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COÛTS DE LA RIPOSTE VACCINALE CONTRE LA FIÈVRE JAUNE À

ABIDJAN, 2001
Pétronille Zengbé-Acray, Alfred Douba, Youssouf Traoré, N’cho Simplice Dagnan,
Harvey Attoh-Touré, Kouadio Daniel Ekra

S.F.S.P. | « Santé Publique »

2009/4 Vol. 21 | pages 383 à 391


ISSN 0995-3914
Article disponible en ligne à l'adresse :
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Pour citer cet article :
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Pétronille Zengbé-Acray et al., « Coûts de la riposte vaccinale contre la fièvre jaune
à Abidjan, 2001 », Santé Publique 2009/4 (Vol. 21), p. 383-391.
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DOI 10.3917/spub.094.0383
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Coûts de la riposte vaccinale
contre la fièvre jaune à Abidjan, 2001
Estimated operational costs of vaccination campaign
to combat yellow fever in Abidjan
Pétronille Zengbe-Acray (1), Alfred Douba (1), Youssouf Traore (1),
Simplice Dagnan (1), Harvey Attoh-Toure (1), Daniel Ekra (1)

Résumé : Nous avons réalisé une étude de coûts dont l’objectif principal était d’évaluer
les coûts opérationnels de la riposte vaccinale contre la fièvre jaune organisée à Abidjan du
21/09/2001 au 02/10/2001. Le point de vue adopté était celui des autorités sanitaires. La
collecte des données a consisté à recueillir de manière rétrospective toutes les informations

ÉTUDES
concernant les ressources utilisées ou activités. La valorisation monétaire des ressources
s’est faite à l’aide de pièces justificatives.
La couverture vaccinale obtenue était de 91,33 % ; 2 584 360 doses de vaccin ont été
administrées. Les dépenses en vaccins et consommables de vaccins s’élevaient à
1 123 177 128 FCFA ; le coût moyen par dose administrée était de 539,40 FCFA.
2 590 personnes ont été mobilisées pour un coût total de 125 678 400 FCFA. Le coût
opérationnel total de la riposte vaccinale était de 1 394 010 829 FCFA. Les vaccins et les
consommables représentaient le premier poste de dépenses, soit 80,57 %.
Les résultats de cette étude pourraient servir d’outil d’aide à la décision en matière de
financement d’une campagne de vaccination. La prise en compte de ces résultats pourrait

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contribuer à la mise en place de stratégies visant à amoindrir le coût opérationnel d’une
riposte vaccinale.
Mots-clés : Évaluation - coût opérationnel - riposte vaccinale - fièvre jaune - Côte d’Ivoire.
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Summary: A cost effectiveness study was conducted with the main objective to assess the
operational costs of a vaccination campaign against yellow fever organised and implemented
in Abidjan from September 21st to October 2nd, 2001. The study was carried out from the
perspective of the health authorities. Data was collected retrospectively on all information
related to resources needed and required activities. The justification of the monetary value of
resources was provided with written proof and receipts as well as other supporting
documents. The coverage achieved was 91.33% with 2 584 360 doses of vaccine having been
administered. Spending on vaccines and vaccine supplies amounted to 1 123 177 128 FCFA;
the average cost per dose was 539.40 FCFA. Human resource costs amounted to 2590 people
who were mobilized for a total cost of 125 678 400 FCFA. The total operational cost of the
vaccination campaign was 1 394 010 829 FCFA. Vaccines and supplies were the largest item of
expenditure, or 80.57% of the total spent. The results of this study could serve as a tool for
decision-making related to funding a vaccination campaign. Taking account of these results
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could contribute to the development of strategies to effectively reduce the operational cost of
a vaccination campaign.
Keywords: Evaluation - operational cost - vaccination campaign - yellow fever - Côte d’Ivoire.

(1) Département de santé publique, médecine communautaire et informatique médicale, UFR des Sciences
Médicales de l’Université d’Abidjan Cocody, Côte d’Ivoire. 06 BP 6502 Abidjan 06 République de Côte d’Ivoire.

Correspondance : P. Zengbe-Acray Réception : 10/10/2008 – Acceptation : 12/03/2009


384 P. ZENGBE-ACRAY, A. DOUBA, Y. TRAORE et al.

Introduction
En mars 2001, une épidémie de fièvre jaune a débuté à l’Ouest de la Côte
d’Ivoire, dans les districts sanitaires de Danané, Duékoué et Gagnoa puis s’est
étendue à la ville d’Abidjan située au Sud-est du pays [2]. Sur les 62 districts
sanitaires que comptait le pays, 11 ont été atteints avec un total de 280 cas
suspects dont 30 confirmés et 3 décès. A Abidjan, les premiers cas furent enre-
gistrés en Juin 2001 : 31 cas suspects dont 7 confirmés et 6 décès. L’épidémie
urbaine constitue une véritable hantise du fait de sa létalité élevée [9]. Ainsi,
une riposte vaccinale a été menée par les autorités sanitaires en collaboration
avec les partenaires au développement (principalement l’OMS et l’UNICEF) en
vue de rompre la chaîne de transmission et d’empêcher l’extension de l’épidé-
mie dans la ville d’Abidjan. Une telle campagne nécessite d’énormes moyens
humains et matériels engendrant des coûts financiers.
En effet, les campagnes sont généralement considérées coûteuses, ce qui
pourrait constituer un frein à l’appui financier des partenaires au dévelop-
pement. Dans toute intervention de santé de ce genre, le pays concerné ne
peut à lui seul supporter les dépenses y relatives si bien que la contribution
extérieure est toujours souhaitable. Or, très peu d’études évaluant les coûts
d’une riposte vaccinale ont été réalisées en Côte d’Ivoire particulièrement.

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Ces études pourraient susciter la décision d’aide si les partenaires avaient
une estimation des coûts connue d’avance.
C’est en vue de combler cette lacune que nous avons initié cette étude dont
l’objectif général était d’évaluer les coûts opérationnels de la riposte
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vaccinale contre la fièvre jaune dans la ville d’Abidjan en 2001.


Les objectifs spécifiques étaient les suivants :
– déterminer toutes les ressources utilisées ;
– estimer la valeur financière de chaque ressource utilisée ;
– et déterminer le coût global de la campagne ainsi que le coût unitaire de
la vaccination.

Méthodologie
1. Type d’étude et horizon analytique
Nous avons réalisé une évaluation économique partielle centrée sur les
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coûts opérationnels de la riposte vaccinale contre la fièvre jaune organisée


dans la région sanitaire des Lagunes (Abidjan et ses banlieues) du 21/09/
2001 au 02/10/2001. Elle a consisté à mesurer et à analyser a posteriori [6]
tous les coûts engendrés par la réalisation de la campagne.
Le point de vue adopté était celui des autorités sanitaires (Ministère de la
Santé et de l’Hygiène Publique) voulant évaluer le coût d’une riposte
vaccinale pour en déterminer la prévision financière dans le cadre d’un
processus de décision budgétaire.
2. Contexte et population
La région sanitaire des lagunes comptait en 2001, 3 168 138 habitants [10]
exposés au risque amaril. La population cible visée par la campagne était de
2 858 826 habitants et se composait de deux catégories de personnes :
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– 6 mois < population < 10 ans non couvertes par le PEV (Programme
Elargi de Vaccination) ;
– Population > 10 ans non vaccinée ; il s’agit des personnes âgées de plus
de 10 ans qui n’ont jamais été vaccinées ou dont la dernière vaccination
contre la fièvre jaune remontait à plus de 10 ans.
Étaient exclus, les enfants de moins de 6 mois, les personnes déjà
immunisées (dernière vaccination inférieure à 10 ans), les sujets souffrant de
maladies évolutives aiguës et de déficit immunitaire avéré.
L’objectif de couverture vaccinale était d’immuniser 90 % de la population
cible. Le taux de perte (TP) en vaccin anti amaril (VAA) admis était de 5 %. La
stratégie de prestation des vaccinations utilisée a été la stratégie fixe urbaine
et la vaccination était gratuite pour toute la population.
TP en vaccin = [(Nombre de doses utilisées - Pop. Cible vaccinée)/
Nombre de doses utilisées]
3. Catégorie des coûts étudiés
Le coût dans notre étude représentait la valeur monétaire des ressources
mobilisées pour organiser la campagne. Pour ce faire, nous avons recensé les
facteurs générateurs de coût opérationnel des vaccinations de masse [5]. Ces

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facteurs reposent classiquement sur les ressources ou les activités formant
les catégories de coûts étudiés. Ce sont : personnel de vaccination ; vaccins
et solvants ; matériel d’injection et de sécurité des injections ; transport et
matériel roulant ; Fournitures administratives ; mobilisation sociale ou
communautaire ; frais de coordination, supervision et approvisionnement.
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4. Recueil des données


Pour la collecte des données, nous avons approché les institutions
impliquées dans la campagne c’est-à-dire les districts sanitaires de la région
des Lagunes. Ainsi, nous avons recueilli de manière rétrospective dans
chaque district l’ensemble des informations concernant les ressources
utilisées ou activités. Pour le vaccin, le matériel d’injection, le matériel de
sécurité des injections et les fournitures administratives, nous avons collecté
les quantités utilisées et leurs coûts unitaires. Quant au personnel de
vaccination, nous avons recueilli les informations concernant leur nombre,
leurs per diem journaliers et le nombre de jours de travail. Les per diem
couvrent en général les frais d’hébergement (pour les personnels de la
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riposte ne résidant pas dans la région) et de restauration lors des campagnes


de masse réactives et préventives. Ce ne sont nullement pas des honoraires
payés aux différents prestataires sur le terrain qui sont les médecins, les
infirmiers, les logisticiens, etc. Nous avons aussi recueilli les données
relatives aux frais de fonctionnement et d’entretien du matériel roulant, au
forfait de communication, aux frais de prise en charge des manifestations
adverses post-immunisation (MAPI) et enfin celles relatives à la supervision
et la coordination. La valorisation monétaire des ressources et activités s’est
faite à l’aide de pièces justificatives.
Dans le cadre de cette campagne, le matériel et les consommables de la
chaîne de froid n’ont pas été comptabilisés comme ressources génératrices
de coûts car chaque district sanitaire a mis son matériel déjà existant à la
disposition de la campagne.
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5. Traitement des données


Les données ont été traitées par le logiciel Excel.

Résultats
1. La couverture vaccinale et la sécurité des injections
La riposte vaccinale contre la fièvre jaune organisée pour la ville d’Abidjan
et ses banlieues (Anyama, Bingerville et Songon) en 2001 a permis de
vacciner 2 610 994 personnes sur 2 858 826 personnes attendues (popu-
lation cible). Le taux de perte en vaccin était de 1,03 % contre 5 % admis. La
figure 1 illustre la couverture vaccinale obtenue pour cette campagne ; elle
était de 91,33 %.

population
non vaccinée ;
9%

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population
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vaccinée ;
91 %

Figure 1 : Couverture vaccinale de la campagne contre la fièvre jaune à Abidjan en 2001.

En ce qui concerne la sécurité vaccinale, 85 cas de manifestations adverses


post-immunisations (MAPI) ont été notifiés, soit un taux d’attaque de
3,25 MAPI pour 100 000 personnes vaccinées. L’élimination des déchets
vaccinaux a été assurée à 100 %.
2. Les données de coût
Le tableau I représente le coût total du vaccin antiamaril et des consom-
mables utilisés pendant la campagne. Les ressources consommées en termes
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Tableau I : Coût total du vaccin antiamaril et des consommables utilisés pour la campagne
dans la région des lagunes en 2001

Désignation Coût unitaire (FCFA) Quantité consommée Coût total (FCFA)

Vaccin fièvre jaune 370 2 584 360 956 213 200


Solvant fièvre jaune 2 584 360
Seringue AB 0,5 ml 50 2 651 461 132 573 050
Seringue à dilution 73 5 247 383 031
Alcool (en litre) 600 1 563 937 800
Coton (en kg) 2 816 466 1 312 256
Cartes de vaccination 13 2 442 907 31 757 791
TOTAL (FCFA) 1 123 177 128
Source : conçu à partir des données de la campagne.

de doses de vaccin et seringues autobloquantes (SAB) étaient respecti-


vement de 2 584 360 doses et 2 651 641 SAB. La valeur financière totale de
ces ressources se chiffre à 1 394 010 829 F CFA (soit 2 125 016,50 €). Le coût

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unitaire du vaccin antiamaril était de 370 FCFA (0,56 €). Le coût moyen par
dose administrée était de 539,40 FCFA (0,82 €) ; ce coût moyen était le
résultat du rapport du coût total au nombre des doses administrées. Le coût
moyen par personne vaccinée (ou coût total / nombre de personnes vacci-
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nées) se chiffrait à 533,90 FCFA (0,81 €).


Le tableau II résume les coûts des ressources humaines mobilisées pour la
campagne ; ces coûts s’élevaient à 125 678 400 FCFA (soit 191 582,92 €).
Le tableau III quant à lui illustre le coût global des dépenses effectuées au
cours de la riposte vaccinale ; l’ensemble des ressources consommées a
coûté 1 394 010 829 FCFA (soit 2 125 016,50 €). Les vaccins et consom-
mables représentaient avec 80,57 % la plus grande proportion des niveaux
de dépenses.

Tableau II : Coût des ressources humaines mobilisées pour la campagne


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Catégories de ressources Nombre jours Per Diem


Nombre Total (FCFA)
humaines de travail journalier (FCFA)
Coordonnateur 24 11 10 000 2 640 000
Superviseur 113 11 8 000 9 944 000
Chargés de stocks 58 11 8 000 5 104 000
Chargés de données 12 11 8 000 1 056 000
Chauffeurs 123 11 3 800 5 141 400
Personnel de soutien 10 11 3 800 418 000
Vaccinateur chef 225 11 8 000 19 800 000
Vaccinateurs 175 11 5 000 37 125 000
Aides vaccinateurs 900 11 3 000 29 700 000
Vigiles 450 11 3 000 14 850 000
TOTAL (FCFA) 2 590 125 678 400
Source : conçu à partir des données de la campagne.
388 P. ZENGBE-ACRAY, A. DOUBA, Y. TRAORE et al.

Tableau III : Coût global des dépenses réalisées au cours de la riposte vaccinale dans la région
des lagunes en 2001

Niveau de dépenses Coût (FCFA) Pourcentage


Gestion des MAPI 354 911 0,03
Vaccins et consommables 1 123 177 128 80,57
Ressources Humaines 125 678 400 9,02
Fourniture de bureau 14 695 154 1,05
Équipements 101 618 000 7,29
Carburant et lubrifiant 16 808 000 1,20
Entretien et réparation de véhicules 3 019 236 0,22
Frais de communication 8 660 000 0,60
0,62
TOTAL 1 394 010 829 100
Source : conçu à partir des données de la campagne.

Discussion

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1. Les données de couverture et sécurité vaccinales

En termes d’efficacité, l’objectif de couverture vaccinale a été atteint voire


légèrement dépassé (91,3 %). Ce résultat est proche de celui de la riposte
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vaccinale organisée la même année dans la ville de Divo où la couverture


vaccinale était de 94 % [4]. Le taux de perte en VAA a été largement inférieur
au taux admis. Cela n’est pas dû à une insuffisance de quantités prélevée ni
à une mauvaise utilisation des SAB. Selon les fabricants (représentation
locale d’Aventis Pasteur), le conditionnement en flacons de 20 doses prévoit
une dose supplémentaire dans chaque lot, ce qui pourrait être à l’origine de
gains parfois obtenus réduisant ainsi le taux de perte.
Le nombre de cartes de vaccination utilisées était inférieur au total des
personnes vaccinées pour la simple raison que pour la plupart des enfants (et
certains adultes ayant déjà un carnet de vaccination) qui ont été vaccinés, la
date et le lot du vaccin administré ont été mentionnés dans leur carnet de
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santé, par conséquent il ne leur a pas été délivré de carte.


Le faible taux de MAPI observé dans notre étude serait lié à une maîtrise
de la technique vaccinale des agents de santé. En effet avant toute
campagne, ceux-ci reçoivent un recyclage sur les techniques de vaccination
d’une part et, en précampagne, des médecins font une supervision formative
des agents vaccinateurs d’autre part. L’autre raison qu’on pourrait évoquer
serait la non déclaration de tous les cas de MAPI du fait du manque de
sensibilisation des populations en ce qui concerne la prise en charge gratuite
de ces MAPI lors de toute campagne de vaccination.
L’élimination des déchets vaccinaux a respecté les procédures mises en
place : les seringues et aiguilles utilisées ont été collectées et détruites selon
les directives du comité d’organisation de la campagne.
COÛTS D’UNE RIPOSTE VACCINALE 389

2. Les coûts opérationnels de la riposte vaccinale


Le coût des vaccins et consommables de vaccins
La structure du coût total était largement dominée par les vaccins et
consommables qui représentaient 80,57 % (tableau III). Cette structure du
coût total était proche de celle trouvée par Da Silva et al [6] au Sénégal. Dans
leur étude les vaccins et consommables représentaient 85,6 % du coût total
de la riposte vaccinale contre la fièvre jaune et la méningite. Le coût unitaire
du VAA était comparable à celui de la riposte contre la fièvre jaune dans
d’autres localités du pays ou l’on a trouvé des coûts compris entre
413,90 FCFA (0,63 €) et 775,92 FCFA (1,18 €), d’après le rapport du comité de
crise contre la fièvre jaune [2, 3]. À l’inverse, le coût unitaire du vaccin et les
coûts moyens par dose administrée et par personne vaccinée trouvés dans
notre étude étaient nettement supérieurs à ceux de Da Silva et al ; ces coûts
étaient respectivement de 144,22 FCFA (0,22 €), 72,12 FCFA (0,11 €) et
419,57 FCFA (0,64 €). Cette différence serait due à un couplage de deux
antigènes (méningococcique et amaril). Il est important de signaler que les
dépenses relatives aux vaccins sont des coûts variables qui ont été évalués
en fonction du nombre de doses utilisées pendant la campagne.

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En précampagne, si on prévoit de vacciner une certaine proportion de la
population, il convient de trouver le financement pour s’approvisionner en
vaccins et consommables d’où l’importance de l’intervention des bailleurs de
fonds et des partenaires au développement. Certes le Ministère de la Santé
de la Côte d’Ivoire prévoit chaque année un fond d’urgence épidémies [2],
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mais ce fond n’est pas suffisant pour vacciner une population de plus
de deux millions d’habitants exposée à une menace épidémique. Cette
contrainte financière à justifié la contribution des partenaires au développe-
ment pour la réalisation de cette intervention de santé.
Le coût de la gestion des MAPI
Le coût de la prise en charge des MAPI est tout comme celui des vaccins
un coût variable. Il a été évalué en fonction du nombre de personnes ayant
présenté ces manifestations et il a représenté 0,03 % du coût total. Il
correspond en fait au pourcentage de la somme qui a servi à la prise en
charge des MAPI que nous avons obtenu lors de la collecte de nos données.
Ailleurs comme dans l’étude de TAWEESAPS [12] réalisée en Thaïlande, les
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MAPI n’ont pas été prises en charge, ce qui dans une certaine mesure a réduit
les coûts.
Le coût des ressources humaines
Le coût des ressources humaines (tableau II) dans notre étude correspon-
dait au deuxième poste de dépenses du coût total et la moitié des dépenses
hors vaccins et consommables de vaccins. Les ressources humaines
employées pour les ripostes vaccinales induisent des coûts non négligea-
bles. Le choix de la stratégie fixe urbaine a conduit à l’installation de plu-
sieurs postes de vaccination multipliant les équipes d’agents vaccinateurs. Si
on veut minimiser les coûts, il serait peut être intéressant de réduire le nom-
bre de postes de vaccination, suggestion faite également par Andrew L-C [1].
Notre étude a par ailleurs révélé que le nombre de jours des activités était
élevé (11 jours), on admet généralement que 8 jours sont suffisants pour une
390 P. ZENGBE-ACRAY, A. DOUBA, Y. TRAORE et al.

campagne de masse réactive [8]. En réduisant le nombre de jours de travail,


cela va réduire inévitablement le coût des ressources humaines.
Le coût des équipements
Ce coût concernait essentiellement la location des véhicules utilisés pour
la campagne et il représentait dans notre étude le troisième poste des
dépenses du coût total. Certains auteurs pensent que ce coût pourrait être
réduit si on achetait les véhicules (au lieu de les louer) afin qu’ils servent
pour les prochaines campagnes de masse [11].
Le coût des ressources humaines, des équipements et les autres coûts hors
vaccins et consommables de vaccins ont constitué des coûts fixes. Ces coûts
étaient indépendants de la présentation ou non des populations aux postes
de vaccination. Ils ont constitué des dépenses incompressibles qui de toute
façon auraient été engagées au cas où personne ne se présentait aux séances
de vaccination.

Conclusion

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Initier une étude évaluant les coûts opérationnels d’une riposte vaccinale
contre la fièvre jaune dans une agglomération telle que la ville d’Abidjan a
permis de mettre à la disposition des autorités sanitaires un outil de décision
en ce qui concerne le financement d’une campagne de vaccination. Bien que
le coût opérationnel total ait paru énorme, il n’en demeure pas moins que
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cette action de santé a permis de vacciner plus de 90 % de la population


cible. Une étude du rapport coût/efficacité aurait déterminé l’efficience de la
riposte vaccinale et par conséquent la propension des autorités à payer pour
un résultat de santé donné.
Dans un contexte de ressources financières rares ou limitées, les coûts
obtenus dans notre étude pourraient être réduits en agissant sur certains
inducteurs de coûts à savoir le nombre de professionnels de santé, le nombre
de jours d’activités et le coût des équipements.
Toutefois, si l’on devait utiliser ultérieurement la même stratégie que celle
de 2001 pour contrôler une autre épidémie, il conviendrait d’actualiser les
coûts en tenant compte du taux d’inflation annuel en vue d’une prévision
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budgétaire.

BIBLIOGRAPHIE
1. Andrew LC. La vaccination en Colombie : rapport coût/efficacité. Forum mondial de la santé 1987 Vol. 8 :
238-45.
2. Côte d’Ivoire, Ministère de la santé et de l’hygiène publique. Riposte vaccinale contre la fièvre jaune à
Abobo. Rapport de la riposte ; 2001.
3. Côte d’Ivoire, Ministère de la Santé et de L’Hygiène Publique. Riposte vaccinale contre la fièvre jaune à
Bogossehoua (Guiberoua). Rapport de la riposte ; 2001.
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Santé publique 2009, volume 21, n° 4, pp. 383-391

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