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EMC-Médecine 2 (2005) 284–290

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Syndrome inflammatoire chez la personne âgée


Inflammatory syndrome in elderly people
R. Durant *, H. Blain, C. Jeandel
Centre de prévention et de traitement des maladies du vieillissement Antonin-Balmes,
39, avenue Charles-Flahault, 34295 Montpellier cedex 05, France

MOTS CLÉS Résumé Les syndromes inflammatoires sont fréquents et souvent prolongés chez le sujet
Vitesse de âgé. Ils sont définis par l’augmentation de la vitesse de sédimentation et par l’élévation
sédimentation ; des protéines de l’inflammation, en particulier la C reactive protein. Le plus souvent, le
C protéine réactive ; diagnostic étiologique est évoqué cliniquement, mais il faut parfois avoir recours à des
Infections ;
examens complémentaires. Les examens invasifs doivent être évités s’ils ne sont pas
Cancers ;
Maladies indispensables à l’établissement du diagnostic. Les pathologies les plus fréquemment
inflammatoires retrouvées au cours de l’exploration d’un syndrome inflammatoire sont : les maladies
infectieuses, inflammatoires, tumorales et vasculaires. En l’absence de diagnostic étio-
logique, devant un syndrome inflammatoire prolongé, un traitement d’épreuve peut être
discuté.
© 2004 Publié par Elsevier SAS.

Abstract Inflammatory syndromes are more frequent and extended in elderly people.
KEYWORDS
Erythrocyte Erythrocyte sedimentation rate, inflammatory protein and particularly the C-reactive
sedimentation rate; protein are the most important biological parameters of its definition. Most often, clinical
C reactive protein; examination leads to etiological diagnosis, but further investigations are sometimes
Infectious diseases; necessary. If not essential, invasive investigations should be limited. The most frequent
Cancer; etiological diagnoses are: infectious or inflammatory diseases, cancers and vascular
Inflammatory disease pathologies. Therapeutic testing may be tried in extended inflammatory syndrome
without etiological diagnosis.
© 2004 Publié par Elsevier SAS.

Généralités sur la réaction et des facteurs hormonaux. Son but est de limiter
inflammatoire les effets de l’agression sur les tissus cibles. Le
vieillissement touche le système immunitaire et
La réaction inflammatoire constitue une ligne de entraîne une dysrégulation de celui-ci. Il en résulte
défense non spécifique de l’organisme, en réponse une altération du système immunitaire spécifique,
aux diverses agressions (infectieuses, trauma- en particulier de l’immunité à médiation cellulaire,
tiques, tumorales...). Elle est constituée d’un alors que l’immunité non spécifique semble relati-
ensemble complexe de réactions locales et systé- vement préservée (les capacités phagocytaires sont
miques mettant en jeu des cytokines, des lympho- longtemps conservées). Ce déséquilibre entre im-
kines, des phagocytes, le système du complément munité spécifique diminuée et immunité non spéci-
fique conservée explique la fréquence des syndro-
* Auteur correspondant. mes inflammatoires (SI) prolongés chez le sujet
Adresse e-mail : r-durant@chu-montpellier.fr (R. Durant). âgé.
1762-4193/$ - see front matter © 2004 Publié par Elsevier SAS.
doi: 10.1016/j.emcmed.2004.12.003
Syndrome inflammatoire chez la personne âgée 285

Définition et diagnostic du syndrome Tableau 2 Formule de Miller.


inflammatoire Hommes Femmes
Seuil pathologique âge (années) / 2 (âge [années] +
Le SI est classiquement défini par l’augmentation de la VS (mm/h) 10) / 2
de la vitesse de sédimentation (VS) et par l’éléva-
VS : vitesse de sédimentation.
tion des protéines de l’inflammation1 dont les prin-
cipales sont : la C reactive protein (CRP), l’hapto-
largement débattue chez la personne âgée. Dans
globine, le fibrinogène, la protéine sérique
les deux sexes, la VS augmente avec l’âge. Cette
amyloïde (SAA). Il faut noter que la CRP et la SAA
élévation de la VS est corrélée significativement
ont une cinétique plus rapide que le fibrinogène et
aux taux plasmatiques du fibrinogène qui augmen-
l’haptoglobine, ce qui explique leur élévation très
tent aussi avec l’âge. Seule la mesure à la première
précoce lors de la constitution de l’inflammation.
heure exprimée en millimètres a un intérêt. Les
D’autres anomalies biologiques peuvent être aussi
valeurs normales de la VS sont plus basses chez
retrouvées au cours d’un SI en fonction de son
l’homme que chez la femme.
intensité et de sa durée :
La synthèse des différentes études sur la VS
• une thrombocytose ;
réalisées chez le sujet âgé3–5 permet de fixer le
• une anémie normo- ou microcytaire arégénéra-
seuil pathologique de la VS à la 1ère heure après
tive ;
60 ans, à 20 mm chez l’homme et 25 mm chez la
• une hyperferritinémie ;
femme.
• une élévation des alpha2- et des gammaglobuli-
La formule de Miller qui permet de calculer la VS
nes à l’électrophorèse des protéines ;
en fonction de l’âge est encore souvent utilisée
• une hypoalbuminémie.
En pratique clinique, l’association VS et CRP et mais ne semble pas bien adaptée aux sujets très
éventuellement fibrinogène suffit pour établir le âgés (Tableau 2).
diagnostic de SI chez la personne âgée. Lorsque le SI L’élévation polyclonale ou monoclonale des im-
dure plus de 3 semaines, on parle de SI prolongé ou munoglobulines, détectée par l’électrophorèse des
persistant. protides, peut s’accompagner d’une augmentation
de la VS, même en l’absence de SI.
Vitesse de sédimentation L’élévation polyclonale témoigne d’une réaction
immunitaire humorale avec activation polyclonale
Malgré son manque de spécificité et son intérêt des lymphocytes B. L’origine de ces hyperglobuliné-
parfois contesté, la VS est un examen biologique mies est parfois difficile à identifier, et la VS peut
simple, de faible coût, facile d’accès et souvent être le seul signe révélateur. De nombreuses patho-
utile pour apprécier l’existence d’un SI chez le logies très diverses s’accompagnent d’une éléva-
sujet âgé. L’interprétation de la VS reste délicate tion polyclonale des immunoglobulines (Tableau 3).
car de nombreuses situations2,3 avec ou sans in- La présence d’un pic monoclonal sur l’électro-
flammation, sont susceptibles d’entraîner son élé- phorèse des protides témoigne d’une dyscrasie lym-
vation (Tableau 1). phoplasmocytaire. Les principales causes sont : les
La détermination du seuil de la VS le plus discri- gammapathies monoclonales de signification indé-
minant en termes de spécificité et de sensibilité est terminée, le myélome, la maladie de Waldenström,

Tableau 1 Facteurs influençant la vitesse de sédimentation (VS).


Augmentation VS Diminution VS
Âge Cryoglobulinémie
Sexe féminin Polyglobulie
Température élevée de la pièce Forte hyperleucocytose > 50 000/mm3
Maladies inflammatoires Drépanocytose
Anémie Insuffisance hépatocellulaire
Hypergammaglobulinémies Hyperviscosité
Héparine et œstroprogestatifs Hémoglobinopathie
Hyperlipoprotéinémie Hypofibrinogénémie
Obésité Cachexie
Insuffisance rénale chronique Corticoïdes
Syndrome néphrotique Androgènes
Tube sale ou non vertical ou non immobile Hypogammaglobulinémie
Anomalies d’anticoagulant Alcalose
Prélèvement hémolysé Mesure après plus de 2 heures de prélèvement
Température basse de la pièce
286 R. Durant et al.

Tableau 3 Principales étiologies des hypergammaglobulinémies polyclonales.


Infections Virales : hépatites, MNI, CMV
Bactériennes : mycoplasme
Mycoses profondes
Parasitaires : toxoplasmose, leishmaniose, paludisme
Hépatopathies aiguës et chroniques Alcoolique, virale, cirrhose biliaire primitive
Maladies auto-immunes Syndrome de Gougerot-Sjögren, Lupus
Hémopathies LMNH, myélodysplasie
Malnutrition
Hyperplasie ganglionnaire médicamenteuse Antibiotiques, antiépileptiques, immunosuppresseurs
MNI : mononucléose infectieuse ; CMV : cytomégalovirus ; LMNH : lymphome malin non hodgkinien.

les lymphomes B et les leucémies lymphoïdes chro- Fibrinogène


niques. Une recherche systématique effectuée Son dosage est de pratique courante. Le taux nor-
dans une population âgée asymptomatique a révélé mal est compris entre 2 et 4 g/l. Sa cinétique est
la présence d’une gammapathie monoclonale dans relativement longue (4 à 6 jours de demi-vie). Ses
10 % des cas. La VS était cependant inférieure à variations suivent habituellement celles de la VS.
20 mm la 1re heure dans la moitié des cas.
La VS peut aussi s’élever dans de nombreuses Haptoglobine
situations où il n’y a pas de SI (Tableau 1). Le dosage de l’haptoglobine est surtout intéressant
dans les pathologies inflammatoires subaiguës ou
Protéines de l’inflammation chroniques. Sa cinétique est plus lente que la CRP.
Son taux normal se situe entre 0,8 et 2 g/l. Une
L’interprétation des résultats doit tenir compte des maladie inflammatoire s’accompagnant d’un taux
pathologies susceptibles d’interférer avec les dosa- bas d’haptoglobine devra faire rechercher une hé-
ges des protéines de l’inflammation : molyse.
• le syndrome néphrotique augmente les protéi-
nes de l’inflammation sauf la CRP ; Procalcitonine
• l’insuffisance rénale chronique s’accompagne
d’une augmentation du fibrinogène ;
Cette prohormone de la calcitonine peut être dosée
• l’hémolyse entraîne une baisse de l’haptoglo-
facilement et rapidement à partir d’un prélève-
bine ;
ment de sang. Son dosage n’est actuellement réa-
• la coagulation intravasculaire disséminée dimi-
lisé que dans certains centres hospitaliers et reste
nue le fibrinogène par consommation ;
donc difficilement accessible. Ses avantages par
• l’insuffisance hépatocellulaire diminue toutes
rapport à la VS et aux protéines de l’inflammation
les protéines de l’inflammation ;
sont une cinétique très rapide (plus rapide que la
• la carence martiale s’accompagne d’une baisse
CRP) et surtout une élévation sélective dans les
de la ferritine. En cas de cancer colique la
infections bactériennes ce qui permettrait de dif-
ferritine peut être normale : l’élévation secon-
férencier, en cas de fièvre, une infection virale
daire à l’inflammation est compensée par la
d’une infection bactérienne.6 De plus, il semble
carence en fer (anémie ferriprive).
que la procalcitonine ne s’élève pas au cours des
fièvres liées à une maladie inflammatoire. Bien
« C reactive protein »
qu’il s’agisse d’un marqueur très intéressant, les
Le dosage de la CRP est très largement utilisé. Son
modalités d’utilisation de la procalcitonine ne sont
taux normal est inférieur à 4 mg/l. Sa cinétique est
pas encore clairement définies et il faudra attendre
très rapide, elle augmente en 24 heures lors d’une
encore un peu avant que son dosage soit proposé en
infection et peut commencer à diminuer après 24-
routine.
36 heures de traitement bien conduit. Elle se nor-
malise beaucoup plus rapidement que la VS après la
disparition de l’infection. Elle s’élève nettement
lors des infections bactériennes et au cours de la Stratégie diagnostique devant
plupart des maladies inflammatoires (Horton, pé- un syndrome inflammatoire
riartérite noueuse...). En revanche, au cours des
poussées lupiques, la CRP reste normale ou légère- Les syndromes inflammatoires sont fréquents chez
ment élevée sauf en cas de complication infec- le sujet âgé et souvent prolongés. La difficulté
tieuse. n’est pas d’identifier ou de confirmer le SI mais de
Syndrome inflammatoire chez la personne âgée 287

trouver son étiologie. La présence d’un SI doit • Examen vasculaire : palpation et auscultation,
toujours être considérée comme pathologique alors signes de phlébite.
que l’élévation isolée de la VS ne l’est pas toujours • Examen urogynécologique : touchers pelviens,
(erreur technique, obésité...). Il peut être décou- examen des seins et des organes génitaux.
vert au cours de l’exploration d’un symptôme ou • Poids, taille, index de masse corporelle
d’une pathologie ou bien il peut être l’élément (poids/taille2) : pour rechercher une dénutri-
révélateur de la maladie. L’interrogatoire, l’exa- tion.
men clinique et les examens complémentaires vont • Pression artérielle, pouls, température.
permettre d’appréhender une étiologie.
Examens complémentaires
Interrogatoire
Si l’interrogatoire et l’examen clinique ne permet-
Certains éléments de l’interrogatoire sont à recher- tent pas de faire un diagnostic, il faudra réaliser
cher systématiquement. des examens complémentaires. Ceux-ci seront
• Âge, origine ethnique et géographique. orientés par les données de l’interrogatoire et de
• Antécédents personnels et familiaux. l’examen clinique.
• Habitudes : tabagisme, alcool, alimentaire (fro-
mages frais, fruits de mer...). En première intention
• Présence d’animaux. • Hémogramme, taux de prothrombine (TP),
• Allergies médicamenteuses ou alimentaires. temps de céphaline activé (TCA).
• Toutes les prises de médicaments (attention à • VS, CRP, fibrinogène, (procalcitonine ?).
l’automédication). • Électrophorèse des protéines.
• Profession. • Hémocultures systématiques surtout en cas de
• Vaccinations. fièvre, d’hypothermie ou de frissons.
• Soins dentaires. • Transaminases, phosphatases alcalines, cGT.
• Voyages récents. • Créatine phosphokinase (CPK), lacticodéshydro-
• Circonstances de découverte du SI. génase (LDH).
• Calcémie, albumine, protides.
Examen clinique • Ionogramme sanguin, urée et créatinine plasma-
tiques.
Il doit être complet et systématique. • Bandelette urinaire + /- examen cytobactériolo-
• Palpation des artères temporales. gique des urines (ECBU).
• Examen de la cavité buccale (état dentaire et • Protéinurie/24 heures.
gingival + +). • Radio du thorax et des sinus.
• Examen cutané : érythème, ulcère, escarre, • Panoramique dentaire.
purpura, livedo, Raynaud. • Échographie abdominale et pelvienne.
• Examen des phanères : hippocratisme digital, • Échodoppler veineux des membres inférieurs.
ongles blancs. • Électrocardiogramme (ECG).
• Examen des muqueuses : aphte, mycose, syn- • Intradermoréaction (IDR) tuberculine 10 UI.
drome sec, lésion ulcérée.
• Examen de la thyroïde : nodule, goitre. En l’absence de diagnostic
• Examen ORL : palpation des sinus, conduits Plusieurs examens pourront être proposés en se-
auditifs, oropharynx. conde intention en fonction des hypothèses étiolo-
• Examen ophtalmologique : syndrome sec, kéra- giques.
tite. • Recherche de bacilles de Koch (BK) dans les
• Examen des aires ganglionnaires : ganglion de crachats ou par tubage gastrique (trois tubages
Troisier. le matin à jeun) ou par fibroscopie.
• Examen thoracoabdominal : souffle cardiaque, • Scanner thoraco-abdomino-pelvien.
vasculaire, pulmonaire, foyer, épanchement • Scanner cérébral.
pleural ou abdominal, hépatosplénomégalie, • Angioscanner spiralé thoracique.
souffle abdominal, masse. • Mammographie.
• Examen ostéoarticulaire : arthrite, syndrome • Échocardiographie.
rachidien, mobilité articulaire passive et active. • Fibroscopie bronchique.
• Examen neuromusculaire : déficit sensitivomo- • Fibroscopie œsogastrique et coloscopie.
teur, syndrome méningé, myalgies, anomalies • Biopsie des glandes salivaires accessoires.
des réflexes. • Biopsie d’artère temporale.
288 R. Durant et al.

• Biopsie ostéomédullaire + /- myéloculture (BK, • Les infections cutanées (érysipèle, escarres et


leishmaniose). ulcères infectés). Les escarres profondes, éten-
• Biopsie hépatique. dues et non infectées ne s’accompagnent habi-
• Examen ophtalmologique. tuellement pas de syndrome inflammatoire, ce-
• Sérologies virales : virus de l’immunodéficience pendant une légère élévation de la CRP
humaine (VIH), virus de l’hépatite B (VHB), virus (< 20 mg/l) reste possible.
de l’hépatite C (VHC).
• Anticorps antinucléaires, ANCA, facteur rhuma- Cancers et hémopathies
toïde.
Le SI est rarement isolé et s’accompagne le plus
Chez la personne âgée souvent d’une altération de l’état général et éven-
Le scanner thoraco-abdomino-pelvien et la biopsie tuellement d’une fièvre. Le scanner thoraco-
d’artère temporale sont probablement les examens abdomino-pelvien est souvent l’examen le plus ren-
les plus rentables en seconde intention et doivent table pour évoquer le diagnostic. Cependant pour
donc être privilégiés. mettre en place un traitement, il faut impérative-
ment obtenir une histologie du tissu tumoral. Il
faudra particulièrement rechercher :
Principales étiologies à rechercher
• un lymphome malin non hodgkinien devant des
systématiquement adénopathies profondes ;
• une myélodysplasie révélée par une anémie et
Les principales causes de SI sont les maladies infec-
éventuellement des signes systémiques (poly-
tieuses, inflammatoires, tumorales et vasculaires.1
arthrite, fièvre, éruption...) ;
Infections • un myélome ou une maladie de Waldenström ;
• un cancer du rein qui s’accompagne volontiers
La recherche d’un foyer infectieux est l’étape in- de syndrome paranéoplasique ;
dispensable avant tout traitement. Plusieurs infec- • un cancer du sein et de l’ovaire chez la femme ;
tions sont à évoquer systématiquement chez la • un cancer de prostate chez l’homme ;
personne âgée. • un cancer colorectal ;
• La tuberculose est à rechercher de principe • un cancer bronchopulmonaire (fumeurs+ +).
même si l’IDR à la tuberculine est négative.
• Les foyers infectieux ORL et surtout dentaires Maladies inflammatoires ou systémiques
sont fréquemment méconnus et peuvent être à
l’origine de SI sévère. Le diagnostic d’une maladie systémique est souvent
• Les infections pulmonaires sont très fréquentes difficile chez la personne âgée. Malgré les nom-
et favorisées par les fausses routes et les bron- breux examens complémentaires disponibles, c’est
chectasies. parfois l’évolution de la maladie ou le traitement
• Les infections urinaires hautes sont favorisées d’épreuve par corticoïdes qui permettent de
par les cystites et les lithiases. confirmer le diagnostic. Les signes cliniques qui
• Les infections abdominales : cholécystite, an- peuvent faire suspecter une maladie sont souvent
giocholite, diverticulite. peu spécifiques (toux sèche et Horton). Les princi-
• L’endocardite subaiguë doit faire rechercher un pales maladies à rechercher sont les suivantes.
foyer dentaire ou digestif. • La maladie de Horton doit être systématique-
• Le fécalome peut s’accompagner d’un SI discret ment évoquée devant un SI du sujet âgé. Les
et d’une fébricule (par pullulation microbienne formes atypiques ne sont pas rares et de nom-
en amont et translocation bactérienne). breuses artères peuvent être touchées y compris
• Les infections digestives (gastroentérites bacté- l’aorte. La biopsie d’artère temporale peut par-
riennes) et en particulier les diarrhées à Clostri- fois s’avérer négative devant un authentique
dium difficile qui sont favorisées par les antibio- Horton, ce qui peut conduire, en cas de forte
tiques à large spectre. suspicion clinique, à un deuxième prélèvement
• L’abcès sous-phrénique ou pelvien est à recher- du côté opposé ou bien à une corticothérapie
cher en cas d’antécédents chirurgicaux. d’épreuve.
• Une spondylodiscite doit être évoquée en pré- • La pseudopolyarthrite rhizomélique peut s’asso-
sence de douleurs rachidiennes inflammatoires. cier à la maladie de Horton ou être isolée. En
• Une méningite doit être recherchée devant des plus du rhumatisme inflammatoire des ceintures
céphalées fébriles ou devant une confusion fé- et de l’altération de l’état général, il existe
brile. fréquemment des myalgies.
Syndrome inflammatoire chez la personne âgée 289

• La polyarthrite rhumatoïde est parfois séronéga- thies. La présence d’une VS très élevée dans les
tive et les douleurs articulaires peuvent se limi- tumeurs solides pourrait être un indice de gra-
ter à des arthralgies sans véritables arthrites. En vité, car plus souvent associée avec une diffu-
cas de gonflement œdémateux du dos des mains sion métastatique.
et des pieds, on peut évoquer le diagnostic de • La pathologie inflammatoire représente 20 à
RS3PE ou polyarthrite du sujet âgé qui guérit 25 % des cas, regroupant des affections très
habituellement sous corticoïdes. diverses (maladies systémiques, pathologie
• Les thyroïdites auto-immunes sont fréquentes et thrombotique...). Après 65 ans, il faut
augmentent avec l’âge. Elles s’accompagnent le rechercher systématiquement une maladie de
plus souvent d’une hypothyroïdie. Au stade ini- Horton.
tial, les hormones thyroïdiennes peuvent être • Les causes indéterminées sont assez rares ; lors-
normales et seuls les anticorps anti-TPO peu- que le diagnostic peut être fait ultérieurement,
vent être élevés. les connectivites et rhumatismes inflammatoi-
• La périartérite noueuse, la sclérodermie, la ma- res sont le plus souvent en cause.
ladie de Wegener et la maladie lupique sont
rares et souvent de diagnostic difficile.

Maladies vasculaires Conduite à tenir devant un syndrome


inflammatoire prolongé, en l’absence
Certaines pathologies vasculaires artérielles ou vei- de diagnostic étiologique
neuses peuvent s’accompagner d’un SI le plus sou-
vent modéré. • En l’absence d’altération de l’état général on
• La maladie veineuse thromboembolique : c’est peut proposer un arrêt des investigations et une
une cause fréquente de SI chez la personne simple surveillance ambulatoire avec contrôles
âgée. Il faudra évoquer systématiquement ce réguliers du poids, de la température, du pouls
diagnostic d’autant que la prévalence des et des principaux marqueurs de l’inflammation.
thromboses veineuses profondes augmente avec En effet, environ deux tiers des syndromes in-
l’âge et les signes cliniques sont souvent frustes flammatoires prolongés disparaissent spontané-
(simple empâtement, œdème localisé...). Le ment en plusieurs mois sans qu’un diagnostic
recours à l’échodoppler veineux doit être re- étiologique ait pu être posé.1
commandé au moindre doute. En cas de suspi- • En cas d’altération de l’état général, il est en
cion d’embolie pulmonaire, l’angioscanner tho- revanche licite de proposer un traitement
racique spiralé est souvent plus informatif que d’épreuve. Il peut s’agir d’une trithérapie anti-
la scintigraphie de ventilation-perfusion. tuberculeuse s’il existe un doute sur une tuber-
• L’infarctus du myocarde est souvent indolent culose ou bien une antibiothérapie probabiliste
chez le diabétique et le sujet âgé. à large spectre associant une céphalosporine de
• La dissection aortique et la fissuration d’un 3e génération à un macrolide en cas de suspicion
anévrisme aortique peuvent s’accompagner
d’infection bactérienne (il vaut mieux éviter les
d’un SI.
fluoroquinolones car elles sont actives sur le
bacille de Koch). En cas de suspicion de maladie
Cas particulier : VS > 100 mm/1re heure inflammatoire, et après avoir écarté une infec-
tion évolutive (en particulier la tuberculose),
Quel que soit le contexte clinique, une VS à 100 est une corticothérapie systémique peut être envi-
un très bon indice de pathologie grave. Il faut sagée. L’évolution clinique sous corticoïdes
absolument poursuivre les investigations et trouver peut être difficile à interpréter initialement,
une étiologie (dans 90 % des cas une pathologie est car il existe souvent une amélioration de l’état
retrouvée). général et un effet positif est parfois obtenu
L’analyse des grandes séries de la littérature dans les pathologies tumorales (les lymphomes
s’intéressant aux étiologies des VS > 100 permet de sont habituellement corticosensibles).
retenir plusieurs points.7
• La pathologie infectieuse représente environ
50 % des cas. Les infections respiratoires et Références
génito-urinaires regroupent à elles seules un
tiers des cas. 1. Durand DV, Rousset H, Bienvenu J, Sibille M. Le syndrome
• La pathologie cancéreuse représente 20 à 25 % inflammatoire. In: Diagnostics difficiles en médecine
des cas dont un tiers correspond aux hémopa- interne. Paris: Maloine; 1999. p. 913–32.
290 R. Durant et al.

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