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LES TRAITEMENTS PSYCHIATRIQUES

Prof. Dassa, UL/FSS 2023

I- PHARMACOTHERAPIE

1.1 Introduction

La pharmacothérapie se définie par l’usage rationnel des médicaments en


thérapeutique. En psychiatrie, elle concerne essentiellement les psychotropes :
antipsychotiques, anxiolytiques, hypnotiques, antidépresseurs, thymorégulateurs et
anticholinergiques. Comme une grande partie des médicaments, ils doivent toujours
être utilisés dans le cadre d’une prescription ou d’un avis médical. Il convient donc de
bien s’informer du mode d’emploi, mais aussi des interactions et des effets secondaires.
Les psychotropes sont des médicaments possédant une propriété dont l’action se fait
spécifiquement sur l’activité cérébrale. Le terme psychotrope signifie littéralement « qui
agit, qui donne une direction » (trope), « à l'esprit ou au comportement » (psycho).
Selon Jean Delay en 1957, « on appelle psychotrope, une substance chimique d'origine
naturelle ou artificielle, qui a un tropisme psychologique, c'est-à-dire qui est susceptible
de modifier l'activité mentale, sans préjuger du type de cette modification. ».

1.2 Classification des psychotropes

Il existe de nombreuses classifications des psychotropes. Mais on distingue de façon


générale selon Delay et Deniker :

• Psycholeptiques : Médicaments déprimant l’activité mentale.

− Neuroleptiques ou antipsychotiques ou tranquillisants majeurs : Haloperidol,


Risperidone, Chlorpromazine, Loxapine

− Tranquillisants ou anxiolytiques : Diazepam, oxazepam, Bromazepam

− Hypnotiques : Hydroxizine, Zolpidem, zopiclone, alimémazine

• Psychoanaleptiques : Médicaments stimulant l’activité mentale.

− Les thymoanaleptiques ou antidépresseurs ou encore stimulant de l’humeur :


Clomipramine, Paroxétine, Amitriptyline,

− Les nooanaleptiques : stimulant de la vigilance (amphétamines)

− Psychostimulants divers (caféine, …)

• Psychoisoleptiques ou normothymiques : Thymorégulateurs

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• Psychodysleptiques ou hallucinogènes ne sont pas utilisés en thérapeutique
médicale.

La pharmacothérapie en psychiatrie inclue l’usage des anticholinergiques pour régler


les effets secondaires d’ordre neurologique des antipsychotiques.

1.3 Les antipsychotiques ou neuroleptiques

Substances psychotropes psycholeptiques sédatives, non-hypnotiques, caractérisées par


leur activité thérapeutique dans les processus psychotiques et par leur aptitude à
déterminer des effets indésirables neurologiques et/ou métaboliques.

Critères psychophysiologiques de l'action des neuroleptiques

Ils sont au nombre de cinq, selon Delay et Deniker :

➢ La création d'un état d'indifférence psychomotrice :

- diminution de l'initiative motrice spontanée et provoquée ; - rareté et lenteur des


mouvements ;

- hypo ou amimie ; - indifférence psychique ; neutralité émotionnelle ; - tendance à la


catalepsie ;

- inhibition des réflexes conditionnés.

➢ L’efficacité sur l'excitation et l'agitation :

- sédation de l'excitation maniaque ; - sédation de l'agitation psychotique ; - efficacité


sur l'agressivité et l'impulsivité.

➢ Réduction progressive des troubles psychotiques aigus et chroniques :

- action antidélirante ; - action antihallucinatoire ;- action anticonfusionnelle ; - action


désinhibitrice ou stimulante dans la schizophrénie.

➢ Apparition de syndromes extra-pyramidaux et végétatifs :

- syndrome akinétique ou hyperkinétique ; - hypertonie ; rigidité extra-pyramidale ; -


tremblements, dyskinésies ; - action anti-émétique ; - hypotension artérielle ;
constipation ; sécheresse des muqueuses (hyposialorrhée) ; modification de la
régulation thermique.

➢ Effets dominants sur les structures cérébrales sous-corticales : participation à


l'efficacité de l'action antipsychotique et à l'apparition d'effets indésirables.

Classification

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On distingue la classification chimique :

➢ Tricycliques

− Phénothiazines : Chlorpromazine (Largactil*) : VO, IM, IV (LI), Fluphénazine


(Modecate*, Moditen*) VO, IM (LP), Lévomépromazine (Nozinan*) : VO, IM (LI)

− Pipothiazine (Piportil*) : VO, IM (LP), Cyamémazine (Tercian*) : VO, IM (LP)

− Dérivés du thioxanthène : Zuclopenthixol (Clopixol*) : action immédiate VO,


action prolongée et semi-prolongée IM, Flupentixol (Fluanxol*): VO, IM (LP)

− Dibenzo-oxazépines : Clozapine (Leponex*) : VO, Loxapine (Loxapac*) : VO, IM


(LI)

− Olanzapine (Zyprexa*) : VO, IM (LI)

− Butyrophénones: Butyrophénones d’action courte : Droperidol (Droleptan*): IM,


IV

− Butyrophénones d’action longue : Haloperidol (Haldol*) : IM

− Benzamides : LI (VO, IM): Amisulpride (Solian*), Sulpiride (Dogmatil*),


Tiapride (Tiapridal*)

− Autres neuroleptiques: Aripiprazole (Abilify*) : VO, Risperidone (Risperdal*):


VO, IM (LP)

Classification thérapeutique :

Classification thérapeutique 1ère génération 2ème génération


des neuroleptiques

Incisifs (antiproductifs) Haloperidol (Haldol*) Olanzapine (Zyprexa*)

Fluphénazine (Modecate*) Risperidone (Risperdal*)

Flupentixol (Fluanxol*) Clozapine (Leponex*)

Pipothiazine (Piportil*)

Antidéficitaires à faible dose Sulpiride (Dogmatil*) Amisulpride (Solian*)

Sédatifs Cyamémazine (Tercian*)

Lévomépromazine (Nozinan*)

Loxapine (Loxapac*)

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Polyvalent Chlorpromazine (Largactil*)

Indications thérapeutiques

➢ Indications psychiatriques

✓ Urgences : excitation psychique et agitation motrice LI (IM, IV)

− Psychoses aiguës LI (IM, IV) : Bouffées délirantes : antipsychotiques


antiproductifs

✓ Accès maniaques : antipsychotiques sédatifs, Accès mélancolique délirant : ATD


+ antipsychotique sédatif, Accès confuso-onirique : antipsychotiques polyvalents,
Delirium tremens (Tiapridal*), Psychoses chroniques LP (IM)

− Schizophrénies : les symptômes positifs répondent mieux aux antipsychotiques


sédatifs et antidélirants ; les symptômes négatifs répondent mieux aux
antipsychotiques désinhibiteurs.

− Délires chroniques

− Troubles psychotiques du Parkinson et de la maladie d’Alzheimer :


antipsychotiques de 2ème génération.

− Clozapine (Leponex®) : Strictement réservée aux schizophrénies chroniques


sévères, évoluant depuis au moins 2 ans, résistantes (non modifiées malgré la
prescription d'au moins deux antipsychotiques différents prescrits à posologie
élevée) ou aux cas d'intolérances neurologiques sévères et invalidantes aux
neuroleptiques, en milieu hospitalier

− troubles psychotiques du parkinsonien

− Autres indications neuro-psychiatriques : névroses obsessionnelles, complément


psychothérapies, neurologie (chorée Huntington : Haloperidol, Tiapride)

− troubles psychosomatiques (Dogmatil*), Démences des patients âgés :


Risperidone, Olanzapine.

➢ Indications non psychiatriques :

− Neuroleptanalgesie, Hoquet chronique, Dermatoses prurigineuses, Douleurs


cancéreuses

− Vomissements rebelles

Effets indésirables

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➢ Neurologiques

✓ Fréquents, surtout avec les antipsychotiques antidélirants (incisifs) de 1ère


génération du fait de leur action antidopaminergique.

− Les effets aigus apparaissant dès le début du traitement sont : les dyskinésies
aiguës

✓ le syndrome hyperkinétique (peut persister à moyen et long termes), Les effets


neurologiques à moyen et long termes :

− syndrome parkinsonien akinéto-hypertonique

− dyskinésies tardives

La correction des syndromes hyper cholinergiques (effets secondaires des


antipsychotiques) se fait par les anticholinergiques centraux (Trihexyphénidyle
ARTANE®, Bipéridène AKINETON LP®, Tropatépine LEPTICUR®).

➢ Neurovégétatif : le syndrome malin des neuroleptiques

− C’est une complication rare et souvent mortelle.

− Toute fièvre supérieure à 38 °C nécessite un examen clinique complet, un bilan


sanguin (CPK totales et CPK MM, recherche d’acidocétose, kaliémie). L’arrêt des
neuroleptiques s’impose devant : la présence d’une contracture musculaire
douloureuse importante, l’impossibilité de réaliser un bilan biologique dans
l’immédiat, l’absence de cause infectieuse évidente.

− Dans tous les cas, l’apparition d’un état fébrile sous neuroleptiques nécessite une
surveillance constante, horaire, en réanimation médicale si le diagnostic de
syndrome malin des neuroleptiques est porté. Symptomatologie : hyperthermie
maligne (supérieure à 40 °C) ; hypertonie généralisée ; pâleur, transpiration
importante avec déshydratation massive. Sur le plan biologique :
rhabdomyolyse.

➢ Les effets cardio-vasculaires

− Hypotension orthostatique (peut être sévère, surtout avec la Lévomépromazine).

− Torsades de pointes si hypokaliémie associée.

− Allongement du QT (Halopéridol, Clozapine).

− La dysrégulation thermique : variations thermiques rapides avec des passages


d’une hypothermie à une hyperthermie avec une sensation de malaise.
Complication rare.

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− L’hypothermie seule est plus fréquente. Impose un bilan thyroïdien
systématique.

➢ Neuropsychiques

− Confusion mentale : souvent iatrogène, fréquente chez la personne âgée,


survenant sous traitement par neuroleptiques ou antiparkinsoniens
anticholinergiques.

− États dépressifs : soit intégrés dans l’évolution de la maladie, soit secondaires à


l’inhibition de la transmission dopaminergique (accompagnés d’un syndrome
parkinsonien).

➢ Autres

− Indifférence psychomotrice. Réactivation anxieuse.

− Endocriniens.

− Prise de poids.

− Potomanie

− Manifestations cliniques d’une hyperprolactinémie

− Aménorrhée.

− Baisse de la libido.

− Troubles de l’éjaculation.

− Impuissance chez l’homme, anorgasmie chez la femme.

− Galactorrhée.

− Hyposialorrhée.

− Constipation.

− Troubles de l’accomodation.

− Sécheresse oculaire avec kératites et infections oculaires secondaires.

− Hypersensibilité et toxicité.

− Hépatiques

− Photosensibilisation et allergies cutanées

− Hématologiques

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− Oculaires surtout avec la chlorpromazine

Contre-indications

− Grossesse, durant le 1er trimestre. Troubles du rythme cardiaque. Sclérose en


plaque «SEP».

− Maladie de Parkinson. Glaucome à angle fermé. Adénome de la prostate.


Phéochromocytome.

− Antécédents d’agranulocytose et de leucopénie pour la Clozapine. Antécédent de


syndrome malin des neuroleptiques.

1.4 Les antidépresseurs

Ce sont des substances psychotropes psychoanaleptiques thymostimulantes. C’est


l’ensemble de médicaments hétérogènes (classes chimiques, mécanismes d’action) qui
ont en commun l’améliorer de l’humeur dépressive.

Chez les sujets normaux, elles n’entraînent pas d’effet euphorisant. Dans les troubles
bipolaires, cet effet peut dépasser son but en entraîner une inversion de l’humeur dans
le sens du pôle maniaque.

Classification

On distingue la classification en familles et la classification thérapeutique :

CLASSIFICATION THERAPEUTIQUE

Antidépresseurs Antidépresseurs Antidépresseurs


psychostimulant intermédiaires ou sédatifs
s médians (anxiolytiques)

Imipraminique Desipramine Clomipramine Amitriptyline (Elavil*,


s ou (Anafranil*) Laroxyl*)
Tricycliques
Imipramine (Tofranil*)

Inhibiteurs de ISRS : ISRS :


la recapture de _
Fluoxetine Citalopram (Seropram*)
la sérotonine
(Prozac*)
(IRS) Paroxetine (Deroxat*)
Sertraline
IRSNA :
(Zoloft*)
Venlafaxine (Effexor*)
IRSNA :

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Minalcipran
(Ixel*)

Atypiques _ _ Mianserine (Athymil*)

Mirtazapine (Norset*)

Inhibiteurs de
la monoamine IMAO non sélectifs, IMAO sélectifs MAO-A
oxydase
(IMAO)

Indications thérapeutiques

✓ Episodes dépressifs :

− 1ère intention : tous les ATD sauf les IMAO

− 2ème intention : les IMAO

✓ Troubles obsessionnels compulsifs : Clomipramine et ISRS

✓ Traitement du trouble panique et agoraphobie : tous les ATD

✓ Prévention des attaques de panique : Paroxétine, Citalopram (Seropram®)

✓ Traitement du trouble « anxiété sociale » (phobie sociale) : Paroxétine,


Citalopram IV (Seroplex®)

✓ Anxiété généralisée, évoluant depuis au moins 6 mois : Paroxétine, Fluoxétine


(Prozac®)

✓ Boulimie en complément d'une psychothérapie : Fluoxétine (Prozac®)

Effets indésirables

➢ Anticholinergiques:

• Périphérique

− sécheresse de bouche (complications: caries, glossite, stomatite)

− constipation

− vision trouble (accommodation)

− rétention urinaire

• Central

− confusion mentale +++ (sujet âgé ou débilite)


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− abaissement du seuil épileptogène

− tremblement

➢ Cardiovasculaires:

− tachycardie par augmentation du tonus sympathique et effet


parasympatholytique

− Hypotension orthostatique

− A haute dose: trouble de la conduction cardiaque

➢ Effets psychiques:

− Suicide : la levée de l’inhibition psychomotrice précède en général l’amélioration


complète de l’humeur. Il existe une période de vulnérabilité toute particulière.

− inversion de l’humeur (virage maniaque)

− activation délirante

➢ Autres:

− ictère, agranulocytose

− prise de poids, augmentation de l’appétit

− grossesse : pas d’argument pour tératogénicité (éviter)

➢ Syndrome sérotoninergique (augmentation de séro) :

Ensemble de symptômes pouvant nécessiter l’arrêt de traitement, voire entrainer le


décès :

− Psychique : agitation, confusion, hypomanie, éventuellement coma

− Végétatif : hypo ou hypertension, tachycardie, frissons, hyperthermie, sueurs

− Moteur : tremblements, rigidité, hyperactivité

− Digestif : diarrhées

Contre-indications

✓ Absolues:

− Adénome de la prostate.

− Glaucome à angle fermé «GAF»

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− Troubles cardiaques, notamment les troubles du rythme et de la conduction,
l’infarctus du myocarde récent et l’insuffisance cardiaque.

✓ Relatives :

− Infarctus du myocarde ancien.

− Insuffisance hépatique.

− Insuffisance rénale.

− Epilepsie.

− Processus organiques cérébraux.

− Grossesse au 1er trimestre.

− Association à l’alcool.

1.5 Les anxiolytiques/tranquilisants/hypnotiques

L’action tranquillisante se définit par son effet sédatif sur l’anxiété. Les tranquillisants
ont, en outre, un effet hypnogène (variable selon les molécules). Quant aux
benzodiazépines, elles sont par ailleurs myorelaxantes et anticonvulsivantes. Comme la
plupart des psychotropes, les benzodiazépines potentialisent l’effet de l’alcool et celui
des barbituriques.

Classification

Les tranquillisants/Anxiolytiques/hypnotiques

Les pipérazines Hydroxyzine (Atarax) Pas d’effet myorelaxant, ni anticonvulsivant


(Antihistaminiques anti-H1)
N’induit aucune dépendance

Les antagonistes 5HT1A buspirone (Buspar) N’induit aucune dépendance

Les bêtabloquants Propranolol (Avlocardyl) Efficace dans la prévention des manifestations


somatiques de l’anxiété de performance (trac).
Les antipsychotiques Tercian*, Nozinan*, Rispéridone* − cf
Les benzodiazépines Diazépam (Valium) Agonistes des récepteurs GABA-A.
Bromazépam (Lexomil) Très addictogène (demi-vie courte)
Prazépam (Lysanxia)

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Les hypnotiques

Cyclopyrrolones Zopiclone (Imovane) : demi-vie 7 h Inducteurs de sommeil

Imidazopyrines Zolpidem (Stilnox) : demi-vie 2 à 3 heures Inducteurs de sommeil


Les benzodiazépines Diazépam (Valium), Bromazépam (Lexomil), Prazépam (Lysanxia)
Flunitrazépam (Rohypnol), Triazolam (Halcion)

Les associations de molécules Benzodiazépine et phénothiazine (Noctran)


Méprobamate et phénothiazine (Mépronizine).

Indications et contre-indications

Les benzodiazépines et les cyclopyrrolones sont contre-indiquées dans la myasthénie,


dans l’insuffisance respiratoire décompensée ; leur utilisation doit être très prudente en
cas : chez le sujet âgé, dans l’insuffisance rénale ou hépatique.

Les carbamates sont contre-indiquées en cas d’insuffisance hépatique (la fonction


hépatique chez un sujet alcoolique doit être évaluée avant la prescription de
méprobamate) et en cas de porphyrie.

Les imidazopyrines n’ont pas de contre-indications spécifiques.

La grossesse est une contre-indication relative, surtout au dernier trimestre, du fait du


risque d’inhibition respiratoire et de syndrome de sevrage chez le nouveau-né.

Les médicaments anxiolytiques ne doivent être prescrits qu’en traitement d’appoint


d’une symptomatologie anxieuse. L’absence de traitement adapté de la cause, de règles
hygiénodiététiques et d’éducation du patient sont des facteurs prédisposant à l’abus et à
la dépendance.

La prescription d’anxiolytiques impose l’éducation du patient, concernant les effets


indésirables et les précautions à prendre : pas de consommation d’alcool concomitante,
conduite automobile précautionneuse.

Une indication particulière des benzodiazépines est le traitement du pré DT

Effets indésirables

Somnolence diurne – Fréquente, surtout en début de traitement. Peut s’accompagner


d’une asthénie, d’une diminution de la libido et parfois d’une légère hypotension
artérielle avec sensation ébrieuse.

Allongement du délai de réaction – Décrit pour tous les médicaments psychotropes.


Impose une éducation du patient, surtout en cas de conduite automobile ou de

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manipulation de machines nécessitant des réactions vives. La conduite automobile est
déconseillée, surtout au début de traitement.

Troubles mnésiques – Quasi constants chez les patients traités par benzodiazépines. Il
s’agit d’amnésies antérogrades partielles, qui n’apparaissent patentes qu’en cas de
pathologie organique associée, chez les sujets âgés ou en cas de traitement prolongé.

Risque de dépendance et d’abus – Il est très important, sauf pour les antihistaminiques.
– La dépendance est d’abord psychique, mais la dépendance physique s’installe très
rapidement, surtout chez les sujets impulsifs ou toxicomanes (alcooliques) et pour les
benzodiazépines à demi-vie d’élimination courte. – Les manifestations de sevrage ne
surviennent qu’après des traitements à fortes doses et/ou prolongés (supérieurs à 3
mois). Les accidents de sevrage sévères avec crises convulsives, confusion mentale sont
rares. Les manifestations mineures de sevrage sont plus fréquentes : sensation de
malaise, manifestations somatiques d’angoisse, insomnie, sensations vertigineuses,
anorexie, troubles digestifs. Il est parfois difficile de les distinguer d’un simple rebond
anxieux à l’arrêt du traitement.

Inhibition respiratoire et syndrome de sevrage chez le nouveau-né de mère


consommant des benzodiazépines au cours du troisième trimestre de grossesse

Effets paradoxaux – Ils sont à type d’agitation et d’anxiété massive et observés lors de
l’administration de benzodiazépines chez le jeune enfant et le sujet âgé.

Allergies

Surdosage – En cas de surdosage, on peut observer une ataxie, dysarthrie,


incoordination motrice, troubles de la vision avec diplopie.

Intoxications aiguës – Très fréquentes et généralement sans risque vital pour les
benzodiazépines, en l’absence de prise d’alcool concomitante. En revanche, les
intoxications aux carbamates mettent en jeu le pronostic vital.

Modalités de prescription

Les anxiolytiques ne sont que des traitements symptomatiques de l’anxiété. Il convient


donc d’entreprendre de manière complémentaire un soutien psychologique en cas
d’anxiété réactionnelle ou un traitement de la cause de l’état psychopathologique sous-
jacent. Certaines psychothérapies (relaxation) ont comme objectif le contrôle des
manifestations anxieuses.

Prescription des benzodiazépines non hypnotiques

− Posologie minimale efficace.

− À éviter en cas de toxicophilie.


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− Associée à un traitement de la cause et des règles hygiénodiététiques, voire
des psychothérapies de relaxation.

− Durée maximale : 12 semaines.

Prescription des hypnotiques

− Posologie minimale efficace.

− À éviter en cas de toxicophilie.

− Associée à un traitement de la cause et des règles hygiénodiététiques, voire


des psychothérapies de relaxation.

− Durée maximale : 4 semaines.

Arrêt

− Doit être progressif lorsque la posologie est élevée ou la durée de traitement


prolongée.

− Elle doit être diminuée de moitié toutes les cinq demi-vies de la molécule
prescrite.

1.6 LES THYMOREGULATEURS

Définition et indications

Les thymorégulateurs sont des psychotropes normothymiques. Ils ont pour action
principale la régulation de l’humeur. Ils sont indiqués dans le trouble bipolaire, dans la
dépression récurrente et dans la schizophrénie dysthymique.

Classification, contre-indication et bilan


CLASSE PRODUITS CONTRES INDICATIONS BILAN PRETHERAPEUTIQUE ET DE
ABSOLUES SURVEILLANCE
Thymorégulateur Carbonate de lithium Grossesse, Insuffisance rénale ; NFS, glycémie, ionogramme sanguin,
classique : le lithium (Téralithe*) cp sécable Insuffisance hépatique ou créatininémie, urée, protéinurie de 24 h
250 mg, cp LP sécable cardiaque évoluées ; (si protéinurie positive à la bandelette
400 mg Hypothyroïdie non corrigée urinaire), ECBU, bilan hépatocellulaire
complet, TSH, bêta-HCG chez les
femmes en âge de procréer; ECG

Anticonvulsivants Carbamazepine Grossesse, allaitement, allergie, NFS, bilan hépatique complet, ECG
thymorégulateurs (Tégrétol*) cp LP 200 mg, troubles de la conduction
cp LP 400 mg cardiaque, insuffisance
hépatique, glaucome, adénome
Valproate de sodium de la prostate,

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(Dépamide*)
Valpromide (Dépamide*)
divalproate de sodium
(Dépakote*)
Lamotrigine (Lamictal*)

Antipsychotiques atypiques Olanzapine, Rispéridone,


Quétiapine, Aripiprazole

Éducation

➢ Du patient

– Explication de la maladie : facteurs héréditaires de vulnérabilité (déculpabiliser et bien


expliquer le terme « héréditaire ») ; prodromes de la série maniaque ou dépressive ;
règles hygiénodiététiques (respecter un rythme de vie régulier, éviter les excès) ;
éducation de la surveillance et de la nécessité d’une observance du traitement
thymorégulateur et du suivi.

– Dans le cadre du traitement par sels de lithium : * expliquer l’importance de la


surveillance biologique et de la nécessité de communiquer les résultats au médecin
traitant ; * connaître les symptômes de surdosage et les différencier des effets
secondaires : expliquer les effets secondaires ; * la surveillance biologique annuelle :
thyroïde et fonction rénale (TSHus et créatininémie annuelles). Lithiémie mensuelle ; *
si une dysthyroïdie secondaire au traitement par lithium apparaît au cours du
traitement, elle ne représente pas une contre-indication à la poursuite du
thymorégulateur mais nécessite une opothérapie substitutive ;

N.B. : La dysthyroïdie iatrogène peut être une cause de déstabilisation d’un patient
bipolaire !!! * hygiénodiététique : hydratation régulière et suffisante (au moins 1,5 litre
d’eau par jour, voire 3 si exposition à une chaleur importante ou un effort intense). Si la
consommation d’eau augmente de façon excessive avec un syndrome polyuro-
polydypsie, il faut évoquer un diabète insipide distal secondaire au traitement par
lithium (ne contre-indique pas la poursuite du traitement mais nécessite une
surveillance multidisciplinaire). * contre-indications absolues : au régime sans sel ; aux
diurétiques ; * contre-indications relatives : AINS et aspirine (si absolument nécessaire :
surveillance rapprochée de la lithiémie) ; * les femmes en âge de procréation : si une
grossesse est désirée, elle doit être programmée, et le lithium doit être arrêté un mois
avant la conception et réintroduit à l’accouchement (pas d’allaitement). Collaboration
multidisciplinaire.

– Dans le cadre d’un traitement par carbamazépine: * expliquer la surveillance


biologique (hémogramme et bilan hépatique tous les six mois; carbamazépinémie au
moindre doute de surdosage ou de mauvaise observance); * connaître les signes de
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surdosage: somnolence, troubles de l’équilibre avec chutes, désorientation temporo-
spatiale; * conduite à tenir devant un syndrome fébrile, ulcérations buccales: arrêt
immédiat du traitement et consultation en urgence en précisant le traitement en cours
(faire un hémogramme, une numération plaquettaire et des prélèvements
bactériologiques); * ne pas donner chez la femme enceinte, ni durant l’allaitement.

– Dans le cadre d’un traitement par valpromide ou valproate: * savoir que, chez la
personne âgée, ce traitement peut donner un tableau confusionnel avec des troubles du
comportement et de l’équilibre, même à des concentrations plasmatiques comprises
dans la fourchette thérapeutique; * le dosage plasmatique n’est demandé qu’en début
de traitement pour équilibrer la posologie ou si doute de surdosage ou de mauvaise
observance; * chez la femme enceinte: substitution en vitamine K (risque de spina
bifida) et surveillance échographique rapprochée.

➢ De l’entourage

– Signes de surdosage.

– Règles hygiénodiététiques.

QUELQUES CONSEILS POUR UNE BONNE PRESCRIPTION : Ce que nous devons


avoir à l’esprit avant toute prescription)

Toujours se rappeler qu’en psychiatrie, les traitements sont longs et souvent à vie (la
durée minimum d’un traitement médical est de 6 mois). Nécessité d’une bonne
psychoéducation pour augmenter les chances d’une bonne observance.

Toujours se rappeler qu’une ordonnance de plus d’un médicament augmente le risque


d’inobservance et le risque de survenue des ES.

Toujours expliquer les effets secondaires possibles et les conduites à tenir.

Les traitements symptomatiques sont à proscrire car ils sont sans intérêts, aggravent
parfois la maladie, augmentent le nombre de médicaments sur l’ordonnance (coût, ES et
inobservance). Il faut miser sur une psychothérapie de soutien et une psychoéducation.

Beaucoup de patients psychiatriques dans notre contexte africain sont sans emplois et
n’ont pas les moyens pour honorer les ordonnances.

L’intensité des symptômes ne justifient pas une forte prescription.

Vouloir étouffer tous les symptômes entraine souvent une mauvaise prescription.

Il n’y a point de précipitation en psychiatrie.

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Un bon examen physique et des examens complémentaires sont nécessaires avant un
traitement psychotrope de fond.

Un bilan rénal, hépatique et sanguin est nécessaire avant tout traitement psychotrope.
Ce bilan doit être systématiquement répété en fonction du psychotrope et des moyens
du patient.

Du fait que notre population est non fumeuse et prend très peu de café, elle est sensible
aux psychotropes.

II- LES PSYCHOTHERAPIES

Psychothérapies regroupent toutes les méthodes de traitement des désordres


psychiques, voir des désordres somatiques, utilisant des moyens psychologiques, et
d’une manière plus précise, la relation du thérapeute et du malade. « Est
psychothérapeutique toute démarche visant à modifier de façon durable la relation de
l’organisme à son milieu en agissant sur le médiateur de cette relation le psychisme
(Sivadon). « Le médicament le plus fréquemment utilisé en médecine générale est le
médecin lui-même » (Balint). Une relation médecin malade de qualité a en elle-même
des vertus thérapeutiques.

La relation Soignant-Soigné est l’ensemble des processus émotionnels et cognitifs mis


en jeu dans la relation entre une personne souffrante et un soignant

2.1 Types de psychothérapies

Psychothérapies individuelles

➢ Psychothérapie de soutien

➢ Psychanalyse et les Psychothérapies d’Inspiration Psychanalytique

➢ Thérapies Cognitives et Comportementales, Mindfulness

➢ Psychothérapies à médiation corporelle: Relaxation, Sophrologie,


Hydrothérapie, Bioénergie, Psychomotricité

➢ Hypnose

Psychothérapies de groupe

➢ Psychothérapie de soutien: soutien de la famille

➢ Thérapies systémiques : familiales et conjugales

➢ Psychodrame

➢ Thérapies Cognitives et Comportementales de groupe

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➢ Psychothérapies institutionnelles

2.2 Psychothérapie de soutien

Au sens large, les psychothérapies regroupent toutes les méthodes de traitement des
désordres psychiques, voir des désordres somatiques, utilisant des moyens
psychologiques, et d’une manière plus précise, la relation du thérapeute et du malade.
Action concentrée, méthodique, et animée par une intention thérapeutique précise « A .
Berge ». On a souvent tendance à parler de la psychothérapie de soutien comme une
démarche qu’exclurait la compétence, il est vrai que dans de tels entretiens, une
disponibilité plus ouverte, de plusieurs façons de répondre s’intègrent à une action
psychiatrique quotidienne. Sont des psychothérapies non codifiées, sans référence
théorique précise, ni technique spécifique. Bien qu’elles soient largement pratiquées,
dans des indications très diverses, elles n’ont guère donné lieu à des élaborations
poussées. On doit cependant se garder de les assimiler au soutien que n’importe qu’elle
personne peut apporter à un autre ; elles doivent en effet comporter des buts relativement bien
définis, être pratiquées par des thérapeutes relativement bien formés au maniement de la
relation interpersonnelle pour en éviter les écueils et les enlisements et utiliser des moyens
thérapeutiques qui différent en fonction de la personne et de la pathologie du patient. C’est
une forme de thérapeutique relationnelle, la plus employée, elle utilise des mécanismes
définis pour aider le malade et exige un certain nombre de critères pour sa réussite.
C’est une technique psychologique permettant une action concentrée méthodique et
animée pour une intention thérapeutique précise.

Critères d’une relation de soutien efficace

− Capacité de percevoir le monde effectif de l’autre à travers sa communication


verbale et non verbale.
− Respect du monde intérieur de l’autre avec capacité d’identification sans
projection.
− Neutralité sans jugement ni conseils de vie.
− Disponibilité au moment de l’entretien « 45 minutes ou plus ».
− La perception du transfert et du contre transfert.

La relation de soutien

− Très couramment utilisée en pratique psychiatrique.


− La relation de soutien devient une véritable thérapie laquelle s’applique aux
besoins psychologiques du patient présentant un handicap prolongé ou encore
un déficit notable d’adaptation.
− Conduite souvent en association avec une chimiothérapie.
− Prend appui sur une image médicale sécurisante.

17
− Dialogue se situe sur un plan de réalité, au fil d’une relation médecin – malade
complémentaire et directive de durée non limitée.
− Schneider distingue thérapie de soutien et psychothérapie de soutien, dans cette
dernière le support offert par le médecin tient compte de la situation
conflictuelle, interpersonnel et intrapsychique, et de ses aspects inconscients.
− Il y a une différence entre la psychothérapie « découverte » proche de la thérapie
analytique et la psychothérapie de soutien qui est dite « recouvrante » ou
« supportative » où le conflit inconscient est laissé dans l’ombre, on s’en prend
uniquement à ses répercussions dans la vie du patient.
− La psychothérapie de soutien ne vise aucun remaniement psychothérapique
profond.
Buts de la psychothérapie de soutien

Par définition les psychothérapies de soutien ne visent pas l’obtention de remaniements


psychologiques profonds mais :
− Un renforcement des capacités d’adaptation du sujet.
− Une mise en œuvre plus efficace et plus simple de ses moyens de défense.
− Obtenir la plus grande amélioration symptomatique possible.
− Dégagement des contraintes extérieures par une action sur l’environnement.
− Facilitation des aménagements concrets de l’existence du patient ou
l’accompagnement psychologique dans une période de crise.
La réalisation de ces objectifs nécessite l’établissement d’une relation positive entre le
patient et le thérapeute, relation suffisamment chaleureuse pour servir transitoirement
de support, mais qui devra être constamment modulée en fonction des mouvements
transférentiels du sujet ; le transfert opéré ici comme dans toute psychothérapie mais il
n’est pas l’objet d’un travail d’explication et d’analyse, et de ce fait échappe en grande
partie à la conscience du patient ; le thérapeute devra donc y être plus attentif.

Utilisation dynamique de la relation thérapeutique

Défense : Rétablir ou renforcer les mécanismes de défense préexistants et plus rarement


en introduire de nouveaux mécanismes.
Conflit : Traiter le conflit conscient et le rendre supportable au malade, le thérapeute
joue le rôle d’un ‘Moi auxiliaire temporaire’
Identification : Favoriser le désir qu’a le malade, d’identifier son Moi à celui du
thérapeute.
Renforcement :
Introduire de nouveaux modes de défense pour une meilleure intégration de la réalité.

Pulsions et désirs : Valoriser les éléments conscients de la relation, gratifier l’aspect


conscient de pulsions inconscientes.
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Sur moi et le conscient: Pourvoir le malade d’un Surmoi valable mais supportable,
possible d’incorporer un Moi mieux adapté à la réalité.

Moyens

Ils sont très variables, selon le type de pathologie, la personnalité du malade et le


moment de la prise en charge. Le plus souvent les psychothérapies de soutien
comportent :
L’encouragement de la verbalisation :
L’expression verbale des émotions apporte souvent un soulagement important et
relâchent des tensions intérieures chez des patients qui se sentent contraints à un
contrôle émotionnel permanent dans leur entourage habituel.
La verbalisation des émotions facilite leur réduction, même lorsqu’il n’est pas possible
d’encourager une compréhension intuitive des conflits sous-jacents, qui souvent
exacerberait d’abord l’anxiété et les inhibitions.

La mise en mots de certaines expériences psychiques particulièrement pénibles pour le


sujet « affects mélancoliques, dépersonnalisation, expérience délirante » permet d’en limiter le
caractère dramatique, ainsi que les sentiments d’isolement, d’incommunicabilité et de
culpabilité qui les accompagnent ; il ne s’agit pas ici de banaliser ces expériences mais d’aider le
sujet à les mettre en forme sur le plan cognitif et de lui faire savoir qu’elles peuvent être
comprises par autrui.
Les résistances que le sujet manifeste dans l’abord de ses conflits intrapsychiques et des
phénomènes intérieurs qui sous-tendent ses conduites seront généralement respectées,
du moins aussi longtemps que le sujet n’aura pas été complètement rassuré quant au
caractère positif et non menaçant de sa relation au thérapeute.

Attitude de rassurement compréhensif :


Les attitudes de rassurement sont indispensables dans certains moments
particulièrement aigus où le sujet est totalement envahi par le désarroi qui lui procure
son expérience psychique et ne peut anticiper un avenir diffèrent de ce qu’il est en train
de vivre. Cependant l’encouragement et le rassurement sont tout à fait différents de
l’affirmation de principe d’un optimisme inconditionnel « qui serait d’ailleurs aussitôt
invalidé parce que le sujet ressent de son expérience pathologique ». Ils se servent au
contraire de la reconnaissance de cette expérience elle-même : une crise d’angoisse
aiguë est d’abord une expérience de mort imminente bien qu’elle ne soit pas mortelle,
un moment dépressif intense est d’abord une expérience de pessimisme total, même si
ce pessimisme n’est pas définitivement justifié.
Les encouragements sont sans valeur s’ils ne peuvent pas être entendus par le sujet ou
s’ils dépassent l’attente raisonnable d’une amélioration que l’évolution confirmera.
De même le constat des progrès obtenus conforte l’espoir de progrès à venir.
19
Conseils et suggestion
Les conseils :
Différents des conseils « de bon sens » de l’entourage habituel, qui tendent en général à
denier l’expérience psychique dont le sujet est l’objet « par exemple ne pas s’écouter
lorsqu’une sensation d’angoisse, agir, sortir de soi même lorsqu’un état dépressif inhibe
toute possibilité d’action ».
Le conseil ne peut avoir de sens que s’il tient compte de l’expérience vécue et des
possibilités du sujet.
Il vise plutôt à faciliter et déculpabiliser la coexistence du sujet avec son trouble.
Dans le domaine des réalités extérieures, le conseil sera émis comme une opinion plutôt
comme un ordre « il ne s’agit pas d’une prescription ».
Il peut concerner le mode de vie du patient, certaines décisions importantes, le
développement et la réalisation de ses capacités, la modération d’efforts stériles ou
l’encouragement à s’autoriser le plaisir ou la sublimation.
Le conseil doit tenir compte des besoins et surtout des moyens du patient et ne doit pas
bien entendu, avoir pour seules références les croyances personnelles du thérapeute.
Ces interventions dans la réalité du sujet n’excluent pas les contacts avec la famille, ou
le recours à un service social, en sachant ce qu’impliquent ces références.

L’aide relationnelle :
Si la relation entre le patient et le thérapeute n’est pas l’objet d’une élucidation qui
mettrait au jour des processus inconscients, elle peut servir d’illustration et de modèle
explicatif aux difficultés relationnelles que le patient éprouve avec son entourage
familial ou professionnel.
La sensibilisation du sujet à la psychologie d’autrui et aux interactions affectives et
comportementales dont il est le centre ne mène pas seulement à une certaine pédagogie
de la relation mais peut aboutir à une meilleure prise de conscience de ses mouvements
internes.
Une certaine identification au thérapeute fait partie du processus thérapeutique.
Attitude semi-directive :
Pouvant être d’un grand secours chez les patients immatures, mais renforçant l’image
du thérapeute tout puissant.
Intervention sur l’environnement :
Selon le cas, l’action thérapeutique concerne le milieu social ou professionnel
« aménagement de conditions de travail, orientation, reclassement professionnel » ou
familial.
Lorsqu’une séparation provisoire s’impose « hospitalisation par exemple », le choix de
ces modalités est une tâche délicate.

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Mécanismes permettant de structurer la psychothérapie de soutien

Abréaction :
Le fait de raconter au médecin ses conflits, sa souffrance, les stress subit, permet au
malade une décharge émotive qui diminue l’intensité de ses tensions internes, ceci peut
aller jusqu'à la catharsis.
La compréhension :
La description des conflits, leur tendance répétitive au-delà des circonstances et des
personnes permet au sujet de trouver des solutions ou des compromis qui vont
diminuer l’intensité de son anxiété.
Le partage :
L’intérêt pris par le médecin aux souffrances du patient peut lui donner une impression
de partage même s’il ne manifeste les sentiments éprouvés par le patient.
Un choc affectif pouvant entraîner une dramatisation des affects, le seul intérêt entraîne
une sorte de dilution du sentiment en dehors du sujet et une charge moins lourde.
L’appui :
La régression au moment de l’entretien et le transfert, peuvent transformer le médecin
en une image parentale sécurisante, dont le risque une fois passée la souffrance, à
l’origine de la demande, sera l’instauration d’une relation de dépendance stable.
L’éducation ou l’apprentissage :
Elle se situe au plan des habitudes de vie, des consommations de toxiques et de
médicaments, de l’hygiène mentale et physique, de l’adaptation au stress, à l’exclusion
de conseils concernant la vie familiale, amoureuse ou professionnelle, vis à vis
desquelles l’interventionnisme a plus d’inconvénients que d’avantages.

Les indications

Les indications relèvent de plusieurs facteurs : l’état du patient / sa situation réelle / sa


personnalité / ses propres choix de traitement.
L’état du patient :
Peut-être par lui-même une indication :
▪ Pendant un épisode psychotique subaigu.
▪ Lors des fluctuations dépressives qui lui succèdent souvent.
▪ Le soutient psychothérapique et un accompagnement nécessaire de traitement
institutionnels et biologiques.
▪ Il en est de même dans bien des épisodes cliniques subaigus : états dépressifs /
névroses décompensées / périodes de réadaptation / accès d’angoisse
Les situations de crises ou les états réactionnels à des événements traumatisants :
Ne sont pas de bonnes conditions pour commence une psychothérapie réglée et
structurée.

21
Une thérapie de soutien est plus indiquée pour aider le sujet à intégrer et dominer les
réalités auxquelles il doit faire face, quitte à envisager ultérieurement si cela est
nécessaire un autre mode de traitement.
Il en est de même à certains âges critiques « adolescents, retraite, 3ème âge » où le poids
de la réalité intervient autant que les conflits intrapsychiques.
Certaines personnalités :
Certaines personnalités présentent des mécanismes de défense trop fragiles ou au
contraire trop rigides, pour qu’on envisage des remaniements profonds de leur
personnalités au risque d’une décompensation psychotique ou d’une dépression
intense.
La faible tolérance à la frustration ou la méconnaissance de l’origine psychologique des
troubles sont également des arguments en faveur d’une psychothérapie de soutien.
Choix de traitement :
Enfin il n’est pas rare que des sujets, qui seraient parfaitement accessibles à un travail
d’investigation de type analytique, ne le souhaitent pas et préfèrent être aidés et
conseillés dans les aspects de leurs difficultés sans en aborder les aspects inconscients.
Une telle attitude n’a pas à être considérée systématiquement comme une résistance ou
un refus ; il importe plutôt de l’accepter comme une nécessité du moment, quitte à la
voir évoluer par la suite.

2.3 Autres psychothérapies et leurs indications


2.3.1 Psychanalyse et Psychothérapie d’Inspiration Psychanalytique
La psychothérapie d’inspiration analytique comme la plupart des psychothérapies ont
été fortement influencées, directement ou indirectement, par la Psychanalyse. La
dénomination de « psychothérapie d’inspiration psychanalytique », est de fait un peu
vague car elle recouvre des situations et des modes d’intervention très variés, tant dans
le rythme et la durée des séances, que sur la manière dont le thérapeute va intervenir.
La psychothérapie d’inspiration analytique adhère dans les grandes lignes d’une partie
des mouvements analytiques de la psychanalyse que nous allons développer dans notre
exposé. La psychothérapie analytique a une indication plus large que la cure analytique.
Elle permet d’apporter une aide focalisée sur certains conflits. Basée sur l’interprétation
verbale proposée par le patient, elle vise à l’explicitation des conduites et des affects
avec pour but, la disparition des conflits. C’est aussi un traitement par des moyens
psychologiques, qui se fait par des entretiens réguliers, avec un psychothérapeute. La
durée du traitement varie de quelques mois à quelques années. Elle peut être pratiquée
seule ou associée à d’autres thérapeutiques comme prescription des médicaments.
Objectifs
• Compréhension de l’origine de symptôme
• Rendre l’énergie qui est immobilisée par les conflits inconscients
• Interprétation verbale proposée par le patient.
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• Explication des conduites en visant à la disparition des symptômes.
• Faire installer l’équilibre relatif, de s’accommoder de ses particularités.

Les bases théoriques et techniques


Bases théoriques
La base théorique est la même que celle de psychanalyse.
• Elle considère que la plupart de nos problèmes d’adulte ont pour origine des
conflits non-résolus de l’enfance.
• La relation thérapeutique est plus active, plus ancrée dans la réalité.
• Le psychothérapeute analytique considère que l’écoute active et l’empathie sont
les principaux outils de guérison.
• Il considère que le travail de guérison passe aussi par la libération des émotions
réprimées du passé.
• Elle vise à rendre au patient sa liberté et lui permettre de vivre mieux.
Les entretiens se déroulent en face à face.
Dans le cadre de la psychothérapie analytique, le thérapeute intervient davantage. Son
attitude est plus active et plus directe que dans la cure psychanalytique.
Bases techniques
Il cherche à rejoindre son patient au plus près de ce qu’il vit, de ce qu’il ressent sur le
plan émotionnel. Il le questionne sur son passé et sur les relations familiales passées. Il
identifie les schémas de répétitions auxquels son patient est confronté pour l’aider à
« faire et être autrement » lorsqu’il sera de nouveau confronté à une problématique
similaire.
Les conditions de fonctionnement varient suivant les thérapeutes (rythme, durée des
séances, planification des congés).
La durée d’une psychothérapie est variable. Elle dépend évidemment de la demande du
patient, de l’ampleur de sa souffrance et de son degré d’autonomie.
En règle générale, la psychothérapie analytique se pratique à raison d’une à deux
séances par semaine.
Indications et contre-indications
➢ Indications
Le vécu d’une souffrance ou d’un problème insistant qui rend le quotidien difficile à
gérer tout seul, sur certains de ses aspects :
• Relationnel, Affectif, Emotionnel, Professionnel, Exploration de la psyché et la
connaissance de soi.
➢ Contre-indication
La psychose chronique, L'absence de motivation du patient, Les personnes «
paranoïaques », «psychopathes », ou « pervers, La formation insuffisante du praticien/
Dans de nombreux cas, l’analyse est contre-indiquée en particulier en raison de la
fragilité du moi du patient.
23
2.3.2 Thérapies cognitives et comportementales
Théories de l’apprentissage
Modèle comportemental: conditionnement classique, opérant, social
Modèle cognitif : Perturbation du traitement de l’information
Différentes techniques : Désensibilisation, exposition graduée, immersion, affirmation
de soi, relaxation, Remédiation cognitive, résolution de problème
Indications
Troubles anxieux: Phobies, TOC, ESPT, TAG, Trouble panique avec ou sans
agoraphobie
Trouble de l’humeur: Dépression, trouble bipolaire en préventif
Pathologies psychosomatiques : UGD, eczéma, psoriasis, HTA, Asthme, ….

2.3.3 Hypnose
Induction d’un état modifié de conscience (transe hypnotique) par différentes
techniques (procédés d’induction), modifiant l’attention au réel et augmentant la
suggestibilité, l’hypnose permet une approche thérapeutique inductive, visant à faire
disparaître un symptôme
Indications : Troubles conversifs, Troubles psychosomatiques, Autres troubles
anxieux: stress aigu et post-traumatique, TAG… ; Conduites addictives : tabagisme+++

2.3.4 Thérapies systémiques : thérapies familiales et thérapies de couple


Elles abordent les symptômes psychiatriques comme produits des interférences entre
un sujet et son environnement social (qu’il soit familial, amical, conjugal…)
Un patient, consultant pour un symptôme, est considéré lui-même comme le
symptôme d’un système défaillant (couple, famille….). C’est l’approche globale de ce
système qui se veut thérapeutique, pour l’ensemble des individus concernés, et a
fortiori pour le patient.
Indications : Dysfonctionnement familial, de couple ou d’amis
2.3.4 Thérapies à médiation corporelle
Elles utilisent le corps comme médiateur dans le travail thérapeutique : Relaxation,
Hydrothérapie, Sophrologie, Psychomotricité, Bioénergie…

Indications : Troubles anxieux, Troubles psychomoteurs : mouvements involontaires,


tics, bégaiement…Troubles psychosomatiques

2.3.5 Psychodrame
Le psychodrame est une forme de psychothérapie collective utilisant le jeu, la
représentation en acte et parole pour élucider et traiter certains processus psychiques
difficilement abordables autrement.

24
De plus en plus fréquemment proposée à toute catégorie d’individu...il peut être utilisé
en thérapie de groupe, familiale ou individuelle. Représentation théâtrale d’une
expérience vécue, Analyse en groupe de la problématique et des stratégies d’adaptation

Indications : Troubles anxieux, Troubles de la personnalité, Conduites addictives,


Troubles des conduites alimentaires

2.3.6 Thérapies institutionnelles


Les psychothérapies institutionnelles sont des applications dérivées de la psychologie
et des travaux de sociologie spontanée de psychiatres comme Georges DAUMEZON,
François TOSQUELLES, ….

Elles visent à utiliser l’ensemble des soignants et des intervenants d’une institution
d’une institution pour analyser et contenir le fonctionnement des patients les plus
graves, le plus souvent les psychotiques. Dans ce dispositif, le médecin reste dans une
neutralité qui lui permet d’analyser les interactions et les transferts émotionnels entre
les différents membres de l’institution et le patient. Une institution est un ensemble
social hiérarchisé, avec plusieurs niveaux de divisions du travail. Une institution
psychiatrique a pour particularité d’accueillir la pathologie psychique (en général
grave), ce qui a des répercussions sur les personnes y travaillant et sur le
fonctionnement collectif.

Objectifs :

- Rendre l’institution conforme à la finalité (de soins et de réinsertion) ;

- Eviter que l’institution ait des effets contraires ou aberrants ;

- Réguler le fonctionnement de l’institution afin de le rendre, si ce n’est


thérapeutique, du moins non toxique ;

- Modifier l’organisation de l’institution afin que la place, l’intégrité et le travail de


chacun soient respectés.

Bases théoriques

- Une institution a des répercussions sur les personnes y travaillants et sur le


fonctionnement collectif ;

- Le système hiérarchisé, la dynamique du groupe des soignants ont des effets


(positifs et négatifs) sur les patients.

Techniques

Outils

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- Réunions soignants/soignés et/ou soignants/soignants ;

- Les clubs intra et/ou extrahospitaliers comme les ateliers d’ergométrie mobilisant
les affects autour de la création ou encore les clubs de quartier à l’extérieur de
l’hôpital ;

- Groupes organisés spontanés comme les groupes de gestion, de contrôle


analytique, d’enseignements, de lecture, …

Activités

- Mettre en évidence les relations entre les patients et l’équipe soignante et les
conséquences pour les uns et pour les autres ;

- Analyser le rapport du personnel soignant avec l’institution ;

- Expliquer et améliorer le fonctionnement interactif au sein de l’institution.

Indications : pathologies psychiatriques les plus graves (psychoses chroniques),


situations après guerres ou catastrophes naturelles (tremblements de terre, tsunami,
inondations, …

Contre-indications : lors d’hospitalisations, pathologies psychiatriques aigues.

III- SOCIOTHERAPIE/REHABILITATION PSYCHOSOCIALE


3.1 Sociothérapie
3.1.2 Définitions

Par sociothérapie on entend toutes les formes d'activité de groupe organisées pour les
malades dans un but thérapeutique d'occupation, de réadaptation au travail,
d'amélioration ou de restauration des communications interpersonnelles. C'est l'une
des activités spécifiques des auxiliaires médicaux. Ils ont la possibilité d'initier, de
mener et de prescrire les activités socio-thérapeutiques en raison du rôle que leur confie
la législation. En psychiatrie, les activités sociothérapiques font partie du projet
thérapeutique individuel. Ces activités sont des soins à part entière nécessitant des
techniques particulières. Les activités sociothérapiques peuvent être à visée
occupationnelle et se définissent comme : « un ensemble d'actions offertes au malade
dans le cadre de sa prise en charge thérapeutique pour préserver ses capacités de vie
(travaux artisanaux, activités de la vie quotidienne, de culture ou de loisir). Elles
peuvent être à visée thérapeutique et se définissent comme : « un ensemble d'actions
inscrites dans un projet thérapeutique individualisé qui vise à conserver, développer ou
instaurer l'autonomie du malade et de ses capacités relationnelles, physiques, gestuelles
et/ou créatives »

26
3.1.3 Le patient face à l'activité

Le choix de la participation d'un patient à un groupe d'activités se fait en équipe


pluridisciplinaire sur proposition du ou des référents (de l'activité et/ou du patient).
Cette activité doit être adaptée aux besoins du patient, elle fait partie de la prise en
charge globale et continue de ce dernier. Le plus souvent, le soignant référent de
l'activité et le soignant référent du patient lui" proposent l'activité. L'expérience montre
que le soignant doit stimuler le patient et lui insuffler le désir de venir, de rester et de
participer. En effet, il semble utopique de penser qu'il suffit d'attendre l'émergence du
désir du patient ou de miser sur la dynamique du groupe pour que se mette en place
une activité. L'activité est médiatrice du soin, elle permet au patient, avec l'aide du
thérapeute, de mettre des mots sur certaines émotions, d'éprouver de la satisfaction à
dépasser ses appréhensions, à réaliser des objets, à être plus autonome. Enfin, l'activité
en individuel ou en groupe a pour objectif de faciliter la relation à l'autre dans un
cadre particulier, de rompre l'isolement et de créer du lien.

3.1.4 Le patient face au groupe

L'atelier peut être constitué :

- d'un groupe fermé, c'est-à-dire d'un groupe déterminé une fois pour toutes;

- d'un groupe semi-fermé, dans lequel peuvent s'intégrer des personnes


extérieures;

- d'un groupe ouvert à de nouveaux patients. Le nombre minimum et maximum


de patients pouvant s'intégrer au groupe sera prédéfini.

Le groupe a une fonction socialisante. Pour le patient, il est un lieu d'échanges


interindividuels dans un cadre particulier. Le groupe est un lieu de socialisation qui
implique une notion d'engagement du patient vis à vis des autres, engagement d'une
présence dans un cadre défini et d'une participation à une activité. Le rôle du soignant
est d'accompagner le patient en l'aidant à s'insérer dans le groupe, en observant son
comportement, en comprenant la place qu'il occupe et dans quelles circonstances.

Cadre et l'organisation

Quand les soignants désirent organiser une activité en groupe, ils doivent penser tout
d'abord au cadre. Il semble que l'activité elle-même, l'unité de lieu et de temps soient
importantes, néanmoins le cadre est garanti avant tout par le ou les soignants référents
de l'activité et du groupe.

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Les 7 critères que doit prendre en compte une activité :

Le temps : déterminer le rythme des séances, leur durée, la durée d'une session et ses
éventuelles coupures durant les vacances des référents. En effet, l'équipe peut décider
qu'il est nécessaire qu'il existe une coupure dans le temps, structurante pour les patients
car elle pointe le manque ou le fait que la continuité est indispensable.

Le lieu : Prévoir une salle adaptée et disponible pour réaliser l'activité en groupe,
l'existence d'une salle de sport, la proximité d'une piscine, etc. Parfois « être obligé » de
changer de lieu, de modifier les horaires si les raisons en sont données aux patients,
permet une ouverture, une verbalisation et surtout de repositionner le cadre. Une
exception est faite pour les ateliers qui s'adressent aux patients atteints de troubles
cognitifs : pour eux l'unité de lieu et de temps est un repère indispensable.

La médiation utilisée : L'impact recherché tant sur un plan relationnel qu'au niveau de
la tâche à réaliser : les objectifs globaux de l'activité et les objectifs individualisés à
chaque patient ; Le public auquel elle s'adresse; Les référents de cette activité
(profession, formations complémentaire) ; la procédure d'évaluation et de transmission
qu'est-ce que j’observe ? qu'est-ce que je mets par écrit ?

L'impact recherché : entrer en relation avec un patient taciturne qui se livre peu, qui
exprime un sentiment de persécution, recueillir des données autour de sa façon de
jouer, de se référer à la règle du jeu, de supporter une relation brève autour d'un jeu de
société, référence au besoin de communiquer et de se divertir.

Diagnostique infirmier : isolement social lié à la crainte d'une intrusion de l'autre dans
son espace intérieur.

Le public : un patient persécuté, renfermé sur lui-même.

Les référents de cette activité : infirmier référent du patient.

La procédure d'évaluation et de transmission : cf impact recherché.

3.2 Réhabilitation psychosociale

3.2.1 Définitions

La Réhabilitation Psychosociale s’est développée aux USA après la 2éme guerre


mondiale comme une alternative sociale au modèle médical dominant dans le
traitement des patients psychiatriques. Elle est définie comme un " processus qui
facilite le retour d’un individu à un niveau optimal de fonctionnement autonome dans
la communauté ". Elle met l’accent sur l’intégrité et les forces de l’individu plutôt que

28
sur sa maladie et propose une approche globale incluant la réadaptation au travail, le
logement, les loisirs sociaux, l’éducation et l’adaptation personnelle (Cnaan, 1998). Elle
est un ensemble de pratiques " en attente de théorie "(Saraceno dans Vidon, 1995).

Pour Marianne Farkas, chercheuse et directrice du Centre de Réhabilitation


Psychosociale de l’OMS de Boston, la réhabilitation psychosociale est « la somme des
actions à développer pour optimiser les capacités persistantes d’un sujet et atténuer les difficultés
résultant de ses conduites déficitaires ou anormales. Son but est d’améliorer le fonctionnement de
la personne et qu’elle puisse remporter des succès et éprouver des satisfactions dans un milieu de
son choix et avec le moins d’interventions professionnelles possibles ». Marianne Farkas dans
cette définition apporte des éléments fondamentaux. Elle considère qu’il est nécessaire
de partir des besoins de l’usager, en pointant ses capacités et ses difficultés, en adaptant
la prise en charge au projet de vie souhaité afin d’améliorer le fonctionnement mais
aussi l’estime de soi de la personne.

Le Dr Gilles Vidon, membre du Congrès Français pour la Réhabilitation Psychosociale


va plus loin, dans la définition qu’il propose. Au-delà des pratiques spécifiques de ce
champ, il pointe : « la participation réelle des malades aux échanges de la société », en
resituant la place de l’usager par un « accès à la citoyenneté totale politique, juridique et
économique ». Il traite également de la stigmatisation de « la société à l’égard des malades
mentaux » en expliquant qu’il est nécessaire de mettre en place des actions de
déstigmatisation. Cette définition redonne sa place à l’usager dans la société. Il a un rôle
d’acteur de ses soins, une place de citoyen et lutter contre la stigmatisation permet(tra)
de réduire la souffrance et les difficultés des usagers face à l’image qu’a la société des
personnes souffrant de troubles psychiques.

En France, il existe une difficulté de traduction. Il n’est pas rare d’entendre réadaptation
psychosociale, réinsertion psychosociale. En réalité, la réhabilitation psychosociale est
l’association de la réadaptation« l’ensemble des mesures ayant pour objet de rendre au
malade ses capacités antérieures et d’améliorer sa condition physique et mentale, lui permettant
d’occuper par ses moyens propres une place aussi normale que possible dans la
société (Organisation Mondiale de la Santé) » et de la réinsertion« processus permettant
l'intégration d'une personne au sein du système socio-économique par l'appropriation des
normes et règles de ce système ».

Au final, Alain Cochet, membre du Congrès Français pour la Réhabilitation


Psychosociale, synthétise, dans sa définition, la réhabilitation psychosociale comme :
« ensemble d’un processus de prise en charge du patient, de la crise initiale jusqu’à la reprise de
vie la plus « normale possible », c’est-à-dire avec le moins d’intervention des professionnels et le
retour au plus proche de l’insertion initiale » en pointant le projet de soin puis le projet de
vie de la personne.

29
3.2.2 Les grands principes de la réhabilitation psychosociale

Pour le Docteur Ram Cnaan, de l’université de Pennsylvanie, la Réhabilitation


Psychosociale repose d’abord sur deux postulats :

- Il existe en chaque individu une motivation à développer maîtrise et compétence


dans des domaines de la vie qui vont lui permettre de se sentir indépendant et
confiant en lui-même.
- De nouveaux comportements peuvent être appris et les individus sont capables
d’y avoir recours et de les adapter pour répondre à leurs besoins de base.

Les grands principes sont au nombre de 13 :

1er principe : L’utilisation maximale des capacités humaines (Full Human Capacity)

Chaque personne est capable d’améliorer son niveau de fonctionnement. La vie est un
processus de croissance et de changement et chaque individu, même sévèrement
handicapé, est capable de croissance et de changement. C’est de la responsabilité des
professionnels de développer le niveau d’attentes que les patients ont pour eux-mêmes,
de les aider à se percevoir comme capable de progrès et de les soutenir dans ce
processus de croissance. Il convient pour cela d’exploiter les forces de la personne, de
travailler avec les parties saines de son Moi.

2ème principe : Doter les personnes d’habiletés (Equipping People with Skills)

C’est la présence ou l’absence d’habiletés (sociales et instrumentales), et non la


disparition des symptômes cliniques, qui est le facteur déterminant dans le succès de la
réhabilitation. Apprendre ou réapprendre les habiletés élémentaires pour agir dans un
environnement social, vivre de façon indépendante, garder un emploi, etc., vont être les
objectifs du traitement. Les difficultés sont dès lors appréhendées sous l’angle
comportemental, en termes de déficits ou d’excès comportementaux.

3ème principe : L’auto-détermination (Self-Determination)

Les personnes ont le droit et la capacité de participer à la prise de décisions concernant


leur vie. Il ne s’agit donc pas de faire les choses dans le meilleur intérêt de la personne,
mais de lui permettre de prendre ses décisions et d’apprendre au travers des
conséquences de ses choix. L’auto-détermination des personnes devraient concerner
également la gestion des programmes de réhabilitation auxquels elles participent.
L’auto-détermination implique également que la personne soit pleinement informée sur
sa maladie, ses conséquences et sur les possibilités de traitement.

4ème principe : La normalisation (Normalization)

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Il s’agit de permettre aux personnes souffrant de maladie mentale de vivre et de
fonctionner dans les mêmes lieux que les autres (logements, loisirs, éducation, travail)
ou en tout cas dans les lieux les moins restrictifs possibles. Ce principe s’oppose à la
ségrégation. L’objectif idéal de la réhabilitation psychosociale est une vie indépendante
dans la communauté avec le minimum de soutien professionnel.

5ème principe : L’individualisation des besoins et des services (Differential Needs


and Care)

Chaque personne a des besoins propres. En conséquence, le processus de réhabilitation


doit être individualisé pour ce qui est des services, de leur durée, de leur fréquence, etc.
C'est du sur-mesure et non pas une action globalisante pour l'ensemble des patients au
long court.

6ème principe : L’engagement des intervenants (Commitment of Staff)

Engagement personnel des intervenants qui sont soucieux du bien-être de la personne


et qui ont foi dans ses capacités de progresser. Les intervenants prennent l’initiative de
garder le contact avec les personnes (coup de téléphone, visite à domicile) pour limiter
les abandons et montrer qu’ils se soucient d’elles.

7ème principe : La déprofessionnalisation de la relation d’aide


(Deprofessionnalization of Service)

Les intervenants ne doivent pas se cacher derrière une couverture professionnelle. Les
barrières artificielles doivent être enlevées. L’élément humain de la personne de
l’intervenant est crucial dans le processus de réhabilitation. De même les intervenants
doivent appréhender la personne comme un être humain avec toutes ses dimensions
plutôt que sous l’angle d’un seul type de service. Une attitude de "neutralité" ne
convient pas. L’intervenant répond, de façon positive ou négative, à ce que la personne
dit ou fait, même au sujet de problèmes non-thérapeutiques.

8ème principe : Intervenir précocement (Early Intervention)

Il est essentiel d’intervenir le plus précocement possible dès les premiers signes avant-
coureurs de rechute ou de dysfonctionnement. Le but est d’éviter les rechutes et les
réhospitalisations et de préserver les acquis en compétences et en liens sociaux (travail,
logement, contacts sociaux,...).

9ème principe : Structurer l’environnement immédiat (Environnemental Approach)

Les interventions doivent viser à structurer l’environnement immédiat de la personne


(la famille, réseau social, milieu de vie, de travail,...) pour qu’elle puisse en obtenir un
maximum de soutien.

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10ème principe : Changer l’environnement plus large (Changing the Environment)

Une partie des interventions doit viser à changer l’environnement plus large de la
personne, c’est-à-dire les attitudes et les modes de fonctionnement d’une société qui
peuvent nuire à l’adaptation de personnes souffrant de maladie mentale sévère
(informer le public, modifier les services médicaux, les structures d’accueil,...).

11ème principe : Pas de limite à la participation (No limits on participation)

La réhabilitation psychosociale est un processus continu qui nécessite continuité des


soins et du soutien et qui doit être constamment revu en fonction de l'évolution. Il
importe de ne pas suspendre les services de réhabilitation en cas d’hospitalisation. S’il
n’y a pas de limite de temps, il convient aussi de mettre le moins possible de critères de
sélection pour l’entrée dans un programme.

12ème principe : La valeur du travail (Work-Centered Process)

La Réhabilitation Psychiatrique soutient la conviction que le travail, et spécialement


l’opportunité d’aspirer et de se réaliser dans un emploi rémunéré, est un besoin et une
force d’intégration pour tout être humain. Il faut garder une foi dans le potentiel de
productivité des personnes même lourdement handicapée par la maladie mentale. Il
s’agit d’envisager un travail intégré dans la réalité sociale, pas forcément un emploi
temps plein, mais des emplois souples, diversifiés tout en restant compatibles avec les
besoins des employeurs.

13ème principe : Priorité au social par rapport au médical (Social Rather Than Medical
Supremacy)

Il s’agit de dépasser le modèle médical traditionnel : maladie, diagnostic, réduction des


symptômes par les médicaments, le savoir médical qui sait ce qui est juste pour le
patient, etc., pour favoriser une approche globale de la personne centrée sur son
autodétermination, sur ses capacités, sur l’apprentissage d’habiletés, sur la mobilisation
de son environnement social propre. Dans cette dynamique, le médical doit pouvoir
s’effacer tout en restant disponible, pour laisser la place à d’autres acteurs sociaux. Ces
grands principes de la Réhabilitation Psychosociale sont pour nous qui travaillons en
psychiatrie une invitation à sortir d’un modèle médical étroit et à nous ouvrir à un réel
partenariat avec le patient, son entourage direct et l’ensemble des ressources
professionnelles et non-professionnelles de son environnement.

3.2.3 Les approches mobilisées dans le champ de la réhabilitation psychosociale

Dans un premier temps, l’approche fondamentale et primordiale est le diagnostic de


réhabilitation psychosociale. Il permettra d’évaluer les besoins, les problèmes, les
ressources des personnes et de définir, avec l’usager, le parcours de réhabilitation
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psychosociale à mettre en œuvre. Différents champs d’évaluations peuvent être
proposés tels que l’évaluation de l’autonomie sociale, de la conscience des troubles de la
maladie (insight), de la qualité de vie, de l’estime de soi … L’évaluation a lieu au début
et tout au long du parcours. Une synthèse de ce diagnostic de réhabilitation sera
effectuée avec l’usager et des objectifs seront ciblés.

Dans un second temps, l’usager bénéficiera tout au long de sa prise en charge, avec son
accord, d’une ou plusieurs approches, en lien avec les objectifs visés. À ce jour, il n’y a
pas d’étude stipulant par quelle approche débuter le parcours de réhabilitation.
L’important est de partir des besoins et des souhaits de prise en charge de l’usager afin
de développer une accroche, une alliance thérapeutique. Il n’est pas rare, pour de jeunes
usagers qui présentent un déni de leurs troubles, de proposer des stratégies spécifiques
comme la remédiation cognitive ou l’entrainement aux habiletés sociales utilisant le
sport comme support de médiation. Mais chaque usager est différent de par sa
pathologie, sa symptomatologie et ses difficultés. Par conséquent, chaque prise en
charge est différente. Nous avons pris le parti de pointer trois approches : l’Éducation
Thérapeutique du Patient, la remédiation cognitive et l’entrainement aux habiletés
sociales.

3.2.3 L’Éducation Thérapeutique du Patient (ETP)

Modèle s’appuyant « sur une conception biopsychosociale de la santé centrée sur les
soins où l’éducation thérapeutique est au cœur de cette conception pour développer le
processus d’observance, le coping, l’alliance avec le patient ainsi que l’intégration d’un
savoir-faire à partir de procédures de soins (Jean-Marie Revillot). Cette conception
permet au patient de se constituer comme sujet parce que l’urgence vitale est gérée et
qu’il s’agit alors de construire un projet de soin avec lui. Modèle médical (centré sur la
maladie), modèle psychologique (centré sur le bien-être), modèle psychosocial (centré
sur le développement), avec hétérogénéité des approches modélisées par trois champs
d’interventions : l’intervention comportementaliste centrée sur les connaissances et les
acquisitions, l’intervention constructiviste centrée sur la connaissance de soi du patient
et l’intervention socioconstructiviste centrée sur les potentialités du groupe. En fonction
de l’approche, l’ETP travaille des visées différentes et la pédagogie diverge. La position
du patient évolue au fur et à mesure du processus d’éducation passant d’objet de soin
(modèle biomédical) à co-créateur (modèle biopsychosocial) à sujet dans sa vie (modèle
biopsychosocial développemental). Dans cette dernière visée, on est proche des
conceptions exposées sur la réhabilitation psychosociale. L’ETP ne peut que se situer
dans une notion plurielle celle d’enseigner, de former, nourrir, développer des
capacités, accompagner le patient dans la construction d’un projet de soin, d’un projet
de vie dans un processus de changement.

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La Haute Autorité de Santé (HAS) en France propose une planification de l’ETP en 4
étapes : élaboration d’un diagnostic éducatif, la définition d’un programme d’éducation
thérapeutique du patient avec des priorités d’apprentissage, la planification et la mise
en œuvre des séances d’éducation thérapeutique du patient en groupe et/ou en
individuel, ainsi que la réalisation d’une évaluation des compétences acquises et du
déroulement du programme. L’ETP est encadrée par des injonctions législatives
décrivant les compétences à acquérir et à valider pour dispenser l’ETP et pour
coordonner et accompagner les équipes ainsi les programmes à mettre en œuvre ratifiés
par les Agences Régionales de Santé.

3.2.4 La remédiation cognitive

« Ensemble des techniques rééducatives visant à restaurer les fonctions cognitives défaillantes
(mémoire, attention, fonction exécutive, cognition sociale) » (Nicolas Franck). Son efficacité
ayant été démontrée par une amélioration des fonctions déficitaires, de la
symptomatologie, de l’estime de soi, de l’adaptation sociale et de la réinsertion
professionnelle. Selon différentes études (Heinrichs et Zakzanis, 1998, Aleman et al,
1999), 70 à 80% des patients souffrant de schizophrénie, présentent des troubles
cognitifs. Les troubles cognitifs associés aux symptômes ont pour conséquences un
isolement social et une baisse de l’estime de soi. Avant de débuter une prise en charge
en remédiation cognitive, en préambule, il est nécessaire d’effectuer un bilan
neuropsychologique. Ce bilan permet de dégager le profil cognitif de chaque usager en
pointant leurs points faibles et leurs points forts. Différents outils individuels ou
groupaux, ayant fait l’objet de validation scientifique, existent. La remédiation cognitive
s’appuie sur le développement, par l’usager, de stratégies alternatives permettant de
contourner une difficulté, un apprentissage sans erreur et une valorisation tout au long
de la prise en charge. Il est proposé à l’usager des tâches à effectuer à domicile lui
permettant de mettre en œuvre des stratégies spécifiques. Il est également possible de
mettre en place de la remédiation cognitive en milieu écologique c’est-à-dire
directement dans la vie quotidienne de l’usager comme par exemple, lorsque l’usager
prend les transports en commun, effectuer ses courses, un repas. L’idée étant de
l’observer dans ces tâches de la vie quotidienne qu’il juge difficiles et ensuite, pouvoir le
faire verbaliser une stratégie alternative lui permettant de contourner une difficulté et
ensuite qu’il puisse la tester pour voir si elle est plus efficace.

3.2.5 L’Entraînement aux Habiletés Sociales (l’EHS)

« Comportements verbaux et non-verbaux résultant de processus cognitifs et affectifs


qui permettent de s’ajuster à la vie dans la communauté (Jérôme Favrod et Lucien
Barrelet). C’est l’ensemble des capacités spécifiques qui nous permettent de répondre à
une situation sociale de façon jugée compétente ». Il existe trois habiletés sociales : Les

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habiletés réceptives (capacités à percevoir et à comprendre les différents paramètres
d’une interaction sociale), les habiletés décisionnelles (capacités à trouver une réponse
appropriée à une situation sociale donnée après avoir envisagé les alternatives
possibles) et les conséquences de celles-ci, les habiletés émettrices (capacités à adopter
une réponse comportementale adaptée : verbal et non-verbal : posture, ton,
mimiques…).

Différents outils d’entraînement aux habiletés sociales existent et améliorent


spécifiquement les habiletés travaillées. L’EHS permet une amélioration du
fonctionnement social de l’usager, une atténuation du stress, un sentiment d’efficacité
personnelle, développe la confiance et l’estime de soi.

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