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Bac 2019
Épreuve de philosophie
Série ES

Sujet 1 : La morale est-elle la meilleure des politiques ?

Problématisation : Sujet qui mobilise apparemment deux notions du programme (la morale, la politique)
mais qui va bien au-delà car il faut prendre en compte ici le sens équivoque de « politique ». L'expression
« la meilleure des politiques » est en effet à entendre au sens de « la meilleure des attitudes possibles »
dans notre relation avec les autres et cela touche donc d'autres notions (autrui, la société).

Plan possible :

I. La meilleure politique est la plus respectueuse de l’intérêt général

On reproche souvent aux politiques leur manque de morale, au sens de malhonnêteté. L'opinion courante
a donc naturellement tendance à penser que la meilleure politique est la plus morale, c'est-à-dire la plus
respectueuse du bien commun et de l'intérêt général. Cette position peut être qualifiée d'idéaliste. Elle
rejoint la Cité idéale de Platon, dans La République où les philosophes rois règnent en raison de leur
connaissance du Bien.

II. Trop de morale paralyse l’action politique

Cependant, la réalité à laquelle le politique est confronté est complexe. Elle est le lieu où se croisent des
intérêts contradictoires entre lesquels il faut soit trancher soit faire des compromis. De trop grands
scrupules moraux peuvent paralyser l'action politique ou même la conduire à l'échec. C'est la raison pour
laquelle, selon Machiavel dans Le Prince, celui qui veut exercer efficacement le pouvoir ne doit pas
s'interdire la ruse et la cruauté si nécessaire. Pour Machiavel la politique n'est pas la morale.

III. L’homme est un « animal politique »

Pour autant, même s'il faut éviter d'être naïf, la conduite morale peut être une bonne politique. L'homme
est un « animal politique » selon l'expression d'Aristote, c'est-à-dire un être qui vit dans des cités
organisées par ses propres lois, parce qu'il a la capacité de se gouverner lui-même. Il a aussi la capacité de
discerner qui le trompe, qui le trahit, qui l'exploite. Aristote, à propos de l'amitié, distingue ainsi un
égoïsme intelligent de l'égoïsme vulgaire. Celui-ci néglige autrui alors que le premier sait qu'il n'y a pas de
bonne politique qui ne se soucie, pour son propre bonheur, du bonheur d'autrui.

Sujet 2 : Le travail divise-t-il les hommes ?

Problématisation : Sujet qui mobilise clairement la notion « travail », traiter le problème suppose
cependant de prendre en compte la dimension sociale de la relation humaine et, notamment, les
« échanges ».

Plan possible :

I. Avec la division du travail naissent les inégalités

Depuis le néolithique et la sédentarisation, avec la naissance des premiers villages rendue possible par
l'agriculture, les hommes ont du se spécialiser dans leur travail. Les métiers distinguent les hommes au sein
de l'économie commune. Chacun a sa compétence propre, mais l'importance et la valeur de ce qu'il produit
le place également sur une position sociale plus ou moins importante. Avec la division du travail naissent
les inégalités.

II. Une dépendance réciproque qui donne lieu à des échanges

Cependant, si chacun est spécialisé, chacun a également besoin d'autrui pour tout ce qu'il ne produit pas
lui-même. Il y a donc une dépendance réciproque qui donne lieu à des échanges. Marx, dans ses Manuscrits
de 1844, distinguait notamment le travail humain de l'activité animale par cette finalité. Là où l'activité
animale se réduit essentiellement à la reproduction, le travail humain produit au-delà de ce qui est
nécessaire pour l'individu ou sa petite communauté ouvrant ainsi des voies de communication et
d'échanges qui ont permis à des cultures très éloignées géographiquement de se rencontrer.

III. La collaboration est essentielle

Encore faut-il, sans doute, avoir accès au travail et on peut penser qu'une grande compétitivité entre les
travailleurs accentue les divisions et les conflits. Pour autant même ceux qui sont en concurrence dans leur
entreprise doivent collaborer pour réaliser leurs projets. La plus ou moins bonne volonté dont on fera
preuve dans le travail dépend-elle réellement de celui-ci ou de la valeur morale des individus eux-mêmes ?
Pour que la dialectique du maître et de l'esclave de Hegel fonctionne, encore faut-il que l'esclave y mette
du sien, prenne sa tâche au sérieux, et que le maître reconnaisse qu'il ne peut plus se passer des
compétences de son esclave.

Sujet 3 : Leibniz, Remarques sur la partie générale des Principes de Descartes (1692)

Analyse du sujet : La notion concernée par ce texte apparaît clairement, il s'agit de la liberté, abordée plus
précisément sous l'angle du libre arbitre. En quoi consiste exactement notre libre arbitre ? Pourrait être le
problème abordé et la thèse de Leibniz est qu'il ne consiste que dans notre capacité à diriger notre
attention et notre intérêt (lignes dix-onze).

Lignes un à cinq : « Nous avons le libre arbitre, non pas quand nous percevons, mais quand nous
agissons » Cette première phrase est essentielle pour comprendre le texte. L'action dont il est question ici
consiste en l'orientation de nos centres d'intérêts, ce vers quoi nous nous tournons. Nous avons la capacité
de diriger notre attention, pas de décider de ce que nous allons percevoir, aussi bien sur le plan sensible (le
miel) que sur le plan intellectuel (le théorème).

Lignes cinq à neuf : Nos décisions sont toujours accompagnées de perceptions, de pensées, de souvenirs.
Mais nous ne pouvons pas décider librement du contenu de ces perceptions. Ainsi, pour reprendre le
premier exemple, nous pouvons décider de goûter du miel mais nous ne pouvons pas décider de son goût,
la sensation sucrée ne dépend pas de notre libre arbitre.

Ligne neuf à fin : La phrase « Nous ne reconnaissons à la volonté que le pouvoir de commander à
l'attention et à l'intérêt » constitue en fait la thèse de Leibniz. Le libre arbitre consiste donc, selon lui,
uniquement dans la capacité de diriger notre attention, c'est-à-dire de se tourner vers tel ou tel sujet sans
que nous puissions décider des impressions que cela produit en nous. Cependant la direction de cette
attention va se trouver elle-même conditionnée par le fait que nous tournerons notre attention plus
facilement vers ce qui produit en nous des sensations plaisantes que vers celles qui sont déplaisantes. Du
coup un renforcement s'exerce qui peut nous plonger dans l'illusion.

Intérêt de ce texte : La dernière partie du texte est d'une actualité brûlante car ce que décrit là Leibniz ce
sont des mécanismes psychologiques amplifiés de façon préoccupante avec internet et les réseaux sociaux,
tant ils se prêtent malheureusement à la manipulation. En dirigeant notre attention vers ce que nous
croyons déjà (moralement, politiquement, religieusement) nous renforçons toujours plus notre conviction,
notre croyance, et réduisons d'autant plus notre sens critique.
Pour éviter cela, il faudrait, comme Nietzsche le recommandait, regarder les choses à travers « de multiples
yeux » c'est-à-dire à travers de multiples points de vue, sous plusieurs angles.

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