Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
1. La flore buccale
1.1. Principales espèces de la flore bucco-dentaire
1.2. Evolution de la flore en fonction de l'âge
1.3. Flores normales et pathologiques des différents sites : langue, muqueuse jugale,
salive
1.4. Flores normales et pathologiques des différents sites : dent et plaque dentaire
1.5. Composition de la flore bactérienne de la plaque dentaire
2. La plaque dentaire
2.1. Genèse de la plaque
2.2. Rôle de S. mutans dans la carie dentaire
2.3. S. mutans : facteurs de virulence
2.4. S. mutans : liaison à la surface de la dent
2.5. Particularités des caries de la racine dentaire
2.6. Sucres de subsitution et carie
2.7. Rôle des fluorides sur les bactéries cariogènes
2.8. Prévention de la carie sur le plan bactériologique
- 197 -
Chapitre XVI – Bactériologie bucco-dentaire
1. La flore buccale
La flore du milieu buccal est très riche et diversifiée et l’on y a dénombré jusqu’à 200
espèces différentes. Toutefois, la flore commensale "résidente" comporte une vingtaine
d’espèces qui sont retrouvées régulièrement. Cet écosystème est soumis à l’influence d’une
série de paramètres qui y régissent un équilibre facilement rompu.
• Certains sites sont plus favorables à certaines espèces. Par ex. Streptococcus sanguis se
trouve essentiellement sur les dents alors que S. salivarius réside préférentiellement sur
les muqueuses jugales et linguales. L'adhérence des bactéries joue un rôle important à
ce niveau : elle est variable suivant les espèces et les surfaces. S. sanguis adhère à la
surface dentaire, S. salivarius à la langue, les Neisseria adhèrent peu. Les Veillonella
surtout à la langue. La formation de polysaccharides joue également un rôle dans
l'adhérence aux dents.
- 198 -
Chapitre XVI – Bactériologie bucco-dentaire
Cocci Gram +
Parmi les microcoques et les staphylocoques, seul Micrococcus mucilaginosus, récemment
dénommé "Stomatococcus mucilaginosus" occupe une place de quelque importance.
Cocci Gram -
Ils sont représentés par les Neisseria, aérobies et les Veillonella, anaérobies souvent très
abondantes.
- 199 -
Chapitre XVI – Bactériologie bucco-dentaire
Bacilles Gram +
La plupart des espèces sont anaérobies, strictes ou préférentielles, ou microaérophiles.
Beaucoup ont une morphologie pléomorphe, filamenteuse.
Bacilles Gram -
Parmi les aérobies, Haemophilus influenzae et H. parainfluenzae sont généralement présents
dans la bouche. Les espèces anaérobies les plus importantes appartiennent aux genres
Fusobacterium (surtout F.nucleatum) et Bacteroïdes, Porphyromonas ou Prevotella. Ce sont
les bacilles pigmentés (groupe "melaninogenicus") et en particulier Porphyromonas gingivalis
qui sont souvent impliqués en pathologie bucco-dentaire.
Les Capnocytophaga et les Actinobacillus sont aussi à ranger dans les espèces à Gram
négatif, microaérophiles.
Autres germes
Des spirochètes tels que Treponema denticola et d’autres, des Candida et de rares
protozoaires peuvent également être rencontrés.
La flore se diversifie avec l’âge. Six heures environ après la naissance, la colonisation
progresse rapidement. Après un jour, Streptococcus salivarius peut être retrouvé chez 80%
des enfants. S. mutans et S. sanguis n’apparaissent qu’au moment de la dentition. Les
actinomycètes et les Fusobacterium n’y sont pas liés, mais augmentent avec l’éruption des
dents.
Porphyromonas gingivalis n’est retrouvé que chez 18 à 40% des sujets de 5 ans, alors
qu’entre 13 et 16 ans sa présence est constante.
- 200 -
Chapitre XVI – Bactériologie bucco-dentaire
La langue héberge une prédominance de cocci Gram +. Parmi ceux-ci, S.salivarius est le
mieux représenté, il présente d’ailleurs une propriété d’adhérence à la muqueuse linguale
plus marquée que les autres streptocoques. D’après Gordon et Gibbons, la répartition des
groupes de bactéries à la surface de la langue s’établit comme suit :
Cocci Gram + facultatifs : 44,8%
Cocci Gram + anaérobies : 4,2%
Bacilles Gram + facultatifs : 13,0%
Baccilles Gram + anaérobies : 7,4%
Cocci Gram - aérobies-fac.: 3,4%
Cocci Gram - anaérobies : 16,4%
Bacilles Gram - facultatifs : 3,2%
Bacilles Gram - anaérobies 8,2%
Les parois jugales présentent à peu près la même flore. La flore de la salive a également une
composition très voisine de la langue. On y trouve 2,5 x 108 bactéries par ml environ. Il
semble donc que ce soit la langue et les muqueuses et non les dents qui contribuent à
reconstituer constamment la flore salivaire qui devient le reflet de ces sites.
- 201 -
Chapitre XVI – Bactériologie bucco-dentaire
La plaque dentaire est le résultat d’une organisation bactérienne complexe dont les premiers
stades de formation correspondent à un dépôt de glycoprotéines sur les surfaces des tissus
durs ou des tissus mous baignant dans la salive. Ces glycoprotéines sont principalement les
suivantes : albumine, lysosyme, amylase, phosphoprotéines, lactoferrine, mucines... Cette
pellicule exogène acquise est secondairement colonisée par des micro-organismes qui vont
s’organiser en fonction de critères physico-chimiques, nutritionnels ou relationnels. Deux
types de plaque se distinguent : la plaque supra-gingivale et la plaque sous-gingivale.
Comme leur nom l’indique, ces deux types sont définis en fonction de leur localisation
anatomique par rapport à la gencive. La plaque supra-gingivale est spécifiquement impliquée
dans la pathologie carieuse alors que la plaque sous-gingivale est associée aux pathologies
parodontales (gingivites, parodontites, abcès parodontaux).
Plaque supra-gingivale.
Au début, s’observe une prédominance des streptocoques : S. sanguis sur les surfaces lisses,
S. mutans sur les fissures. Il y a un antagonisme entre les deux et généralement une seule
de ces deux espèces prédomine. Après, les conditions nutritionnelles évoluent et la flore se
diversifie. Présence abondante de Veillonella et d’Actinomyces (surtout A.viscosus). Des
Haemophilus et des lactobacilles profitent aussi de ces facteurs de croissance. Le potentiel
redox s’abaisse progressivement et les anaérobies stricts augmentent : Bacteroïdes,
Porphyromonas, Prevotella, Peptococcus, Peptostreptococcus, Eubacterium, Bifidobacterium.
Plaque infra-gingivale
La composition est semblable mais il y a une plus grande proportion d’anaérobies.
Lorsqu’elle descend vers la région apicale, Porphyromonas gingivalis et Fusobacterium
prédominent. A ce moment, cette flore est identique à la flore des infections parodontales.
Des variations interviennent ici aussi en fonction de l’âge, du régime alimentaire etc. Par ex.
chez les jeunes enfants Actinomyces naeslundii est plus fréquent alors qu’A.viscosus est
prédominant chez l’adulte. Les lactobacilles de l’enfant sont différents de ceux de l’adulte
(L.casei chez l’enfant). L’abondance de saccharose dans l’alimentation a une influence bien
connue en fournissant aux streptocoques le substrat nécessaire à l’élaboration des glucanes.
- 202 -
Chapitre XVI – Bactériologie bucco-dentaire
2. La plaque dentaire
Miller a, le premier, émit l’hypothèse du rôle des bactéries dans la genèse de la carie et a
prouvé que in vitro des bactéries de la bouche étaient capables, en acidifiant des milieux
sucrés, d’attaquer l’émail des dents. Ensuite on attribua aux lactobacilles un rôle dans la
carie par leur pouvoir acidifiant. Cette théorie fut rapidement abandonnée, en raison, entre
autres, du faible pourcentage que représentent ces germes dans la flore totale de la plaque.
- 203 -
Chapitre XVI – Bactériologie bucco-dentaire
De même, le caractère transmissible de la carie a été démontré chez des hamsters : des
animaux sans caries sont encagés avec des animaux présentant des caries, un groupe
témoins étant séparé. Tous les animaux sont soumis au même régime. Les hamsters
indemnes contractent des caries au contact de ceux qui en sont atteints.
Le rôle de S. mutans a pu être également avancé sur base d’observations faites chez
l’homme : dans les plaques provenant d’individus ne faisant pas de caries on trouve
généralement S. sanguis alors que dans celles provenant de personnes présentant des caries
S. mutans est prédominant.
L’acidité qui attaque l’émail dentaire est provoquée essentiellement par la fermentation de
glucides au niveau de la plaque. S.mutans se révèle être plus acidogène que les autres
streptocoques. S.mutans acidifie jusqu’à un pH de 3,4 en 18 h. Les lactobacilles acidifient
jusqu’à 3,6-3,8 en 3 à 5 jours.
Parmi les sérotypes de S.mutans c’est le type C qui est le plus communément rencontré dans
nos régions.
- 204 -
Chapitre XVI – Bactériologie bucco-dentaire
Tolérance à l’acidité
Cette tolérance est indispensable pour la survie de la bactérie et sa croissance à pH bas
Production d’endodextranases
Cette production permet apparemment au S. mutans d’envahir l’écosystème formé à la
surface de la dent par les souches productrices de glucanes extracellulaires riches en liaisons
α-1-6, hydrosolubles (les autres streptocoques S. sanguis et S. mitis)
Le métabolisme de S. mutans à la surface de la dent est fort différent selon qu’il y a ou non
présence de saccharose.
- 205 -
Chapitre XVI – Bactériologie bucco-dentaire
Les caries de la racine dentaire surviennent plus fréquemment chez la personne âgée et sont
nécessairement liées à une perte de substance gingivale qui expose la dentine à
l’environnement oral. Elles sont, comme pour la couronne, associées à la formation d’une
plaque dentaire. Les bactéries impliquées sont par contre plus difficiles à évaluer. Trois
groupes de bactéries sont impliquées dans cette localisation particulière :
• Actinomyces viscosus a été isolé en culture pure de lésions de caries sur racine dentaire.
L’inoculation au rat ou au hamster induit ce type de carie en même temps que des
lésions de périodontite. Cette espèce produit des polysaccharides extracellulaires et
forme du lactate comme principal produit de catabolisme.
• S. mutans induit également, chez le rat, des caries de la racine et de la gingivite. Il joue
certainement un rôle chez l’homme également.
- 206 -
Chapitre XVI – Bactériologie bucco-dentaire
• Les lactobacilles ont un rôle beaucoup plus incertain. Ils sont souvent présents dans les
lésions mais ils le sont aussi dans la salive. Il n’y a pas de modèle animal montrant
l'apparition de carie en présence de lactobacilles seuls.
Le saccharose a été largement remplacé ces dernières années, par des substituts sucrés ou
non, dans l’alimentation et les boissons. Ces substituants n’offrent de toute évidence pas les
mêmes avantages écologiques aux S. mutans que le saccharose.
Les études sur animaux montrent que les polyols (sorbitol, mannitol, xylitol) sont très
faiblement cariogènes, voire anti-cariogènes dans le cas du xylitol.
L’aspartame est non-cariogène ainsi que la saccharine qui, de plus, inhibe la carie chez le rat
lorsqu’elle est donnée à forte concentration.
Les fluorides sont connus pour leur pouvoir anti-cariogène. Leur principal rôle est d’inhiber la
déminéralisation de la dent et d’entretenir la reminéralisation. Il y a cependant de plus en
plus d’évidences qu’ils agissent aussi par un effet antibactérien lorsqu’ils sont donnés en
applications topiques (pâtes et gels dentaires, produits de rinçage... hautement concentrés).
S. mutans est beaucoup plus sensible à cet effet inhibiteur que ne le sont A. viscosus et
Lactobacillus.
L’élimination précoce de la plaque dentaire par un brossage adéquat est la mesure la plus
efficace puisqu’elle s’attaque à la condition bactériologique première, nécessaire à l’éclosion
de la carie.
L’emploi de dextranases s’est révélé efficace dans l’expérimentation animale, mais n’a pas
donné satisfaction chez l’homme.
- 207 -
Chapitre XVI – Bactériologie bucco-dentaire
Rôle de l’immunité: chez les individus ayant une déficience en IgA sécrétoires (IGAs), on
observe plus de caries, mais pas chez ceux qui ont une suppléance par des IgM sécrétoires
(IgMs). De plus dans la plaque on observe des bactéries tapissées d’IgA.
• par voie générale, il n'y a pas d'efficacité, pas d'IgAs (et danger de sensibilisation ?)
• par voie locale dans les glandes salivaires, on observe une certaine protection
• par voie orale, il y aurait un effet au niveau des plaques de Peyer intestinales et une
stimulation plus générale des IgAs à d'autres niveaux.
3.1. Parodontites
Ce sont des infections des structures de soutien de la dent : la gencive, le ligament péri-
odontal, l’os alvéolaire, le cément. Ces infections commencent par une gingivite, avec
œdème saignant facilement et haleine désagréable. Les gingivites sont souvent torpides et
peuvent gagner, à partir du sillon gingival, tous les tissus de soutien de la dent qui sont
détruits progressivement. Ces infections chroniques sont une cause majeure de la perte des
dents. Elles restent habituellement localisées au parodonte où se forment parfois des abcès
avec péricoronarite. La péricoronarite est une infection des gencives autour des couronnes
dentaires, avec abcès gingival pouvant s’étendre aux parties molles adjacentes. Ces
infections se voient surtout lors de l’apparition des dents de sagesse.
- 208 -
Chapitre XVI – Bactériologie bucco-dentaire
Un argument pour l’étiologie bactérienne de ces affections est donné par la corrélation
parfaite entre la sévérité des lésions et la quantité de "dépôt" ou de plaque sur les dents.
Expérimentalement, lors d’une interruption de l’hygiène buccale, une gingivite survient en +
ou - 8 jours et disparaît rapidement lors de l’élimination de la plaque. Dans les parodontites,
il y a des lésions (détachements) irréversibles qui n’ont pas autorisé la prolongation des
expériences précédentes.
Mécanisme pathogénique
Curieusement il n’y a pas d’invasion tissulaire dans les parodontites, et, si le rôle des
bactéries paraît indiscutable, leur mécanisme pathogénique n’est pas parfaitement élucidé.
- 209 -
Chapitre XVI – Bactériologie bucco-dentaire
On a également invoqué des cytotoxines et des métabolites irritants: amines, H2S,... Les
bactéries, par contre, provoqueraient un chimiotactisme des polymorphonucléaires (PMN)
qui passent à travers l’épithélium gingival. Lors de la lyse des PMN, il y aurait libération
d’enzymes destructrices des tissus, ce qui favoriserait la pénétration des éléments précités.
Les endotoxines pourraient également intervenir à ce niveau de même que la formation
d’immun-complexes qui activeraient le complément.
Les bactéries des sites parodontaux peuvent être à l’origine d’infections des tissus mous et
osseux de la cavité orale. Ce sont surtout : S. milleri, B. gingivalis, F. nucleatum, Eikenella,
etc. qui sont trouvés dans ces circonstances. L’actinomycose cervico-faciale constitue
une autre manifestation infectieuse dont le point de départ est souvent bucco-dentaire.
Enfin on peut observer des infections systémiques ou à distance causées par des germes des
sites dentaires parodontaux : l’endocardite, les abcès du cerveau à S. milleri, les infections
suppuratives pulmonaires.
D’autres infections bactériennes de la cavité buccale ne sont pas liées à une infection
dentaire, mais sont d’apparition spontanée ou favorisée par des traumatismes (brûlures
chimiques ou thermiques), ou une immunosuppression (chimiothérapie, cytolytique...). Il
s’agit de stomatites gangréneuses chez les sujets immunodéprimés ou malnutris. Ces
stomatites débutent par une lésion gingivale douloureuse évoluant rapidement vers un
ulcère nécrotique, avec diffusion de l’infection vers les tissus profonds adjacents. Ces
infections, de pronostic grave, sont dues à des bactéries anaérobies telles que Treponema
vincentii, Fusobacterium nucleatum, Prevotella melaninogenica. Enfin, certaines stomatites
spontanées sont sexuellement transmises : stomatites ulcéreuses à tréponèmes (chancres
syphilitiques) ou stomatites suppurées (gonocoques).
- 210 -
Chapitre XVI – Bactériologie bucco-dentaire
- 211 -
CH2OH CH2 CH2 CH2 CH2
1-3 linked chain6 insoluble 6 6 6
CH2
A 1 1 1 1 6
1
D 1
3
CH2OH
1-6 linked chain soluble
CH2OH 1
3
CH2OH 1
CH2OH 3
CH2 1
3
CH2 C
3
B
3 1