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- Ensuite, « l’art, c’est faire croire ». En effet, l’art est une représentation du réel. Il correspond à
une vision subjective de l’artiste, et à une interprétation du spectateur ou lecteur. C’est donc
un point de vue déformé sur la réalité, qui essaie souvent de se faire passer pour la réalité elle-
même. C’est tout l’enjeu de la fiction : on sait que c’est faux, mais on fait le choix d’y croire
quand même, et c’est dans cette fausse illusion (l’illusion romanesque ou l’illusion théâtrale)
que réside le plaisir de la fiction. Comment, nous, lecteurs, en venons-nous à adopter cette
absurde position de celui qui sait qu’on lui fait croire, mais qui croit quand même ?
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Français-philosophie séquence 1 : « le partage du vrai et du faux devient […] insignifiant
CPGE scientifiques au regard de l’efficacité du « faire croire ». »
Lycées Turgot et Léonard Limosin Myriam Revault d’Allonnes, La Faiblesse du vrai, 2018
année scolaire 2023-2024
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Français-philosophie séquence 1 : « le partage du vrai et du faux devient […] insignifiant
CPGE scientifiques au regard de l’efficacité du « faire croire ». »
Lycées Turgot et Léonard Limosin Myriam Revault d’Allonnes, La Faiblesse du vrai, 2018
année scolaire 2023-2024
Rhétorique / éloquence
Demande une analyse psychologique S’appuie sur les S’appuie sur la raison : vise
pour s’interroger sur les facteurs de passions : crée des l’honnêteté, la clarté, l’éthique
crédulité et de crédibilité impressions
Prenons les choses sous un autre point de vue. D’une certaine façon, on peut dire que la création
artistique est une manière de faire croire : puisqu’il s’agit de représenter une réalité, d’en donner une
image, vraie ou fictive, tout en faisant croire qu’il s’agit de la réalité. Or, comment réagissons-nous à
l’art représentatif, qu’il s’agisse d’écriture ou d’images1 ? Notre propos s’appuiera en particulier sur la
question de la fiction en littérature, plus précisément du roman.
Essayons d’établir certaines notions d’analyse littéraire en guise d’introduction aux extraits
suivants.
- La fiction désigne toute histoire fausse, une construction imaginaire. Donc toute fiction est
opposée au réel et est un mensonge.
- Mais les auteurs de fictions essaient de nous faire croire que la fiction est en quelque sorte la
vérité et entretiennent donc deux sortes d’illusions :
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Nous ne parlerons pas ici de musique : ce n’est pas un art représentatif. La musique peut aider à faire croire
quelque chose (dans un film, une publicité, un discours…) mais qui n’est pas elle-même. Il ne s’agit pas de faire
croire à la vérité d’une réalité qui serait représentée par la musique, alors que l’écrivain ou le peintre essaient
souvent de nous faire croire qu’ils représentent le vrai.
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Français-philosophie séquence 1 : « le partage du vrai et du faux devient […] insignifiant
CPGE scientifiques au regard de l’efficacité du « faire croire ». »
Lycées Turgot et Léonard Limosin Myriam Revault d’Allonnes, La Faiblesse du vrai, 2018
année scolaire 2023-2024
o On appelle illusion référentielle (ou effet de réel) les procédés qui font que la fiction
ressemble au réel, d’une façon ou d’une autre, de plus ou moins loin. Cela permet au
lecteur :
▪ De se projeter dans l’intrigue et de s’identifier aux personnages
▪ De considérer la fiction comme un moyen de connaissance du réel
o On appelle illusion romanesque les procédés par lesquels les romanciers essaient de
faire croire que leur récit est une histoire vraie (préfaces, témoignages d’autorité, notes
de bas de page… ce sera très présent dans notre étude des Liaisons dangereuses)
- Toutefois, pour que l’illusion fonctionne, il faut que le lecteur ait envie de se laisser illusionner.
Quand il lit un roman, il sait que c’est du faux, mais il fait semblant de croire que c’est vrai, sans
quoi il n’en retire aucun plaisir. C’est pourquoi on parle de :
o Pacte de lecture : c’est un pacte implicite lié tacitement entre l’auteur et le lecteur. Si
c’est un documentaire, le lecteur s’attend à ce que l’auteur ait respecté un pacte de
documentation et de réalité. Si c’est une fiction, le lecteur s’engage à se laisser
illusionner, à essayer d'y croire.
o On appelle suspension de l’incrédulité le fait d’accepter de croire l’incroyable, le temps
de la fiction, justement parce que c’est une fiction. C’est le fait d’accepter de se laisser
entraîner dans une intrigue sans passer son temps à dire « peuh, ce n’est même pas
possible… »
Lecture du texte 5 : Louis Aragon, préface aux Cloches de Bâle
Le roman est le domaine du mensonge : il « invente », il est plein de « ce qui est menti », et Aragon
parle de « mensonge romanesque ». Or, ce « mensonge romanesque » a un lien ambigu avec la vérité,
« le réel objectif ».
- Il fonctionne par contraste : les mensonges des romans, c’est-à-dire la fiction, permettent en
réalité de mieux comprendre le réel, dont on sait qu’il n’est pas « menti ». La fiction est un biais
grâce auquel on peut paradoxalement avoir accès au réel, elle est « l’ombre sans quoi vous ne
verriez pas la lumière ».
- Mais les choses sont plus compliquées que cela. D’après Aragon, nous avons peur du réel, de
la réalité objective, parce que nous ne la comprenons pas. Nous sommes des « ignorantins »
soumis à l’ « épouvante » de la vérité que nous ne parvenons pas à atteindre.
- C’est pourquoi le mensonge romanesque est un moyen de nous faire croire que nous
comprenons le monde réel, parce que nous comprenons la façon dont il est « menti », travesti
dans la fiction. C’est sur ce « substratum », ce fondement certes falsifié mais nécessaire, que
nous construirons ensuite notre rapport à la réalité.
- Le roman est donc un mensonge nécessaire, qui est finalement « moyen de connaissance »
- C’est pourquoi l’être humain, toujours en quête de compréhension et de lumière dans les
ténèbres, ne pourra jamais se passer du roman. Pour ma part, j’entends par là : de la fiction,
de tout ce qui « invente d’inventer ».
Lecture du texte 6 : Nathalie Sarraute, L’Ere du soupçon
- Ce texte postule que dans le texte littéraire (en particulier ici : dans le roman tel qu’il se
développe dans les années 50, ce qu’on appelle le « Nouveau Roman ») il y a en quelque sorte
deux discours : la conversation et la sous-conversation (dans le langage courant, aujourd’hui,
on parlerait de texte et de sous-texte, en d’autres termes, ce qui est dit et ce qui est sous-
entendu)
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Français-philosophie séquence 1 : « le partage du vrai et du faux devient […] insignifiant
CPGE scientifiques au regard de l’efficacité du « faire croire ». »
Lycées Turgot et Léonard Limosin Myriam Revault d’Allonnes, La Faiblesse du vrai, 2018
année scolaire 2023-2024
- Le texte est ce qu’on veut faire croire au lecteur, le sous-texte ce que le lecteur essaie de lire
entre les lignes pour ne pas entièrement être la dupe de l’auteur
- Le lecteur est donc constamment en proie au « soupçon » : il ne demande qu’à croire ce qu’on
lui dit et, par identification, à croire ce qu’un personnage dit à un autre, mais en réalité il a
toujours un doute.
- Le romancier joue donc sur ces deux tableaux : en même temps il fait croire au lecteur à la
réalité de sa fiction (conversation) et en même temps il instille le doute (sous-conversation).
Conclusion :
- Parce que la fiction représente un monde faux et essaie de le faire passer pour vrai
- Parce que la représentation du faux peut être un moyen d’infléchir la réalité, de susciter une
croyance (il ne s’agit pas de croire à la fiction elle-même, mais que la fiction aide à faire croire
à une idéologie). C’est en cela que l’art / la représentation imagée / le discours sont des moyens
efficaces de propagande politique. Le monde des émotions et des passions qui sous-tend la
sous-conversation est très largement utilisés comme nous le verrons notamment à travers le
propos de Hannah Arendt