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Les principes d’imposition des non résidents

LES PRINCIPES D'IMPOSITION DES NON RESIDENTS

Abderraouf YAICH
Diplômé d’expertise et de gestion comptable

Sommaire

I - Le droit d'imposer ne se présume pas


II - Primauté relative des conventions internationales sur le droit
interne
III - Le principe de non discrimination
IV- La règle de non aggravation
A- Les fondements juridiques de la règle de non aggravation
en fiscalité internationale
B- Mise en œuvre de la règle
V- Modalités d'imposition des établissements stables
A- Importance du statut fiscal de l'opérateur étranger en
Tunisie
B- Retenue à la source libératoire sur les marchés de travaux
et prestations ne dépassant pas six mois

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Les principes d’imposition des non résidents

Pour qu'un revenu versé à un non résident ne soit pas


imposable en Tunisie, il faut que sa non imposition soit expressément
prévue par une disposition légale de droit interne ou que son
imposition ne soit pas prévue par la convention fiscale de non double
imposition lorsqu'une telle convention existe entre la Tunisie et le
pays de résidence du bénéficiaire, ce qui illustre le principe selon
lequel « le droit d’imposer ne se présume pas » (Section 1). Les
conventions fiscales internationales ratifiées demeurent supérieures
aux lois internes (Section 2). Lorsque le bénéficiaire de la
rémunération est un ressortissant d'un pays avec lequel la Tunisie a
conclu une convention de non double imposition, le régime fiscal qui
lui est applicable est en outre régie par le principe de non
discrimination (Section 3) et la règle de non aggravation (Section 4).
Enfin, nous examinerons les aménagements apportés aux règles
d'imposition des étrangers qui disposent du statut d'établissement
stable (Section 5).
I- LE DROIT D'IMPOSER NE SE PRESUME PAS
Pour qu'un revenu de source tunisienne versé au profit d'un
non résident ne soit pas imposable en Tunisie, il faut que cette
dispense de l'impôt soit prévue par une disposition légale de droit
interne ou que son imposition ne soit pas prévue par la convention
fiscale de non double imposition conclue avec le pays de résidence du
bénéficiaire.
A contrario, en présence d'une convention fiscale
internationale, pour qu'un revenu de source tunisienne soit imposable
en Tunisie, il faut que son imposition dans le pays de la source soit
explicitement prévue par la convention fiscale de non double
imposition et que son imposition ne soit pas écartée par une
disposition de droit interne.

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Les principes d’imposition des non résidents

En effet, dans le domaine de la fiscalité internationale, le droit


d'imposer ne se présume pas. Ainsi, « lorsque la convention ne
donne pas explicitement à un Etat le droit d'imposer un revenu, un tel
droit ne doit pas se présumer »1.
Ainsi, pour savoir si un revenu de source tunisienne versé à un
non résident est imposable en Tunisie, il faut suivre la démarche
suivante :
1) S'assurer que ledit revenu est imposé par une disposition de
droit interne.
2) S'assurer, ensuite, que la convention fiscale de non double
imposition permet expressément de l'imposer dans le pays de la
source.
3) Appliquer, si l'imposition est prévue par les deux sources
(droit interne et convention fiscale), le taux d'imposition le plus faible
du droit interne et de la convention.

1
Bruno GOUTHIÈRE, Les impôts dans les affaires internationales, Editions
Francis Lefebvre, page 148. Maître GOUTHIÈRE ajoute que le droit d'imposer
ne se présume pas «même, en principe, au profit de l'Etat de résidence du
bénéficiaire».

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Les principes d’imposition des non résidents

Revenu de source tunisienne

Oui Le Non
bénéficiaire
est-il
résident ?

Oui
Le
Etablissement stable ou base bénéficiaire
fixe est-il établi
en Tunisie ?

Non

Le revenu est-il
imposé par une Non
disposition de x
On applique le droit interne ?
droit interne
compte tenu
des
aménagements Oui
éventuels
d’une
convention
fiscale
Y a-t-il une
Non convention
applicable (entrée
en vigueur) ?

Appliquer le droit interne


Oui

La convention
Oui prévoit-elle Non
Taxer selon le taux minimal du droit interne
et de la convention
explicitement
l’imposition dans le
x
pays de la source ?

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Les principes d’imposition des non résidents

Les règles d’imposition des non résidents en droit interne sont


fixées par le code de l’IRPP et de l’IS.
Personnes physiques : L'article 3 du code de l'IRPP et de l'IS
traitant des revenus des personnes physiques dispose que l'impôt est
dû par les personnes physiques non résidentes qui réalisent des
revenus de source tunisienne ou qui réalisent une plus-value
immobilière mais à raison des seuls revenus ou plus-value.
Toutefois, l'impôt n'est pas dû sur :
- les intérêts des dépôts et des titres en devises ou en dinars
convertibles ;
- les dividendes des sociétés de capitaux établies en Tunisie 2 ;
- les rémunérations payées par les entreprises totalement
exportatrices telles que définies par la législation en vigueur, au titre :
• des droits d'auteur ;
• de l'usage, de la concession de l'usage ou de la cession d'un
brevet, d'une marque de fabrique ou de commerce, d'un dessin ou d'un
modèle, d'un plan, d'une formule ou d'un procédé de fabrication, y
compris les films cinématographiques ou de télévision ;
• de l'usage ou de la concession de l'usage d'un équipement
industriel, commercial, agricole, portuaire ou scientifique ;
• des informations ayant trait à une expérience acquise dans le
domaine industriel, commercial ou scientifique ;
• des études techniques ou économiques, ou d'une assistance
technique ;

2
Il s'agit des revenus distribués au sens de l'alinéa "a" du paragraphe II et du
paragraphe II bis de l'article 29 du code de l'IRPP et de l'IS, ou des tantièmes
attribués aux membres du conseil d'administration visés au paragraphe 3 de
l'article 30 dudit code et des revenus visés à l'article 31 du même code.

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- les rémunérations pour affrètement de navires ou d'aéronefs


affectés au trafic international ;
- et la plus-value de cession des valeurs mobilières.
Personnes morales : Les personnes morales non résidentes sont
soumises, aux termes du paragraphe II de l'article 45 du code de
l'IRPP et de l'IS, à l'impôt sur les sociétés lorsqu'elles perçoivent des
rémunérations ou réalisent des revenus de source tunisienne ou une
plus-value provenant de la cession d'immeubles sis en Tunisie.
Toutefois, les exonérations instituées par l'article 3 du code de
l'IRPP et de l'IS au profit des personnes physiques sont étendues aux
personnes morales non résidentes.
Mais, en présence d’une convention fiscale conclue avec le pays
de résidence, un revenu de source tunisienne versé à un non résident
n’est imposable en Tunisie que lorsqu’il est à la fois imposé par une
disposition de droit interne et une disposition de la convention de
non double imposition.
II- PRIMAUTE RELATIVE DES CONVENTIONS INTERNA-
TIONALES SUR LE DROIT INTERNE
Aux termes de l'article 32 de la constitution, les conventions
fiscales dûment ratifiées ont une autorité supérieure à celle des lois
internes sous réserve, dispose la constitution, de leur application par
l'autre partie.
La nouvelle réserve formulée de façon pertinente par la
constitution depuis la loi constitutionnelle du 27/10/1997 est conforme
à une pratique généralement admise en matière de fiscalité
internationale. En effet, la primauté des conventions internationales
sur le droit interne n'est réellement opérante que lorsqu'elle est
effectivement respectée par les deux parties contractantes. Après sa
ratification, une convention fiscale internationale acquiert une autorité
supérieure à celle des lois internes dès lors qu'elle est appliquée
réciproquement.

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Les principes d’imposition des non résidents

Il en résulte que les dispositions de la convention qui se révèlent


contraires à la loi interne l'emportent sur la loi interne. Néanmoins,
selon la règle de non aggravation reconnue par la doctrine de
l'administration fiscale tunisienne, lorsque l'imposition instituée par la
loi interne est plus favorable au contribuable non résident que
l'imposition qui résulte de la convention, c'est la loi interne qui
s'applique.
Cette règle de non aggravation appliquée par la Tunisie n'est
pas observée par tous les pays. Il est même possible d'affirmer qu'au
plan international, cette branche particulière du droit fiscal est celle
qui connaît le plus d'arbitraire et d'interprétation administrative
tendancieuse et chauvine, bien que le droit fiscal international soit,
conceptuellement, fondé sur le principe de la non discrimination.
III- LE PRINCIPE DE NON DISCRIMINATION
Toutes les conventions de non double imposition contiennent
une disposition dite de non discrimination.
Le principe de non discrimination interdit toute discrimination
fondée sur la nationalité en matière fiscale et veut dire que, sous
condition de réciprocité, à situation égale, les ressortissants d'un Etat
signataire de la convention ne peuvent être traités moins
favorablement que les nationaux.
Ce principe signifie que l'impôt appliqué aux nationaux et aux
étrangers se trouvant dans une situation identique doit revêtir la même
forme, que ses modalités d'assiette et de liquidation doivent être
semblables, son taux égal et, enfin, que les formalités relatives à
l'imposition (déclaration, paiements, délais, etc...) ne peuvent être plus
onéreuses pour les étrangers que pour les nationaux.
Toutefois, le principe de non discrimination n'interdit pas par
principe qu'il soit établi une distinction entre les résidents pour
l'octroi d'avantages relatifs à leurs charges familiales et les non
résidents en réservant les déductions pour charges de famille aux seuls
résidents, quoique, une telle discrimination reste sans conséquence

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Les principes d’imposition des non résidents

signifiante, dans le contexte tunisien, compte tenu du caractère


modique des déductions pour charges de famille.
Le principe de non discrimination n'interdit pas, non plus, qu'un
Etat réserve des avantages fiscaux à ses propres organismes publics ou
services publics ou à des établissements privés n'ayant pas un but
lucratif et dont l'activité s'exerce pour des fins d'utilité publique.
En revanche, le principe de non discrimination s'applique pour
les avantages fiscaux applicables aux personnes morales de droit
public exploitant des entreprises à caractère économique dès lors
qu'elles sont assimilables à des entreprises industrielles et
commerciales de droit privé.
La non discrimination est formulée sous une forme négative du
type : "Les nationaux d’un Etat contractant ne sont soumis dans
l’autre Etat contractant à aucune imposition ou obligation y relative,
qui est autre ou plus lourde que celle à laquelle sont ou pourront être
assujettis les nationaux de cet autre Etat se trouvant dans la même
situation" (Article 6-1 de la convention Franco-Tunisienne).
C'est à dessein que la disposition est rédigée sous la forme
négative. En effet, une telle formulation vise à proscrire que les
étrangers soient traités de façon défavorable par rapport aux nationaux
mais pas l'inverse. Rien ne s'oppose, en effet, à ce qu'un Etat accorde
certains aménagements ou facilités à des personnes étrangères et dont
ne profitent pas les nationaux.
Le principe de non discrimination qui s'applique aux impôts et
taxes visés par la convention a généré une autre règle d’essence
pratique dite de non aggravation. La question se pose alors de savoir
s'il est juridiquement acceptable qu'un Etat institue une imposition
spécifique aux revenus versés à des étrangers comme c'est le cas de la
taxe sur la valeur des contrats conclus avec les artistes étrangers ?

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Les principes d’imposition des non résidents

IV- LA REGLE DE NON AGGRAVATION


La règle de non aggravation implique que les dispositions d’une
convention fiscale de non double imposition ne doivent pas faire
obstacle à l’application des dispositions fiscales de droit commun, qui
peuvent être des dispositions de droit interne spécifiques à
l’imposition des non-résidents, lorsqu’elles sont plus favorables au
contribuable.
A- Les fondements juridiques de la règle de non aggravation
en fiscalité internationale
Les conventions fiscales conclues en vue d’éviter les doubles
impositions ne permettent pas, par elles-mêmes, de prélever l’impôt.
Elles ne peuvent donc constituer un fondement autonome à une
imposition. Leur objet est seulement, comme leur nom l’indique, de
faire éventuellement obstacle à une imposition prévue par le droit
interne et ne peuvent, a contrario, jamais aggraver une telle imposition
interne.
Autrement dit, un Etat qui conclut une convention internationale
de non double imposition se borne à abandonner une partie du droit
d’imposition qu’il tient du droit interne.
Ainsi, les conventions internationales de non double imposition
ont comme particularité de présenter un caractère subsidiaire.
L’autorité supérieure à celle des lois internes que l’article 32 de la
constitution confère à tout engagement international ne peut jouer en
matière fiscale que pour autant que la loi est d’abord susceptible de
trouver application en droit interne.
Il en résulte qu’une convention fiscale internationale n’a jamais
pour objet de permettre à un Etat d’établir une imposition mais
seulement de régler les cas de conflits en retirant à un Etat le droit de
taxer qu’il tire de son droit interne.
Lorsque le droit interne exonère un revenu par exemple, ce
revenu ne peut être imposé par le pays concerné en vertu d’une

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Les principes d’imposition des non résidents

disposition d’une convention fiscale internationale. De même, lorsque


le droit interne soumet un revenu à une imposition plus douce que
celle résultant d’une convention fiscale de non double imposition,
c’est cette imposition plus douce qui s’applique.
C’est la raison pour laquelle, l’article 52 du code de l’IRPP et de
l’IS prévoit une disposition spécifique relative au taux de la retenue à
la source applicable à certains revenus versés à des bénéficiaires non
domiciliés et/ou non établis en Tunisie.
En matière de fiscalité internationale, il est établi une priorité,
d’alléger l’imposition dans un pays et d’éviter l’aggravation de
l’imposition d’un revenu que deux pays se partagent par rapport à
l’ensemble de l’imposition du même revenu imposé dans un seul pays.
Cette priorité l’emporte sur la hiérarchisation des normes telle qu’elle
résulte, en Tunisie, de l’article 32 de la constitution.
B- Mise en œuvre de la règle
La règle de non aggravation découle du principe de non
discrimination et implique que les dispositions d'une convention
fiscale de non double imposition ne doivent pas faire obstacle à
l'application des dispositions fiscales de droit commun, qui peuvent
être des dispositions de droit interne spécifiques à l'imposition des
non-résidents, lorsqu'elles sont plus favorables au contribuable.
Cette règle est reconnue par la doctrine de l'administration
fiscale tunisienne (BODI, Texte DGI n° 92/41, Note commune n° 27,
pages 145 et 148).
Ainsi, il est fait application des règles suivantes pour qu'une
rémunération versée à un non résident ou une opération réalisée avec
un non résident soit passible de l'impôt tunisien :
- il faut que le droit commun ou interne permette son imposition,
- et qu'une telle imposition soit prévue ou soit compatible avec
les dispositions de la convention de non double imposition applicable ;

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Les principes d’imposition des non résidents

autrement dit, en cas de silence d'une convention, le revenu n'est pas


imposable dans le pays de la source.
De même, il est fait application des règles suivantes pour la
détermination du taux d'imposition en présence d'une convention
de non double imposition :
1ère règle : Lorsque le taux prévu par la convention bilatérale est
inférieur au taux tunisien de droit interne, le taux de la convention est
applicable de plein droit du seul fait que la convention prime sur la loi
interne.
2ème règle : Lorsque le taux de la convention bilatérale est
supérieur au taux tunisien de droit commun, c'est le taux de droit
commun qui s'applique puisqu'il constitue un taux maximum ne
pouvant être dépassé.
À ce titre, les dividendes de source tunisienne sont totalement
exonérés d'impôt et ce, nonobstant toute disposition contraire des
conventions fiscales.
Cependant, la règle de non aggravation ne fait pas l'objet d'un
consensus international. Ainsi, tirant les conséquences de la primauté
de la convention fiscale sur le droit interne, l'administration fiscale
française, par exemple, considère que les dispositions
conventionnelles peuvent restreindre ou, au contraire, aggraver les
obligations des contribuables 3.

3
Bruno Gouthière qualifie la règle de non aggravation d'un pseudo-principe : «la
loi du 29 décembre 1959 qui prévoit que "nonobstant toute disposition contraire
du Code général des impôts, sont passibles en France de l'impôt sur le revenu
des personnes physiques ou de l'impôt sur les sociétés, tous revenus dont
l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative
aux doubles impositions". Cette loi constitue une autorisation expresse du
législateur pour donner un fondement légal interne à une imposition qui
résulterait du jeu d'une convention internationale. C'est d'ailleurs exactement en
ce sens que son exposé des motifs indique qu'il s'agit de permettre à la France
d'accepter l'insertion dans les conventions fiscales de clauses attribuant à notre
pays le droit d'imposer certaines catégories de revenus, même s'il s'agit de

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Les principes d’imposition des non résidents

De même, certains pays instituent des impôts spécifiques


applicables aux étrangers, ce qui est de nature à contourner
l'obligation de non discrimination et de non aggravation applicable
aux impôts visés par les conventions. C'est le cas de la taxe sur la
valeur des contrats conclus avec les artistes étrangers instituée par la
Tunisie.
Les règles spécifiques d’imposition par voie de retenue à la
source libératoire applicables aux non résidents s’écartent, totalement
ou partiellement, lorsque le non résident opère en Tunisie dans le
cadre d’un établissement stable ou d’une base fixe.
V- Modalités d'imposition des établissements stables
Le régime applicable aux rémunérations versées aux entreprises
étrangères est largement dépendant :
- de leur statut en Tunisie, selon qu'elles disposent ou qu'elles
doivent disposer ou non d'un établissement stable (ou d’une base fixe),
- selon que l'opération est rattachée ou rattachable ou au
contraire dissociable et non rattachée audit établissement,
- et selon qu'il s'agit ou non de travaux de construction, de
montage ou de contrôle ou de membres de groupement de sociétés,
dont la durée des travaux ou du marché de prestations ne dépasse pas
6 mois.
A- Importance du statut fiscal de l’opérateur étranger en
Tunisie
Aux termes de l'article 47 du code de l'IRPP et de l'IS, "les
bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont ceux réalisés dans
le cadre d'établissements situés en Tunisie et ceux dont l'imposition

revenus non imposables d'après la législation française interne. Cette remarque


suffit, selon nous, à battre en brèche l'existence d'un pseudo-principe de « non-
aggravation» in. les impôts dans les affaires internationales, Editions Francis
LEFEBVRE, 5e édition, 2001, page 155.

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Les principes d’imposition des non résidents

est attribuée à la Tunisie par une convention fiscale de non double


imposition".
Dans les conventions internationales, il est généralement inséré
la disposition suivante : si l'entreprise exerce son activité par
l'intermédiaire d'un établissement stable, les bénéfices de l'entreprise
sont imposables dans l'Etat où se trouve ledit établissement mais
uniquement dans la mesure où ils sont imputables audit
établissement stable.
Selon les commentaires de l'OCDE, cela revient à dire que les
activités d'une entreprise étrangère qui dispose d'un établissement
stable en Tunisie peuvent comporter deux branches : la branche des
activités qui se rattachent à l'établissement stable et la branche des
activités dissociées (lorsqu'elles sont dissociables).
Ainsi, les activités rattachées à l'établissement stable sont
soumises à l'impôt selon le régime du droit interne alors que les
activités dissociées sont régies par le régime conventionnel et
généralement imposées selon la technique de la retenue à la source
libératoire ou, purement et simplement, non imposables en Tunisie.
Les établissements stables soumis à l'IR ou à l'IS selon le régime
du droit commun sont tenus de respecter toutes les obligations
fiscales, sociales et comptables qui incombent aux personnes établies
en Tunisie à savoir :
- le dépôt de la déclaration d’existence prévue par l’article 56 du
code de l’IR et de l’IS (ce qui suppose l’obtention d’une carte de
commerçant),
- la tenue d’une comptabilité conforme à la législation
comptable des entreprises,
- le dépôt des déclarations mensuelles (retenues à la source,
TVA, TCL, TFP, FOPROLOS, droits de timbres sur factures, etc …)

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Les principes d’imposition des non résidents

- le dépôt des déclarations des acomptes provisionnels, le cas


échéant,
- le dépôt des déclarations annuelles de l’IR ou de l’IS,
- l’immatriculation à la CNSS et le dépôt des déclarations
trimestrielles de cotisations sociales. A défaut d’établissement stable
et lorsque l’opération dissociable n’est pas rattachée à un
établissement stable, la rémunération versée au non résident est
imposée en Tunisie par voie de retenue à la source libératoire si deux
conditions cumulatives sont remplies :
- son imposition est prévue en droit commun, et
- la convention, conclue avec le pays de résidence du non
résident, donne le droit au pays de la source de l’imposer.
Dans ce cas, le régime d’imposition dans le pays de la source
par voie de retenue libératoire ou la non imposition dépendront de la
qualification de la rémunération versée.
B- Retenue à la source libératoire sur les marchés de
travaux et prestations ne dépassant pas six mois
Bien que réalisés dans des conditions qui confèrent le statut
d’établissement stable, la loi soumet à un régime de retenue à la
source libératoire les travaux de construction, les opérations de
montage et les activités de surveillance s’y rattachant réalisés
individuellement ou par chacun des membres ou associés dans le cas
de constitution de groupements ou de sociétés de personnes avec
réalisation par chaque membre de sa quote-part des travaux et
services.
Par conséquent, le régime de retenue à la source libératoire
s’applique aux travaux de construction, opérations de montage et
activités de surveillance s'y rattachant ainsi qu’aux travaux et services
réalisés par les associés ou membres non résidents des sociétés de
personnes et assimilées qui sont constituées en Tunisie et dont chaque

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Les principes d’imposition des non résidents

membre ou associé réalise en son nom personnel sa quote-part des


travaux et services, et ce :
- lorsque l’opérateur non résident acquiert le statut
d'établissement stable en vertu du droit commun 4 ou des dispositions
conventionnelles,
- les travaux de construction, les opérations de montage, les
services ou les autres travaux ne dépassent pas en Tunisie la période
de 6 mois.
Le régime de la retenue à la source libératoire est le régime de
référence pour les activités visées qui satisfont aux conditions prévues.
Néanmoins, la personne non résidente, éligible au régime de la
retenue libératoire, peut opter pour son imposition selon le régime réel
auquel cas les retenues sont effectuées selon les taux de droit commun
applicables aux résidents.
En cas d’option pour le paiement de l’impôt sur le revenu ou de
l’impôt sur les sociétés sur la base des revenus ou des bénéfices nets
réalisés en Tunisie au titre des activités visées par le régime de la
retenue libératoire et du non respect des obligations fiscales et
comptables prévues par le code de l’IRPP et de l’IS, l’impôt sur le
revenu ou l’impôt sur les sociétés dû ne peut, dans tous les cas, être
inférieur au montant de l’impôt calculé sur la base de la retenue à la
source libératoire par type de travaux ou d’activités.
Lorsque le non résident accepte le régime de la retenue à la
source libératoire, il est imposé en Tunisie par voie de retenue à la
source aux taux suivants calculés sur une base TVA comprise :

4
Selon la doctrine administrative, lorsque les membres d’un groupement ont
signé solidairement et conjointement le contrat relatif au marché concerné,
quoi que chacun des membres exécute son propre lot, tous les membres
solidaires du groupement sont considérés comme établis en Tunisie et ce,
indépendamment des dispositions des conventions de non double imposition
conclues entre la Tunisie et le pays de résidence de chaque membre.

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Les principes d’imposition des non résidents

- 5% du montant brut des rémunérations pour les travaux de


construction,
- 10% du montant brut des rémunérations pour les opérations de
montage,
- 15% du montant brut des rémunérations pour les activités de
surveillance ainsi que pour toutes les autres activités et services
réalisés par les associés ou membres de sociétés ou groupements
susmentionnés.
Les personnes qui sont soumises à la retenue à la source
libératoire, bien qu’elles soient établies en Tunisie, sont dispensées :
- de la tenue d’une comptabilité conforme à la législation
comptable des entreprises,
- du dépôt de la déclaration de l’IR ou de l’IS.
Toutefois, elles demeurent soumises à l’obligation d’opérer et de
reverser les retenues à la source prévues par les articles 52 et 53 du
code de l’IRPP et de l’IS dans le cas où elles paient des montants
passibles de la retenue à la source et de déposer la déclaration
mensuelle de la retenue à la source.
Elles restent tenues également de déposer les déclarations
mensuelles relatives, notamment, à la taxe sur la valeur ajoutée, à la
taxe de formation professionnelle, à la contribution au fonds de
promotion de logements pour les salariés et à la taxe sur les
établissements à caractère industriel, commercial ou professionnel et
aux déclarations de sécurité sociale.
Compte tenu de l’ampleur des obligations déclaratives
maintenues qui, en toute vraisemblance, rendent l’appui sur une
comptabilité bien organisée nécessaire sans parler du maintien de
l’obligation de tenir une comptabilité régulière au regard des
obligations de sécurité sociale, on peut se demander si la dispense de
tenue de comptabilité est réellement opérante ?

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Les principes d’imposition des non résidents

Schéma illustrant le régime de la retenue libératoire au titre des travaux de


construction, opérations de montage ou de surveillance et membres de
groupements de sociétés

Entrepreneur seul Membres d’un groupement Membres d’un


(Personne physique ou réalisant chacun son lot sans groupement réalisant
personne morale) solidarité chacun son lot avec
solidarité

Non
Convention

Oui

Oui Non
Y a-t-il Durée ≤ 6
établissement mois
stable ?

Oui
Régime réel

Oui
Y a-t-il option
au réel ?
Non

Non

Aucune imposition Retenue libératoire

Ainsi, comme l’illustre le schéma, le régime de la retenue à la


source libératoire ne s’applique pas :
- Lorsque les conditions d’intervention de l’opérateur étranger
ne lui confèrent pas le statut d’établissement stable, auquel cas, il
échappe à toute imposition en Tunisie.

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Les principes d’imposition des non résidents

- Lorsque la durée des travaux dépasse six mois, auquel cas, il


est constitué en établissement stable, sauf si la convention de non
double imposition ne lui confère pas ce statut. Dans le cas où les
conditions de l’établissement stable sont remplies, il est
nécessairement soumis en Tunisie selon le régime réel de droit
commun.
- Lorsque, bien qu’éligible au régime de la retenue libératoire, il
opte pour son imposition selon le régime réel.
Le régime de retenue à la source libératoire qui a visé d'assouplir
les obligations fiscales et comptables pour les établissements tunisiens
des entreprises étrangères exerçant en Tunisie pour une période
inférieure à six mois n'a, probablement, pas rencontré de succès
pratique en raison du nombre réduit des opérateurs étrangers qui
correspondent aux conditions exigées, des incertitudes liées à la
période de six mois, de l'importance des taux de retenue à la source,
qui, dans l'hypothèse du taux de 15%, par exemple, suppose un
bénéfice supérieur à 50% du chiffre d'affaires hors TVA et du
maintien des obligations déclaratives relatives à l'obligation de retenir
à la source, à la TVA, à la TCL, à la TFP, au FOPROLOS et à la
CNSS.

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