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Faculté des Lettres et des Sciences Humaines 2019-2020

Département de Langue et Littérature Françaises

Histoire de la littérature et de l’art XVIIe-XVIIIe siècles

S2 – G 3-5

Pr. A. Fennane

Le XVIIIe siècle

I- Le contexte politique

Ce qu’on appelle le siècle des Lumières commence en 1715 et finit en


1793. Siècle marqué particulièrement par un changement du régime
politique : passage de la monarchie à la république (la Révolution
française en 1789), et par un nouvel esprit, les Lumières défendant la
liberté, l’amour de la raison, la tolérance… Ces idées qui ont été
préparées par la philosophie de Descartes critiquant le dogmatisme
(seule la raison peut décider ce qu’est le Bien et de ce qu’est le Mal) et
par les analyses de Jean La Bruyère de sa société dans Les Caractères
(voir notamment chapitre « De la cour »).
Si le XVIIe siècle a été le siècle de la stabilité politique, de la prospérité
économique et de l’autorité absolue incarnée dans Louis XIV, le XVIIIe
siècle a été caractérisé par une instabilité qui a commencé avec la fin du
règne de Louis XIV. Trois moments indiquent cette nouvelle situation qui
va conduire à la fin de l’Ancien Régime (XVIe siècle-1789) :

- La régence (1715-1723) :

C'est une nouvelle époque qui commence après la mort de Louis XIV,
en 1715. Son neveu, Philippe d'Orléans, deviendra régent. Cette
situation va contribuer au relâchement de l’autorité et de l’absolutisme
que représentaient le Roi-Soleil, à la libération des esprits.

- Le règne de Louis XV (1723-1774) :

Louis XV monte sur le trône à l'âge de 13 ans (âge de la majorité), mais


lors des premières années de son règne, ce sont le duc de Bourbon,
puis le cardinal de Fleury qui dirigent le pays. Il gagne la confiance de
son peuple grâce à ses succès militaires pendant les guerres contre les
Autrichiens, vers 1740. Mais sa décision de leur rendre leurs terres
(Traité d'Aix-la-Chapelle) en 1748 lui fait perdre sa popularité. En 1757, il
a été l’objet d’une tentative d'assassinat. Il meurt dans une quasi
indifférence le 10 mai 1774.

- Le règne de Louis XVI (1774-1793) :

Louis XVI accède au trône en 1774, alors qu'il est encore adolescent.
Malgré ses succès politiques (l'alliance avec l'Autriche et son mariage
avec Marie-Antoinette
qui le conduisent à la victoire contre les Anglais en 1783), la
France commence à être influencée par les idées républicaines. Des
difficultés financières apparaissent et les paysans commencent à
protester contre l'augmentation des impôts. Ce qui mène à une crise
économique, sociale et financière. En 1789 le
peuple se révolte (prise de la Bastille, juillet 1789, suivie de la prise des
Tuileries le 10 août 1792). Louis XVI est guillotiné le 21 janvier 1793
ainsi que
sa femme, Marie-Antoinette, le 16 novembre 1793. La Révolution
française marque la fin de l’Ancien Régime représentée par la
monarchie.

II- Les Lumières :

« Accéder aux Lumières consiste pour l’homme à sortir de la


minorité où il se trouve par sa propre faute. Être mineur, c’est être
incapable de se servir de son propre entendement [esprit/raison]
sans la direction d’un autre […] Aie le courage de te servir de ton
propre entendement ! Telle est la devise des Lumières. »,
Emmanuel Kant, Qu’est-ce que les Lumières ?, traduit de
l’allemand par Jean-Michel Muglioni, Éditions Hatier, Paris,
1999, p. 4.

Il y a un avant-les-Lumières et un après-les-Lumières. Le premier


moment correspond à ce que Emmanuel Kant appelle la « minorité ».
C’est une minorité de l’esprit où l’homme parce qu’il n’a pas le courage
moral, parce il s’est habitué à être soumis, manipulé, guidé par les
autres, ne veut pas penser par lui-même. Il agit et réagit par des
« préjugés » plutôt que par la raison. Il s’est habitué à vivre sous
l’oppression et dans l’obéissance aveugle aux lois, à la religion, aux
valeurs de la société, etc. Il s’est habitué à vivre sous la tutelle.
Le deuxième moment, celui de l’après-les-Lumières, est celui où
l’homme découvre progressivement la raison, la liberté, dépasse sa peur
de penser et de laisser les autres décider pour lui. C’est le passage de la
« minorité » vers la « majorité ». Ce passage ne se fait pas du jour au
lendemain. C’est un long processus. Ce n’est pas une révolution (un
changement brusque) mais une lente réforme.

Sur la masse de la société (dans un pays) ou du genre humain dans sa


globalité, seules quelques personnes sont capables de vivre cette
évolution. Cette minorité ont un devoir : propager les Lumières.
Cette minorité est formée par quelques savants et quelques prêtres qui
deviennent des éclaireurs pour le les autres. Il faut préciser que le mot
allemand « Aufklärung » qu’on a traduit par Lumières veut dire
exactement « propagation des Lumières » plutôt que Lumières. C’est
comme une flamme ou une lampe dont la lumière se propage au fur et à
mesure dans un espace jusqu’à éclairer tous ses coins sombres. Pour
propager les idées des Lumières, Emmanuel Kant souligne l’importance
de la transmission et du débat. Mais pour cela, il faut un facteur
déterminant à savoir la liberté. Emmanuel Kant distingue à ce sujet deux
usages de la raison : l’ « usage public » et l’ « usage privé ». L’usage
privé de la raison c’est celui qu’on fait dans un cercle réduit (la classe, la
famille, le milieu du travail, l’église…). L’usage public c’est celui qui
s’adresse au public. D’où l’importance de la publication (les livres).
Moyen de rendre public ses livres, de les partager avec un grand public
et de les faires circuler et de les soumettre à la discussion. Mais sans
liberté, toute cette chaîne ne peut pas fonctionner. Les Lumières se
réalisent par l’usage public libre de la raison.

La liberté de la circulation des écrits (livres, publications dans la


presse…) est le garant principal de la progression vers les Lumières. Il
ne s’agit pas de rejeter les institutions (État, Église, Famille…) ; il s’agit
de les améliorer. Par les écrits des savants éclairés parmi la société, les
autres membres de cette même société commencent à réfléchir et à
critiquer pour améliorer les choses (c’est-à-dire les réformer). Mais pour
que cette liberté de l’esprit existe, il faut que le Chef d’État soit favorable
aux Lumières. C’est à cette condition qu’il pourrait protéger les quelques
éclaireurs qui veulent aider les hommes, avec leurs idées et grâce aux
débats qu’ils provoquent, à sortir de la minorité vers la majorité, c’est-à-
dire vers l’état de la pensée libre.

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