Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Méthodologie du Droit
Dans un travail de recherche en droit, la méthodologie ne peut être séparée de visées pratiques. La
réalisation d’un travail de qualité commence par l’acquisition de méthodes et l’apprentissage de la
recherche, pour s’acheminer vers la formation de la démarche intellectuelle qui doit caractériser le
juriste.
L’objectif de ce fascicule est relativement modeste, mais avec le souci d’être efficace. Il s’agit de donner
à l’étudiant les moyens de réaliser un bon travail de recherche. L’expérience pédagogique révèle que
souvent les étudiants de Master n’ont pas acquis ces bases et hésitent encore, au-delà des années de
licence, sur la méthode de la dissertation juridique ou du commentaire d’arrêt.
Le droit comparé a vocation à perfectionner la science juridique. Il est utilisé par les juristes de droit
positif, les historiens, les sociologues et les philosophes du droit. Leurs travaux montrent la relativité du
droit et ses déterminismes sociaux, historiques ou culturels. Le comparatiste doit prendre en
considération la société et l'histoire des pays concernés, afin de comprendre les différences des
solutions juridiques adoptées. L'étude des différentes législations permet également de faciliter la
recherche de la meilleure solution pour un problème donné, en offrant une variété de solutions que ne
peut offrir l'étude d'un seul système.
L'analyse comparée des droits aboutit souvent, par contraste, à mieux comprendre un droit national. On
découvre ses originalités et ses lacunes. La comparaison est désormais massivement utilisée, partout
dans le monde, lors des réformes législatives ou des modifications jurisprudentielles. Pour adapter le
droit et organiser la mondialisation, le droit comparé est doublement primordial. Il est indispensable
pour l'uniformisation du droit, au niveau régional et international. En effet, les traités établissant des
règles communes matérielles se fondent sur l'étude comparée. Il est également important de savoir
comment chaque pays recevra le traité (valeur juridique dans l'ordre interne, procédure de ratification…)
L'étude juridique comparée permet également de dégager les principes généraux communs utilisés par
la Cour internationale de justice (C.I.J.) ou la Cour européenne des droits de l’homme (C.E.D.H.). La
comparaison est également effectuée dans le commerce international lors des arbitrages internationaux,
ou par les firmes transnationales afin d’élaborer leur stratégie et déterminer le droit propice à une activité
donnée.
Il est à noter que la démarche comparatiste est également pertinente à s’appliquer entre un droit positif
et un ordre juridique historique (droit romain, droit musulman classique, Ancien droit français). Il s’agira
de rechercher, par exemple, ce que tel domaine du droit marocain actuel doit au droit musulman, ou le
Code civil roumain aux compilations justiniennes….
2. L’introduction
L'introduction est une partie essentielle, l’ouverture de la thèse. Elle permet de déterminer la
signification d'un sujet, d'en préciser la substance, et de justifier l'axe de réflexion selon lequel il sera
traité. Elle est une progression, cohérente et homogène, tendant à justifier l'aboutissement que représente
la problématique. Sa longueur sera d’environ 10% du nombre total de pages. Du point de vue
méthodologique, l’introduction doit se composer des éléments suivants :
Il s’agit de définir les notions contenues dans l’intitulé du sujet ou celles nécessaires à sa compréhension,
en traitant certains aspects historiques, sociologiques, politiques, économiques, qui permettent de les
éclairer. La délimitation consiste en l’explication et la justification de l’élimination d’autres aspects du
sujet. Cette indication de la maîtrise de la globalité du sujet est importante, et les aspects secondaires
volontairement écartés justifieront d’autant mieux les choix qui sont faits. Les premières pages de
l’introduction doivent être agréables à lire, pour donner envie au lecteur de poursuivre, et contenir peu
de références.
L'intérêt du sujet représente la partie la plus importante de l'introduction sur un plan quantitatif. Il s'agit
d'aller du plus général au plus précis, en indiquant les raisons pour lesquelles le sujet devait être traité.
Cet exposé peut s’accompagner d’une analyse critique des travaux scientifiques antérieurs sur la
question (ou sur des thèmes connexes), en montrant en quoi l’approche proposée renouvelle la question,
ou en quoi elle est totalement inédite. C’est ce qu’on appelle l’apport scientifique d’une thèse.
Une thèse n’est pas un catalogue de connaissances, mais une démonstration. Il est donc nécessaire
d’identifier le problème juridique général posé par le sujet, celui que la recherche se propose de résoudre.
Elle a donc un but, une finalité, et l’indication de la méthode utilisée est primordiale (avec
éventuellement les difficultés rencontrées et les moyens de les surmonter) pour donner à comprendre
cette démarche intellectuelle personnelle. La formulation de la problématique exige sobriété et
rigueur pour être immédiatement perceptible. Elle justifie le choix du plan, qui est une réponse
progressive, par étapes, à la question initialement posée.
L'annonce de plan répond aux mêmes exigences de sobriété et de rigueur. Elle introduit les deux parties
que comptera le développement de la thèse. Cette étape vient en dernier lieu, après avoir donner forme
et substance à votre recherche.
3. Le développement du sujet
Le traitement du sujet repose sur le choix de la problématique, dont le plan élaboré constitue la solution
sous forme de démonstration logique.
3.1 – Le plan
Le plan est la structure de la recherche, une armature logique qui, en partant de la problématique, propose
un enchaînement d’idées aboutissant à la résolution de celle-ci. Le plan est hiérarchiquement
structuré (de façon pyramidale et symétrique) : une partie correspond à plusieurs idées qui sont
subdivisées en autant de sous-parties, elles-mêmes divisées en sous-ensembles (d’où la division partie
– chapitre- section – paragraphe – A – 1- a…etc)
Un plan est une construction personnelle, une façon originale d’aborder le sujet, qui reflète la
rationalité et aussi la créativité de son auteur. Mais il doit correspondre aux exigences méthodologiques
de la recherche juridique, et en particulier à celles du droit.
Plan synthétique : il permet de construire un raisonnement thématique, fondé sur des idées
de fond concernant le sujet. Ce type de plan permet l'analyse d'un problème en étudiant
successivement différentes strates du sujet. Ici, on défend une thèse à l'aide de deux idées, et
de sous-idées qui font l'objet des différentes sous-parties.
Il faut veiller à l’équilibre du plan en ce qui concerne le contenu quantitatif (en nombre de pages) des
grandes subdivisions (partie, chapitre). Une symétrie entre les deux parties doit être respectée, en
nombre de chapitres et de sections. Par exemple, si la première partie contient 3 chapitres, qui
contiennent eux-mêmes 3 sections, la seconde partie ne pourra être composée de 2 chapitres qui
contiendraient chacun 2 sections. De même, à l’intérieur d’une même partie, il doit exister une symétrie
du nombre de sections des différents chapitres.
Les intitulés des parties et sous-parties doivent être courts et explicites, afin d’exprimer clairement ce
que l'on veut démontrer. Ils correspondent à la formulation de l’idée centrale de la subdivision de niveau
hiérarchique concernée. A la seule lecture d’un titre, il doit être possible de comprendre de quoi il est
question dans la partie concernée.
NB : La méthodologie du droit comparé proscrit les titres descriptifs du type « en droit français », « en
droit marocain », « en droit tunisien »…etc
S’inspirer d'un auteur est parfaitement légitime, à condition de le citer. La thèse en sera d’autant plus
révélatrice de la maturité scientifique de son auteur, ainsi que de sa maîtrise de la bibliographie sur le
sujet. Mais il est contraire à la déontologie de la recherche scientifique et illicite (délit de plagiat et de
contrefaçon) de recopier des passages entiers du travail d’autrui, même en les transformant.
Les développements permettent la progression de la démonstration menée dans la thèse. Ils doivent être
clairs et précis et proposer une véritable analyse juridique à partir des ressources documentaires
directement exploitées : codes, lois, textes réglementaires, jurisprudence et doctrine. Il doit s’agir d’un
travail personnel de réflexion juridique, qui exclut l’appropriation des analyses d’autrui (sauf pour les
commenter, les compléter ou les infirmer).
NB : une thèse de droit comparé (droit marocain - droit étranger) doit obligatoirement contenir la
jurisprudence du pays étranger sur le sujet. Le doctorant est avant tout un juriste spécialiste
de son droit national, dont il propose une analyse au regard du droit étranger (et non l’inverse !)
Le droit comparé implique nécessairement une comparaison entre des systèmes juridiques différents
(au-delà de la question du mimétisme juridique). La comparaison s’effectue à l’intérieur des
développements, en insistant sur les rapports, les différences, les évolutions et les complémentarités des
droits étudiés. Les titres des développements thématiques sont le reflet de ce travail d’analyse
comparative.
4 – La conclusion
Elle est indispensable pour clore la réflexion et attester de la pertinence de la démonstration. Elle permet
de synthétiser (pas de résumer !) les idées fortes de la recherche et d'ouvrir sur des perspectives, à la fois
proches et suffisamment réalistes, relatives au sujet. C’est l’occasion pour le chercheur de donner son
avis personnel terminal. Dans l’idéal, sont indiquées in fine les propositions de thèse sous une forme
condensée.
Cette méthode permet assurément de prouver qu’une véritable thèse a été rédigée, aux idées et
conclusions neuves, et qu’elle n’est pas une simple compilation de travaux antérieurs.
Conseils de bibliographie
Les doctorants pourront d’abord consulter avec profit certains ouvrages de méthodologie et de droit :
PANSIER Frédéric Jérôme, Méthodologie du droit, LexisNexis, 7e éd., Paris, 2016, 505p.
SENOUSSI Roland, Introduction au droit comparé, 3ème éd., Dunod, Paris, 2008, 222 p.
Les méthodologies de la recherche en science juridique, axée sur le droit français, sont aussi d’un
précieux recours :
La thèse de doctorat en droit et la recherche juridique, 4ème journée nationale du droit (1991,
Faculté de droit de Saint-Maur – Université de Paris XIII), Association pour une fondation
nationale des études de droit, LGDJ, Paris, 1993.
Un autre excellent moyen de réussir une thèse de droit comparé est assurément de lire et de s’imprégner
de celles qui ont été soutenues dans les facultés de droit des pays étrangers, voire par la suite publiées
chez les grands éditeurs juridiques. Les doctorants auront l’embarras du choix, à l’issue d’une recherche
bibliographique sur www.sudoc.abes.fr, en tapant le mot clé « droit comparé »