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Prolapsus uro-génital

Prise en charge non chirurgicale


DIPLOME INTER-UNIVERSITAIRE DE CHIRURGIE VAGINALE

Pr Erdogan NOHUZ
Professeur Associé des Universités
Service de Gynécologie-Obstétrique
HFME, Hôpital Femme Mère Enfant
CHU de Lyon
Jeudi 16/06/22
Le Prolapsus uro-génital

• Traduction d’une anomalie de l’anatomie pelvi-périnéale

• Facteurs prédisposant: âge avancé, parité, déchirures obstétricales, constituants du


tissu conjonctif
• Physiopathologie encore obscure (dénervation et traumatismes de la musculature du
plancher pelvien, défects du fascia endopelvien, anomalies du turnover du
collagène)

• Altération de la qualité de vie


• Altérations physiques
• Altérations psychologiques (détérioration de l’image et de l’estime de soi)

• Pathologie fréquente
•. 2020

Evolution démographique dans les 20 ans à venir


This number is expected to increase by 46% by the year 2050 because of the aging of the population

-Allongement de l’espérance de vie


(progrès médicaux, sanitaires et sociaux) Une femme sur trois
-Amélioration des moyens d’information Prolapsus
Une sur deux après 60 ans++

-Amélioration des moyens de prise en charge

Les + de 65 ans: 25 %
(dont 65% de femmes)
« Epidémie »
de Prolapsus
attendue à l’horizon 2030-2050

Mbaye et alInt Urogynecol J. 2020 / Sung et al. Obstet Gynecol Clin N Am. 2009.
Principaux facteurs de risque des troubles de la
statique pelvienne

• Grossesse
• Accouchement (surtout si dystocique)
• Vieillissement, œstropénie
• Toux chronique
• Constipation chronique
• Sportives avec hyper-sollicitation pelvi-périnéale
• Facteurs génétiques: résorption exagérée du collagène et de l ’élastine
• Facteurs ethniques
Objectifs de la prise en charge ?
Correction anatomique
mais surtout …

Correction fonctionnelle +++

« Primum non nocere »


Traitement
• Un principe à retenir et à appliquer

Pas de gêne = pas d’indication à traiter!


Prise en charge non chirurgicale
• Principes de base:
• Ne traiter que les patientes symptomatiques, qu’il s’agisse d’une prise en charge
chirurgicale ou pas
• Rassurer
• Si découverte en cs de routine: informer, appréhender l’éventuelle répercussion
sur l’image corporelle, la sexualité
• En absence de traitement: surveillance dans le cadre du suivi habituel
• Indications chirurgicales « urgentes » rares mais possibles
• Rétention d’urine
• Hydronéphrose +/- insuffisance rénale
• Erosions vaginales
• Infections récidivantes (urinaires, vaginales)
• Prolapsus devenu irréductible
Prise en charge non chirurgicale

• Mesures adjuvantes : elles sont essentielles


• Lutter contre la surcharge pondérale
• Protéger le périnée contre les traumatismes chroniques
• Préférer la natation au jogging (éviter la glotte fermée)
• Prendre en charge une constipation, une toux chroniques
Prise en charge non chirurgicale
• Toutefois, l’association entre mode de vie, obésité, toux chronique et
risque de survenue d’un POP n’est pas prouvée solidement par
l’Evidence Based Medicine.
• La perte de poids et la diminution des contraintes hyperpressives
périnéales (limitation des efforts d’exonération des selles, du port de
charges lourdes, de la toux ou des exercices physiques intenses)
doivent tout de même être encouragés.
Lutter contre la surcharge pondérale

• Obésité Augmentation significative de la prévalence du POP


• Surtout si IMC > 30 Kg/m2
• Prévalence du POP chez 1155 femmes obèses (IMC moyen = 35.4±5.3 kg/m2)
• 7 % si IMC entre 30 - 34,9 kg/m2
• 9,9 % entre 35 - 39,9 kg/m2
• 12,7 % si > 40 kg/m2 (p = 0,040) (Whitcomb et al., 2009).
Constipation
• La constipation
• Prévalence globale entre 20 et 53%.
• Peu de données permettant de mettre en évidence une relation de cause à
effet entre constipation et POP.
Exercice physique
• L’activité physique intensive
• Source d’hyperpression intra-abdominale
• Facteur probablement favorisant des POP
• NB: études le + souvent de faible niveau de preuve.
• Etude cas-témoin
• 191 femmes ayant un POP et 191 contrôles appariées selon
• L'activité physique de la vie quotidienne (activités de loisirs, domestique et
professionnelle), n'augmentait pas la prévalence du POP anatomique chez les femmes
d'âge moyen.
• Seule une activité intense pendant l'adolescence était associée significativement au
risque de POP (Nygaard et al. Am J Obstet Gynecol. 2014) .
Exercice physique
• Etude originale de Forner et al.
• 3774 femmes pratiquant l'haltérophilie versus un groupe contrôle ne portant
pas de charge.
• Prévalence totale des symptômes de POP était de 14,4% (n = 566).
(Forner et al. Int Urogynecol J).
Exercice physique
• Prévalence du POP plus importante en cas de port de charge dans le
cadre professionnel.
• Etude auprès de 20.000 femmes norvégiennes
• Profession impliquant le port de charge augmentait les risques de subir une
intervention chirurgicale pour POP de 1,40 fois (IC95% : 0,98-2,01) par
rapport aux professions assises (Lonnée-Hoffmann et al. Int Urogynecol J.
2015).
• Travail avec port de charge est associé au risque de POP (Braeken et
al. BJOG. 2009)
Tabac, BPCO, Diabète
• Tabac n’est pas associé significativement au risque de survenue d’un POP
(Vergeldt, 2005)
• Mais constitue un FDR de complications post-opératoires
• Conseiller sevrage tabagique en cas de prise en charge, notamment chirurgicale (Le
Normand 2016).
• Bronchopneumopathie chronique obstructive et le diabète sucré ont été
évoqués comme facteurs de risque de POP
• Lien non clairement démontré [Akter,2016 ; Swift,2000 ; Forsman,2008]
Rééducation pelvi-périnéale
• Encadrée par un professionnel (Kiné ou SF)
• Multimodale
• Volet éducation (prise de conscience, modification des habitudes mictionnelles)
• Volet renforcement musculaire (contraction contre résistance, co-activation des
muscles transverses abdominaux, biofeedback, électrostimulation)
• Travail sur la posture

• Ne corrige pas seule le prolapsus


• Participe à sa prise en charge
• Améliore sa symptomatologie fonctionnelle sans réellement
restaurer la correction anatomique
Rééducation pelvi-périnéale
• Méta-analyse récente a inclus 13 essais randomisés avec 2340
patientes.
• Objectif: évaluer l'efficacité de la rééducation périnéale chez les
femmes présentant un POP ou en complément d'une chirurgie du
prolapsus.
• Amélioration significative des symptômes et du stade du POP avec la
rééducation périnéale.
• Le nombre de femmes ayant déclaré que leur prolapsus était en amélioration
était significativement supérieur dans le groupe rééducation (RR 5,48, IC 95%,
2,19–13,72).
Rééducation pelvi-périnéale
• Au total, la RPP

• Améliore les symptômes associés au POP non extériorisés (stades 1 à 3).

• Ne semble pas apporter un bénéfice certain en cas de prise en charge


chirurgicale
Le pessaire gynécologique
• Traitement « palliatif », en pré-opératoire voire test thérapeutique
• Rend de grands services
• Correction anatomique
• Utilisé depuis l’Antiquité: l’emploi du premier pessaire est évoqué par
Polybus, un médecin grec, qui utilise une demi-grenade placée dans le
vagin
• Constitués de latex ou de silicone
• Silicone à privilégier+++ :
• Longue durée de vie
• Résistance importante
• Propriétés hypoallergéniques
Le pessaire gynécologique

Le pessaire gynécologique est un dispositif placé dans la cavité


vaginale dans le but de réduire le prolapsus.

Il peut être utilisé de manière


- provisoire
- dans l’attente d’une solution chirurgicale
- à titre de test thérapeutique
- définitive, lorsque la patiente ou le contexte clinique
récusent une intervention.
D’après Nohuz et al.
Le pessaire gynécologique

Enclin à très peu de contre-indications, réversible, il peut


(devrait…c’était avant 2021; désormais doit ) même être
proposé en première ligne de traitement puisqu’il est aussi
efficace que la prise en charge chirurgicale.

Un traitement adjuvant par œstrogénotherapie locale (ovules


ou anneau) est préconisé (deux à trois prises hebdomadaires
vespérales sont conseillées), chez la femme ménopausée.
PESSAIRES de soutien ou de comblement
Silicone+++
Le pessaire gynécologique
• Peu de contre indications!
• Infection uro-génitale en cours
• Ulcérations importantes
• Allergie au latex et au silicone
• patientes dont le suivi est difficile

• Penser à l’association oestrogénique locale +++

• En cas d’antécédent de cancer oestrogéno-dépendant (sein)


• Concertation onco-gynécologique préalable préférable
Le pessaire gynécologique
• Comparaison chirurgie vs pessaire
• Etude de Sung * et al., American Journal (2016)
• Patient-reported goal attainment and comprehensive functioning outcomes after
surgery compared with pessary for pelvic organ prolapse
• Prolapsus symptomatique de grade 2 ou plus
• Etude prospective: 160 patientes (72 chir et 64 pessaire avec un follow up moyen de
un an)
• Conclusion: Women undergoing either surgery or pessary for symptomatic prolapse
experience goal attainment and improvements in physical, social, and emotional
functioning, although surgery is associated with greater improvements.

* Sung et al. J Obstet Gynecol. 2016


•. 2018

Le pessaire gynécologique
• Comparaison chirurgie vs pessaire
• Etude nééerlandaise de Coolen et al *
• 113 femmes (74 dans le groupe pessaire, 39 dans le groupe chirurgie)
• POP > ou = stade 2
• Suivi de 12 mois
• Patientes opérées rapportaient des symptomes en relation avec le POP moins
sévères que chez celles traitées par pessaire
• Mais 72% des femmes traitées par pessaire n’ont pas opté pour la chirurgie.
• *Cooeln et al. Primary treatment of pelvic organ prolapse: pessary use
versus prolapse surgery. Int Urogynecol J. 2018.
Le pessaire gynécologique
• Etude rétrospective de cohorte canadienne
• Enrolant 304 femmes avec POP, âgées de 65 ans au moins.
• 25% avaient + de 75 ans
• 63% de résultats satisfaisants
• Facteurs prédictifs d’échec:
• Atcd d’hystérectomie
• Atcd de chirurgie du POP
• Prolapsus postérieur
• Taux de continuation selon les sous-groups à 1-2 et 5 ans:
• 65-74 ans: 87.5%; 81%; 62%
• +de 75 ans: 81%; 71%; 38%
• Taux d’erosion vaginale rapporté: 19%, essentiellement si + de 75 ans
* Ramsay et al. Int Urogynecol J. 2016
Le pessaire gynécologique anneau
• Plier l’anneau en deux
• Insérer dans le vagin en direction du sacrum
• Le laisser se déployer au dessus de la symphyse pubienne
• Disposer de plusieurs pessaires d’essai afin de choisir la taille
adéquate
• Vidange vésicale préalable préférable
• Une fois posé, demander à la patiente de se lever, déambuler,
s’accroupir, marcher: gène? expulsion? intolérance?
D’après Nohuz et al.
D’après Nohuz et al.
D’après Nohuz et al.
Le pessaire gynécologique
• Absence de recommandation et de consensus clair vis-à-vis du suivi
et de l’entretien du pessaire jusqu’en 2021.
• CNGOF (2007*): 1° cs à M3 puis tous les 3 mois (sauf si pessaire retiré
régulièrement (1/sem) par la patiente: cs annuelle)
• Société canadienne des G/O (**): 1° cs dans les 2 à 4 semaines
suivant la pose

• * Courtieu C. Existe t-il encore des indications du pessaire ? Extrait des mises à jour en gynécologie - Collège national des gynécologues et
obstétriciens français. Tome XXXI - pp 259-71
• ** Robert M, Schulz JA, Harvey M-A. Mise à jour technique sur l’utilisation des pessaires. J Obstet Gynaecol Can. juill 2013;35(7):675-9
Que dit la HAS?
Que dit la HAS?
• Les pessaires sont des traitements efficaces sur les symptômes
associés au POP et améliorent la qualité de vie. Leur efficacité (à court
terme) sur les symptômes semble équivalente au traitement
chirurgical.
• Les données concernant la sexualité chez les patientes porteuses d’un
pessaire sont peu nombreuses; il semble que l’utilisation de pessaire
améliore la sexualité des patientes au même titre que la chirurgie.
• La pose d’un pessaire peut être proposée en première intention à
toutes les patientes présentant un POP symptomatique, quel que
soit leur âge ou le stade du prolapsus.
Que dit la HAS?
• La première consultation de suivi après la pose du pessaire pourra
être programmée 2 à 6 semaines après la pose ; le suivi sera
secondairement adapté en fonction du type de pessaire, des pertes
vaginales, et de la capacité de la patiente à le retirer pour le nettoyer.
Quels facteurs d’échec?
• Prolapsus avancé
• Antécédent de chirurgie du prolapsus
• Antécédent d’hystérectomie
• Prolapsus de l’étage postérieur
• Women (N = 93) with advanced POP who chose conservative treatment with ring
pessary; 78 successfully continued to use the pessary at 6 months, and 15 had
pessary dislodgment (16.1%).
The presence of advanced apical POP and previous POP surgery are risk factors for
ring pessary dislodgment. This information should guide physicians for counseling
patients before pessary insertion.

Coelho et al. Female Pelvic Med Reconstr Surg 2020.


Le pessaire gynécologique
• Complications
• Rares: infections locales, érosions, incrustations (« pessaire
cimenté »)
En guise de conclusion…

Pensez PESSAIRE!
• Merci pour votre attention

• Des questions???

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