Vous êtes sur la page 1sur 9

1 - L'EAU DANS L'ENVIRONNEMENT MINIER

Depuis toujours, l'eau joue un rôle important dans l'activité minière. Elle
est indispensable au traitement du minerai et, déjà au Ve siècle avant J.-C., les
exploitants de la galène argentifère de la mine de Laurium, en Grèce, prenaient
soin de la recycler pour en réduire la consommation (Troly, 1996). Aujourd'hui,
la flottation est le procédé le plus couramment utilisé pour enrichir les minerais

sulfurés. Cette technique consomme, avec recyclage, entre 1.2 et 1.5 m 3 d'eau par
tonne de minerai. Ainsi, une mine de capacité égale à 30 000 tonnes/jour doit

s'assurer un approvisionnement en eau de l'ordre de 1 600 m 3/heure durant


toute l'exploitation. Pour des raisons économiques, le minerai ne peut être
transporté loin de son lieu d'extraction à l'état brut et, lorsque l'eau est absente
sur le site, il est indispensable de s'en procurer ailleurs et de l'acheminer jusqu'à
la station de traitement du minerai. En zone désertique, l'alimentation en eau
constitue donc une part non négligeable des frais d'exploitation.

En zone tempérée, l'eau est plus souvent abondante qu'absente. Si le


minerai à extraire est localisé sous le niveau hydrostatique, il est nécessaire de
pomper l'eau : c'est l'exhaure. Les premiers systèmes d'exhaure ont été mis en
place à l'ère romaine. Ils ont ensuite été développés durant tout le Moyen-Age.
Techniquement, l'exhaure n'est plus un problème aujourd'hui.

Cependant, en plus du coût financier qu'il représente, l'exhaure a des


conséquences importantes sur l'environnement. L'activité minière perturbe en
effet l'équilibre hydrogéologique qui prévalait sur le site.

1.1 - Avant l'exploitation : un système hydrogéologique en équilibre


Un système hydrogéologique est caractérisé à la fois par son
hydrodynamique, qui définit les écoulements (débit, type,…), et sa géochimie,
i.e. : la composition chimique de son eau. Dans ce système, les aquifères sont
alimentés par l'infiltration des eaux de surface qui y circulent jusqu'aux
exutoires (sources, rivières, captages…). Au cours de ce déplacement, l'eau
interagit chimiquement avec le milieu rocheux. Ceci se traduit par une
évolution de sa composition chimique, qui dépend de la nature des roches et du
temps de contact eau/roche. L'eau superficielle est le plus souvent oxydante et a
de faibles concentrations en ions et un pH variable. Evoluant en milieu
anoxique, l'eau profonde est en général réductrice (e.g. : Toulhoat, 1996) et
équilibrée avec des phases minérales secondaires. Avant toute activité minière,
le système hydrogéologique se trouve dans un état d'équilibre global, que ce soit
d'un point de vue hydrodynamique ou géochimique (fig.0.1).
Figure 0.1. Avant l'exploitation : un système à l'équilibre

1.2 - L'exploitation minière : rabattement des nappes et conditions


oxydantes

• Un impact hydrodynamique…

L'exploitation minière perturbe l'équilibre hydrogéologique. Lorsque le


niveau minéralisé se situe en dessous de la surface piézométrique de la nappe, il
est indispensable de rabattre cette surface jusqu'au niveau de l'exploitation. A
cet effet, un pompage permanent de l'eau de la nappe est mis en place : c'est
l'exhaure (fig. 0.2). L'abaissement de la surface piézométrique entraîne alors un
déficit de l'alimentation en eau des exutoires naturels ou artificiels voisins. L'eau
pompée peut être utilisée, selon les cas, pour l'alimentation en eau potable,
l'utilisation industrielle ou être rejetée dans des cours d'eau voisins, modifiant
de manière artificielle leur débit. Par ailleurs, l'utilisation d'explosif entraîne des
fissurations du toit et du mur de la formation exploitée et peut ainsi créer de
nouvelles connections hydrauliques. Les travaux miniers sont donc à l'origine
d'une modification du régime hydrodynamique général.

Figure 0.2. Impact hydrodynamique de travaux miniers


• … et géochimique

L'exhaure amène au contact de l'atmosphère, et sans dilution, des eaux


profondes dont la nature chimique peut poser des problèmes de rejet dans
l'environnement, comme par exemple du fer dissous qui précipitera dans les
conditions oxydantes de la surface (e.g. : Ledoux, 1996). Les matériaux des
mines à ciel ouvert et des carrières sont par définition soumis aux conditions
atmosphériques et vont donc réagir selon les nouveaux paramètres
d'hygrométrie et de potentiel d'oxydoréduction. Dans le cas des exploitations
souterraines, l'ouverture des galeries minières crée des conduits susceptibles
d'apporter de l'eau et de l'oxygène au contact du minerai (fig. 0.3). Couplée au
rabattement du niveau piézométrique engendré par l'exhaure, cette situation
provoque l'apparition de conditions oxydantes, là où le milieu était réducteur.
Les interactions eau/roche s'en trouvent modifiées et il y a formation de
nouveaux minéraux.

Roches denoyéesRoches denoyéesRoches denoyées

- 22 - Introduction
On désigne par drainage minier, la génération d'effluents dont la qualité
diffère de celle de l'eau d'origine pendant l'activité minière et/ou à son abandon.

Enfin, l'activité minière génère des déchets solides de diverses sortes :


encaissants parfois relativement riches en sulfures (stériles francs), minerais
pauvres en sulfures (haldes, stériles de sélectivité) et rejets de traitement
pauvres en métaux précieux mais riches en sulfures. Les quantités produites et
stockées peuvent atteindre plusieurs millions de tonnes. Ces matériaux rocheux,
brusquement placés en conditions oxydantes, sont lessivés par les pluies. Ce
phénomène a pour conséquence l'apparition d'effluents à forte charge acide
et/ou polluante : c'est le premier type de drainage minier.
Figure 0.3. Les conséquences de l'exploitation minière

1.3 - L'après-mine : vers un nouvel équilibre


hydrogéologique

• La remontée de la nappe

Après l'abandon de l'exploitation, l'arrêt des pompages d'exhaure


entraîne l'ennoyage des galeries ou de la fosse. Certains circuits hydrauliques
anciens et exutoires naturels sont réactivés, tandis que les vides créés par
l'exploitation peuvent générer des courts-circuits hydrauliques, provoquant
l'apparition de nouveaux exutoires. Le régime hydrologique général est modifié
et évolue vers un nouvel état d'équilibre, différent de celui qui existait avant
l'exploitation (fig. 0.4).

• Le drainage minier
D'un point de vue chimique, l'ennoyage entraîne la dissolution des
minéraux néoformés lors de l'exploitation, souvent riches en métaux. Ainsi, à la
reprise des écoulements naturels, l'eau présente généralement une composition
chimique différente de celle d'origine et a une qualité souvent incompatible avec
ses utilisations antérieures ou avec un rejet direct dans l'environnement. C'est le
second type de drainage minier que l'on rencontre (fig. 0.5). La qualité de l'eau
s'améliore d'abord rapidement (quelques mois à quelques années) puis, plus
lentement (quelques dizaines à quelques centaines d'années), le plus souvent
avec le retour des conditions réductrices. La qualité finale dépend des
conditions locales (hydrodynamique et paragenèse minérale).

Figure 0.4. Apparition d'un nouveau régime hydrodynamique


après l'abandon des exploitations
Figure 0.5. Le drainage minier

Vous aimerez peut-être aussi