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Club de l’arbitrage, clubdelarbitrage@gmail.com
Aix-Marseille Université, 13100 Aix-en-Provence
1 OPPETIT Bruno, « Justice étatique et justice arbitrale », in Études offertes à Pierre Bellet, Litec, 1991 p. 415 et s. ;
TERRÉ François, Discours, in Compte-rendu du colloque du 24 septembre 1997 à la CCI de Paris « Justice arbitrale et
justice étatique », Association française d’arbitrage, 1997, p. 11. ; GAILLARD Emmanuel, « L’ordre juridique arbitral :
réalité, utilité, spécificité », 55 McGill L.J., 2010, p. 891.
2PERROT Roger, BEIGNIER Bernard et MINIATO Lionel, Institutions judiciaires, 2018, LGDJ, Lextenso éditions, p. 73,
no61.
3 Ibid., p. 37, no22.
4 Ibid., p. 76-77, no65.
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I. L’arbitre, un juge ?
Le juge est une figure d’autorité chargé de résoudre une contestation. Il ne peut se
confondre avec les intérêts de l’une ou l’autre des parties. En cela, il peut être défini
comme un tiers neutre, impartial et désintéressé10. Le juge naturel de l’ordre juridique
étatique est le magistrat. Tous les magistrats sont-ils des juges ? Le magistrat juge
lorsqu’il siège, mais il requière l’application de la loi quand il est au parquet11. Le
magistrat exerce une fonction publique, bien que son statut soit distinct de celui des
fonctionnaires ; les magistrats forment un corps judiciaire au sein de l’État.
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Un acte juridictionnel est une décision qui tranche un litige selon la règle de droit
ou en vertu de l’équité. Pour être qualifié de juridictionnel, l’acte doit émaner d’une
juridiction, c’est-à-dire un organe investi régulièrement par la loi du pouvoir de
juger16. Pour savoir si une décision constitue un acte juridictionnel, il convient de
vérifier si le juge statue sur un litige, entre deux ou plusieurs adversaires, en faisant
application d’une règle de droit.
Quels sont les principaux effets d’un acte juridictionnel ? D’abord, le dessaisissement
du juge qui a rendu l’acte ; il ne pourra ni modifier l’acte, ni réexaminer l’affaire.
Ensuite, l’autorité de la chose jugée empêche le renouvellement de l’affaire. Un acte
juridictionnel se caractérise par la force exécutoire lorsqu’il est revêtu de la formule
dite exécutoire, permettant le recours à la force publique 17.
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Doit-on en déduire que le juge tranche selon le droit, tandis que l’arbitre juge en
fonction des faits ? Cela serait une erreur, même lorsque l’arbitre agit en amiable
compositeur, car le droit demeure. Certes, il y a une interrogation : l’arbitre est-il, lui
aussi, lié par une jurisprudence, celle d’un ordre juridique arbitral ? La question est
complexe22. Quelques éléments de réponse peuvent être apportés. L’intérêt de
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l’arbitrage réside dans la latitude de décision lorsqu’il est fait application du droit
désigné23. La justice arbitrale étant décentralisée et autonome, l’arbitre est libre de
reproduire ou non des solutions données par d’autres arbitres, puisque aucun organe
n’est en charge d’une unité d’application du droit ou de l’interprétation des faits. Les
choses peuvent être encore nuancées, car une jurisprudence arbitrale a une
influence dans la pratique. Mais le fondement de cette influence n’est pas son
autorité, mais serait plutôt son acceptabilité24. Donc, l’arbitre n’envisage pas la
jurisprudence de manière a priori contraignante dans son raisonnement juridique.
Autre point important, l’erreur de droit n’est pas sanctionnée par le juge de
l’annulation. En d’autres termes, une sentence ne peut être annulée parce que
l’arbitre n’aurait pas dit le droit applicable de la même manière que le juge étatique
l’aurait fait. La conséquence pratique est notable : l’arbitre dispose d’une liberté dans
l’appréciation des faits et du droit. Le juge, lui, est lié par une double contrainte dans
l’appréciation des faits : le droit positif applicable, et l’autorité de la jurisprudence25.
L’arbitre est libéré de ces contraintes, comme nous l’avons vu, et c’est sans doute un
des traits les plus distinctifs de l’arbitrage.
23Ibid, p. 456. Les méthodes d’interprétation peuvent différer en fonction du type d’arbitrage, voir à ce sujet LÉVY,
Laurent, ROBERT-TISSOT, Fabrice « L’interprétation arbitrale », Rev. arb., 2013, no4.
24 JACQUET, Jean-Michel, op. cit., p. 457.
25 IVAINER, Théodore, L’interprétation des faits en droit, LGDJ, Paris, 1988, no54.