Vous êtes sur la page 1sur 33

INSUFFISANCE

RENALE AIGUE
Pr S.LAHFAYA
SERVICE de Néphrologie
TOT Blida
2022/2023
Rappel

Fonctions physiologiques du rein

• Élimination des déchets azotés:


– urée, créatinine, acide urique

• Régulation du bilan hydro électrolytique et acido basique:


– sodium, potassium, phosphore, ions H+

• Régulation de la tension artérielle:


– système rénine angiotensine aldostérone

• Sécrétions endocrines:
– vitamine D, érythropoïétine
Le néphron: unité de filtration
I - Introduction:

 L’insuffisance rénale aigue (IRA) est définie par la baisse


brutale de la filtration glomérulaire et la détérioration des
autres grandes fonctions du rein.

 Le diagnostic d’IRA est posé sur l’élévation rapide de la


créatinine.

Elle peut être oligo-anurique ou à diurèse conservée.

 L’oligurie est définie par une diurèse inferieure à 500


ml/24h.

L’anurie est définie par une diurèse < 100 ml/24h.


I - Introduction:

 L’IRA est un syndrome clinique, conséquence de lésions


anatomiques et de circonstances étiologiques différentes.

Elle peut survenir chez un sujet ayant auparavant une fonction


rénale normale ou déjà altérée par une néphropathie chronique.

L’IRA complique 5% des hospitalisations dans les hôpitaux des


pays développés, elle surviendrait chez 20 à 30 % des malades
séjournant en unités de soins intensifs.

 L’IRA est une urgence mettant en jeu le pronostic vital par


risque d’acidose, hyperkaliémique et OAP.
Classification de RIFLE
• Proposée après une réunion d’experts (2004)

• Basée sur la créatinine plasmatique et la diurèse

Coefficient Filtration
Diurèse
Glomérulaire (GFR)
Créatininémie × 1,5 ou
Risk Clcréat > 25%
< 0,5 ml/kg/h pdt 6h
Créatininémie × 2 ou
Injury Clcréat > 50%
< 0,5 ml/kg/h pdt 12h
Créatininémie × 3 ou < 0,3 ml/kg/h ou anurie
Failure Clcréat > 75% pdt 12h
Loss Perte complète fonction rénale > 4 semaines
End Stage
Kidney Besoin d’épuration extra rénale > 3 mois
Disease
Rein 1
22

1.Pré-rénale
fonctionnelle
2.Parenchymateuse
3 organique
3.Obstructive
Les différents types d’IRA:

• post-rénale par obstacle urologique: 5% des IRA;

• pré rénale ou IR fonctionnelle en rapport avec une hypoperfusion


rénale: 65% des IRA;

• poussée d’IRA sur IRC préexistante: 10% des IRA.

• Les IRA de causes rénales ou IR organique: 20% des IRA liées à :


- une nécrose tubulaire aigue;
- une néphropathie interstitielle aigue;
- une atteinte glomérulaire aigue;
- une atteinte vasculaire aigue.
II - Physiopathologie et mécanismes des IRA:

Le débit de filtration glomérulaire(DFG) dépend de plusieurs


paramètres physiques, exprimé par la formule:

DFG = ∆ P + Kf
∆P= Pression de filtration.
Kf = coefficient de filtration.
∆P = Pcg – Pu
∆P = Q × (Ref – Raf) – Pu

Q= flux sanguin rénal.


Ref= résistances de l’artériole efférente.
Raf= résistance de l’artériole afférente.
Pcg= pression capillaire glomérulaire.
Pu= pression dans la chambre urinaire du glomérule.
Les mécanismes de l’insuffisance rénale:

La filtration glomérulaire baisse ou s’annule quand:


 Q diminue ( hypovolémie, choc)
 Les Ref diminuent (vasodilatation efférente glomérulaire)
 Les Raf augmentent (vasoconstriction pré-glomérulaire intense);
 Si Pg augmente (obstacle intra-tubulaire ou sur la voie excrétrice).

vaisseaux

Glomerule

Interstitium

Tubule
III - Principaux types d’IRA:

A- IRA fonctionnelle ou pré-rénale:

• Elle est liée à une hypoperfusion à l’origine d’une souffrance ischémique


du rein.
• Le parenchyme rénal est intact,

• L’hypoperfusion rénale stimule:


- la synthèse et la sécrétion de rénine par l’AJG, formation d’angiotensine
II et sécrétion d’aldostérone .
- sécrétion d’ADH.
Les conséquences rénales sont:

 dans le glomérule: vasoconstriction post-glomérulaire de l’artériole


efférente visant à maintenir la pression de filtration.
Au delà d’une certaine limite, l’adaptation n’est plus possible et la pression
de filtration chute et l’IRA fonctionnelle apparait.

 Dans les tubules:


• réabsorption tubulaire proximale,
• réabsorption distale de sodium sous l’effet de l’aldostérone,
• réabsorption d’eau sous l’effet de l’ADH.

L’urine excrétée est donc peu abondante (oligurie) pauvre en sodium, riche
en potassium, acide, et très concentrée. On dit que la réponse du rein est
< adaptée > .
Signes IRA fonctionnelle

Urée plasmatique augmentée


Créatinine nle ou augmentée
Urée/Créatinine P (umol/l ) > 100

FE Na+ < 1%
Na+/K+ urinaire < 1
U/P urée > 10
U/P créatinine > 40
U/P osmoles > 2
Na urinaire < 20 mM/l

Ces indices ne sont interprétables qu’à deux conditions:


- Absence de traitement diurétique.
- Absence d’insuffisance rénale chronique sous-jacente.
Les étiologies des IRA fonctionnelles:

1. DSH extracellulaires par:

 pertes digestives: vomissements , diarrhée, fistules, aspiration,…


 pertes cutanées: brulures, coup de chaleur,…
 Création d’un 3eme secteur: occlusion, pancréatite, péritonite,…
 Polyuries osmotiques, diabète insipide néphrogénique, syndrome
de levée d’obstacle, NIA, NIC,…

2. Etats de choc: hémorragiques, cardiogéniqes, septiques, par


surdosage en antihypertenseurs,…
3. Troubles de l’hémodynamique intra-rénale :
- Vasoconstriction pré glomérulaire: AINS, anti-calcineurines
(ciclosporine), adrénaline, noradrénaline,
- Vasodilatation post-glomérulaire: IEC, Sartans,
4. Les hypoalbuminémies;
- syndrome néphrotique,
- cirrhose hépatique,
Tableau clinique des IRA Fonctionnelles: observées au cours des DHS EC;
• Hypotension artérielle;
• Tachycardie;
• Pli cutané;
• Perte de poids;
• Hémoconcentration;
• Oligurie faite d’urines foncées;
IRA obstructives ou post rénale:

Obstacle haut 

Obstacle bas 
B – IRA obstructives ou post rénale:

Il s’agit d’un obstacle à l’écoulement des urines.


L’IRA obstructive doit être évoquée devant:

1. Cliniquement:

• L’existence d’antécédents urologiques (lithiases) ou de tumeur


pelvienne;
• Une colique néphrétique, des douleurs abdominales ou lombaires;
• Une hématurie macroscopique avec caillots;
• Une anurie totale, ou une rétention complète d’urines;
• La palpation d’un gros rein;
• La mise en évidence d’une grosse prostate ou d’une tumeur du
petit bassin aux touchers pelviens systématiques.
• L ’obstacle doit être bilatéral
(ou unilatéral si rein anatomiquement ou
fonctionnellement unique)

• Y songer tout particulièrement:


- chez le patient âgé
- avec ATCD prostatiques/ gynéco/ chirrurgie abdo
- si anurie

• Diagnostic:
- parfois à portée de main !!!! (globe)
- écho:
.dilatation des cavités pyélocalicielles
.piège: « hypotonie »

A réaliser au plus tard dans les 24 premières heures!


2 . Radiologiquement:

• ASP: - un ou deux gros reins;


- lithiase radio-opaque.
• L’échographie de l’appareil urinaire est l’examen de choix en révélant:
- une dilatation des CPC;
- peut préciser la topographie de l’obstacle;
- suggère parfois la cause de l’obstruction;

Fibrose rétro péritonéale Calcul urétéral


L’absence de dilatation des CPC n’exclue pas l’origine obstructive
surtout si:

- obstruction récente;
- déshydratation associée;
- fibrose rétro péritonéale.

Les causes d’obstacles urinaires les plus fréquentes sont:


- Tumeurs prostatiques (adénome , cancer );
- Les lithiases;
- Les néoplasies ( pelviennes ou rétro péritonéales );
- Les fibroses réto péritonéales.
C- Les IRA parenchymateuses ou organiques:

Elles sont dues à des lésions anatomiques des différentes structures du


rein: les plus fréquentes sont les nécroses tubulaires aigues (NTA ),mais
l’IRA peut compliquer les néphropathies glomérulaires, interstitielles ou
vasculaires.

Les principaux éléments de la discussion:


Les antécédents de maladie générale; le contexte de survenue, prise de
médicaments néphrotoxiques, une HTA;

1) La nécrose tubulaire aigue (NTA ):


3 mécanismes d’atteinte tubulaire aigue dominent: ischémie, toxicité
cellulaire directe, et obstruction.

La régénération de l’épithélium tubulaire permet le plus souvent la


guérison progressive à partir de 3 semaines d’évolution.
Ischémie tubulaire:

• déshydratation ,hypotension sévère/prolongée, état de choc.

• en période post-opératoire:
- chirurgie des anévrysmes de l’aorte abdominale
(surtout si clampage sous-aortique );
- chirurgie cardiaque avec CEC.

• dysfonction organique multiple (sepsis avec endotoxinémie,


pancréatite aigue, …)

• médicaments ayant perturbés l’hémodynamique rénale: AINS, IEC,


Sartans, Ciclosporine A,Tacrolimus,
Agents toxiques pour les cellules tubulaires:
• Pigments:
- myoglobine: rhabdomyolyse aigue
- hémoglobine: hémolyse aigue

• Médicaments:
- produits de contraste iodés +++
- agents anti-infectieux: aminosides, vancomycine, amphotéricine B,
foscarnet, pentamidine.
- agents anticancéreux: cisplatine, 5-FU, tioguanine, cytarabine
- lithium ( surdosage )

•Toxiques:
- drogues (ecstasy )
- solvants ( tétrachlorure de carbone, chloroforme )
- métaux lourds ( mercure )
 Obstruction tubulaire:
- cylindres de chaines légères ( myélome multiple )
- cristaux de médicaments: acyclovir, indinavir, méthotrexate,
sulfamethoxazole, triamtérène.
- cristaux uratiques ( syndrome de lyse tumoral )
- cristaux d’oxalate (empoisonnement à l’éthylène glycol )

2) Néphrites interstitielles aigues:


• Infectieuses ,ascendantes (pyélonéphrites )ou hématogènes:
Leptospirose fièvres hémorragiques virales,..

• Immuno-allergiques:
- sulfamides;
- ampicilline, méthicilline;
- AINS;
- fluoroquinolones.
3) Glomérulonéphrites aigues rapidement progressives:
Doivent être reconnues précocement car ce sont des urgences
thérapeutiques.
• GNRP endo et extra capillaires ( lupus, de cryoglobulinémies, de purpura
rhumatoïde, syndrome de Good Pasture )
• Glomérulonéphrite nécrosante ( Wegener, polyangéite microscopique )
GNA post infectieuse.

4) Néphropathies vasculaires aigues:

 Liées à l’atteinte des artères de petits calibre et des capillaires (SHU,


emboles de cholestérol,…)

 Liées à l’atteinte des artères de gros calibre ( embolies, thromboses ,


dissection des artères rénales )
Tableau para clinique:

IRA Organique

Urée plasmatique augmentée


Créatinine augmentée
Urée/Créatinine P (Umol/l ) < 50
FE Na+ > 1%
Na+/K+urinaire > 1
- U/P urée < 10
U/P créatinine < 20
U/P osmoles < 2
Na+ urinaire > 20
• Il existe une rétention hydro sodée avec prise de poids, tendance à
l’acidose, hyperkaliémie, hypocalcémie
- Des signes d’atteinte tubulaire ou glomérulaire: protéinurie < 2
g/24h, hématurie+cylindres hématiques, cylindres granuleux.

• Indication de la PBR dans l’IRA:


- Si le tableau diffère de celui d’une NTA;
- Si on évoque une néphropathie glomérulaire, vasculaire ou
interstitielle;
- Devant un tableau de NTA lorsque la fonction rénale ne s’améliore
pas 4 à 6 semaines après le début de l’IRA.
- Dans tous les cas, prendre les précautions habituelles.
IV- Complications évolutives et pronostic des IRA:

A – Mortalité:

• En moyenne 50% toutes causes confondues;


• Liée à la maladie, au terrain et aux complications secondaires.

B – Principales complications:

 CPC métaboliques: acidose métabolique, hyperkaliémie,


hyperhydratation avec OAP, dénutrition;
 Les infections nosocomiales;
 Les hémorragies digestives;
 CPC cardio-vasculaires: phlébite, embolie pulmonaire, infarctus du
myocarde, AVC .
IV- Complications évolutives et pronostic des IRA:

C – Facteurs pronostic:

1. Pronostic rénal:
- Fonction rénale antérieure;
- le type d’IRA ( les NTA guérissent souvent sans séquelles après 3 à4 semaines )
- Les glomérulonéphrites ont un pronostic plus réservé car le Dc est souvent
tardif et donc retard thérapeutique;

2. Pronostic vital:
• Le choc septique initial;
• Les défaillances viscérales associées à l’IRA;
• Les complications;
• Le terrain sur lequel survient l’IRA;
TRAITEMENT:

1- IRA pré-rénale: restauration d’une volémie efficace;

2 – IRA organique:

• NTA: suppression de la cause, et trt symptomatique


Pour les GN et vascularite rapidement progressives: TRT
immunosuppresseur + corticoïdes +/- échanges plasmatiques.

3– IRA post-rénale: levée d’obstacle en urgence par:


TRAITEMENT
IRA obstructive:

• Geste immédiat de levée d’obstacle:


- Sondage vésical ou KT sus-pubien
- Montée de sonde JJ.
- Néphrostomie percutanée
Permettant: - drainage des urines
- pyélographie descendante
• Prévention du syndrome de levée d’obstacle
(compensation de la polyurie)
• Traitement antibiotique adapté en cas d’infection urinaire

• Secondairement traitement étiologique de l’obstacle


TRAITEMENT de l’IRA
PREVENTION ++++

• Etiologique :
• Symptomatique :
surveillance : poids, TA, hydratation, diurèse
ECG, Rx pulmonaire, iono pl. et U
Eau : selon diurèse (diurèse + 500 ml)
Na : désodé si anurie, HTA ou oedèmes
K+ : restriction en général + kayexalate
Furosémide : efficace si débuté tôt, à fortes doses (500 mg
à 1 g/24h) pour tenter de maintenir une diurèse
EER : si : - anurie
- Hyperazotémie +++
- HyperK+ > 6 mmol/l et/ou anomalies ECG
- acidose majeure

Hémodialyse en général parfois dialyse péritonéale.


A retenir…
_ Pathologie fréquente avec mortalité importante,
à l'hôpital mais aussi à long terme!

– Risque vital à court terme? (hyperkaliémie menaçante,


OAP anurique, acidose métabolique grave)

– Examen des urines (sédiment ET ionogramme)= primordial!


– Echographie rénale = "obligatoire"

– Les 3 causes les plus fréquentes:


déshydratation
médicaments
contraste iodé
_ Adaptation des doses de médicaments
_ Avis néphrologique dans tous les cas

Vous aimerez peut-être aussi