer à un changement de lieu en invoquant la mention dans son contrat, sauf à
ce qu’il y ait une clause claire et précise en ce sens.
Il existe une hypothèse dans laquelle, alors même qu’il n’y a pas de clause de mobilité,
l’employeur va pouvoir muter le salarié occasionnellement en dehors du secteur géographique
sans son accord :
C’est le cas lorsque les fonctions du salarié impliquent une certaine mobilité : Cass. soc. 22
janvier 2003.
L’affaire met en jeu un chef de chantier, cadre, qui travaille depuis dix ans dans la région
toulousaine. Son employeur décide de l’envoyer pour une mission temporaire de deux mois
à plus de 300 km de Toulouse.
La Chambre sociale de la Cour de cassation a jugé que :
« Un déplacement occasionnel imposé à un salarié en dehors du secteur géographique où
il travaille habituellement ne constitue pas une modification de son contrat de travail dès
lors que la mission est justifiée par l’intérêt de l’entreprise et que la spécificité des
fonctions exercées par le salarié implique une certaine mobilité géographique ».
C’est également le cas lorsque la mutation est motivée par l’intérêt de l’entreprise, qu’elle
est justifiée par des circonstances exceptionnelles et que le salarié a été informé
préalablement dans un délai raisonnable du caractère temporaire de la mutation et de sa
durée prévisible : Cass. soc. 3 mai 2012. (Cette solution s’applique également cas de
mutation à l’extérieur des limites géographiques d’une clause de mobilité).
Enfin, récemment, la Chambre sociale de la Cour de cassation a également admis le
déplacement occasionnel du salarié en dehors du secteur géographique lorsque celui-ci entre
dans le cadre habituel de l’activité du salarié muté : Cass. soc. 2 avril 2014.
Faits de l’espèce : « Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X… a travaillé au service de la
société Dechiron, aux droits de laquelle se trouve la société Vinci construction terrassement,
er
en qualité de chef d’équipe à compter du 1 octobre 1996, puis en qualité d’assistant chef de
er
chantier à compter du 1 août 2009 ; qu’il a été licencié pour faute grave par lettre du
22 septembre 2009, l’employeur lui reprochant ses refus successifs d’affectation sur deux
chantiers d’autoroute, le premier en Gironde et le second dans les Pyrénées-Atlantiques ; que
contestant le bien-fondé de son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud’homale ».
Solution : « Mais attendu qu’ayant constaté que le déplacement refusé par le salarié
s’inscrivait dans le cadre habituel de son activité d’assistant chef de chantier, la cour d’appel,
qui n’avait pas à procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, en a
exactement déduit que le salarié avait manqué à ses obligations contractuelles ; que le moyen
n’est pas fondé ».
I. LE PRINCIPE
La rémunération constitue un élément du contrat de travail du salarié qui ne peut être modifié
sans son accord même de manière minime, même de manière plus favorable : (Cass. soc. 3
mars 98 ; Cass. soc. 23 mai 2013 au sujet d’une prime de pause).
Ainsi, toute modification, opérée directement (par modification de la clause du contrat fixant
la rémunération) ou indirectement (par modification d’un autre élément tel le lieu de travail,
le temps de travail ou la qualification), requiert l’accord du salarié. La clause du contrat qui
permettrait à l’employeur de faire varier librement la rémunération est nulle (Cass. soc. 16
juin 2004).
À quelles conditions l’employeur peut-il supprimer une prime dont bénéficiait le salarié ?
Faut-il l’accord du salarié ?
3 hypothèses existent :
➢ La prime est prévue par le contrat de travail : dans ce cas on applique la solution
dégagée par l’arrêt Raquin : il s’agit d’une modification de la rémunération donc d’une
modification du contrat de travail. L’accord du salarié est indispensable.
➢ La prime est prévue par une convention collective : d’après les articles L2261-9 et
suivants du Code du travail, l’employeur devra d’abord le dénoncer dans sa totalité en
consultant préalablement le CSE s’il existe. La dénonciation est suivie d’un préavis de 3
mois à compter de la notification de la dénonciation (ou autre délai prévu par l’accord
dénoncé). Au terme du préavis, la période légale de négociation est d’un an. Si à l’issue
de ce délai (3 mois + 1 an soit au total 15 mois) aucun accord de substitution n’est
adopté, les salariés des entreprises concernées conserveront une rémunération, en
application de la convention ou de l’accord dénoncé ou mis en cause, dont le montant
annuel, pour une durée de travail équivalente à celle prévue par leur contrat de travail, ne
peut pas être inférieure à la rémunération versée lors des 12 derniers mois. Auparavant, le
législateur prévoyait que les salariés concernés puissent continuer à jouir de leurs
avantages individuellement acquis.
Si l’employeur ne respecte pas ces règles pour dénoncer l’usage qu’il a instauré dans son
entreprise, celui-ci reste en vigueur et les salariés peuvent s’en prévaloir.
Il n’est pas nécessaire que l’accord collectif stipule qu’il remplace l’usage : dès lors qu’ils
ont le même objet, l’accord s’applique mettant ainsi fin à l’usage sans qu’il soit nécessaire
de procéder à sa dénonciation régulière : Cass. soc. 198 novembre 1997. En revanche, s’ils
n’ont pas le même objet, l’accord collectif ne met pas fin à l’usage (Cass. soc. 9 juill. 1996
Régie Régir c/Padieu et a.). Ce nouvel accord peut prévoir le maintien des avantages
acquis antérieurement à son entrée en vigueur. Dans ce cas, l’avantage qui résultait de
l’usage ou de l’engagement unilatéral, lequel a disparu du fait du nouvel accord collectif,
est considéré comme un avantage acquis qui s’incorpore au contrat de travail et dont les
salariés peuvent continuer à bénéficier (Cass. soc, 14 juin 2000. n° 98-41.703. URSSME
c/Dore et a).
1. Définition de l’usage
Un usage est une pratique de l’employeur qui confère un avantage aux salariés et qui présente
les caractères de :
– Généralité,
– Constance, stabilité,
– Fixité.
Par généralité, il faut entendre « avantage non individuel ». Pour qu’il y ait usage, l’avantage
doit être collectif. Il doit donc être reconnu soit à l’ensemble des salariés, soit à une catégorie
ou un groupe de salariés déterminés (Cass. soc. 28 févr. 1996, n° 93-40.883. Duprez
c/Bioteau).
Le caractère de stabilité, ou de constance, impose que l’avantage ait été attribué à plusieurs
reprises. La notion même d’usage impose qu’il y ait une répétition et que l’avantage ait été
attribué au moins deux fois même si les tribunaux exigent généralement une répétition plus
importante. L’unique versement d’une prime est insuffisant pour qu’il en résulte un usage
(Cass. soc. 13 févr. 1996. n° 92-45.247. SA SARP c/Morantin). En revanche, une prime
versée pendant quatre années, même si elle n’a jamais été portée sur le bulletin de salaire, est
due (Cass. soc. 28 févr. 1996. n° 93-40.883. Duprez c/Bioteau).
Un usage doit être fixe. Le versement, même régulier, d’une prime qui ne dépend d’aucun
critère fixe et précis et dont le montant a toujours été variable ne peut constituer un usage
(Cass. soc. 13 mars 1996. n° 93-40.782. Ferreira c/Sté Roger Junca). En revanche, l’usage
peut être établi si le mode de calcul de la prime est fixe, mais que son montant est variable
(prime de résultat par exemple). De même, lorsqu’il est constaté que l’entreprise a toujours
accordé des hausses de salaires indexées sur l’évolution du taux des rentes d’accident du
travail, l’existence d’un usage est établie (Cass. soc. 16déc. 1998. n° 95-40.385. FNATH
c/Faurie et a.).
L’employeur peut prendre, vis-à-vis des salariés, un engagement de faire (verser une prime
par exemple) ou de ne pas faire (ne pas licencier pendant un certain délai).
De manière générale, il s’agit de toute manifestation de volonté de l’employeur à l’égard de
l’ensemble des salariés.
– D’une décision prise devant l’ensemble du personnel (Cass. Soc. 22 janv. 1992. N° 89-
42.841. Sté clinique Saint-Tronc c/lste) ;
– D’une décision prise devant le comité d’entreprise ou une autre institution représentative
du personnel ;
– D’un protocole de fin de conflit ;
– D’une clause de règlement intérieur accordant des droits aux salariés dans une matière
autre que la discipline et l’hygiène et la sécurité (Cass. Soc. 7 juin. 1998. n° 96-42.521.
Rancurel c/Ligue de l’enseignement et de l’éducation permanente) ;
– D’une note de service ou de la direction des ressources humaines.
L’engagement unilatéral doit être appliqué en respectant les conditions qu’il prévoit.
Toutefois, seule une clause précise définissant objectivement l’étendue et les limites de
l’obligation souscrite par l’employeur peut constituer une condition d’application d’un
engagement unilatéral de l’employeur. Ainsi, un employeur ne peut subordonner le versement
d’une prime de fin d’année aux « résultats économiques suffisants » de l’entreprise (Cass.
soc., 27 juin 2000. n° 99-41.926. Kbibech et a. c/SNC Sohito Alliance Trois Rivières).
L’application volontaire d’une convention collective aux salariés de l’entreprise alors que
l’entreprise n’y est pas normalement soumise, constitue un engagement unilatéral de
l’employeur. L’employeur peut donc y mettre fin en respectant la procédure de dénonciation
des usages et engagements unilatéraux (Cass. soc. 31 janv. 1996. n° 93-41.254. Sté Indre
bureautique services c/Fouquet).
Le fait de dénoncer cet engagement met fin à l’application de la convention aux salariés de
l’entreprise sans qu’il y ait lieu à maintien des avantages individuels acquis (contrairement à
la dénonciation d’un accord collectif).
Constitue un accord atypique l’accord signé par l’employeur qui ne répond pas aux
conditions de conclusion d’un accord collectif. Si cet accord ne peut produire les effets
d’un accord collectif, il vaut, en revanche, engagement unilatéral de l’employeur.
Sont des accords atypiques :
– L’accord qui n’a pas fait l’objet d’un écrit. Un accord collectif devant être écrit, s’il est
simplement oral, il ne peut acquérir la force obligatoire d’un accord. En revanche, il peut
constituer un engagement unilatéral de l’employeur dès lors que la volonté de s’engager est
démontrée (Cass. soc., 26 mars 1997. n° 94-43.146. Sté Gadso c/Peyret) ;
– L’accord signé avec des salariés n’ayant pas la qualité de délégués syndicaux (Cass. Soc.
15 juill. 1998. n° 96-41.1 18. Centre de gestion de comptabilité fiscale agricole de l’Oise
c/Delon) ;
– L’accord conclu avec le comité d’entreprise (Cass. soc., 18 mars 1997. n° 93-43.989. Sté
Allianz via assurances/ARD c/Vialle et a.) ou avec des délégués du personnel.
Si la prime ne résulte pas de la convention collective, mais d’un usage, il est souhaitable
d’avoir une note de service dans l’entreprise indiquant clairement les conditions d’attribution
de la prime.
Le paiement d’une prime ou d’un accessoire du salaire peut-il être conditionné à la présence
du salarié l’année suivante ? C’est la question à laquelle la Cour de cassation a répondu dans
son arrêt du 27 mars 2013.
Dans cette affaire, un employeur avait mis en place, par engagement unilatéral, une prime
d’expatriation dont le versement était subordonné à la présence du salarié dans les effectifs de
l’entreprise l’année suivante. Un salarié qui avait passé plusieurs mois à l’étranger avant de
démissionner ne remplissait pas cette condition, mais estimait que cette prime lui était due. Il
a saisi le conseil de prud’hommes pour en obtenir le paiement.
La Cour de cassation décide d’invalider la condition de présence exigée par l’employeur et
d’accorder au salarié sa prime d’expatriation. En effet, elle estime que l’ouverture du droit à
un élément de la rémunération afférant à une période travaillée peut être soumise à une
condition de présence à la date de son échéance, mais que le droit à la rémunération est
acquis lorsque cette période a été intégralement travaillée et ne peut pas être soumis à
une condition de présence à une date postérieure.
Ainsi, l’employeur aurait pu subordonner le versement de la prime d’expatriation au fait que
le salarié mène à son terme la mission à l’étranger, mais pas à la présence du salarié dans les
effectifs l’année suivant la mission.
Une prime de fin d’année peut être diminuée, compte tenu des jours d’absence, même si ceux-
ci sont dus à une absence pour congé de maternité (Cass. soc. 11 avril 1991 n° 87-41.975). Il
faut évidemment dans ce cas qu’il n’y ait pas de discrimination, aussi, quelle que soit la
raison de l’absence, le montant de la prime doit alors être proratisé.
La privation de la prime pour sanctionner le salarié est illicite, car cela reviendrait à
sanctionner pécuniairement le salarié : Cass. soc. 11 février 2009.
Avec ce genre de clause, le salarié accepte dès la conclusion du contrat de travail de conférer
à l’employeur une prérogative contractuelle exorbitante consistant à lui permettre de modifier
unilatéralement un élément du socle contractuel.
Ces clauses ne sont toutefois que très rarement admises.
Une clause du contrat de travail peut prévoir une variation de la rémunération du salarié sous
trois conditions : Cass. soc. 2 juillet 2002 ; Cass. soc. 10 mai 2007.
– Elle doit être fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de
l’employeur ;
– Elle ne doit pas faire porter le risque d’entreprise sur le salarié ;
– Elle ne doit pas avoir pour effet de réduire la rémunération en dessous des minima
légaux et conventionnels.
Le contrat de travail peut prévoir l’existence de primes de rentabilité dont le montant sera
fixé par l’employeur en fonction de variables déterminées à l’avance et objectives : Cass.
soc. 8 janvier 2002.
« Une clause du contrat de travail ne peut permettre à l’employeur de modifier
unilatéralement la rémunération contractuelle du salarié ». Toute clause du contrat de travail
autorisant à procéder à une modification de la rémunération en fonction de critères imprécis
(Cass. soc. 30 mai 2000) ou unilatéralement fixés par l’employeur est nulle (Cass. soc. 27
février 2001).
Par un arrêt rendu le 14 novembre 2018, la Chambre sociale de la Cour de cassation casse la
décision d’appel au visa de l’article L. 1121-1 du Code du travail, ensemble l’article 1134 du
Code civil dans sa rédaction applicable à la cause. Plus précisément, elle énonce « qu’une
clause du contrat de travail ne peut permettre à l’employeur de modifier unilatéralement le
contrat de travail ». Ayant constaté que les contrats stipulaient que les salariés effectueront des
horaires de soir ou des horaires de nuit et bénéficieraient des primes afférentes, les juges
d’appel ont violé les textes visés.
Pour mémoire : la rémunération contractuelle est sans doute l’élément le mieux protégé du
socle contractuel, l’employeur ne pouvant unilatéralement en faire varier ni le montant (Cass.
soc., 3 mars 1998, n° 95-43.274, Bull. civ. V, n° 109) ni la structure (Cass. soc., 28 janv. 1998,
n° 95-40.275, Bull. civ. V, n° 40). Au contraire, les horaires de travail du salarié ne relèvent
pas du champ contractuel, mais du domaine des conditions de travail (Cass. soc., 22 févr.
2000, n° 97-44.339, Bull. civ. V, n° 67) à moins d’avoir été « expressément précisés et, à la
demande de la salariée, acceptés par l’employeur » (Cass. soc., 11 juill. 2001, n° 99-42.710,
Bull. civ. V, n° 213). La règle de principe a été peu à peu nuancée d’exceptions lorsque le
changement d’horaires implique le passage d’horaires fixes à des horaires variables (Cass.
soc., 14 nov. 2000, n° 98-43.218, Bull. civ. V, n° 365), la privation du repos dominical (Cass.
soc., 2 mars 2011, n° 09-43.223, Bull. civ. V, n° 56) et surtout, pour ce qui nous concerne, le
passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit et vice-versa (Cass. soc., 22 mai 2001, n° 99-
41.146, Bull. civ. V, n° 178), y compris si ce changement est temporaire (Cass. soc., 18 sept.
2013, n° 12-18.065, inédit). Dans ces hypothèses, l’accord du salarié est indispensable.
Il est constant que l’article L. 1121-1 du Code du travail, qui garantit que nul ne peut «
apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui
ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but
recherché », soit utilisé pour limiter la mise en œuvre d’une clause contractuelle ou du
pouvoir de direction de l’employeur (sur la mise en œuvre de la clause de mobilité : Cass.
soc., 10 févr. 2016, n° 14-17.576, inédit ; d’une clause de mission : 12 juill. 2010, n° 08-
44.363, inédit ; du pouvoir de changer unilatéralement les horaires de travail : 3 nov. 2011,
n° 10-14.702, Bull. civ. V, n° 246, Semaine sociale Lamy n° 1518, p. 11, note A. Fabre, RDT
2012, p. 31).
Il est en revanche nettement moins fréquent que ce fondement soit invoqué dans le but
d’apprécier la validité d’une clause contractuelle.
Il sera observé que la validité de clauses relatives à la rémunération ou aux horaires de travail
ne trouve pas aisément de fondement sur l’article L. 1121-1 du Code du travail.
La condamnation de la clause relative aux changements d’horaires est prononcée dans cet
arrêt de manière générale, en ce qu’elle ne fait pas égard à la situation spécifique des salariés.
Pourtant, il aurait pu paraître cohérent de défendre que leur droit au repos et à une vie
familiale « normale » sont mieux garantis par un travail de jour que par un travail de nuit.
La rémunération du salarié pourrait sans doute être classée au rang des droits fondamentaux,
ne serait-ce qu’en raison du droit à un salaire décent ou équitable garanti par différentes
conventions internationales (par exemple, l’article 3 de la Convention n° 131 de l’OIT ou
l’article 4 de la Charte sociale européenne révisée).
Il sera enfin rappelé que la chambre sociale n’a jamais condamné les clauses de variation de
la rémunération à ce titre et a toujours préféré une argumentation purement contractuelle
fondée sur l’ancien article 1134 du Code civil.
Rappel : une clause du contrat de travail peut prévoir une variation de la rémunération du
salarié sous trois conditions : Cass. soc. 2 juillet 2002 ; Cass. soc. 10 mai 2007 :
– Elle doit être fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de
l’employeur ;
– Elle ne doit pas faire porter le risque d’entreprise sur le salarié ;
– Elle ne doit pas avoir pour effet de réduire la rémunération en dessous des minima
légaux et conventionnels.
Le contrat de travail peut prévoir l’existence de primes de rentabilité dont le montant sera fixé
par l’employeur en fonction de variables déterminées à l’avance et objectives : Cass. soc. 8
janvier 2002
« Une clause du contrat de travail ne peut permettre à l’employeur de modifier
unilatéralement la rémunération contractuelle du salarié ». Toute clause du contrat de travail
autorisant à procéder à une modification de la rémunération en fonction de critère imprécis
(Cass. soc. 30 mai 2000) ou unilatéralement fixé par l’employeur est nulle (Cass. soc. 27
février 2001).
A. Définition de la clause d’objectif
Pour être valable, elle doit fixer des objectifs raisonnables, dans le sens où ils doivent être
réalistes et réalisables, compte tenu, de première part, de la situation économique du secteur
professionnel dans lequel intervient le salarié, de deuxième part, du niveau de compétence de
ce dernier : Cass. soc. 13 mars 2001.
« Les objectifs peuvent être définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son
pouvoir de direction » Cass. soc. 22 mai 2001 :
Lorsque les objectifs sont définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son
pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu’ils sont réalisables et qu’ils ont été
portés à la connaissance du salarié en début d’exercice (Cass. soc. 2 mars 2011).
Cass. soc. 10 mai 2012 : s’il est prévu que les objectifs sont fixés lors des entretiens
d’évaluation et que l’entretien d’évaluation n’a pas eu lieu alors l’employeur ne peut pas
prendre en compte les objectifs de l’année précédente pour apprécier si le salarié a atteint ou
non les objectifs.
Cass. soc. 9 mars 2011 : quid de la preuve des objectifs atteints ou non ?
D’après la Cour de cassation, « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit
l’extinction de son obligation ».
Il incombe donc à l’employeur (se prétendant libéré…) : « de justifier des éléments
permettant de déterminer si les objectifs fixés au salarié avaient été atteints » et non
l’inverse.
I. LE PRINCIPE
Cette construction jurisprudentielle a été parachevée avec l’arrêt soc. 15 juin 2000
Bensoussan c/société Spada (Bull. n° 233), qui précise que le salarié doit consentir
expressément à la modification-sanction de son contrat de travail. Son acceptation,
conformément à la jurisprudence constante de la Chambre sociale de la Cour de cassation en
ce domaine, ne peut résulter de son absence de protestation à la modification ou de la seule
poursuite de l’exécution du contrat modifié.
I. LE PRINCIPE
La modification de la durée de travail du salarié constitue une modification de son contrat de
travail qui suppose l’accord du salarié : Cass. soc. 20 octobre 1998.
Exemple : passage de 28 heures de travail par semaine à 35 heures : dans une telle hypothèse,
il faudra l’accord du salarié.
II. L’EXCEPTION :
L’exercice des heures supplémentaires, c’est dire des heures dépassant la durée légale de
travail (35 heures de travail par semaine), relève du pouvoir de direction de l’employeur et
s’impose donc au salarié dans la limite du contingent autorisé par la loi (220 heures par an et
par salarié.)
En d’autres termes si l’employeur demande à un salarié d’effectuer des heures
supplémentaires dans le respect des 220 heures par an et par salarié, alors ce salarié n’aura pas
le droit de refuser. Son refus constitue une faute justifiant le licenciement : Cass. soc. 9 mars
99.
Exemple : passage de 35 heures de travail par semaine à 37 heures : ici, les heures
supplémentaires s’imposeront au salarié.
A. Le principe :
La modification des horaires de travail ne constitue pas une modification du contrat de travail
et s’impose donc au salarié. Le refus du salarié s’analysera comme une insubordination
pouvant faire l’objet de sanctions disciplinaires.
B. Les exceptions
– si le changement d’horaire s’accompagne d’une modification de la durée de travail, alors il
s’agira d’une modification du contrat de travail nécessitant l’accord du salarié.
– si le changement des horaires est d’une telle intensité qu’il affecte la vie privée et familiale
du salarié, alors l’accord du salarié sera nécessaire.
C’est le cas notamment du passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit, d’un horaire
continu à un horaire discontinu (Cass. soc. 3 novembre 2011) ou encore de la privation du
repos dominical (Cass. soc. 18 janvier 2012).
En toute hypothèse, la décision de l’employeur relative aux horaires, qui vaut en principe
changement des conditions de travail, sera qualifiée de modification du contrat de travail à
partir du moment où la transformation des conditions de travail dépasse un certain seuil
d’intensité.
Aux termes de l’article L1222-6 du Code du travail, l’employeur qui entend modifier le
contrat de travail du salarié pour un motif économique devra respecter les étapes procédurales
suivantes :
La lettre doit informer le salarié qu’il dispose d’1 mois pour faire connaître son refus et qu’à
défaut il sera réputé avoir accepté ;
La lettre doit informer le salarié de ses nouvelles conditions d’emploi et des éventuelles
mesures accompagnant la proposition ;
La lettre doit être précise (à défaut de quoi le futur éventuel licenciement sera abusif).
Le salarié dispose d’un délai de réflexion de 1 mois pendant lequel il peut approuver ou
désapprouver la proposition. Si le salarié ne répond pas, il est considéré avoir accepté.
Cass. soc. 20 février 2013 : Alors qu’une modification de son lieu de travail lui a été
proposée, le salarié n’avait pas clairement refusé la modification, mais simplement signifié à
l’employeur que son contrat de travail stipulait un lieu de travail différent et qu’il bénéficiait
d’une clause de garantie d’emploi. La Cour de cassation a considéré que ces propos
équivalaient à un refus de la proposition. Contrairement au consentement du salarié qui doit
être exprès, son refus peut être beaucoup plus équivoque.
3. Dans tous les cas la modification effective ne doit pas intervenir avant le délai de
1 mois
Si la modification n’a pas une cause économique (ex. : reclassement d’un salarié inapte), la
loi ne prévoit pas de procédure particulière. Cependant l’employeur doit informer le salarié de
sa proposition de modification et lui laisser un délai suffisant de réponse.
L’absence de réponse du salarié au terme de ce délai ne vaut pas acceptation. Le salarié peut
réagir, même longtemps après la mise en œuvre de la modification.
Si le salarié accepte la modification, sa volonté doit être claire et non équivoque (si possible
par avenant).
Dans l’hypothèse où l’employeur a respecté la procédure dégagée par l’arrêt Raquin, à savoir
qu’il a proposé la modification au salarié avant d’y procéder, il sera confronté :
Dès lors qu’elle est claire et non équivoque, l’acceptation du salarié permet à l’employeur de
mettre en œuvre la mesure projetée.
– Soit il abandonne son projet de modification du contrat (il choisit alors la poursuite
du contrat dans les conditions d’exécution antérieures) ;
S’il opte pour le licenciement, il doit arguer d’un motif de rupture du contrat qu’il ne
trouvera pas dans le refus du salarié (Cass. soc. 23 janvier 2001). Seules les motivations à
l’origine de la proposition de modification du contrat sont susceptibles de conférer une cause
à la rupture du contrat : Cass. soc. 8 juin 2011.
1) Dans le cas d’un refus suite à une modification pour un motif économique
Si le salarié refuse la proposition qui lui est faite, l’employeur doit soit renoncer à la
modification, soit procéder au licenciement du salarié dans le respect des règles de fond et de
forme du licenciement pour motif économique. Le simple refus ne constitue pas une cause
réelle et sérieuse de licenciement.
2) Dans le cas d’un refus suite à une proposition de modification pour un motif non
économique
Le simple fait de refuser ne peut pas être une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Si le salarié reste silencieux ou s’il refuse la proposition qui lui est faite, l’employeur doit soit
renoncer à la modification, soit procéder au licenciement dans le respect des règles de fond et
de forme du licenciement pour motif personnel ou disciplinaire, si la modification est basée
sur un motif disciplinaire.
Le principe demeure que « doivent être traités de façon identique les travailleurs placés dans
une même situation au regard d’un avantage » (cf. Soc. 29 octobre 1996 « Ponsole » nº 92-
43680 Bull. nº 359 – Soc. 30 avril 2009 nº 07-40527 Bull. nº 121 – Soc. 20 février 2008 nº
06-40085 Bull. nº 38).
Mais il est reconnu que les partenaires sociaux peuvent amender ce principe.
Selon la Cour de cassation, dès lors qu’elles « s’opèrent par voie de conventions ou d'accords
collectifs négociés et signés par des organisations syndicales représentatives, investies de la
défense des droits et intérêts des salariés et à l'habilitation desquelles ces derniers participent
directement par leur vote », sont « présumées justifiées les différences de traitement » :
« entre des salariés exerçant, au sein d’une même catégorie professionnelle, des
fonctions distinctes » (Soc. 8 juin 2016 nº 15-11324 Bull. en cours – égal. Soc. 26 avril
2017 nº 15-23968 Bull. en cours – Soc. 28 juin 2017 nº 16-12571)
« entre les salariés dont le contrat de travail a été transféré en application d'une
garantie d'emploi instituée par voie conventionnelle qui résulte de l'obligation à
laquelle est tenu l'employeur de maintenir au bénéfice des salariés transférés les
droits qui leur étaient reconnus chez leur ancien employeur au jour du transfert »
(Soc. 30 mai 2018 nº 17-12782)
Ces arrêts laissaient à penser que le principe d’égalité était entièrement dans les mains des
partenaires sociaux qui pouvaient totalement l’amender selon les besoins de leur négociation
collective.
Mais par un arrêt bénéficiant de la plus grande diffusion, la Cour de cassation a tempéré sa
jurisprudence :
Il était constant que « au regard du respect du principe "à travail égal, salaire égal", la seule
circonstance que des salariés aient été engagés avant ou après l'entrée en vigueur d'un
accord collectif ne saurait suffire à justifier des différences de rémunération entre eux, sauf à
l'employeur à démontrer que ces différences entre les salariés effectuant un même travail de
valeur égale, repose sur des raisons objectives et pertinentes qu'il revient au juge de vérifier »
(Soc. 4 février 2009, nº 07-41406, Bull. nº 35 – Soc. 24 septembre 2014, nº 13-10233, Bull.
nº 200).
Par deux arrêts complémentaires publiés le même jour, la Cour de cassation a précisé que :
« le principe d'égalité de traitement ne fait pas obstacle à ce que les salariés
embauchés postérieurement à l'entrée en vigueur d'un nouveau barème conventionnel
soient appelés dans l'avenir à avoir une évolution de carrière plus rapide dès lors
qu'ils ne bénéficient à aucun moment d'une classification ou d'une rémunération plus
élevée que celle des salariés embauchés antérieurement à l'entrée en vigueur du
nouveau barème et placés dans une situation identique ou similaire » (Soc. 7
décembre 2017 nº 16-14235 Bull. en cours – Soc. 17 octobre 2018 n° 16-26729)
Attention, il ne faut jamais parler de licenciement en cas de rupture de CDD, mais de rupture
anticipée !
« Sérieuse » : la cause revêt une certaine gravité qui rend impossible, sans dommage pour
l’entreprise, la continuation du travail (ministre du Travail en 1973).
La jurisprudence considère que la cause est réelle et sérieuse si les éléments objectifs qui
fondent le licenciement étant établis, la mesure prise n’est pas disproportionnée.
Le licenciement pour motif personnel n’est pas nécessairement fondé sur une faute. D’autres
motifs tels que l’insuffisance professionnelle peuvent être à l’origine d’un licenciement.
S’il résulte d’une faute c’est à dire du manquement à la discipline de l’entreprise (exemple :
abandon de poste), le licenciement sera alors de nature disciplinaire et l’employeur devra
respecter la procédure disciplinaire.
1. L’insuffisance professionnelle
L'insuffisance professionnelle est caractérisée par le fait que le salarié « n'arrivait pas à
mener ses missions » (Soc. 16 mai 2018, nº 16-25.552), par une « insuffisance du salarié dans
l'exécution de ses obligations professionnelles » (Soc. 10 décembre 2015, nº 14-21.852, Bull.
nº 840), par le fait « que le salarié n'exécutait pas correctement les tâches qui lui étaient
confiées » (Soc. 25 septembre 2012, nº 11-10.684, Bull. nº 231) ou par « des manquements et
carences dans l'exécution de ses tâches » (Soc. 8 avril 2009, nº 07-44.068, Bull. nº 114).
Ce motif personnel de licenciement largement utilisé par les employeurs a une particularité :
il est exclusif d’une faute du salarié, mais résulte d’un constat, la mauvaise exécution du
contrat de travail par le salarié (Soc. 16 juin 2009 nº 08-40722 Bull. nº 149 – Soc. 9 mai 2000
nº 97-45163 Bull. nº 170 – Soc. 6 avril 1999 nº 96-43467 Bull. nº 162).
Le licenciement pour insuffisance professionnelle ne repose donc pas sur une faute du
salarié, mais sur son incompétence : Cass. soc. 25 janvier 2006.
Attention, l’insuffisance de résultats n’est pas une cause de licenciement et ne doit pas être
confondue avec l’insuffisance professionnelle : « l'insuffisance de résultats ne constitue pas à
elle seule une cause réelle et sérieuse de licenciement ; le juge doit vérifier si une insuffisance
professionnelle ou une faute du salarié sont à l'origine de l'insuffisance de résultats invoquée
par l'employeur pour licencier le salarié » (Soc. 12 février 2002, nº 99-42.878, Bull. nº 65 –
confirmé par Soc. 13 janvier 2004, nº 01-45.931, Bull. nº 3 – déjà Soc. 3 avril 2001, nº 98-
44.069, Bull. nº 117).
Cela étant en pratique, l'employeur va souvent invoquer dans la lettre de licenciement une
insuffisance de résultats qu’il impute à une insuffisance professionnelle du salarié et les juges
du fond vont avoir tendance à caractériser l’insuffisance professionnelle en s’appuyant sur la
conséquence tangible qui en résulte, les résultats insuffisants du salarié.
D’après la Cour de cassation, le licenciement ne peut être fondé que si l’employeur établit
que :
- les objectifs à réaliser étaient réalistes, raisonnables et compatibles avec le marché ;
- le salarié disposait de moyens suffisants ;
- le fait que les objectifs n’aient pas été atteints résulte des erreurs ou des négligences du
salarié et non pas des difficultés économiques de l’entreprise.
En toute hypothèse, les faits allégués par l’employeur doivent être objectifs donc vérifiables :
En effet, pour être fondé sur une cause réelle et sérieuse, le licenciement pour insuffisance
professionnelle doit reposer sur des éléments objectifs, c’est-à-dire des éléments
circonstanciés et vérifiables, propres à justifier l’appréciation portée par l’employeur (Cass.
soc. 10 octobre 2001).
Quid de la clause d’objectifs ? : La clause d’objectifs qui prévoirait une rupture automatique
du contrat en cas de non-réalisation de ceux-ci est illicite. Le juge conserve toujours son
pouvoir d’appréciation.
2. La faute disciplinaire
Le licenciement pour motif disciplinaire implique que le salarié ait commis une faute et que
cette dernière présente un caractère de gravité suffisant pour justifier la rupture du contrat de
travail.
Il existe quatre types de fautes : la faute légère, la faute sérieuse, la faute grave et la faute
lourde.
Depuis la réforme législative de 1973, toute faute ne permet pas de légitimer un licenciement,
puisque ce dernier doit reposer sur une cause réelle et sérieuse, laquelle implique un certain
degré de gravité. En application de ce principe, il est interdit à l’employeur de procéder au
licenciement en se fondant sur une faute légère.
La faute légère n’est pas définie par le Code du travail. Sa caractérisation relève donc de
l’appréciation souveraine des juges du fond. Généralement, elle correspond à un
comportement inhabituel et ponctuel qui peut être excusé par les circonstances propres à
chaque espèce (ancienneté du salarié, comportement antérieur irréprochable, bonne foi de
l’intéressé) et qui n’affecte pas de façon significative le bon fonctionnement de l’entreprise.
La faute grave est une faute sérieuse aggravée. Elle peut procéder d’un fait isolé ou de
l’accumulation de plusieurs faits de moindre gravité. Elle « résulte d’un fait ou d’un
ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations
découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle
rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis »
(Soc., 26 février 1991, n° 88-44.908, Bull. n° 97 – Soc., 8 avril 1992, n° 90-45.669, Bull. n°
257 – Soc., 5 décembre 2007, n° 06-41.313, au Bull. – Soc., 6 octobre 2010, n° 09-41.294, au
Bull.).
Exemples :
Ensuite, les juges du fond ne peuvent s’en tenir à la gravité des faits pour caractériser ou
exclure la faute grave, sans examiner les circonstances de leur commission et leurs
conséquences. Ainsi, ne donne pas de base légale à sa décision la cour d’appel qui retient
l’existence d’une faute grave justifiant le licenciement du salarié, sans rechercher si
l’interruption brutale d’activité et le comportement irrationnel du salarié pendant plus de deux
mois et son hospitalisation deux jours avant le licenciement suivi quelques mois plus tard de
son suicide, n’ôtaient pas aux brusques carences reprochées à l’intéressé leur caractère fautif
(Cass. soc. 23 nov. 1994).
La Cour de cassation a également décidé que les juges du fond ne peuvent retenir qu’une
salariée, responsable des caisses, a commis une faute grave en laissant sans surveillance,
pendant un court laps de temps, deux enveloppes contenant des fonds importants, sur un
bureau situé dans un local aisément accessible, sans se prononcer sur la difficulté des
conditions de travail invoquées par l’intéressée pour expliquer le manquement unique qui lui
est reproché (Cass. soc. 17 déc. 1987).
- Le vol
Est-ce que le vol constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement et plus
précisément une faute grave ?
D’après la jurisprudence (Cass. soc. 26 février 1991), la faute grave est celle qui rend
intolérable le maintien du salarié dans l’entreprise y compris pendant la période de préavis.
En ce qui concerne le vol, les juges se prononcent au cas par cas en fonction de l’ancienneté
du salarié, de son âge, de son absence d’antécédents disciplinaires, etc.
Les critères dégagés sont les suivants :
Si la victime du vol n’est pas l’employeur, mais un de ses clients, la Cour de cassation retient
que la faute grave est caractérisée – quelque soit la valeur de l’objet volé, l’ancienneté du
salarié et l’absence de reproches durant sa carrière
Dans un arrêt du 16 janvier 2007 rendue par la Chambre Sociale, la Cour de Cassation
a considéré que « le vol commis par un salarié au préjudice d’un client de
l’employeur caractérise, alors même que l’objet soustrait serait de faible valeur, une
faute grave ».
En revanche, lorsque la victime du vol est l’employeur, la Cour de cassation estime qu’il faut
tenir compte de la valeur marchande du bien volé et de l’ancienneté du salarié ainsi que de
son comportement antérieur
Soc. 13 février 2013 N° de pourvoi 11-25991 Qu'en statuant ainsi, alors que la
soustraction d'un tel objet par un salarié ayant plus de six ans d'ancienneté
n'était pas de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise, la cour
d'appel a violé les textes susvisés »
Soc. 22 juin 2011 N° de pourvoi 10-14494 Qu'en statuant ainsi, alors que
l'acte isolé de la salariée laquelle justifiait d'une ancienneté de plus de douze
années, portait sur la disparition de pains pour une valeur de 25,25 € et
n'était pas de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise, la cour
d'appel a violé les textes susvisés »
Soc. 21 juin 2011 N° de pourvoi 10-10833 Qu'en statuant ainsi alors que les
seuls faits établis parmi ceux dénoncés par la lettre de licenciement se
résumaient au vol de 6 ou 7 pièces de deux euros ainsi qu'au défaut
d'enregistrement, sur une seule journée, de quelques achats d'une valeur
indéterminée, lesquels, s'agissant d'une salariée ayant neuf années
d'ancienneté, n'étaient pas de nature à rendre impossible son maintien dans
l'entreprise, la cour d'appel a violé les textes susvisés »
Soc. 6 avril 2011 N° de pourvoi 10-15286 Qu'en statuant ainsi, alors que l'acte
isolé du salarié, qui justifiait d'une ancienneté de plus de dix années n'était
pas de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise, la cour
d'appel a violé les textes susvisés »
Soc. 30 juin 2010 N° de pourvoi 09-41049 : « Qu'en statuant ainsi, alors que
l'acte isolé de la salariée, qui justifiait d'une ancienneté de vingt-neuf années
n'était pas de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise, la cour
d'appel a violé les textes susvisés »
En conséquence, le vol dont le salarié serait l’auteur ne qualifie pas systématiquement la faute
grave de ce dernier justifiant son licenciement.
« En l’absence d’avertissement préalable, des retards répétés sur une période d’un mois
de la part d’un salarié comptant trois ans d’ancienneté dans l’entreprise ne suffisent pas
à caractériser une faute grave. »
Des retards répétés pourront être considérés comme une cause réelle et sérieuse de
licenciement s’ils revêtent une certaine importance. Par exemple, les juges ont considéré
que le licenciement d’une salariée était justifié lorsque celle-ci se présente fréquemment avec
15 minutes de retard à son poste de travail et ce, même si elle arrive à l’heure dans
l’entreprise (Cass. soc. 19 décembre 2000 – n° de pourvoi 98-44.418). À l’inverse, les juges
ont estimé que le licenciement d’une salariée, responsable de nombreux, mais minimes
retards et qui, par ailleurs, étaient compensés en fin de journée au-delà de leur durée, n’est pas
justifié (Cass. soc. 8 juillet 1982). Enfin, le licenciement du salarié sera fondé si celui-ci
continue de ne pas respecter les horaires qui lui sont imposés, malgré des avertissements
de son employeur (Cass. soc. 4 février 1981).
Par ailleurs, la fréquence des retards du salarié et leur impact sur le fonctionnement de
l’entreprise sont des éléments qui peuvent amener les juges à reconnaître l’existence d’une
faute grave. Ainsi, ceux-ci ont considéré que les nombreux retards d’un salarié, qui avaient
désorganisé la bonne marche de l’entreprise, étaient constitutifs d’une faute grave (Cass. soc.
19 mars 1987). La faute grave a également été retenue en raison du statut du salarié dans
l’entreprise. Les juges ont en effet estimé qu’un chef d’équipe, auquel étaient reprochés des
retards réitérés, avait manqué aux obligations liées à sa qualité et à son pouvoir de direction et
de contrôle sur les salariés. Ce manquement a été qualifié de faute grave (Cass. soc. 19
décembre 2007 – n° de pourvoi 06-43.983).
•• Autres exemples de fautes graves retenues par la jurisprudence
Mais l’appréciation doit être nuancée et dépend de chaque espèce : par ex. « Ne constitue pas
une faute grave mais une cause réelle et sérieuse de licenciement l'absence injustifiée de 6
semaines du salarié après une visite médicale à l'issue de laquelle il a été déclaré apte à son
poste par le médecin du travail, dès lors que cette absence de l'intéressé, qui rencontrait de
nombreuses difficultés personnelles et de santé et avait plus de 20 ans d'ancienneté, n'avait
pas perturbé le service » (Soc. 26 septembre 2018 n° 17-17.563 F-D)
- Actes de concurrence
Participation directe d’un salarié à la création d’une société concurrente à celle de son
employeur ; Utilisation par un salarié des moyens de commercialisation de son entreprise pour
la vente de produits d’une autre société ; Acceptation d’un mandat d’administrateur dans une
société concurrente.
Ex. : est caractérisée l'intention de nuire constitutive de la faute lourde du salarié qui,
en violation d'une clause d'exclusivité et en concertation avec un autre salarié et alors
qu'il est encore au service de son employeur, a recours à un montage juridique
permettant de dissimuler la création d'une entreprise dont l'activité est concurrente de
celle de son employeur et a débuté avant la rupture de leurs relations contractuelles,
l'intéressé ayant détourné de la clientèle et débauché un salarié de l'employeur (Soc.
15 mai 2019 n° 17-28.943 F-D).
- Déloyauté :
- Inconduite et injures :
Attitude indécente réitérée d’un salarié à l’égard de ses collègues féminines ; Harcèlement
sexuel d’un salarié par un supérieur hiérarchique ; Salarié prononçant des insultes racistes à
l’égard d’un supérieur hiérarchique ; Salarié tenant des propos injurieux envers un client de
l’entreprise ; Responsable d’atelier tenant des propos racistes, agressifs et méprisants envers
les salariés placés sous son autorité et refusant de mettre à leur disposition des vêtements de
protection, principalement lorsqu’ils étaient d’origine étrangère ; Salarié envoyant un courriel
contenant des propos antisémites.
- Insubordination :
Refus du salarié d’exécuter une tâche entrant dans ses attributions normales, sans aucune
justification ; Refus réitéré du salarié de se soumettre aux instructions de l’employeur ; Refus
d’accomplir un travail à plusieurs reprises alors qu’une sanction avait déjà été prononcée à ce
titre.
Détournements de fonds, faux et usages de faux pratiqués et reconnus par un salarié ; Salarié,
responsable des services techniques et de maintenance, ayant demandé à un fournisseur de
surestimer un devis afin de faire financer par son employeur une porte de garage destinée à
son équipement personnel ; Photocopie de documents couverts par le secret professionnel afin
de les utiliser dans un contentieux engagé contre l’employeur.
- Violences physiques :
Menaces et violences à l’égard de l’employeur ; Altercations et riposte d’un salarié avec une
violence démesurée, ces faits ayant gravement perturbé la bonne marche de l’atelier.
Attention : la poursuite pour un salarié d’un fait fautif autorise l’employeur à se prévaloir de
faits similaires, y compris ceux ayant déjà été sanctionnés, pour caractériser une faute grave :
Cass. soc. 30 septembre 2004.
La faute lourde se distingue des autres fautes par le fait qu’elle traduit « une intention de
nuire du salarié vis-à-vis de l’employeur ou de l’entreprise » (Cass. soc. 29 nov. 1990). Elle
correspond à la faute dolosive du droit de la responsabilité civile. Par conséquent, une faute
d’imprudence ou de négligence ne pourra jamais, quelles que soient ses conséquences
dommageables, caractériser une faute lourde en l’absence d’élément intentionnel. Comme
pour la faute grave, la Cour de cassation exerce un contrôle de qualification sur la faute
lourde. Par conséquent, les juges du fond ne peuvent reconnaître l’existence d’une telle faute
sans rechercher et caractériser l’intention de nuire. À titre d’exemple, la Chambre sociale a
censuré une cour d’appel au motif que « si le délit de vol comporte un élément intentionnel,
celui-ci n’implique pas, par lui-même, l’intention de nuire à l’employeur, caractérisant la
faute lourde du salarié » (Cass. soc. 6 juill. 1999).
La responsabilité pécuniaire d’un salarié à l’égard de son employeur ne pouvant résulter que
de sa faute lourde, « ni la convention collective, ni le règlement intérieur de l’entreprise ne
peuvent instituer un cas de responsabilité pécuniaire de plein droit du salarié » (Cass. soc.
9 juin 1993).
Si la faute lourde est une condition essentielle pour mettre en œuvre la responsabilité du
salarié, il n’est pas nécessaire qu’un salarié ait commis une faute lourde pour être condamné,
à l’occasion de son licenciement, à verser à son employeur des sommes qu’il avait encaissées
pour le compte de ce dernier et qu’il devait lui restituer conformément à son obligation
contractuelle (Cass. Soc. 19 nov. 2002).
➢ Les circonstances atténuant la faute disciplinaire
➢
- L’ancienneté du salarié :
L’ancienneté du salarié est retenue par la Cour de cassation comme un élément atténuant la
gravité de sa faute et permettant la disqualification de la faute grave en faute simple. Il
s’ensuit alors que le salarié licencié bénéficiera des indemnités de préavis et de licenciement.
Cass. soc. 3 juin 1997 Gouhet Guichot c/Le Printania le fait isolé, pour une veilleuse de
nuit totalisant plus de 14 années d’ancienneté et n’ayant jamais fait l’objet de reproches
pour des faits similaires, de s’endormir momentanément pendant son service, ne peut
suffire à caractériser un manquement rendant impossible son maintien dans l’entreprise
pendant la durée du préavis et n’est donc pas constitutif d’une faute grave. En réalité,
dans cette affaire, il ressortait du dossier que l’employeur cherchait par tous les moyens
à évincer la salariée (ancienne déléguée syndicale) et lui avait tendu un véritable piège
pour se constituer un motif de rupture.
Cass. soc. 22 février 2000 Dudot c/Sté Niro Kestner : arrêt dans lequel la Cour de cassation
censure un arrêt qui avait retenu la faute grave d’un salarié qui se faisait rembourser ses frais
de déplacement suivant le barème applicable aux véhicules d’une puissance fiscale de 11
chevaux alors qu’il utilisait un véhicule de 5 chevaux : qu’en statuant ainsi, à l’égard d’un
salarié justifiant d’une ancienneté de plus de 30 années et qui n’avait fait l’objet d’aucun
grief, la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé un manquement rendant impossible le maintien
du salarié pendant la durée du préavis, a violé les articles L. 122-6 et L. 122-8 du Code du
travail dans leur rédaction applicable au litige.
Cass. soc. 18 juillet 2000 société Elfe c/Roméo : arrêt qui décide que la tentative
d’obtention de commissions indues de la part d’un salarié totalisant 24 années
d’ancienneté n’est pas constitutive d’une faute grave.
Cass. soc. 14 mai 1997 Sté Accor c/Poulot : la salariée avait été licenciée pour faute grave
pour avoir refusé de se soumettre à un changement de poste n’entraînant pas de modification
de son contrat de travail. Effectivement, le changement des conditions de travail s’impose au
salarié qui commet une faute grave (en principe) s’il refuse de s’y soumettre. Mais, en
l’occurrence, les juges du fond ont relevé un usage abusif par l’employeur de son pouvoir de
direction à l’effet de provoquer le départ de la salariée : il en résulte que le licenciement
intervenu dans ces conditions est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
1. La perte de confiance
En principe, la perte de confiance a été rejetée comme cause réelle et sérieuse, car « elle ne
constitue pas en soi un motif de licenciement » : Cass. soc. 29 novembre 1990 ; Cass. soc. 10
mai 2005.
La perte de confiance de l’employeur ne peut jamais constituer en tant que telle une cause de
licenciement même quand elle repose sur des éléments objectifs ; seuls ces éléments objectifs
peuvent, le cas échéant, constituer une cause de licenciement, mais non la perte de confiance
qui a pu en résulter pour l’employeur : Cass. soc. 29 mai 2001.
Néanmoins, par un arrêt du 10 février 2014, le Conseil d’État a validé la perte de confiance
comme motif valable de licenciement : CE, 10 février 2014 :
Le secrétaire général d’une chambre des métiers et de l’artisanat avait exercé,
concomitamment, les mêmes fonctions au sein d’une organisation identique. Son licenciement
pour perte de confiance a été décidé au titre de ce cumul de fonctions. Le requérant a saisi le
juge en vue de l’annulation de cette décision.
La mésentente pour être retenue comme cause légitime de licenciement, doit reposer sur un
comportement habituel ou répété du salarié. Elle n’est alors pas caractérisée si elle est
imputable à l’employeur : Cass. soc. 21 janvier 1987, ou si elle n’a pas d’incidence sur le
fonctionnement de l’entreprise : Cass. soc. 19 juillet 1989, 27 février 2007.
Licenciement ou tout autre mesure fondée sur : son origine, son sexe, ses mœurs, son
orientation sexuelle, son âge, sa situation de famille, sa grossesse, convictions religieuses,
race, opinion politique, activité syndicale, apparence physique, nom de famille, état de santé,
etc.
Il est de jurisprudence constante que, « aucun motif de la vie privée du salarié ne peut justifier
un licenciement » sauf dans deux hypothèses :
Exemple : un salarié d’un centre éducatif entretien une relation amoureuse avec une jeune
patiente : la Cour de cassation a dit : manquement du salarié aux règles éthiques de respect et
de correction : donc manquement à ses obligations découlant de son contrat de travail donc
licenciement pour motif disciplinaire possible : Cass. soc. 28 novembre 2012.
2e hypothèse : si le comportement du salarié a créé un trouble objectif caractérisé au
sein de l’entreprise (Cass. soc. 26 septembre 2012). Dans ce cas, un licenciement pour
motif personnel pourra être prononcé à son égard.
Exemple : condamnations pénales des salariés, la Cour de cassation a jugé, dans un arrêt du
26 septembre 2012 que, celle-ci pouvait constituer une cause réelle et sérieuse de
licenciement dès lors qu’elle avait « créé un trouble caractérisé et certain dans l’entreprise ».
Dans cette affaire, le salarié avait été condamné pour un crime à 8 ans d’emprisonnement.
La Cour de cassation avait alors considéré que le licenciement pour motif personnel du salarié
était bien fondé en raison du trouble objectif caractérisé causé à l’entreprise par :
– la forte émotion exprimée par les salariés de l’entreprise sur ce sujet et l’ouverture d’une
cellule psychologique pour assurer un soutien des salariés du service.
Dans l’arrêt du 12 février 2014, les faits étaient quasi similaires à la seule différence que le
motif de licenciement, à savoir la suspension du permis de conduire, était expressément prévu
par le contrat de travail du salarié. En l’espèce, par suite de la suspension de son permis de
conduire pour excès de vitesse commis au volant de son véhicule de fonction durant un
déplacement privé, un salarié occupant le poste de commercial vendeur, a été licencié pour
cause réelle et sérieuse au visa de l’article 10 de son contrat de travail lequel prévoyait la
rupture du contrat en cas de retrait de permis de conduire. Le salarié a alors saisir le conseil
des prud’hommes en vue d’obtenir la requalification du licenciement en licenciement sans
cause réelle et sérieuse. La cour d’appel l’a débouté de sa demande en considérant d’une part
que l’employeur n’avait fait qu’exécuter les termes du contrat de travail (lequel prévoyait
expressément la rupture du contrat de travail en cas de suspension du permis de conduire du
salarié), d’autre part, que l’impossibilité pour le salarié de poursuivre l’exécution de son
contrat de travail aux conditions et suivant les modalités convenues, avait causé un trouble
objectif caractérisé à l’entreprise justifiant le licenciement pour motif personnel du salarié.
Cette solution n’a pas été suivie par la Cour de cassation qui s’est contentée de préciser
qu’aucune clause du contrat ne peut valablement décider qu’une circonstance
quelconque constituera en elle-même une cause de licenciement.
La Cour de cassation approuve une cour d'appel qui, « s'en tenant aux termes de la lettre de
licenciement, a constaté que le salarié avait manqué aux obligations résultant de son contrat
de travail, qui lui imposait de disposer d'un véhicule, et que ce manquement rendait
impossible la poursuite de ce contrat » (Soc., 28 novembre 2018, n° 17-15.379, au Bull.).
Un parallèle peut être fait avec le licenciement motivé par la suspension du permis de
conduire du salarié. Une telle suspension, qui relève de la vie privée du salarié, peut justifier
le licenciement si elle empêche l'intéressé d'exercer les fonctions pour lesquelles il a été
engagé (Soc. 15 janvier 2014 n° 12-22.117 F-D). En l'espèce, la possession d'un véhicule était
indispensable à l'exécution du contrat de travail et il ne pouvait pas être raisonnablement
exigé de l'employeur qu'il fournisse un véhicule au salarié pour lui permettre de remplir sa
mission.
Tout employeur qui envisage de rompre – après la période d’essai – le contrat de travail à
durée indéterminée d’un salarié pour un motif personnel doit suivre une procédure de
licenciement précise :
re
➢ 1 étape : convocation à un entretien préalable par LRAR ou décharge (art. L
➢
1232-2)
Avant toute décision, l’employeur (ou son représentant) doit convoquer le salarié à un
entretien préalable de licenciement par lettre recommandée ou remise en main propre contre
décharge. La convocation doit mentionner :
- la date, le lieu et l’heure de l’entretien : la date de l’entretien doit être fixée au moins 5
jours ouvrables (tous les jours de la semaine sauf dimanche et jours fériés) après la
présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre ;
- la possibilité pour le salarié de se faire assister lors de l’entretien par une personne de
son choix (membre du personnel de l’entreprise ou, en l’absence de représentant du
personnel, conseiller du salarié).
La lettre doit aussi mentionner sans équivoque qu’un licenciement est envisagé. Les motifs
n’ont pas forcément à être indiqués à ce stade : Cass. soc. 6 avril 2016 N°14-23198.
Attention, dans le cas du licenciement pour motif disciplinaire, la convocation doit être
envoyée le plus rapidement possible et au plus tard dans les 2 mois à compter de la
connaissance du fait fautif.
e
➢ 2 étape : l’entretien préalable
➢
Lors de l’entretien, l’employeur expose les motifs du licenciement envisagé et recueille les
explications. Il ne peut pas donner mandat à une personne extérieure à l’entreprise pour faire
cela.
e
➢ 3 étape : la lettre de licenciement
➢
Après l’entretien, l’employeur doit attendre au moins 2 jours ouvrables pour envoyer – en
recommandé avec avis de réception – la lettre de licenciement.
Délai maximum de 1 mois en cas de licenciement disciplinaire.
L’employeur dispose à son tour d’un délai de 15 jours après la réception de la demande du
salarié pour apporter des précisions s’il le souhaite. Il communique ces précisions au salarié
par lettre recommandée avec AR ou remise contre récépissé.
Du reste, dans un délai de 15 jours suivant la notification du licenciement et selon les mêmes
formes, l’employeur peut, à son initiative, préciser les motifs du licenciement (C. trav., art. R.
1232-13 et R. 1233-2-2).
Art. L. 1235-2 : « Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement prévue aux articles L.
1232-6, L. 1233-16 et L. 1233-42 peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés
par l’employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié, dans des délais et
conditions fixés par décret en Conseil d’État.
La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l’employeur, fixe les limites du
litige en ce qui concerne les motifs de licenciement.
À défaut pour le salarié d’avoir formé auprès de l’employeur une demande en
application de l’alinéa premier, l’irrégularité que constitue une insuffisance de
motivation de la lettre de licenciement ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause
réelle et sérieuse et ouvre droit à une indemnité qui ne peut excéder un mois de salaire
(…) ».
La seule référence à la gravité des faits reprochés, à une perte de confiance ou à une
insuffisance professionnelle ne constitue pas une raison suffisamment précise.
Cette lettre fixe classiquement les limites du futur litige. Cela signifie que l’employeur ne
pourra plus par la suite invoquer d’autres motifs : Cass. soc. 27 février 2002.
Enfin, « la référence dans la lettre de licenciement aux motifs contenus dans le courrier de
convocation à l’entretien préalable ne constitue pas l’énoncé des motifs exigés par la loi » :
Cass. soc. 27 février 2002.
D. Date de la rupture :
II. LE PRÉAVIS
Sauf faute grave ou lourde, un préavis doit être observé d’une durée au moins égale à :
– un mois, si l’ancienneté du salarié est comprise entre 6 mois et 2 ans,
– deux mois, pour une ancienneté de 2 années ou plus (L1234-1).
Le préavis débute le jour de la première présentation de la lettre de notification, que le salarié
en accuse réception ou non. La convention collective peut prévoir des dispositions plus
avantageuses.
Si le licenciement d’un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée, mais
pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l’employeur d’accomplir la procédure
prévue et accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être
supérieure à un mois de salaire. Sauf exception visée ci-dessous, ces dispositions ne sont
toutefois pas applicables au licenciement d’un salarié de moins de deux ans d’ancienneté dans
l’entreprise et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de
11 salariés : dans ce cas, selon la jurisprudence de la Cour de cassation, le salarié peut
prétendre à une indemnité, dont le montant est fixé par le juge, destinée à réparer le préjudice
que lui fait subir l’irrégularité de la procédure.
En cas de méconnaissance des dispositions relatives à l’assistance du salarié par un conseiller,
les dispositions relatives aux irrégularités de procédure s’appliquent même au licenciement
d’un salarié ayant moins de deux ans d’ancienneté et au licenciement opéré dans une
entreprise employant habituellement moins de 11 salariés.
Art. L. 1235-2 : « Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement prévue aux articles L.
1232-6, L. 1233-16 et L. 1233-42 peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par
l’employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié, dans des délais et conditions
fixés par décret en Conseil d’État.
La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l’employeur, fixe les limites du litige en
ce qui concerne les motifs de licenciement.
À défaut pour le salarié d’avoir formé auprès de l’employeur une demande en application de
l’alinéa premier, l’irrégularité que constitue une insuffisance de motivation de la lettre de
licenciement ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse et ouvre
droit à une indemnité qui ne peut excéder un mois de salaire.
En l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, le préjudice résultant du vice de
motivation de la lettre de rupture est réparé par l’indemnité allouée conformément aux
dispositions de l’article L. 1235-3.
Lorsqu’une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement
d’un salarié intervient sans que la procédure requise aux articles L. 1232-2, L. 1232-3, L.
1232-4, L. 1233-11, L. 1233-12 et L. 1233-13 ait été observée ou sans que la procédure
conventionnelle ou statutaire de consultation préalable au licenciement ait été respectée, mais
pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une
indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire ».
Art. L. 1235-2-1 : « En cas de pluralité de motifs de licenciement, si l’un des griefs reprochés
au salarié porte atteinte à une liberté fondamentale, la nullité encourue de la rupture ne
dispense pas le juge d’examiner l’ensemble des griefs énoncés, pour en tenir compte, le cas
échéant, dans l’évaluation qu’il fait de l’indemnité à allouer au salarié, sans préjudice des
dispositions de l’article L. 1235-3-1. »
Comme tout licenciement, le licenciement pour motif économique doit être motivé et justifié
par une cause réelle et sérieuse.
Dans l’ensemble, pour que le licenciement pour motif économique soit fondé il faut donc :
– un motif non inhérent à la personne du salarié
– une cause économique (difficultés économiques, mutation technologique,
sauvegarde de la compétitivité, cessation d’activité de l’entreprise)
– un impact sur l’emploi
– En outre, le licenciement pour motif économique ne sera valable que si l’employeur
a satisfait à son obligation d’adaptation et de reclassement.
Le licenciement économique doit reposer sur un motif non inhérent à la personne du salarié,
c’est-à-dire un motif qui ne repose pas sur la personnalité ou le comportement du salarié.
C’est une situation étrangère à la personne du salarié qui doit déclencher le projet de
licenciement. Cette situation est nécessairement une situation économique, que celle-ci
concerne l’entreprise elle-même ou son environnement.
Le salarié ne doit pouvoir avoir aucune prise sur le motif de licenciement. C’est l’idée que la
qualité lato sensu du travail n’entre pas en ligne de compte dans la détermination du caractère
économique du licenciement.
Par exemple ne sont pas des motifs de licenciement du fait de leur caractère inhérent à la
personne du salarié les motifs :
– Disciplinaires.
Exemple : Cass. soc. 28 novembre 2007 : « les difficultés s’appréciant au niveau du secteur
d’activité du groupe auquel appartient l’entreprise qui licencie, la cour d’appel, qui n’est pas
sortie des limites du litige fixées par la lettre de licenciement, n’avait pas à rechercher si les
résultats de la société Ensival-Moret Kestner étaient bénéficiaires ».
Ceci emporte deux conséquences :
– Le licenciement économique peut être justifié dans une entreprise ne supportant pas
de difficultés économiques SI LE SECTEUR D’ACTIVITÉ DU GROUPE
AUQUEL ELLE APPARTIENT EST EN CRISE (espèce TRW Repas).
– Le licenciement peut ne pas être justifié dans une entreprise supportant des
difficultés économiques, mais DONT LE SECTEUR D’ACTIVITÉ DU GROUPE
EST PROSPÈRE (arrêt Thomson).
Cass. soc. 4 mars 2009 : selon l’employeur, l’activité de sciage de bois de chêne constitue un
secteur d’activité différent de celui du négoce de bois et matériaux de construction. Selon la
Cour : « la cour d’appel qui a constaté que les éléments produits par l’employeur, limités aux
entreprises situées sur le territoire français, ne permettaient pas de déterminer l’étendue du
secteur d’activité du groupe dont relevait la société Bosni, a pu en déduire que la réalité des
difficultés économiques invoquées n’était pas établie ». Dès lors, si l’employeur fait partie
d’un groupe, c’est à lui de communiquer au juge prud’homal les informations nécessaires
pour déterminer la consistance de ce groupe et celle du secteur d’activité concerné.
Par ces ceux arrêts publiés rendus le même jour, la Chambre sociale de la Cour de cassation a
rappelé le principe selon lequel, lorsque l’entreprise fait partie d’un groupe comprenant
d’autres entités qui interviennent sur le même secteur, la cause économique s’apprécie au
niveau du secteur d’activité commun (Cass. soc. 14 décembre 2011 ; Cass. soc. 14 décembre
2011).
La loi du 8 août 2016 définit avec plus de précisions les difficultés économiques pouvant
entraîner un licenciement économique. Les difficultés économiques rencontrées par
l’entreprise pourront notamment être caractérisées par une baisse des commandes ou du
chiffre d’affaires pendant un certain nombre de trimestres consécutifs, qui varie en fonction
de la taille de l’entreprise. Ce nombre est fixé à l’article L1233-3 du Code du travail :
Il suffit que l’entreprise remplisse ces conditions posées par la législation pour que le
licenciement économique soit mis en œuvre. Il sera alors difficile pour un salarié de contester
le motif économique de son licenciement dès lors que ces critères sont réunis. Cette définition
plus précise, avec l’introduction de nouveaux critères, aura également pour effet de réduire le
pouvoir d’interprétation des tribunaux quant aux motifs économiques avancés par l’entreprise
pour justifier le licenciement.
En toute hypothèse, il appartient aux juges du fond d’apprécier la réalité des difficultés
économiques invoquées. Il n’est pas exigé l’existence d’un état de cessation des paiements.
En revanche, le seul fait d’invoquer le coût élevé du travail, l’insuffisante rentabilité du poste
du salarié ne suffit pas à justifier des difficultés économiques (Cass. soc. 16 mars 1994). Il en
est de même de la seule diminution des marges de l’entreprise (Cass. soc. 21 mars 2001). En
revanche, à titre d’illustration, la perte, par l’employeur, de son unique client peut justifier
l’existence de difficultés économiques (Cass. soc. 19 juillet 2000).
Même si les difficultés économiques sont établies, le licenciement sera sans cause réelle et
sérieuse s’il apparaît que l’employeur a fait preuve d’une légèreté blâmable ou a eu une
attitude frauduleuse en organisant des difficultés de l’entreprise.
Cependant, d’une part, les juges vont apprécier si la mutation technologique invoquée par
l’employeur peut véritablement être considérée comme telle (par exemple, sur la question de
savoir si un simple changement de pro logiciel ou logiciel constitue une innovation
technologique en tant que telle : Cass. soc. 13 mai 2003.)
D’autre part, selon l’article L.6321-1 du Code du travail, l’employeur est tenu d’adapter les
salariés aux évolutions prévisibles de leur emploi.
En conséquence, le licenciement pourra être jugé abusif si l’employeur n’a pas au préalable
satisfait à son obligation d’adaptation.
Cette obligation d’adaptation impose à l’employeur d’offrir à ses salariés une période de
formation qui leur permette d’occuper le poste proposé (Cass. soc. 17 février 1998).
Cette obligation a une limite ; si l’employeur est tenu d’assurer l’adaptation des salariés à
l’évolution de leur emploi, au besoin en leur assurant une formation complémentaire, il ne
peut cependant lui être imposé d’assurer la formation initiale qui leur fait défaut (Cass. soc.
10 mars 2009).
« Lorsqu’elle n’est pas liée à des difficultés économiques, une réorganisation ne peut
constituer un motif économique que si elle est effectuée pour sauvegarder la
compétitivité du secteur d’activité » (Cass. soc. 29 mai 2001).
La notion de sauvegarde de la compétitivité est destinée à permettre aux entreprises de
procéder à des licenciements économiques pour prévenir des difficultés économiques qui
n’existent pas au moment du licenciement.
Le licenciement visant à anticiper des difficultés prévisibles est donc possible alors même que
l’entreprise bénéficie, au jour du licenciement, d’une situation financière saine (Cass. soc.
Pages jaunes 11 janvier 2006). Attention, cela ne signifie en aucun cas que des licenciements
économiques soient possibles pour améliorer la rentabilité de l’entreprise. L’employeur
doit toujours être en mesure de démontrer l’existence de menaces véritables pesant sur la
compétitivité de l’entreprise (Cass. soc. 31 mai 2006 Catimini ; Cass. soc. 21 novembre
2006, Dunlop).
La Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir retenu que l’entreprise aurait été
confrontée à des difficultés économiques si elle n’avait pas adapté son organisation au
nouveau mode de gestion de son fonds de commerce et donc que la nouvelle organisation
était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise.
Attention :
Tout d’abord, le juge est intransigeant sur l’idée que la cause doit bien relever d’une
« sauvegarde » de la compétitivité et non pas d’une « amélioration » de celle-ci. L’idée étant
qu’aucun licenciement économique ne peut être opéré dans le but d’augmenter les
profits. À l’inverse, le maintien de ces profits, qui n’est pas non plus le maintien de
l’entreprise comme l’avait voulu la loi de modernisation sociale, est parfaitement acceptable.
C’est l’idée qu’il vaut mieux, en amont accepter quelques centaines de licenciements, plutôt
que d’avoir à déplorer, en aval, la survenue de milliers de ruptures de contrats pour motif
économique.
Par ailleurs, le juge doit simplement se borner à constater que l’employeur excipe bien
une cause légale ou jurisprudentielle de licenciement économique.
Plus précisément, il n’appartient pas au juge d’arbitrer entre les différents choix offerts à
l’employeur, dès lors qu’il constate que la mesure critiquée avait pour but de sauvegarder la
compétitivité de l’entreprise : Ass. Plén. SAT 8 décembre 2000, Valéo Vision 17 décembre
2002.
Dans ces affaires, l’employeur avait le choix entre 86, 213 et 318 licenciements selon des
modalités différentes de réorganisation de sa société. Ayant choisi la solution la plus
préjudiciable à l’emploi (318 emplois supprimés), la Cour d’appel de Riom avait décidé que
les licenciements étaient sans cause réelle et sérieuse dans la mesure où l’employeur
sauvegardait sa compétitivité dans les trois options et où il devait prendre en compte dans ses
calculs le « concept de préservation de l’emploi ». Cassant cet arrêt sur la base d’un moyen
soulevé d’office, l’Assemblée plénière de la Cour de cassation a estimé qu’il n’appartient pas
au juge d’arbitrer entre les différents choix offerts à l’employeur, dès lors qu’il constate que la
mesure critiquée avait pour but de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise.
D. La cessation d’activité
La cessation d’activité de l’entreprise est, en soi, une cause de rupture légitime du contrat de
travail lorsqu’il est conclu pour une durée indéterminée. Toutefois, elle ne libère pas
l’employeur de son obligation de respecter un préavis (article L. 1234-7 du Code du travail) et
de verser l’indemnité de licenciement légalement due (article L. 1234-10 du Code du travail).
Certes, en cas de force majeure, cet arrêt définitif de l’activité emporte dispense de préavis et
d’indemnité de licenciement (article L. 1234-12 du même Code) et, en ce cas, c’est le
personnel qui donc supporte entièrement le risque de disparition de l’entreprise, sans pouvoir
prétendre au paiement d’une indemnité.
Mais les conditions posées pour que la force majeure soit caractérisée (événement extérieur
irrésistible/impossibilité de poursuivre le contrat de travail) réduisent considérablement le
champ d’application de cette cause d’exonération (Cass. soc. 12 février 2003).
En d’autres termes le risque économique que prend l’entrepreneur prime ici le risque que
constitue, pour son personnel, la disparition des emplois. Comme le jugeait en 1956 la
Chambre sociale, « aucune disposition légale ne fait obligation [à l’employeur] de maintenir
son activité à seule fin d’assurer à son personnel la stabilité de son emploi » (Cass. soc.
31 mai 1956).
Mais cette répartition inégale du risque a une limite : la cessation de l’activité ne constitue pas
une cause réelle et sérieuse de licenciement si elle résulte d’une légèreté blâmable ou d’une
faute de l’employeur (Cass. soc., 16 janvier 2001), des erreurs de gestion ne suffisant pas à
caractériser un tel manquement (Cass. soc. 14 décembre 2005).
Autrement dit, la liberté de dissoudre l’entreprise et de résilier ainsi les contrats de travail ne
permet pas de légitimer une décision qui trouve sa cause dans une faute de l’employeur. Cette
légèreté blâmable pourra notamment consister, pour l’employeur qui fait partie d’un groupe et
dont la situation est prospère, à interrompre son activité et à licencier tout son personnel à la
seule demande de la direction du groupe, dans la mesure où il fait ainsi primer son
er
appartenance au groupe sur l’intérêt de l’entreprise, au détriment de l’emploi (Cass. soc. 1
février 2011).
La liberté de mettre fin à son activité n’est donc pas sans limites.
Par ailleurs, si l’intégration dans le groupe est si poussée qu’une autre société du même
groupe contrôle en réalité les choix et les décisions de l’employeur, notamment dans la
gestion de son personnel, à la faveur d’une confusion d’intérêts, d’activité et de direction, une
situation de co-emploi pourra alors être caractérisée qui ne permettra plus d’invoquer une
cessation d’activité pour justifier le licenciement de tout le personnel de l’une des entités
puisque la cause économique devra exister chez chacun des co-employeurs.
Il faudra en ce cas que les licenciements reposent sur une autre cause économique constituée
au niveau du secteur d’activité du groupe dans lequel interviennent les co-employeurs (Cass.
soc. 18 janvier 2011). Le risque sera alors réparti comme pour toute autre cause de
licenciement pour motif économique.
D’après la jurisprudence, pour que la cessation d’activité constitue une cause économique
légitime de licenciement, elle doit : (Cass. soc. 18 janvier 2011).
•• concerner l’ensemble des établissements de l’entreprise : Cass. soc. 16 mars 2004.
•• être définitif et non temporaire : Cass. soc. 15 octobre 2002).
•• elle ne doit pas résulter d’une faute de l’employeur ou de sa légèreté blâmable :
Cass. soc. 16 janvier 2001 arrêt Morvant.
En d’autres termes, la cessation partielle d’activité ne justifie pas un licenciement pour motif
économique (Cass. soc. 10 octobre 2006).
La cessation partielle de l’entreprise qui ne concerne qu’un seul établissement ne pourra
justifier un licenciement économique qu’en cas de :
•• difficultés économiques
•• de mutation technologique
•• ou de réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité :
Cass. soc. 10 octobre 2006 ; Cass. soc. 25 septembre 2007.
De la même façon, « lorsque le salarié a pour co-employeurs des entités faisant partie
d’un même groupe, la cessation d’activité de l’une d’elles ne peut constituer une cause
économique de licenciement qu’à la condition d’être justifiée par des difficultés
économiques, par une mutation technologique ou par la nécessité de sauvegarder la
compétitivité du secteur d’activité du groupe dont elles relèvent » (Cass. soc. 18 janvier
2011).
Si un salarié est licencié alors que son emploi est maintenu et occupé par un autre salarié c’est
que le motif de son licenciement se trouvait nécessairement attaché à sa personne et qu’en
conséquence celui-ci ne recouvre pas de caractère économique.
Cass. soc. 24 avril 1990 Voissot : un licenciement motivé par le caractère trop onéreux d’un
salarié n’est pas économique, car est inhérent à sa personne et ne fait pas suite à une
suppression d’emploi.
Le juge va chercher ici à mettre en évidence le lien de causalité entre les difficultés
économiques (causes originelles) et la suppression effective de l’emploi litigieux (Cass. soc.
11 juin 2002). La suppression d’emploi doit être la conséquence des difficultés économiques.
Ainsi, la lettre de licenciement devra clairement faire apparaître les liens entre motif
économique et disparition de l’emploi. Si tel n’est pas le cas, le licenciement est dépourvu de
cause réelle et sérieuse.
A. PRINCIPES CLASSIQUES
1° L’obligation d’adaptation
2° L’obligation de reclassement
L’article L. 1233-4 du Code du travail prévoit que : « Le licenciement pour motif économique
d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été
réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré sur les emplois
disponibles, situés sur le territoire national dans l’entreprise ou les autres entreprises du
groupe dont l’entreprise fait partie et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation
assurent la permutation de tout ou partie du personnel ».
Aux termes des articles L1233-38 et suivants du Code du travail, lorsque l’employeur procède
au licenciement pour motif économique de 10 salariés ou plus dans une même période de 30
jours, l’employeur doit respecter la procédure des grands licenciements économiques.
Par ailleurs, il est de jurisprudence constante que les ruptures conventionnelles, lorsqu’elles
ont une cause économique et s’inscrivent dans un processus de réduction des effectifs dont
elles constituent la ou l’une des modalités, doivent être prises en compte pour calculer le
seuil de déclenchement de la procédure des grands licenciements économiques.
D’après l’article L1233-38 les étapes procédurales que doit respecter l’employeur sont :
A. Définition
Depuis la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002, le terme de « plan social » a été
remplacé par la notion « plan de sauvegarde de l’emploi ».
Un plan de sauvegarde de l’emploi se définit par un ensemble de mesures qui ont pour but
d’éviter ou limiter le nombre des licenciements pour motifs économiques, et de favoriser le
reclassement des salariés licenciés. Un tel plan doit être mis en œuvre par toute entreprise
d’au moins 50 salariés qui procède au licenciement pour motifs économiques d’au moins 10
salariés sur 30 jours.
Cet accord collectif doit déterminer au moins le contenu du plan de sauvegarde de l’emploi,
mais il peut aussi préciser les modalités de consultation du CSE et de mise en œuvre des
licenciements (la pondération et le périmètre d’application des critères d’ordre des
licenciements, le calendrier des licenciements, le nombre de suppressions d’emplois et les
catégories professionnelles concernées, les modalités de mise en œuvre des mesures de
formation, d’adaptation et de reclassement.
D’après l’article L1244-24-1, le PSE peut également résulter d’un document unilatéral
homologué par l’administration.
Selon l’article L 1233-57-1, le document élaboré par l’employeur mentionné à l’article L 1233
-24-4 est transmis à l’autorité administrative pour homologation du document. En
présence d’un document unilatéral, l’administration exerce son contrôle dans un délai de 21
jours.
Actualités.
Soc. 30 septembre 2020 n° 19-13.714 : demande de validation d’un accord collectif ou
d’homologation d’un document de l’employeur fixant le contenu du plan de sauvegarde de
l’emploi :
Il résulte des articles L. 1233-57-5 et L. 1235-7-1 du code du travail que toute demande
tendant, avant la transmission de la demande de validation d’un accord collectif ou
d’homologation d’un document de l’employeur fixant le contenu du plan de sauvegarde de
l’emploi, à ce qu’il soit enjoint à l’employeur de fournir les éléments d’information relatifs à
la procédure en cours ou de se conformer à une règle de procédure prévue par les textes
législatifs, est adressée à l’autorité administrative. Les décisions prises à ce titre ainsi que la
régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l’objet d’un litige distinct
de celui relatif à la décision de validation ou d’homologation relevant de la compétence, en
premier ressort, du tribunal administratif, à l’exclusion de tout autre recours administratif ou
contentieux.
Dès lors, une cour d’appel qui constate que les demandes d’un comité d’entreprise et d’un
syndicat tendent à ce qu’il soit enjoint à l’employeur de suspendre sous astreinte la fermeture
de magasins et toute mise en œuvre d’un projet de restructuration avant l’achèvement de la
consultation des instances représentatives du personnel relative au projet de restructuration et
au projet de licenciement collectif pour motif économique donnant lieu à l’établissement d’un
plan de sauvegarde de l’emploi, en déduit exactement, sans méconnaître le principe du droit
au recours effectif, que ces demandes ne relèvent pas de la compétence du juge judiciaire.
Le PSE doit prévoit un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés.
À défaut de plan de reclassement, le PSE est nul ce qui entraîne la nullité des actes
subséquents à savoir :
➢ les licenciements qui auront été prononcés
➢
➢ les départs volontaires : Cass. soc. 30 mai 2013 (attention examen) :
➢
Par un arrêt du 30 mai 2013, la Cour de cassation rappelle l’obligation pour l’employeur
d’intégrer dans le PSE, un plan de reclassement conformément à l’article L1235-10 du Code
du travail, à défaut de quoi, la procédure de licenciement est nulle ce qui affecte les actes
subséquents et notamment les départs volontaires subséquents.
En effet, le licenciement pour motif économique ne peut intervenir que lorsque le
reclassement de l’intéressé ne peut être opéré ce qui suppose, dans le cadre de grands
licenciements économiques, l’élaboration d’un plan de reclassement intégré au PSE.
La Cour de cassation rappelle cette exigence légale tout en confirmant une jurisprudence
antérieure selon laquelle l’exigence d’intégrer un plan de reclassement dans le PSE joue
également en matière de départs volontaires de salariés inclus dans le PSE.
En 2010, la Haute juridiction a admis que, dès lors que le projet de réduction des effectifs
n’envisage que des départs volontaires et comporte l’engagement exprès de ne procéder à
aucun licenciement, l’employeur soit dispensé de son obligation légale d’établir un plan de
reclassement interne s’intégrant au PSE : Cass. soc. 26 octobre 2010.
Mais en 2012, la Cour de cassation a fait un pas de plus : si l’employeur qui entend
supprimer des emplois pour des raisons économiques en concluant avec les salariés des
accords de rupture amiable, n’est pas tenu d’établir un plan de reclassement interne
lorsque le plan de réduction des effectifs au moyen de départs volontaires exclut tout
licenciement pour atteindre des objectifs qui lui sont assignés en terme de suppression
d’emplois, il en va autrement lorsque le projet de réduction d’effectifs de l’employeur
implique la suppression de l’emploi de salariés qui ne veulent ou ne peuvent quitter
l’entreprise dans le cadre du plan de départs volontaires : Cass. 25 janvier 2012.
En d’autres termes, lorsque le projet de réduction des effectifs implique la suppression de
l’emploi de salariés qui ne veulent ou qui ne peuvent quitter l’entreprise dans le cadre du plan
de départ volontaire, un plan de reclassement interne doit être élaboré.
– des actions en vue du reclassement interne des salariés sur des emplois relevant de
la même catégorie d’emplois ou équivalents à ceux qu’ils occupent ou, sous réserve
de l’accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ;
– des créations d’activités nouvelles par l’entreprise ;
– des actions favorisant le reclassement externe à l’entreprise (notamment par le
soutien à la réactivation du bassin d’emploi) ;
– des actions de soutien à la création d’activités nouvelles ou à la reprise d’activités
existantes par les salariés ;
– des actions de formation, de validation des acquis de l’expérience (VAE) ou de
reconversion de nature à faciliter le reclassement interne ou externe des salariés sur
des emplois équivalents ;
– des mesures de réduction ou d’aménagement du temps de travail ainsi que des
mesures de réduction du volume des heures supplémentaires réalisées de manière
régulière (lorsque ce volume montre que l’organisation du travail de l’entreprise est
établie sur la base d’une durée collective manifestement supérieure à 35 heures
hebdomadaires ou 1 600 heures par an et que sa réduction pourrait préserver tout ou
partie des emplois dont la suppression est envisagée) ;
– les conditions de mise en œuvre du congé de reclassement (lorsqu’il est obligatoire).
En toutes hypothèses, le chef d’entreprise doit faire figurer dans son plan de sauvegarde de
l’emploi un ensemble de mesures concrètes et efficaces afin de favoriser le reclassement des
salariés ou d’éviter leur licenciement (Cass. soc 28 mars 2000 Lasnon).
Les moyens mis en œuvre par le plan de sauvegarde de l’emploi doivent être proportionnés
aux moyens dont dispose l’entreprise ou, le cas échéant, l’UES ou le groupe, afin d’éviter des
licenciements ou de favoriser des reclassements.
En effet, une très grande entreprise n’a pas les mêmes moyens matériels et humains qu’une
PME, ce qui implique que le juge apprécie les mesures du plan de sauvegarde de l’emploi au
regard des possibilités et donc de la situation concrète de l’entreprise.
En toutes hypothèses, l’employeur ne peut se contenter de mentionner dans son PSE les
mesures de l’article L1233-62. Les mesures qui figurent dans le PSE doivent être
suffisamment précises.
Le PSE doit en outre indiquer précisément la localisation des emplois offerts dans le cadre du
reclassement interne (Cass. soc. 10 juin 2007) ainsi que les catégories professionnelles
concernées par le projet de licenciement collectif (Cass. soc. 13 février 1997).
Les règles relatives à l’ordre des licenciements (essentiellement celles de l’article L1233-5 du
Code du travail) sont destinées à garantir que le choix des salariés effectivement licenciés
pour un motif économique sera contrôlable parce qu’effectué en fonction de critères
préétablis.
En l’absence de convention ou d’accord collectif applicable, l’employeur doit fixer l’ordre
des licenciements et les critères retenus afin de les fixer : article L1233-5 et suivants (charges
de famille, ancienneté, statut du salarié, réinsertion).
« l'inobservation des règles relatives à l'ordre des licenciements n'a pas pour effet de priver le
licenciement de cause réelle et sérieuse » (Soc. 20 janvier 1998, nº 96-40930, Bull. nº 20 –
Soc. 26 janvier 1999, nº 97-40463, Bull. nº 39 Dr. soc. 1999. 530)
« les critères de l'ordre des licenciements doivent faire l'objet d'une mise en oeuvre distincte
par catégorie professionnelle, c'est-à-dire à l'ensemble des salariés qui au sein de l'entreprise
exercent des fonctions de même nature supposant une formation commune » (Soc. 23
septembre 2015 nº 13-28621 – déjà Soc. 8 novembre 2011 nº 10-15160 nº 10-15161 nº 10-
15159)
L’établissement des critères de l’ordre des licenciements est obligatoire en tenant compte de
ceux fixés par la loi et par la convention collective. Ils s’appliquent à l’ensemble du personnel
de l’entreprise (Cass. soc. 24 mars 1993) et par catégorie professionnelle ou catégorie
d’emploi (Cass. soc. 13 février 1997). Néanmoins, « les règles relatives à l’ordre des
licenciements prononcés pour motif économique ne s’appliquent que si l’employeur doit
opérer un choix parmi les salariés à licencier. ». Tel n’est pas le cas lorsque le licenciement
concerne tous les salariés d’une entreprise appartenant à la même catégorie professionnelle
(Cass. soc. 27 mai 97).
Tout employeur qui envisage de rompre – après la période d’essai – le contrat de travail à
durée indéterminée d’un seul salarié pour un motif économique doit respecter les règles
concernant :
➢ le reclassement du salarié ;
➢ l’ordre des licenciements ;
➢ la convocation du salarié à un entretien préalable avant toute décision ;
➢ la notification du licenciement ;
➢ l’information de la DREETS ;
➢ le préavis.
Lorsque le licenciement touche un salarié protégé, l’employeur doit obtenir une autorisation
de l’inspecteur du travail pour pouvoir le licencier.
Le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque :
– et que le reclassement du salarié sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il
occupe ou sur un emploi équivalent assorti d’une rémunération équivalente (la rémunération à
prendre en compte est la rémunération globale) ou, à défaut, et sous réserve de l’accord
exprès du salarié, sur un emploi d’une catégorie inférieure ne peut être réalisé dans le cadre de
l’entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient.
Les offres de reclassement ainsi proposées doivent être écrites et précises.
Une procédure spécifique s’applique lorsque l’entreprise ou le groupe auquel elle appartient
dispose d’implantations hors du territoire national. Cette procédure consiste pour l’employeur,
avant de faire des propositions de reclassement à l’étranger, à s’assurer que le salarié concerné
est d’accord pour recevoir de telles propositions et à quelles conditions. Les étapes suivantes
sont prévues :
Le salarié manifeste son accord, assorti le cas échéant des restrictions mentionnées ci-dessus
(niveau de rémunération, localisation de l’emploi proposé, etc.) pour recevoir de telles offres,
dans un délai de 6 jours ouvrables à compter de la réception de la proposition de l’employeur.
Le salarié qui ne répond pas dans ce délai est présumé ne pas vouloir recevoir de propositions
de reclassement hors du territoire national.
Avant toute décision de licenciement, l’employeur (ou son représentant) doit convoquer le
salarié à un entretien préalable par lettre recommandée ou remise en main propre contre
décharge qui mentionne :
– l’objet de l’entretien (c’est-à-dire le projet de licenciement) énoncé clairement et
sans équivoque ;
C’est également au cours de cet entretien préalable que l’employeur doit informer le salarié
du contenu et des modalités de mise en œuvre des dispositifs spécifiques de reclassement dont
il peut bénéficier : contrat de sécurisation professionnelle (CSP) si l’entreprise compte moins
de 1 000 salariés ou s’il s’agit d’une entreprise en redressement ou liquidation judiciaire quel
que soit son effectif ; congé de reclassement si l’entreprise (ou l’établissement) compte au
moins 1 000 salariés.
L’employeur est tenu d’informer la DREETS. Cette information prend la forme d’une lettre
recommandée avec avis de réception qui précise :
V. LE PRÉAVIS
Des dispositions plus favorables peuvent figurer dans le contrat de travail ou dans la
convention collective applicable à l’entreprise. En outre, des dispositions spécifiques
s’appliquent lorsque le salarié choisit de bénéficier d’une convention de reclassement
personnalisé ou d’un congé de reclassement.
En cas de licenciement d’un salarié protégé, l’employeur doit en outre obtenir une
autorisation de l’inspection du travail.
Dans les entreprises dotées d’un CSE central, l’employeur réunit ce dernier ou les CSE
d’établissements intéressés dès lors que les mesures envisagées excèdent le pouvoir du ou des
chefs d’établissement concernés ou portent sur plusieurs établissements simultanément.
L’employeur convoque les représentants du personnel et leur remet d’abord un document écrit
qui précise :
Avec ces renseignements est également transmis aux représentants du personnel un document
précisant les conditions de mise en œuvre du congé de reclassement.
L’employeur réunit ensuite les représentants du personnel. Ces derniers émettent un avis sur
le projet de licenciement collectif et sur les mesures sociales d’accompagnement des
licenciements envisagées. Cet avis est transmis à la DREETS par l’employeur.
Le licenciement intervenu dans une entreprise dépourvue de CSE alors qu’aucun procès-
verbal de carence n’a été établi est irrégulier.
Afin de déterminer les salariés susceptibles d’être licenciés, l’employeur doit tenir compte des
critères prévus par la convention collective ou, au moins, par le Code du travail.
IV. LA CONVOCATION A UN ENTRETIEN PRÉALABLE
Le salarié est convoqué par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre
décharge.
Cette lettre précise l’objet de l’entretien et la possibilité, pour le salarié, d’être assisté par une
personne de son choix appartenant à l’entreprise, si l’entreprise est dépourvue de
représentants du personnel (délégués du personnel, membres du comité d’entreprise ou
d’établissement, délégués syndicaux), soit par une personne de son choix appartenant au
personnel de l’entreprise, soit par un conseiller du salarié. Dans ce dernier cas, la lettre
précise également les adresses des services auprès desquels consulter la liste de ces
conseillers.
La liste des conseillers du salarié est disponible auprès de la mairie, de la DREETS ou de
l’inspection du travail.
V. L’ENTRETIEN PRÉALABLE
Il ne peut avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée
ou la remise en main propre de la lettre de convocation.
Au cours de l’entretien, le salarié peut être assisté par une personne de son choix appartenant
à l’entreprise. Lorsqu’il n’y a pas d’institutions représentatives du personnel dans l’entreprise,
le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix appartenant au personnel de
l’entreprise, soit par un conseiller du salarié.
La date de la rupture du contrat est celle de la fin du préavis, qu’il soit ou non effectué.
I. LE PRÉAVIS
Le salarié non dispensé de préavis continue de travailler dans l’entreprise, dans les conditions
habituelles, et de percevoir sa rémunération (salaire, primes éventuelles...).
Durée du préavis
La durée du préavis varie en fonction de l’ancienneté du salarié, dans les conditions
suivantes :
Ancienneté Durée du préavis
Moins de 6 mois Durée fixée :
I. soit par la convention collective,
II. soit par accord collectif,
III. soit par les usages pratiqués dans l’entreprise
ou la profession
Entre 6 mois et 2 1 mois
ans
À partir de 2 ans 2 mois
Des dispositions conventionnelles, collectives ou contractuelles peuvent prévoir une durée du
préavis plus favorable.
Employeurs de 11 salariés et plus. Lorsque le licenciement survient pour une cause qui n’est
pas réelle et sérieuse, c’est-à-dire sans justification, le juge peut proposer la réintégration du
salarié, avec maintien de ses avantages acquis. En cas de refus de cette réintégration par l’une
ou l’autre des parties, le juge accorde au salarié une indemnité à la charge de l’employeur
comprise entre les montants minimaux et maximaux ci-dessous :
Ancienneté du salarié dans Indemnité minimale Indemnité maximale
l’entreprise (en mois de salaire (en mois de salaire
(en années complètes) brut) brut)
0 Sans objet 1
1 1 2
2 3 3,5
3 3 4
4 3 5
5 3 6
6 3 7
7 3 8
8 3 8
9 3 9
10 3 10
11 3 10,5
12 3 11
13 3 11,5
14 3 12
15 3 13
16 3 13,5
17 3 14
18 3 14,5
19 3 15
20 3 15,5
21 3 16
22 3 16,5
23 3 17
24 3 17,5
25 3 18
26 3 18,5
27 3 19
28 3 19,5
29 3 20
30 et au-delà 3 20
Employeurs de moins de 11 salariés. Lorsque le licenciement est mis en œuvre dans une
entreprise qui occupe habituellement moins de 11 salariés, les montants minimaux sont
inférieurs à ceux qui précèdent :
0 Sans objet
1 0,5
2 0,5
3 1
4 1
5 1,5
6 1,5
7 2
8 2
9 2,5
10 2,5
Cas particulier des licenciements entachés de nullité. Les barèmes indiqués ci-dessus ne
sont pas applicables si le licenciement est entaché de nullité, par exemple s’il présente un
caractère discriminatoire, s’il fait suite à des faits de harcèlement ou s’il résulte de la
violation d’une liberté fondamentale du salarié. Dans ces hypothèses, quand le salarié ne
réclame pas la poursuite de son contrat de travail ou si la réintégration dans l’entreprise est
impossible, le juge lui octroie une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des 6
derniers mois. Cette somme est due sans préjudice, s’il y a lieu, de l’indemnité de
licenciement légale, conventionnelle ou contractuelle.
Chambre sociale, 11 mai 2022, 21-15.247. Société FSM, Fives Stein Manufacturing.
D'une part, aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de
l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, applicable au litige, si le licenciement d'un
salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la
réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou
l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la
charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et
maximaux.
D'autre part, dans la partie I de la Charte sociale européenne, « les Parties reconnaissent
comme objectif d'une politique qu'elles poursuivront par tous les moyens utiles, sur les plans
national et international, la réalisation de conditions propres à assurer l'exercice effectif des
droits et principes » ensuite énumérés, parmi lesquels figure le droit des travailleurs à une
protection en cas de licenciement. Selon l'article 24 de cette même Charte, « en vue d'assurer
l'exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement, les Parties s'engagent à
reconnaître :
a) le droit des travailleurs à ne pas être licenciés sans motif valable lié à leur aptitude ou
conduite, ou fondé sur les nécessités de fonctionnement de l'entreprise, de l'établissement ou
du service ;
b) le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou à une
autre réparation appropriée. A cette fin les Parties s'engagent à assurer qu'un travailleur qui
estime avoir fait l'objet d'une mesure de licenciement sans motif valable ait un droit de
recours contre cette mesure devant un organe impartial. »
L'annexe de la Charte sociale européenne précise qu'il « est entendu que l'indemnité ou toute
autre réparation appropriée en cas de licenciement sans motif valable doit être déterminée
par la législation ou la réglementation nationales, par des conventions collectives ou de toute
autre manière appropriée aux conditions nationales. »
L'article 24 précité figure dans la partie II de la Charte sociale européenne qui indique que «
les Parties s'engagent à se considérer comme liées, ainsi que prévu à la partie III, par les
obligations résultant des articles et des paragraphes » qu'elle contient. Dans la Partie III de
la Charte, il est indiqué que « chacune des Parties s'engage : a) à considérer la partie I de la
présente Charte comme une déclaration déterminant les objectifs dont elle poursuivra par
tous les moyens utiles la réalisation, conformément aux dispositions du paragraphe
introductif de ladite partie ; b) à se considérer comme liée par six au moins des neuf articles
suivants de la partie II de la Charte : articles 1, 5, 6, 7, 12, 13, 16, 19 et 20 ; c) à se
considérer comme liée par un nombre supplémentaire d'articles ou de paragraphes numérotés
de la partie II de la Charte, qu'elle choisira, pourvu que le nombre total des articles et des
paragraphes numérotés qui la lient ne soit pas inférieur à seize articles ou à soixante-trois
paragraphes numérotés. »
Sous réserve des cas où est en cause un traité international pour lequel la Cour de justice de
l'Union européenne dispose d'une compétence exclusive pour déterminer s'il est d'effet direct,
les stipulations d'un traité international, régulièrement introduit dans l'ordre juridique interne
conformément à l'article 55 de la Constitution, sont d'effet direct dès lors qu'elles créent des
droits dont les particuliers peuvent se prévaloir et que, eu égard à l'intention exprimée des
parties et à l'économie générale du traité invoqué, ainsi qu'à son contenu et à ses termes,
elles n'ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent
l'intervention d'aucun acte complémentaire pour produire des effets à l'égard des particuliers.
Il résulte des dispositions précitées de la Charte sociale européenne que les Etats
contractants ont entendu reconnaître des principes et des objectifs, poursuivis par tous les
moyens utiles, dont la mise en œuvre nécessite qu'ils prennent des actes complémentaires
d'application selon les modalités rappelées aux paragraphes 13 et 17 du présent arrêt et dont
ils ont réservé le contrôle au seul système spécifique rappelé au paragraphe 18 (Assemblée
plénière, avis de la Cour de cassation, 17 juillet 2019, n° 19-70.010 et n° 19-70.011 ; 1re Civ.,
21 novembre 2019, pourvoi n° 19-15.890, publié).
C'est dès lors à bon droit que la cour d'appel a retenu que, les dispositions de la Charte
sociale européenne n'étant pas d'effet direct en droit interne dans un litige entre
particuliers, l'invocation de son article 24 ne pouvait pas conduire à écarter l'application
des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail et qu'il convenait d'allouer en
conséquence à la salariée une indemnité fixée à une somme comprise entre les montants
minimaux et maximaux déterminés par ce texte.
Chambre sociale, 11 mai 2022, 21-14.490, Société Pleyel centre de santé mutualiste.
Aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la loi
doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. En application de
l'article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause
qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de
l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux fixés par
ce texte. Pour déterminer le montant de l'indemnité, le juge peut tenir compte, le cas échéant,
des indemnités de licenciement versées à l'occasion de la rupture, à l'exception de l'indemnité
de licenciement mentionnée à l'article L. 1234-9.
Cette indemnité est cumulable, le cas échéant, avec les indemnités prévues aux articles L.
1235-12, L. 1235-13 et L. 1235-15, dans la limite des montants maximaux prévus au même
article. Aux termes de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'Organisation internationale
du travail (l'OIT), si les organismes mentionnés à l'article 8 de la présente convention
arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, et si, compte tenu de la législation
et de la pratique nationales, ils n'ont pas le pouvoir ou n'estiment pas possible dans les
circonstances d'annuler le licenciement et/ou d'ordonner ou de proposer la réintégration du
travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d'une indemnité adéquate ou
toute autre forme de réparation considérée comme appropriée.
Les stipulations de cet article 10 qui créent des droits dont les particuliers peuvent se
prévaloir à l'encontre d'autres particuliers et qui, eu égard à l'intention exprimée des parties
et à l'économie générale de la convention, ainsi qu'à son contenu et à ses termes, n'ont pas
pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l'intervention d'aucun
acte complémentaire, sont d'effet direct en droit interne (voir également : Assemblée plénière,
avis de la Cour de cassation, 17 juillet 2019, n° 19-70.010 et n° 19-70.011).
En effet, la Convention n° 158 de l'OIT précise dans son article 1er : « Pour autant que
l'application de la présente convention n'est pas assurée par voie de conventions collectives,
de sentences arbitrales ou de décisions judiciaires, ou de toute autre manière conforme à la
pratique nationale, elle devra l'être par voie de législation nationale. »
A cet égard, il convient de relever qu'aux termes de l'article L. 1235-3-1 du code du travail,
l'article L. 1235-3 de ce code n'est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement
est entaché d'une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article. Dans ce cas,
lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que
sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur,
qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Les nullités mentionnées au
premier alinéa sont celles qui sont afférentes à :
1° La violation d'une liberté fondamentale ;
2° Des faits de harcèlement moral ou sexuel dans les conditions mentionnées aux articles L.
1152-3 et L. 1153-4 ;
3° Un licenciement discriminatoire dans les conditions mentionnées aux articles L. 1132-4 et
L. 1134-4 ;
4° Un licenciement consécutif à une action en justice en matière d'égalité professionnelle
entre les femmes et les hommes dans les conditions mentionnées à l'article L. 1144-3, ou à
une dénonciation de crimes et délits ;
5° Un licenciement d'un salarié protégé mentionné aux articles L. 2411-1 et L. 2412-1 en
raison de l'exercice de son mandat ;
6° Un licenciement d'un salarié en méconnaissance des protections mentionnées aux articles
L. 1225-71 et L. 1226-13.
En application de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut faire l'objet
d'une discrimination en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de son orientation
sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de
ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation
économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-
appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses
opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat
électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de
son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa
perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que
le français.
Il en résulte, d'une part, que les dispositions des articles L. 1235-3 et L. 1235-3-1 du code
du travail, qui octroient au salarié, en cas de licenciement injustifié, une indemnité à la
charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et
maximaux variant en fonction du montant du salaire mensuel et de l'ancienneté du salarié
et qui prévoient que, dans les cas de licenciements nuls dans les situations ci-dessus
énumérées, le barème ainsi institué n'est pas applicable, permettent raisonnablement
l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi.
Il en résulte, d'autre part, que le caractère dissuasif des sommes mises à la charge de
l'employeur est également assuré par l'application, d'office par le juge, des dispositions
précitées de l'article L. 1235-4 du code du travail. Les dispositions des articles L. 1235-3, L.
1235-3-1 et L. 1235-4 du code du travail sont ainsi de nature à permettre le versement d'une
indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l'article 10
de la Convention n° 158 de l'OIT. Il en résulte que les dispositions de l'article L. 1235-3 du
code du travail sont compatibles avec les stipulations de l'article 10 de la Convention
précitée.
Pour condamner l'employeur au paiement d'une somme supérieure au montant maximal
prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail, l'arrêt constate, d'une part, que ce texte
prévoit, pour une ancienneté inférieure à 4 ans, une indemnité de licenciement injustifié
comprise entre 13 211 et 17 615 euros, et, d'autre part, que la salariée justifie, en raison de sa
qualité de demandeur d'emploi jusqu'en août 2019 et déduction faite des revenus perçus de
Pôle emploi, d'une perte supérieure à 32 000 euros.
L'arrêt retient que ce montant représente à peine la moitié du préjudice subi en termes de
diminution des ressources financières de la salariée et ne permet donc pas, compte tenu de la
situation concrète et particulière de la salariée, âgée de 53 ans à la date de la rupture, une
indemnisation adéquate et appropriée du préjudice subi, compatible avec les exigences de
l'article 10 de la Convention n° 158 de l'OIT.
La prise d’acte désigne tout acte par lequel le salarié notifie à l’employeur qu’il met fin au
contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, quelle que soit la
dénomination utilisée dans cet acte.
Confronté à une violation par l’employeur de ses obligations, le salarié peut prendre acte de la
rupture de son contrat de travail (Cass. soc. 25 juin 2003).
– Que le grief invoqué par le salarié existe à la date de la rupture, qu’il soit réel. À
éviter donc la prise d’acte prématurée, par exemple à l’occasion d’un simple projet de
réduction des salaires : tant que la fiche de paie n’a pas été effectivement amputée
(Cass. soc. 16 mai 2012) ;
Par trois arrêts récents du 26 mars 2014, la Cour de cassation est venue apporter des
précisions sur la « gravité suffisante » des manquements justifiant la prise d’acte du salarié.
Elle a jugé que le manquement suffisamment grave est celui qui rend impossible la
poursuite du contrat de travail.
Reste à savoir ce qu’il faut entendre par manquement « rendant impossible la poursuite du
contrat de travail du salarié ».
À ce sujet, la Cour de cassation a dégagé un faisceau d’indices permettant de juger si oui ou
non, le manquement invoqué par le salarié a pu rendre impossible la poursuite du contrat de
travail de ce dernier :
er
➢ 1 indice : l’écoulement du temps
➢
L’écoulement du temps entre le moment ou l’employeur commet un manquement et celui où
le salarié prend acte de la rupture, peut constituer un indice laissant penser que la poursuite du
contrat de travail était bien possible. À défaut, le salarié aurait pris acte de la rupture
beaucoup plus rapidement.
Toutefois, selon Pierre BAILLY, doyen de la Chambre sociale de la Cour de cassation,
l’écoulement du temps ne permet pas automatiquement de juger la prise d’acte comme
infondée.
Selon lui, « il serait erroné de considérer également qu’une modification ne peut justifier
une résiliation si elle s’est poursuivie pendant longtemps. La faute de l’employeur ne
disparaît pas si le contrat s’exécute avec cette modification ».
➢ 2e indice : la répétition du manquement par l’employeur
➢
Il ressort des arrêts du 26 mars 2014 qu’un manquement isolé de l’employeur ne justifierait
pas la prise d’acte du salarié.
e
➢ 3 indice : l’influence défavorable sur le montant de la rémunération perçue par le
➢
salarié ; critère retenu par l’arrêt du 12 juin 2014.
Par deux arrêts du 12 juin 2014, la Cour de cassation retient comme critère d’appréciation du
manquement grave de l’employeur, « l’effet défavorable sur le montant de la
rémunération perçue par le salarié ».
Dans ces deux affaires, l’employeur avait porté atteinte à la rémunération du salarié.
Parce que cette modification n’avait pas eu d’effet défavorable sur le montant global de la
rémunération perçue par le salarié, alors la Cour de cassation jugeait la rupture à
l’initiative du salarié comme non fondée.
« une cour d’appel peut décider qu’une salariée avait manifesté de façon claire, sérieuse, non
équivoque, et réitérée sur plusieurs jours, sa volonté unilatérale de mettre fin à son contrat de
travail, de sorte que la rupture de celui-ci résultait de sa démission, après avoir relevé que
l'intéressée avait annoncé à des collaborateurs son intention de démissionner le vendredi 21
octobre ; que si lors d'échanges de courriels le dimanche suivant, elle avait évoqué auprès de
son employeur une séparation à l'amiable, elle avait confirmé plus tard dans la soirée sa
volonté de démissionner et avait, le lendemain, annoncé sa démission à ses collaborateurs ;
que les termes du courriel du 25 octobre confirmaient la volonté unilatérale de l'intéressée de
quitter l'entreprise, son message du 28 octobre constituant une rétractation tardive et sans effet
sur la démission » (Cass. soc. 9-11-2017 n° 16-17.962 F-D).
« Une cour d’appel peut retenir que le caractère équivoque de la démission n’est pas établi et
rejeter la demande de requalification de celle-ci en prise d'acte de la rupture aux torts de
l’employeur après avoir relevé : d’une part, que la salariée avait souhaité être réintégrée dans
l’entreprise après une première démission en 2012, ce qu’avait accepté l’employeur, puis que
les messages électroniques de l'intéressée début 2013 traduisaient une volonté claire et
réfléchie de démissionner, que les échanges de messages entre elle et l’employeur évoquaient
une possible embauche par un autre employeur, démontrant une volonté de se consacrer à un
autre emploi ; d’autre part, qu’aucun élément ne permettait de considérer que la salariée
s’était rétractée, qu’elle avait laissé l’employeur sans nouvelle à la suite d’un arrêt de travail,
nonobstant une lettre de l’employeur lui demandant, 5 jours après l'expiration de cet arrêt, de
justifier son absence » (Cass. soc. 9-11-2017 n° 16-18.580 F-D).
La solution est identique en matière de départ à la retraite : ce départ peut être requalifié en
prise d’acte : Cass. soc. 15 mai 2013.
La prise d’acte consomme la rupture du contrat de travail (Cass. soc. 19 décembre 2007) donc
il ne faut pas tenir compte d’une éventuelle lettre de licenciement envoyée postérieurement
par l’employeur.
La démission peut également être équivoque et dans ce cas une option s’ouvre au salarié
- il peut soutenir devant le juge que sa démission est entachée d’un vice du
consentement qu’il devra prouver et s’il parvient à le faire la démission sera annulée
par le juge
- sans apporter la preuve d’un vice du consentement, le salarié peut soutenir que sa
démission est équivoque – en ce qu’elle ne procède pas d’une volonté claire sérieuse
du salarié de rompre le contrat de travail – parce qu’en réalité la décision est prise par
le salarié en raison des manquements qu’ils reprochent à l'employeur et, dans ce cas,
la démission est requalifiée en prise d’acte.
L’arrêt de principe qui illustre cette alternative offerte au salarié : « la démission est un acte
unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre
fin au contrat de travail ; lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à
entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou
manquements imputables à son employeur et lorsqu'il résulte de circonstances antérieures ou
contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était
équivoque, le juge doit l'analyser en une prise d'acte qui produit les effets d'un licenciement
sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une
démission » (Soc. 9 mai 2007 n° 05-40.518 Bull. GADT, 4e éd., n° 88).
Pour une illustration récente de requalification d’une démission en prise d’acte : « Une cour
d'appel ne saurait décider que la démission d'un salarié procède d'une volonté libre, consciente
expresse, claire et non équivoque alors qu'elle relève, d’une part que l'acte de démission avait
été rédigé par l'intéressé en même temps qu'un écrit de reconnaissance des faits qui lui étaient
reprochés, en présence du directeur, dans un contexte de grande fatigue, et cela après que le
directeur avait indiqué qu'il allait appeler les gendarmes et porter plainte, d’autre part que la
démission avait été rétractée quelques jours après » (Cass. soc. 23-1-2019 n° 17-26.794 F-D).
IV. LES EFFETS DE LA PRISE D’ACTE : licenciement sans cause réelle et sérieuse
OU démission
Lorsque le juge considère que la prise d’acte est bien fondée, c’est-à-dire lorsqu’il estime
que les griefs invoqués par le salarié sont suffisamment graves, la rupture a les effets d’un
licenciement sans cause réelle et sérieuse : Cass. soc. 25 juin 2003.
Dans certains cas, la prise d’acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail, si elle
est justifiée, produit les effets d’un licenciement nul. Illustration à l’occasion d’une récente
affaire, dans laquelle un salarié avait pris acte de la rupture en raison de faits de harcèlement
moral.
Dans cette affaire, la Cour de cassation a retenu que la prise d’acte de la rupture du contrat de
travail par le salarié peut produire les effets d’un licenciement nul.
En l’espèce, un salarié avait pris acte de la rupture de son contrat de travail, s’estimant
victime de faits de harcèlement moral de la part de son employeur (retrait des fonctions qui
lui avaient été attribuées et de son rôle de responsable qualité, mise à l’écart systématique,
attribution de tâches et de fonction ne correspondant pas à son rang hiérarchique, suppression
de son poste de travail et de son bureau, blocage inexpliqué de sa demande de congé parental,
dégradation de son état de santé). Il avait saisi le Conseil des prud’hommes d’une demande de
requalification de la prise d’acte en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Au vu des éléments fournis par les parties, la cour d’appel avait considéré que le salarié avait
rapporté des faits précis permettant de présumer l’existence d’un harcèlement moral, tandis
que l’employeur n’avait pas démontré de son côté que ses agissements n’étaient pas
constitutifs d’un tel harcèlement, ni que sa décision était justifiée par des éléments objectifs
étrangers à tout harcèlement. Les juges en avaient déduit que l’altération de l’état de santé du
salarié était bien en lien avec le comportement de son employeur, les agissements répétés de
ce dernier ayant eu pour effet une dégradation de ses conditions de travail. Ils avaient
alors prononcé par conséquent la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur et fait
produire à la prise d’acte les effets d’un licenciement nul.
Si, lorsqu’elle est justifiée, la prise d’acte produit en général les effets d’un licenciement sans
cause réelle et sérieuse, certaines circonstances peuvent lui faire produire les effets d’un
licenciement nul. Tel est le cas lorsqu’elle est justifiée par des faits de harcèlement, mais
également lorsqu’elle est effectuée par un salarié protégé, un salarié victime d’un accident du
travail ou d’une maladie professionnelle pendant la période de suspension de son contrat, ou
encore par une salariée enceinte.
En revanche, lorsque le juge considère que la prise d’acte n’est pas fondée, c’est-à-dire
lorsqu’il considère que les faits invoqués par le salarié ne sont pas suffisamment graves, alors
la prise d’acte produit les effets d’une démission.
Remarque 1 : seuls les faits invoqués par le salarié à l’appui de sa prise d’acte permettent de
requalifier la rupture du contrat. En revanche la lettre par laquelle le salarié prend acte de la
rupture ne fixe pas les limites du litige : Cass. soc. 29 juin 2005.
Les manquements invoqués par le salarié doivent être prouvés par celui-ci : Cass. soc. 19
décembre 2007.
On applique donc le droit commun (C. civ., art. 1353) : c’est celui qui allègue un fait qui doit
en rapporter la preuve. Toutefois il existe certains domaines pour lesquels le régime
probatoire est très favorable au salarié : discrimination ou égalité de traitement et obligation
de sécurité qui est une obligation de résultat pour l’employeur :
Cass. soc 12 janvier 2011 : « Il appartient à l’employeur qui considère injustifiée la prise
d’acte de la rupture d’un salarié qui, étant victime d’un accident du travail, invoque une
inobservation des règles de prévention et de sécurité, de démontrer que la survenance de cet
acte est étrangère a tout manquement à son obligation de sécurité de résultat. »
Obligation de sécurité de résultat = l’employeur a forcément fauté puisqu’un accident est
survenu : cette faute permet à n’importe quel accidenté ou salarié en maladie professionnelle
de prendre acte de la rupture.
« La prise d’acte de la rupture n’est soumise à aucun formalisme » : Cass. soc. 3 mai 2012
Comme n’importe quel salarié, un représentant du personnel peut prendre acte de la rupture
de son contrat de travail non seulement au titre des manquements de l’employeur concernant
l’exécution du contrat de travail (ex. : non-paiement du salaire, harcèlement), mais aussi au
titre de son mandat par exemple la non-convocation à des réunions de comité d’entreprise ou
encore le non-versement d’heures de délégation : Cass. soc, 12 avril 2012).
Dans cette hypothèse, cette rupture produit, d’après la Cour de cassation, « un licenciement
nul pour violation du statut protecteur » dont les indemnités seront égales au salaire que le
salarié aurait dû percevoir jusqu’à la fin de la période de protection en cours : Cass. soc. 16
février 2011.
FICHE 13 : LA RÉSILIATION
JUDICIAIRE DU CONTRAT DE TRAVAIL
I. CONDITIONS
Les conditions sont identiques à celles de la prise d’acte :
Les indices pour apprécier la gravité du manquement dégagé par la Cour de cassation en mars
et juin 2014 s’appliquent également à la résiliation judiciaire (écoulement du temps,
manquement isolé, etc.).
Cette faculté ouverte au salarié bénéficie aussi au salarié protégé : Cass. soc. 16 mars 2005.
En tant que telle, cette demande est sans incident sur l’existence et le cours du contrat de
travail qui continue à s’exécuter jusqu’à la décision du juge.
Si le juge considère que la demande de résiliation judiciaire n’est pas fondée, alors,
contrairement à la prise d’acte, le contrat de travail se poursuivra.
Remarque 1 : quel choix entre la prise d’acte et la résiliation judiciaire : En cas d’attitude
fautive de l’employeur, il est moins risqué pour le salarié d’opter pour une résiliation
judiciaire puisque, au pire des cas il conservera son emploi. Dans la résiliation judiciaire, le
salarié à la certitude de l’indemnisation ou du maintien dans l’emploi. La prise d’acte quant à
elle apparaît comme plus risquée puisque, si le juge la considère comme non fondée, elle
produira les effets d’un licenciement et donc d’une perte d’emploi.
Remarque 2 : hors les cas où la loi le permet (exemple : CDI en cas d’inaptitude du salarié),
l’employeur n’est plus recevable à demander la résiliation judiciaire du contrat (Cass. soc. 29
juin 2005), fût-ce reconventionnellement (Cass. soc. 3 novembre 2005).
Dans les faits, cela se traduit par le départ du salarié de l’entreprise (après que ce dernier a
informé son employeur de sa décision de quitter l’entreprise en raison de griefs qu’il lui
impute). Ce n’est que postérieurement à son départ, qu’il saisira alors le conseil des
prud’hommes afin que sa prise d’acte produise les effets d’un licenciement sans cause réelle
et sérieuse.
En matière de résiliation judiciaire, la marche à suivre est tout à fait différente, et pour cause :
le salarié, tout en restant dans l’entreprise, va saisir simultanément le conseil des
prud’hommes d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail. Le dépôt de la
requête pour résiliation judiciaire ne met donc pas fin au contrat de travail qui perdure jusqu’à
ce que le conseil se prononce. Ce n’est que postérieurement et uniquement dans le cas où ce
dernier trancherait en faveur du salarié que le contrat de travail serait alors rompu.
Comme il a été vu précédemment, cette rupture produirait alors les effets d’un licenciement
sans cause réelle et sérieuse.
En l’espèce, un salarié, après avoir été privé de ses attributions et de ses outils de travail, a
saisi le conseil des prud’hommes d’une résiliation judiciaire de son contrat de travail.
Or, une fois la procédure enclenchée, l’employeur a régularisé sa situation, lui attribuant de
nouveau ses responsabilités et outils de travail dont il disposait auparavant.
De manière tout à fait surprenante, la Cour de cassation répond positivement à cette question
et juge « qu’en matière de résiliation judiciaire du contrat de travail, sa prise d’effet ne peut
être fixée qu’à la date de la décision judiciaire la prononçant dès lors que le contrat n’a pas été
rompu avant cette date ; qu’il appartient aux juges du fond d’apprécier les manquements
imputés à l’employeur au jour de leur décision. »
De toute évidence, cette solution diffère de celle rendue en matière de prise d’acte dont
l’appréciation se limite aux faits connus lors de la rupture : Cass. Soc. 9 octobre 2013,
pourvoi n°11-24.457, (pièce 18).
A priori, tout fait intervenu postérieurement à celle-ci ne peut être pris en compte pour
apprécier le bien-fondé de la rupture du contrat de travail.
La différence de traitement entre prise d’acte et résiliation judiciaire s’explique sans doute par
des enjeux non comparables. Alors que la prise d’acte non fondée produit les effets d’une
démission, la résiliation judiciaire n’a aucune incidence sur l’exécution du contrat de travail
qui, en cas d’échec, continue à être exécuté. Par ailleurs, dans la prise d’acte, le salarié quitte
l’entreprise sans attendre la décision rendue par le conseil des prud’hommes et prend donc le
risque de se retrouver, du jour au lendemain, sans emploi.
Quelle est la conséquence d’une prise d’acte intervenue après la saisine d’un Juge pour
résiliation judiciaire du contrat de travail ?
Le juge doit-il statuer d’abord sur la demande de résiliation, et seulement ensuite, en cas de
rejet, sur la prise d’acte ?
La prise d’acte de la rupture par le salarié rompant immédiatement le contrat de travail (Cass.
soc. 19 janvier 2005), il est apparu à la Chambre sociale que cette initiative du salarié rendait
sans objet sa demande initiale en résiliation, de sorte que le juge doit seulement se prononcer
sur le bien-fondé de cette prise d’acte, mais - et ce point est important - en prenant en
considération aussi bien les faits invoqués à l’appui de la demande initiale en résiliation que
ceux qui seraient invoqués au soutien de la prise d’acte. Cass. soc. 31 octobre 2006 (3 arrêts
du même jour ont été rendus en ce sens par la Cour de cassation).
Actualité :
Si une salariée saisit le juge prud’homal d’une demande de résiliation judiciaire et qu’au jour
de la saisine elle n’a pas informé son employeur qu’elle était enceinte, la résiliation judiciaire
de son contrat de travail ultérieurement prononcée aux torts de l’employeur produira les effets
d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais en aucun cas celui d’un licenciement nul.
Cass. soc., 28 nov. 2018, n° 15-29.330 P+B
FICHE 14 : LA DÉMISSION
La démission est un acte unilatéral du salarié qui met fin au contrat de travail (article L1237-1
Code du travail). À la différence de la prise d’acte et de la résiliation judiciaire, aucun grief
n’est invoqué par le salarié qui décide simplement de quitter l’entreprise pour des raisons qui
lui sont propres.
I. CONDITIONS
A. Une volonté claire, sérieuse et non équivoque de démissionner
Aucun formalisme n’encadre l’acte de rupture : elle peut être tacite, verbale et n’a pas à être
motivée (sauf dérogations prévues par accords collectifs, usages, contrat de travail).
En revanche la démission suppose une volonté libre, claire, sérieuse et non équivoque de
démissionner. Il faut donc en principe une initiative du salarié : la démission ne se présume
pas.
Exemples jurisprudentiels :
Un départ précipité suite à un incident ne montre pas que le salarié voulait réellement
démissionner.
Quid des absences prolongées ? D’après la Cour de cassation, l’absence injustifiée du salarié,
même de longue durée ne peut caractériser une volonté non équivoque de démissionner. Si la
Cour de cassation n’exclut nullement que des sanctions pouvant aller jusqu’au licenciement
pour faute grave soient prises, elle n’accepte plus que ces absences soient constitutives d’une
démission afin de préserver les droits aux allocations chômage du salarié qui fait vivre une
famille.
re
1 remarque : la volonté du salarié ne vaudra pas démission lorsqu’elle n’a pas été émise
librement. La jurisprudence qualifie la démission de licenciement chaque fois que le salarié a
été contraint par le comportement fautif de l’employeur.
2e remarque : s’agissant des CDD, il ne peut être question ni de démission ni de prise d’acte
comme l’a confirmé la Chambre sociale le 30 mai 2007. Rappelons la règle : en matière de
CDD, la rupture n’est licite qu’en cas de faute grave, de force majeure ou de résiliation
conventionnelle.
3e remarque (attention ! sujet potentiel de cas pratique, déjà tombé à Bordeaux) : En matière
de CDI, la démission expressément motivée par des manquements patronaux constitue en
droit une véritable prise d’acte : « La démission d’un salarié en raison de faits qu’il
reproche à son employeur s’analyse en une prise d’acte qui produit les effets soit d’un
licenciement si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire d’une
démission » : Cass. soc. 13 décembre 2006.
4e remarque : quid du salarié qui démissionne sans invoquer aucun grief et qui plus tard
saisit le juge pour griefs imputables à l’employeur ? Cette démission peut-elle être requalifiée
en prise d’acte ?
4 arrêts ont été rendus le 9 mai 2007 par la Chambre sociale de la Cour de cassation : le
juge doit raisonner en 2 temps :
– Si oui, les faits invoqués n’ont-ils pas été invoqués trop tardivement (ex. :
assignation déposée 17 mois après : trop tardif selon la CC) et « justifiaient »-ils la
rupture ?
Ex. : simple erreur sur le taux de majoration des heures supplémentaires = insuffisant : Cass.
soc. 30 mai 2007.
Si ces conditions sont remplies, la démission produira les effets d’un licenciement sans cause
réelle et sérieuse.
Le salarié ne peut pas mettre fin immédiatement à son contrat de travail. Il doit respecter un
préavis. Cette obligation s’impose aux parties sans mise en demeure préalable. La maladie ou
l’accident professionnel n’en suspend pas l’exécution. En revanche, lorsque le salarié a
démissionné pendant ses congés, il ne court qu’à partir de la date du retour.
Sa durée n’est pas fixée par la loi, mais souvent par accord collectif ou par usage. Le contrat
de travail lui-même ne peut pas prévoir des dispositions moins favorables que celles de ma
er
convention collective applicable même si cette dernière l’y autorise : Cass. soc. 1 juillet
2008.
À défaut de respect du préavis, le salarié pourra être condamné au versement à des dommages
et intérêts dont le montant sera évalué par le juge du fond.
D’après la Cour de cassation, « la démission pour exercer une activité concurrente ne
constitue pas en soi un abus du droit de démissionner », mais l’éventuelle clause de non-
concurrence devra bien sûr être respectée, tout comme le remboursement de la somme
figurant dans l’éventuelle clause de dédit-formation.
– Si ce dernier démontre qu’il est intervenu dans la rupture par des agissements
frauduleux et dans un but déterminé : détournement de clientèle, violation de secret de
fabrication, etc. ;
– Si le nouvel employeur a embauché le salarié en sachant très bien qu’il était encore
lié par un contrat de travail avec le précédent ;
– S’il a continué à occuper le salarié après avoir appris qu’il était encore lié par un
contrat de travail.
La rupture conventionnelle est régie par les articles L1237-11 et suivants du Code du travail.
I. CONDITIONS
L’article L1237-12 précise que « Les parties au contrat conviennent du principe d’une rupture
conventionnelle lors d’un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié peut se faire
assister :
1° Soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise, qu’il s’agisse
d’un salarié titulaire d’un mandat syndical ou d’un salarié membre d’une institution
représentative du personnel ou tout autre salarié ;
2° Soit, en l’absence d’institution représentative du personnel dans l’entreprise, par un
conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l’autorité administrative.
Lors du ou des entretiens, l’employeur a la faculté de se faire assister quand le salarié en fait
lui-même usage. Le salarié en informe l’employeur auparavant ; si l’employeur souhaite
également se faire assister, il en informe à son tour le salarié.
L’employeur peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de
l’entreprise ou, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, par une personne
appartenant à son organisation syndicale d’employeurs ou par un autre employeur relevant de
la même branche. »
Par ailleurs, d’après l’article L1237-13 « La convention de rupture définit les conditions de
celle-ci, notamment le montant de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle qui ne
peut pas être inférieur à celui de l’indemnité prévue à l’article L. 1234-9.
Elle fixe la date de rupture du contrat de travail, qui ne peut intervenir avant le lendemain du
jour de l’homologation.
À compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d’entre elles dispose d’un
délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation. Ce droit est exercé
sous la forme d’une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l’autre
partie ».
Enfin, d’après l’article L1237-14, « À l’issue du délai de rétractation, la partie la plus
diligente adresse une demande d’homologation à l’autorité administrative, avec un exemplaire
de la convention de rupture. Un arrêté du ministre chargé du travail fixe le modèle de cette
demande.
L’autorité administrative dispose d’un délai d’instruction de quinze jours ouvrables, à compter
de la réception de la demande, pour s’assurer du respect des conditions prévues à la présente
section et de la liberté de consentement des parties. À défaut de notification dans ce délai,
l’homologation est réputée acquise et l’autorité administrative est dessaisie.
La validité de la convention est subordonnée à son homologation.
L’homologation ne peut faire l’objet d’un litige distinct de celui relatif à la convention. Tout
litige concernant la convention, l’homologation ou le refus d’homologation relève de la
compétence du conseil des prud’hommes, à l’exclusion de tout autre recours contentieux ou
administratif. Le recours juridictionnel doit être formé, à peine d’irrecevabilité, avant
l’expiration d’un délai de douze mois à compter de la date d’homologation de la convention. »
La Cour de cassation est venue préciser les contours de ce mode de rupture du contrat de
travail et a notamment rendu les arrêts suivants :
re
– 1 affaire n°13-20.549 :
er
1 apport : lorsque le contrat de travail a été rompu par l’exercice, par l’une ou l’autre des
parties, de son droit de résiliation unilatérale, la signature postérieure d’une rupture
conventionnelle vaut renonciation commune à la rupture précédemment intervenue.
e
2 apport : lorsque le contrat de travail prévoit que l’employeur pourra libérer le salarié de
l’interdiction de concurrence, soit à tout moment au cours de l’exécution du contrat, soit à
l’occasion de sa cessation au plus tard dans la lettre notifiant le licenciement ou le jour même
de la réception de la démission, c’est, en cas de rupture conventionnelle, la date de la rupture
fixée par la convention de rupture qui détermine le respect par l’employeur du délai
contractuel.
e
– 2 affaire n°13-23.348 :
La signature par les parties d’une rupture conventionnelle ne constitue pas un acte interruptif
de la prescription prévue par l’article L1332-4 du Code du travail (lequel prévoit que « Aucun
fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà
d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que
ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales. »)
e
– 3 affaire n°13-15.551 :
La signature par les parties au contrat de travail d’une rupture conventionnelle, après
l’engagement d’une procédure disciplinaire de licenciement, n’emporte pas renonciation par
l’employeur à l’exercice de son pouvoir disciplinaire. Si le salarié exerce son droit de
rétractation de la rupture conventionnelle, l’employeur est fondé à reprendre la procédure
disciplinaire par la convocation du salarié à un nouvel entretien préalable dans le respect des
dispositions de l’article L1332-4 du Code du travail et à prononcer une sanction, y compris un
licenciement pour faute grave.
Sauf en cas de fraude ou de vice du consentement, une rupture conventionnelle peut être
valablement conclue en application de l’article L1237-11 du Code du travail au cours des
périodes de suspension du contrat de travail auxquelles la salariée a droit au titre de son congé
de maternité, ainsi que pendant les quatre semaines suivant l’expiration de ces périodes.
Dans un arrêt du 26 mars 2014 (n° 12-21136), la Chambre sociale de la Cour de cassation a
jugé qu’un salarié et un employeur ayant signé une rupture conventionnelle ne peuvent
valablement conclure une transaction que si elle a pour objet de régler un différend relatif non
pas à la rupture du contrat de travail, mais à son exécution sur des éléments non compris dans
la convention de rupture.
Le ministre du Travail a rappelé cette solution dans une réponse ministérielle du 2 septembre
2014 (question n°55914) : « Une transaction, dont l’objet serait justement de mettre fin à un
litige lié à une rupture conventionnelle, ne peut intervenir sans remettre directement en cause
l’accord des parties et donc la validité de la rupture elle-même. C’est ce que vient de
confirmer la Cour de cassation dans son arrêt du 26 mars 2014. Rupture conventionnelle et
transaction ne sont compatibles que dans la mesure où elles ont des objets distincts ».
En d’autres termes, n’est pas valable la transaction conclue postérieurement à l’expiration du
contrat à la suite d’une rupture conventionnelle, pour régler de manière amiable les
conséquences de la rupture du contrat. Cette décision peut se comprendre, dès lors que la
rupture conventionnelle est censée intervenir d’un commun accord entre les parties, en
l’absence de tout vice du consentement.
Par un arrêt récent du 23 mai 2013, la Cour de cassation a considéré que l’existence, au
moment de la conclusion, d’un différend entre les parties au contrat de travail n’affecte pas
par elle-même la validité de la convention de rupture conclue en application de l’article
L1237-11 du Code du travail.
D’après la jurisprudence, la rupture conventionnelle ne peut être imposée par l’une ou l’autre
des parties. Ainsi, lorsque le consentement du salarié est vicié, la convention est nulle : Cass.
soc. 23 mai 2013.
Dans cette affaire il s’agissait d’une avocate menacée par son employeur de mettre un terme à
contrat de travail en raison des erreurs et manquements de sa part justifiant un licenciement et
incitée, par une pression, à choisir la voie de la rupture conventionnelle.
En conclusion, le salarié doit apporter la preuve d’un vice du consentement et cette preuve
n’est pas rapportée du seul fait que le salarié serait victime de harcèlement moral.
VII. RUPTURE CONVENTIONNELLE ET NON-REMISE D’UN EXEMPLAIRE
AU SALARIE = NULLITÉ
Un salarié ayant signé une rupture conventionnelle de son contrat de travail conteste cette
mesure et reproche notamment à son employeur de ne pas lui avoir remis un exemplaire de la
convention de rupture. En l’absence de dispositions spéciales régissant la forme de la rupture
conventionnelle des articles L. 1237-11 et suivants du Code du travail, l’employeur invoquait
plusieurs arguments tirés du droit commun pour démontrer que l’absence de remise d’un
original au salarié n’affectait pas la légalité de la rupture.
Ils sont tous rejetés par la Cour de cassation. La rupture conventionnelle étant entourée de
garanties formelles, la Haute juridiction décide, en dépit du silence des textes, que la remise
d’un exemplaire de la convention de rupture au salarié est nécessaire à la fois pour que
chacune des parties puisse demander l’homologation de la convention et pour garantir le libre
consentement du salarié, en lui permettant d’exercer ensuite son droit de rétractation en
connaissance de cause. Ainsi, à défaut de remise, la convention de rupture est atteinte de
nullité.
19 janvier 2022, Soc. En raison de l'atteinte qu'il porte à la liberté d'expression, en particulier
au droit pour les salariés de signaler les conduites ou actes illicites constatés par eux sur leur
lieu de travail, le licenciement d'un salarié prononcé pour avoir relaté ou témoigné, de bonne
foi, de faits dont il a eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions et qui, s'ils sont
établis, seraient de nature à caractériser des infractions pénales ou des manquements à
des obligations déontologiques prévues par la loi ou le règlement, est frappé de nullité.
Si, d'une part, la lettre de licenciement reproche expressément au salarié d'avoir menacé son
employeur de saisir la compagnie régionale des commissaires aux comptes de l'existence dans
la société d'une situation de conflit d'intérêts à la suite de cas d'auto-révision sur plusieurs
entreprises, situation prohibée par le Code de déontologie de la profession, dont il l'a
préalablement avisé par lettre, et, d'autre part, si la procédure de licenciement a été mise en
œuvre concomitamment à cette alerte et à la saisine par le salarié de cet organisme
professionnel après que l'employeur lui ait refusé toute explication sur cette situation, le
licenciement est nul.
(Société Diagnostic et investissement c/ M. [G] [L], pourvoi n° 20-10.057 [P])
Chambre sociale, 11 mai 2022, 21-14.490, Société Pleyel centre de santé mutualiste.
Validation des barèmes Macron en cas de licenciement abusif.
Aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la loi
doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. En application de
l'article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause
qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de
l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux fixés par
ce texte. Pour déterminer le montant de l'indemnité, le juge peut tenir compte, le cas échéant,
des indemnités de licenciement versées à l'occasion de la rupture, à l'exception de l'indemnité
de licenciement mentionnée à l'article L. 1234-9. Cette indemnité est cumulable, le cas
échéant, avec les indemnités prévues aux articles L. 1235-12, L. 1235-13 et L. 1235-15, dans
la limite des montants maximaux prévus au même article. Aux termes de l'article 10 de la
Convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail (l'OIT), si les organismes
mentionnés à l'article 8 de la présente convention arrivent à la conclusion que le licenciement
est injustifié, et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationales, ils n'ont pas le
pouvoir ou n'estiment pas possible dans les circonstances d'annuler le licenciement et/ou
d'ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner
le versement d'une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme
appropriée. Les stipulations de cet article 10 qui créent des droits dont les particuliers peuvent
se prévaloir à l'encontre d'autres particuliers et qui, eu égard à l'intention exprimée des parties
et à l'économie générale de la convention, ainsi qu'à son contenu et à ses termes, n'ont pas
pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l'intervention d'aucun acte
complémentaire, sont d'effet direct en droit interne (voir également : Assemblée plénière, avis
de la Cour de cassation, 17 juillet 2019, n° 19-70.010 et n° 19-70.011). En effet, la
Convention n° 158 de l'OIT précise dans son article 1er : « Pour autant que l'application de la
présente convention n'est pas assurée par voie de conventions collectives, de sentences
arbitrales ou de décisions judiciaires, ou de toute autre manière conforme à la pratique
nationale, elle devra l'être par voie de législation nationale. »
Selon la décision du Conseil d'administration de l'Organisation internationale du travail, ayant
adopté en 1997 le rapport du Comité désigné pour examiner une réclamation présentée en
vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT par plusieurs organisations syndicales
alléguant l'inexécution par le Venezuela de la Convention n° 158, le terme « adéquat » visé à
l'article 10 de la Convention signifie que l'indemnité pour licenciement injustifié doit, d'une
part être suffisamment dissuasive pour éviter le licenciement injustifié, et d'autre part
raisonnablement permettre l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi. A cet égard, il
convient de relever qu'aux termes de l'article L. 1235-3-1 du code du travail, l'article L. 1235-
3 de ce code n'est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d'une
des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article. Dans ce cas, lorsque le salarié ne
demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est
impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut être
inférieure aux salaires des six derniers mois. Les nullités mentionnées au premier alinéa sont
celles qui sont afférentes à : 1° La violation d'une liberté fondamentale ; 2° Des faits de
harcèlement moral ou sexuel dans les conditions mentionnées aux articles L. 1152-3 et L.
1153-4 ; 3° Un licenciement discriminatoire dans les conditions mentionnées aux articles L.
1132-4 et L. 1134-4 ; 4° Un licenciement consécutif à une action en justice en matière
d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans les conditions mentionnées à
l'article L. 1144-3, ou à une dénonciation de crimes et délits ; 5° Un licenciement d'un salarié
protégé mentionné aux articles L. 2411-1 et L. 2412-1 en raison de l'exercice de son mandat ;
6° Un licenciement d'un salarié en méconnaissance des protections mentionnées aux articles
L. 1225-71 et L. 1226-13.
Selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, la qualification de liberté
fondamentale est reconnue à la liberté syndicale, en vertu de l'alinéa 6 du Préambule de la
Constitution du 27 octobre 1946 (Soc., 2 juin 2010, pourvoi n° 08-43.277 ; Soc., 9 juillet
2014, pourvois n° 13-16.434, 13-16.805, Bull. 2014, V, n° 186), au droit de grève protégé par
l'alinéa 7 du même Préambule (Soc., 25 novembre 2015, pourvoi n° 14-20.527, Bull. 2015, V,
n° 236), au droit à la protection de la santé visé par l'alinéa 11 du même Préambule (Soc., 11
juillet 2012, pourvoi n° 10-15.905, Bull. 2012, V, n° 218 ; Soc., 29 mai 2013, pourvoi n° 11-
28.734, Bull. 2013, V, n° 136), au principe d'égalité des droits entre l'homme et la femme
institué à l'alinéa 3 du même Préambule (Soc., 29 janvier 2020, pourvoi n° 18-21.862, publié),
au droit à un recours juridictionnel en vertu de l'article 16 de la Déclaration de 1789 (Soc., 21
novembre 2018, pourvoi n° 17-11.122, publié), à la liberté d'expression, protégée par l'article
10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (Soc.,
30 juin 2016, pourvoi n° 15-10.557, Bull. 2016, V, n° 140 ; Soc., 19 janvier 2022, pourvoi n°
20-10.057, publié). En application de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne
peut faire l'objet d'une discrimination en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de
son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de
sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa
situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-
appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses
opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat
électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de
son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa
perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que
le français.
Les protections mentionnées aux articles L. 1225-71 et L. 1226-13 du code du travail
concernent la protection de la grossesse et de la maternité, la prise d'un congé d'adoption, d'un
congé de paternité, d'un congé parental, d'un congé pour maladie d'un enfant et la protection
des victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles. Par ailleurs, selon l'article
L. 1235-4 du code du travail, dans le cas prévu à l'article L. 1235-3 du même code, le juge
ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie
des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du
jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé.
Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas
intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.
Il en résulte, d'une part, que les dispositions des articles L. 1235-3 et L. 1235-3-1 du code du
travail, qui octroient au salarié, en cas de licenciement injustifié, une indemnité à la charge de
l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux variant
en fonction du montant du salaire mensuel et de l'ancienneté du salarié et qui prévoient que,
dans les cas de licenciements nuls dans les situations ci-dessus énumérées, le barème ainsi
institué n'est pas applicable, permettent raisonnablement l'indemnisation de la perte injustifiée
de l'emploi. Il en résulte, d'autre part, que le caractère dissuasif des sommes mises à la charge
de l'employeur est également assuré par l'application, d'office par le juge, des dispositions
précitées de l'article L. 1235-4 du code du travail. Les dispositions des articles L. 1235-3, L.
1235-3-1 et L. 1235-4 du code du travail sont ainsi de nature à permettre le versement d'une
indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l'article 10 de
la Convention n° 158 de l'OIT.
Il en résulte que les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail sont
compatibles avec les stipulations de l'article 10 de la Convention précitée. Pour
condamner l'employeur au paiement d'une somme supérieure au montant maximal prévu par
l'article L. 1235-3 du code du travail, l'arrêt constate, d'une part, que ce texte prévoit, pour une
ancienneté inférieure à 4 ans, une indemnité de licenciement injustifié comprise entre 13 211
et 17 615 euros, et, d'autre part, que la salariée justifie, en raison de sa qualité de demandeur
d'emploi jusqu'en août 2019 et déduction faite des revenus perçus de Pôle emploi, d'une perte
supérieure à 32 000 euros.
L'arrêt retient que ce montant représente à peine la moitié du préjudice subi en termes de
diminution des ressources financières de la salariée et ne permet donc pas, compte tenu de la
situation concrète et particulière de la salariée, âgée de 53 ans à la date de la rupture, une
indemnisation adéquate et appropriée du préjudice subi, compatible avec les exigences de
l'article 10 de la Convention n° 158 de l'OIT.
Clause de conciliation
Chambre sociale, 21 septembre 2022, 21-14.171, société Cabinet de chirurgie dentaire
Pasteur. Il résulte des articles 122 et 124 du code de procédure civile que les fins de non-
recevoir ne sont pas limitativement énumérées. Licite, la clause d'un contrat instituant une
procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en
oeuvre suspend jusqu'à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir
qui s'impose au juge si les parties l'invoquent.
2 mars 2022, Soc. Au visa des articles R. 4624-45 et R. 4624-55 du Code du travail dans
leurs dispositions applicables au litige, le premier issu du décret n° 2017-1698 du 15
décembre 2017et le second issu du décret n° 2016-1908 du 27 décembre 2016, en cas de
contestation portant sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications reposant sur
des éléments de nature médicale émis par le médecin du travail mentionnés à l'article L. 4624-
7, le conseil de prud'hommes, statuant en la forme des référés, est saisi dans un délai de
quinze jours à compter de leur notification. Les modalités de recours ainsi que ce délai sont
mentionnés sur les avis et mesures émis par le médecin du travail. L'avis médical d'aptitude
ou d'inaptitude émis par le médecin du travail est transmis au salarié ainsi qu'à
l'employeur par tout moyen leur conférant une date certaine.
Il en résulte que, pour constituer la notification faisant courir le délai de recours de quinze
jours à l'encontre d'un avis d'aptitude ou d'inaptitude, la remise en main propre de cet avis doit
être faite contre émargement ou récépissé.
(Association Vivre et devenir Villepinte Saint-Michel, pourvoi n° 20-21.715 [P])
Conventions (clauses) de forfait de rémunération : validité ou annulation ?
Chambre sociale, 22 juin 2022, 21-10.621, société CGI France
Vu l'article L. 212-15-3 I devenu les articles L. 3121-38 et L. 3121-40 du code du travail dans
leur rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, l'article 3 du chapitre 2 de
l'accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail, étendu, attaché à la convention
collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des
sociétés de conseils du 15 décembre 1987 et l'article 3.2.2 de l'accord sur la réduction et
l'aménagement du temps de travail UES Logica du 30 juin 2008 :Selon l'article L. 215-15-3 I
devenu l'article L. 3121-40 du code du travail, la conclusion de conventions de forfait en
heures sur l'année est prévue par une convention ou un accord collectif de travail étendu ou
par une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement. Cette convention prévoit les
catégories de cadres susceptibles de bénéficier de ces conventions de forfait ainsi que les
modalités et les caractéristiques principales des conventions de forfait susceptibles d'êtres
conclues.
L'article 3 du chapitre 2 de l'accord du 22 juin 1999 intitulé réalisation de missions dispose
que ces modalités s'appliquent aux salariés non concernés par les modalités standard ou les
réalisations de missions avec autonomie complète. Tous les ingénieurs et cadres sont a priori
concernés, à condition que leur rémunération soit au moins égale au plafond de la sécurité
sociale. De plus, en fonction de l'activité de l'entreprise, un accord d'entreprise doit préciser
les conditions dans lesquelles d'autres catégories de personnel peuvent disposer de ces
modalités de gestion. Dans un arrêt rendu le 26 mai 2004 (Soc., 26 mai 2004 n° 02-10.723,
Bull V n° 144), la Cour de cassation a dit que s'analysent en une convention de forfait en
heures assortie de la garantie d'un nombre maximal annuel de jours de travail les dispositions
du chapitre 2, article 3, de l'accord qui prévoient, d'une part, une convention horaire sur la
base hebdomadaire de trente-huit heures trente avec une rémunération forfaitaire au moins
égale à 115 % du salaire minimum conventionnel, d'autre part, un nombre maximum de jours
travaillés dans l'année.
L'accord Logica sur la réduction et l'aménagement du temps de travail daté du 30 juin 2008,
après avoir rappelé en son article 3.2 que les parties signataires reconnaissent l'existence au
sein de l'UES de trois modalités d'organisation du temps de travail qui correspondent aux
définitions de l'accord national du 22 juin 1999, dispose en son article 3.2.2 que la modalité
réalisation de missions s'applique aux salariés non concernés par la modalité standard ou la
modalité en autonomie complète. Plus précisément, elle concerne les ingénieurs et cadres
relevant a minima de la position 2.2 et du coefficient 130 et au plus du coefficient 170, soit la
position 3.1 de la convention collective nationale Syntec, et dont la rémunération au moment
de leur affectation dans la modalité est au moins égale au PASS.
Pour condamner l'employeur au paiement d'heures supplémentaires, l'arrêt, après avoir
rappelé que, pour l'appréciation du caractère plus ou moins favorable entre deux accords
collectifs, il convient de procéder à une comparaison des avantages ayant le même objet ou la
même cause eu égard à l'ensemble des intéressés, et non eu égard à l'un d'entre eux en
particulier, retient que l'accord collectif de réduction du temps de travail annexé à la
convention collective Syntec, à la différence de l'accord collectif d'entreprise, ne précise pas
que la condition de rémunération au moins égale au PASS ne s'applique que pour déterminer
au départ la catégorie dont relève le salarié. Il estime que l'accord d'entreprise ajoute une
condition restrictive, tenant à l'applicabilité dans le temps de ce critère de rémunération
plancher, qui n'est pas expressément posée par l'accord de branche. Il ajoute que, plus
généralement, l'intégration des salariés à la modalité RM emporte des conséquences
dérogatoires au droit commun de la durée légale du travail en ce qu'elle autorise la conclusion
d'une convention de forfait hebdomadaire et que l'intérêt du salarié commande de faire une
stricte application des possibilités de dérogation à la durée légale du travail, en sorte que
favoriser le maintien de la convention de forfait en dépit de la constatation, après l'admission
du salarié dans la catégorie RM, de l'infériorité de sa rémunération par rapport au PASS serait
contraire à l'intérêt du salarié.
Il en déduit que, contrairement à ce que prétend l'employeur, ne serait-ce qu'en ajoutant au
texte de l'accord de branche une condition restrictive qui n'y figure pas, l'accord d'entreprise
du 30 juin 2008 apparaît moins favorable aux salariés que l'accord de niveau supérieur, ce
dont il résulte que l'application de sa clause 3.2.2 susvisée, qui précise que la condition tenant
à une rémunération au moins équivalente au PASS s'apprécie au moment de l'affectation dans
la modalité RM, doit être écartée.
En se déterminant ainsi, sans préciser en quoi la définition par l'accord d'entreprise des
conditions d'éligibilité au forfait en heures, dérogeant aux règles de calcul de droit commun
de la durée du travail, et de leur maintien dans le temps était globalement moins favorable
qu'un décompte de la durée du travail selon les règles de droit commun, la cour d'appel n'a
pas donné de base légale à sa décision.
26 janvier 2022, Soc. Selon l'article L. 3121-45 du Code du travail dans sa rédaction issue de
la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, le salarié qui le souhaite peut, en accord avec son
employeur, renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d'une majoration de son
salaire. L'accord entre le salarié et l'employeur est établi par écrit. Le nombre de jours
travaillés dans l'année ne peut excéder un nombre maximal fixé par l'accord prévu à l'article
L. 3121-39. A défaut d'accord, ce nombre maximal est de 235 jours. Un avenant à la
convention de forfait conclue entre le salarié et l'employeur détermine le taux de la majoration
applicable à la rémunération de ce temps de travail supplémentaire, sans qu'il puisse être
inférieur à 10 %.
En conséquence et en l'absence de conclusion d'un tel accord, le juge fixe, dans le respect du
minimum de 10 %, le montant de la majoration applicable à la rémunération due en
contrepartie du temps de travail excédant le forfait convenu. Une cour d’appel peut ainsi
estimer le montant des sommes restant dues au salarié en contrepartie des jours travaillés en
dépassement du forfait de 215 jours fixés par la convention individuelle de forfait en jours.
(M. [L] [F] c/ Société Suez international, pourvoi n° 20-13.266 [P])
Chambre sociale, 26 octobre 2022, 20-17.105, société Oxyria. Est nulle la clause d'un
contrat de travail par laquelle un salarié s'engage à reverser à son employeur les
rémunérations qui lui ont été versées pour des missions pour lesquelles il a été désigné expert
personnellement.
Chambre sociale, 23 novembre 2022, 21-12.125, société Saphif. Vu les articles L. 1332-3,
L. 8252-1 et L. 8252-2 1° du code du travail : Selon le deuxième de ces textes, nul ne peut,
directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque
durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en
France. Selon le troisième, le salarié étranger a droit au titre de la période d'emploi illicite,
au paiement du salaire et des accessoires de celui-ci, conformément aux dispositions légales,
conventionnelles et aux stipulations contractuelles applicables à son emploi, déduction faite
des sommes antérieurement perçues au titre de la période considérée.
Il résulte de ces textes que si l'irrégularité de la situation d'un travailleur étranger constitue
nécessairement une cause objective justifiant la rupture de son contrat de travail exclusive de
l'application des dispositions relatives aux licenciements et de l'allocation de dommages-
intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, elle n'est pas constitutive en soi d'une
faute grave. L'employeur qui entend invoquer une faute grave distincte de la seule irrégularité
de l'emploi doit donc en faire état dans la lettre de licenciement. Seule la faute grave peut
justifier une mise à pied conservatoire et le non-paiement du salaire durant cette période.
Pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un rappel de salaire pour la période
antérieure au licenciement, l'arrêt retient qu'il ressort de la lettre de licenciement que la seule
faute reprochée au salarié est de ne pas avoir produit, en dépit de mises en demeure, un titre
de séjour valable l'autorisant à travailler et que cette absence d'autorisation n'est pas contestée
par l'intéressé, en sorte que l'employeur n'avait d'autre choix que de procéder à son
licenciement. En statuant ainsi, alors qu'elle retenait par ailleurs que l'article L. 8252-2 du
code du travail était applicable et que l'employeur n'avait invoqué aucune faute grave à l'appui
du licenciement, ce dont elle aurait dû déduire que le salarié, en situation d'emploi illicite,
avait droit au paiement du salaire pour la période antérieure à la rupture du contrat de travail,
la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes
susvisés.
Chambre sociale, 23 novembre 2022, 21-16.162. société Solocal. D'une part, aux termes de
l'article L. 1222-6 du code du travail, lorsque l'employeur envisage la modification d'un
élément essentiel du contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à
l'article L. 1233-3, il en fait la proposition au salarié par lettre recommandée avec avis de
réception. La lettre de notification informe le salarié qu'il dispose d'un mois à compter de sa
réception pour faire connaître son refus. A défaut de réponse dans le délai d'un mois, le salarié
est réputé avoir accepté la modification proposée. L'article L. 1233-25 du code du travail
dispose que lorsqu'au moins dix salariés ont refusé la modification d'un élément essentiel de
leur contrat de travail, proposée par leur employeur pour l'un des motifs économiques énoncés
à l'article L. 1233-3 et que leur licenciement est envisagé, celui-ci est soumis aux dispositions
applicables en cas de licenciement collectif pour motif économique. D'autre part, il résulte de
l'article L. 1235-7-1 du code du travail que le juge judiciaire, compétent pour statuer sur les
litiges relatifs à l'application des mesures comprises dans un plan de sauvegarde de l'emploi,
est fondé, lorsque le défaut de validité de l'accord collectif déterminant le contenu du plan de
sauvegarde de l'emploi résulte des motifs de la décision du juge administratif annulant la
décision de validation de cet accord, à écarter l'application des clauses de cet accord.
Il en résulte qu'une modification de contrat de travail intervenue, en application de l'article L.
1222-6 précité, dans le cadre d'un projet de réorganisation ayant donné lieu à l'élaboration
d'un accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi, ne constitue pas un acte
subséquent à cet accord, de sorte que les salariés ayant tacitement accepté cette modification
ne sont pas fondés à se prévaloir du défaut de validité de l'accord collectif déterminant le
contenu du plan de sauvegarde de l'emploi pour obtenir la nullité de leur contrat de travail. Le
moyen, qui soutient le contraire, n'est donc pas fondé en ses trois premières branches. La cour
d'appel ayant ensuite relevé que l'employeur avait informé la salariée légitimement et de
manière licite, des conséquences légales d'un éventuel refus de la proposition de modification
de son contrat de travail et que la négociation et la validation préalables de l'accord
majoritaire portant plan de sauvegarde de l'emploi lui avaient permis d'être parfaitement
éclairée sur les implications de son choix, a, dans l'exercice de son pouvoir souverain, décidé
que le vice du consentement invoqué ne pouvait être retenu.
Chambre sociale, 7 décembre 2022, 21-12.696, Association Aide à domicile aux retraités
Flandre-Métropole. Aux termes de l'article L. 4111-1, alinéa 1, du code du travail, sous
réserve des exceptions prévues à l'article L. 4111-4, les dispositions de la quatrième partie du
code du travail sont applicables aux employeurs de droit privé ainsi qu'aux travailleurs. Selon
l'article L. 4732-1 du même code, l'inspecteur du travail, lorsqu'il constate un risque sérieux
d'atteinte à l'intégrité d'un travailleur résultant de l'inobservation des dispositions du livre
IV de la quatrième partie du code du travail, peut saisir le juge des référés pour voir ordonner
toutes mesures propres à faire cesser le risque.
Aux termes de l'article R. 4421-1 du même code, les dispositions relatives aux risques
biologiques sont applicables dans les établissements dans lesquels la nature de l'activité peut
conduire à exposer les travailleurs à des agents biologiques. Toutefois, les dispositions des
articles R. 4424-2, R. 4424-3, R. 4424-7 à R. 4424-10, R. 4425-6 et R. 4425-7 ne sont pas
applicables lorsque l'activité, bien qu'elle puisse conduire à exposer des travailleurs,
n'implique pas normalement l'utilisation délibérée d'un agent biologique et que l'évaluation
des risques prévue au chapitre III ne met pas en évidence de risque spécifique. Selon l'article
R. 4421-4 du même code, sont considérés comme agents biologiques pathogènes les agents
biologiques des groupes 2, 3 et 4, dont la liste est fixée par arrêté conjoint des ministres
chargés du travail, de l'agriculture et de la santé. Il résulte du premier de ces textes que toute
personne morale ou entreprise individuelle qui exerce une activité de service à la personne, en
sa qualité d'employeur de droit privé, est soumise aux dispositions relatives à la prévention
des risques biologiques.
Chambre sociale, 7 décembre 2022, 21-23.662, société Ulysse Hervé et fils. Aux termes de
l'article L. 4624-7 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août
2016, si le salarié ou l'employeur conteste les éléments de nature médicale justifiant les
avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail en
application des articles L. 4624-2, L. 4624-3 et L. 4624-4, il peut saisir le conseil de
prud'hommes d'une demande de désignation d'un médecin-expert inscrit sur la liste des
experts près la cour d'appel. L'affaire est directement portée devant la formation de référé.
L'article R. 4624-45 du même code, dans ses dispositions issues du décret n° 2017-1008 du
10 mai 2017, énonce qu'en cas de contestation portant sur les éléments de nature médicale
justifiant les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du
travail mentionnés à l'article L. 4624-7, la formation de référé est saisie dans un délai de
quinze jours à compter de leur notification. Les modalités de recours ainsi que ce délai sont
mentionnés sur les avis et mesures émis par le médecin du travail. La décision de la formation
des référés se substitue aux éléments de nature médicale mentionnés au premier alinéa qui ont
justifié les avis, propositions, conclusions écrites ou indications contestés. Il en résulte que
l'avis émis par le médecin du travail, seul habilité à constater une inaptitude au travail, peut
faire l'objet tant de la part de l'employeur que du salarié d'une contestation devant la
formation de référé du conseil de prud'hommes qui peut examiner les éléments de toute nature
ayant conduit au prononcé de l'avis. En l'absence d'un tel recours, cet avis s'impose aux
parties.
Chambre sociale, 7 décembre 2022, 21-17.927, société Access Assistance. Selon l'article L.
4624-7 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22
septembre 2017, modifiée par la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018, le salarié ou l'employeur
peut saisir le conseil de prud'hommes en la forme des référés d'une contestation portant
sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du
travail reposant sur des éléments de nature médicale en application des articles L. 4624-2, L.
4624-3 et L. 4624-4. Ce texte ajoute que le conseil de prud'hommes peut confier toute mesure
d'instruction au médecin inspecteur du travail territorialement compétent pour l'éclairer sur les
questions de fait relevant de sa compétence et que sa décision se substitue aux avis,
propositions, conclusions écrites ou indications contestées. Selon l'article R. 4624-42 du code
du travail dans ses dispositions issues du décret n° 2016-1908 du 27 décembre 2016, le
médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du travailleur à son poste de travail
que s'il a réalisé au moins un examen médical de l'intéressé, accompagné, le cas échéant, des
examens complémentaires, permettant un échange sur les mesures d'aménagement,
d'adaptation ou de mutation de poste ou la nécessité de proposer un changement de poste, s'il
a réalisé ou fait réaliser une étude de ce poste et une étude des conditions de travail dans
l'établissement et indiqué la date à laquelle la fiche d'entreprise a été actualisée et enfin s'il a
procédé à un échange, par tout moyen, avec l'employeur. Il en résulte que le juge saisi d'une
contestation de l'avis d'inaptitude peut examiner les éléments de toute nature sur lesquels le
médecin du travail s'est fondé pour rendre son avis. Il substitue à cet avis sa propre décision
après avoir, le cas échéant, ordonné une mesure d'instruction.
2
Getting
There
1) Mme Roselyne a été mandatée par M. Robert, agent général d'assurance, en qualité de
sous-agent d'assurances, à compter du 1er avril 1988. M. Robert a notifié à Mme Roselyne la
fin du « mandat de sous-agent » à effet du 31 décembre 2021. Revendiquant l'existence d'un
contrat de travail, Mme Roselyne souhaite saisir la juridiction prud'homale.
Elle vous précise ce qui suit : elle effectue, au-delà des tâches de prospection et
d'encaissement ponctuel de primes d’assurance, des tâches de secrétariat, de gestion des
contrats et des sinistres, sous les directives et le contrôle de M. Robert avec les moyens mis à
disposition par ce dernier. Mme Roselyne travaillait au sein de l'agence de Paris et de l’agence
de Meaux, en ayant à sa disposition des moyens téléphoniques et informatiques la reliant à
l'agence de Paris, commandés par M. Robert et qu'elle a dû restituer à la suite de la rupture du
contrat, ainsi que des supports publicitaires et administratifs mis à sa disposition par la
compagnie d'assurances.
Mme Roselyne produit, en outre, un courrier comportant les objectifs pour l'année 2021,
annexé au contrat de sous-agent, ainsi que des lettres de M. Robert contenant la "synthèse
d'entretien individuel et lettre de mission" indiquant qu'"un point régulier sera effectué à
chaque réunion mensuelle" et qui concluent que : "je souhaite que les résultats dépassent les
objectifs fixés." "les résultats de l'agence et en particulier les tiens. (...)" je te reproche de ne
pas respecter l'objectif fixé. Ce qui me gêne, c'est l'activité commerciale de ton point de vente
(...). Je te rappelle que nous avons signé ensemble, en début d'année, un objectif pour 2021
que je joins à la présente lettre. Nous sommes loin du compte (...). Le ressenti que j'ai de ce
qui précède, c'est l'éloignement de plus en plus flagrant vis à vis de l'agence principale de
Paris, peu de présence à nos réunions, du manque de maîtrise par rapport aux nouveaux
produits et de la méconnaissance des offres commerciales" ; "il est bien évident, dans la
conjoncture actuelle que cela ne peut continuer ainsi. (...) Il reste 4 mois pour obtenir les
objectifs fixés (...)".
Que pouvez-vous conseiller à Mme Roselyne au sujet de l’existence d’un contrat de travail ?
er
2) Mme Laurent a travaillé, à compter du 1 octobre 1993, en qualité de reporter pigiste pour
le compte de la société Luron, agence de presse. Elle dispose d'une carte de presse depuis
1987. Elle bénéficie d'une carte d'identité de journaliste professionnel. Le 31 mars 2022, la
société lui a adressé une lettre lui indiquant que ses besoins ne justifiaient plus de recourir aux
piges qu'elle pouvait lui proposer. Elle exerçait sa profession pour le compte de cette agence
de presse contre rémunération : elle recevait chaque mois un salaire fixe quelle que soit la
quantité d'articles rédigés notamment à compter de 2005 et elle bénéficiait auprès de l’agence
d'un compte épargne salariale abondé par cette dernière.
Mme Laurent a adressé divers courriels à des managers de l'agence entre décembre 2021 et
février 2022 dans lesquels elle posait à son interlocuteur les questions suivantes : "Pourriez-
vous me dire quelles sont les directives rédactionnelles pour les semaines à venir" (courriel du
20 décembre 2021) ; "Si tu n'as trouvé la gentillesse pour me répondre à tous les mails
envoyés au fil de ses 2 derniers mois te demandant sur quels sujets tu souhaiterais que je
travaille" (courriel du 10 février 2022) ; "Pourrais-tu m'orienter sur les sujets à traiter, à
préparer, à creuser pour le service des sports dans les semaines à venir" (courriel du 12 février
2022) ; "Je me trouve face à une problématique que je vous demande de trancher" (courriel du
15 février 2022).
Mme Laurent souhaite saisir la juridiction prud'homale à l'effet de faire constater que la
relation de travail entre l'agence et elle est une relation de travail salarié à durée indéterminée
et démontrer qu’elle a le statut de journaliste professionnel. Que pouvez-vous lui conseiller ?
3) M. Alfred a été engagé par la société SSP en qualité d'agent de prévention et de sécurité,
aux termes de plusieurs contrats à durée déterminée successifs à compter du 1er juillet 2009
jusqu'au 30 juin 2021. Les parties ont conclu une transaction le 5 janvier 2022.
Après avoir employé le salarié selon plusieurs contrats à durée déterminée successifs
ininterrompus pour accroissement temporaire d'activité, l'employeur s'était engagé
er
unilatéralement le 1 octobre 2021 à l'embaucher par contrat à durée indéterminée à compter
du 1er novembre 2021. A l'issue toutefois d’un nouveau contrat à durée déterminée d’un mois
conclu à cette date, les parties ont conclu une transaction le 5 janvier 2022 aux termes de
laquelle le salarié « s'estime rempli de ses droits relatifs à l'exécution et la rupture de tous les
contrats de travail à durée déterminée dont il reconnait le bien-fondé et la régularité, et
renonce notamment à contester la qualification de ces contrats, moyennant le versement de la
somme de 500 euros ».
4) M. Hubert a été engagé par la société Roland, à compter du 1er janvier 2002. Son contrat
de travail prévoit une rémunération comprenant une partie fixe et une partie variable sur
objectifs. Invoquant la définition tardive de ses objectifs et un non-paiement de l'intégralité de
ses primes d'objectif sur les années 2020 et 2021 ainsi qu'un harcèlement moral, le salarié
souhaite saisir la juridiction prud'homale. Il vous demande conseil. L’employeur lui reproche
sa mauvaise humeur à la suite de l'arrivée de son nouveau supérieur hiérarchique dont il avait
espéré obtenir le poste. Le salarié vous indique ce qui suit.
D’une part, son contrat de travail initial avait prévu un salaire mensuel de base brut de 10 500
€ et une partie variable constituée d'une prime d'objectif de 42 000 euros par an liée à la
réalisation à 100 % des objectifs définis par sa hiérarchie. A la demande du salarié, un
avenant à son contrat de travail a prévu une modification de sa paye, augmentant la
rémunération mensuelle de base à la somme de 12 066,34 € et diminuant le montant de la
prime d'objectifs à 38 000 € pour un exercice annuel et pour des objectifs atteints à 100 % qui
précise « vos objectifs et les critères afférents au calcul de votre part variable sont définis et
communiqués par votre hiérarchie ».
D’autre part, le salarié reproche à son employeur un harcèlement moral par mise à l'écart
progressive et déclassement ces derniers mois. Dans les années 2017 et 2018, le salarié a
participé à la création d’un centre de service au Maroc et en assumait la responsabilité. A
compter de fin 2019, la société a décidé de mettre un terme à sa mission au Maroc, sans
donner au salarié de motifs à ce changement d'affectation, excepté une « nouvelle
organisation de l’entreprise ». Le salarié se sent victime d'un déclassement et ses aspirations à
retrouver un poste de directeur opérationnel sont régulièrement déçues ; il se plaint d'un
isolement résultant notamment de son absence de participation à des réunions de cadres en
2022, à l'absence de bureau et d'assistante ; il se plaint de ne pas être invité au meeting
« group management » de 2022 et de ne pas être tenu informé des nominations ou événements
de l'entreprise. Il vous signale l'envoi par l’employeur de nombreux courriels professionnels
durant ses congés payés, en méconnaissance du droit au repos du salarié. Il vous indique que
son dossier médical mentionne une souffrance au travail qui est manifestement liée au ressenti
de ce qu'il vit comme un déclassement et une mise à l'écart, les certificats médicaux
mentionnant qu'il se plaint du manque de reconnaissance de l'entreprise et « se sent mis au
placard ». Que pouvez-vous lui conseiller au sujet du paiement de sa rémunération et sur le
grief de harcèlement moral ?
5) Mme Jean a été engagée le 5 septembre 2012 en qualité de gestionnaire par la société
Lubeck & associés, en tant que cadre. Son contrat de travail contient une clause soumettant la
salariée au régime du forfait en jours. La relation de travail est régie par la convention
collective nationale des sociétés financières. L'article 7 du contrat de travail intitulé « Durée
du travail » stipule que la salariée « appartient à la catégorie des cadres autonomes relevant du
forfait jours avec 217 jours par an ».
La convention collective nationale prévoit, en premier lieu, que la charge de travail confiée ne
peut obliger un cadre à excéder une limite de durée quotidienne de travail effectif fixée à 10
heures ni excéder une limite de durée hebdomadaire ; le cadre dispose d'une grande liberté
dans la conduite ou l'organisation des missions correspondant à sa fonction et dans la
détermination du moment de son travail ; le cadre et l'employeur examinent ensemble, afin
d'y remédier, les situations dans lesquelles ces dispositions ne peuvent pas être respectées.
Toutefois, la société n'a pas organisé d'entretien annuel individuel avec Mme Jean.
Après avoir démissionné le 2 juillet 2022, la salariée souhaite saisir la juridiction prud'homale
aux fins notamment de faire prononcer la nullité de la clause de forfait en jours et d'obtenir un
rappel d'heures supplémentaires. Que pouvez-vous lui conseiller ?
6) M. Dimitri a été engagé par la société Lullaby France Sports et Randonnées à compter du
24 septembre 2003 pour occuper un emploi de responsable de rayon, statut cadre. Il souhaite
saisir la juridiction prud'homale en ce qui concerne le paiement de ses heures de travail,
d'heures supplémentaires, de congés payés afférents et d'une indemnité pour absence de
contrepartie obligatoire en repos pour les années 2019 à 2021.
Le salarié a d'abord travaillé dans l'établissement de Bordeaux du 24 septembre 2003 au 31
octobre 2010, où il a été successivement responsable de l'univers « eau », de l'univers « eau et
sports collectifs » et de l'univers « montagne », puis à compter du 14 novembre 2010 dans
l'établissement de Versailles où il est désormais responsable du rayon « randonnée ».
Le salarié produit aux débats pour les années 2019 à 2021, un décompte fondé sur une
amplitude horaire. Que pouvez-vous lui conseiller ?
Corrigés
1)Dossier Roselyne
Mme Roselyne a été mandatée par M. Robert, agent général d'assurance, en qualité de sous-
agent d'assurances, à compter du 1er avril 1988. M. Robert a notifié à Mme Roselyne la fin du
« mandat de sous-agent » à effet du 31 décembre 2021. Revendiquant l'existence d'un contrat
de travail, Mme Roselyne souhaite saisir la juridiction prud'homale.
Que peut-on conseiller à Mme Roselyne au sujet de l’existence d’un contrat de travail ?
Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un
employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et
de sanctionner les manquements, que le travail au sein d'un service organisé peut constituer
un indice du lien de subordination (V. par ex., Chambre sociale, 17 novembre 2021, 20-
13.950).
La position retenue par la Cour de cassation est nette : ce lien « est caractérisé par l'exécution
d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des
directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements du subordonné »
sachant que « le travail au sein d'un service organisé peut constituer un indice du lien de
subordination lorsque l'employeur détermine unilatéralement les conditions d'exécution du
ème
travail » (V. par ex., Cass. civ. 2 25 mai 2004, n° 02-31.203 : Bull. 2004, II, n° 233 ; Cass.
ème
civ. 2 17 février 2022, n° 20-19.493). Cette définition est identique au sein de la Chambre
ème
sociale et de la 2 Chambre civile.
Il faut appliquer dans cette affaire la définition du lien de subordination : justifie légalement
sa décision une cour d'appel qui, pour qualifier de contrat de travail la relation entre un
chauffeur VTC et la société utilisant une plate-forme numérique et une application afin de
mettre en relation des clients et des chauffeurs exerçant sous le statut de travailleur
indépendant, retient :
2°) que le chauffeur se voit imposer un itinéraire particulier dont il n'a pas le libre choix et
pour lequel des corrections tarifaires sont appliquées si le chauffeur ne suit pas cet itinéraire,
3°) que la destination finale de la course n'est parfois pas connue du chauffeur, lequel ne peut
réellement choisir librement, comme le ferait un chauffeur indépendant, la course qui lui
convient ou non,
- Mme Roselyne organiserait librement son activité, ne serait pas tenue de rendre un
rapport d'activité, au contraire des salariés de l'agence, elle serait conviée à prendre
part aux réunions organisées si elle le souhaitait, ses objectifs ne seraient pas imposés
par M. Robert mais négociés entre eux et n’auraient donc aucun caractère obligatoire,
de sorte que leur existence ne suffirait pas à caractériser un lien de subordination ;
- le mandat est la convention par laquelle une personne, le mandant, confère à une autre
personne, le mandataire, le pouvoir d'accomplir, en son nom et pour son compte, un ou
plusieurs actes juridiques ; le mandataire devant rendre compte à son mandant de sa
gestion, ce dernier est en droit de contrôler son activité ;
- Mme Roselyne aurait revendiqué tout au long des trente années de collaboration avec M.
Robert sa totale indépendance à l'égard de ce dernier et elle se serait démarquée à
plusieurs reprise des propositions de son mandant, ce qui ne lui aurait pas été possible
si un lien de subordination les liait. Arguments infondés.
2)Dossier Laurent
er
Mme Laurent a travaillé, à compter du 1 octobre 1993, en qualité de reporter pigiste pour le
compte de la société Luron, agence de presse. Elle dispose d'une carte de presse depuis 1987.
Elle bénéficie d'une carte d'identité des journalistes professionnels. Le 31 mars 2022, la
société lui a adressé une lettre lui indiquant que ses besoins ne justifiaient plus de recourir aux
piges qu'elle pouvait lui proposer.
Elle exerçait sa profession pour le compte de cette agence de presse contre rémunération : elle
recevait chaque mois un salaire fixe quelle que soit la quantité d'articles rédigés notamment à
compter de 2005 et elle bénéficiait auprès de l’agence d'un compte épargne salariale abondé
par cette dernière.
Mme Laurent souhaite saisir la juridiction prud'homale à l'effet de faire constater que la
relation de travail entre l'agence et elle est une relation de travail salarié à durée indéterminée
et démontrer qu’elle a le statut de journaliste professionnel. Que peut-on lui conseiller ?
Selon les articles L. 7111-3 et L. 7112-4 du code du travail, est journaliste professionnel toute
personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l'exercice de sa profession dans
une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de
presse et qui en tire le principal de ses ressources.
Toute convention par laquelle une entreprise de presse s'assure, moyennant rémunération, le
concours d'un journaliste professionnel est présumée être un contrat de travail. Cette
présomption subsiste quels que soient le mode de la rémunération ainsi que la qualification
donnée à la convention par les parties (article L. 7112-1 ; Chambre sociale, 17 novembre
2021, 20-15.598 ; article L. 7112-1 du même code).
Dans le cas où l'employeur n'est pas une entreprise de presse ou une agence de presse, la
qualité de journaliste professionnel peut être retenue si la personne exerce son activité dans
une publication de presse disposant d'une indépendance éditoriale.
Peu importe qu’elle dispose d'une carte de presse, qu'elle bénéficie d'une carte d'identité des
journalistes professionnels, qu'elle exerce sa profession pour le compte de l'agence contre
rémunération, qu'elle reçoive chaque mois un salaire fixe quelle que soit la quantité d'articles
rédigés, qu'elle bénéficie auprès de la société d'un compte épargne salariale abondé par
l'agence.
Il faut rechercher si Mme Laurent tire le principal de ses ressources de son activité auprès
d'entreprises de presse. L’énoncé du cas est assez lapidaire sur cette question. Il faut donc
conseiller à cette dame d’établir, à partir de documents probants, que ses ressources
professionnelles proviennent pour l’essentiel de son activité accomplie pour l’agence.
Article L. 7112-1 : toute convention par laquelle une entreprise de presse s'assure, moyennant
rémunération, le concours d'un journaliste professionnel est présumée être un contrat de
travail. Cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération
ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties.
En l’espèce, les courriels en eux-mêmes n’apportent rien de décisif dans ce dossier. Il faut
caractériser l'exercice d'un pouvoir de direction, de contrôle et de sanction de l'agence à
l'égard de Mme Laurent au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail. Le lien de
subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le
pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les
manquements de son subordonné.
Il faut donc conseiller à cette dame d’établir qu’elle devait tenir compte des consignes, des
contrôles et éventuellement des sanctions de l’agence de presse afin d’établir l’existence d’un
contrat de travail.
3)Dossier Alfred
M. Alfred a été engagé en qualité d'agent de prévention et de sécurité, aux termes de plusieurs
contrats à durée déterminée successifs à compter du 1er juillet 2009 jusqu'au 30 juin 2021.
Les parties ont conclu une transaction le 5 janvier 2022.
Après avoir employé le salarié selon plusieurs contrats à durée déterminée successifs
ininterrompus pour accroissement temporaire d'activité, l'employeur s'était engagé
er
unilatéralement le 1 octobre 2021 à l'embaucher par contrat à durée indéterminée à compter
du 1er novembre 2021.
A l'issue toutefois d’un nouveau contrat à durée déterminée d’un mois conclu à cette date, les
parties ont conclu une transaction le 5 janvier 2022 aux termes de laquelle le salarié « s'estime
rempli de ses droits relatifs à l'exécution et la rupture de tous les contrats de travail à durée
déterminée dont il reconnait le bien-fondé et la régularité, et renonce notamment à contester la
qualification de ces contrats, moyennant le versement de la somme de 500 euros ».
L'employeur peut-il contester l’annulation de plein droit du protocole transactionnel ? Son but
est évidemment d’éviter d’être condamné à payer au salarié diverses sommes au titre de
l'exécution et de la rupture d'un contrat de travail à durée indéterminée.
L'article 2044 du Code Civil qui dispose que : "La transaction est un contrat par lequel les
parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat est
rédigé par écrit... ».
La jurisprudence précise qu'est nulle la transaction dont l'indemnité transactionnelle est d'un
montant dérisoire (Cass. soc. 18 mai 1999 N° 223).
En l’espèce, après avoir employé le salarié selon plusieurs CDI successifs ininterrompus pour
accroissement temporaire d'activité, l'employeur s'était engagé unilatéralement à l'embaucher
par CDI.
A l'issue du nouveau CDD, les parties ont conclu une transaction aux termes de laquelle le
salarié s'estimait rempli de ses droits relatifs à l'exécution et la rupture de tous les contrats de
travail à durée déterminée dont il reconnaissait le bien-fondé et la régularité, et renonçait
notamment à contester la qualification de ces contrats, moyennant le versement de la somme
de 500 euros.
M. Hubert a été engagé par la société Roland, à compter du 1er janvier 2002. Son contrat de
travail prévoit une rémunération comprenant une partie fixe et une partie variable sur
objectifs. Invoquant la définition tardive de ses objectifs et un non-paiement de l'intégralité de
ses primes d'objectif sur les années 2020 et 2021 ainsi qu'un harcèlement moral, le salarié
souhaite saisir la juridiction prud'homale.
Il nous demande conseil. L’employeur lui reproche sa mauvaise humeur à la suite de l'arrivée
de son nouveau supérieur hiérarchique dont il avait espéré obtenir le poste. Le salarié vous
indique ce qui suit.
D’une part, son contrat de travail initial avait prévu un salaire mensuel de base brut de 10 500
€ et une partie variable constituée d'une prime d'objectif de 42 000 euros par an liée à la
réalisation à 100 % des objectifs définis par sa hiérarchie.
D’autre part, le salarié reproche à son employeur un harcèlement moral par mise à l'écart
progressive et déclassement ces derniers mois. Il vous indique notamment que son dossier
médical mentionne une souffrance au travail qui est manifestement liée au ressenti de ce qu'il
vit comme un déclassement et une mise à l'écart, les certificats médicaux mentionnant qu'il se
plaint du manque de reconnaissance de l'entreprise et « se sent mis au placard ».
Selon l'article 1315, devenu 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation
doit la prouver et, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le
fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Lorsque les objectifs sont définis unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son
pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu'ils sont réalisables et qu'ils ont été
portés à la connaissance du salarié en début d'exercice (V. par ex., Chambre sociale, 17
novembre 2021, 19-24.907).
3°Réponse en fait
Lorsque les objectifs sont définis unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son
pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu'ils sont réalisables et qu'ils ont été
portés à la connaissance du salarié en début d'exercice.
Le salarié ne saurait donc être débouté le salarié de sa demande de rappel de salaire au titre de
la rémunération variable. La demande du salarié parait fondée.
Compte tenu des éléments indiqués par le salarié, celui-ci est-il victime de harcèlement moral
de la part de son employeur ?
Selon l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés
de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de
travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou
mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il
appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en
compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits
matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un
harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail.
Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements
invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par
des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement (V. par ex., Chambre sociale, 17 novembre
2021, 19-24.907). En cas de saisine du conseil de prud’hommes, le juge doit examiner
l'ensemble des faits invoqués par le salarié qui étaye sa demande au titre du harcèlement
moral.
En l’espèce, le salarié se sent victime d'un déclassement et ses aspirations à retrouver un poste
de directeur opérationnel sont régulièrement déçues ; il se plaint d'un isolement résultant
notamment de son absence de participation à des réunions en 2022, à l'absence de bureau et
d'assistante ; il se plaint de ne pas être invité au meeting « group management » de 2022 et de
ne pas être tenu informé des nominations ou événements de l'entreprise. Il signale l'envoi par
l’employeur de courriels professionnels durant ses congés payés, en méconnaissance du droit
au repos du salarié, etc.
En cas de saisine du juge par le salarié, la juridiction doit examiner l'ensemble des faits
invoqués par le salarié au titre du harcèlement. Elle ne peut pas rejeter les demandes formées
par le salarié au motif évasif selon lequel aucun élément du dossier n'établirait des faits
répétés laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral. A défaut l’explications de
l’employeur fondées sur des éléments objectifs, le grief de harcèlement parait établi.
5)Dossier Jean
Mme Jean a été engagée le 5 septembre 2012 en qualité de gestionnaire par la société Lubeck
& associés, en tant que cadre. Son contrat de travail contient une clause soumettant la salariée
au régime du forfait en jours. La relation de travail est régie par la convention collective
nationale des sociétés financières. L'article 7 du contrat de travail intitulé « Durée du travail »
stipule que la salariée « appartient à la catégorie des cadres autonomes relevant du forfait
jours avec 217 jours par an ».
La convention collective nationale prévoit, en premier lieu, que la charge de travail confiée ne
peut obliger un cadre à excéder une limite de durée quotidienne de travail effectif fixée à 10
heures ni excéder une limite de durée hebdomadaire ; le cadre dispose d'une grande liberté
dans la conduite ou l'organisation des missions correspondant à sa fonction et dans la
détermination du moment de son travail ; le cadre et l'employeur examinent ensemble, afin
d'y remédier, les situations dans lesquelles ces dispositions ne peuvent pas être respectées.
Toutefois, la société n'a pas organisé d'entretien annuel individuel avec Mme Jean.
Après avoir démissionné le 2 juillet 2022, la salariée souhaite saisir la juridiction prud'homale
aux fins notamment de faire prononcer la nullité de la clause de forfait en jours et d'obtenir un
rappel d'heures supplémentaires. Que peut-on lui conseiller ?
Faut-il, dans ce dossier, déclarer nulle la clause de forfait en jours et condamner l’employeur
à payer à la salariée un rappel d'heures supplémentaires ?
Par un arrêt du 12 janvier 2011 (Soc., 12 janvier 2011, pourvoi n° 09-69.679), la Cour de
cassation a statué non pas sur les garanties présentées par une convention collective pour les
salariés ayant conclu une convention individuelle de forfait en jours mais sur la possibilité de
soumettre le salarié partie au litige au régime du forfait en jours, au regard de l'autonomie
dont il dispose.
Par des arrêts du 14 mai 2014 (Soc., 14 mai 2014, pourvoi n° 12-35.033 et Soc., 14 mai 2014,
pourvoi n° 13-10.637), la Cour s'est prononcée sur les dispositions relatives au forfait en jours
de la convention collective nationale des cabinets d'experts-comptables et de commissaires
aux comptes du 9 décembre 1974.
Elle a censuré un arrêt ayant fait application d'une convention individuelle de forfait en jours
pour débouter un salarié de sa demande au titre des heures supplémentaires, en affirmant que
les stipulations conventionnelles n'étaient pas de nature à assurer la protection de la sécurité et
de la santé des salariés concernés et que la cour d'appel aurait dû en déduire que la convention
de forfait était nulle.
Les arrêts précités du 14 mai 2014 ne constituent pas un revirement de jurisprudence. Ils
s'inscrivent dans le cadre d'une jurisprudence affirmant que toute convention de forfait en
jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du
respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires
(Soc., 29 juin 2011, pourvoi n° 09-71.107).
Le juge peut déclarer nulle la clause du contrat de travail relative au forfait en jours, sans
porter atteinte à une situation juridiquement acquise et ni violer l'article 1er du premier
protocole additionnel à la CEDH (Chambre sociale, 17 novembre 2021, 19-16.756). Si la
clause de forfait en jours est annulée, l’employeur est condamné à payer au salarié des
sommes au titre des heures supplémentaires, des congés payés afférents, de l'indemnité
compensatrice de la contrepartie en repos non pris.
En l’espèce, la demande de la salariée parait justifiée. Le salarié peut prétendre à ce que les
heures accomplies au-delà de la durée légale du travail soient considérées comme des heures
supplémentaires et rémunérées comme telles.
Le conseil de prud’hommes analyse les pièces produites par chacune des parties, évalue
souverainement l'importance des heures supplémentaires et fixe les créances salariales s'y
rapportant. L'employeur devrait démontrer en l’espèce que des entretiens spécifiques ont été
organisés de nature à permettre le contrôle et le suivi de l'application des dispositions
conventionnelles. Or ces entretiens n’ont pas eu lieu.
Les stipulations de la convention doivent assurer la garantie du respect des durées maximales
de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires ; cette convention collective ou cet
accord collectif doit donc prévoir les catégories de cadre intéressés, les modalités de
décompte des journées ou des demi-journées travaillées et de prise des journées ou demi-
journées de repos, les conditions de contrôle de son application, les modalités de suivi de
l'organisation de travail des salariés concernés, et de l'amplitude de leurs journées d'activité et
de la charge de travail qui en résulte ; il est nécessaire que l'accord collectif prévoit
précisément les modalités de contrôle et de suivi de ces dispositions. Tel ne semble pas être le
cas en l’espèce. La convention de forfait en jours mentionnés dans le contrat de travail (qui
est soumis à la convention collective) est nulle.
Argument de l’employeur devant être écarté : il incomberait au salarié de démontrer que son
employeur n'a pas organisé un entretien annuel individuel portant sur sa charge de travail,
l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie
personnelle et familiale, ainsi que sur sa rémunération, s'il entend se prévaloir de cette
circonstance à l'appui de son action en nullité de la convention de forfait annuel en jours.
6)Dossier Dimitri
M. Dimitri a été engagé par la société Lullaby France Sports et Randonnées à compter du 24
septembre 2003 pour occuper un emploi de responsable de rayon, statut cadre. Il souhaite
saisir la juridiction prud'homale en ce qui concerne le paiement de ses heures de travail,
d'heures supplémentaires, de congés payés afférents et d'une indemnité pour absence de
contrepartie obligatoire en repos pour les années 2019 à 2021.
Le salarié produit aux débats pour les années 2019 à 2021, un décompte fondé sur une
amplitude horaire. Que pouvez-vous lui conseiller ?
Selon l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans
un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit
les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis
et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.
Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre
d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier
les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par
le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de
besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail
accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-
ci doit être fiable et infalsifiable.
En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient
au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux
heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui
assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses
propres éléments.
Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des
exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des
pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence
d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son
calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
La Cour de cassation retient que si le salarié fournit un décompte fondé sur une amplitude
horaire, face à un employeur qui ne produit aucun élément de contrôle de la durée du travail,
la demande du salarié est considérée comme fondée (Chambre sociale, 4 novembre 2021, 19-
23.834).
En l’espèce, d’une part, le salarié présente vraisemblablement des éléments chiffrés dans son
décompte fondé sur une amplitude horaire pour permettre à l’employeur d’y répondre.
D’autre part, ce dernier ne produit aucun élément de contrôle de la durée du travail. Les juges
ne doivent pas faire peser la charge de la preuve sur le seul salarié.
Est logiquement fondée la demande du salarié au titre des heures supplémentaires, des congés
payés afférents et de l’indemnité pour absence de contrepartie obligatoire en repos. Peu
importe que le salarié communique simplement un décompte fondé sur une amplitude
horaire ; il peut évidemment produire un document répertoriant ses horaires de travail
journaliers mentionnant l’heure à laquelle il a commencé son travail, l’heure à laquelle il a
terminé son travail et son temps de pause. Néanmoins, un décompte fondé sur une amplitude
horaire permet à l’employeur de répondre.
=>
***************************
Va
2
Ots de droit:La demande rappel d'heures sup
est-elle fondée?
La qualitéde cadre
dirigeant
entrave-t-elle cette demande.
dirigeant?
Article 1.3111-2 Code du T.
↳ Le salariéayant
la qualitede cadre
dirigeant
west soumis dispositions des titres II et
III.
pas aux
I
Arrêt 31 janvier 2012 seuls
-
les salariés cadre dirigeants
appartenant
à la Direction de l'entreprise he beneficient
pas
des heures sups.
salariés
1)Droit des
au rappel
2) La qualitéde cadre
arrigeant comme
entrave
1) Rappel des faits
verves
en qualitéde directeur de
fabricate
Le contrat
a pris fin le 27mai2013 sous la
forme licenciement
au
pour faute grave du salarié.
2) Question de droit
La demande d'heures
en paiement sups et
payés y afférents,
de
conges
on salariécadve
dirigeant
est
-elle fondée?
3)La Réponse
En Droit
2. Sont
habilités prendre
à des décisions de façon
largement autonome.
direction de
l'entreprise.
Dans arrêt
cet bien que la salariée
la qualification du statut
de cadre dirigeantan
sens de l'article L. 31-2 c.5 car cette 4condition nietal
pas remplie
Arrêt
* Ch SoC 13 janvier 2009:
La reponse en faits
Position de dirigeant -
gestion du personnel (discp)
Salaire le + élevé
EDT libre
-
semble montrer qu'il participe la
à directs ae
la soc
Mais he faisant
parti d'aucun conseil de Directo
de la societela considereaw'il
cour
pourrait
assure uniquementle bon fonctionnement
du site