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UNIVERSITE DE KINSHASA

FACULTE DE PSYCHOLOGIE ET DES SCIENCES


DE L’EDUCATION
Département de Psychologie

COURS DE PSYCHOLOGIE COMPAREE DES PERSONNALITES


Aspects cliniques et culturels
PR. Dr Timothée KAMANGA MBUYI

Année Académique 2019-2020


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Objectif général
Examiner les similitudes et les différences de personnalités.
Objectifs spécifiques
A la fin de ce cours, chaque étudiant devra être capable de :
- définir les concepts psychopédagogiques,
- décrire les différentes théories de la personnalité,
- de circonscrire la problématique de la psychologie comparée,
- procéder à l’étude de cas.
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CHAPITRE I. NOTIONS GENERALES


1. Définition des concepts
1.1. La psychologie comparée est une branche, un domaine de la psychologie qui
étudie des différences et des similitudes de comportements observés en mettant
en parallèle l’homme et l’animal, les groupes humains, les races, les milieux
culturels, les niveaux socio-économiques, les groupes d’âge, les sexes, les
croyances etc.
Comme noms rattachés à la psychologie comparée, on peut citer Von Frisch,
Thordinke, Watson et K. Lorenz.
1.2. La personnalité est une organisation dynamique de différents aspects de
l’individu : cognitif, affectif, ou volitif, physiologique et morphologique. Au
concept de la personnalité peuvent être associés les noms de S. Freud, A. Adler,
C.G. Jung.
1.3. Une approche clinique :
Une approche est une manière d’aborder le sujet de connaissance quant
au point de vue de la méthode.
La psychologie clinique est une branche de la psychologie qui se fixe
comme but l’investigation en profondeur de la personnalité à l’aide d’entretiens
non directifs, d’observations de la conduite et parfois des tests psychologiques.
Clinique qui se fait au chevet du malade.
1.4. Une culture est un ensemble des aspects intellectuels, techniques,
artistiques, religieux propres à une civilisation, à une nation, à un peuple.
Une approche transculturelle : examine les différences ou les similitudes
selon les types de cultures. Exemple : la culture chrétienne et la culture islamique,
comment les chrétiens et les musulmans considèrent-ils la maladie ? La mort ?
1.5. La théorie de la personnalité
Le mot théorie vient du grec theorein qui signifie « observation, mais
aussi vision des choses ». Kerlinger (1973,) définit la théorie comme étant un
ensemble de connaissances interreliées (concepts, définitions et propositions) qui
présentent une vision systématique des phénomènes et précisent les rapports entre
les variables, dans le but d’examiner ces phénomènes et de les prévoir.
Pour Kim (1983), la théorie et tout simplement la formulation de rapports
entre plusieurs classes de phénomènes (et partant des concepts) menant à la
compréhension d’un problème ou de la nature des choses.
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Les théories sont élaborées en vue de :


- classer les données et les organiser
- expliquer la raison pour laquelle certains phénomènes se produisent
- comprendre l’importance des événements passés
- augmenter l’emprise sur certains phénomènes
- permettre de prévoir certains événements.
2. Les théories de la personnalité
2.1 La perspective psychanalytique
La théorie psychanalytique est née de la pratique clinique de Sigmund Freud.
Sigmund Freud est le premier qui cherche à déterminer les sources et les
manifestations de troubles de l’esprit et de la personnalité. Son expérience auprès
de Jean Martin Charcot l’amènera à élaborer une théorie détaillée du
développement de la personnalité.
Aspects de la conscience Freud divise la conscience en trois catégories :
- le conscient
- le préconscient
- l’inconscient.
La première catégorie, le conscient, inclut tout ce dont il est facile de se
souvenir comme les adresses, les numéros de téléphone, les dates, etc.
Le préconscient (appelé parfois le subconscient) contient toutes les
pensées, sentiments et désirs oubliés, mais qui peuvent facilement revenir à la
mémoire. Il peut s’agir d’anciens numéros de téléphone ou d’anciennes adresses,
de sentiments éprouvés le jour du mariage ou la naissance du premier enfant.
La troisième catégorie l’inconscient englobe les pensées, les sentiments,
les actions, les expériences et les rêves qui ne peuvent pas remonter au conscient
ou dont on ne peut se souvenir parce que pénibles.
Le ça, le moi e le surmoi Pour Freud, la personnalité est constituée de
trois instances :
- le ça
- le Moi
- le Surmoi
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Chacune de ces instances remplit une fonction différente, mais elles sont
si étroitement interreliées qu’il est difficile d’en séparer les effets sur le
comportement d’une personne.
Les pulsions biologiques et psychologiques présentes à la naissance
constituent le ça. Les pulsions sont désirs psychologiques innés, considérés
comme des besoins. Sur le plan biologique, la faim est une carence nutritionnelle,
mais sur le plan psychologique c’est un désir de nourriture. Le désir est le
facteur de motivation qui pousse une personne à rechercher la nourriture. Par
conséquent, les pulsions servent à orienter le comportement dans une direction
donnée.
Le ça garde en réserve toue l’énergie psychique, qui à son tour, confère au
moi et au surmoi la capacité d’agir. Le ça n’a aucune connaissance du monde
extérieur et ne fonctionne que dans les limites de sa propre réalité subjective.
Totalement centré autour de lui-même, il n’a comme principale
préoccupation que la satisfaction immédiate de ses besoins. Comme le ça ne peut
pas supporter la tension qui augmente à mesure que ces besoins ne sont pas
satisfaits, il essaie de les assouvir le plus rapidement possible, sans tenir compte
de la réalité ou de la moralité. C’est ce qu’on appelle le principe de plaisir.
Le ça est capable d’actes réflexes, comme le clignement des yeux,
l’éternuement et les soupirs qui permettent d’atténuer dans l’immédiat la tension
engendrée par la plupart des situations où des besoins primaires s’expriment ,
mais qui ne lui procurent pas la satisfaction dont il a besoin dans des situations
plus complexes. Il est également capable de produire des images mentales pour
dissiper la tension. La personne qui a faim peut, par exemple évoquer l’image
d’une denrée alimentaire pour soulager la tension causée par le besoin de
manger. C’est ce qu’on appelle le processus primaire. Ni l’acte réflexe ni le
processus primaire ne sont en mesure de soulager complètement la tension. Le ça
est incapable de comprendre la démarche réaliste qui lui permettrait d’aboutir à
la satisfaction de ses besoins. C’est là la fonction du moi.
Le rôle du moi est de veiller à ce que les pulsions débridées qui mènent le
ça vers la satisfaction de ses besoins ne s’échappent pas hors des frontières de
la réalité. Ainsi, pour que ses besoins de nourriture soient satisfaits, la personne
qui a faim doit apprendre à se trouver de la nourriture, la préparer et à la manger.
Elle doit donc établir une distinction entre la représentation mentale des aliments
et leur signification réelle, ce qui revient à dire que les images doivent être
converties en perceptions qui lui permettent d’assouvir sa faim. Le but principal
de ce processus est de permettre au moi de contenter le ça de façon à assurer
son bien-être et la survie. Alors que le ça obéit au principe de plaisir, et
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fonctionne selon un processus primaire, le moi obéit au principe de la réalité et


fonctionne selon un processus secondaire.
Le principe de la réalité a pour principale fonction de maintenir la
tension à un niveau tolérable jusqu’à ce la personne trouve l’objet qui puisse
répondre à ses besoins. Le processus secondaire est simplement la pensée
réaliste qui permet au moi de trouver les moyens de répondre aux besoins du ça
et de mettre ses desseins à l’essai ; ce processus porte le nom de l’épreuve de la
réalité. Le moi a pour mission d’aider le ça à satisfaire ses besoins et ne s’y
opposera jamais sciemment. Le moi n’existe pratiquement pas sans le ça et il
ne peut jamais s’en libérer complètement. Le rapport entre le ça et le moi est un
rapport de connivence, c’est-à-dire qu’il sert une fin pratique et qu’il est
nécessaire à la survie de l’espèce. Le moi ne s’embarrasse pas de valeurs morales
ni de tabous. Ce rôle est réservé à la troisième instance, le surmoi.
Le surmoi est l’instance qui intériorise les règles de la société et les
valeurs personnelles, qui sont, ensuite, inculquées aux enfants selon un système
récompense et de punition. Le surmoi se plie davantage à un idéal qu’à la réalité.
C’est l’instance morale de la personnalité, qui vise la perfection par opposition au
plaisir du ça et à la réalité du moi. A toutes fins pratiques, c’est ce qu’on appelle la
« conscience », l’instance de la personnalité qui se préoccupe essentiellement
du bien et du mal. Puisque les enfants sont récompensés ou punis, selon leur
conduite, ils apprennent très vite ce qui est acceptable ou « bien » et ce qui est
inacceptable ou « mal » lorsque l’enfant est récompensé pour sa bonne conduite,
l’expérience est incorporée dans l’idéal du moi, qui est une partie du surmoi. Ce
processus s’appelle introjection, une forme d’identification qui permet
l’incorporation des normes et des valeurs des autres dans son propre soi. Par
ailleurs, lorsque l’enfant est puni à cause de sa mauvaise conduite, l’expérience
est incorporée dans sa conscience. La dynamique de ces deux processus est la
suivante : l’idéal du moi nous récompense en nous procurant un sentiment de
bien-être, et la conscience nous punit en infligeant un sentiment de malaise. Les
individus dont le surmoi n’est pas développé sont incapables d’éprouver
un sentiment de bien-être ou de malaise par suite d’une certaine conduite.
Bien qu’on les qualifie souvent d’immoraux, il serait plus exact de dire qu’ils sont
amoraux.
Le surmoi est donc une instance de censure des pulsions irrationnelles
du ça et véhicule qui permet au moi de s’acquitter de ses responsabilités
envers le ça en l’aidant à choisir , pour sa satisfaction,, des objets qui ne sont pas
considérés comme mauvais ou immoraux. Freud a découvert que les liens serrés
qui existent entre ces deux instances de la personnalité déterminent grandement
le comportement des êtres humains. Il a également compris que des conflits
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surgissent lorsque ces trois instances tendent vers des buts différents.
D’après Freud, le mode de règlement de ces conflits détermine l’état de santé
mentale de personne.
Angoisse et mécanismes de défense
La notion d’angoisse forme la trame de la perspective psychanalytique de
la personnalité. Pour les freudiens, l’angoisse est une sensation de tension, de
détresse et de malaise, quelque peu semblable à la peur, mais produite par la
perte réelle ou imaginaire de la maîtrise de soi plutôt que par un danger
extérieur. Les émotions provoquées par l’angoisse sont à tel point intolérables
qu’elles poussent la victime à prendre certaines mesures. La fonction de
l’angoisse est de mettre en garde l’individu contre un danger imminent. Ce
message clair, lancé au moi, le prévient que, faute de mesures palliatives, il
risque d’être submergé. Pour s’adapter à l’angoisse, le moi ne peut prendre que
des mesures rationnelles lui permettant de diminuer la tension de malaise. Ce
procédé réussit souvent chez la personne en bonne santé mais, durant certains
périodes de la vie de chacun, le moi est incapable de faire face et peut avoir
recours à des procédés moins rationnels pour surmonter l’angoisse, procédés
qu’on appelle les mécanismes de défense du moi. Les mécanismes de défense
du moi soulagent l’angoisse, par le biais de la dénégation, de la fausse
interprétation ou de la déformation de la réalité. Cela est vrai même lorsque l’on
a recours à des mécanismes de défense que Freud considérait comme nécessaires
et salutaires. La sublimation et le déplacement qui, d’après Freud, sont
nécessaires à la motivation sociale et personnelle, en sont des exemples. Les
mécanismes de défense constituent eux-mêmes, une déformation de la réalité, et
le fait d’y avoir recours provoque, en général, une absence de congruence entre
la réalité et la perception de cette réalité.
Développement psychosexuel
Le développement psychosexuel est le processus de développement de la
personnalité de la naissance à l’adolescence. Lors de chacun de cinq stades
distingués par Freud, l’enfant peut prendre des moyens caractéristiques pour
satisfaire le plaisir sexuel (libido). Ces stades correspondent à ceux de la
croissance du corps et Freud les a nommés :1) stade oral,2) stade anal, 3) stade
phallique, 4) période de latence, 5) le stade génital.
Freud dit qu’il est impossible de passer d’un stade à l’autre si les besoins
du stade précédent n’ont pas été satisfaits.
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Importance de la théorie psychanalytique


On peut utiliser la théorie psychanalytique pour l’évaluation des clients.
Grâce à elle, on peut examiner de façon systématique le développement au cours
des premières années de vie et les stratégies utilisées par les clients. La théorie de
Freud permet, par exemple, une distinction entre la simulation et la régression ou
entre la manipulation et la dénégation. Elle permet en outre de mieux saisir les
méandres mystérieux de l’esprit humain.
De nombreux disciples de Freud considèrent sa vision comme trop
étriquée étant donné qu’elle ne tient pas compte des influences sociales et
culturelles.
2.2 La perspective interpersonnelle
Harry Stack Sullivan
Bien qu’il ait commencé ses travaux à l’école de la psychanalyse, il met par
la suite au point une, théorie du développement qui s’écarte beaucoup des idées
de Freud. Il s’agit de la théorie interpersonnelle du développement.
La personnalité est une notion abstraite qui ne peut se manifester que
dans le cadre des rapports interpersonnels. C’est la raison pour laquelle il
n’étudie l’individu que dans le contexte de ses rapports avec autrui. D’après la
théorie interpersonnelle, la personnalité ne se manifeste que dans les
interactions avec une autre personne ou avec un groupe. Sullivan ne nie pas que
l’hérédité et l’épanouissement du corps font partie du développement, mais il
attache beaucoup d’importance à l’organisme en tant qu’entité sociale qu’en tant
que entité biologique.
Bien que pour Sullivan la personnalité est une notion plus abstraite que
pour Freud, il en fait quand même l’axe de la dynamique humaine dans la sphère
interpersonnelle où il reconnaît trois processus primordiaux : les dynamismes,
les personnifications et les processus cognitifs.
Les dynamismes
Dans sa forme la plus simple, le dynamisme est un ensemble de
comportements adoptés depuis longtemps. On peut, par conséquent, considérer
le dynamisme comme une habitude. La définition de Sullivan est assez large pour
qu’on puisse inclure dans un dynamisme donné de nouveaux comportements.
Tant que l’ensemble des comportements ne subit de modification radicale, on
peut dire qu’on reste dans le même dynamisme.
Selon la théorie de Sullivan, les dynamismes font ressortir les traits de la
personnalité. On peut dire, par exemple, que l’enfant qui est « méchant »
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présente un dynamisme d’hostilité. L’idée maîtresse est que la réaction


habituelle d’une personne face à une autre ou face une situation constitue un
dynamisme. D’après Sullivan, la plupart des dynamismes répondent aux besoins
fondamentaux de l’individu, car ils réduisent son angoisse.
Ainsi, le nouveau-né connaît l’angoisse pour la première foi quand il
quitte le ventre de sa mère. A mesure que l’enfant grandit, l’angoisse surgit
chaque fois que sa sécurité est menacée.
Sullivan appelle dynamisme de soi ou système du self le dynamisme qui
se forme pour réduire l’angoisse. Le système du self est le gardien de la sécurité
de l’individu.
Les personnifications
Selon la théorie de Sullivan, la personnification est l’image qu’on a de soi
et d’autrui. Chaque être humain possède un grand nombre de telles images,
forgées à partir d’attitudes, de sentiments et de perceptions dérivées des
expériences individuelles. Par exemple, pour l’enfant, la personnification du bon
maître ne se produit que s’il a rencontré ce genre de personne. Toute relation qui
se traduit par une « bonne » expérience entraîne une personnification
avantageuse de la personne avec laquelle on a entretenu cette relation. Les
personnifications fâcheuses découlent d’une « mauvaise » expérience.
Selon Sullivan, les personnifications s’élaborent au début de la vie pour
permettre à l’individu de s’adapter aux relations interpersonnelles. Avec l’âge,
cependant, les personnifications très rigides peuvent entraver les relations
interpersonnelles.
Les processus cognitifs
Pour Sullivan, les processus cognitifs constituent la troisième
composante de la sphère interpersonnelle. Ces processus cognitifs, tout comme
les personnifications, dépendent d’expériences qui appartiennent à l’un des
trois modes suivants. Le premier, qui doit obligatoirement précéder tous les
autres, est l’expérience prototaxique, c’est-à-dire l’expérience qui accède à la
conscience sans qu’elle soit reliée à aucune autre, sans discrimination entre soi et
l’univers. Il s’agit, par exemple des images, des sensations ou des émotions. Les
nourrissons connaissent souvent ce genre d’expériences. Le deuxième mode est
celui de l’expérience parataxique. Elle est vécue par la personne qui établit un
rapport de cause à effet entre des événements qui se produisent plus ou moins
simultanément mais qui e sont pas liés de façon logique. Supposons, par exemple,
qu’un enfant dise à sa mère qu’il la déteste et que plus tard il tombe malade. La
pensée parataxique l’amène à conclure que chaque fois qu’il dira à sa mère qu’il
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la déteste, il tombera malade. Sullivan affirme que la plupart de nos pensées ne


dépassent pas le niveau parataxique. Le troisième mode est celui de l’expérience
syntaxique qui constitue, de l’avis de Sullivan, le niveau le plus élevé de la
pensée. Il s’agit de la faculté de symboliser, en général, de celle de symboliser le
discours, en particulier. La symbolisation ne peut se concrétiser que si un groupe
d’individus comprend le sens des symboles et s’en entend sur leur signification. A
ce niveau, on peut donner un ordre logique aux expériences et les communiquer.
Importance de la perspective interpersonnelle
Cette théorie définit le développement dans un contexte social et lui
permet d’évaluer les influences de la culture et de l’interaction sociale sur le
comportement du client.
2.3. La perspective béhavioriste
B.F. Skinner
Les théories béhavioristes et notamment celles de
Skinner, ont eu une influence considérable sur les scientifiques puisqu’elles ont
changé leur façon d’aborder le développement de la personnalité. Comme les
théoriciens du développement interpersonnel, Skinner a remis en question la
plupart des idées de Freud et de ses disciples, comme l’existence des pulsions
innées et l’élaboration de la structure de la personnalité, entre autres. Selon
Skinner, puisque ces phénomènes ne pouvaient être observés, ils ne pouvaient
pas faire l’objet d’une étude scientifique.
La théorie de Skinner porte surtout sur l’analyse fonctionnelle du
comportement, ce qui sous-entend une approche pragmatique. La question
qu’on doit se poser est : pourquoi une personne agit-elle d’une certaine façon et
qu’est-ce qui dans son environnement la pousse à un tel comportement ? La
théorie béhavioriste s’attache moins à la compréhension du comportement par
rapport à des événements passés qu’au besoin immédiat de prévoir la tendance
de ce comportement et de la dominer. Pour Skinner, les actes ont beaucoup plus
d’importance que les motivations, les instincts et les émotions inconscientes.
D’après cette théorie, les comportements peuvent être modelés grâce à un
système de récompenses et de punitions. Etant donné que tout comportement a
des conséquences précises, Skinner pense qu’il faut récompenser le sujet chaque
fois que son comportement a des conséquences positives et que le
comportement en question doit être renforcé, mais qu’il faut , par ailleurs, le
punir si son comportement a des conséquences négatives.
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Dans la perspective béhavioriste, le comportement est structuré et il peut


être façonné. De ce point de vue, les processus d’apprentissage et d’interaction
avec l’environnement déterminent la personnalité. Si nous poussons plus loin ce
raisonnement, cela revient à dire que nos problèmes et nos carences sont le
résultat d’un apprentissage inadéquat et que nous pouvons les corriger grâce à
de nouvelles expériences d’apprentissage qui renforcent un comportement
différent. Le principe du renforcement (appelé parfois conditionnement
opérant) est l’une des bases de la théorie de Skinner.
Le renforcement du comportement permet de changer la probabilité avec
laquelle ce comportement se reproduira.
D’après Skinner, certains facteurs favorisent la diminution de cette
probabilité tout en augmentant la probabilité qu’un nouveau comportement soit
adopté. Selon le principe du renforcement, la modification du comportement
conditionné s’installe plus solidement lorsqu’on « renforçateur » suit la réponse
conditionnée. En d’autres mots, la réponse est répétée si elle est renforcée. C’est
ce que Skinner appelle la réponse opérante, c’est-à-dire la réponse qui apporte
un changement dans l’environnement. Il se produit un conditionnement
opérant, par exemple, lorsqu’une enseignante ne voit pas d’inconvénient à ce
que ses étudiants lui remettent régulièrement leurs travaux en retard. Si elle
veut réduire la fréquence d’une telle pratique, elle doit tout simplement refuser
ce genre de comportement si elle donne des punitions ; c’est ce qu’on appelle
réponse punitive. Skinner dit que l’on peut prévoir, modifier et expliquer chaque
comportement, si on peut analyser et comprendre le principe de renforcement
qu’on a utilisé pour le consolider.
Les théories de Skinner ont eu autant de défenseurs que des détracteurs.
Certains s’opposent à l’idée de modifier les comportements par l’utilisation
constante d’un système de récompense-punition. Pour défendre la théorie de
Skinner, ces adeptes rappellent qu’il est inutile de recourir à la punition pour
renforcer les comportements souhaitables. En d’autres mots, on peut renforcer
systématiquement des comportements souhaitables grâce aux récompenses
seulement. Dans ce cas la punition est absente du processus de modification du
comportement.
L’importance de perspective béhavioriste
On peut se servir des théories de Skinner dans deux domaines. Le premier
est celui de l’éducation des clients. Le renforcement positif des bonnes réponses
est l’un des éléments clés de l’apprentissage. D’après Skinner, ce ne sont pas
généralement les étudiants qui sont incapables d’apprendre ; ce sont les
enseignants qui ne savent pas enseigner. Si l’enseignant loue l’étudiant pour ses
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efforts d’apprentissage et l’encourage, selon Skinner, les chances de réussite sont


plus grandes. Pour que ce principe fonctionne, il faut établir des objectifs précis
afin que les résultats puissent être mesurés.
Le second domaine est celui de la santé mentale. On peut, par exemple,
utiliser les principes de Skinner pour modifier le comportement d’un client
plutôt que son système de valeurs ou les traits de personnalité. On se sert
souvent de thérapies béhavioristes dans les unités de soins psychiatriques
réservées aux adolescents, dans les groupes d’aide aux toxicomanes et lors des
séances de perte du poids et d’abandon de la cigarette.
La théorie de Skinner a également inspiré les intervenants chargés de la
rééducation des délinquants et des criminels.
2.4. La perspective du développement cognitif
C’est à Jean Piaget qu’on doit l’élaboration de la théorie du
développement cognitif de la personnalité.
D’après jean Piaget, l’intelligence des enfants se développe grâce aux
contacts avec le milieu. Il émet l’hypothèse que la réalité de l’enfant est
confrontée à des milieux en constance évolution et que, durant ce processus,
celui-ci apprend à reconnaître les différences entre sa propre réalité et celle du
monde extérieur. Une fois ces différences intégrées, l’enfant sera capable
d’établir de nouveaux rapports entre les objets, par conséquent, de développer
une compréhension plus profonde du monde.
Selon Jean Piaget, la capacité de penser d’un enfant se développe grâce à
l’interaction de deux processus. Le premier processus est celui de l’assimilation,
c’est- à - dire l’incorporation de données nouvelles dans des structures ou
schèmes existants. Piaget distingue trois types d’assimilation : l’assimilation
biologique, l’assimilation mentale et l’assimilation sociale.
L’assimilation biologique est l’ingestion de la nourriture et sa digestion.
L’assimilation mentale est l’absorption des informations de l’extérieur
auxquelles le sujet attribue une certaine signification selon sa perception.
L’assimilation sociale, enfin, est l’apprentissage des règles de la société et leur
intégration dans le système de valeurs de l’individu. Le but de l’assimilation est
d’adapter le monde extérieur aux besoins individuels.
Le deuxième processus est celui de l’accommodation, c’est-à-dire la
modification des schèmes existants pour intégrer de nouvelles connaissances en
s’accordant plus avec un vieux schème. Piaget distingue encore une fois trois
types d’accommodation : l’accommodation physique, l’accommodation mentale
et l’accommodation sociale. L’accommodation physique est la simple
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modification de posture, comme lorsqu’on se met sur la pointe des pied pour
atteindre un objet placé trop haut. L’accommodation mentale est constituée
des ajustements intellectuels nécessaires à l’assimilation des informations.
L’accommodation sociale est l’adoption d’un système particulier de valeurs à
cause des pressions venant du monde extérieur. L’accommodation comporte une
modification des réactions qu permet l’adaptation aux réalités du monde
extérieur.
Selon la théorie de Piaget, le développement intellectuel s’accomplit lors
du jeu entre l’assimilation et l’accommodation en vue d’atteindre un état
d’équilibre idéal. D’après lui, ce développement stagne lorsqu’un type de
comportement prédomine. Si les enfants assimilent les connaissances mais s’ils
incapables de les adapter au monde extérieur, Piaget considère qu’ils réfugient
essentiellement dans les activités ludiques et dans la fantaisie. Si d’autre part, les
enfants sont dociles et acceptent sans rechigner tout ce qui les entoure, leur
comportement n’est qu’imitation et ne traduit aucun apprentissage autonome.
Tout comme Freud et Sullivan, Piaget distingue des stades de
développement intellectuel lequel, pour lui, se divise en quatre périodes : 1) la
période de l’intelligence sensori-motrice, 2) la période pré-opératoire ; 3) la
période des opérations concrètes ; 4) la période des opérations formelles
hypothético-déductives. Durant chaque période, les enfants développent de
nouveaux modes de pensées qui présentent des différences notables les uns par
rapport aux autres. La vitesse à laquelle un enfant traverse une période est
fonction de son patrimoine génétique et de son milieu.
L’importance de la perspective du développement cognitif
La théorie de développement cognitif de Piaget fournit un cadre
d’évaluation. Mais cette théorie a également de nombreuses applications dans le
domaine de l’andragogie.
2.5. La perspective psychosociale
On ne saurait parler des théories de la personnalité sans rappeler le rôle
considérable joué par le psychanalyste américain Erik Erikson, qui a eu le
mérite d’élargir la perspective psychanalytique.
Eric Erikson
D’après, le développement de la personnalité ne s’arrête pas à
l’adolescence mais se poursuit toute la vie. Contrairement à Freud, il pense que l
‘être humain peut revenir à un stade antérieur de développement pour mener à
bien les tâches qu’il a été incapable d’accomplir auparavant pour une raison ou
pour une autre. Selon la théorie de développement de la personnalité
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d’Erikson, on peut atteindre un niveau de développement supérieur à n’importe


quel moment de la vie.
Erikson ne nie pas l’importance que la perspective psychanalytique
accorde aux pulsions et aux besoins fondamentaux chez les enfants, mais il
pense que le conflit entre les besoins et la culture joue un rôle plus important
dans le développement de la personnalité que le conflit entre le Ça, le moi et le
surmoi. Sa théorie se fonde sur l’idée que les pulsions individuelles sont presque
identiques chez tous les enfants mais que les cultures, elles, sont très différentes
d’un pays à l’autre. . A son avis, les cultures, tout comme les êtres humains,
peuvent évoluer.
Pour Erikson le moi façonne davantage la personnalité que le ça ou le
surmoi, idée qui découle de sa vision culturaliste de la psychologie. Maintenant
nous allons pratiquer l’arrangement floral ensemble et puis nous décrirons
chacun nos sentiments après arrangement floral dans cette salle. Chacun pense-
t-il, joue un rôle de médiateur entre l’individu et la société ; le rapport ainsi créé
est au moins aussi important que les influences des pulsions fondamentales.
L’observation des modifications qui interviennent au sein d’une famille ou d’un
groupe, dont les membres ont des intérêts communs, a permis à Erikson de
comprendre l’importance de l’individu avec le groupe social et d’élargir le
champ des déterminants de la personnalité qui, d’instinctuels et biologiques,
deviennent sociaux et culturels.
Sa vision du rôle de l’avenir a également enrichi les théories
psychanalytiques. Alors que Freud n’accorde de l’importance qu’aux événements
passés. Erikson considère que les événements futurs sont plus importants. A son
avis, la capacité d’anticiper les événements futurs peut avoir une influence sur
l’action dans le présent.
Selon Erikson, chaque être humain traverse huit stades de
développement :
1) le stade sensoriel (de 0 à 18 mois)
La crise développementale : la confiance ou la Méfiance.
La principale caractéristique est : L’enfant cherche à établir des
rapports basés sur la Confiance.
2) le stade musculaire (de 1 à 3 ans)
La crise développementale : l’autonomie ou le doute ou la honte.
La principale caractéristique est : le début du processus de la
séparation d’avec la mère et l’apprentissage de l’autonomie.
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3) le stade locomoteur (de 3 à 6 ans)


La crise développementale : l’initiative ou la culpabilité
La principale caractéristique : l’enfant fait l’apprentissage des
influences du milieu et prend conscience de son identité.
4) la latence (de 6 à 12 ans)
La crise développementale : la compétence ou l’infériorité.
La principale caractéristique : l’énergie est investie dans la
productivité, les activités créatives et l’apprentissage.
5) l’adolescence (de 12 à 20 ans)
La crise développementale : l’identité ou la confusion d’identité.
La principale caractéristique : c’est une période de transition, pendant
laquelle l’adolescent se tourne vers l’âge adulte et commence à intégrer les idées
et le système de valeurs acquis précédemment.
6) le stade du début de l’âge adulte (de 18 ans à 25 ans)
La crise développementale : l’intimité ou l’isolement.
La principale caractéristique : le jeune adulte apprend à établir des
rapports intimes.
7) l’âge adulte (de 24 à 45 ans)
La crise développementale : la procréation ou la stagnation.
La principale caractéristique : le primat est donné à la consolidation
des rapports intimes. Cette période est caractérisée par le désir de former une
famille.
8) la maturité (de 45 à la mort).
La crise développementale : l’intégrité personnelle ou le désespoir.
La principale caractéristique : c’est la période d’acceptation de sa
propre vie, telle qu’elle a été et des bons et des mauvais aspects du passé. La
personne consolide une image positive du moi.
Chaque stade est caractérisé par une crise qu’il faut surmonter avant de
pouvoir passer au stade suivant. Erikson soutient que le développement normal
est entravé si l’individu est incapable de surmonter la crise du stade précédent.
L’importance de la perspective psychosociale
La théorie du développement d’Erikson brosse un tableau dynamique de
l’être humain et de son évolution toute sa vie durant.
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2.6. La perspective humaniste


Les chefs de fil de l’approche sont Abraham Maslow et Carl Rogers.
a) Abraham Maslow
Ses idées qui sont à base de la théorie humaniste de la personnalité, sont
très originales, mais elles ont été critiquées parce qu’elles reposent sur les études
de personnes très créatives psychologiquement saines. D’après certains
chercheurs, les méthodes de Maslow ne sont pas suffisamment scientifiques
étant donné que ses études, menées en dehors de laboratoires se sont limitées à
de observations et à des inférences. Maslow distingue deux types de besoins
humains : les besoins physiologiques fondamentaux et les besoins d’ordre
supérieur. Les besoins physiologiques, tels le besoin de nourriture, d’eau et de
sommeil sont vitaux. Les besoins d’ordre supérieur sont les besoins reliés à la
croissance ; il s’agit, entre autres, de la sécurité, de l’amour, de l’estime de soi et
de l’actualisation de soi. En général, les besoins fondamentaux doivent être
satisfaits avant les besoins d’ordre supérieur. La personne qui a faim se
préoccupera moins d’amour et d’estime de soi que celle qui a pu satisfaire ce
besoin fondamental. Selon Maslow, lorsque les besoins reliés à la croissance
restent insatisfaits, il y a risque de perturbations psychologiques.
Maslow s’est penché sur le côté sain et fort de la nature humaine. Pour lui,
la santé compte plus que la maladie et le succès plus que l’échec. A son avis, les
besoins physiologiques fondamentaux sont sains. Il ne le considère pas comme
des pulsions malsaines que la réalité oblige à tempérer et à dominer. MASLOW
pense que la nature innée des gens est essentiellement bonne ou, au pis aller,
neutre.
Cette idée est radicalement opposée à celle de nombreux autres
théoriciens qui jugent les pulsions innées mauvaises ou anti-sociales.
b) Carl Rogers
Le psychologue Carl Rogers est également adepte de la perspective
humaniste. Comme Maslow, Rogers pense que la principale motivation de l’être
humain est la volonté de se développer. Il a bâti ses théories sur son expérience
de psychothérapeute et sur les observations recueillies dans sa pratique.
Selon Rogers, ce n’est pas le concept de soi qui est inné mais plutôt le
besoin de se réaliser. La maturité est une étape que l’être humain ne peut franchir
qu’au moment où il peut établir une distinction entre lui-même et le monde
extérieur. A cette étape-là de sa vie, il peut compter sur ses capacités et
commencer à développer un système de valeurs qui lui permet d’être le juge de
son propre comportement. Ces valeurs peuvent autan traduire ses propres désirs
16

que lui être imposées par la société. Un conflit surgit lorsque les valeurs de la
personne s’opposent à celles de la société.
Rogers est persuadé que le potentiel d’adaptation de l’être humain
dépend de sa capacité de mettre en symboles ou de donner un nom à ses
expériences, ce qui lui permet de comprendre les différents éléments de son
comportement. Pour Rogers, un tel être est entièrement fonctionnel : il est
conscient de ses limites et de ses faiblesses, il a une image de soi très positive et il
peut maintenir des rapports interpersonnels.
L’importance de la perspective humaniste
Les œuvres de Maslow sont étudiées dans nombreux cours sur les soins
infirmiers. On se sert constamment des théories humanistes pour établir les
lignes de conduite de la pratique étant donné que leur vision de l’être humain et
de son environnement est dynamique et positive.
2.7. La perspective du développement moral
Les questions liées à la vertu et à la moralité de l’être humain préoccupent
les philosophes depuis toujours. Voici les travaux de deux théoriciens modernes
du développement moral : Lawrence Kohlberg et Carol Gilligan.
Lauwrence Kohlberg est l’un des rares psychologues contemporains pour
qui la moralité est une règle d’éthique et non de conduite.
Le développement moral et la moralité découlent, selon lui, du principe
de justice, c’est-à-dire de l’équilibre entre les obligations et les responsabilités,
principe qui ne peut être suivi que si l’on respecte l’être humain plus que la loi.
De son point de vue, la justice est l’aboutissement du développement moral ; en
d’autres termes, dans la perspective du développement, l’être humain dans son
développement, cherche à atteindre les niveaux de justice les plus élevés.
Kohlberg distingue six stades de développement moral, groupés, en trois
niveaux. Le stade 6 constitue le niveau le plus élevé de raisonnement moral et
le stade 1, le niveau le plus bas. On peut situer les individus à l’un ou l’autre de
ces stades selon leur façon de se sortir d’un certain nombre de dilemmes moraux
bien définis.
Kohlberg estime qu’aux premiers stades du développement moral, là où
la justice n’est ni entièrement comprise ni clairement distinguée, l’être humain
se contente des raisonnements moraux sommaires qui ne sont pas
nécessairement immoraux. Mais à son avis, la personne devrait néanmoins
tendre vers les stades plus élevés. Kohlberg lie la capacité de développement de
la personnalité et de développement de la fonction cognitive à la capacité de
17

traverser les six stades du développement moral. A son sens, ces trois types de
développement vont de pair.
Niveau I (de 4 à 10 ans) : préconventionnel ou prémoral. On se laisse guider
surtout par les éléments venant de l’extérieur. On obéit aux normes d’autrui pour
éviter une punition ou pour obtenir une récompense. Ce niveau comprend :
- le stade 1 caractérisé par l’orientation vers la punition ou l’obéissance :
qu’est-ce qui va m’arriver ? L’enfant se conforme aux règles des autres
pour éviter la punition
- le stade 2 caractérisé par une orientation vers le marchandage et les
échanges du type « donnant, donnant ». L’enfant se conforme aux règles
pour son propre intérêt et par craintes des représailles.
Niveau II (de 10 à 13 &ns) : la moralité de la conformité au rôle traditionnel.
L’enfant cherche désormais à plaire et peut décider que sa conduite est
« bonne » si elle est conforme aux normes des personnes qui représentent
l’autorité. Ce niveau comprend :
- le stade 3 caractérisé par une consolidation des relations, de recherche de
l’approbation d’autrui, la règle par excellence étant : « Suis-je bon ? »
L’enfant veut plaire et aider les autres, il est capable d’évaluer les
intentions d’autrui et de former ses propres idées sur la bonté.
- le stade 4 caractérisé par une moralité de l’ordre et de la conscience
sociale : Et si tout le monde le faisait ? Le jeune est préoccupé par son
devoir, le respect de l’autorité et le maintien de l’ordre social.
Niveau III (de 13 ans, jeune adulte ou jamais) moralité des valeurs librement
acceptées. On franchit le seuil de la véritable moralité. Pour la première fois, l’être
humain devient conscient du fait qu’il peut exister un conflit entre deux normes
acceptées par la société et doit décider pour laquelle opter. La décision sur la
conduite à adopter, autant par rapport aux normes suivies que par rapport aux
raisonnements sur le bien et le mal, revient maintenant à l’individu. Les stades 5
et 6 découlent des mêmes préceptes. On peut accéder à l’un ou à l’autre selon le
niveau de raisonnement atteint. . Ce niveau comprend :
- le stade 5 caractérisé par la moralité de contrat, de droits individuels et de
la loi acceptée par voie démocratique. Pensée rationnelle, qui tient compte
de la volonté de la majorité et du bien-être de la société. On admet
généralement que ces valeurs sont mieux protégées par le respect des lois
bien qu’on puisse aussi admettre que, dans certaines circonstances, il
existe u conflit entre les besoins individuels et la loi.
18

- le stade 6 caractérisé par une moralité des principes universels. La


personne s’impose les règles qui lui semblent justes, sans se préoccuper
des contraintes dictées par la loi, ni de l’avis d’autrui. Son action est
conforme à ses convictions et normes profondes et il se reprocherait toute
dérogation.
D’après Carol Gilligan, également théoricien du développement moral, la théorie
de Kohlberg ne peut s’appliquer universellement.
Carol Gilligan
Le féminisme a poussé les femmes vers l’exploration de nouvelles voies leur
permettant d’analyser leur condition. Cette recherche de l’identité les a obligées à
poser des questions dans un grand nombre de domaines. La question qui a
préoccupé Gilligan a été le développement moral des femmes.
La théorie de Kohlberg et les théories connexes du développement moral ont été
élaborées en prenant comme prototype l’homme. Dans une telle perspective,
l’homme constitue la norme et donne l’orientation du raisonnement moral.
Gillignan se demande dans quelle mesure ces théories peuvent être
représentatives pour le développement de la femme et élabore sa propre théorie
du véritable développement de celle-ci.
Gillignan a constaté que lorsqu’on pose aux jeunes filles les questions concernant
les dilemmes moraux énoncés par Kohlberg, leurs réponses les situent d’habitude
au stade du développement moral inférieur à celui des garçons du même âge.
C’est la raison pour laquelle, dit-elle, on considère que les femmes manquent de
logique et qu’elles sont incapables de raisonner. Gillignan explique que, pour la
femme, le monde n’est pas fait d’individus et de situations isolés, mais de
rapports et de liens entre les êtres humains. Pour la femme, le dilemme ne se
pose pas sous la forme d’un problème de mathématique qui prend pour objet les
êtres humains mais, plutôt, sous celle d’une narration des rapports qui
s’établissent entre eux dans le temps. Gillignan pense que la perspective des
femmes est toute aussi valable que celle des hommes et elle demande qu’on
remette en question les stades définis par Kohlberg, qu’elle estime n’être valable
que pour une partie de la population.
Gillignan essaie d’établir des distinctions entre les expériences vécues par les
deux sexes qui déterminent des comportements distincts, de façon à ce que l’on
puisse mieux définir les expériences propres à chacun d’entre eux. A son avis,
une telle étude est particulièrement vitale pour les femmes dont le
développement a toujours été considéré comme un « échec » et auxquels on a
toujours refusé une réalité qui leur est propre.
19

Juanita Williams
Carol Gillignan n’a pas été la seule à critiquer la pertinence des théories du
développement de la personnalité chez les femmes. Tout comme Gillignan,
Juanita Williams affirme que pour la plupart des théoriciens du développement
de la personne, l’homme constitue la norme selon laquelle on évalue l’humanité
entière.
D’après Williams, les femmes se développent dans un contexte bio-psycho-
holistique. Outre le développement moral, elle a étudié l’apprentissage, le choix
de modèles, le renforcement, l’identification par rapport au rôle assigné au sexe
ainsi que les rapports sociaux, le développement cognitif et la compétence.
Williams affirme que le comportement humain est déterminé par un répertoire
néonatal et s’organise dans le contexte social. Elle ne croit pas que le
comportement des femmes soit moins normal que celui des hommes, il n’est que
moins compris à cause de l’absence des recherches. Les femmes, en tant que
classe, dit-elle, ont de caractéristiques, conditions de vie et des expériences qui
les distinguent des hommes. Si l’on veut comprendre leur comportement, elles
devraient faire l’objet d’études distinctes.
L’importance de la perspective du développement moral
Kohlberg, Gillignan et Williams ont proposé une perspective et un cadre où les
jugements et les raisonnements d’ordre moral sont nécessaires.
Au fur et à mesure que les chercheurs soulèveront de nouvelles questions au sujet
du développement les résultats devront être pris en compte.
3. Problématique de la psychologie comparée
Poser la problématique de la psychologie comparée de personnalités c’est poser
en d’autres termes la problématique de la culture et personnalité. C’est aussi
poser la problématique de la comparaison des personnalités appartenant aux
cultures différentes. C’est ainsi que certains auteurs ont parlé de la psychologie
comparée des personnalités.
Selon le Pr. Doutreloux, la problématique du rapport culture et personnalité est
née aux E.U. dans les années 1920-1930 dans les milieux d’anthropologues.
A cette époque, le courant diffusionniste faisait les études sur les cultures non
blanches : indiennes et africaines en mettant en parallèle ce qui était considéré
comme leurs traits spécifiques. Et le professeur de conclure : ce courant a abouti à
une impasse, c’est-à-dire qu’elle n’a pas pu donner les explications qu’on
attendait. Le courant s’est fourvoyé à cause d’un excès de théorisation. Il a noté
également que le stéréotype du noir, de l’indien, de l’américain, de la femme, de
20

l’enfant ne donne pas l’occasion de saisir les contenus psychologiques de ces


différents individus.
Cette problématique de l’anthropologie est caractérisée par le souci de fonder
une nation dotée d’une culture homogène. Et pendant longtemps cette
préoccupation politique a sous-tendu l’étude des traits, les éléments culturels
pouvant être diffus. Et on a voulu savoir comment la personnalité est moulée par
la culture, comment faire du sauvage indien, noir des américains civilisés ?
Il s’agit donc des préoccupations politiques et sociales et non à proprement
parler scientifiques qui furent à la base de l’anthropologie américaine. Ceci nous
conduit à dégager quelques principes :
 l’ordre ne peut se faire qu’à partir du désordre. L’idée de mise en ordre
présuppose l’existence du désordre ;
 la nécessité d’une remise en cause constante de nous-mêmes et des idées
acquises
 les vérités d’hier ne sont pas nécessairement celles d’aujourd’hui.
 A ces principes, il convient d’ajouter celui du « relativisme culturel »
affirmant qu’aucune culture n’est absolument supérieure ni absolument
inférieure à l’autre.
Des témoignages sur la naissance du courant ont résultats universels pouvant
donner une explication systématique des faits observés. Et ceux qui ont travaillé
dessus ont prétendu que leur méthode était une méthode scientifique. Cependant,
on a constaté plusieurs erreurs dont l’ethnocentrisme, c’est-à-dire que lorsqu’un
auteur anglais explique une société, le modèle est anglais d’une façon implicite.
En outre cet ethnocentrisme revêtait trois formes : l’évolutionnisme, le
diffusionnisme et le fonctionnalisme. Ces erreurs tiennent parce qu’on voulait
trouver chaque fois un facteur dominant.
Pour l’évolutionnisme, « toute société doit passer par les trois étapes
nécessaires : sauvage, barbare et civilisé » pour se développer.
Son facteur dominant est le temps.
Quant au diffusionnisme, « Seul le voisinage explique la société ». C’est ainsi
que certains auteurs ont affirmé que tout vient de la mère.
Son facteur dominant est l’espace.
Selon le fonctionnalisme, « la fonction d’une technique d’une institution explique
la société ». Son facteur dominant est le besoin.
21

La deuxième erreur est la politique coloniale. La colonisation a fait table rase de la


culture du non civilisé. IL n’en a pas et il faut lui en donner une, celle de
l’Occident.
Réactions contre le l’Ethnocentrisme : la relativisme
Selon le courant, toute société a toujours une valeur personnelle. C’est elle qui lui
a permis de résoudre ses propres problèmes. Ce courant évite d’établir une
comparaison entre les cultures. C’est sa règle méthodologique. Donc, toute société
a une réponse à un besoin.
Pour O. Klineberg, discuter de la culture et personnalité c’est en un sens faire
une fausse dichotomie et poser un faux problème. On peut soutenir d’une part
que la culture s’exprime par le comportement des personnes qui la détiennent.
Ceci nous conduit au postulat qu’il n’y a pas de culture sans personne.
Et d’autre part, la personnalité est ce qu’elle dans le processus d’enculturation.
Elle présente en partie une assimilation du matériel du milieu ambiant. On a
proposé alors de parler de la culture dans la personnalité, d’autres de la
personnalité dans la culture ou alors culture-personnalité. Certains ethnologues
ont soutenu l’existence indépendante de la culture et fondé cette opinion sur deux
arguments fondamentaux : la culture survie bien que les individus meurent, bien
qu’après plusieurs siècles elle peut garder les traits reconnaissables dans
l’histoire d’une culture donnée, des inventions ou études ouvertes sont faites par
un ou plusieurs individus différents.
22

CHAPITRE II. LES MALADIES CREATRICES.


« La maladie est ce qui gêne les hommes dans l’exercice normal de leur vie, et
surtout ce qui les fait souffrir ». (LERICHE)
« La maladie est une bénédiction divine » (Mokichi Okada).
2.1. Essai de définition.
Dans un sens demeuré juste jusqu’il y a des décennies, la maladie est une
altération organique ou fonctionnelle considérée dans son évolution comme une
entité définissable. De cette conception se sont découlées plusieurs
classifications : maladies bénignes, graves ; incurables, maladies vénériennes,
maladies de carence et maladies mentales, maladies de la honte etc.
Avec le courant de l’anthropologie, la maladie a été considérée par François
Laplantine comme une essence et comme une fonction.
La première tendance est en germe dans un des courants de la médecine
hippocratique dans sa tentative de rupture avec la pensée spéculative et son
attention portée aux symptômes corporels du malade. Elle trouve une
formulation systématique dans le dualisme cartésien séparant l’âme du corps, la
première étant métaphysique et le second de la physique. Elle connaît un
développement prodigieux grâce l’exploration de l’anatomie et triomphe avec les
découvertes micro biologiques de Pasteur qui ouvrirent la voie à notre médecine
moderne.
L’idée ou plus précisément l’image-croyance que l’on peut assez aisément
dégager est la suivante : le praticien et son client procèdent à une objectivation
de la maladie considérée comme le mal en soi qui est pensé selon les catégories
de l’entrée et de la sortie : la maladie est une entité ennemie et étrangère et il
convient de la combattre.
Le deuxième système étiologico-thérapeutique s’est imposé avec une telle force
à notre société et à nos mentalités qu’il a fini par marginaliser, voir occulter un
autre courant de la pensée et de la pratique médicale. Essayons d’en déterminer
exactement la spécificité ; la santé et la maladie ne s’opposent plus comme
précédemment comme le bien et le mal, car la seconde est considérée comme une
réaction en elle-même thérapeutique. Au couple, Santé= Bien, Maladie= Mal se
substitue une compréhension non plus lésionnelle, mais fonctionnelle, non plus
substantialiste, mais relationnelle : le normal et le pathologique sont alors
pensés en termes d’harmonie et de dysharmonie, d’équilibre et de déséquilibre.
Le système de représentation peut s’actualiser en plusieurs variables.
23

a) La maladie comme rupture d’équilibre entre l’homme et lui-même : c’est par


exemple la représentation de la maladie issue de la médecine que l’on
appelle humorale, qui considère les symptômes comme variations soit par
excès soit par défaut d’une de quatre humeurs : le chaud, le froid, le sec et
l’humide. Un autre cas de figure nous est fourni par l’étude de l’homéopathie
tant populaire que savante. Ainsi, la connaissance paysanne qui se trouve
confrontée aux brûlures agit le plus souvent « feu contre feu » par des
compresses de vinaigre ou d’eau de vie ou encore en faisant chauffer la partie
brûlée. De même pour la fièvre, on donne au malade des infusions chaudes, de
potages, des tisanes, cherchant à le faire transpirer, à le faire rougir, à aider
l’expulsion du chaud en l’attirant par des cataplasmes ou des bouillottes.
L’homéopathie savante telle qu’elle est issue des expériences de Hahnemann,
est fondée sur la même représentation de la guérison non par les contraires
mais par les semblables qui sont censés agir dans le sens d’une excitation et
d’une réactivation des symptômes. Ce qui le distingue de l’homéopathie
populaire, en dehors du fait bien connu de l’administration des doses
infinitésimales, c’est l’étude du passé, du terrain ; de la longue maturation de la
maladie et de l’administration d’un remède précis et individualisé devant
correspondre à l’individualité propre du malade.
C’est enfin cette même conception dynamique, tenant compte de l’organisation
interne de l’individu et de sa désorganisation fonctionnelle que nous retrouvons
dans la médecine psychosomatique contemporaine et dans la psychanalyse.
Le psychanalyste, l’analyste, loin de chercher à juguler les symptômes par les
contraires (électrochoc, neuroleptiques, anti-dépresseurs voire neurochirurgie)
agit par le moyen d’associations libres, dans le sens de leur réactualisation,
provoquant ainsi chez l’analysé la fameuse « névrose de transfert ». Soulignons
ici que le psychanalyste ne travaille pas sur la généalogie objective des troubles
et en particulier sur les cause sociales, ayant entraîné la maladie, mais sur les
fantasmes éprouvés et les modifications des relations entre l’homme et son
milieu, mais entre les instances psychiques : le Ça, le Moi, et le Surmoi.
b) La maladie comme rupture d’équilibre entre l’homme et le cosmos : c’est cette
représentation que nous trouvons notamment dans la médecine des
correspondances ou des signatures. La maladie est considérée comme l’effet
d’une dysharmonie entre le microcosme et le macrocosme et le processus de
la guérison consiste dans une rééquilibration cosmique (intervention directe
sur des éléments naturels ou au moyen de ces derniers).
c) La maladie comme rupture d’équilibre ente l’homme et son milieu (ou sa
société) : ici que la représentation d’une maladie individuelle que l’on
24

pourrait isoler, autonomiser, et qui serait la morbidité spécifique d’un être


humain est assez rare dans les champs ethnographique des sociétés connues.
2.2. La maladie créatrice
Elle est celle à l’issue de laquelle on sort avec vision modifiée du monde, avec une
nouvelle philosophie, avec une nouvelle vision. Le sujet ayant fait une maladie
créatrice reçoit des dons de voyance sur la passé, le présent et le futur. On peut
dire qu’il s’agit d’une nouvelle naissance dans un nouvel être. L’examen de notre
culture, de la littérature, de l’histoire nous fournit plusieurs exemples. Nous
rapportons dans la partie qui suit quelques cas à titre d’illustration.
2.3. ETUDE DES CAS
2.3.1. FECHNER
Il est présenté comme le fils d’un pasteur, il a fait ses études de médecine à
Leipzig où il vécut jusqu’à sa mort.
De temps en temps il publiait de petits ouvrages sous le faux nom (de Docteur
MISES).
« L’anatomie des âges » était l’un de ses opuscules, où il parlait de l’évolution du
règne animal à l’homme, puis il extrapola qu’il cherchait à imaginer la forme
idéale d’un être supérieur, c’est-à-dire un ange.
En 1836, Fechner publia, sous son nom véritable ce qu’il appellera « le petit livre
de la vie après la mort ».
A l’âge de 32 ans, il se marie, il enseigne la physique à l’université de Leipzig. Un
de ses contemporains dit ceci à propos de lui : dès qu’il accéda à une position
indépendante qui lui permette de se consacrer à sa propre recherche en médecine,
toute son énergie se trouva brisée. Il avait des difficultés à terminer ses cours.
Fechner poursuivit ses activités dans un état de tension considérable et se livra
lui-même à des expériences sur les phénomènes visuels subjectifs. Sa vue en
souffrit et à l’âge de 39 ans il s’effondra et dut renoncer pendant trois ans à ses
activités professionnelles.
En termes de nosologie moderne, la maladie de Fechner se définirait comme une
grave dépression nerveuse accompagnée de symptômes hypochondriaques.
On peut aussi y voir un exemple de ce que Novalis a appelé l’hypocondrie sublime,
dont le patient sortirait avec une philosophie et une métamorphose de sa
personnalité. Presque tout le temps de sa maladie, il fut contraint de vivre dans la
solitude la plus absolue, dans une pièce sombre dont les murs étaient peints en
noir, où il portait un masque pour se protéger contre la lumière. Il ne supportait
25

plus la plupart des aliments. Sa guérison, selon ses propres dires, advient d’une
façon peu banale. Une amie de la famille rêva qu’elle lui préparait un plat de
jambon fortement épicé. Le lendemain elle lui prépara effectivement ce plat et le
lui apporta en insistant pour qu’au moins il goutte. Le jour suivant, il mangea
régulièrement de petites quantités de ce plat et sentit peu à peu ses forces lui
revenir.
Il entreprit ensuite de remettre en branle ses facultés intellectuelles au prix d’un
effort considérable. Il fit ensuite un rêve où il vit le nombre 77 et il en conclut qu’il
serait guéri le 77e jour et cela arriva effectivement.
Ses trois années de dépression furent suivies d’une brève période d’exaltation.
Fechner éprouvait un sentiment de bien-être et exprimait des idées de grandeur.
Il se croyait élu par Dieu et capable de répondre à toutes les énigmes de l’univers.
Il était convaincu qu’il avait découvert un principe universel fondamental du
monde de l’esprit que le principe universel de Newton l’avait été pour le monde
physique.
Fechner appela sa découverte le principe du plaisir. Avant sa maladie, il se
présentait comme un physicien qui n’avait que de mépris pour la philosophie de
la nature.
Désormais, il se rangea lui-même parmi les tenants de cette école. Il échangea sa
chaire de physique à l’université de Leipzig contre celle de philosophie.
2.4.2 NIETZSCHE ou le prophète d’une nouvelle ère
Vers 1880, le monde occidental était sous l’influence du positivisme, du
scientisme et de l’évolutionnisme.
Les courants dominants, outre quelques survivances de l’ancienne philosophie de
lumière, étaient représentés par le darwinisme social, le marxisme et les
philosophies matérialistes et mécanistes plus récentes.
F. Nietzsche s’imposa comme l’un des initiateurs de ce mouvement.
Né en 1844 et mort en 1900, il était le fils d’un pasteur. Celui-ci mourut alors que
Nietzsche était encore tout jeune.
Sa première vocation fut la philosophie gréco-latine. Etudiant brillant, il sera
nommé professeur de philosophie classique à l’université de Bâtes à 25 ans. La
maladie le contraignit à renoncer à son poste en 1879. Il avait déjà commencé la
publication d’une série d’ouvrages où il proclamait sur un ton prophétique la
nécessité de renverser les idées reçues de la société contemporaine. Il préconise
le principe de la volonté de puissance et de l’éternel retour.
26

En 1889, il fut frappe de paralysie générale et passa les dernières années de sa vie
dans un état d’aliénation mentale complète. Il correspond au haut degré à ce que
les Allemands appellent une « nature problématique », c’est-à-dire une
personnalité difficile à évaluer et donnant lieu aux opinions les plus
contradictoires. Son évolution entière se fit à travers une série de crises
successives.
Après le drame que fut pour lui la perte de sa foi chrétienne dans sa jeunesse, il
donna cours à son enthousiasme pour les philosophes Schopenhauer et Wagner.
A ces expériences s’ajouta une série de troubles physiques et névrotiques dont il
sortait souvent avec une philosophie différente (renouvelée) ; la dernière
s’exprima à travers « ZARATHOUSTRA », l’un de ses ouvrages.
Trois éléments contribuent à conférer une importance particulière à Nietzsche
dans le monde européen contemporain :
- sa légende
- son style
- ses idées.
De son vivant, s’était créée autour de lui la légende d’un homme s’excluant lui-
même de la société, vivant en solitaire, un peu comme le héros de son livre
« Zarathoustra » qui vivait dans les montagnes. Puis ce fut sa maladie mentale où
certains se plaisaient à voire une vengeance du destin contre un homme
prétendant s’élever au-dessus de ses semblables.
Il est difficile de juger les idées de Nietzsche parce qu’elles manquent de
systématisation et abondent en contradictions.
Ses contemporains étaient impressionnés par leur caractère polémique et par les
attaques véhémentes de Nietzsche contre les idées reçues qui étaient en honneur
dans sa société de l’époque, contre l’ordre social bourgeois, contre la religion
établie et la moralité conventionnelle ; il déniait toute existence à la causalité. Il
dénie toute existence aux lois universelles et ne croyait pas en la possibilité pour
l’homme d’atteindre quelque vérité que ce soit. Il conclut tous ces rejets en disant
que « tout est permis, rien n’est vrai ».
Il est aussi important par ses intuitions psychologiques et par ses concepts
philosophiques. Nietzsche serait, selon un auteur : « le plus grand critique et
psychologue de la morale que l’histoire spirituelle de l’humanité ait connu ».
Si l’homme se ment à lui-même plus qu’il ne ment aux autres, le psychologue doit
chercher à dévoiler ce que les gens veulent effectivement signifier plutôt que de
s’attacher à ce qu’ils disent ou font. Aussi, la parole de l’évangile selon laquelle
27

« Quiconque s’abaisse sera élevé », devrait, pour Nietzsche, être comprise comme
suit : « Quiconque s’abaisse cherche à être élevé ».
Selon lui, la morale chrétienne n’est qu’une forme raffinée de
ressentiment, c’est une morale d’esclaves, incapable de se rebeller ouvertement
contre les oppresseurs, aussi ont-ils choisi cette voie de rébellion qui leur permet
de se sentir supérieur en humiliant leurs ennemis. C’est une morale d’hypocrites.
Nietzsche, reprenant Diderot, dira que la civilisation est assimilée à la
maladie et à la souffrance de l’humanité parce qu’elle est la conséquence d’un
arrachement par la force à notre passé animal ; une déclaration de guerre contre
les instincts ancestraux faisant sa vigueur, son plaisir et sa grandeur, autrement
dit, le sauvage (non civilisé).
L’une des caractéristiques de la psychologie de Nietzsche est l’importance
accordée non seulement aux instincts d’agressivité mais aussi d’autodestruction.
Entre autres manifestations, ceux-ci s’expriment dans notre soif de connaissance.
La science pour lui est un principe ennemi de la vie et destructeur. La soif de
vérité pourrait bien n’être qu’un désir de mort déguisée.
2.4.3 S. FREUD
Tous les témoignages concordent à reconnaître que le mariage de Freud
avec Martha fut heureux. Ils eurent six enfants parmi lesquels Anna qui prit la
relève de son père. En 1896, Freud sentit que sa théorie et sa méthode
thérapeutique étaient suffisamment originales pour qu’il puisse leur donner un
nom nouveau et spécifique, la PSYCHANALYSE.
De 1891 à 1899, quatre événements s’entremêlent inextricablement dans
la vie de Freud :
- ses relations très intimes avec Fliess,
- ses troubles névrotiques ;
- son auto-analyse,
- son élaboration des principes fondamentaux de la psychanalyse.
C’est en 1887 qu’il fit la connaissance de Fliess, un médecin oto-rhino-
laryngologiste (O.R.L.), auteur des théories dont on peut retenir le point essentiel
suivant : l’existence en tout individu d’une double périodicité : féminine avec un
cycle de 28 jours et masculine avec un cycle de 33 jours. La première lettre de
Freud à Fliess était datée du 24 novembre 1887 et concernait le diagnostic d’un
malade. Une amitié naquit entre eux, amitié qui prit rapidement un caractère plus
intime. Pour Freud, Fliess était un correspondant scientifique, son médecin
28

personnel et un confident qui le stimulait dans ses propres recherches, et en qui il


avait une confiance illimitée.
Au début de 1894, Freud souffrit de symptômes cardiaques. Sur les
conseils de Fliess, il cessa de fumer et malgré les difficultés, il s’en tint à sa
décision. A la mort de son père, il publia, en collaboration avec le Docteur Breuer,
« les études sur l’hystérie ». Les souffrances de Freud ne faisaient qu’empirer.
Lors d’une excursion en montagne, il se sentit très essoufflé et fut obligé de
revenir sur ses pas. Une fois de plus, il cessa de fumer mais recommença bientôt.
Freud se rendait compte de tout ce que son père représentait pour lui. Très
probablement il ressentait un sentiment de culpabilité à cause de l’hostilité qu’il
avait éprouvée contre lui.
A partir de ce moment, l’auto-analyse de Freud à laquelle il semblait s’être
livré de façon intermittente jusque-là, devint systématique, en particulier
l’analyse de ses rêves et il l’aborda de plus en plus.
Pendant une année après la mort de son père, les souffrances intérieures
de Freud s’empirèrent. Il méditait nuit et jour sur la structure de l’appareil
psychique et sur la nature des rêves. Il portait une attention accrue aux
fantasmes qui masquent certains souvenirs et il se sentait sur le point de
découvrir de grands secrets, croyait les avoir découverts, puis retombait dans un
doute torturant. Il parlait de sa névrose qualifiée de la petite hystérie. Dans une
lettre à Fliess il dit : « mon principal malade, celui qui m’occupe le plus c’est moi-
même » et il ajoutait que son analyse était plus ardue que celle de quiconque.
Les souvenirs de son enfance affluaient dans sa tête par exemple la «
nounou » vielle et laide qui lui parlait de Dieu et de l’enfer. Il voyait en elle la
source de ses premières expériences sexuelles, tandis que la libido à l’égard de sa
mère s’était éveillée à 2 ans et demi.
Les relations qu’il entretient avec son neveu, d’une année et demie son
aîné, avait établi un modèle pour l’aspect névrotique de ses amitiés ultérieures. Il
se rappela sa jalousie à l’égard de son petit frère et le sentiment de culpabilité
qu’il éprouva après sa mort. Il supposa que les sentiments amoureux de petit
garçon pour sa mère et sa jalousie envers son frère représentaient un phénomène
universel et il invoqua les noms d’Œdipe et de Hamlet.
Il reformula ses idées su l’origine de l’hystérie et des obsessions. Au cours
de ces processus que traversaient Freud, l’auto-analyse et l’analyse de ses
malades s’entremêlaient très étroitement et Freud écrivait à Fliess : « il m’est
impossible de faire sentir la beauté intellectuelle de ce travail ».
29

La publication de l’interprétation des rêves marqua la fin de sa névrose


créatrice, mais Freud n’arrêta point son auto-analyse. A partir de ce moment, il
consacra chaque jour quelques heures à son auto-analyse. Il sortit de son
expérience avec une transformation intérieure et se libera de la dépendance où il
avait vécu par rapport à Fliess, et leur étroite amitié prit fin débute 1902.
L’étrange maladie que connut Freud entre 1894 et 1900 ainsi que son
auto-analyse ont donné lieu à des diverses interprétations. Certains de ses
adversaires prétendaient qu’il était gravement malade, et que la psychanalyse
n’était qu’un sous-produit de sa maladie. L’auto-analyse de Freud n’était qu’un
aspect d’un processus plus complexe qui comprenait ses relations avec Fliess, sa
névrose et l’élaboration de la psychanalyse. Ce processus nous donne un
exemple de ce que nous appelons maladie créatrice.
2.4.4 Mokichi Okada.
Il naquit à Asakusa, Tokyo, le 23 décembre 1882, dans une famille de
négociants d’objets de seconde main. C’était un enfant très faible de santé, mais
malgré cela il avait un caractère indépendant et il aimait par dessus tout la justice.
Lorsqu’il voyait ses camarades opprimer un faible, il les réprimandait : son
caractère était bien trempé et porté à la compassion.
Pendant sa jeunesse bien que maladif, il fut le soutien de sa famille. Il était le
jeune patron d’une mercerie en gros. Les articles créés par lui-même ave goût
devinrent parois à la mode : une boutique de gadgets et autres articles ingénieux
qui par la suite, va se muer en une affaire florissante : Maison de commerce
Okada.
Okada qui n’hésitait pas à recourir à des techniques de management en avance
sur son temps, exploite pleinement son sens d’esthétique et ses talents en
peinture et laquage. C’est ainsi qu’il créa une décoration destinée aux accessoires
pour dames, l’Asahi Daiya (Diamant du Soleil), brevetée dans neuf pays autres
que le Japon. Et il déclara qu’il était au sommet de l’orgueil.
Le sort allait toutefois s’abattre sur Okada. Il perd d’abord son épouse et enfant,
ports en couches, puis c’est la faillite résultant de la panique financière et la
destruction de tous ses biens lors de tremblement de terre de Kanto (1923). Ces
malheurs successifs l’amenèrent à s’interroger sur les causes de la souffrance et
de la maladie dans la société, puis à promouvoir la création d’un monde différent
bâti sur la vérité ; la vertu et la beauté. Il se lança dans l’étude de différentes
philosophies.
Ce japonais a fait l’école élémentaire et la classe préparatoire de l’école de beaux-
arts. Parmi les philosophes de son temps, il partageait les points de vue de H.
30

Bergson, de Rudolf Eucken (1846-1926). Il était d’accord avec la pensée de ce


dernier, un neo-idéaliste allemand pour qui ; l’homme construit une idole pour se
prosterner devant. C’est un instinct humain. L’homme s’en satisfait.
La philosophie d’Okada réserve une place importante à l’art sous ses trois
formes : l’art de vivre, l’art de la nourriture et l’art de la beauté. Pour lui, l’art
élève et purifie l’esprit. Et cette même notion de purification spirituelle qui va
susciter son intérêt pour l’agriculture naturelle. Tout comme l’art purifie l’esprit,
les aliments naturels exempts de tous les produits chimiques et de toxines si
nocifs purifient le corps humain.
Dans sa vie spirituelle, nous notons qu’il était un athée extrême, ne croyait ni
en Dieu ni en Bouddha. Il pensait que croire dans l’invisible n’était que
superstition. Il était arrivé qu sommet de l’orgueil par le succès de sa Maison de
commerce. Mais ensuite, il a échoué par les malversations financières. Il a
rencontré le malheur par la mort de son épouse et son enfant morts en couches,
plusieurs maladies : maladie des yeux, perte de l’utilisation de son index, la
tuberculose etc. Ce destin misérable l’a fait tomber en enfer. C’est ainsi qu’il est
allé à l’endroit où la plupart de gens arrivent : la religion et il est entré à Omoto-
kyo, la religion en vogue à son époque. Il ne pouvait chercher le salut que dans le
shintoïsme ou dans la bouddhisme comme la plupart de gens le faisaient à son
époque.
En examinant son passé, il a ri de sa bêtise. Ainsi depuis cet éveil spirituel, sa vie
d’athée extrême avait changé de 180 degrés et il avait compris que l’être humain
reçoit la bénédiction de Dieu et de Bouddha et qu’il est vain de méconnaître
l’existence de Dieu.
En 1926, il reçut un grand nombre des révélations sur le programme divin depuis
l’origine de l’humanité jusqu’à la période actuelle, sur sa relation avec Dieu, sur
sa mission de salut de l’humanité, le passé et l’avenir, les erreurs que l’Humanité
a commises et la voie qu’elle se doit de prendre.
De ses expériences spirituelles, il eut des révélations du Dieu Créateur. Celles-ci
lui permirent d’atteindre un état d’illumination Kenshinjitsu et d’unité avec Dieu
Shinjin-gôitsu.
1°L’état d’illumination
L’état d’illumination spirituelle signifie la compréhension intime du cœur de toute
chose et littéralement il veut dire la vision de la vérité.
Jusqu’à présent, on a toujours considéré la religion, la philosophie, l’éducation,
l’idéologie, etc. comme étant toutes incapables d’expliquer l’univers au-delà d’un
31

certain point. Ainsi l’homme est-il censé ne pouvoir accéder à des mystères les plus
profonds.
Shakyamuni dit qu’il n’atteignit l’état suprême d’illumination spirituelle, qu’à l’âge
de 72 ans. On dit que Nichiren l’atteignit dans la cinquantaine bien qu’il n’ait jamais
parlé de l’illumination, Jésus-Christ dit : « Dieu est à la portée de la main et
prophétisa la deuxième venue du Christ ». Il n’aurait pu prononcer ces prophéties s’il
n’avait été dans l’état d’illumination.
Plusieurs autres saints apparus dans l’histoire furent proches d’un état
d’illumination.
C’est à l’âge de quarante-cinq ans que j’ai atteint l’illumination.
A ce moment-là, le passé, le présent et l’avenir me sont devenus limpides, de même
que l’avenir du monde et des hommes.
2° Unité avec Dieu ( Shinjin-gôitsu).
L’idée de l’unité de l’homme avec Dieu remonte à l’Antiquité, mais je ne pense pas
que quiconque ait pu réellement atteindre cette union.
Les trois grands leaders religieux Shakyamuni, Jésus et Mahomet peuvent paraître
l’avoir atteint, mais ils n’étaient en réalité que des relais de la volonté de Dieu.
Exprimé tout simplement, ils étaient les intermédiaires de Dieu.
Ainsi, on ignorait la différence qu’il y avait entre l’unité avec Dieu et être le relais de
Dieu. Les relais de Dieu sont possédés par le pouvoir divin et agissent conformément
à ce que Dieu leur dit de faire. C’est pour cela qu’ils prient Dieu et Bouddha en
permanence pour Leur demander conseils et protection.
L’esprit divin qui est en moi est de rang supérieur. Il n’existe pas de divinité de rang
plus élevé, c’est pourquoi ce n’aurait aucun sens pour moi de vénérer d’autres dieux.
Mokichi Okada a légué à l’humanité
- l’art médical japonais ou la science médicale japonaise : le Johrei comme
médecine du 21è siècle ou la thérapie purificatrice Okada (T .P. O.).
- L’agriculture naturelle : une philosophie de la terre et de l’alimentation.
- Les beaux-arts, l’arrangement floral.
Ces activités et ses écrits sont étudiés dans les Universités dans le monde par les
sommités scientifiques de notre époque.
Donner les détails sur cet héritage.
32

CHAPITRE III. LE CARACTERE NATIONAL


(La personnalité de base et la personnalité modale)
Dans les sciences sociales modernes, l’étude du caractère national comme
celle d’interrelations entre la personnalité modale, sa structure sociale et la
culture est perçue comme celle du problème des interrelations. Autrement,
parler du caractère national veut dire chercher à trouver la relation entre la
personnalité modale (personnalité de base) et la culture.
Ainsi l’étude de caractère national vise avant tout la « la personnalité
modale ». Ce concept se réfère à des caractéristiques du comportement de la
personnalité qui apparaissent avec une certaine fréquence dans une société
donnée.
En utilisant le terme statistique de « mode » pour parler de personnalité
modale, on reconnaît implicitement à côté de l’existence éventuelle de patterns
de personnalité apparaissant fréquemment, l’existence de différences
individuelles. Il semble qu’il faille mieux rechercher plutôt un type de
personnalité modale à l’intérieur d’une société donnée une pluralité de
personnalités modales. Une telle démarche nécessite l’investigation des variables
psychologiques spécifiques des échantillons représentatifs d’individus dans
chacun des différents pays. Il s’agit de quelles variables psychologiques ou quels
sont les traits de personnalité le plus pertinents pour la construction de cet
ensemble analytique. Les variables utilisées traditionnellement dans l’étude du
caractère national reflètent une notion de la personnalité fortement influencée
par la psychanalyse ou par l’approche traditionnelle de l’Anthropologie
socioculturelle.
Systématiquement il est difficile de mener une telle étude sans recourir aux
disciplines apparentées comme la psychanalyse et l’Anthropologie culturelle.
Actuellement se dessine une nouvelle perspective en anthropologie
tendant à redéfinir l’étude de la culture comme celle des systèmes cognitifs liés
à l’appréhension d’un phénomène donné du monde social, par exemple les
anthropologues, les ethnologues s’intéressent au système de parenté, à la
taxonomie, aux maladies, aux plantes médicinales, etc.
Certains auteurs (psychanalystes) soulignent le fait de la nécessité de
recours à la psychanalyse en hypostasiant les courants principaux de la
psychanalyse.
En psychologie sociale, Triandis a pu particulièrement développer le
concept de la culture subjective par lequel il désigne les manières typiques pour
33

un membre d’une culture donnée de percevoir et conceptualiser son


environnement.
Dans cette nouvelle perspective, l’étude de la personnalité modale devient
celle de l’identité sociale subjective. Il ne s’agit pas de construire une entité
abstraite que l’on définirait artificiellement de « modale », de réaliser un
programme de recherche où l’élément central est une structure cognitive que l’on
appelle identité ou le soi.
Ainsi conçue, la personnalité représente la dynamique des systèmes et
sous-systèmes de la pensée. Quels sont ces systèmes et sous-systèmes ?
A. Eléments subjectifs et objectifs de l’identité sociale
Le point de départ d’une telle approche sera de considérer
que chaque individu est situé objectivement, une partie de cette localisation
objective peut être lue dans une carte d’identité : sexe, âge, nationalité,
profession, état-civil. Si nous ajoutons la religion, l’orientation politique et la
classe sociale, nous obtenons huit groupes fondamentaux caractérisant en tout
cas, objectivement sinon subjectivement tout membre d’une société donnée. Ces
groupes peuvent être considérés comme des paramètres de base de l’individu.
B. Méthode d’étude de l’identité sociale
1. La méthode d’inventaire de l’identité sociale
La technique va consister dans un premier temps à obtenir les données de
premier degré : association libre. Le but consiste à engendrer des nouvelles
données : données au second degré.
Les éléments contextuels constituant un aspect du versant objectif de
l’identité sociale, par exemple le groupe d’appartenance, la catégorie sociale. C’est
par rapport à ce versant objectif que nous pouvons nous exprimer en termes de
« nous » et de « eux » (in group et out group). Ainsi, le in group français est
composé des hommes et des femmes bourgeois, ouvriers, vieux, jeunes, des
normands, des provençaux. On pose alors à l’individu la question suivante :
« Lorsque vous pensez à des français en terme de nous, que vous vient-il à
l’esprit ? »
Réponse : « Nous les français, nous sommes… »
Elle signale que lorsqu’au moins cinq réponses sont retenues (obtenues) à
cette question, on passe à la question suivante : « Maintenant, si vous essayez de
penser aux français en terme de « eux », que vous vient-il à l’esprit ? »
Réponse : « Eux les français, ils sont… »
34

Là encore on obtient cinq associations libres ou cinq réponses. Ce qui nous


donne au moins dix réponses par sujet.
La même question va être utilisée pour chacun des groupes d’appartenance, et on
obtient un minimum de 80 réponses par sujet parce que chaque sujet a huit
groupes d’appartenance.
Les associations libres obtenues pour chacun de huit groupes d’appartenance
vont fonctionner comme stimuli pour produire des données du second degré. On
tente à présent de découvrir les frontières psychologiques des in group et de
leurs ont group, et d’identifier leur intersection avec les représentations du soi en
utilisant la technique suivante : L’IFMS (Introspection focalisée à multiples
études).
2. Résultats et signification des réponses obtenues
Le premier niveau de résultats obtenus est de contenu cognitif pouvant
comporter des éléments les suivants :
1° Caractéristiques individuelles (stéréotypes de groupe)
2° descriptions des rôles
3° privilèges ou désavantages perçus comme résultant de
L’appartenance à un groupe donné, par exemple :
- nous les noirs nous sommes opprimés,
- nous les américains nous sommes privilégiés par rapport aux autres
pays.
4° des attitudes négatives ou positives envers un groupe ou un
sous-groupe donné.
2. Etude des cas
1. Le problème du caractère national selon I.S.KOHN
La nécessité d’un lieu étroit entre l’histoire et la psychologie ne se
manifeste probablement nulle part de façon aussi évidente que lorsqu’on
s’attaque au problème du caractère national et ce problème soulève un certain
nombre de vraies questions parmi lesquelles on peut énumérer :- y - t-il
vraiment entre les individus appartenant à diverses nations et à divers groupes
des différences bien déterminées et empiriquement observables et, dans
l’affirmative, quelle est leur nature et leur degré :
35

Dans quelle mesure peut-on se référer à ces différences pour l’explication


de telle ou telle particularité dans l’évolution historique de divers pays et de
divers peuples ?
a). Principe de base de l’étude du caractère national
L’auteur tient à affirmer qu’il va se borner à un examen critique de
quelques approches du sujet et des méthodes empiriques utilisées.
b). Qu’est-ce que la nation
1° Il s’agit d’une communauté de structure psychologique de la nation ou d’une
communauté de culture nationale.
2° Dans le dictionnaire philosophique, le caractère est défini comme le
groupement de particularités psychologiques constantes de l’homme qui
dépendent de ses activités et de ses conditions d’existence qui se manifestent
dans ses démarches.
3° Pour le dictionnaire des sciences sociales de l’UNESCO, c’est un concept
explicatif déduit des conduites habituelles ou significatives de l’individu et
désignant une série de multiples éléments qui sont en relation mutuelle :
disposition, valeur admise, motivation que l’on a faite sienne, tendance,
mécanisme d’autodéfense et impulsion s’accordant pour faciliter les moyens de
s’exprimer.
Au stade préscientifique de la pensée de l’individu on trouve chez tout homme
cette notion que « des gens appartenant à divers peuples et à divers groupes
ethniques se distinguent les uns des autres par leur tempérament, leur culture et
leurs mœurs ».
Il semble bien que les particularités nationales apparaissent avec un vigoureux
relief dans les productions artistiques, ainsi il n’est pas nécessaire d’être un fin
connaisseur pour distinguer une maladie russe d’une maladie italienne ; un détail
d’ornementation ukrainienne d’un autre qui est propre à l’Inde l’humour anglais
de l’humour français, l’élégance de la femme congolaise de la sénégalaise, etc.
Assez généralement, les gens énumèrent sans difficultés particulières les
caractéristiques qu’ils jugent typiques et pour leurs propres peuples et pour des
peuples étrangers, et, ils n’est pas rare que les caractéristiques attribuées aux
autres peuples et celles qu’ils s’attribuent à eux-mêmes coïncident et se fassent
aisément acceptées par les concernés.
c). Expérience de A. A. Bodeliev
Une expérience psychosociologique révèle que la perception d’un homme dépend
normalement pour une grande part de son expérience antérieure ou d’une
36

attitude préalablement élaborée à l’égard de l’objet. Un psychologue de


Leningrad, A .A. Bodaliev, ayant réuni un groupe de 58 sujets adultes pour son
expérience, a voulu faire dire à chacun tour à tour quels étaient les traits de la
physionomie d’un homme dont on venait de leur montrer une photographie.
Avant la présentation de la photo, à un certain nombre d’entre eux on a dit
(consigne) :
« Maintenant vous allez voir la figure d’un héros ».
A chaque membre du second groupe on dit : « voici l’image d’un criminel ».
d) Résultats
1° L’attitude à l’égard du « criminel » présupposé donna lieu à des réponses de ce
genre : « cet espèce d’animal comprend tout ce qu’il veut, il jette ses regards sur
tout, avec intelligence et sans discontinuer. Il a le menton typique des bandits ;
des poches sous les yeux, sa figure est massive, vieilloque ou vieillotte, projeté en
avant :
2° Concernant le héros présupposé, il est décrit comme suit : « le visage d’un
homme qui a de la volonté, des yeux qui vous regardent dans les yeux et dont
toute peur est absente, les lèvres sont serrées l’une contre l’autre, on pressent
une force d’âme, de la fermeté et le visage exprime de la fierté ».
Dans plus du tiers de cas, l’interprétation individuelle fut entièrement déterminée
par l’attitude provoquée par l’interprétation donnée du portrait, c’est-à-dire par
la suggestion verbale (consigne) préalable de l’expérimentateur. Elle est en
quelque sorte une conséquence de l’ethnocentrisme.
Le terme d’ethnocentrisme n’existait pas au 16è siècle mais Montaigne en avait
découvert dans sa haute sagesse l’idée fondamentale. L’essentiel c’est cette
affirmation que l’impression produite, ainsi que le jugement de valeur portées
sur les conduites des peuples étrangers apparaissent comme une réfraction à
travers le prisme des traditions et des valeurs du groupe national ou ethnique
auquel on appartient. L’ethnocentrisme, c’est aussi une préférence pour son
propre groupe par rapport à tous les autres. Et un de ses fondements est la
psychologie collective.
Cette dernière affirmation appelle toutefois un correctif car de nombreuses
occasions se présentent où, non seulement les gens n’estiment pas leurs façons de
faire comme les meilleures, mais témoignent vis-à-vis de l’étranger d’un
complexe d’infériorité, et, même quelques-uns ont une attitude de vénération à
l’égard de l’étranger.
37

2.1. Klineberg et W. E. Lambert


O. Klineberg et W. E. Lambert se réfèrent à l’opinion émise par le russe L.
S. Vygotski estimant que l’appréhension des ressemblances exigeait une plus
grande capacité de généralisation et de conceptualisation que celle des
différences ; c’est-à-dire qu’il est plus difficile de percevoir de ressemblances chez
les individus que ce qui est différent si bien que le savant voit plus des
ressemblances alors que le commun des mortels est frappé par des
dissemblances. Les stéréotypes ethniques ont un caractère généralement
mensonger dans une proportion considérable qu’il s’agirait d’évaluer dans
chaque cas.
L’erreur commise provient de l’incapacité assez générale de situer tel trait de
caractère qu’on a observé comme assez répandu chez un peuple étranger dans
l’ensemble de sa culture. Ce qui est le seul moyen de lui donner sa vraie
signification. Puis, il y a le fait de la généralisation abusive.
Les stéréotypes sont la schématisation des représentations que l’on se fait
de son propre peuple et des peuples étrangers et qui affluent au courant de la
conscience. Ils expriment une attitude émotionnelle à l’égard de l’objet.
a). Expérience et résultats
En Allemagne ; à deux reprises, en 1963 et en 1965, une enquête fut menée
sur les attitudes des allemands à l’égard de la France et des français. Les résultats
diffèrent sensiblement, les jugements sur la « légèreté des français et leur goût
des plaisirs » étaient exprimés par 20 % des Allemands questionnés en 1965 ; en
1963, 14 % seulement donnaient cet avis-là sur les français.
Le « nationalisme » était attribué aux français comme qualité typique. Ce
jugement est porté par 4% des allemands en 1963 sur les français. En 1965, 19 %
d’allemands dénonçaient le « nationalisme » des français. C’est-à-dire qu’en deux
ans, le jugement des allemands sur les français a changé négativement. Pour les
qualités positives comme le charme, l’amabilité des français, le nombre de ceux
qui les citaient avait également diminué au bout de deux ans.
Au cours de ces deux années, les rapports franco-allemands s’étaient détériorés
et il y avait eu dans la presse allemande une campagne anti-française.
2. Ethnologie et le caractère national
La science du « caractère national » appelée ici « ethnopsychologie » ne peut pas
se fonder sur de pareilles images. Au contraire, l’une de ses principales tâches
apparaît être l’analyse critique des représentations de la connaissance vulgaire.
A. Méthodes utilisées en ethnopsychologie
38

1° Observation ethnographique.
Il existe une tradition d’observation ethnographique. On décrit en détail les
habitudes, la façon dont les gens se comportent les uns envers les autres, leurs
attitudes vis-à-vis de la famille, leur manière de résoudre les conflits. Au cours
des dernières années, l’attention s’est portée sur les poses et les gestes de
personnes appartenant à divers groupes ethniques, par exemple : les italiens et
les juifs, y compris les africains sont les peuples à gesticulations abondantes (le
comportement non verbal, C. N. V.).
2° Analyse autobiographique
On rassemble et on analyse des biographies, souvent des autobiographies des
représentants de divers groupes ethniques afin de découvrir les motifs de la
conduite et la façon dont les événements ont été vécus. Cf. les autobiographies
des grands hommes dans la R. I. S. S. n°1/2, 1973.
3° Etude des rêves
L’étude de rêves largement répandue sous l’influence de la psychanalyse. On peut
par exemple établir les comparaisons statistiques entre les thèmes prédominants
chez les personnes de tel ou tel groupe ethnique, mais leur interprétation a un
caractère de subjectivité plus accusé encore que celle des biographies. De plus, les
symboles dont Freud a fourni le sens sont typiques de la culture de l ’Europe
occidentale essentiellement.
4° Méthode des tests
L’usage des tests apparaît plus important du point de vue scientifique, par
exemple la série des méthodes projectives :
a) le test de Rorschach
b) le T.A.T.
c) la méthode consistant à analyser les dessins.
d) l’étude du folklore : au lieu de chercher à connaître une culture à partir des
individus, on peut à l’opposé partir de la culture elle-même ; et l’étude du
folklore est l’une des plus importantes méthodes dans cette orientation. Il y a
aussi l’étude des légendes et contes d’autrefois qui aident à comprendre
l’histoire d’un peuple et de plus son caractère, ses espérances, le système de
ses valeurs morales et sociales. En outre, les types de héros glorifiés dans les
récits sont très révélateurs.
39

5°Etude de l’art national


Un essai d’interprétation de divers aspects d’un art national (art plastique, la
musique, la peinture, etc.) ne présente pas moins d’intérêt que l’étude de l’épopée
populaire, la nature des sujets, la façon dont sont traités les divers aspects de la
vie individuelle et sociale, le choix des images et des symboles, tout cela forme un
riche ensemble permettant d’avancer dans la connaissance d’un peuple.
6° La linguistique comparée
Elle nous apparaît comme un instrument précieux de l’ethnopsychologie car la
structure des langues est liée de la façon la plus étroite aux processus mentaux les
plus profonds.
C. Procédures d’interprétation du caractère national
On voit que les opinions divergent lorsque la science contemporaine cherche à
expliquer comment les divers groupes ethniques possèdent tel ou tel caractère
psychologique spécifique. Il y a en bref trois interprétations du caractère national
selon qu’on se fonde :
1° sur la biologie
2° sur la sociologie
3° sur l’histoire.
1. Perspective biologique du caractère national
Elle consiste à le considérer comme quelque chose d’inné, qui est génétiquement
conditionné et transmis par l’hérédité.
Comme inconvénient, on note la confusion des particularités nationales avec les
signes distinctifs des races, des ethnies et tribus ; la confusion entre des formes
de communautés issues de la vie sociale, du vécu historique et les résultats d’une
histoire biologique.
Certains savants ont affirmé que les diverses races possèdent les particularités
psychologiques conditionnées par leur patrimoine génétique. En ce qui les
concerne, sociologues et théoriciens de gauche soutiennent que l’on ne peut pas
affirmer qu’il existe des données scientifiques permettant d’établir une
statistique des différences psychologiques innées, génétiquement conditionnées
par lesquelles se distingueraient les membres de diverses nationalités.
Comme deuxième inconvénient, il faut noter que l’individu ne naît pas avec un
assemblage de tendances, il les acquiert, il les fait siennes au cours de l’éducation
et de la vie qu’il mène avec les gens qui l’entourent.
40

Les conditions sociales et culturelles occupent selon ces savants la place la plus
importante. Mais quelles sont-elles au juste ?
Un premier essai de réponse à cette question, ce fut la théorie de la culture et
personnalité étroitement liée au néo-freudisme, et parfois appelée »
anthropologie psychologique « ou « ethnopsychologie » représentée par de
grands noms comme R. Benedict, A. Kardiner, M. Mead, Cl. Duffrenne, R. Linton,
C. Dubois , etc.
D’après S. Freud, tous les hommes ont à parcourir les mêmes stades d’une
évolution psycho-sexuelle, mais ces stades peuvent être franchis de façon
différente du fait des conditions sociales, de l’éducation familiale et de divers
autres facteurs. Freud lui-même s‘est peu préoccupé des problèmes de
l’ethnopsychologie, mais ses successeurs se sont efforcés de trouver des schémas
permettant de relier les structures psychologiques.
Le concept de base de Kardiner et Linton est celui de la personnalité de base.
La personnalité de base est une configuration psychologique particulière
propre aux membres d’une société donnée et qui se manifeste par un certain
style de vie sur lequel les individus brodent leurs variantes singulières, à savoir,
par exemple, une certaine agressivité liée à certaines croyances, à une certaine
défiance à l’égard d’autrui, à une certaine faiblesse de super-ego, etc.
En définitive, ce sont ces caractéristiques qui constituent exactement la base de
la personnalité pour les membres du groupe. Concrètement, la personnalité de
base c’est ce par quoi tous les Baluba sont baluba, tous les ngbandi sont ngbandi,
tous les français sont français.
Cette notion renvoi à celle de « caractère national » et celle de personnalité
moyenne.
Comprendre une culture, c’est comprendre l’unité de ses traits ou de ses
institutions, la comprendre comme un tout. Or, cette unité ne peut être
recherchée et exprimée semble-t-il, qu’en termes psychologiques, et c’est la
personnalité de base qui la fournit. Les individus se reconnaissent dans ce qu’ils
ont de commun, ce qu’est leur culture et ce qu’ils sont.
Quant à Éric Fromm, il s’est efforcé d’utiliser quelques matériaux du marxisme.
Cet auteur ne se contente pas de constater que les conditions sociales
déterminent diverses particularités du développement de la sexualité, il invoque
aussi les nombreux processus par lesquels l’individu s’adapte aux exigences de
la société. La structure sociale de chaque société et la situation des diverses
classes sociales à l’intérieur de la société prescrivent à leurs membres des formes
41

déterminées de leurs comportements. Éric Fromm parle de « caractère social »


pour désigner le caractère national.
Le caractère social manifeste sa présence non seulement dans le groupe ethnique
mais encore dans n’importe quel groupe social.
2. Perspective sociologique
A la différence des théories qui précédent, la sociologie marxiste considère ce
problème dans son rapport avec la « théorie générale de nation ». Le principe de
l’égalité des nations ne doit pas nous conduire à croire à l’identité des nations.
Ayant évolué dans les conditions naturelles, sociales et culturelles dissemblables,
les divers peuples ont acquis une diversité de caractère de types de pensée et des
modes de comportements. Chacun est en corrélation plus ou moins grande avec
les circonstances qui l’ont engendré.
Cependant, tout en reconnaissant la diversité de qualités des groupes ethniques,
la théorie marxiste : - n’admet pas qu’on leur attribue une valeur absolue ; mais
qu’on les considère comme produits des circonstances historiques.
3. Perspective historique.
Les traits dans lesquels on pouvait penser voir des particularités spécifiques
d’un caractère national sont en fait les produits des conditions historiques bien
définies que d’influences culturelles.
Produits par l’histoire, ils se transforment aussi avec elle, et ensuite des
stéréotypes correspondants changent eux aussi avec un certain retard.
Au début du 18è siècle en Europe, beaucoup de gens estimaient que les Anglais
avaient des prédispositions au changement et à la révolution, alors que les
français apparaissaient comme un peuple très conservateur. Cent ans plus tard,
ces affirmations s’étaient diamétralement opposées.

T.P. Appliquer les différentes méthodes et techniques au cas de la R.D.C.


42

CHAPITRE IV. LES ENFANTS ET LEUR SOCIALISATION


3.1. DEFINITION ET HISTORIQUE DE L’ENFANT SAUVAGE
Un enfant sauvage est un enfant qui, perdu ou abandonné, a vécu à son plus
jeune âge, reclus de la société, à l'écart de tout contact humain. Certains enfants
sauvages ont été rejetés par leurs parents pour cause de graves handicaps
physiques ou mentaux. D'autres enfants ont vécu de graves traumatismes avant
d'être abandonnés.
Il existe de nombreux récits de cas d'enfants élevés (ou ayant été élevés) par des
animaux sauvages. Ces récits évoquent des loups, des ours ou d'autres animaux
hostiles, ayant adopté un enfant comme l'un des leurs. Les cas documentés les
plus abondamment et par des témoins compétents voire des scientifiques, sont au
nombre de 5 ou 6 parmi la cinquantaine de cas recensés depuis le XIVe siècle. Il
existe des histoires, bien plus rares, d'enfants élevés par des herbivores
(antilopes en Afrique). La différence de résultat entre enfant élevé par des
omnivores ou carnivores et enfant élevé par des herbivores permet de se poser
de très bonnes questions, sur le lien entre comportement alimentaire et
comportement social. Dans le cas d'enfants élevés par des herbivores, il faut noter
l'adaptation posturale à la course.
L'expression enfant sauvage est apparue dans le rapport de police de Guiraud et
Constant de Saint-Estève relatant la première et la seconde capture du « sauvage
de l'Aveyron ».
La psychologie s'est intéressée au cas de ces enfants pour discuter les rapports
entre culture et nature (quels apports culturels nécessite un petit d'humain pour
devenir un humain ?) et pour discuter la place du déterminisme précoce dans
l'ontogénèse. Mais les informations extrêmement fragmentaires sur leur vie
antérieure (âge de l'abandon, durée de celui-ci, capacités acquises au moment de
l'abandon...) font que les enfants sauvages ne constituent pas véritablement des
cas permettant de discuter scientifiquement ces questions.
Les rapports, abondamment discutés et qui ont servi de sources à des livres ou à
des films, sont en particulier ceux concernant :
 Victor, l'enfant sauvage de l'Aveyron, décrit par Jean Itard (cf. le film de
François Truffaut) qui a tenté d'effectuer une rééducation comme pour un
enfant sourd, sans grands résultats ;
 Amala et Kamala, les fillettes-louves, décrites par le révérend Singh et le Dr
Sarbadhicari qui les ont prises en charge de manière intuitive, sans pouvoir
leur apprendre véritablement à parler.
43

Ils ont souvent été considérés comme des enfants oligophrènes mais des
ébauches de modification de leurs comportements, dans le cadre des techniques
de « dressage » qui ont souvent été employées, montrent une certaine reprise de
leur évolution sans que des démarches autonomes d'apprentissage se
manifestent. Les enfants sauvages ont d'insurmontables difficultés pour
apprendre à parler.
3.2. Légendes et littérature
La légende la plus connue est peut-être celle de Romulus et Rémus,
jumeaux abandonnés à la naissance et élevés par des loups, connus pour être les
fondateurs de Rome. Un autre exemple célèbre, dans la littérature, est celui de
Mowgli, personnage du Livre de la jungle de Rudyard Kipling. Un autre exemple
connu est celui de Tarzan.
Dans la mythologie et la littérature, les enfants sauvages sont non seulement
dotés de l'intelligence humaine, mais aussi d'une certaine dose d'instinct de
survie en milieu naturel : s'intégrer dans la société, pour eux, est supposé
relativement facile.
3.3. Cas (présentés comme) réels
La véracité des cas d'enfant sauvage est à réévaluer en fonction des
recherches dans les archives menées par Serge Aroles, l'un des premiers à avoir
dénoncé l'escroquerie de Survivre avec les loups. En effet, contrairement à
d'autres auteurs (Malson, Zingg, etc.), Serge Aroles fit ce qu'ils n'ont point fait :
enquêter sur le terrain, retrouver les archives, analyser les symptômes médicaux
de ces « enfants sauvages », leurs cicatrices, etc. Diagnostics médicaux et archives
à l'appui, le verdict de Serge Aroles (sur Amala et Kamala, sur l'enfant-mouton
d'Irlande, les enfants-ours de Pologne, etc.) est accablant, y compris même pour le
célèbre Victor de l'Aveyron, dont les cicatrices sur le corps ne sont pas celles
d'une vie dans les bois, mais celles d'une maltraitance humaine (Serge Aroles est
chirurgien).
 L'enfant-mouton d'Irlande : escroquerie élaborée sur un enfant très
gravement handicapé (polyhandicap congénital) et exhibé dans les foires.
 Les trois garçons-ours lituaniens. Selon les archives publiées par Serge
Aroles, il n'y eut qu'un seul cas : un enfant sauvage découvert au printemps
1663, mais pas du tout parmi des ours.
 La fille de Oranienburg
 Peter, l'enfant sauvage de Hameln : enfant déficient mental présentant des
anomalies congénitales (syndactilie, synéchies linguales) et ayant vécu à
44

peine un an dans la nature (archives à l'appui).


 Dans l'historique millénaire des enfants sauvages, le cas majeur est celui de
Marie-Angélique, la fille sauvage capturée à Songy en Champagne. Selon
Serge Aroles, qui a retrouvé des centaines de documents relatifs à cette fille
et qui en a publié 30, il s'agit :
 du seul cas authentique d'un enfant ayant survécu dix ans en forêt
(Marie-Angélique était une petite Amérindienne du Wisconsin (alors
colonie française), de la tribu des Renards, grands ennemis des Sioux
et des Français (actuellement les Fox, aux Etats-Unis), ce qui
explique sa longue survie en forêt, attendu que, très jeune déjà, elle
savait nager, coudre des vêtements de peaux, etc.) ;
 le seul enfant pour lequel la survie en forêt pendant une décennie
puisse être authentifiée par un vaste corpus d'archives (elle s'évada
en novembre 1721, durant la grande peste de Provence, où son
navire venant du Canada avait accosté un an plus tôt; erra durant
une décennie dans les forêts du royaume de France, et fut capturée
en septembre 1731, à Songy, dans la partie aride de la Champagne,
où l'absence de massif forestier la mettait dangereusement à vue) ;
 et le seul enfant sauvage qui, découvert dans un grand état de
régression comportementale, eût ensuite présenté une résurrection
intellectuelle, ayant pu apprendre à lire et écrire (nous possédons
des écrits d'elle et même, fait exceptionnel, la mention des livres de
sa bibliothèque, puisque un inventaire notarié de ses biens fut dressé
en janvier 1776, un mois après son décès).
Seules les archives ont permis de reconstruire la vie de Marie-Angélique, car les
livres et les nombreux articles écrits à son sujet, eux, sont d'une extrême
fantaisie : elle n'était pas "une Esquimaude du Labrador", mais une Amérindienne
du Wisconsin ; elle n'était pas "âgée de dix ans" lors de sa capture, mais âgée de
dix-neuf ans ; elle n'est pas "morte pauvre à trente ans", mais décédée riche à 63
ans (le 15 décembre 1775), à Paris, alors pensionnée par la reine de France...
 La fille-ours de Krupina, Slovaquie (1767). Selon Serge Aroles, ce cas est
inconnu dans les archives de Krupina.
 L'homme sauvage des Pyrénées, dans la forêt d'Iraty, dépeint par Paul-
Marie Leroy en 1776.
 L'adolescent sauvage de Cronstadt (1781). Selon le document source en
langue magyar (hongrois) publié par Serge Aroles, il s'agit d'une
escroquerie supplémentaire, élaborée sur un adolescent souffrant de
crétinisme (hypothyroïdie avec goitre) et exhibé pour de l'argent, ce qui est
45

clairement explicité dans le texte hongrois.


 Victor de l'Aveyron (1797), dépeint en 1969 dans le film L'Enfant sauvage
de François Truffaut. Pour la discussion sur la non authenticité de ce
célèbre cas, voir le lien à son nom.
 Kaspar Hauser (début du XIXe siècle), dépeint en 1974 dans le film de
Werner Herzog L'Énigme de Kaspar Hauser (Jeder für sich und Gott gegen
alle). Enfant séquestré dans un lieu clos ; pas du tout un enfant sauvage
survivant en forêt.
 Amala et Kamala, les fillettes-louves, découvertes en 1920 en Inde Selon
Serge Aroles, qui a ouvert les archives relatives à ce cas, il s'agit de la plus
grande escroquerie relative aux enfant-loups : Kamala était une fillette
déficiente mentale battue par un escroc, Singh, afin qu'elle marche à quatre
pattes devant les visiteurs.
 Genie, nom donné à une jeune fille de 13 ans, découverte à Los Angeles,
États-Unis, le 4 novembre 1970, maltraitée, attachée et enfermée sans
aucun contact depuis plus de dix ans par son père handicapé mental. Même
commentaire que pour Kaspar Hauser : Genie est une fillette séquestrée
dans un lieu clos ; pas du tout un enfant sauvage survivant en forêt.
 Oxana Malaya, Ukraine, (années 1990) élevée par des chiens jusqu'à l'âge
de huit ans
 Andrei, un garçon de sept ans élevé par un chien de garde dans la région de
l'Altaï, découvert en juillet 2004.
 On peut lire aussi le témoignage de Misha Defonseca, dans son livre
Survivre avec les loups, relatant son expérience de petite fille traversant
toute l'Europe à la recherche de ses parents, pendant la Seconde Guerre
mondiale. Cette femme aujourd'hui âgée a perdu confiance dans l'humanité
et reste profondément attachée à l'animal. L'historien de la déportation
Maxime Steinberg et le spécialiste des enfants-loups Serge Aroles ont mis
en question la véracité de ce témoignage. Finalement la supercherie a été
confirmée par l'intéressée elle-même qui a avoué avoir été élevée par son
grand-père pendant la guerre.
 Rochom P'ngieng trouvée dans une forêt du Cambodge le 19 janvier 2007.
Natasha, une fillette de cinq ans, est retrouvée à Tchita en Sibérie en mai 2009.
Elle était enfermée dans une pièce insalubre avec des chats et des chiens qui l'ont
probablement élevée. La fillette se comportait comme un chien, lapait, sautait et
aboyait pour communiquer.
3.4. LA SOCIALISATION
Depuis le XIVe jusqu’ aux XXe siècles, ont été rapportés toutes sortes de cas :
enfant-loup, enfant-ours, enfant-singe, enfant-gazelle, enfant-léopard etc. Notre
littérature et nos comtes abondent de ce genre de cas. Ils sont généralement
46

quadrupèdes, tous muets, en outre intolérants aux vêtements, et sexuellement


indifférents. Bien que certaines de leurs fonctions soient généralement très
développées (odorat, vision nocturne), ils demeurent à peu près totalement
inéducables sous les aspects précédents. Ils éprouvent les émotions
élémentaires : impatience ou la colère, mais ignorent le sourire et le rire.
Ces particularités paraissent démontrer l’existence d’un mécanisme
d’apprentissage sélectif et massif dans une période critique programmée
héréditairement : de la fonction de langage. Cette période, par ailleurs, se trouve
être celle où s’installe la locomotion bipède, l’usage manuel des ustensiles et
aussi les bases des conduites sexuelles et affectives.
En dehors de cas Victor du Dr Itard et d’autres aujourd’hui introuvables, de
déréliction en milieu naturel, il existe, à l’époque moderne, d’assez nombreux
exemples d’isolement précoce complet provoqué par la pathologie parentale.
La notion de déficience mentale est au cœur du développement de la psychiatrie
du 19è siècle ; dans le temps l’idiot et le faible d’esprit étaient traités comme des
individus naturels et innocents auxquels on appliquait l’épithète « bête » qui
semblait leur convenir à merveille.
On les considérait parfois comme étant plus ou moins immoraux ; ainsi Luther
qui croyait de grand cœur à l’effet de démon dans la maladie mentale et la
sorcellerie demandait aux parents de l’enfant faible d’esprit de le plonger dans
une rivière, de débarrasser leur maison de la présence du démon.
Cependant, après que le Dr Itard eut aussi un traitement de longue durée à
soigner avec un succès relatif l’enfant appelé « le sauvage d’Aveyron », la
méthode de soins de la déficience mentale devint une branche de la psychiatrie
active. Ce garçon, à qui Itard donna le nom de Victor (découvert en 1798) vivait
comme un animal dans le bois de Canne. Itard qui était médecin-chef dans un
hôpital à Paris s’intéressa à ce cas, mais ses amis philosophes le découragèrent en
décrétant que l’enfant était un « imbécile » et donc inéducable. Itard déploya
néanmoins de gros efforts pour développer les sens et l’intelligence de Victor. Les
cinq années d’efforts produisirent des fruits surtout sur Edouard Seguin,
assistant des Docteurs Itard et Quirol. Seguin eut une grande influence sur les
travaux de Maria Montessori, pédagogue italienne d l’école nouvelle.
Travail pratique :
Demander aux étudiants de retrouver dans les comptes et la littérature
traditionnels les cas similaires des enfants sauvages.
47

CHAPITRE V. LES APPROCHES TYPOLOGIQUES.

4. 1. Historique et définition.
Il s’agit d’une classification des conduites selon des types, généralement à
partir de caractéristiques biologiques ou de personnalité. La plus ancienne est
celle d’Hippocrate qui décrivit quatre types ou tempéraments ; sanguin,
colérique, mélancolique et flegmatique. Cette typologie fut reprise par différents
auteurs.
1. Galien relia d’une manière causale chaque type à une humeur
interne : ainsi, le mélancolique doit sa tristesse à la bile noire, le
colérique son irritabilité à la bile jaune.
2. E. Kant considérait encore ces entités typologiques comme innées.
3. W. Wundt s’opposera à cette classification catégorielle en classes
indépendantes en faveur de dimensions fonctionnelles telles que la
force de la réactivité affective et la vitesse du changement des
sentiments, permettant des combinaisons multiples à partir des
quatre tempéraments. Ces typologies demeurent essentiellement
descriptives.
Dans les approches typologiques, il est nécessaire de distinguer « classe » et «
type » car entre les deux il y a une séparation bien tranchée. Un individu ne peut
appartenir en même temps à deux classes différentes. C’est ainsi qu’il n’y que
deux classes de sexe masculin et féminin. L’individu appartenant à l’une ne peut
appartenir à l’autre. Comme on peut le voir, la notion de type s’oppose à celle de
classe.
Au XXe siècle, de nouvelles typologies ont été proposées qui tentent d’établir des
liens de causalité entre les types et les fonctions de l’organisme. Les plus
connues sont celles de :
1. F. Gross qui relie les types qu’il décrit sur un mode dimensionnel à fonctions
neurophysiologiques hypothétiques.
2. I. Pavlov qui construisit une typologie à partir de ses travaux sur les
réflexes conditionnés (type fort, type faible, mobilité) et en fournit une
explication à partir de processus d’excitation et d’inhibition du système
nerveux central.
3. C. G. Jung qui fonda les différences typologiques sur des tendances de
l’énergie libidinale à s’exprimer vers l’extérieur (extraversion) ou vers
l’intérieur ( introversion).
48

4. E. Kretschmer pour toutes les conduites humaines normales et


pathologiques se répartissent entre les deux extrêmes que sont la
schizophrénie et la psychose maniaco-dépressive selon deux dimensions :
la schizothymie et la cyclothymie.
5. W. R. Sheldon qui insiste sur la relation de la morphologie de l’individu avec
son caractère (mésomorphe- dominant, endomorphe- timide, ectomorphe-
sociable).
Toutes ces typologies n’ont guère fait progresser l’analyse scientifique de la
personnalité, et sont plus souvent fondées sur l’intuition clinique que sur
l’expérimentation. Les quelques recherches expérimentales qui y ont été
consacrées n’ont jamais jusque-là été concluantes.
L’introduction de l’analyse factorielle en psychologie par C. Spearman a orienté,
surtout après la seconde guerre mondiale, les recherches vers l’analyse de
facteurs ou de traits de personnalité avec les travaux de J. P. Guil Ford, G. W.
Allport, R. B. Cattell et H. J. Eysenck.
4.2. Variétés de typologie.
Selon la manière d’envisager l’individu, il est possible de le classer selon son
aspect :
1. morphologique (Kretschmer)
2. physiologique (Sheldon)
3. psychologique. (Heymans et Wiersma)
1. Dans la première, on y classe les individus selon les différentes
caractéristiques anthropologiques : la taille, le poids, l’aspect du corps.
2. La deuxième se base sur le fonctionnement du système nerveux central pour
différencier les individus.
3. La typologie psychologique à partir des traits psychologiques simples ou
selon leur ensemble, établit une classification des individus.
49

TABLEAU SYNOPTIQUE

TYPE Caractéristiques Catégorie pathologique

Morphologique Le pycnique : gros et petit, Maniaco-dépressive


cyclothyme
Kretschmer

L’athlétique : équilibré
musclé

Leptosome : grand, filiforme,


schizothyme

Physiologique Endomorphe: dominance du


tronc sur les hanches,
Sheldon
contours arrondis

Mésomorphe : robustesse des


os et muscles, musculature
puissante, peu de hanche

Psychologique Emotif, actif, primaire


Heymans et Wiersma

Emotif, actif, secondaire

Emotif, non actif, primaire

Emotif, non actif, secondaire

Non émotif, actif, primaire

Non émotif, actif, secondaire

Non émotif, non actif, primaire

Non émotif, non actif non


secondaire
50

Remarques : Sheldon avait adopté une classification à trois chiffres de 1 à 7,


chiffres qui exprimaient la forte ou la faible appartenance d’un individu à chaque
groupe morphologique. Ainsi l’endomorphe correspond à 711 : 7 pour
l’endomorphe, 1 pour les deux autres groupes. Il est impossible d’obtenir des
types purs tels 777 ou 111.
F. Gross qui relie les types qu’il décrit sur un mode dimensionnel à foncions
neurophysiologiques hypothétiques ;
Pavlov qui construisit une typologie à partir de ses travaux sur les réflexes
conditionnés et en fournit une explication à partir de processus d’excitation et
d’inhibition du système nerveux central.
4.3 Description de quelques typologies
4.3.1 Typologie de Kretschmer ou de traits morphologiques
Kretschmer est un psychiatre allemand, connu principalement pour son ouvrage
sur la paranoïa. Il s’agit d’une typologie reconstruite à partir d’une corrélation
établie entre le domaine psychologique et, après déduction des types
psychologiques dérivés de catégories psychiatriques. Kretschmer part d’abord
d’une certaine conception de la maladie mentale.
Pour lui, la psychose est la maladie mentale par excellence. Aucune cause
organique ne serait à son origine, il s’agit d’un trouble purement psychogène. Ce
point situe l’opposition entre « psychose » et « démence ». La démence est une
autre maladie psychiatrique dont la cause est toujours organique (la syphilis)
dans le syndrome de la paralysie générale.
A l’intérieur du même groupe des psychoses (groupe opposé à celui des
démences), Kretschmer distingue deux groupes fondamentaux de psychoses :
a) la psychose maniaco-dépressive ou psychose cyclique qui fait succéder de
façon cyclique deux états la manie (exaltation morbide) et la dépression.
b) la schizophrénie : psychose évolutive, un long processus se développe dans
lequel le malade est de plus en plus plongé dans un éloignement affectif vis-à-vis
du monde et des autres. Il s’en suit l’isolement, l’autisme et le déficit progressif
dans le contact affectif.
Ces maladies mentales se retrouvent sous des formes mineures, atténuées chez
les individus non psychotiques. Elles présentent même une configuration, une
même structure, mais à un degré nettement moins prononcé.
Selon Gauquelin M., Gauquelin Fr et al, les grands philosophes, théologiens,
fondateurs des religions sont en majorité
51

leptosomes-schizothymes. Parmi les leptosomes, ils citent Descartes, Kant,


Schopenhauer, Hegel, Nietzsche.
En bref, Kretschmer met en évidence un double lien entre la psychose maniaco-
dépressive ou pathologie de la tendance cycloïde (zone intermédiaire) et l’état
cyclothymique (terme plus général), s’agissant de la psychose cyclique.
Autrement dit, un individu considéré comme étant « normal » peut présenter des
fois des réactions non franchiment
maniaques-dépressives mais cycloïdes, c’est-à-dire qui rappellent cet état
morbide. De même, le schizoïde n’est pas, un malade,mais s’il le devient, il
représentera probablement le tableau clinique de la schizophrénie.
A ces deux niveaux de tendance, l’on retrouve la configuration schizophrénique
chez les individus appelés « schizoïdes » et la configuration maniaco-dépressive
chez les « cycloïdes ».
Possédant cette bipolarité « schizoïde » / « cycloïde », basée sur une grande
opposition psychiatrique et se trouvant comme tendance parmi les individus non
psychotiques, Kretschmer tenta d’établir un rapport entre ces traits
psychologiques et les caractéristiques morphologiques de l’individu. Déjà
Kretschmer avait remarqué dans les asiles psychiatriques que les maniaco-
dépressifs étaient petits et épais, tandis que les schizophrènes étaient filiformes
en général. Il distingue trois types morphologiques qu’il cherche dans à mettre en
rapport avec les catégories dans son approche psychiatrique :
1) le pycnique : gros et petit, cyclothyme, maniaco-dépressif
2) l’athlétique : équilibré, musclé, tendance à l’épilepsie essentielle
3) le leptosome : grand, filiforme, schizothyme, schizophrène.
Kretschmer fait mention d’un autre type : le dysplasique qui rassemble de
nombreuses variétés. Sur le plan pathologique, le dysplasique est disposé à
l’épilepsie. Il convient cependant de noter que sur base de notre expérience
clinique, nous nous demandons si la dysmorphie des dysplasiques n’est pas
imputable aux effets secondaires des produits neuroleptiques que ce type de
malade doit prendre quotidiennement toute leur vie durant, par exemple, dans le
cas des épileptiques soumis au traitement à base de la Dépakine, Gardénal et
autres molécules.
4.3.2 Typologie de Sheldon
Sheldon reprend la problématique de Kretschmer, mais avec d’autres méthodes.
Il cherchera à quantifier, à mettre en chiffres les différences entre les individus.
Sa classification de base, pour l’aspect physique ou organique, repose sur les
52

catégories classiques de l’embryologie. Face à celles-ci, il dégage une classification


morphologique à trois variables :
1) l’endomorphe : dérivant de l’endoderme ou couche embryonnaire interne,
correspondant au système digestif. Il est caractérisé par la dominance du
tronc sur les membres, les hanches fortes, le contour arrondi et mous, peu
de muscles, les os graciles.
2) le mésomorphe : dérivant du mésoderme, couche embryonnaire
intermédiaire, correspondant au squelette, aux muscles et au sang. Il a
pour caractéristiques : la robustesse des os et des muscles, une
musculature puissante, peu de hanches.
3) L’ectomorphe : dérivant de l’ectoderme, couche embryonnaire externe à
l’origine de la peau, de poils, des ongles, du système nerveux, des organes
des sens etc. Un tel type a des membres très longs, une cage thoracique et
bassin plats.
Cette classification morphologique de Sheldon correspond en grandes lignes à
celle de Kretschmer.
On peut dire en gros, que l’endomorphe correspond au pycnique, le mésomorphe
à l’athlétique et l’ectomorphe au leptosome.
Sheldon adopte un système de quantification à trois chiffres, de 1à 7, chiffres qui
expriment respectivement la faible ou la forte appartenance d’un individu à
chaque groupe morphologique.
Il faut noter qu’il est impossible de trouver des formules se rapportant par
exemple à 111, 555, 444 etc.
4.3.3. Typologie de Heymans et Wiersma ou typologie psychologique.
Il s’agit d’une typologie purement psychologique. Elle sera reprise et complétée
par la suite par l’école française de caractérologie représentée par les
philosophes français Réne Le Senne et Gaston Berger.
Psychologues hollandais, M. Heymans et Mme Wiersma partent des trois traits
fondamentaux qui se retrouvent chez chaque individu à des degrés différents, à
savoir :
a) l’émotivité : E
b) l’activité : A
c) la rétentivité qui peut être primaire P ou secondaire S
A. L’émotivité sera très forte lorsque l’écart entre l’importance objective d’un
événement et la réaction qu’il suscite chez l’individu sera très grande. On dira
53

que la réaction émotive est disproportionnée et est marquée par une


émotivité peu contrôlée.
B. L’activité correspond à une spontanéité de l’action
C. La rétentivité
De retentissement, elle désigne un effet indirect ou en retour d’un effet, d’un
comportement ou d’une action. C’est la durée de sa présence chez un individu qui
détermine qu’elle est soit primaire c’est-à-dire qu’elle provoque un effet spontané
ou retardé. Ainsi le primaire réagit sur le champ, coup par coup alors que la
secondaire va récriminer, reporter ses réactions.
En combinant les trois traits fondamentaux, on obtient huit possibilités
universelles caractéristiques suivantes :
1. E.A.P = colérique
2. E.A.S. = passionné
3. E.N.A.P. = nerveux
4. E.N.A.S. = sentimental
5. N.E.A.P. = sanguin
6. N.E.A.S = flegmatique
7. N.E.N.A.P. = amorphe
8. N.E.N.A.S. = apathique.

T.P. Demander à chaque groupe d’indiquer la formule caractérologique de


certaines personnalités africaines ou mondiales.
54

Bibliographie
 Lucien Malson, Les Enfants sauvages : mythe et réalité, suivi de Jean Itard,
Mémoire et rapport sur Victor de l'Aveyron, Paris : 10/18, 2003, 246 p. (10-
18. Bibliothèques 10-18, n° 157). (ISBN 2-264-03672-9)
 Lucienne Strivay, Enfants sauvages : approches anthropologiques, Paris :
Gallimard, 2006,
 Serge Aroles, L'Énigme des enfants-loups : une certitude biologique mais un
déni des archives, Paris Publibook, 2007.
 Louis-François Raban, La Jeune Fille qui mangeait de l'herbe, ill. Charlotte
Des Ligneris, Paris : Mouck, 2009, 44 p. (Mouckins).
 Natacha Grenat, Le Douloureux Secret des enfants sauvages, Levallois-
Perret : la Compagnie littéraire-Brédys, 2007.
 Thierry Gineste, Victor de l'Aveyron : dernier enfant sauvage, premier enfant
fou, Paris : Hachette Littératures, 1993.
 Harlan Lane, L'Enfant sauvage de l'Aveyron, Paris : Payot, 1979. MOKICHI
OKADA
55

TABLE DES MATIERES


I. NOTIONS GENERALES ................................................................................................................ 2
1. Définition des concepts .................................................................................................................. 2
2. Les théories de la personnalité ................................................................................................... 3
2.1 La perspective psychanalytique ..................................................................................... 3
2.2 La perspective interpersonnelle ........................................................................................ 7
2.3 La perspective béhavioriste................................................................................................. 9
2.4. La perspective du développement cognitif .................................................................11
2.5 La perspective psychosociale............................................................................................12
Eric Erikson ............................................................................................................................................12
2.6. La perspective humaniste ...................................................................................................15
2.7. La perspective du développement moral ....................................................................16
3. Problématique de la psychologie comparée .......................................................................19
CHAPITRE II. LES MALADIES CREATRICES.............................................................................22
2.1. Essai de définition. .................................................................................................................22
2.2. La maladie créatrice ..............................................................................................................24
2.3. ETUDE DES CAS.......................................................................................................................24
2.3.1. FECHNER ...........................................................................................................................24
2.4.2 NIETZSCHE ou le prophète d’une nouvelle ère ............................................25
2.4.3 S. FREUD .........................................................................................................................27
2.4.4 Mokichi Okada. ...........................................................................................................29
CHAPITRE III. LE CARACTERE NATIONAL ..............................................................................32
A. Eléments subjectifs et objectifs de l’identité sociale ...............................................33
B. Méthode d’étude de l’identité sociale ............................................................................33
2. Ethnologie et le caractère national .........................................................................37
A. Méthodes utilisées en ethnopsychologie .....................................................................37
C. Procédures d’interprétation du caractère national ...................................................39
1. Perspective biologique du caractère national ...........................................................39
2. Perspective sociologique ...................................................................................................41
3. Perspective historique. .....................................................................................................41
CHAPITRE IV. LES ENFANTS ET LEUR SOCIALISATION. ................................................42
3.2. Légendes et littérature .........................................................................................................43
3.3. Cas (présentés comme) réels ............................................................................................43
CHAPITRE V. LES APPROCHES TYPOLOGIQUES. ..................................................................47
4. 1. Historique et définition. ....................................................................................................47
4.2. Variétés de typologie. ...........................................................................................................48
4.3 Description de quelques typologies ................................................................................50
4.3.1 Typologie de Kretschmer ou de traits morphologiques ................................50
4.3.2 Typologie de Sheldon ....................................................................................................51
4.3.3. Typologie de Heymans et Wiersma ou typologie psychologique. ............52
Bibliographie .....................................................................................................................................54

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