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Cours : Droit pénal spécial

Auteur : Catherine GINESTET

Leçon n° 8 : Les atteintes volontaires à l'intégrité physique

Introduction

Après les atteintes à la vie de la personne, le code pénal traite des atteintes à l'intégrité physique
ou psychique de la personne établissant ainsi une hiérarchie des valeurs à protéger. Pour s'en
tenir aux atteintes volontaires (les atteintes involontaires feront l'objet de la leçon suivante) , sont
successivement traitées par le législateur, les tortures et actes de barbarie art.222-1s C.pén., les
violences art.222-7s C.pén. et les menaces art.222-17s C.pén. , ainsi que les agressions sexuelles
art.222-22s C.pén. , le harcèlement moral art.222-33s C.pén. et enfin le trafic de stupéfiants
art.222-34s C.pén. .

Parmi les infractions les plus anciennes, les coups et blessures et les infractions en matière
sexuelle n'étaient pas traitées dans la même section du chapitre unique consacré aux crimes et
délits contre les personnes ; elles faisaient l'objet de dispositions séparées du code napoléonien.
De ce point de vue, le code actuel est plus explicite, même s'il n'est pas lui-même exempt de
critiques. De nombreuses infractions particulières sont venues se rajouter au fur et à mesure
comme les tortures et actes de barbarie ou le harcèlement moral par exemple.

Seront successivement étudiées ici les infractions les plus poursuivies statistiquement :
http://.www.justice.gouv.fr aller à la rubrique : Publications, consulter : Statistiques, consulter : Les
chiffres-clés de la justice et laisser libre accès à l'intégralité des années dont les chiffres sont
disponibles), savoir, les violences (Section 1) et les agressions sexuelles (Section 2).

Section 1. Les violences

C'est une matière qui a beaucoup et souvent évolué ; pendant très longtemps, les coups et
blessures, qualifiés " d'injures réelles " étaient punis de la même manière que les injures verbales.

Le mot injuria désignait en droit romain, dans son sens le plus étroit, toute atteinte légère à la
personne.

Dans bon nombre de coutumes, le premier critère pour apprécier la gravité du comportement
n'était autre que " l'effusion de sang ", auquel venait s'ajouter dès le Moyen-Age l'avis d'expert
(Cf.J-M.Carbasse, Histoire du droit pénal et de la justice criminelle, n°188, 204s " Si les blessures
étaient particulièrement graves, et que l'on ne savait pas si la victime allait vivre ou mourir, la
qualification de l'infraction était suspendue. En attendant l'issue, le coupable était placé en

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détention provisoire") . De cette lointaine origine, il demeure que les incriminations visées
sont des infractions de résultat. De sorte que le résultat obtenu -et lui seul- permet de qualifier
le comportement. La répression dépend du préjudice subi (Cf. les ouvrages de droit pénal général,
sur la notion d'infraction de résultat) .

Le code napoléonien consacra trois articles (anciens art. 309 à 311) aux " blessures et coups
volontaires non qualifiés meurtre ", maintes fois remaniés dès le XIXe siècle. On dénombre
aujourd'hui plus de dix articles consacrés aux violences dans la partie législative augmentée par la
loi du 5 mars 2007 sur la prévention de la délinquance (art.222-7 à 222-16-2 C.pén.) et trois dans
la partie réglementaire (art.R.624-1, R.624-2 et R.625-1 C.pén.) . L'ensemble sera étudié à partir
de la distinction simple entre qualification et répression.

§ 1. La qualification des violences

Elle dépend de l'analyse des éléments constitutifs de l'infraction comprenant un élément matériel
et un élément intentionnel.

A. L'élément matériel

Pas plus que jadis avec les coups et blessures ou les voies de fait, le législateur ne définit les
violences, estimant sans doute que les termes sont suffisamment explicites. Ce sont donc les
tribunaux qui, eu égard aux circonstances, devront déterminer si l'on est en présence de violences.
Par delà les différences de comportement, des traits communs caractérisent ces violences.

• Les traits communs : Il est constant que la victime de ces violences doit être une
personne humaine (les sévices à animaux sont sanctionnés par d'autres textes du code
pénal, art.521-1 et 512-2, art.R.654-1 et art.R.654-2 C.pén.) , vivante (sauf à considérer
l'hypothèse de l'infraction impossible, traitée dans le cadre du droit pénal général). En outre,
le code pénal n'incrimine que les violences portées sur autrui et non celles qu'une personne
peut s'infliger à elle-même.

Jurisprudence :
Cass.crim.27 octobre 1999, RSC 2000, p.396 obs.Mayaud qui précise si une émotion suffit à
caractériser la violence, elle s'entend d'une pression personnellement ressentie par une victime
identifiée, et non d'un vague sentiment collectif, qui ne rentre pas dans les prévisions de la loi

• Quant aux actes à proprement parler, un certain nombre de caractéristiques


communes peuvent être relevées : il peut s'agir d'un acte unique ou de plusieurs actes,
mais l'abstention n'est pas prise en considération (L'ancien art.309 C.pén. incriminait ainsi
"toute personne qui, volontairement, aura porté des coups ou commis des violences ou voies
de fait..." , ce qui implique un acte positif). L'abstention tomberait éventuellement sous le coup
de l'incrimination d'omission de porter secours à personne en péril visée à l'article 223-6
C.pén ou s'il s'agit d'un mineur, sous le coup de l'art.227-15 et 227-16 C.pén. incriminant par
exemple la privation d'aliments ou de soins.
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Puisque la répression est très largement fonction du résultat, l'existence d'un lien de causalité
entre les violences et le dommage subi par la victime est nécessaire. Il n'a cependant pas à
être exclusif, ni direct et immédiat. Lorsque plusieurs personnes participent à une scène unique de
violence sans pouvoir déterminer quelle est exactement la part de chacun dans le résultat, la
jurisprudence fait application de la théorie de la complicité corespective, notion étudiée en droit
pénal général. Ce préjudice est défini par plusieurs textes comme étant une incapacité totale de
travail. Il est impératif de noter cependant que l'existence du préjudice n'est pas requise pour les
violences légères.

Les éléments constitutifs des violences :

Un dommage subi par autrui Un acte de violence Un lien de causalité

• Une victime, personne


humaine
• Exclusif ou on
• Une victime vivante • Un acte unique ou
• Direct ou on
• Une victime identifiée plusieurs positif(s) actes
• Immédiat ou on
• Une victime, correspondant
à autrui

En savoir plus : Distinction entre l'incapacité totale de travail et l'incapacité de nature


professionnelle

Il convient de distinguer l'incapacité totale de travail et l'incapacité de nature professionnelle. Ce


qui est visé ici c'est l'incapacité d'avoir une activité physique normale. Cf. Cass.crim.22 novembre
1982, Bull.crim.n°263 par exemple. L'incapacité temporaire totale de travail n'implique pas
nécessairement l'impossibilité pour la victime de se livrer à un effort physique afin d'accomplir
elle-même certaines tâches ménagères

• Les différences : Au-delà de cette unité, les violences peuvent prendre des formes très
différentes et les nouveaux choix terminologiques du législateur ne remettent pas en cause
les distinctions faites sous l'empire des anciens textes. Ainsi, faut-il dissocier les coups, des
voies de fait.

Les coups impliquent un contact brutal avec la victime qui va pouvoir se traduire par des
blessures dont la gravité permettra de qualifier le comportement, ou même par une absence de
lésion. Il s'agit de toute impression faite sur le corps de la victime et peu importe le moyen utilisé.
L'auteur peut porter le coup à main nu ou avec un objet, il peut utiliser un animal. Les blessures ne
sont donc que le résultat éventuel des coups et sont constituées par des lésions plus ou moins
graves. Dans certaines hypothèses, il y aura même décès de la victime, qu'il va falloir
impérativement distinguer de l'homicide.

Les violences légères, visées dans la partie réglementaire du code pénal, ne sont pas faciles à
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caractériser. L'article R.624-1 C.pén. ne comporte pas en lui-même le qualificatif contenu dans
l'intitulé de la section. C'est au fond la référence à l'absence d'incapacité totale de travail qui
permet au juge d'appliquer la disposition adéquate. Ont été retenus au titre des violences légères,
le fait d'asperger une personne avec un tuyau d'arrosage ou de secouer une personne par les
épaules ou encore de tenter d'ouvrir la portière d'un véhicule au cours d'une altercation entre
automobilistes par exemple.

Les voies de fait avaient été introduites en 1863 pour élargir l'incrimination et punir ainsi des
comportements intolérables constituant des atteintes corporelles, sans pour autant pouvoir être
qualifiés de coups. Les travaux préparatoires du texte en question retenaient par exemple le fait de
jeter une personne à terre ou de lui arracher les cheveux, ce qui suppose encore un contact avec
la victime. Mais la jurisprudence est allée plus loin, en supprimant purement et simplement la
nécessité d'un contact physique.

Jurisprudence :
Les voies de fait peuvent désormais résulter d'une attitude qui " sans atteindre matériellement la
victime, sont de nature à impressionner une personne raisonnable (Cass.crim.7 mars 1972,
Bull.crim.n°85 ; voir déjà Cass.crim.19 février 1892, DP 1892, 1, 550 : En visant les violences et
voies de fait exercées volontairement, le législateur a entendu réprimer notamment celles qui, sans
atteindre matériellement la personne, sont cependant de nature à provoquer une sérieuse
émotion) " ou " à troubler son comportement au point qu'elle se blesse elle-même (Cass.crim.21
novembre 1988, Bull.crim.n°392) ".

C'est ainsi développer notamment toute une jurisprudence à propos des appels téléphoniques
multiples et agressifs destinés à troubler l'existence d'une personne et tombant sous la
qualification de voie de fait, au contraire des appels abusifs n'ayant pas éprouvé sérieusement la
victime.

Remarque : La discussion a évoluée aujourd’hui puisque le code de 1992 a créé une incrimination
spécifique à l'article 222-16 C.pén. concernant les appels téléphoniques malveillants. L'existence
de ce texte ne remet pas totalement en cause la jurisprudence rendue sous la qualification de
violences dans la mesure où l'incrimination spécifique protège la tranquillité d'autrui, non l'intégrité
physique, de sorte que la pénalité retenue est moindre. Pour une comparaison des deux textes,
222-16 C.pén. et à l'article 222-11 C.pén. .

Par ailleurs, le choc émotif peut provenir d'attitudes menaçantes (avancer avec un couteau, tirer
un coup de feu en l'air pour effrayer la victime) , de l'utilisation de pétard ou encore de l'envoi de
lettre anonyme (V° Y.Mayaud, "Quand la plaisanterie confine à la bêtise...", Rec.sc.crim.2002,
chron.587. Il s'agit d'un envoi d'une lettre contenant de la poudre blanche laissant penser à une
agression au bacille de charbon, ce qui était très traumatisant dans le contexte des attentats de
2001) , enfin de la rétention de personnes, pendant une heure, dans une salle dont les issues sont
fermées.

B. L'élément moral

Eu égard à leur place dans le code pénal, ces infractions sont toutes volontaires même si cela
n'est précisé (maladroitement) que pour les violences définies par les dispositions réglementaires.
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Ainsi, celui qui est poursuivi pour violences doit avoir voulu porter les coups ou exercer les voies
de fait sur la victime.La volonté de porter atteinte à l'intégrité corporelle doit être démontrée.

Jurisprudence :
A propos de l'arrêt rendu par la chambre criminelle le 6 février 2001 en matière de violences
chirurgicales, Cf. D.2001, somm.comm.p.2351, obs.Roujou de Boubée et RSC.2001, p.580 "
Intention et mobiles dans les violences volontaires : l'exemple de violences chirurgicales " par Y.
Mayaud. On a pu voir dans cette décision, l'exigence d'un dol spécial, à côté du dol général. Il se
caractérise par la volonté de causer le dommage. Selon Y. Mayaud, " L'intention se définirait alors,
non comme la volonté d'attenter à l'intégrité physique ou psychique des personnes, mais comme
la volonté du dommage inhérent à cette atteinte. L'intention de porter atteinte à l'intégrité de la
victime ne suffirait pas à remplir le délit de son élément moral, encore faudrait-il que cette atteinte
ait été également voulue comme un dommage en soi ".

Si cette volonté n'était pas démontrée, il n'y aurait que blessures involontaires (Selon G. Roujou de
Boubée, op.cit. L'absence de dol spécial rendait, en effet, difficile la distinction entre les violences
volontaires et les violences involontaires dès lors que la faute elle même est consciente. En même
temps, il n'est guère logique de faire abstraction de la volonté du préjudice tout en établissant une
proportion entre la sanction et l'importance du préjudice causé) .

La volonté du comportement ne doit pas être confondue par ailleurs avec la volonté de
produire un résultat déterminé .

Jurisprudence :
Il est ainsi de jurisprudence constante que les violences volontaires sont constituées " dès qu'il
existe un acte volontaire de violence, quelque soit le mobile qui ait inspiré cet acte et alors même
que son auteur n'aurait pas voulu causer le dommage qui en est résulté (La chambre criminelle
précise aussi parfois que l'auteur est responsable non seulement des conséquences qu'il avaient
prévues et voulues, mais aussi de toutes celles qui ont pu se produire ) . Cette analyse permet de
retenir par exemple, le fait de briser volontairement une vitre dont l'un des éclats atteint une
personne située à quelques mètres de là (Cass.crim.3 oct.1991, Dr.pén.1992, n°57, obs.Véron) .

S'il est alors certain que l'acte a été voulu, il n'en est certainement pas de même pour le résultat.
Cette constatation fait dire à certains membres de la doctrine que " la nature de l'infraction n'est
pas d'emblée acquise, qui est faite d'un mélange d'intention et d'imprudence (Cf. Ph.Conte, Droit
pénal spécial, Litec 2003, n°161. L'auteur va d'ailleurs plus loin en précisant au n°162 "tout se
passe donc comme si les textes, pour couper court à toute difficulté de preuve, présumaient de
façon irréfragable que le dommage causé est celui que le coupable voulait" ; Voir aussi V.Malabat,
Droit pénal spécial, Dalloz, coll. Hypercours 2005, n°100) ".

La question qui se pose est de savoir quelles sont les circonstances qui peuvent écarter
toute responsabilité. On songera à l'erreur de fait et à certains faits justificatifs. L'erreur de
fait consistant par exemple à vouloir attenter à l'intégrité d'une personne et a en blesser une autre
laisse intact l'élément matériel et l'élément moral, de sorte que l'auteur des violences sera
condamné. L'identité de la victime importe peu. La permission de la coutume ou l'usage justifie de
porter des coups dans l'exercice de sports violents comme le rugby, mais encore faut-il que l'on
soit dans une phase active du jeu et que les violences soient inhérentes à la pratique du sport en
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question. La coutume autorise aussi, dans les limites du raisonnable, le devoir de correction des
parents envers leurs enfants. Sont également autorisées les sanctions inoffensives des
enseignants. Les pratiques religieuses peuvent être justifiées.

Jurisprudence :
La circoncision est admise mais pas l'excision. Cf. TA Lyon, 12 juin 1996, RUDH1996, 695 note
Levinet ; " l'excision constitue une mutilation du corps de la femme qui génère des souffrances très
intenses , aucune nécessité thérapeutique ou tout autre motif d'ordre sanitaire ne la justifie et elle
procède du seul usage rituel et culturel ; par suite l'excision pratiquée contre leur volonté sur une
personne ou sur ses enfants constitue un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 3
de la Convention européenne des droits de l'homme ".

Enfin, même s'il existe un principe d'inviolabilité du corps humain, la loi autorise certaines atteintes
dans un but thérapeutique protégeant ainsi les médecins et les chirurgiens.

En savoir plus : Justification, l’intérêt thérapeutique

La justification ne se trouve donc pas dans le consentement de la victime qui est toujours
indifférent en droit pénal. Cf. RSC.2001, p.580 à propos de l'arrêt du 6 février 2001 : " L'intérêt
thérapeutique s'analyse comme un fait justificatif empruntant sa mesure à l'autorisation de la loi
(Cass.crim.30 mai 1991 : Bull.crim.n°232 ; Dr. pén 1991.255, obs. Véron RSC.1992.74,
obs.Levasseur). Il s'agit donc d'une cause objective d'irresponsabilité pénale, mais sous réserve
que soient respectées toutes les conditions mises à la justification, et le consentement éclairé et
non équivoque du patient est à ce titre déterminant ".

§ 2. La répression des violences

Les peines encourues par l'auteur des violences sont très variées et dépendent des circonstances
qui les entourent. Deux paramètres sont déterminants en la matière, l'étendue ou la gravité du
préjudice subi et les circonstances aggravantes.

En dehors de toute circonstance aggravante, les peines sont uniquement fonction du dommage,
lequel peut varier d'intensité indépendamment de la volonté de l'auteur. Pour aller de l'hypothèse
la moins grave à la plus sérieuse, il existe des violences contraventionnelles, des violences
correctionnelles et des violences criminelles.

• Les violences constituent une contravention lorsqu'elles sont " légères ", c'est-à-dire
qu'elles ne provoquent aucune incapacité totale de travail art.R.624-1 C.pén. . Il s'agit alors
d'une contravention de 4° classe pour laquelle le montant de l'amende est de 750 euros.
Lorsque les violences ont entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit
jours, il s'agit d'une contravention de 5° classe punie de 1500 euros et 3000 euros dans
l'hypothèse d'une récidive art.R.625-1 C.pén. . Dans tous les cas des peines
complémentaires sont expressément prévues.
• Les violences constituent un délit lorsque l'incapacité est plus longue. Si l'incapacité est
supérieure à huit jours, l'infraction est punie de trois ans d'emprisonnement et de 45 000
euros d'amende ; si le dommage consiste en une mutilation ou une infirmité permanente, les
violences sont punies de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende. La seule
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difficulté sera de préciser au cas par cas, si le dommage peut être qualifié de mutilation ou
d'infirmité. La mutilation a pu être retenue pour l'arrachement du pavillon de l'oreille, l'ablation
de la rate ou l'ablation du clitoris par exemple. Sont en revanche des infirmités permanentes,
la surdité définitive ou la cécité totale.
• Enfin, les violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner constituent un
crime. La répression de cette infraction pose deux sortes de difficultés. Il est primordial de
distinguer ce comportement de l'homicide volontaire, la ligne de partage se faisant par
référence à l'intention. L'intention de donner des coups, de blesser est requise pour les
violences volontaires, l'intention de tuer est inhérente à l'homicide . La moindre gravité de
l'acte, par rapport à l'homicide volontaire, explique que l'on descende de deux degrés dans
l'échelle des peines, la sanction étant ici la réclusion criminelle à 15 ans. En outre, le lien de
causalité entre les violences et le préjudice peut ne pas être immédiat. Ainsi, un décès qui
surviendrait plusieurs semaines après les coups volontaires, pourrait tomber sous le coup de
ce texte.

L'existence de circonstances aggravantes définies par les textes et dont le domaine s’élargit
notamment avec la loi du 4 avril 2006 sur les violences au sein du couple ou commises contre les
mineurs et la loi du 5 mars 2007 sur la prévention de la délinquance, va augmenter les pénalités.
Les articles 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13 C.pén. énumèrent une série de circonstances. Il
ressort de toutes ces dispositions que l'aggravation tient soit à la qualité de la victime, soit à
l'auteur, soit enfin aux circonstances de l'infraction.

• La victime prise en considération est notamment le mineur de 15 ans, une personne d'une
particulière vulnérabilité ou un ascendant, enfin une personne dépositaire de l'autorité
publique. Dernièrement, le législateur a entendu protéger aussi par exemple, les victimes
choisies à raison de leur appartenance vraie ou supposée à " une ethnie, une nation, une
race ou une religion déterminée " ou encore " à raison de leur orientation sexuelle ".
• L'auteur doit être dans certains cas, un conjoint ou un concubin ou le partenaire lié à la
victime par un pacte civil de solidarité, ou par ailleurs une personne chargée d'une mission de
service public notamment.
• Les circonstances tiennent en particulier à la pluralité d'auteurs ou de complices, à la
préméditation , au guet-apens ou encore à l'usage d'une arme.

Si l'une des conditions prévues est réalisée, la pénalité est plus élevée. Ainsi, les violences
contraventionnelles n'ayant entraîné aucune incapacité de travail sont en principe punies de
peines correctionnelles : trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros, article 222-13 C.pén. . Il faut
noter toutefois que lorsque les violences sont commises sur un mineur de 15 ans par un
ascendant ou toute autre personne ayant une autorité sur lui, les peines sont de cinq ans
d'emprisonnement et de 75 000 euros. L'emprisonnement peut même aller jusqu'à sept ans dans
des cas précis visés par le dernier alinéa de l'article. Si les violences étaient normalement
qualifiées de délit et punies de trois ans d'emprisonnement, ce dernier passe à cinq ans en
principe, article 222-12 C.pén. , sauf aggravation majorée prévue dans la même hypothèse que
précédemment. Quand les violences ont entraîné une mutilation ou une infirmité permanente,
l'aggravation provoque un changement de qualification. C'est alors la réclusion de quinze ans qui
est encourue en principe ou de vingt ans dans les cas les plus graves, article 222-10 C.pén. .
Enfin, les violences ayant entraîné la mort sans l'intention de la donner passent aux cas
d'aggravation de quinze à vingt ans de réclusion criminelle ou trente dans les hypothèses les plus
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graves, article 222-8 C.pén. .

En savoir plus : Violences entre ex-concubins

V° Cass.crim.1er février 2006, Dr.pén.2006, n°70 obs. Véron. Il est ici question de violences entre
ex-concubins, lesquelles ne pouvaient être réprimées au regard du droit antérieur. Dans un tel
contexte, les dispositions du Code pénal, singulièrement celles de l’article 132-80, trouveraient
aujourd’hui à s’appliquer. Pourtant, en vertu du principe de non-rétroactivité des textes, la loi du 4
avril 2006 ne pouvait s’appliquer à des faits commis avant son entrée en vigueur.

Le caractère alambiqué de la répression rappelle simplement que les violences constituent par
principe des infractions de résultat, mais aussi selon certains auteurs que ce système " s'efforce
de tenir compte de la réalité criminologique (Cf. Pradel et Danti-Juan, Manuel de Droit pénal
spécial, Cujas n°51) ".

Section 2. Les agressions sexuelles

Elles constituent une forme spécifique d'atteinte à l'intégrité physique de la personne. La


présentation de la question par les deux codes (l'ancien et le nouveau) n'est pas anodine. Les
incriminations en matière sexuelle ne sont plus aujourd'hui dirigées contre les mœurs mais ont
pour but de protéger la liberté du comportement dans le domaine sexuel. Ce n'est plus la pudeur
de la victime qui est prise en considération mais le fait qu'elle n'a pas consenti à la situation
imposée par l'agresseur) et leur étude, plutôt que celle de la torture ou des actes de barbarie,
s'explique pour des raisons pratiques et théoriques. Ces infractions sont quantitativement très
nombreuses et se définissent en principe comme des violences.

La présentation utilisée aujourd'hui par le code est assez maladroite ; en effet, après avoir posé
une définition générique des agressions sexuelles, le législateur traite du viol et des agressions
sexuelles autres que le viol.

L'article 222-22 C.pén. dispose dans son premier alinéa " constitue une agression sexuelle toute
atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise ".

Cette définition, issue des lois de 1992, est cependant loin d'être aussi claire qu'elle le devrait.

Définir l'agression comme une atteinte peut être assimilé à une tautologie, indépendamment du fait
que le Code pénal distingue par ailleurs l'agression de l'atteinte sexuelle, qui n'est pas elle-même
définie, mais qui serait une atteinte sans violence. Le travail jurisprudentiel est donc primordial qui
consiste à cerner les notions de " violence ", de " contrainte " à laquelle la " menace " semble se
rapporter, enfin de " surprise ", introduite dans les textes en 1980.

En savoir plus : Jeune âge des enfants

V° Cass.crim.7 décembre 2005, Dr.pén.2006, n°31, obs.Véron. L’arrêt précise que « l’état de
contrainte ou de surprise résulte du très jeune âge des enfants qui les rendaient incapables de
réaliser la nature et la gravité des actes qui leur étaient imposés ». La Cour de cassation « éclaire
donc le sens » d’un élément constitutif de l’infraction grâce à une circonstance aggravante. Ce
raisonnement tranche avec la jurisprudence selon laquelle il ne faut pas confondre éléments
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constitutifs et circonstances aggravantes

Parmi les agressions sexuelles, celle qui a toujours attirée les foudres du législateur est le viol,
longtemps confondue avec le rapt (J.M.Carbasse, Histoire du droit pénal et de la justice criminelle,
PUF 2ème éd, n°181 ; E.Garçon, Code pénal annoté, tome1, p.843, n°1s). Il faut le distinguer
cependant de ce que la loi appelle les agressions sexuelles autres que le viol.

§ 1. Le viol

Il s'agit sans conteste de l'agression sexuelle la plus grave.

Autrefois puni à l'article 332 C.pén. (Initialement, le code de 1810 incriminait " quiconque aura
commis le crime de viol, ou sera coupable de tout autre attentat à la pudeur, consommé ou tenté
avec violence contre les individus de l'un ou de l'autre sexe sera puni de réclusion ". A la veille de
la codification de 1992, l'art.332 C.pén. était ainsi rédigé :

L. n° 80-1041 du 23 déc. 1980 : " Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit,
commis sur la personne d'autrui, par violence, contrainte ou surprise, constitue un viol. Le viol
sera puni de la réclusion criminelle à temps de cinq à dix ans. Toutefois, le viol sera puni de la
réclusion criminelle à temps de dix à vingt ans lorsqu'il aura été commis soit sur une personne
particulièrement vulnérable en raison d'un état de grossesse, d'une maladie, d'une infirmité ou
d'une déficience physique ou mentale, soit sur un mineur de quinze ans, soit sous la menace
d'une arme, soit par deux ou plusieurs auteurs ou complices, soit par un ascendant légitime,
naturel ou adoptif de la victime ou par une personne ayant autorité sur elle ou encore par une
personne qui a abusé de l'autorité que lui confèrent ses fonctions "), le viol fait désormais l'objet
des dispositions de l'article 222-23 C.pén. .
La rédaction actuelle est pratiquement celle de la loi de 1980 ; elle est importante car c'est par ce
texte que le législateur a défini le viol dans ses éléments matériel et moral ainsi que sa répression.

A. L'élément matériel du viol

Il faut prendre en considération l'absence de consentement de la victime et l'acte de pénétration


sexuelle, déterminant de la qualification.

Au fond, cette façon de voir les choses n'est guère nouvelle. Jousse écrivait déjà qu'il s'agissait
de "toute conjonction illicite commise par force et contre la volonté des filles, femmes et veuves".
Garraud définissait le viol comme "le fait de connaître charnellement une femme sans la
participation de sa volonté". Ex. cités dans le Code pénal annoté, p.844, n°13) .

• L'absence de consentement de la victime est marquée par la référence à la " violence,

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contrainte, menace ou surprise ". La contrainte et la surprise ont été ajoutées en 1980, la
menace avec le code de 1992, dans le seul but d'élargir le champ d'application du texte (Cf.
E.Garçon, Code pénal annoté, "c'est un principe aujourd'hui constant que le crime existe par
cela seul que la femme n'a pas consenti à l'union sexuelle : ce défaut de consentement peut
résulter de la violence physique, de la violence morale ou contrainte, et même de la surprise
ou de la supercherie", p.845, n°24) . Bien évidemment une seule des conditions est requise,
mais il est impératif de relever quel procédé a été utilisé ; il est primordial en outre de préciser
à cette occasion que la victime doit donc être vivante (Cf. E.Garçon, op.cit.p.845 n°19 et
Cass.crim.13 juillet 1965, Bull.crim.n°175) et que ces éléments doivent être objectivement
constatables et précisés par les juridictions du fond.

La violence peut être physique, mais aussi morale au cas de contrainte ou de menace. Elle
doit s'exercer sur la victime de l'infraction et non sur un tiers. Enfin, la notion de surprise doit être
bien comprise dans la mesure où elle correspond à surprendre le consentement de la victime - et
non à prendre en considération la surprise de la victime " tombée des nues (Cass.crim.25 avril
2001, Bull.crim.n°99 ; Le défaut de consentement en matière d'agressions sexuelles : précisions et
rappels sur les notions de contrainte et de surprise, Rev.sc.crim.2001. 808, note Yves Mayaud) "- .

Jurisprudence :
Ainsi y a-t-il surprise lorsque le violeur s'introduit dans le lit d'une femme encore endormie et se fait
passer pour son mari (Cass.crim.25 juin 1857, S.1857, 1, 11) . Il en va de même pour celui qui
abuse de la faiblesse d'esprit d'une personne (Cass.crim.4 janvier 1990, Bull.crim.n°1) ou de son
état de choc (Cass.crim.13 mars 1984, JCP.éd.G.1984, IV, 164) .

La preuve du consentement ou de l'absence de consentement de la victime est difficile à


rapporter, spécialement lorsque cette dernière a consenti à certains attouchements, sans pour
autant consentir à l'acte sexuel.

Jurisprudence :
Des problèmes similaires se posent pour le viol entre époux reconnu par la chambre criminelle
(Cass.crim.17 juillet 1984, RSC.1985, 82, obs.Levasseur ; Cass.crim.11 juin 1992, JCP.éd.G.1992,
II, 22043 note Garé. Ainsi le mariage ne crée pas de présomption irréfragable de consentement
des époux aux actes sexuels. Le mariage ne vaut donc pas renonciation de la liberté sexuelle) .

Des précisions en ce sens sont aujourd’hui apportées par la loi qui dispose « le viol et les autres
agressions sexuelles sont constitués lorsqu'ils ont été imposés à la victime dans les circonstances
prévues par la présente section, quelle que soit la nature des relations existant entre l'agresseur et
sa victime, y compris s'ils sont unis par les liens du mariage. Dans ce cas, la présomption de
consentement des époux à l'acte sexuel ne vaut que jusqu'à preuve du contraire » (Art.222-22 al.2
tel qu’il est issu de la loi du 4 avril 2006).

• Ce qui caractérise le viol, c'est précisément " tout acte de pénétration sexuelle, de
quelque nature que ce soit ". Le texte vise bien sûr ce que Jousse appelait la conjonction
illicite mais pas uniquement. En effet, la jurisprudence a retenu la fellation (Exemple,
Cass.crim.22 février 1984, Rev.sc.crim.1984, 743, obs.Levasseur) , la sodomie (Exemple,
Cass.crim.24 juin 1987, Rev.sc.crim.1988, 302, obs.Levasseur) au titre de viol. Le texte
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permet aussi aujourd'hui de condamner sous cette qualification, l'introduction de corps
étrangers dans le sexe ou l'anus de la victime (Exemple, Cass.crim.5 septembre 1990,
D.1991, 13 note Angevin) . Les tribunaux tiennent compte de la connotation sexuelle de l'acte
(Exemple, Comme le fait d'introduire un objet recouvert d'un préservatif. Cf. Cass.crim.6
décembre 1995, Bull.crim.n°372) . Enfin, l'infraction disparaît si l'acte est justifié par une
expertise judiciaire par exemple (Exemple, Cass.crim.29 janvier 1997, Bull.crim.n°39) . Cette
définition, large, du viol permet de retenir la qualification quel que soit le sexe de l'auteur et de
la victime, alors que classiquement le viol ne pouvait être commis que par un homme sur une
femme. Ont ainsi été retenus les agissements d'une mère sur sa fille, ou le viol commis par
une personne sur une victime du même sexe.

B. L'élément moral du viol

Le viol est une infraction intentionnelle et suppose la volonté d'accomplir l'élément matériel
prévu par le texte. Il faut aussi établir que l'auteur a eu conscience d'agir contre la volonté
de la victime et qu'il a eu conscience de réaliser un acte de nature sexuelle. C'est, là encore,
par le jeu des présomptions que cette intention sera prouvée. La matérialité des faits peut servir à
prouver les éléments constitutifs de l'infraction, comme le fait de recouvrir un objet d'un préservatif.

Ici, comme ailleurs le mobile est indifférent.

Jurisprudence :
Le défendeur ne peut prétendre se justifier en mettant en avant par exemple le fait de parfaire
l'éducation sexuelle de la victime (Cass.crim.27 avril 1994, Bull.crim.n°157) .

C. La répression du viol

En principe, le viol est passible de quinze ans de réclusion criminelle, c'est donc un crime. Mais le
Code pénal prévoit une série d'aggravations qui font encourir à l'auteur des peines plus sévères.
Comme précédemment l'aggravation peut provenir de la qualité de la victime, de l'auteur lui-même
ou des circonstances du viol. L'article 222-24 C.pén. prévoit vingt ans de réclusion criminelle
notamment au cas de mutilation ou d'infirmité permanente, si la victime est un mineur de quinze
ans ou une personne d'une particulière vulnérabilité, ou encore si le viol est commis à raison de
l'orientation sexuelle de la victime . (La vulnérabilité doit être préexistante aux éléments constitutifs
du viol, V° Cass.crim.9 août 2006, Dr.pén.2006, n°137, obs.Véron) Le viol est puni de trente ans
par l'article 222-25 C.pén. lorsqu'il a entraîné la mort de la victime. La perpétuité est enfin
encourue lorsque le viol est précédé, accompagné ou suivi de tortures ou d'actes de barbarie.

En savoir plus : Eléments constitutifs et circonstances aggravantes

Il est de jurisprudence constante qu’il ne faut pas confondre éléments constitutifs du viol et
circonstances aggravantes de cette même infraction. Le viol suppose pour être caractérisé la
contrainte, la violence ou la surprise, circonstances qui ne peuvent se déduire ou se présumer de
l’autorité de l’auteur des faits sur la victime. V° Cass.crim.21 février 2007, Dr.pén.2007, n°68
(4ème espèce), obs.Véron. Prouver la violence ou la contrainte par exemple est nécessaire pour
prouver le viol ; établir en outre que l’auteur a autorité sur la victime permet de retenir l’existence
d’une circonstance aggravante.

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Dans l’arrêt précité, la Cour de cassation fait valoir enfin que « la qualité de personne ayant
autorité sur la victime ne saurait résulter des seuls sentiments de soumission éprouvés par cette
dernière ».

A côté des peines principales, les violeurs encourent des peines complémentaires définies aux
articles 222-44, 222-45, 222-47 et 222-48 C.pén. . Parmi ces peines, notons par exemple,
l'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec
des mineurs ou plus classiquement l'interdiction de séjour. Plus intéressante encore est la
condamnation au suivi socio-judiciaire de l'article 222-48-1 C.pén. , selon les modalités des articles
131-36-1 et suivants du code pénal

Le suivi socio-judiciaire emporte obligation de se soumettre à des mesures d'assistance et de


surveillance, sous le contrôle d'un juge, dans le but d'éviter la récidive. La condamnation peut
comprendre une injonction de soins, articles 131-36-1 à 131-36-8 C.pén. Enfin, aussi curieux que
cela puisse paraître, la responsabilité d'une personne morale peut être recherchée pour viol.

§ 2. Les agressions sexuelles autres que le viol

Les agressions sexuelles autres que le viol, du code de 1992, remplacent " les attentats à la
pudeur " de l'ancien code, l'expression étant jugée archaïque et vague . Les incriminations ne sont
donc plus aujourd'hui dirigées contre les mœurs - les mauvaises bien évidemment-, mais ont pour
but de protéger la liberté du comportement dans le domaine sexuel. Ce n'est pas tant la pudeur de
la victime qui est prise en considération, que le fait qu'elle n'ait pas consenti à la situation imposée
par l'agresseur (voir C.Ginestet, « Les mœurs et le droit pénal », in « La dissertation de droit pénal,
droit civil et droit public » Ellipses 2005, p.77).

L'alinéa 1er de l'article 222-22 C.pén. dispose ainsi, " constitue une agression sexuelle toute
atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise ".

Pourtant, la Cour de cassation a eu l'occasion d'affirmer que la nouvelle formulation n'a pas étendu
le champ d'application du texte par rapport aux anciens articles 330 à 333-1.

En savoir plus : Les anciens textes

Art. 330 (L. 13 mai 1863) " Toute personne qui aura commis un outrage public à la pudeur sera
punie d'un emprisonnement de trois mois à deux ans, et d'une amende ", L. n° 56-1327 du 29 déc.
1956, art. 7 ; L. n° 85-835 du 7 août 1985 " de 500 F à 15 000 F ". Art. 333 (L. no 80-1041 du 23
déc. 1980) " Tout autre attentat à la pudeur commis ou tenté avec violence, contrainte ou surprise
sur une personne autre qu'un mineur de quinze ans sera puni d'un emprisonnement de trois ans à
cinq ans et d'une amende de 6 000 F à 60 000 F ou de l'une de ces deux peines seulement.
Toutefois, l'attentat à la pudeur défini à l'alinéa premier sera puni d'un emprisonnement de cinq
ans à dix ans et d'une amende de 12 000 F à 120 000 F ou de l'une de ces deux peines seulement
lorsqu'il aura été commis ou tenté soit sur une personne particulièrement vulnérable en raison
d'une maladie, d'une infirmité ou d'une déficience physique ou mentale ou d'un état de grossesse,
soit sous la menace d'une arme, soit par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de la victime ou
par une personne ayant autorité sur elle, soit par deux ou plusieurs auteurs ou complices, soit
encore par une personne qui a abusé de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ".
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Il ne s'agit donc que d'une modernisation du vocabulaire. Il demeure en effet, comme sous l'empire
de l'ancien Code, que ce comportement se distingue des autres agressions à la personne, à raison
de leur nature sexuelle qu'il faut prouver, ce qui sera a priori moins difficile pour un viol que pour
des agressions sans contact physique avec la victime ou des atteintes sexuelles.

En savoir plus : Distinction entre agressions sexuelles et atteintes sexuelles

Les agressions sexuelles supposent la violence alors que les atteintes sexuelles visées aux
articles 227-25s C.pén. sont réalisées en dehors de toute violence sur une victime nécessairement
mineure.

A. Les éléments constitutifs des agressions sexuelles

Tout ce qui a été dit au sujet de l'absence de consentement de la victime est applicable aux
agressions sexuelles, c'est le point commun avec le viol. Pourtant, devant " l'incroyable confusion
dans la présentation " du législateur, certains auteurs distinguent par exemple les agressions avec
et sans contact physique. Pour ce qui est des agressions avec contact physique, c'est le résultat
qui fait la différence avec le viol. Il est certain qu'il ne doit pas y avoir de pénétration sexuelle, mais
au-delà quel est exactement l'élément matériel ? L'agression suppose un acte positif, à caractère
sexuel, réalisé sur autrui.

Jurisprudence :
A titre d'exemple, l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt d'assemblée plénière du 14 février 2003 donne
une bonne illustration des actes poursuivis. La personne condamnée pour agression sexuelle
aggravée est un médecin ayant agi par surprise " sous le fallacieux prétexte de réaliser des
examens cliniques (Cass.ass.plén.14 février 2003, D.P.2003, n°55 obs.Véron ; il est souligné que
les touchers génital et rectal auxquels il a été procédé, ne pouvaient être médicalement justifiés
dans le cadre de la consultation que ces actes que M.K. n'a pas inscrit sur la fiche d'examens
avaient été effectués hâtivement, sans qu'il ait recueilli le consentement de la patiente ni respecté
les précautions exigées par la pratique médicale) ".

L'agent doit avoir eu la volonté de porter atteinte à la liberté sexuelle d'autrui, ce qui ressort du
procédé utilisé. La preuve de l'intention n'est donc pas difficile à rapporter en règle générale.

Dans la catégorie des agressions sexuelles sans contact physique, il faut mentionner l'exhibition
sexuelle et le harcèlement sexuel protégeant l'intégrité psychique et non plus physique de la
personne.

L'exhibition sexuelle correspond à l'ancien " outrage public à la pudeur " et consiste à incriminer
un spectacle impudique dans le but de protéger la moralité publique, la décence (Comparer
l'article 222-32 C.pén. et l'ancien article 330, cité plus haut). L'exhibition sexuelle imposée à autrui
est un délit, lequel ne peut être réalisé que si « le corps ou la partie du corps volontairement
exposé à la vue d’autrui est ou paraît dénudé » (Cass.crim.4 janvier 2006, Dr.pén.2006, n°33,
obs.Véron)

Le harcèlement sexuel est quant à lui une nouveauté du Code de 1992, ayant déjà été reformée,
en particulier par une loi de janvier 2002, article 222-33 C.pén. . Cette infraction dont l'élément
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matériel n'est toujours pas défini le harcèlement consistant à harceler autrui !- est plus large qu'à
l'origine.

Le délit peut émaner de n'importe qui et plus nécessairement d'un supérieur, le but étant d'obtenir
des faveurs de nature sexuelle, ce qui n'implique pas une relation

Il s'agit donc d'une infraction formelle pour laquelle les juges doivent veiller à ne point étendre
l'application à toute tentative de séduction. Par ailleurs, il est difficile en pratique de distinguer le
harcèlement sexuel et la tentative d'agression sexuelle, prévue par l'article 222-31 C.pén. .

Jurisprudence :
La question de la qualification des faits est souvent délicate comme dans l'affaire concernant un
enseignant initialement poursuivi pour harcèlement sexuel. Sur son pourvoi, la chambre criminelle
rejette cette qualification mais reproche à la juridiction du fond de ne pas avoir recherché s'il n'y
avait pas atteinte sexuelle. V° Cass.crim.10 novembre 2004, Dr.pén.2005, n°53 obs.Véron.

B. La répression

En principe, les agressions sexuelles autres que le viol sont qualifiées de délit et punies de cinq
ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. Mais, là encore, des causes d'aggravation
sont prévues aux articles 222-28, 222-29, 222-30 C.pén. .

Jurisprudence :
La Cour de cassation contrôle en particulier que les juridictions du fond ne confondent pas les
éléments constitutifs de l'infraction avec les éventuelles circonstances aggravantes (Cass.crim.18
juin 2003, Dr.pén.2003, n°141, obs. Véron) .

La peine d'emprisonnement est de sept ans au cas de blessure ou lésion, ou encore lorsque
l'infraction est commise à plusieurs. Il en va de même quand l'infraction est commise sur un
mineur, ou une personne d'une particulière vulnérabilité. Il est remarquable de noter cependant
que l'agression sexuelle contre ces personnes subit une aggravation supplémentaire lorsqu'elle est
commise par un ascendant ou toute personne ayant autorité sur la victime par exemple.
L'emprisonnement est alors de dix ans.

Il existe cependant une hypothèse dans laquelle, l'agression sexuelle autre que le viol va
recevoir une qualification criminelle. Lorsque cette agression accompagne des actes de
torture ou de barbarie, la peine encourue est de vingt ans de réclusion criminelle. Outre les
peines complémentaires pouvant être prononcées, le suivi socio-judiciaire peut être décidé comme
en matière de viol. Enfin, la loi prévoit la responsabilité des personnes morales pour agressions
sexuelles.

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