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Introduction
1. À la découverte du microbiote buccal
Un champ de bataille permanent
La bouche : un nid (super organisé) de bactéries, virus et phages
Le biofilm et ses couches
Petits portraits de famille des bactéries buccales
Les trois types de flores (ou « biofilms »)
Les trois doshas de l’ayurvéda
Comment se forme la flore buccale chez le nouveau-né ?
La flore buccale de la maman et celle du nouveau-né
Le rôle de l’allaitement
La complexification de la flore buccale, quand l’enfant grandit
La diversification de la flore buccale, l’apparition des dents, les infections
virales
La flore buccale à la puberté
L’heure du baiser adolescent (et adulte)
Un équilibre à préserver
Quand la flore buccale est déséquilibrée
Les caries
La gingivite et la maladie parodontale
Les cancers de la bouche, de l’œsophage (mais aussi de l’estomac, du côlon, du sein ?)
Les principaux facteurs de risque
Muqueuse, innervation, immunité : les trois composantes de l’équilibre
L’étanchéité de la muqueuse
La qualité de l’innervation
L’immunité antivirale
La porte d’entrée vers l’intestin…
Conclusion
Références bibliographiques
INTRODUCTION
Le rôle de l’allaitement
On estime que la mère et le nourrisson auraient 85 % de leur
microbiote buccal en commun. En réalité, la transmission du
microbiote maternel de la mère à son bébé est universelle (elle
a lieu chez les mammifères, mais aussi chez les oiseaux, les
poissons, les insectes, les reptiles), et elle s’opère même si les
contacts sont réduits, même si la maman ne postillonne pas sur
son bébé, même si elle porte un masque. Cette colonisation
s’accomplit dans les 48 heures qui suivent la naissance.
Comment expliquer cette vitesse de colonisation ? Par la
faiblesse des protections du bébé, de sa flore, qui accueillerait
sans distinction les microbiotes étrangers ? Mais alors
pourquoi n’accueille-t-il pas aussi ceux des infirmières, des
sages-femmes ou des nourrices ?
Deux hypothèses :
• Soit la muqueuse est « préformatée » durant les 9 mois de
grossesse (par des bactériophages) pour n’accueillir qu’une
flore identique à la flore buccale maternelle, première pierre
singulière d’un édifice qui se poursuit avec un biote extérieur
plus universel ;
• Soit la flore pré-existait à l’accouchement et ne fait que se
« révéler » dans les 48 heures suivantes, comme le microscope
révèle la bactérie jusque-là invisible mais bien présente dans la
boîte de Pétri (boîte de culture pour bactéries).
Quarante-huit heures est une durée beaucoup trop courte
pour croire qu’un biofilm, systématiquement identique à celui
de la mère, capable de survivre immédiatement et résistant aux
autres biofilms, puisse se structurer. Le microbiote est un
organe à part entière. Pour qu’il naisse viable, il faut que les
germes (au sens propre comme au figuré) aient été présents
dans nos tissus, et surtout dans nos muqueuses, avant la
naissance. C’est le biofilm buccal qui apparaît le premier. Le
placenta et le liquide amniotique contiennent probablement
des germes d’origine maternel (transmis par voie sanguine).
Ces germes vont coloniser la peau et surtout la bouche du
bébé. La succion du pouce ou les mouvements de la langue
sont très souvent constatés durant les échographies fœtales. La
flore buccale sera transmise par voie digestive et sanguine au
reste du fœtus. Elle permet la survie.
Le lait maternel n’est bien sûr pas stérile. Il contient des
bactériophages particuliers, que l’on trouve aussi dans la salive
(tout existe dans la salive) et pour certains dans les fluides
corporels (sang, lymphe, liquide intercellulaire, etc.).
Cependant, s’il participe probablement à la construction des
biofilms digestifs – et demeure le meilleur nutriment du
bébé –, il ne diminue pas les risques d’allergie et n’enrichit pas
la flore. L’hypothèse ci-dessus explique que le lait n’est pas
l’artisan principal de la construction du biote.
Les caries
La carie est le résultat d’une dysbiose buccale : les bactéries
pathogènes prolifèrent dans la plaque dentaire, et
déminéralisent l’émail et la dentine, aboutissant à la
destruction progressive de la dent. La plaque dentaire est une
sorte d’enduit qui se dépose à la surface des dents et des
gencives. Elle est formée de protéines salivaires, de déchets
alimentaires (sucre et acides) et de bactéries. Avec le temps, la
plaque dentaire se densifie, se calcifie, provoquant la
formation de tartre. Certaines bactéries, comme Streptococcus
mutans, utilisent le sucre de l’alimentation pour fabriquer des
acides qui vont attaquer les dents, et entraîner l’apparition des
caries. Deux bactéries très dangereuses s’accrochent sur
Streptococcus mutans : Fusobacterium nucleatum et
Porphyromonas gingivalis, les deux grands affreux des
microbiotes, bien pires que le célèbre Candida albicans (plutôt
inoffensif).
La qualité de l’innervation
Les virus peuvent endommager les nerfs. C’est aussi le cas
de l’alcool, de nombreux médicaments, des carences (surtout
en vitamines B), des toxiques environnementaux (pesticides,
composés pétroliers volatiles, comme les vernis, les colles,
etc.), des particules aériennes (tabac, silice, métaux, spores de
levures), des mycotoxines (toxines de moisissures), etc.
L’innervation sous-muqueuse dépend du système nerveux
autonome (nous en reparlerons). Elle assure la régulation de
l’immunité, la qualité de la perfusion, la régulation du tonus
des tissus (essentiel pour le calibre d’un canal ou pour un tissu
barrière, comme le palais mou, le pharynx, les joues).
Toute détérioration de l’innervation aboutit d’une part à une
perte de fonction, d’autre part à la transmission d’une
information négative vers le cerveau, qui répondra par une
tentative de réparation ou de protection (apparition d’un
œdème, d’où gonflement des lèvres ou de la langue,
déclenchement d’un spasme, d’où gêne respiratoire ou de la
déglutition). Les filets nerveux terminaux vont jusqu’au
contact des muqueuses. La moindre information gustative,
thermique, agressive est analysée. Le biofilm bactérien nous
préserve d’un excès d’information et d’un excès de réaction. À
noter : une inflammation de la muqueuse est immédiatement
rapportée au cerveau, qui s’inflamme à son tour et peut
transposer le « stress » à un autre organe. La survenue d’un
infarctus du myocarde par spasme coronarien est
abondamment décrite après des grippes ou des ulcères
d’estomac.
L’immunité antivirale
L’immunité antivirale repose surtout sur les interférons,
dont la synthèse est principalement contrôlée par des
lymphocytes T auxiliaires (un sous-groupe des globules
blancs). Leur nombre et leurs performances dépendent de
facteurs génétiques, mais aussi de la maturation de notre
système immunitaire entre 3 et 18 mois. Une carence en
vitamine D, une exposition à des poussières ou une
contamination virale dans cette période critique conduisent à
des dérives qui ne pourront pas être totalement corrigées
ensuite. Les virus chroniques détruisent régulièrement les
muqueuses, tout particulièrement la partie superficielle (qui
accueille la flore aérobie, productrice de monoxyde d’azote),
ce qui avantage encore la prolifération virale. Ces virus sont
malheureusement souvent neurotropes (agissent sur le système
nerveux) et ils diminuent l’innervation intrinsèque de l’organe
touché, qui va perdre de son efficacité. Par exemple, la
sécrétion salivaire peut diminuer ; les ligaments alvéolo-
dentaires (ou parodontaux) peuvent devenir fragiles ou
douloureux, ce qui retentit sur la mastication ; les tissus
élastiques s’étendent moins, ce qui peut gêner la déglutition, la
phonation, la respiration ou la vidange d’un canal comme la
trompe d’Eustache.
La porte d’entrée vers l’intestin…
La rectocolite hémorragique
Le diabète de type 1
Le cancer de l’estomac
La maladie de Parkinson
Examiner la bouche
La candidose buccale
La candidose buccale se manifeste par un dépôt blanchâtre
sur une muqueuse douloureuse et rouge vif, sans ulcération. La
langue et la face interne des joues se couvrent de plaques
convergentes. Les sensations de brûlure sont fréquentes, les
saignements rares. Le goût peut être altéré, diminué, devenir
désagréable. Habituellement, il n’y a pas de difficulté à
déglutir.
Les candidoses sont courantes après une antibiothérapie
longue ou comportant plusieurs antibiotiques. On pensera
aussi à une immunosuppression, évidente après une
chimiothérapie anti-cancéreuse ou une corticothérapie, parfois
annonciatrice chez un sujet HIV positif. Il pourra également
s’agir d’un diabète qui se déséquilibre.
Attention, on diagnostique souvent hâtivement une
candidose. Chez l’enfant, voire le nourrisson, il s’agira le plus
souvent, lors de symptômes approchants, d’une aphtose virale
herpétique (primo-infection). Une langue noire ou
géographique (voir ci-après) n’est pas évocatrice d’une
candidose.
Les aphtes
Un aphte est une petite ulcération douloureuse de la
muqueuse. Tout commence par une sensation de brûlure ; puis
l’ulcération apparaît rapidement, avec un pourtour très rouge
(inflammatoire) et un fond jaune beurre. Le cratère à bord net
et creusant ne saigne pas.
L’aphte est douloureux au contact (langue, aliments).
Unique ou multiple, il siège sur les bords, la face inférieure ou
la pointe de la langue, à l’intérieur des lèvres ou des joues. La
cicatrisation survient spontanément en une à deux semaines,
sans cicatrice. Aucune contagiosité n’est à redouter.
Attention à ne pas confondre les aphtes (non contagieux)
avec les ulcérations accompagnant certaines maladies
infectieuses transmissibles, comme l’herpès (surtout la primo-
infection), la varicelle, le syndrome pieds-mains-bouche, etc.
Il existe aussi des aphtes traumatiques, qui se développent
au contact d’appareils dentaires mal ajustés, de prothèses
dentaires allergisantes ou de matériaux orthodontiques
tranchants. Le nickel ou certains aliments – noix, cacahuètes,
gruyère, fraises, tomates, etc. – peuvent induire une réaction
allergique intense, avec apparition quasi immédiate d’aphtes.
Il en va de même pour certains médicaments : anti-
inflammatoires non stéroïdiens, bêtabloquants, biphosphonates
(traitement contre l’ostéoporose), etc.
Face à des aphtes récidivants, il faudra toujours étudier
l’hypothèse de certaines maladies, comme la maladie de Crohn
(maladie inflammatoire digestive), la maladie de Behçet
(aphtoses récidivantes buccales, génitales, voire cutanées, avec
atteinte oculaire), la maladie cœliaque (intolérance au gluten),
ou encore d’une baisse importante des globules blancs
(neutropénie sévère), d’une carence en vitamine B12, etc.
Attention, il existe aussi des maladies rares mais très
sévères qui ont notamment pour symptômes la formation de
bulles dans la bouche (vésicules remplies de sérum) ;
lesquelles, après s’être percées, ressemblent à des aphtes : on
citera le syndrome de Stevens-Johnson (réaction intense à un
médicament) ou le pemphigus vulgaire.
Ainsi, si les aphtes peuvent être sans gravité, lorsqu’ils sont
récidivants, ou dans le cas de lésions ressemblantes, ces
symptômes peuvent cacher une maladie sous-jacente
débutante. En cas de doute, n’hésitez donc jamais à en parler à
votre médecin !
La mauvaise haleine
La mauvaise haleine correspond à une synthèse exagérée
d’hydrogène sulfureux. Les autres types de gaz exhalés par la
bouche, en particulier ceux trouvés dans une haleine dite
« cétonique » (résultat d’un jeûne prolongé ou d’une
alimentation cétogène, c’est-à-dire sans glucides) ou chargée
en acides acétiques, propioniques ou butyriques, ne sont pas
nauséabonds. L’hydrogène sulfureux pose problème car il sent
l’œuf pourri, éloignant immédiatement les interlocuteurs les
plus courageux. Il est produit par les bactéries anaérobies
consommatrices de soufre et des muqueuses que l’on appelle
mucinophages. Fusobacterium nucleatum ou bien les
Desulfovibrio en synthétisent de grandes quantités.
Un état bucco-dentaire négligé, une maladie parodontale, le
tabagisme, une récurrence d’herpès virus sont les causes les
plus courantes du développement de cette bactérie. Il est
conseillé, lorsque cette mauvaise haleine persiste, de se rendre
le plus vite possible chez le dentiste pour éradiquer les
éventuels foyers infectieux et supprimer le tartre, et, dans tous
les cas, d’appliquer avec rigueur les principes fondamentaux
du nettoyage bucco-dentaire.
Un rééquilibrage alimentaire, une amélioration de la
vidange gastrique afin de supprimer les reflux, une stimulation
immunitaire pour contrôler la récurrence des herpès virus
buccaux et la prise de vitamine D2/D3 s’imposent par ailleurs
rapidement. Il est en effet crucial que Fusobacterium ne
contamine pas les autres tissus par voie digestive ou
hématogène, ou bien que les herpès virus ne touchent pas le
système nerveux autonome ou ne contaminent pas les proches.
La bouche sèche
La sensation de bouche sèche est le plus souvent induite par
une salive insuffisante (hyposialie) ou trop visqueuse, collante.
La langue brûle ou pique. Ce qui conduit à éviter les épices,
les piments, les acides. Les lèvres peuvent se fendiller. Ces
troubles peuvent s’accompagner de difficultés d’élocution ou
de déglutition, ou encore de caries multiples, avec des
gencives sensibles ou qui saignent facilement.
La salive aidant à la digestion des aliments (en particulier
des céréales, grâce à l’amylase) et à la libération des arômes,
une baisse du goût ou de l’odorat peut être ressentie. Par
ailleurs, la salive contient du lysozyme, un puissant bactéricide
impliqué dans les défenses contre les bactéries à Gram positif
(comme les streptocoques, les staphylocoques, le clostridium,
la listeria – autant de grands noms de criminels envers la gent
humaine). Elle possède aussi des propriétés antivirales et
antifungiques (contre le Candida albicans). Par cet effet, elle
réduit massivement le risque de tartre, de caries, de mauvaise
haleine ou d’atteinte des muqueuses.
Cet assèchement de la bouche peut être un effet secondaire
d’un ou plusieurs médicaments, d’une radiothérapie ou bien
d’une maladie auto-immune appelée syndrome de Gougerot-
Sjögren, qui touche surtout la femme de 50 à 60 ans. Dans ce
dernier cas, le syndrome n’est pas seulement buccal ; il peut
aussi être oculaire, vaginal, voire cutané.
Plusieurs mécanismes peuvent intervenir dans la diminution
de la production de salive : manque d’apport d’eau,
destruction plus ou moins importante des glandes salivaires
(auto-immunité, radiothérapie/chimiothérapie) ou perturbation
dans leur fonctionnement (vieillissement). De très nombreux
médicaments peuvent causer cette hyposialie : les
anxiolytiques, les antidépresseurs ou les neuroleptiques, les
antalgiques morphiniques, les antihistaminiques (contre les
allergies) ou les anticholinergiques (contre les nausées ou la
maladie de Parkinson), et certains médicaments
antihypertenseurs.
Les autres causes sont plus rares : diabète, HIV/Sida, Covid-
19, insuffisance rénale chronique sévère, Alzheimer, etc. Le
cas « Covid-19 », encore mal connu, est à surveiller ! Tout ce
qui touche à la salive, à l’odorat ou au goût est très dangereux.
Rappelons que la flore salivaire est particulièrement riche
en bactéries et bactériophages. Cette flore détermine celle du
duodénum, puis de l’intestin grêle, via des bactéries
indésirables dites « disruptives » (comme les klebsielles, les
Escherichia coli, les clostridies ou les entérobactéries).
L’atteinte qualitative ou quantitative de la salive va toujours
retentir sur la flore duodéno-jéjunale et provoquer une
dysbiose intestinale (ou SIBO, Small Intestinal Bacterial
Overgrowth, pullulation bactérienne du grêle). Tout
déséquilibre retentira également sur le risque d’infection virale
par des herpès virus ou par des papillomavirus.
Lors d’un examen médical, le praticien devra donc vérifier
que la salive du patient est claire, abondante et peu filante. Ce
dernier doit pouvoir déglutir rapidement un verre d’eau de
150 millilitres (en moins d’une dizaine de secondes) – dans le
cas contraire, il est possible qu’il y ait atteinte du système
nerveux autonome pharyngé.
Les antibiotiques
On sait que les antibiotiques sont destructeurs de la flore
intestinale. Mais ils vont aussi détruire la flore buccale. Ils
diffusent dans les tissus après leur passage dans le sang et se
concentrent – selon leur classe et leurs propriétés
pharmacologiques – préférentiellement dans certains organes.
On parle de « volumes de distribution » (ou « espaces de
distribution »). Les muqueuses buccales et digestives font très
souvent partie de l’espace de distribution des antibiotiques.
La flore buccale, qui possède la diversité en bactériophages
la plus grande de l’organisme (des dizaines de milliers de fois
plus grande que celle de l’intestin), est particulièrement
appauvrie après une antibiothérapie. Plus généralement, la
destruction des bactéries protectrices de la bouche livre nos
muqueuses à la barbarie de bactéries beaucoup plus avides en
ressources. Mobiles, ces dernières se divisent rapidement, et
opèrent une exploitation intense des ressources pouvant
engendrer des dommages tissulaires profonds (aphtes,
saignements, déchaussements de dents, fissures de la langue),
voire une inflammation majeure, avec accumulation de
globules blancs. Ces bactéries produisent des gaz et des
toxines qui peuvent endommager d’autres tissus à distance, en
essaimant par voie sanguine (on parle alors de bactériémie),
propageant ainsi l’inflammation chronique.
Ainsi, si une antibiothérapie non maîtrisée peut résoudre
une infection aiguë ponctuelle, elle peut aussi induire une
infection/inflammation chronique diffuse, source
d’immunosuppression, d’atteinte des muqueuses ou des nerfs
sous-jacents. Les bactéries buccales pathogènes jouent un rôle
majeur dans ces pathologies post-antibiothérapie abusive.
Les bactéries résistantes cohabitent désormais chez toutes
les espèces animales vertébrées et occupent des places de
choix dans tous les biofilms, notamment celui de la bouche
(mais aussi celui de la peau et des orifices). Nos habitudes
occidentales conduisent inéluctablement et souvent très
précocement à des flores altérées. Les flores sont détruites par
les antibiotiques, les désinfectants (détergents domestiques,
chlore des piscines, et autres produits halogénés), les
bactéricides ou les bactériostatiques (bains de bouche et usage
de gels hydro-alcooliques répété).
L’intégration de bactéries antibiorésistantes dans les
biofilms rend toute la communauté plus résistante, car les
gènes de résistance sont facilement transfectés d’une bactérie à
l’autre. Un biofilm antibiorésistant devient vraiment un
ennemi inexpugnable, car toutes les bactéries qui le composent
résistent.
Alors que les bactéries sensibles créent des conglomérats de
nombreuses espèces bactériennes différentes pour se protéger,
les bactéries antibiorésistantes forment des biofilms pauvres,
comme si, n’ayant pas besoin de se défendre, elles n’avaient
nul besoin de s’associer.
Nous avons perdu le contact avec le sol (plus de mains dans
la bonne terre de jardins travaillés depuis des lustres) et le bois
(travail forestier, bois de chauffage, maisons ou meubles en
bois massif). Les flores des animaux de rente que nous
mangeons ne valent pas mieux (baisse de la diversité
alimentaire, stabulation, usage irrationnel des antibiotiques).
Même la diversité de la flore de nos animaux de compagnie
commence à décliner. L’obésité commence à frapper chats et
chiens. Et si les antibiothérapies commençaient à tuer les
flores de nos terres agricoles et à raréfier la diversité de
l’endobiote de nos végétaux ? Présents dans les aliments, les
cours d’eau, l’eau du robinet, les antibiotiques détruisent les
flores commensales ancestrales. On retrouve plus de trois
bactéries multi-antibiorésistantes dans certaines eaux
minérales. Les biofilms antibiorésistants se propagent, car les
animaux ou les individus qui en sont porteurs contaminent leur
environnement : fumier, terroir, lieu de vie, en passant par
l’eau du jacuzzi ou de la piscine.
L’argent colloïdal
Autre véritable non-sens : l’utilisation de l’argent colloïdal,
qui va venir désinfecter la flore, alors que, vous l’aurez
compris, la santé implique une flore riche ! D’autant que
l’argent est un métal toxique, qui s’accumule dans les tissus. À
proscrire absolument donc (et éviter aussi tous ceux qui le
recommandent !).
Les médicaments
Et le dentifrice ?
C’est la qualité du brossage qui compte, pas le dentifrice. Si,
en plus du brossage, vous vous nettoyez la bouche avec de
l’eau oxygénée diluée ou bien avec un hydropulseur qui
projette de l’eau enrichie en oxygène, le bénéfice du dentifrice
est négligeable.
Sachez que, dans le monde très réglementé des dentifrices,
il existe encore beaucoup de produits dangereux. Évitez les
dentifrices contenant, entre autres, du dioxyde de titane (classé
mutagène), du triclosan (cancérigène, perturbateur
endocrinien, allergisant, diminuant la diversité du biote) ou du
sodium lauryl sulfate (cancérigène, irritant, diminuant la
diversité du biote).
Quant à leur teneur en fluor, elle est très contrôlée.
L’efficacité chez l’adulte est limitée.
Selon les directives de l’OMS, les enfants de moins de 3 ans
doivent utiliser des dentifrices contenant au plus un niveau de
fluorure de 1 000 ppm (1 000 millionièmes), tandis que les
enfants de plus de 3 ans peuvent utiliser des dentifrices
contenant 1 000 à 1 500 ppm de fluorure. Les dentifrices ne
doivent jamais être utilisés en quantités excessives, pour éviter
les divers effets secondaires de l’empoisonnement au fluor.
Les enfants de moins de 7 ans ne doivent utiliser qu’une
quantité de dentifrice de la taille d’un petit pois. Il est
cependant conseillé de recracher le contenu de la bouche après
le brossage plutôt que de se rincer la bouche à l’eau – ceci afin
que le fluor présent dans le dentifrice puisse rester en contact
avec les surfaces dentaires pendant une période plus longue.
On trouve aujourd’hui sur le marché des dentifrices enrichis
en probiotiques. Plusieurs études rapportent un effet bénéfique
de certaines lactobactéries (toutes génétiquement modifiées !)
sur la flore buccale, avec une baisse du risque de caries. Les
liquides et les dentifrices ainsi enrichis seraient cependant
plutôt inefficaces, en comparaison avec les pastilles ou les
gommes à mâcher. Notez que ces résultats sont préliminaires
et demandent confirmation : aucun probiotique n’ayant pour
l’instant été classé comme médicament, ils sont pour le
moment considérés par les autorités de santé comme des
placebos.
Ce que l’on sait en revanche, ce n’est qu’aucun probiotique
n’est capable de changer durablement un microbiote. Et fort
heureusement ! Avant de vouloir changer un microbiote, il faut
en effet établir un diagnostic, et confirmer que le changement
de la flore buccale sera bénéfique. Imaginez qu’un lactobacille
incompatible avec votre flore personnelle réussisse à
s’implanter, cela provoquerait une guerre fratricide : une auto-
immunité buccale ou bucco-gastrique, ou, pire encore, une
inflammation chronique avec retentissement sur les voisins
(les sinus, le pharynx, les amygdales, les végétations, la
colonne cervicale, le cerveau…). Cela serait d’autant plus
dramatique qu’il est très difficile – parfois impossible –
d’arrêter le massacre. Il faut donc à tout prix éviter de
remplacer sa bonne flore par une mauvaise.
Les polyphénols
Les polyphénols sont issus des végétaux. Il en existe trois
grands types : le resvératrol (raisin noir), la curcumine
(curcuma) et les esters de caféine (produits dans les feuilles et
les écorces d’arbres). Les polyphénols, employés aux doses
idoines, sont d’excellents inhibiteurs de l’immunosuppression
et participent à la lutte anti-oxydante et antitumorale. Ils
agissent tous de la même façon, aussi n’est-il pas nécessaire de
les associer. Attention cependant : un taux élevé est délétère,
car il annule l’effet protecteur (on parle de courbe « en
cloche »).
Afin de faire d’une pierre trois coups (fibres + endobactéries
+ polyphénols), je conseille d’éviter les extraits (dépourvus de
fibres et d’endobactéries) et de sélectionner les produits les
plus riches en fibres : le totum 5 des plantes, ou des écorces,
très riches en rutine, apigénine ou bétuline. On obtient aussi un
effet matrice. L’idéal est d’utiliser des écorces alimentaires
(bouleau, tremble, frêne, aulne, etc…), voire des graines (lin,
psyllium noir) finement moulues, afin d’enrichir en fibres les
compotes, les purées, les pâtes, etc. Les décoctions, infusions
et macérations sont dénuées d’intérêt : pas de fibres, et donc
pas d’endobiotes, et peu de polyphénols.