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Les agents pathogènes dans la

lutte biologique contre les insectes


B. S. TOGUEBAYE
Faculté des Sciences et Techniques
Université Cheikh Anta DIOP de Dakar
Introduction
La Lutte biologique

DEBACH (1964) définit la lutte biologique


comme « l’action des parasites, des
prédateurs et des agents pathogènes
dans le maintien de la densité des
populations d’un autre organisme à un
niveau qui ne pourrait être atteint en leur
absence »
Introduction
La Lutte biologique

• Méthodes directes
– Stérilisation des mâles par lâchers inondatifs ou Lutte
autocide
– Utilisation des hormones juvénilisations
extraites des corps cardiaques et allates
– Utilisation des phéromones attractives
ou pièges à phéromones
• Méthodes indirectes
– Utilisation de plantes transgéniques
résistantes aux insectes
– Lutte écologique
Les agents pathogènes dans la
lutte biologique
• Les Bactéries
• Les virus
• Les Champignons
• Les Microsporidies
• Les Nématodes
Les Bactéries
Identité
• Trois grandes familles:
Bacillaceae, Enterobacteriaceae et
Pseudomonaceae avec les genres
• Plusieurs genres:
Agrobacterium, Arthobacter, Azotobacter,
Bacillus, Clostridium, Enterobacter,
Erwinia, Flavobacterium, Pseudomonas,
Serratia
Les Bactéries

(Photo: J.F. CHARLES, IP Paris)


(Photo: J.C. CÔTE, Agriculture Canada)

Bacillus thuringiensis var. israelensis en microscope photonique et


électronique
Les Bactéries
Bacillus thuringiensis
Intérêt insecticide

• Quatre types de protoxine (précurseurs de


toxines) localisées au niveau du cristal: alpha-
exotoxines, beta-exotoxines, delta-endotoxines
et gama-exotoxines possédant leur propre
activité

• Grande sélectivité due, en bonne partie, aux


propriétés des cristaux.
Les Bactéries
Bacillus thuringiensis
Mode d’action

- Contamination par ingestion du cristal;


- Désintégration du cristal en présence d’un pH stomacal
alcalin;
- Libération des protoxines qui sont transformées par des
enzymes (les protéases) en toxines;
- Fixation des toxines au niveau des cellules stomacales
- Hypertrophie et éclatement des cellules affectées causant la
perforation de la paroi du tube digestif;
- Passage du suc digestif dans la cavité générale de l'insecte et
mouvement inverse pour l'hémolymphe;
- Mort de l’insecte par inanition ou par septicémie
Les Bactéries
Bacillus thuringiensis
Mode d’action

• Plusieurs étapes sont donc nécessaires à l'obtention d'un effet


toxique occasionné par Bacillus thuringiens. Dans son habitat, un
insecte doit, pour mourir :

– ingérer le cristal du Bacillus;


– posséder un tube digestif à pH basique;
– posséder les enzymes protéolytiques capables de transformer
les protoxines en molécules toxiques,
– posséder les récepteurs membranaires adéquats, c'est-à-dire
compatibles avec les toxines libérées par les enzymes

• La présence ou l'absence de récepteurs cellulaires appropriés


semble être un des facteurs-clefs de la haute spécificité Bacillus
thuringiensis
Les Bactéries
Bacillus thuringiensis
Insectes sensibles

• Coléoptères
• Lépidoptères
• Diptères
Les Bactéries
Bacillus thuringiensis
Formulation et utilisation

• Les produits larvicides commerciaux à base de Bacillus


thuringiensis existent sous de poudres, de granules, de
briquettes et de liquides.

• Ces produits sont autorisés dans de très nombreux pays et


utilisés avec succès pour le contrôle des populations de
Diptères, Lépidoptères et Coléoptères

• Le choix de la formulation à employer dépend de l'insecte


visé par le contrôle, du type d'environnement à traiter et de
son accessibilité, et de la persistance de l’effet toxique
visée par l’applicateur
Les Bactéries
Limites de l’intérêt insecticide

• L’ingestion et la digestion des cristaux et spores des


dépendent du comportement et de la physiologie de
l’insecte
• La disponibilité des spores et cristaux dépend de la
quantité appliquée, du temps d’exposition et des
conditions de traitement
• L’activité toxique des spores et des cristaux dépend des
de la biologie et physiologie de l’insecte et des facteurs
environnementaux
• L’importante variabilité de l’efficacité en fonction de
l’espèce cible
• Développement de résistance chez certains insectes
(Plutella xylostela)
Les Virus
Identité
• 7 Grandes familles
- Groupe à corps d’inclusion:
Baculoviridae, Reoviridae, Poxviridae;
- Groupe sans corps d’inclusion:
Iridoviridae, Parvoviridae, Picornoviridae
et Rhabdoviridae
• Familles les plus utilisées: Baculoviridae,
Reoviridae et Poxviridae
Les Virus

Polyèdres

Coupe d’un
polyèdre

Polyèdres de Baculovirus observés en Microscopie photonique et


électronique
Les Virus
Baculovirus
Intérêt insecticide
• Formation de polyèdres protégeant les virions contre le
rayonnement solaire

• Deux modes de dissémination:


– l'une permettant la transmission de l'infection de cellules à
cellules par l’intermédiaire des virions libres;
– l'autre permettant la transmission de l'infection d'individu à
individu par l’intermédiaire des virions inclus dans les polyèdres

• La spécificité, la virulence et le niveau raisonnable de


persistance dans l’environnement
Les Virus
Baculovirus
Mode d’action

• Contamination par ingestion des polyèdres


• Dégradation par les protéases du tube digestif (pH
alcalin)
• Libération des virions qui traversent les cellules
intestinales pour se multiplier dans les hémocytes et
dans les tissus adipeux
• Liquéfaction du tissus adipeux entraînant une
turgescence de l’insecte suivi de sa mort
Les Virus
Baculovirus
Insectes sensibles

• Lépidoptères
• Hyménoptères
Les Virus
Baculovirus
Formulation et utilisation
● Les produits insecticides commerciaux à base
de Baculovirus existent sous forme de poudres
et de liquides.

● Ils sont autorisés dans de très nombreux pays


et utilisés avec succès pour le contrôle des
populations de Lépidoptères et d’hyménoptères
Virus
Limites de l’intérêt insecticide

• La rémanence des virus est affectée par le rayonnement


solaire ;
• Le temps létal est souvent long;
• Le niveau de virulence souvent peu élevé ;
• Spectre d’activité trop étroit du point de vue commercial
(le marché est de ce fait assez limité)
• Le coût élevé de production, car ils doivent être produits
in vivo dans des insectes hôtes ou in vitro dans des
cultures de cellules d'insecte, ce qui exige des milieux
cultures cellulaires coûteux et assez complexes.
Les Champignons
Identité

• Principale classe: Deuteromycètes


• Principaux genres: Beauveria,
Metharizium, Verticillium, Erynia,
Hirsutella, Entomophtora et Entomophaga
Les Champignons

Spores de Beauveria Hyphes et mycélium de Beauveria


(Photos: MATHIAS de KOUASSI, Université du Québec)
Les Champignons
Beauveria
Intérêt insecticide

• Production de spores comme agents infectieux


• Contamination surtout par contact
• Certaines souches produisent des toxines non
enzymatiques qui accentuent et accélèrent le
processus d'infection
• Large spectre d’action et bonne virulence
• Peut être produit en masse à moindre coût et
peut être appliqué avec les méthodes
conventionnelles
Champignons
Beauveria
Mode d’action
• Contamination généralement par contact
• Adhésion des spores avec les cellules tégumentaires de l'insecte
• Production d’un mucilage provoquant une modification de
l’épicuticule aboutissant à la germination
• Production d’appressoriums qui vont ramollir la cuticule et favoriser
la pénétration
• Production de toxines non enzymatiques qui accentuent et
accélèrent le processus d'infection
• Colonisation de l’hôte puis envahissement de l’hémolymphe
• À la mort de l’insecte, le champignon produit un antibiotique qui va
lui permettre de surmonter la compétition des bactéries du tube
intestinal de l’insecte
• Les hyphes traversent le tégument puis le recouvre d’un feutrage
mycellien blanc cotonneux qui va amorcer la formation des
conidiospores
Champignons
Beauveria
Mode d’action

Nymphe de sauterelle infectée


par Beauveria bassiana
Champignons
Beauveria
Insectes sensibles
• Les Orthoptères
• Les Coléoptères
• Lépidoptères
Champignons
Beauveria
Formulation et utilisation
● Les produits insecticides commerciaux à base de
Beauveria existent sous forme de poudre sèche de
spores ou de solution concentrée huileuse. Ils sont
autorisés dans de nombreux pays et utilisés avec succès
pour le contrôle des populations de Lépidoptères et les
Orthoptères et les Coléoptères

● Le choix de la formulation à employer dépend de


l'insecte visé par le contrôle, du type d'environnement à
traiter et de son accessibilité, et de la persistance de
l’effet toxique visée par l’applicateur
Champignons
Limites de l’intérêt insecticide

• Rémanence affectée par les facteurs abiotiques (T°,


rayonnement solaire, humidité)
• La germination des spores est très dépendante des
conditions environnantes et de la physiologie de l‘insecte
(composition biochimique de la cuticule ) qui peuvent
favoriser ou inhiber la germination
• La production des appressoriums est très dépendante
de la valeur nutritive de la cuticule de l’hôte. Une cuticule
nutritive va stimuler la croissance myceliale plutôt que la
pénétration
• Le temps létal est souvent long
Microsporidies

Identité

• Principale famille: Nosematidae


• Principal genre: Nosema
Microsporidies
Nosema

Spores de Nosema observées en microscopie photonique et


électronique (Photo: Toguebaye et coll)
Microsporidies
Nosema
Intérêt insecticide
• Production de spores comme agents infectieux
• Large spectre d’action
• Large tropisme tissulaire
• Assez bonne virulence et provoquent aussi des
effets intermédiaires: stérilité, baisse de la
fécondité, et perturbations de développement
• Transmission verticale par la voie ovarienne
Microsporidies
Nosema
Mode d’action
• Contamination par ingestion des spores
• Germination des spores dans le tube digestif et
introduction du germe infectieux dans
l’épithélium intestinal
• Multiplication l’agent infectieux dans la cellules
hôtes en produisant d’autres spores qui
envahissent l’insecte, détruisent les tissus
infectés entraîne la mort
Microsporidies
Nosema
Mode d’action

Invasion des tissus hôtes observée en microscopie


électronique(Photo: Toguebaye et coll)
Microsporidies
Nosema
Mode d’action

Invasion des tissus hôtes observée en microscopie


photonique(Photo: Toguebaye et coll)
Microsporidies

Nosema
Insectes sensibles

• Tous les groupes d’insectes


Microsporidies
Nosema
Formulation et utilisation
● Un seul produit insecticide commercial à
base de Nosema existe sous forme de
poudre sèche de spores. Il est autorisé
aux USA et utilisés avec succès pour le
contrôle des populations d’Orthoptères
Microsporidies
Limites de l’intérêt insecticide

• Rémanence affectée par les facteurs abiotiques


(T°, rayonnement solaire, humidité)
• Temps létal souvent long
• Coût de production élevé , car elles doivent être
produites in vivo dans des insectes hôtes ou in
vitro dans des cultures de cellules d'insecte, ce
qui exige des milieux cultures cellulaires coûteux
et assez complexes
Nématodes
Identité

• Principales familles: Mermithidae,


Steinernematidae et Heterorhabditidae
• Principaux genres: Romanomermis,
Steinernema , Heterorhabditis
Nématodes

L3 ♀ ♂
Steinernema carpocapsae
(Photo: H. Mauléon et al., INRA, France)
Nématodes
Intérêt insecticide
• Large spectre d’action
• Temps létal court
• Elevage facile
• Causent aussi des effets intermédiaires:
stérilité, baisse de la fécondité,
perturbations du développement,
aberrations de comportement
Nématodes
Mode d’action
• Contamination par les larves de 3e stade qui pénètrent
dans le corps des insectes par les ouvertures naturelles
(bouche, anus, spiracles), les blessures ou directement
en brisant la cuticule des insectes
• Multiplication à l’intérieur de l’insecte entraînant la mort
• Certains nématodes (Steinernema et Heterorhabditis )
vivent en symbiose avec une bactérie qui libérée dans la
cavité abdominale de l'insecte contribuer à tuer par
septicémie et liquéfie les tissus
• Les nombreux nématodes formés quittent le corps de
leurs victimes pour s’attaquer à d’autres individus
Nématodes

Larve de la teigne des ruches (Galleria


Larves de moustique (Culex sp.) infectées mellonella) parasitée par Steinernema
par Romanomermis culicovorax carpocapsae
(Photos: J.J. Petersen, USDA)
(Photo: H. Mauléon et al., INRA, France)
Nématodes
Insectes sensibles

• Diptères
• Lépidoptères
• Coléoptères
Nématodes
Formulation et utilisation

Des produits insecticides commerciaux à


base de Romanomermis, Steinernema ,
Heterorhabditis existent sous forme de
poudre sèche de spores. Ils sont utilisés
avec succès au Canada et aux USA pour
le contrôle des populations Moustiques et
Hannetons horticoles
Nématodes
Limites de l’intérêt insecticide

Larves très sensibles aux radiations


solaires, aux fortes t° et leur survie
est courte durée dans les sols
argileux.
Conclusions
Le but principal de la lutte microbiologique consiste à
développer des pathogènes comme biopesticides pour
une utilisation par moyen inondatif.

Cette approche purement « insecticides » est entrain


d’évoluer vers des stratégies de gestion de ravageurs en
employant des approches génétiques.

En effet, les principaux inconvénients d'un


entomopathogène sont:
- son mode d'application qui ne permet de traiter
toutes les zones d’une plante;
- le temps létal qui est souvent assez long.
Conclusions
Il est donc fait de plus en plus recours à la transgénèse
avec pour objectifs:

- d’une part de donner à la plante les moyens de


se défendre par elle-même, de manière intrinsèque,
avec son propre métabolisme;
- et d’autre part d'accélérer la mortalité de
l'insecte.

Pour ce faire, l'idée est d'ajouter des gènes insecticides


(qui codent pour les protéines responsables de la mort
des insectes) au génome de la plante ou du pathogène
Conclusions
• Exemple 1. Le gène de la delta-
endotoxine de B. thuringiensis a été
introduit dans le chloroplaste végétal
de maïs. Ceci a permis d’obtenir des
lignées de maïs résistantes aux larves
de la pyrale. Ces maïs transgéniques
sont capables de se défendre contre le
ravageur
Conclusions
• Exemple 2. Dans les interactions entre le
champignon entomopathogène Metarhizium
anisopliae et les insectes, la protéase Pr1 qui est
exprimée lors de la pénétration à travers la cuticule
de l'insecte, solubilise la cuticule, permettant ainsi la
pénétration de l'hyphe fongique. Le gène de cette
protéine a été cloné et des copies multiples ont été
ajoutées au génome de M. anisopliae.

Cette transformation de M. anisopliae a abouti à une


production plus importante de Pr1.

L'efficacité de M. anisopliae en tant qu'agent


biologique de contrôle a été ainsi significativement
améliorée
Bibliograhie
• Robert Van den Bosc, Messenger P.S. & Gutuirrez A. P.
(1982). An introduction to Biological control. Plenum
Press, New York, USA, 247p
• Gabriele Stoll (2002). Protection naturelle des végétaux
en zones tropicales. Vers une dynamique de
l’information. Margraf Verlag, Weikersheim, Allemagne,
386p
• Polaszek Andrew & Delavre Gérard (2000). Les foreurs
des tiges de céréales en Afrique. Importance
économique, systématique, ennemis naturels et
méthodes de lutte. CIRAD, Montpelier, France
• Kumar R. (1991). La lutta contre les insectes ravageurs.
L’agriculture en régions tropicales. CTA- KARTALA,
Wagenigen, Paris

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