Vous êtes sur la page 1sur 45

MINISTÈRE DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET DE LA RECHERCHE Université Virtuelle du Sénégal

SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP

LICENCE 1

SCIENCES JURIDIQUES
& POLITIQUES

DROIT CIV
IL
Introductio

l’étude du d
roit
d Bachir Niang
e pte u r : Pr Mohame
t Conc
Enseignan

Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable VERSION 1.0


Octobre 2014
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP

LE DROIT OBJECTIF
-
LE DROIT SUBJECTIF

2
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

PLAN DU COURS :
TITRE I – LE DROIT OBJECTIF

CHAPITRE I – L’identification de la règle de droit

Section I – La règle de droit et les autres règles de conduite sociale


I – Caractères de la règle de droit
A – Caractère prescriptif de la règle de droit
B – Caractère général et impersonnel
C – Caractère obligatoire
II – Distinction de la règle de droit et des autres règle de conduite
A – Distinction quand à l’origine
B – Distinction quand à la finalité
C – Distinction quand à la sanction

Section II – Les spécialisations de la règle de droit


I – Le droit privé
A- Le droit civil
B – Le droit social
C – Le droit commercial
D – Le droit des sûretés
E – Le droit international privé
F – Le droit pénal
II – Le droit public
A – Le droit constitutionnel
B – Le droit administratif
C – Le droit des finances publiques
D – Le droit international public

CHAPITRE II – L’élaboration de la règle de droit

Section I – La philosophie du droit


I – Exposé des courants de pensée
A – Le courant idéaliste
1 – La philosophie grecque
2 – Le droit romain
3 – La philosophie chrétienne
4 – Le droit naturel moderne
B – Le courant positiviste
1 – Le positivisme légaliste et normativiste
2 – le positivisme sociologique
II – L’impact des courants de pensée sur le droit positif sénégalais
A – L’influence du positivisme juridique
B – L’influence de l’idéalisme juridique

Section II – Les sources de la règle de droit


I – La classification des sources du droit
A – Les sources supra nationales et la Constitution
1 – Les sources supra nationales
2 – La constitution
B – Les lois et règlements
1 – Distinction quand à la définition
2 – Quand au domaine

3
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
3 – Quand à l’entrée en vigueur
4 – Quand à l’expiration
5 – Quand au contrôle
C – La coutume et la jurisprudence
1 – La coutume
2 – La jurisprudence
II – La mise en œuvre des sources du droit
A – L’application de la loi dans le temps
1 – Le principe de la non rétroactivité des lois
a – Affirmation du principe
b – Les exceptions au principe
2- Le principe de l’effet immédiat de la loi
B – L’application de la loi dans l’espace

TITRE II – LES DROITS SUBJECTIFS

CHAPITRE I – La classification des droits subjectifs

Section I – Les droits patrimoniaux et les droits extrapatrimoniaux


I – Les droits patrimoniaux
A – Le patrimoine
1 – Définition
2 – Les différentes conceptions du patrimoine
B – Caractères du patrimoine et des éléments du patrimoine
1 – Caractères du patrimoine
2 – Caractères des éléments du patrimoine
II – Les droits extrapatrimoniaux
A – Identification des droits extrapatrimoniaux
B – caractères des droits extrapatrimoniaux

Section II – Droits réels et droits personnels


I – Les droits réels
A – Les biens objets des droits réels
1 – La distinction principale : meuble et immeuble
a – Les meubles
b – Les immeubles
2 – Les distinctions secondaires
- Chose corporelles et choses incorporelles
- Choses dans le commerce et choses hors du commerce
- Choses fongibles et choses non fongibles
- Choses consomptibles et choses non consomptibles
B – Le régime juridique des droits réels
1 – Les droits réels principaux
a – Le droit de propriété
b – Les démembrements de la ^propriété
2 – Les droits réels accessoires
a – L’hypothèque
b – Le gage
II – Les droits personnels

CHAPITRE II – LA PREUVE DES DROITS SUBJECTIFS

4
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

Section I – L’objet de la preuve des droits subjectifs


Section II – La charge de la preuve des droits subjectifs
Section III – Les modes de preuve des droits subjectifs
I – La preuve par écrit
A – Les formes de l’écrit
B – Le domaine de la preuve écrite
C – La valeur juridique de la preuve écrite
II – Le témoignage
III – L’aveu et le serment
IV – Les présomptions du fait de l’homme

CHAPITRE III – La transmission et l’extinction des droits subjectifs

Section I – La transmission des droits subjectifs


I – Les modes non conventionnels de transmission
A – La succession
B – La subrogation légale
II – Les modes conventionnels de transmission des droits subjectifs
A – La cession de créance
B – La cession de contrat
C – La subrogation conventionnelle
D – La délégation
Section II – L’extinction des droits subjectifs
I – Les causes d’extinction liées à la volonté des parties
II – Les causes d’extinction indépendantes de la volonté des parties

CHAPITRE IV – Les titulaires des droits subjectifs

Section I – L’acquisition de la personnalité juridique


I – Les personnes physiques
II – Les personnes morales

Section II – La perte de la personnalité juridique


I – Perte de la personnalité juridique pour les personnes physiques
A – Le décès
B – Les incertitudes sur l’existence
1 – L’absence
a – Du manque de nouvelles à la déclaration de décès
b – La gestion des biens et de la famille de l’absent
2 – La disparition

5
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
INTRODUCTION GENERALE/

Dans le langage courant, le mot droit peut avoir deux significations : dans l’expression « je maîtrise
le droit de mon pays », j’essaie certainement de signifier que je maîtrise l’ensemble des règles ou normes à
caractère juridique de mon pays. Par contre, lorsque je dis « j’ai le droit de vendre ma voiture », je tente par là
d’expliquer que j’ai le pouvoir, la prérogative, la liberté de vendre ma voiture.

Ces deux compréhensions du mot droit sont différentes et correspondent pourtant aux deux véritables signi-
fications du concept de « droit ». Tantôt, en effet, le droit correspond à l’ensemble des règles à caractère juri-
dique qui régissent la vie en société : c’est le droit objectif. Tantôt par contre, le droit désigne un lien entre une
personne et une ou plusieurs autres personnes ou une personne et une chose par exemple. Ce lien permettant
au premier de détenir une prérogative qu’elle exercera sur l’autre ou sur la chose : c’est le droit subjectif.

Le cours introductif à l’étude du droit a pour objet l’explication et l’explicitation de ces deux contenus du
concept de droit. Nous étudierons d’abord le phénomène juridique en tant qu’universalité de règles c’est-à-
dire comme droit objectif (TITRE I) avant de ’l’appréhender comme un ensemble de prérogatives, de droit
subjectifs (TITRE II)

TITRE PREMIER / LE DROIT OBJECTIF

Si l’on considère le droit comme l’ensemble des règles à caractère juridique qui régissent la vie en société on ne
peut manquer de se poser un certain nombre de questions. La première interrogation renvoie certainement
à la place de ce corps de règle dans l’essence et le devenir de l’être humain. Le droit est-il une construction de
l’homme ou lui préexiste t-il ? Est-il aux services des volontés des sociétés humaines ou au contraire doit-il
limiter naturellement leur passion et leur action ? D’autres interrogations de ce genre rejoignent celles-ci et
témoignent de l’existence d’une philosophie du droit.

Nous avons affirmé que le droit est l’ensemble des normes à caractère juridique. Ces normes sont-elles seules
à régir la vie en société ? Existe-t-il d’autres règles n’ayant pas un caractère juridique et donc susceptibles de
concurrencer la règle de droit ? Tenter de répondre à l’interrogation revient à opérer une distinction entre
les différentes normes et donc une identification de la règle de droit (CHAPITRE I). Enfin, si le droit est un
ensemble de normes à caractère juridique, on se demande par ailleurs par quels phénomènes naturels ou pro-
voqués ces normes juridiques naissent : c’est la question des sources du droit (CHAPITRE II).

CHAPITRE I / L’identification de la règle de droit

CHAPITRE II/ L’élaboration de la règle de droit

CHAPITRE I - L’IDENTIFICATION DE LA REGLE DE DROIT

Nous avions précédemment défini le droit objectif comme l’ensemble des règles à caractère juridique. Une
compréhension exacte du phénomène du droit objectif nécessite que la notion de règle de droit soit précisée.
En synthétisant, on peut définir la règle de droit comme une norme (écrite ou non) à caractère générale et
impersonnelle dont l’inobservation est sanctionnée par l’autorité publique.
La règle de droit présente un certain nombre de caractères qui facilite son identification. Certains de ces
caractères se retrouvent pourtant dans d’autres règles de conduite sociale comme la règle morale et la règle
6
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

religieuse, ce qui rend leur différentiation d’avec la règle de droit plus difficile (Section I).

Par ailleurs, le droit objectif est composé de familles de règles qui régissent chacune un domaine déterminé
de l’activité humaine. Cette spécialisation des règles juridiques conduit à une division du droit (Section II).

Section I : LA REGLE DE DROIT ET LES AUTRES REGLES DE CONDUITE SOCIALE

La règle de droit a ses propres caractères (I). Ceux-ci peuvent aider à la différentier de la règle morale ou
religieuse (II).

I - les caractères de la règle de droit.

Parce qu’elle est une norme, la règle de droit présente un caractère prescriptif (A). Elle a par ailleurs un aspect
général et impersonnel (B). Enfin, l’attachement que le législateur a pour son application par les citoyens
fonde son caractère obligatoire (C).

A – le caractère prescriptif de la règle de droit.

Il tient dans la prescription contenue dans toute norme de conduite. Il illustre le fait que toute règle juridique
opère un choix entre plusieurs solutions possibles. Ce choix qu’elle impose, ou la prescription contenue dans
la norme, peut consister en une obligation de faire quelque chose (veiller à l’éducation de ses enfants, porter
assistance aux personnes en danger…), de ne pas faire quelque chose (interdiction de voler, détourner les
deniers publics) ou enfin donner quelque chose (payer ses impôts). La prescription de la règle de droit peut
consister aussi en la simple définition d’un concept, d’une institution, d’une notion, par exemple celle de
travailleur ou de commerçant. Par là, la règle fixe un contenu à une notion, organise une institution comme
l’Université Cheikh Anta Diop ou le baccalauréat. La prescription peut enfin consister dans une sanction
prévue pour réprimer un comportement déterminé.

B – le caractère général et impersonnel de la règle de droit

Envisagée sous ce caractère, la règle de droit serait une règle générale et abstraite. On entend par là que la loi
prescrit pour des situations non individualisées. Elle aurait vocation à s’appliquer par la suite à toute personne
se trouvant dans la situation décrite par la règle. Par exemple, la règle selon laquelle les commerçants sont te-
nus de tenir des livres de commerce est dite générale et impersonnelle non pas parce qu’elle s’applique à toute
la population mais qu’elle a vocation à s’appliquer indifféremment à tout individu ayant la qualité de commer-
çant. Ce caractère admet cependant des exceptions. C’est-à-dire des hypothèses où la loi n’intéresse qu’une
seule personne ou des individus nommément désignés. C’est le cas d’une loi d’amnistie votée sur le fonde-
ment de l’article 67 de la Constitution par l’assemblée nationale. C’est le cas aussi des décrets par lesquels le
Président de la République nomme aux emplois civils en vertu de l’article 44 de la même Constitution.

C – le caractère obligatoire de la règle

Ce caractère manifeste l’empreinte de l’Etat sur la norme. Si la règle de droit dicte un choix, un comporte-
ment, son application pourrait être compromise si les citoyens étaient autorisés à passer outre. Le caractère
obligatoire de la règle de droit a pour corollaire la prévision d’une sanction pour son inobservation. Cette
sanction peut être civile (Responsabilité civile, nullité du contrat, interdiction d’exercer le commerce…). Elle
peut être pénale (amende, condamnation à une peine privative de liberté), administrative (retrait d’une auto-
risation…).

7
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
Le caractère obligatoire de la règle de droit mérite pourtant d’être relativisé. Dans certaines hypothèses, la
règle n’impose pas un comportement aux citoyens. Elle se contente de préciser la solution qui a la préférence
du législateur et qui doit recevoir application lorsque les citoyens n’ont pas fait un choix contraire. La règle est
alors dite supplétive. Au contraire, lorsque la loi impose un comportement sans laisser aux citoyens la pos-
sibilité d’y déroger, elle est dite impérative. Les dispositions de l’article 47 du COCC selon lesquels le contrat
doit avoir une cause licite sont impératives. De même, l’interdiction du travail forcé par le Code du travail
sénégalais a un caractère impératif. Par contre, la réglementation de la dot comme une condition de for-
mation du mariage par l’article 116 du Code de la famille est une règle supplétive. Les futurs époux pouvant
convenir du contraire.

La distinction entre règle supplétive et impérative n’est pas aisée. Les choses sont simples lorsque le législateur
utilise un certains vocabulaire afin de montrer le caractère impératif d’une norme. Des formules comme « à
peine de nullité », « impérativement », « toutes dispositions contraires est nulle » ou « cette disposition est
d’ordre public » manifestent la nature impérative de la règle. Cela ne veut pas dire qu’en l’absence de telles
formules, la règle édictée n’est pas impérative. En réalité, lorsque l’expression du législateur n’est pas suffisam-
ment claire, le juge dispose d’un pouvoir d’appréciation pour déterminer si la règle est supplétive ou impéra-
tive.

La nature supplétive de la règle de droit ne fait qu’atténuer son caractère obligatoire mais ne la fait pas dis-
paraitre. En édictant une disposition supplétive, le législateur donne aux parties au contrat la possibilité de
l’écarter pour appliquer une autre norme. Mais, à défaut, pour les parties, d’user de cette faculté, la norme
supplétive conserve son caractère obligatoire à leur égard.

Les caractères de la règle de droit que nous venons d’exposer ne lui sont pas spécifiques. On retrouve cer-
tains de ces caractères dans d’autres règles de conduite sociale comme la règle morale et la règle religieuse. Il
convient de les distinguer de la règle de droit.

II - Distinction de la règle de droit et des règles de conduite voisines.

Une comparaison entre règle de droit, règle religieuse et règle morale peut être située à trois niveaux : celui de
leur origine, de leur finalité et de leur sanction respective.

A - distinction quant à l’origine

La règle de droit émane d’une autorité ayant qualité pour l’édicter. La logique classique du droit désigne parmi
ces autorités les représentants de l’Etat que sont ceux du pouvoir exécutif (Présidents de la République, mi-
nistres…), ceux du pouvoir législatif (députés) et, accessoirement, ceux du pouvoir judiciaire (jurisprudence).

De plus en plus cependant, d’autres acteurs de la société, non étatiques, sont habilités à édicter des règles
de droit. Ainsi, en droit du travail, les articles L. 80 et suivants du Code du travail organisent la façon par
laquelle les syndicats d’employeurs et de salariés peuvent négocier des règles de droit applicables dans l’entre-
prise ou dans la profession.

Contrairement à la règle de droit, la règle religieuse trouve son origine dans une volonté transcendante, celle
de dieu. Quand à la règle morale, elle a sa source dans la conscience de chaque individu, selon l’idée qu’il se
fait du bien ou du mal (on évoque ainsi la morale individuelle. Mais il n’ya pas de doute que des populations
ayant partagé la même histoire, les mêmes références religieuses, finissent par avoir la même conception du

8
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

bien et du mal. La morale devient alors collective).

B – Distinction quant à la finalité

La règle de droit est destinée à organiser la vie en société. On estime souvent que la règle religieuse tend
plus à régir les rapports entre l’homme et Dieu alors que la règle morale tend à assurer l’accord avec notre
conscience. La Constitution du Sénégal, par son article 1er tente de séparer fondamentalement la règle de
droit de la règle religieuse en posant le principe de la laïcité de l’Etat. Cette conception qui sépare fondamen-
talement droit et religion est pourtant largement formelle. Elle est née à une époque où la volonté était d’évin-
cer la règle religieuse pour mieux asseoir l’autorité et la place de la seule règle juridique (siècle des lumières en
France).

La réalité est toute autre car la règle religieuse et la règle morale constituent une source, tantôt directe, tantôt
indirecte de la rège de droit. Elles ont des finalités que le droit ne peut ignorer.

*** la prise ne compte de la morale par le droit : les idées de justice et de bien, d’égalité, qui sont des no-
tions morales et religieuses sont largement prises en compte par le droit. Ainsi l’article 103 du Code des Obli-
gations Civiles et Commerciales (COCC) fait recours à la notion d’ « équité » pour régir le contrat. Le même
Code, en son article 76, fait référence aux notions morales de « bonnes mœurs » et de « bonne foi » (Art. 76 :
« le contrat est nul pour cause immorale ou illicite lorsque le motif déterminant de la volonté des parties est
contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs »).

L’exécution « loyale » du contrat est bien une référence à la morale. Le juge lui-même prend largement en
compte ces notions morales pour décider par exemple de la garde des enfants en cas de divorce, la dési-
gnation du tuteur… (Sélection de l’époux ou de la personne qui est de bonnes moeurs). La propriété qu’on
revendique sur un meuble n’est-il pas présumé que pour le possesseur de « bonne foi »? Cette bonne foi a une
place fondamentale même en droit des affaires. (Cette prise en compte de la morale est aussi constatée en
droit français : Art. 1135 du Code civil : « les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé mais
encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature » ; Art. 1134 du
Code civil « Les conventions légalement formées doivent être exécutées de bonne foi ».)

***La prise en compte de la religion par le droit : L’invocation de la règle religieuse par la règle de droit n’est
pas rare. Ainsi, en droit sénégalais, la place de l’homme comme chef de famille a certainement une inspira-
tion religieuse (Art. 152 du Code de la famille : « le mari est le chef de famille, il exerce ce pouvoir dans l’inté-
rêt commun du ménage et des enfants »). D’autres fois, la référence faite à la religion est plus explicite. A titre
d’exemple, les articles 645 et suivants du Code de la famille organisent les successions musulmanes.

Les rapports entre règle de droit, règle religieuse et règle morale ne sont pas pourtant que des rapports de
conciliation. Ces rapports se traduisent parfois en termes de conflit. Par exemple, la justice est une idée es-
sentiellement morale : le droit essaie de la prendre en compte. Mais cette prise en compte n’empêche pas qu’il
puisse exister des règles juridiques « injustes », contraires à la morale. Par exemple, l’article L. 126 du Code du
travail du Sénégal prévoit que le salarié ne peut exiger le paiement du salaire à l’employeur que dans un délai
de cinq ans. Cela veut dire que, passé ce délai, ce dernier ne peut plus le réclamer. Cette règle est obligatoire
mais peut paraître injuste. Aussi, une loi fiscale qui offre beaucoup d’avantages aux agriculteurs dans le but
de relancer ce secteur peut paraitre injuste à l’égard des pêcheurs et commerçants qui réclament les mêmes
avantages. Le caractère obligatoire de la règle de droit impose cependant d’appliquer la règle de droit même si
elle est injuste et contraire à la morale.

Le conflit entre règle de droit et règle religieuse apparaît aussi rapidement lorsqu’il existe un certain déca-
lage entre les deux types de règles dans une même société. Au Sénégal, la revendication, par certains groupes
sociaux d’une réforme du Code de la famille en vue de mieux prendre en compte le droit islamique entre
dans ce cadre. 9
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
C- Distinction quant à la sanction

Lorsque l’on envisage la distinction sous l’angle de la sanction, la différence entre règle juridique, règle
morale et règle religieuse apparaît très nettement. La sanction de la règle de droit, on l’a déjà soulignée, est
prévue par l’autorité étatique qui utilise la force publique pour l’exécuter. Par contre, la sanction de l’inobser-
vation d’une règle morale semble être juste le ressentiment, le remord, la mauvaise conscience. Enfin, l’inob-
servation de la règle religieuse, le péché, appelle une sanction divine appliquée ici bas ou dans l’au-delà.

Section II - Les spécialisations de la règle de droit.

Les règles de droit tentent d’apporter des réponses à des questions précises. Ces questions renvoient à des
matières du droit qui correspondent souvent à des activités ou des domaines de la vie ou de l’activité humaine
(famille, commerce, vie politique, agriculture, enseignement…).
La codification du droit correspond à une technique de regroupement des règles régissant une matière du
droit de manière à exposer ces règles de façon plus détaillée, plus accessible et lisible. Il existe plusieurs codes
en droit sénégalais (Code de la famille, Code des obligations civiles et commerciales, Code pénal…). La pré-
sentation des codes en « Titres », « chapitres », « sections »… facilite l’accès du citoyen à la règle de droit en
rendant cette dernière plus compréhensible.

L’existence de corps de règles à caractère juridique spécialisées sur certaines questions de la vie en société
conduit à une certaine segmentation du droit en matières différentes. Ces matières du droit appartiennent à
deux grandes familles que sont : le droit privé et le droit public.

I- Le droit privé

Il régit les rapports des particuliers entre eux. C’est le droit des personnes privées. Il comprend plusieurs
matières. On en citera les principales :

A – le droit civil - il constitue le droit privé fondamental c’est-à-dire la base du droit applicable aux
particuliers. Les particuliers sont les sujets de droit qui poursuivent un intérêt personnel et qui ne présentent
aucune particularité. Le droit civil est constitué d’un droit de la famille dont l’essentiel des règles sont regrou-
pées dans un « Code de la famille ». Il comprend également le droit des obligations qui régit d’abord le
droit des contrats de manière générale et celui des contrats spéciaux tels la vente, le bail, le prêt… le droit des
obligations réglemente aussi la responsabilité civile c’est-à-dire l’obligation de réparer les dommages causés à
autrui. Il existe au Sénégal un « Code des obligations civiles et commerciales » (COCC).
Le droit de la procédure civile organise les conditions de saisine des juridictions civiles et le déroulement des
procès devant ces juridictions.

B – le droit social : il est composé du droit du travail et de celui de la sécurité sociale. Le droit du travail a
vocation à organiser les rapports entre les travailleurs et leurs employeurs dans le cadre du contrat de tra-
vail. Il définit les principales obligations de chaque partie, le droit du licenciement, les conditions de travail,
l’hygiène et la sécurité dans l’entreprise, le droit de grève ou encore l’organisation et le fonctionnement des
syndicats. La grande partie de ces règles sont issues de la loi 97-17 du 1er décembre 1997 portant « Code du
travail ». Le droit de la sécurité sociale protège les travailleurs contre les risques du travail tels les accidents du
travail, maladies professionnelles et non professionnelles, la maternité, la vieillesse…

C – le droit commercial : il s’applique aux commerçants et actes de commerce. Il s’agit des commerçants
personnes physiques et des commerçants personnes morales comme les banques, compagnies d’assurance…
Ce droit fait l’objet d’une réglementation uniforme au sein de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique
10
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

du droit des Affaires (OHADA). Les règles du droit commercial, contenues dans des Actes uniformes sont
alors identiques pour les pays membres de l’Organisation. Le droit commercial fait partie d’un ensemble plus
vaste dénommée « droit des affaires » à l’intérieur duquel on retrouve d’autres matières comme le droit ban-
caire, le droit fiscal, le droit des assurances, le droit financier, le droit du credit…

D – Le droit des sûretés - les sûretés sont des garanties accordées au créancier par le contrat ou la loi pour
lui permettre de recouvrer plus facilement sa créance. Le droit des sûretés organise le gage qui porte sur un
bien mobilier corporel (voiture, chaîne en or…), le nantissement dont l’objet est un bien meuble incorporel
(fonds de commerce, roman…), l’hypothèque qui permet d’attribuer un immeuble comme garantie. Le cau-
tionnement est la sûreté par laquelle une personne se porte garante du paiement d’une dette si le débiteur ne
paie pas… ces garanties s’appliquent aussi bien aux particuliers ayant la qualité de commerçant qu’à ceux qui
ne l’ont pas.

E – Le droit international privé : ces règles sont destinées à designer la loi nationale applicable ou la juri-
diction compétente en cas de conflit de lois dans l’espace. Les dispositions du droit international privé per-
mettent par exemple de savoir si le droit sénégalais ou français est applicable en cas de divorce entre un séné-
galais et une française. Autre exemple : un avion d’air France transportant des passagers américains s’écrase au
Sénégal. Faut-il appliquer au litige le droit sénégalais, le droit français, ou le droit américain ? le droit interna-
tional privé résout la question.

F – Le droit pénal : il a pour objet la répression des infractions pénales c’est-à-dire les contraventions, les
délits et les crimes. Il est assorti d’un droit de la procédure pénale destiné à organiser la mise en œuvre du
droit pénal devant les juridictions pénales.

II - Le droit public

Il comprend un ensemble des règles applicables aux personnes publiques et aux relations que ces dernières
entretiennent avec les citoyens. Les personnes publiques sont l’Etat, ses démembrements (Université Cheikh
Anta Diop…) , les collectivités territoriales (communes, communautés rurales…)…. Le droit public se subdi-
vise en plusieurs branches :

A – Le droit constitutionnel : il organise l’Etat en précisant ses missions et ses caractères. Il définit aussi et
réglemente les différentes institutions de l’Etat que sont le Président de la République, le Gouvernement, l’As-
semblée nationale… il contient par ailleurs les principes fondamentaux que la République considère comme
intangibles et définit les libertés fondamentales de l’individu.

B – Le droit administratif : Il détermine l’organisation et le fonctionnement des personnes publiques à carac-


tère administratif c’est-à-dire celles à qui est confié une mission de service publique (Universités publiques,
les mairies, hôpitaux publics). Ce droit réglemente, entre autres, les rapports entre ces organes et les citoyens
appelés usagers. Il établit les régimes juridiques des actes émanant de ces organes et applicables aux usagers
et les conditions dans lesquelles ces usagers peuvent contester la régularité de ces actes devant le juge ou
engager la responsabilité de ces personnes publiques.

C – Le droit des finances publiques : il étudie les règles générales de gestion des finances publiques c’est-
à-dire celles par lesquelles l’Etat et les autres personnes publiques définissent leur recettes, leurs dépenses,
établissent leur budget et l’exécutent.

D – Le droit international public : sa finalité est de régir les rapports des Etats entre eux mais aussi l’organisa-
11
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
tion et le fonctionnement des institutions internationales dont les Etats sont membres (ONU, union africaine,
UEMOA…)

CHAPITRE II - L’élaboration de la règle de droit

Il existe une philosophie de l’élaboration de la règle de droit qu’il convient d’exposer (Section I) avant de voir
les sources de la règle de droit (Section II).

Section I – LA PHILOSOPHIE DU DROIT

Deux grands courants de pensée s’affrontent. Ils correspondent chacune à une famille de juristes et philo-
sophes partageant la même conception de la place et du rôle du droit. Le premier courant voit dans le droit
une réalité ayant son existence propre, originelle, et n’a donc point besoin d’être inventé. C’est le courant idéa-
liste ou naturaliste. Selon les tenants de la seconde pensée, le droit est un pur produit de la volonté humaine
qui doit donc être sa principale source. C’est le courant positiviste.

Il convient d’exposer la pensée des deux courants (Section I) avant de voir le succès qu’ils ont pu avoir sur
l’élaboration des règles juridiques (Section II).

I - Exposé des différents courants de pensée

A- le courant idéaliste

Il a pris naissance à l’époque des philosophes grecs puis s’est répandu dans la pensée de la Rome antique. La
philosophie chrétienne lui donne un nouvel élan avant que des auteurs contemporains à notre époque ne
consacrent un droit naturel moderne.

1 – La philosophie grecque

Les premiers raisonnements de type idéaliste sont découverts à l’époque de la Grèce antique avec l’apport
de certains philosophes comme Platon et Aristote. Selon ces penseurs, le droit est inséparable de l’idée de
justice. Or, la justice bénéficie, selon ces philosophes, d’une antériorité et d’une supériorité sur le droit. La
justice, selon Platon n’est pas à rechercher dans la conformité aux lois de la cité mais correspond à un idéal
que l’homme découvre en lui-même comme une vertu naturelle. En résumé, pour les philosophes grecs, la
réalisation de la justice est la finalité du droit. Or la justice est par essence naturelle. Le droit ne peut donc être
que naturel, universel, insensible aux différences entre les régions, les climats, les faits sociaux… (Aristote,
Ethique à Nicomaque, éd. Garnier ; Platon, La République).

2 – Le droit romain.

Poursuivant le raisonnement des philosophes grecs, les romains estiment que le droit à un fondement dans la
nature même et présente un caractère universel. Cicéron résume très bien cette pensée en déclarant que la loi,
la vraie, est « répandue dans tous les êtres ». C’est celle qui nous rappelle impérieusement à remplir nos fonc-
tions, éviter la fraude. Il s’agit, selon les romains, d’une loi éternelle et immuable qui régit toutes les nations et
en tout temps.
Le naturalisme juridique des grecs et des romains a eu comme conséquence de légitimer des sociétés très
inégalitaires (maitres/ esclaves). Une remise en cause de cette inégalité s’avérait difficile dès lors que les règles
qui la mettaient en œuvre étaient considérées comme naturelles.
12
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

3 - La philosophie chrétienne.

Les penseurs chrétiens partagent avec tous les autres idéalistes le fait de soutenir que l’origine du droit se situe
hors de l’action de l’homme. Ces penseurs chrétiens se particularisent cependant des autres car ils estiment
qu’il n’y a pas de justice sans adhésion à dieu. Les lois profanes, différentes de celle du seigneur, sont toujours
injustes.
Saint Thomas d’Aquin place, au sommet de la hiérarchie des sources du droit, la loi éternelle qui exprime la
volonté divine, puis la loi naturelle qui serait accessible à l’homme ;
Comme tous les penseurs idéalistes, la philosophie chrétienne est essentialiste car elle présente le droit
comme objectivement indépendante des volontés et qu’il est donc antérieur à l’individu et à l’Etat.
La philosophie chrétienne connut par la suite un certain recul. Le droit chrétien, à partir du 12e siècle, ne
correspond plus aux aspirations des peuples européens. Selon les auteurs de cette époque, la loi évangélique
n’inclut pas de préceptes juridiques et qu’elle a un autre domaine : celle des rapports entre l’homme et dieu.
Cette nouvelle vision des choses facilite le passage au droit naturel moderne

4 – Le droit naturel moderne.

Les idéalistes modernes partagent avec les anciens la croyance en l’existence d’un droit préexistant et supé-
rieur. Pourtant, ils se différentient de leurs prédécesseurs en réservant une certaine place à la raison dans
l’édification du droit. Selon eux, le droit naturel est un droit supérieur d’ou le droit positif tire sa validité.
Pourtant, ces auteurs « laïcisent » le droit en le détachant de la philosophie catholique et de la morale. Emma-
nuel Kant précise que le droit est composé de lois générales dont le caractère peut être reconnu à priori par la
raison, même en l’absence de toute législation extérieure. Quand au droit naturel, Kant le déclare immanent
à l’homme et non plus transcendent c’est- dire en fait crée et voulu par l’homme au lieu de s’imposer à lui.
Le droit naturel moderne entretient une différence avec la philosophie chrétienne. Selon Emmanuel kant,
la source de la loi est la raison pure (Emmanuel Kant, Métaphysique des mœurs, T. I, Doctrine du droit ; V.
aussi Frédrich Hegel, Encyclopédie des sciences philosophiques, 1952 ; Léo strauss, Natural rights and his-
tory, 1953).

Le droit naturel moderne fut l’objet de critiques aussi bien de la part des libéraux que des conservateurs car
voulant faire de l’homme à la fois le sujet et le fondement du droit.

B – Le courant positiviste

Les doctrines positivistes sont nombreuses. Nous nous limiterons à l’étude des principales que sont le positi-
visme légaliste et normativisme (A) et le positivisme sociologique (B).

1- Le positivisme légaliste et normativiste

Les auteurs de ce courant combattent la croyance en l’existence d’un droit préexistant et supérieur auquel on
devrait se soumettre. Selon Paul Roubier, les seules règles que l’on peut qualifier de règles de droit sont celles
sanctionnées par l’autorité publique. Le droit se résume à l’intention du législateur (Paul Roubier, Théorie
générale du droit, Paris, Sirey, 1951). Hans Kelsen va encore plus loin. Au-delà du caractère étatique qui
caractérise la règle de droit, l’auteur soutient que la validité des normes, qui fonde leur caractère obligatoire,
dépend, non de leur contenu, mais de la place qu’elle occupe dans la hiérarchie des normes. Au sommet de
la hiérarchie, se situe la Constitution à laquelle se subordonnent lois, coutumes, règlements, normes indivi-
duelles….les tenants de ce positivisme ne s’intéressent guère aux questions fondamentales sur la finalité du
droit. Le droit n’a pas pour objet la découverte d’une vérité ou d’une connaissance qui correspondrait à un
droit naturel. Cette vérité ou connaissance universelle n’existe pas. Le droit correspond juste à une somme
13
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
de règles applicable ici et maintenant, susceptible d’évoluer si le besoin s’en fait sentir (Hans Kelsen, Théorie
pure du droit, dalloz, 2e édition, 1962).

La théorie de Hans Kelsen a reçu un certain nombre de critiques. Il lui a été demandé d’où la Constitution
elle-même tirait sa source ? D’une loi supérieure non écrite ? Une loi naturelle ? Sa théorie par ailleurs a été
jugée trop neutre. Elle s’accommode des lois totalitaires et des lois injustes pour peu que la hiérarchie des
normes ait été respectée.

2 – Le positivisme sociologique

Il a pris naissance avec la pensée de Montesquieu et approfondi par d’autres auteurs (Auguste Comte, SAVI-
GNY …) . Selon cet auteur, le droit ne peut être naturel et statique parce qu’il est le résultat de causes objec-
tives tenant au milieu social ou même culturel, ou encore au climat. Il existe donc un certain relativisme juri-
dique en ce sens que le droit n’est pas le même d’une région à une autre mais aussi un certain déterminisme
juridique car les régions et les peuples présentant les mêmes caractéristiques auront des systèmes de droit
identiques (Montesquieu, De L’esprit des lois, éd. Folio, essais).

La sociologie juridique considère les règles de droit comme trop formelles. Elles ne sont souvent, selon les
sociologues, que l’expression de la volonté de groupes de pression, des gouvernants…
La sociologie moderne rejette toute référence à un droit naturel. Le droit ne doit être que le fruit des besoins
politiques, économiques et sociaux du moment. Il doit prendre en compte l’évolution des mœurs, les nou-
velles aspirations de la population. A la différence d’un droit naturel immuable et statique, ils préconisent un
droit « dynamique » capable de s’adapter aux besoins de la société et de l’économie.

II – L’impact des courants de pensée sur le droit positif sénégalais

On constate une influence conjuguée des deux courants de pensée que nous avons précédemment exposés
même si le droit sénégalais est plus marqué par le positivisme juridique.

A– L’influence du positivisme juridique

*** La place du positivisme juridique se manifeste sans nul doute par la prise en compte de la sociologie
juridique. Ce courant de pensée préconise un certain attachement aux faits sociaux, aux croyances populaires
dans l’élaboration de la loi. Le Code de la famille du Sénégal offre un exemple, parmi d’autres, de cette prise
en compte. Lors de son élaboration, des enquêtes de terrain ont été réalisées en vue de sonder les coutumes,
croyances religieuses et traditionnelles des sénégalais en vue d’établir une législation qui ne soit pas en déca-
lage avec la culture sénégalaise. Cette démarche du législateur sénégalais contraste certainement avec l’idée
d’un droit naturel.

***C’est aussi une démarche sociologique qui conduit aujourd’hui à se réinterroger sur la place de la femme
dans la société, la position de notre droit face à l’interruption volontaire de grossesse, la désignation de
l’homme comme chef de famille… sur toutes ces questions, des réformes législatives sont préconisées pour
mieux adapter notre droit à l’évolution des mentalités des sénégalais.

***Le positivisme juridique s’illustre aussi par la diversité des matières du droit. L’existence d’un droit du tra-
vail applicable aux travailleurs, ayant sa logique propre, d’un droit commercial destiné aux commerçant, d’un
droit civil, droit bancaire, etc. évoque l’idée que le droit doit être un instrument visant des objectifs précis
mais différents, qui évoluent d’un moment à un autre. Cette prolifération de législations spéciales est là pour
combattre encore l’idée d’un droit naturel statique.

***Le normativisme juridique de Hans Kelsen a eu des répercutions sur la conception de notre droit. La
14
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

Constitution, située au dessus de la hiérarchie des normes nationales, est considérée comme la source qui
donne leur valeur à toutes les autres sources. Le normativisme a malheureusement pour principal inconvé-
nient de conduire à une prolifération des règles de droit. Il tend par ailleurs à faire succomber à l’idée fausse
que la règle de droit peut régler tous les problèmes, qu’ils soient juridiques, économiques, politiques… . Il
apparaît pourtant de plus en plus que la règle de droit ne peut pas solutionner tous les problèmes, les ques-
tions économiques devant recevoir une réponse économique par exemple. L’actualité démontre, de plus en
plus, les limites de la norme juridique c’est-à-dire celle imposée par voie de contrainte. De nouvelles formes
d’encadrement apparaissent qui laissent plus de place à la négociation, l’engagement volontaire, l’éthique et la
morale (politiques d’incitation, codes de bonne conduite, régulation, responsabilité sociale des entreprises…)

B - L’influence de l’idéalisme juridique

S’il ne fait pas de doute que la démarche du législateur sénégalais est très empreinte de positivisme, la réfé-
rence à un certain idéalisme juridique n’est pas rare :

***L’article 7 de la Constitution du Sénégal cite un certain nombre de droits qu’il présente comme ayant un
fondement presque naturel pour le citoyen : le droit à la vie, à la liberté, à la sécurité, au libre développement
de la personnalité, à l’intégrité corporelle et à la protection contre toutes mutilations corporelles. Par ailleurs,
le préambule de la Constitution affirme l’attachement de la République du Sénégal à la Déclaration des droits
de l’homme et du citoyen de 1789 et à la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948.
Le premier de ces textes vise et protège expressément les « droits naturels, inaliénables et sacrés de l’homme
» que sont la liberté, la sûreté (sécurité), la propriété et la résistance à l’oppression. Aussi, la référence, dans
notre droit, à certains principes moraux quasi naturels atteste de cette inclinaison vers un certain naturalisme
(bonne foi, bonnes mœurs, équité, loyauté…).

*** L’invocation du droit naturel apparaît de plus en plus avec l’essor de concepts comme l’équité, l’humanité
(crimes contre l’humanité, patrimoine commun de l’humanité…). Aussi, le droit naturel, précisément la na-
ture humaine, est de plus en plus évoquée pour freiner les excès de la biotechnologie tels le clonage humain,
l’avortement ou certaines manipulations génétiques.

*** L’idéalisme religieux que nous avions précédemment relevé avec Saint Thomas d’Aquin est d’ailleurs de
plus en plus à l’ordre du jour avec la réclamation, par certains groupes sociaux, d’une réforme du Code de la
famille. Ces groupes sociaux revendiquent un plus grand attachement aux préceptes islamiques particulière-
ment en matière de mariage, divorce, succession… l’application pure et simple de la charia dans certains pays
témoigne d’un retour en force vers l’idéalisme juridique c’est-à-dire à un droit extérieur à l’homme et qui lui
est transcendant.

15
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP

Section II - Les sources de la règle de droit

La notion de source de la règle de droit renvoie aux origines de la règle de droit. Ces origines sont constitu-
tionnelle, parlementaire, réglementaire…Plus exactement, les sources de la règle de droit évoquent les tech-
niques d’élaboration de la règle de droit. Derrière chaque technique d’élaboration, se dresse un acteur de la vie
sociale et juridique. L’étude des sources de la règle de droit conduit donc à l’étude des acteurs sociaux à qui on
reconnait le pouvoir d’édicter des normes à caractère général, impersonnel et obligatoire. Il est évident que
l’Etat, par ses représentants (exécutif, législatif, judiciaire) va occuper une place importante dans cette élabo-
ration de la norme.

Par ailleurs, la pluralité des techniques d’élaboration de la règle de droit, donc des acteurs sociaux qui inter-
viennent, obligent à une hiérarchisation de ces acteurs. Cela conduit à une hiérarchisation des sources elles
même en fonction de l’autorité ou du groupe social qui organise chaque source. Les sources de la règle de
droit sont donc plurielles mais d’importances inégales. Certaines sont des sources supérieures et d’autres infé-
rieures, nationales ou internationales, formelles (écrites) ou informelles…

Il existe une classification des sources de la règle de droit que nous traiterons en premier lieu (I). La mise en
œuvre de ces sources pose par ailleurs un certain nombre de difficultés que nous présenterons (II)

I – La classification des sources du droit

L’étude des sources de la règle de droit renvoie à la question des techniques d’élaboration de la règle de droit et
celles des autorités ou groupes sociaux habilités à édicter la règle de droit.
Si les sources émanant de l’autorité étatique sont de loin les plus nombreuses, la règle élaborée par d’autres
groupes sociaux est parfois prise en compte à travers la coutume et les usages.

Certaines sources, du fait de leur très grande autorité, semblent s’imposer au législateur lui même : la Consti-
tution et les normes internationales (A). La loi et le règlement constituent les sources les plus importantes en
terme de quantité (B). Enfin, la jurisprudence et la coutume (C).
La Constitution, les traités internationaux, la loi, le règlement, la jurisprudence et la coutume constituent
autant de sources du droit car chacune d’elle contient des prescriptions, des dispositions, des règles à carac-
tère juridique.

A – La Constitution et les sources supra nationales

1 - La Constitution.

Le droit constitutionnel fait l’objet d’un cours à travers deux semestres. Au Sénégal, la Constitution résulte
d’une loi constitutionnelle n° 2001-03 du 22 janvier 2001 après un référendum du 7 janvier 2001. Elle consti-
tue la source fondamentale dans l’ordre juridique interne. Les dispositions de la Constitution ont une valeur
supra législative. Les dispositions des normes internationales et communautaires, des lois et règlements ne
peuvent donc être contraires à celles de la Constitution. L’autorité des normes constitutionnelles est assurée
par un contrôle de la constitutionalité des lois et des engagements internationaux. Ce contrôle est exercé au
Sénégal par le Conseil constitutionnel.

16
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

L’objet du droit constitutionnel est surtout de réglementer l’Etat, ses missions et caractères. (Nature répu-
blicaine de l’Etat, caractère laïc, social…). Elle prévoit les mécanismes d’exercice du pouvoir dans l’Etat par
l’organisation des institutions chargés de cet exercice. Egalement, la Constitution consacre les droit et libertés
fondamentaux accordés aux citoyens.

En tant que source de la règle de droit, on assiste aujourd’hui à une véritable constitutionnalisation du droit
privé. Alors que la Constitution était traditionnellement conçue comme un instrument de réglementation
de l’exercice du pouvoir politique, elle comporte aujourd’hui de nombreuses dispositions afférentes aux
matières du droit privé. La Constitution du 22 janvier 2001 atteste de cette inclinaison en renfermant un
certain nombre de dispositions fondamentales sur le droit de la famille (Articles 17 à 20 de la Constitution),
le droit du travail (Art. 25 de la Constitution) … par ailleurs, quatre textes supra nationaux sont aujourd’hui
intégrés dans le bloc de constitutionalité ( La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août
1789, la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948, La Convention sur l’élimination
de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, La Convention relative aux droits de l’enfant du
20 novembre 1989, La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples du 27 juin 1981)

2- les sources supra nationales

***La logique veut que les engagements pris par chaque Etat au plan international ne puissent être remis en
cause sur le plan interne. Lorsque l’on évoque les normes supra nationales, on distingue les traités interna-
tionaux et communautaires. Ils ne peuvent être négociés que par le Président de la République et n’entrent
en vigueur, selon l’article 96 de la Constitution, qu’après leur ratification ou approbation par une loi. Ils ne
peuvent contenir des dispositions contraires à celles de la Constitution. Le cas échéant, une réforme de la
Constitution devient nécessaire avant la ratification ou l’approbation du Traité. Le constituant sénégalais tente
ainsi d’éviter une contrariété entre norme internationale et norme constitutionnelle. Il ne se prononce pas
pourtant expressément sur la question de savoir laquelle est supérieure à l’autre.

Une fois publiées, les normes supra nationales deviennent des éléments de notre ordonnancement juridique.
Cela veut dire que les dispositions qu’ils renferment deviennent des règles du droit sénégalais sans qu’aucune
autre procédure ne soit nécessaire. Cette automaticité résulte de la nature moniste du système juridique séné-
galais (V. Cour Suprême du Sénégal, arrêt n° 15 du 23 avril 1980 : « attendu que l’Etat du Sénégal est signa-
taire de la Convention n° 111 de l’OIT concernant la discrimination en matière d’emploi et de profession,
adoptée le 25 mai 1961, convention ratifiée et publiée au Journal Officiel de la République du Sénégal du 3
août 1968, ce qui confère à ces dispositions un caractère de loi nationale sénégalaise… ») . La Cour Suprême
ajoutait que la Convention « équivaut à une loi interne dont tout justiciable peut se prévaloir à l’égard de
l’administration et des juridictions sénégalaises)

Les dispositions supra nationales disposent d’une autorité supérieure à celle des règles non constitutionnelles.
On dit qu’elles ont une autorité (une valeur) infra constitutionnelle et supra législative. Pourtant, le contrôle
de la conformité des normes inférieures aux dispositions des traités et conventions internationales (contrôle
de conventionalité) n’est pas aussi bien organisé que le contrôle de la conformité de la loi à la Constitution
(Contrôle de constitutionnalité).

Les dispositions internationales sont souvent citées pour leur ineffectivité. Elles sont rarement invoquées
devant les tribunaux et les juges ne les maitrisent que très peu. Par ailleurs, très souvent, le droit national (loi,
règlement) contient des normes contraires à celles des conventions et traités internationaux (Conventions
internationales sur les droits des femmes, les droits de l’enfant…)

17
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
***Les normes communautaires constituent une catégorie de normes supra nationales. Vu du Sénégal, un
Traité communautaire est un Traité entre l’E tat du Sénégal et d’autres Etats africains. Le fondement consti-
tutionnel de cette source de droit est l’article 96 alinéa 4 de la Constitution : « La République du Sénégal peut
conclure avec tout Etat africain des accords d’association ou de communauté comprenant abandon partiel ou
total de souveraineté en vue de réaliser l’unité africaine».

Le développement d’organismes d’intégration régionale et sous-régionale facilite l’élaboration du droit com-


munautaire (Union Africaine (UA), Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), Orga-
nisation pour l’Harmonisation en Afrique du droit des Affaires (OHADA), Conférence Interafricaine des
Marchés d’Assurances (CIMA), CEDEAO…). En droit communautaire, on distingue entre le droit originaire,
composé par les dispositions des traités eux-mêmes et le droit dérivé qui est issu des Directives (Directives de
l’UEMOA), actes uniformes (OHADA), codes (CIMA) ou des règlements.

L’élaboration du droit communautaire nécessite que les Etats indépendants consentent à un abandon d’une
parcelle de leur souveraineté au profit de l’organe communautaire. Cet abandon peut parfois poser problème
comme ce fut le cas lors de l’adhésion du Sénégal à l’OHADA (V. Décision Conseil constitutionnel : CC n°
3/C/93 du 16 décembre 1993 : le Conseil constitutionnel retenait que le dessaisissement de certaines des
organes de la République (Assemblée nationale, Cour de cassation) au profit d’organes de l’OHADA n’était ni
total ni unilatéral et qu’il ne s’agissait donc pas d’un abandon de souveraineté mais d’une limitation de souve-
raineté qu’implique tout engagement international)

Le droit communautaire occupe aujourd’hui une place sans précédent dans l’élaboration du droit même si
certaines matières du droit ne sont pas encore concernées par cette communautarisation du droit (droit de
la famille, droit pénal). Les organes communautaires poursuivent des objectifs politiques (Union Africaine,
CEDEAO…), économiques (CEDEAO, UEMOA…) ou juridiques (OHADA, Conférences Interafricaine des
Marchés d’Assurances CIMA…). De plus en plus, les organes communautaires instituent des organes juridic-
tionnels chargés de contrôler l’application et l’interprétation du droit communautaire (Cour de justice de la
CEDEAO, Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA…). Tout ceci tend à l’émergence d’un ordre
juridique communautaire.

Les textes communautaires contiennent de plus en plus des dispositions qui s’insèrent directement dans
l’ordre juridique interne en abrogeant toutes les dispositions nationales antérieurement prises dans leur
domaine d’intervention. Cette technique de communautarisation du droit qui consiste en une uniformisa-
tion, tente d’éviter la concurrence entre normes communautaires et normes nationales sur une même ques-
tion (Actes uniformes de l’OHADA, Règlements UEMOA, de la BCEAO…). L’uniformisation du droit trend
à lutter contre l’ineffectivité du droit supra national par la suppression des dispositions nationales sur cer-
taines matières du droit. Le juge n’a pas alors d’autre choix que d’appliquer la norme communautaire qui est la
seule à exister. Par ailleurs, la mise ne place de juridictions communautaire, appelées à assurer l’application et
l’interprétation du droit communautaire, renforce cette effectivité du droit communautaire.

B - Les lois et règlements

D’un point de vue quantitatif, ce sont les sources les plus importantes. Ils manifestent la place des pouvoirs
législatif et exécutif dans l’élaboration de la règle de droit. On ne peut manquer de souligner une certaine «
rivalité » entre lois et règlements. Cette rivalité illustre une certaine remise en cause de la théorie de la sépara-
tion des pouvoirs telle que conçue au 18e siècle.

La multiplicité mais surtout la technicité des matières ont conduit à accorder au pouvoir exécutif une place de
plus en plus grande dans l’élaboration de la règle de droit.
Il est possible de faire une étude comparée de la loi et du règlement en analysant leur définition et entrée en
18
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

vigueur, domaine d’application, leur contrôle

1 - Distinction entre loi et règlement quant à la définition.

La loi est la norme émanant de l’organe du pouvoir législatif, le parlement. Au Sénégal, le parlement est bica-
méral avec une assemblée nationale et un sénat. On distingue plusieurs types de lois :

***Les lois organiques sont celles qui organisent les institutions de la République telles que l’assemblée
nationale, la Cour de cassation, le Président de la République, la Primature... elles ne peuvent être votées qu’à
la majorité absolue des membres composant l’Assemblée nationale.

*** Les lois référendaires sont celles sur lesquelles le peuple s’est prononcé par référendum sur des ma-
tières relevant du domaine du pouvoir législatif.

***Les décrets-lois ou ordonnances sont des textes émanant du gouvernement (pouvoir exécutif) dans
des matières relevant du domaine du législateur et sur autorisation du parlement. Ils ont la même valeur que
les lois votées par le parlement. (Art 77 de la Constitution : « l’Assemblée nationale peut habiliter par une loi
le président de la République à prendre des mesures qui sont normalement du domaine de la loi »)

***Enfin, les lois ordinaires sont celles qui ne présentent aucun caractère particulier et émanent du pou-
voir législatif.

A la différence de la loi, le règlement est un acte émanant d’autorités étatiques du pouvoir exécutif. Ils ne
peuvent contenir de dispositions contraires à celles des lois. Au sommet de leur hiérarchie, on trouve les
décrets du Président de la République, puis les arrêtés ministériels, ceux des différents administrateurs terri-
toriaux ou de services… On y exclut cependant les circulaires qui sont des actes internes à chaque service et
relatifs à la façon d’appliquer les textes.

2 - Différence Quant au domaine

Pour bien délimiter le domaine d’intervention du pouvoir législatif (loi) et du pouvoir exécutif (règlement), la
Constitution du Sénégal distingue entre trois groupes de matières en son article 67:

*** Les matières dans lesquelles la loi fixe les règles : Il s’agit de matières jugées fondamentales sur lesquelles
le règlement n’est pas censé intervenir. Les autorités du pouvoir exécutif ne sont donc appelées à prendre
aucune norme concernant ces matières. Parmi celles-ci, figurent par exemple le statut de l’opposition, la na-
tionalité, l’état et la capacité des personnes, les successions et libéralités, la détermination des crimes et délits,
la procédure pénale, le statut des magistrats, les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux
citoyens…la loi devrait en principe fixer toutes les dispositions concernant ces matières.

*** Une deuxième catégorie est constituée de matières dans lesquelles la loi se limite à fixer les principes
fondamentaux. Il en est ainsi du droit de propriété, du droit du travail, de la défense nationale, de l’enseigne-
ment… les principes fondamentaux sont ceux qui fixent l’esprit général d’une législation. Il appartient alors
au pouvoir exécutif, par voie réglementaire, de définir tout ce qui n’est pas principe général.

*** Enfin, une troisième catégorie de matières est constituée de celles où la loi ne fixe ni règle ni principes
fondamentaux. Elles sont exclusivement du domaine réglementaire.

La distinction entre les matières ou la loi fixe les règles et celles où elle fixe les principes fondamentaux est
quelque peu théorique. Elle n’est pas respectée dans la pratique. Parfois, la loi fixe dans les détails certaines
19
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
matières où elle ne devrait régir que les principes fondamentaux alors que le pouvoir exécutif prend parfois
des règlements dans des domaines exclusivement réservées au législateur.

3 - Différence quant à l’entrée en vigueur

Après son adoption par le Parlement, la loi est transmise au Président de la République qui la promulgue
(Art. 72 de la Constitution). La promulgation est l’acte qui confère à la loi sa force exécutoire c’est-à-dire qui
permet aux citoyens et à l’Etat de réclamer son application. La loi devient, par la promulgation, un élément de
notre « ordonnancement juridique ». La loi doit ensuite faire l’objet d’une publication au journal officiel pour
être opposable aux citoyens. La publication est l’acte par lequel le Président de la République porte la loi à la
connaissance de ses destinataires. Une fois publiée, la loi est censée être connue par tous. On exprime cela en
disant qu’après la publication, « nul n’est censé ignorer la loi ».

Contrairement à la loi, le Règlement ne fait pas l’objet d’une promulgation. Il doit cependant être publié car il
a un caractère général et impersonnel. Il devient alors opposable aux citoyens. Lorsque l’acte émanant d’une
autorité du pouvoir exécutif concerne une ou des personnes nommément désignées, le droit administratif le
nomme « acte administratif individuel ». La notification est alors l’opération par laquelle l’acte est porté direc-
tement à la connaissance de l’intéressé.

4 - distinction quand à leur expiration

Le mode d’expiration le plus courant de la loi est l’abrogation. C’est l’acte par lequel l’autorité qui avait éla-
boré la loi (parlement) lui retire sa force juridique. Elle peut être expresse lorsqu’elle est visée clairement par
cette autorité qui proclame que la loi ne sera plus appliquée. Elle peut être aussi tacite lorsqu’une nouvelle
loi contient des dispositions contraires à celle d’une ancienne loi. Les dispositions de l’ancienne loi sont alors
réputées abrogées par voie de conséquence. Il ne faut point confondre l’abrogation avec la désuétude qui cor-
respond à une situation où la loi n’est plus appliquée dans les faits du fait de son ancienneté ou de son inadap-
tation aux besoins de la société
Les règlements perdent leur valeur juridique et exécutoire par abrogation. Lorsqu’il s’agit d’un acte adminis-
tratif individuel, on parle de retrait.

5 - Quant au contrôle

Les lois ont une force juridique inférieure à la Constitution. Elles ne peuvent par conséquent prévoir de
dispositions contraires à la Constitution (Art. 92 de la Constitution du Sénégal « le Conseil constitutionnel
connait de la constitutionalité des lois et des engagements internationaux (…) »).

Le contrôle de leur conformité à la norme constitutionnelle se fait d’abord lors de la procédure législative par
les pouvoirs donnés au Président de la République ou aux députés (1/10e des membres de l’Assemblée natio-
nale) de saisir le Conseil constitutionnel lorsqu’ils estiment que la loi en préparation (ou déjà votée mais qui
n’est entrée en vigueur) n’est pas conforme à la Constitution. C’est le contrôle à priori. Le contrôle à priori est
un contrôle essentiellement politique, réservé aux membres de l’exécutif et du législatif.

Le contrôle à posteriori est celui par lequel les citoyens sont autorisés à contester la conformité d’une loi à la
Constitution alors qu’elle est déjà en vigueur. L’ « exception d’inconstitutionnalité » est le moyen de défense
par lequel un citoyen exige qu’une loi ne soit point appliquée au litige qui le concerne du fait de son inconsti-
tutionnalité. Au Sénégal, l’exception d’inconstitutionnalité ne peut malheureusement être soulevée que devant
la Cour Suprême (à vérifier !!!). Le contrôle de constitutionalité des lois à postériori devrait avoir comme
principale intérêt de vérifier la conformité des lois à la Constitution mais aussi de permettre au Conseil
constitutionnel d’adapter l’interprétation des dispositions constitutionnelles aux nouvelles circonstances éco-
20
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

nomiques, politiques et sociales.

Au Sénégal, le Conseil constitutionnel contrôle également la conformité des lois aux traités et conventions
internationales.

Quant aux règlements, ils ont une valeur juridique inférieure à celle de la loi. Le contrôle de la conformité de
leurs dispositions aux dispositions législatives se fait par la voie du contrôle de légalité. Le recours pour excès
de pouvoir poursuit l’annulation de l’acte administratif individuel créateur de droits (c’est un acte individuel
et pas un règlement) alors que l’exception d’illégalité a pour finalité d’écarter l’application d’un règlement au
litige présent.

C – La coutume et la jurisprudence

1 – la coutume

Elle correspond à une pratique prolongée, constante, qui finit par provoquer, dans une société, ou un lieu
donné, un sentiment partagé de son caractère obligatoire. Parfois, elle prend le nom d’usage applicable par
exemple à une profession ou dans un marché (droit des affaires). Dans les deux cas, on constate un élément
matériel, c’est-à-dire une pratique répétée, constante, durable et un élément psychologique c’est-à-dire la
croyance que cette pratique est obligatoire.
Il existe trois types de coutumes :

***Les coutumes secundum legum ou « coutume selon la loi ». elles sont conformes à la loi. La loi se réfère
expressément à la coutume et cette dernière a la même force juridique que la loi.

*** Les coutumes praeter légum, celle qui va au-delà de la loi. Elle complète la loi dans des hypothèses où la
loi n’a rien prévu

***Enfin, la coutume contra legum : c’est la coutume qui va à l’encontre de la loi. Il y’a alors contrariété entre
la règle coutumière et la loi. Elle ne s’applique en principe que lorsque a loi a un caractère supplétif.

En droit de la famille, la coutume survit comme source du droit de façon exceptionnelle du fait du principe
de l’abrogation de toutes les coutumes locales et générales par l’article 830 du Code de la famille en 1972. Elle
occupe cependant encore une certaine place en matière de célébration du mariage ou de fiançailles.

Les usages sont beaucoup plus présents et toujours en vigueur. L’article 103 du Code des Obligations Civiles
et Commerciales renvoie aux usages chaque fois qu’il y’a absence de lois ou de prévisions contractuelles
réglementant une question. Ils sont aussi très présents en droit du travail et en droit commercial. Les usages
ont une valeur supplétive c’est-à-dire qu’ils ne reçoivent application que lorsqu’aucune norme de rang supé-
rieur (loi, règlement…) ne réglemente la question en litige ou lorsque de telles dispositions sont supplétives.
(Art. 259 COCC « les usages constants dans une région, sur chaque place, et dans les diverses professions ont
la valeur de règles supplétives. Ils écartent, s’il y’a lieu, les dispositions (…) qui ne sont pas d’ordre public ».
Pourtant, en droit commercial, les usages dits « généraux » ou « usage de droit », applicables à l’ensemble des
commerçants, ont la même valeur juridique que la loi (liberté de la preuve en matière commerciale, solidarité
présumé entre commerçants…).

2 – La jurisprudence

21
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
La jurisprudence peut avoir trois significations. Dans un premier temps, elle correspond à l’ensemble des
décisions rendues sur une question de droit (exemple lorsque je dis : « je recherche de la jurisprudence sur
le divorce au Sénégal ». Dans un deuxième sens, elle renvoie à l’ensemble des décisions concordantes (sem-
blables) rendues sur une question (exp : « sur la question de la dot, il existe une jurisprudence ». Dans un
troisième sens, le plus technique et exact, la jurisprudence correspond aux décisions rendues par les juridic-
tions supérieures (Cour suprême, Conseil constitutionnel…) et qui ont suffisamment d’autorité pour être
respectées par les juridictions inférieures.

Le principe de la séparation des pouvoirs aurait voulu que les juges ne puissent jamais participer à l’élabora-
tion de la règle de droit. Leur rôle devait se limiter à appliquer, lors des différents litiges, les règles de droit.
Cette vision ne prenait pas en compte le fait que la loi est parfois incomplète ou inexistante. Le juge est alors
tenu de suppléer cette absence ou incomplétude en créant des normes puisqu’il lui est interdit de refuser de
statuer. Il s’y ajoute que la loi, bien qu’existante, peut s’avérer ambiguë, floue. Le juge est alors encore tenu
d’une obligation d’interprétation de la loi en vue de déceler l’intention réelle du législateur.

Lorsqu’on parle de la jurisprudence en tant que source du droit, il faut garder à l’esprit que ne sont visées que
les décisions des juridictions supérieures c’est-à-dire celles qui ont assez d’autorité pour être reprises et res-
pectées par les tribunaux inférieurs. Ces juridictions supérieures que sont au Sénégal le Conseil constitution-
nel ou la Cour Suprême qui rendent des « arrêts » dont les solutions sont, par la suite, reprises par les autres
juges. L’application de la norme jurisprudentielle par plusieurs juridictions, son invocation par les avocats
lors des litiges et son enseignement dans les facultés de droit finissent par lui octroyer un certain caractère de
généralité. C’est dans ce sens qu’elle devient une règle de droit en devenant une règle générale et imperson-
nelle. Par ailleurs, le fait qu’elle émane d’une juridiction supérieure lui confère une certaine autorité qui fait
que les justiciables et les praticiens du droit la considèrent comme obligatoire.

Certains auteurs contestent ce point de vue en estimant que la norme jurisprudentielle ne peut être géné-
rale et impersonnelle car il est interdit aux juge de statuer par « voie de règlement » c’est-à-dire en rendant
une décision au-delà des parties au litige : la décision rendue par le juge ne concerne que les parties au litige.
Selon ces auteurs, la norme jurisprudentielle n’aurait pas aussi un caractère obligatoire du fait que les autres
juges (inférieurs) ne sont soumis qu’à l’autorité de la loi et non à celle des juridictions supérieures.

La jurisprudence n’est donc une source du droit que de façon incidente, accidentelle, non prévue initialement.
Son importance aujourd’hui dans l’édification de la règle de droit est pourtant incontestable même si certains
auteurs ne la cite pas parmi les sources du droit (Voir : Gérard Cornu, Droit civil, Introduction, Les per-
sonnes, Les biens, Montchrétien, 12e éd.). Les arguments développés par ces auteurs pour refuser de compter
la jurisprudence parmi les sources de la règle de droit sont nombreux :

Il ne fait pas de doute que la jurisprudence est créatrice de la règle de droit. Cette importance de la juris-
prudence se manifeste d’abord par le fait que la plupart des notions du droit n’ont que le contenu que leur
accordent les juridictions supérieures (notions de salarié, commerçant, contrat, vol, faute civile, licencie-
ment…). Par ailleurs, en dehors de tout texte, ces juridictions supérieures ont su dégager, de l’esprit de notre
droit, un certain nombre de principes généraux considérés comme « nécessaires à notre temps ».

Les rapports entre jurisprudence et loi ne sont pas seulement des rapports d’interprétation et de suppléance.
Les juges ne manquent pas parfois de consacrer des solutions tout à fait contraires à la lettre des textes de
textes, ce qui constitue une atteinte au principe de la séparation des pouvoirs.

II - La mise en œuvre des sources du droit

22
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

Deux types de problèmes se posent : celui de l’application de la loi dans le temps (A) et celui de son applica-
tion dans l’espace (B).

A - L’application de la loi dans le temps

Il y’a conflit de lois dans le temps lorsque deux ou plusieurs lois (au sens matériel) se succèdent dans le temps,
portent sur le même objet, et contiennent des dispositions (solutions) différentes en l’absence de lois transi-
toires. Les dispositions transitoires sont celles par lesquelles le législateur qui édicte la règle de droit définit
clairement son champ d’application temporel. L’existence de dispositions transitoires permet ainsi au législa-
teur d’éviter la situation de conflits de lois en spécifiant les situations juridiques qui seront soumises à cha-
cune des lois en conflit.

Exemple : Une loi du 1er janvier 2009 dispose que le diplôme de licence dans les facultés de droit est déli-
vré après une période d’étude, avec succès, de trois années. Le 10 janvier 2013, une nouvelle loi prévoit que
la licence en droit est délivrée après une période d’étude, avec succès, de quatre années. Les deux lois en
question sont en conflit car elles se succèdent dans le temps (1e janvier 2009/ 10 janvier 2013), portent sur
le même objet (l’organisation de la licence en droit) et contiennent des solutions différentes (période de trois
ans et période de quatre ans). Cette situation soulève un certain nombre de questionnements : les étudiants
inscrits en L2 et L3 devront-ils faire leur licence en trois ans (ancienne loi) ou en quatre ans (nouvelle loi) ?
Ceux qui ont déjà validé trois années d’étude en droit et qui ont obtenu leur licence devront-ils revenir pour
compléter à quatre années ? Ceux qui débutent des études de droit auront-ils à valider trois années d’étude ou
quatre années ?

Pour régler les difficultés posées par les conflits de lois dans le temps, deux principes sont avancés en partant
toujours de la loi nouvelle: celui de la non rétroactivité de la loi nouvelle (1) et celui de l’effet immédiat de la
loi nouvelle(2).

1 : Le principe de la non rétroactivité des lois nouvelles .

a : L’affirmation du principe

Il signifie que la loi nouvelle ne saisit pas les effets passés des diverses situations juridiques pour les modi-
fier. Peu importe que ces effets aient un fondement contractuel ou légal. La Constitution du Sénégal, en son
article 9, pose expressément le principe de la non rétroactivité des lois pénales (Art. 9, al. 2 de la Constitution
« nul ne peut être condamné si ce n’est en vertu d’une loi entrée en vigueur avant l’acte commis (…) ». Mais,
au-delà du droit pénal, la non rétroactivité de la loi nouvelle est un principe général de droit. Le principe est
fondé sur l’idée de droits acquis c’est-à-dire ceux qui sont entrés dans le domaine, le patrimoine de l’individu.
Lorsqu’une nouvelle loi dispose que les loyers dans la région de Dakar ne peuvent être supérieurs à 200 000
frs, les loyers déjà perçus et qui sont supérieurs à cette somme ne sont pas concernés par la mesure. Si une
loi nouvelle interdit aux parents d’éduquer leur enfant en le battant, les parents qui ont déjà eu à le faire ne
peuvent pas être poursuivis sous l’effet de la nouvelle loi car cette dernière « ne retourne pas dans le passé ».

Ce principe de la non rétroactivité connaît un certain nombre d’exceptions c’est-à-dire des hypothèses où la
loi nouvelle « retourne » dans le passé pour réformer les effets passés des situations juridiques.

b : Les exceptions au principe :

Il y’en a trois

*** Les lois déclarées expressément rétroactives par le législateur : le principe de non rétroactivité ne lie pas
le législateur en matière non pénale. En effet, ce principe n’a une valeur constitutionnelle qu’en matière pénale
23
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
(Art. 9 de la Constitution). Par conséquent, dans les dispositions transitoires de la loi non pénale qu’il
édicte, le législateur peut attacher un caractère rétroactif à la loi ou à certaines seulement de ses dispositions.
Il est assez surprenant que le législateur, qui a pour mission naturelle d’assurer la stabilité juridique, puisse
la remettre en cause par le vote de lois expressément rétroactives. Cependant, le vote de ce type de lois est
parfois rendu nécessaire par les circonstances économiques, politiques ou sociales. Les lois déclarées expres-
sément rétroactives sont rares du fait des bouleversements qu’elles produisent dans la situation juridique des
sujets de droit. La possibilité donnée au législateur d’enfreindre le principe de non rétroactivité montre com-
bien le principe peut être fragile. Pourtant, dans la pratique, la rareté des lois déclarées expressément rétroac-
tives conduit à comprendre que l’équilibre se trouve plus dans le bon sens du législateur.

*** Les lois interprétatives sont rétroactives. Une loi est dite interprétative lorsque’elle se borne à clarifier,
sans rien innover, le sens d’une loi préexistante qu’une définition imparfaite a rendu susceptible de contro-
verses.

*** Il est aussi dérogé au principe de non rétroactivité pour les lois pénales plus douces. Une loi pénale est
plus douce lorsqu’elle supprime une infraction ou alors prévoit une peine moins lourde pour le délinquant.
Elles sont rétroactive car elle s’applique immédiatement même aux infractions commises avant leur entrée en
vigueur et n’ayant pas fait l’objet de jugement définitif. Leur caractère rétroactif ne s’étend cependant pas aux
infractions ayant déjà fait l’objet d’une condamnation définitive.

2 – Le principe de l’application immédiate

Si la loi nouvelle ne saisit pas les effets passés des diverses situations juridiques, elle a cependant vocation à
s’appliquer aux effets futurs de ces situations. C’est ce qu’exprime le principe de l’effet immédiat. La solution
contraire aurait certainement conduit à permettre à chacun d’entre nous de revendiquer toujours l’applica-
tion de la loi qui l’a vu naître, celle de son époque, la loi ancienne…les réformes législatives n’aurait plus alors
aucune portée juridique alors que les lois nouvelles sont censées être meilleures et plus adaptées que les lois
anciennes. Dans l’exemple que nous avons précédemment donné et qui interdit d’éduquer son enfant en le
battant, les nouvelles dispositions seront donc immédiatement applicables à toutes les relations entre parents
et enfants.

Le principe de l’effet immédiat, comme celui de la non rétroactivité, connaît aussi une exception. On estime
en effet que lorsque les parties sont liées par un contrat, l’effet immédiat aurait pour conséquence de les obli-
ger à appliquer à leurs relations une loi qu’elles n’avaient pas prévue lors de la signature de leur contrat. Ainsi,
lorsque la situation en cause résulte d’un contrat, elle est régie par la loi ancienne aussi bien dans ces effets
passés que futurs. Dans l’exemple précité de la loi qui fixe un maximum de 200 000 frs pour le loyer, elle ne
sera pas applicable aux contrats de bail signés avant son entrée en vigueur même dans leurs effets futurs. Cela
veut dire que le locataire qui avait signé son contrat de bail sous l’empire de la loi ancienne ne pourra invo-
quer le bénéfice du montant maximum de 200 000frs.

L’effet immédiat de la loi trouve donc une limite dans un autre principe : celui de l’autonomie de la volonté.
L’autonomie de la volonté est si forte qu’elle interdit au législateur de bouleverser le contenu du contrat mais
aussi défend au juge de le faire (théorie de l’imprévision). Cette exception en matière contractuelle ne reçoit
pas cependant application lorsque la loi nouvelle est d’ordre public. Il ne va ainsi lorsqu’elle a un impératif
social élevé. Les termes utilisés par le législateur manifestent souvent sa volonté de faire de la nouvelle loi
une loi d’ordre public : «les loyers ne peuvent en aucun cas dépasser.. », « Il est formellement interdit… », «
Nonobstant toute clause contraire… », « impérat ivement,… ». D’autres fois, c’est dans l’exposé des motifs
de la loi c’est-à-dire le texte préliminaire par lequel le législateur annonce ses objectifs, que le lecteur com-
prendra que la loi en question est une loi d’ordre public. Enfin, lorsque ni les termes ni l’exposé des motifs ne
24
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

sont utiles pour cela, le juge interprète la loi pour la déclarer ou non d’ordre public. En tout état de cause, on
suppose que certaines matières du droit sont par nature d’ordre public. C’est le cas du droit du travail, ou du
droit fiscal. Si la loi nouvelle qui fixe désormais le montant maximal du loyer à 200 000 frs est une loi d’ordre
public, elle pourra être immédiatement invoquée par les locataires pour l’avenir même si leur contrat de bail a
été signé sous l’empire de la loi ancienne.

B – L’application de la loi dans l’espace

Vu du droit sénégalais, il y’a conflit de lois dans l’espace chaque fois que l’on peut douter de l’application de la
loi sénégalaise à une situation juridique du fait de la présence de circonstances particulières appelées « élé-
ments d’extranéité ». Les éléments qui peuvent susciter ce doute sont par exemple la nationalité étrangère des
parties au litige, la nationalité différente des parties, une différence entre le lieu de conclusion et d’exécution
du contrat, un litige portant sur un immeuble situé dans un autre Etat…

De façon plus pratique, il faut se demander si tous les litiges portés devant le juge sénégalais doivent se voir
appliquer la loi sénégalaise ? Comme en matière de conflit de lois dans le temps, deux principes sont en com-
pétition :

***Le premier, celui de la territorialité des lois, veut que la loi s’applique automatiquement à toutes les per-
sonnes se trouvant sur le territoire national.

***Le second principe par contre, celui de la personnalité des lois, donne la possibilité aux étrangers d’invo-
quer l’application de leur propre droit national même sur le territoire sénégalais.

Le principe de la territorialité reçoit application toutes les fois que la loi a un caractère d’ordre public. Ainsi,
les règles du droit pénal, du droit du travail, du droit fiscal par exemple sont d’application territoriale. Par
contre, les lois concernant l’état et la capacité des personnes sont soumises à la loi nationale des individus
même vivants à l’étranger sauf lorsque le juge considère qu’elles ont un caractère de lois de police ou de
sûreté.

TITRE II : LES DROITS SUBJECTIFS

Le droit objectif appréhende, on l’a déjà relevé, le droit comme une science, un phénomène, l’ensemble des
règles à caractère juridique applicables à une société. Pourtant, les règles du droit objectif contiennent des
prescriptions qui reconnaissent aux sujets de droit un certain nombre de prérogatives (droits à… et droits
de…). Ces prérogatives sont les droits subjectifs. Par exemple, la règle qui définit le droit de propriété comme
celui qui confère à son titulaire les prérogatives les plus étendues sur la chose objet de sa propriété est une
règle de droit objectif. En vertu de cette règle, je dispose donc de la prérogative de vendre, détruire ou offrir
le stylo dont je suis propriétaire. Le lien qui me lie à mon stylo est un droit subjectif. Aussi, les dispositions de
l’article 264 du COCC définissent le contrat de vente comme celui par lequel le vendeur s’engage à transférer
la propriété d’une chose contre paiement d’un prix par l’acheteur. Cette règle du droit objectif reconnaît donc
au vendeur un droit subjectif sur l’acheteur : celui de demander le paiement du prix. L’acheteur aussi dispose
d’un droit subjectif sur le vendeur : celui de réclamer la livraison de la chose vendue.

On ne saurait cependant en déduire que toutes les dispositions du droit objectif conduisent à des droits sub-
jectifs. Par exemple, l’article 108 du Code de la famille qui fixe les conditions de fond du mariage est une règle
du droit objectif mais n’accordent aucune prérogative particulière à quelqu’un. Aussi, l’article 73 du COCC
qui définit l’objet du contrat ne donne, en lui-même, aucun droit subjectif à quelqu’un.

25
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
Les prérogatives que les règles du droit objectif peuvent reconnaître aux sujets de droit, c’est-à-dire les droits
subjectifs, renvoient à trois interrogations : celle sur leur classification (Chapitre I), celle sur leur preuve (Cha-
pitre II), leur transmission et leur extinction (Chapitre III) et enfin, leurs titulaires (Chapitre IV).

CHAPITRE I – Classification des droits subjectifs


CHAPITRE II – Preuve des droits subjectifs

CHAPITRE III – Transmission et extinction des droits subjectifs


CHAPITRE IV – Les titulaires des droits subjectifs

CHAPITRE I – La classification des droits subjectifs

Il a pu paraître nécessaire au législateur de réserver des régimes juridiques différents aux droits subjectifs
ayant une valeur économique, estimables en argent, et ceux qui n’en ont point. Par là, on distingue entre les
droits patrimoniaux et les droits extrapatrimoniaux (Section I). Aussi, le législateur a estimé que le régime
juridique des droits subjectifs devait être différentié selon que ses droits reconnaissaient à leurs titulaires des
prérogatives envers un autre sujet de droit, une personne, ou, au contraire, sur une chose. Cette seconde dis-
tinction conduit à différentier les droits personnels des droits réels (Section II).

Section I – Les droits patrimoniaux et les droits extra patrimoniaux

I – Les droits patrimoniaux.

Ils relèvent de l’avoir, le contraire de l’être. Ils sont regroupés au sein du patrimoine qu’il convient d’exposer
(A). Par ailleurs, ces droits patrimoniaux présentent un certain nombre de caractères (B).

A – Le patrimoine.

1 – Définition

Le patrimoine est constitué par l’ensemble des droits et obligations du sujet de droit, droits et obligations
ayant une valeur marchande et donc évaluables en argent. Ces droits et obligations sont dits patrimoniaux. Le
patrimoine correspond au versant économique de la personnalité juridique. Il fait du sujet de droit quelqu’un
participant au « commerce juridique ».

On compte dans le patrimoine :

*** l’actif du sujet : Dans cette catégorie, entrent certainement les biens dont dispose l’individu qu’il peut
vendre, échanger, donner (les droits dont je dispose sur la voiture dont je suis propriétaire sont un élément
de mon patrimoine). Y entrent également les obligations de donner et de faire auxquelles sont assujettis les
autres sujets de droit et ayant une valeur pécuniaire. Le droit dont dispose le bailleur à exiger du locataire de
payer un loyer est un élément de l’actif du premier : c’est un droit subjectif de nature patrimoniale parcequ’il
est évaluable en argent. La prérogative reconnue au vendeur d’exiger de l’acheteur le paiement du prix est un
élément de l’actif du vendeur et est aussi un droit patrimonial.

*** A coté de l’actif, le patrimoine comprend également le passif du sujet c’est-à-dire ses dettes. Celles-ci
sont les obligations de donner et de faire qui pèsent sur le sujet de droit et qui peuvent être évaluées en argent
et faire l’objet de transactions (Exp 1 : l’obligation qui pèse sur les parents de nourrir leurs enfants peut être
évaluée en argent en cas de divorce par le versement de la pension alimentaire : c’est une obligation de nature
patrimoniale. Exp 2 : l’obligation qui pèse sur le client d’un taxi de payer le « taximan » après le transport est
26
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

une obligation à caractère patrimoniale et est contenu dans le passif patrimonial.)

2 – Les différentes conceptions du patrimoine.

Deux conceptions s’affrontent :

*** La première est française, développée par Aubry et Rau. Selon cette conception, le patrimoine est
une subséquence de la personnalité, c’est-à-dire une conséquence naturelle et nécessaire de celle-ci. Tout
sujet de droit aurait donc forcément un patrimoine qui est alors plus un « contenant » qu’un « contenu ». En
effet, le sujet peut, à certaines étapes de sa vie, n’avoir aucun droit ou obligation à valeur pécuniaire et mar-
chande. Il n’en reste pas moins qu’il a quand même un patrimoine qui est en fin de compte la capacité d’avoir
des droits et obligations évaluables en argent. Aussi, selon la conception française, le patrimoine serait unique
pour chaque sujet de droit étant entendu que chaque personne n’a qu’une seule personnalité juridique.

***A la théorie française du patrimoine, s’oppose la conception allemande dite encore celle des patri-
moines d’affectation. Cette conception est largement appliquée dans les pays anglo-saxons. Selon cette
construction juridique, le patrimoine correspond juste à un ensemble de droits et d’obligations ayant une
valeur économique et marchande et affecté à une finalité déterminée. Il n’est pas alors rattaché à la personna-
lité juridique, ce qui a comme conséquence qu’une personne peut avoir plusieurs patrimoines : un patrimoine
consacré à ses affaires familiales, un autre à ses affaires économique, sa profession, un patrimoine affecté à ses
activités humanitaires, associatives…

Le droit sénégalais est largement dominé par la conception française du patrimoine. Il n’en demeure pas
moins cependant que quelques concessions ont été faites à la logique anglo-saxonne du patrimoine. Ainsi,
le régime juridique de la Société unipersonnelle (SARL unipersonnelle, SA unipersonelle) réglementée par
l’Acte Uniforme sur le droit des sociétés commerciales permet bien une affectation de certains biens per-
sonnels à cette société (Art. 309 de l’Acte Uniforme), ce qui revient à avoir de manière indirecte deux patri-
moines.

B- Les caractères du patrimoine et des droits patrimoniaux

1- Caractères du patrimoine

***Dans la conception française, le patrimoine demeure unique, lié à la personnalité juridique. Etant
indispensable à tout sujet de droit, il est par conséquent incessible c’est-à-dire qu’il ne peut faire l’objet d’un
transfert durant la vie de la personne (la mort civile n’existant plus, le patrimoine est incessible comme la
personnalité). Par contre, lorsque la personne meurt, son patrimoine est dévolu à ses héritiers par l’effet de la
transmission universelle du patrimoine.

*** La conception française veut aussi que le patrimoine soit indivisible. Ainsi, cette logique conduit à
considérer que les créances (actif) du sujet répondent sans distinction de l’ensemble des dettes (passif) de
ce dernier. C’est le principe de l’unité et de l’indivisibilité du patrimoine. Aussi, par l’effet de la subrogation
réelle, les éléments qui entrent dans l’actif remplacent immédiatement qui en en sortent. Des exceptions sont
prévues parfois par la loi ou la convention des parties pour affecter certains biens déterminés comme garantie
exclusive de certaines dettes. Ces garanties, on l’a vu, sont réglementées par le droit des sûretés. Elles per-
mettent d’affecter juridiquement certains éléments du patrimoine, non pas à une activité, mais à la garantie
d’une dette.

27
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
2 – Caractères des éléments du patrimoine

Le patrimoine est un contenant. Son contenu, ce sont les droits et les obligations à caractère patrimonial c’est-
à-dire évaluables en argent. Ces éléments du patrimoine présentent un certain nombre de caractère :

-***Si le patrimoine, en tant qu’universalité juridique, est incessible entre vifs, il n’en va pas de même des
éléments qui le composent. En effet, les droits et obligations à caractère patrimonial peuvent dàbord faire
l’objet de conventions. Ce sont des éléments qui sont « dans le commerce » et sont donc susceptibles d’être
cédés, transférés dans le patrimoine d’autres personnes. En plus, cette cession peut se faire à titre onéreux
c’est-à-dire par la perception d’une contrepartie. La plupart des contrats de la vie juridique opèrent cette
cession d’éléments du patrimoine : contrats de vente (cession de la propriété d’un bien), location (cession du
droit d’usage sur la chose)…

***Etant des éléments dans le commerce, les droits patrimoniaux peuvent faire l’objet de saisie. La saisie
est l’opération par laquelle le créancier s’approprie les biens et droits situés dans le patrimoine de son débiteur
pour se faire payer.

***Les droits patrimoniaux peuvent faire par ailleurs l’objet d’une renonciation. Par elle, le titulaire du
droit s’engage à ne plus l’exercer.

II – Les droits extrapatrimoniaux

Il convient de les identifier (A) avant d’étudier leur caractère (B).

A – Identification des droits extrapatrimoniaux

Ils ont la particularité d’être attachés à la personne de l’être humain et insusceptibles d’une évaluation pécu-
niaire. Le caractère inestimable d’un droit tend à lui conférer une nature extrapatrimoniale.
Les droits extrapatrimoniaux sont d’abord ceux proclamés dans les textes fondamentaux comme la Déclara-
tion des droits de l’homme et du citoyen de 1789, la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 dé-
cembre 1948 ou encore la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. La Constitution du Sénégal
en cite un bon nombre en ses articles 7 et 8 : droit à la vie, à la liberté, à la sécurité, au libre développement de
sa personnalité, à l’intégrité corporelle… D’autres droits extrapatrimoniaux débordent le cadre du droit civil :
le droit d’association, de manifestation…

Ces dispositions du droit objectif reconnaissent ainsi aux sujets de droit des prérogatives qu’ils peuvent
invoquer devant d’autres sujets de droit, l’Etat ou le juge. On en trouve aussi dans des textes non constitution-
nels. Ainsi, le Code de la famille (article 2) consacre le droit au nom ou l’autorité que les parents ont sur leurs
enfants (Article 156 du Code de la famille). La loi du 25 aout 2008 sur le droit d’auteur et les droits voisins du
droit d’auteur qui garantit le droit moral de l’auteur d’une œuvre de l’esprit.

La mise en œuvre des droits extrapatrimoniaux est beaucoup plus difficile que celle des droits patrimoniaux.
Le débiteur de ces droits extrapatrimoniaux est parfois clairement identifiable. Pourtant, d’autres fois, ce débi-
teur est vague. Il en va sûrement ainsi pour le droit à la liberté, le droit à un emploi… le débiteur est-il l’Etat ?
Le juge ? L’administration ? Aussi, les controverses doctrinales et jurisprudentielles sur l’étendue du droit à la
vie, du droit moral de l’auteur d’un roman, du droit à l’intégrité corporelle sont récurrentes. La question de la
protection du droit à l’honneur, celle du droit au respect de la vie privée et familiale pose autant d’interroga-
tions. Parfois, c’est la réalité même d’autres droits extrapatrimoniaux qui divise la doctrine et la jurisprudence
(droit de mourir dans la dignité, euthanasie, droit de ne point venir au monde ?)
28
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

B – Caractères des droits extra patrimoniaux.

*** Le premier caractère provient du fait que ces droits ne sont pas susceptibles d’une évaluation pécuniaire.
Ils peuvent cependant avoir des incidences pécuniaires. Si en effet le droit à l’image, à l’intégrité corporelle, à
la liberté ne sont pas évaluables en argent, leur violation peut conduire à l’obtention de dommages et intérêts
en justice c’est-à-dire à une compensation pécuniaire.
***Le second caractère est tiré du fait que ces droits n’ont pas de valeur économique, ils n’ont pas d’équivalent
en argent. Aussi, ils sont hors du commerce puisque étant rattachés à la personnalité. Ils ne peuvent en prin-
cipe faire l’objet de conventions. La Constitution du Sénégal fait référence à certains d’entre eux en énonçant
des « droits de l’homme inviolables et inaliénables ». Mais ce principe a évolué. Ce qui est interdit, ce sont les
conventions à titre onéreux les concernant c’est-à-dire celles par lesquelles le titulaire de ces droits obtient une
contrepartie. Ainsi donc, la convention par laquelle on reçoit gratuitement un organe humain est permise
alors que celle par laquelle on l’achète est interdite puisque le droit à l’intégrité corporelle est un droit extrapa-
trimonial.

***Contrairement aux droits patrimoniaux, les droits extrapatrimoniaux ne peuvent faire l’objet de saisie.

***Aussi, les droits extra patrimoniaux ne peuvent faire l’objet de renonciation c’est dire que leur titulaire ne
peuvent prendre un engagement à ne pas les exercer dans le futur.

***Enfin, les droits extrapatrimoniaux ne sont pas atteints par la prescription. Ils ne peuvent être éteints du
fait de l’écoulement d’un certain temps.

Section II – Droits réels et droits personnels

Les prérogatives que le droit objectif reconnait aux sujets de droit, les droits subjectifs, sont exercées envers
d’autres sujets de droit ou, au contraire, sur des choses. Dans le premier cas, on parle de droit personnel et,
dans le second, de droit réel. Il convient de les étudier séparément.

I – Les droits réels

Les choses sur lesquelles portent les droits réels sont des biens qu’il convient d’identifier (A) avant de
voir le régime juridique que la loi attache à ces droits réels (B).

A – Les biens objets des droits réels

Notre droit classe ces biens en deux grandes catégories : les meubles et les immeubles. La distinction conduit
à établir des régimes juridiques différents pour chaque catégorie (1). Des distinctions secondaires existent
qu’il convient aussi d’identifier (2).

1 - La distinction principale : les meubles et immeubles

Il faut identifier les meubles et les immeubles et envisager ensuite l’étude des intérêts de la distinction.
a – L’identification des meubles et immeubles

a-1 - Les meubles


29
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
***Le critère le plus important de l’identification des meubles est celui tiré de leur mobilité naturelle. Un
meuble, par essence, peut être déplacé, transporté…ce sont les meubles par nature. Il en va ainsi des objets de
toutes natures appelés meubles meublants, mais aussi les animaux.

*** Un deuxième critère réside dans l’anticipation de la finalité du bien. Bien qu’ayant une attache au sol et
ne pouvant être pour l’instant déplacés, certains biens seront quant bien même considérés comme meubles.
Ce sont les meubles par anticipation. On range dans cette catégorie les récoles sur pied, le bois avant la coupe,
les matériaux des carrières avant l’extraction. Le législateur considère qu’une fois arrachés, détachés du sol,
ces biens pourront être déplacés facilement. Aussi, par anticipation sur leur mobilité future, les considère t-on
comme des biens meubles.

*** Un troisième critère prend en compte l’objet auquel certains droits s’appliquent.

§§ - Chaque fois qu’un droit porte sur un meuble par nature ou par destination, ce droit est lui-même
de nature mobilière. Ainsi, les créances mobilières sont celles par lesquelles une personne peut exiger d’une
autre une obligation de faire, de ne pas faire et de donner lorsque l’obligation porte sur un meuble.
Les droits réels mobiliers sont des droits reconnus à une personne sur un meuble appartenant à autrui
(usufruit mobilier, droit d’usage détenu sur le bien meuble d’autrui sur la base d’un contrat de location par
exemple…).

§§ - D’autres fois, le droit ne porte pas sur un meuble par nature ou par destination mais sur un bien
que la loi déclare simplement comme meuble. Le critère est arbitraire et ces biens n’ont aucune matérialité
physique. Ce sont des biens incorporels et on parle meuble par détermination de la loi. On cite, dans cette
catégorie, les parts sociales c’est-à-dire les droits des associés dans tous les types de société, le fonds de com-
merce mais aussi les propriétés incorporelles telles les droits qu’un médecin a sur sa clientèle ou ceux qu’un
artiste a sur son œuvre littéraire et artistique

a- 2 – Les immeubles

Les critères sont tout aussi nombreux que pour les meubles.

*** Au contraire des meubles par nature qui sont les biens pouvant être déplacés, les immeubles par nature
sont ceux qui ne peuvent l’être. C’est le cas du sol lui-même ainsi que les biens incorporés au sol à savoir les
constructions édifiées sur le sol, les végétaux et les arbres

*** Un deuxième critère de l’identification des immeubles est fondé sur la théorie de l’accessoire. Ce critère
conduit aux immeubles par destination. Il s’agit de biens qui auraient du être considérés comme meubles par
nature. Mais, du fait de leur attachement à un immeuble par nature, ils sont réputés être des immeubles. Il
existe deux sous-critères de l’immobilisation par destination

§§ - La participation du bien meuble à la destination économique du bien immeuble par nature. Ces
biens sont destinés à servir à l’exploitation de l’immeuble : ce sont les objets et animaux qui servent à cette
exploitation.

§§- L’attachement à perpétuelle demeure du bien meuble à un bien immeuble par nature. C’est le cas
des ornements, tapisseries, statues qui accompagnent l’immeuble en y étant incorporés.

***Enfin, un troisième critère est tiré de l’objet sur lesquels portent certains droits. À l’image des droits
mobiliers qui portent sur des biens meubles, les droits immobiliers portent sur des immeubles. Le droit
considère ces droits comme des immeubles. On y cite :
30
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

§§- les droits réels immobiliers qui sont les droits réels dont une personne peut être investie sur
l’immeuble d’autrui (usufruit sur un immeuble appartenant à autrui)

§§- Les créances immobilières qui sont les prérogatives qu’une personne peut exiger à une autre
de faire, de ne pas faire ou de donner et concernant un immeuble (livraison d’un immeuble). Dans ce cas, on
constate qu’il y’a juxtaposition d’un droit personnel (celui de donner, de faire ou de donner) et un droit réel
(l’obligation concerne un bien).

§§ - Les actions immobilières qui sont les actions en justice relatives à la propriété ou à la posses-
sion d’un immeuble sont des droits immobiliers. Le droit considère ces droits comme des biens immeubles.

Nous venons de fixer la distinction entre meuble et immeuble. Il convient maintenant de se demander à quoi
sert cette distinction. Quel est son intérêt sur le plan pratique ?

b – Les intérêts de la distinction meuble et immeuble

Plusieurs intérêts peuvent être relevés :

***Le droit prend en compte la valeur des immeubles et meubles. Historiquement, les immeubles
sont considérés comme ayant une valeur en principe supérieure à celle des meubles. Aussi, les opérations les
concernant, leur acquisition, vente, sont soumises à des règles plus formalistes (immatriculation, interven-
tion du notaire…). Les contrats sur les immeubles doivent faire l’objet d’une publicité légale pour informer
les tiers. Contrairement aux immeubles, les opérations juridiques concernant des meubles sont exonérées de
formalisme.
Envisagée d’un point de vue contemporain, la distinction fondée sur la valeur du bien perd un peu de son
intérêt. Certains biens meubles peuvent aujourd’hui présenter une certaine valeur financière (bateaux, avions,
actions de sociétés commerciales…). Aussi, les opérations les concernant sont très souvent soumises aux
mêmes règles de forme que celles concernant les immeubles (nécessité d’un écrit, publicité légale…)

*** En matière de preuve, la règle veut que le possesseur d’un meuble c’est-à-dire celui qui le détient,
soit présumé être propriétaire sauf preuve contraire apportée par une autre personne. Par contre, en matière
immobilière, le détenteur ne bénéficie d’aucune présomption de propriétaire. Il lui faudra prouver ses droits
sur l’immeuble.

***Un troisième intérêt concerne la procédure civile. Lorsque’un litige porte sur un immeuble, le juge
compétent est celui du lieu de situation de l’immeuble. Par contre, pour les contestations portant sur des
meubles, le juge compétent peut varier, être celui du domicile du défendeur, celui de la signature du contrat…

***En matière de voie d’exécution, la saisie de l’immeuble, considérée comme ayant une valeur écono-
mique plus importante, est soumise à des règles plus sévères que la celle des meubles.

2 – Les distinctions secondaires des biens objets des droits réels

***Choses corporelles et choses incorporelles : les premières sont celles ayant une réalité physique alors que
les choses incorporelles n’en n’ont pas (droits d’associés d’une société, romans, poèmes…).

***Choses dans le commerce et choses hors du commerce : les choses dans le commerce sont celles qui
peuvent faire l’objet d’échanges et de conventions (maisons, voitures…). Les secondes ne peuvent être l’objet
de conventions à titre onéreux entre sujet de droits (les éléments du corps humain, les produits illicites
comme la drogue…).
31
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
***Choses fongibles et choses non fongibles : les choses fongibles ou choses de genre existent en plusieurs
exemplaires identiques. Les choses non fongibles n’existent qu’en un seul exemplaire (exp. statut de la renais-
sance africaine…)

*** Choses consomptibles et choses non consomptibles : les premières disparaissent par l’usage qu’on en fait
(les aliments) alors que les secondes ne disparaissent pas par cet usage (une maison…)

B – Le régime juridique des droits réels

Ce régime différentie entre plusieurs types de droits réels en prenant en compte la nature et l’étendue des pré-
rogatives que le titulaire du droit réel a sur le bien objet de son droit. On distingue ainsi les droits réels princi-
paux (1) et les droits réels accessoires (2).

1 – Les droits réels principaux

Le plus important est le droit de propriété (a). Il y’a par ailleurs les droits réel démembrés (b).

a – Le droit de propriété

C’est celui qui confère à son titulaire les prérogatives les plus étendues sur la chose. Le propriétaire a le droit
d’utiliser la chose à sa convenance (droit d’usage ou usus), d’en percevoir les fruits et produits ou fructus
(cueillir les fruits de l’arbre, bénéficier des intérêts du compte bancaire, utiliser la voiture pour gagner de
l’argent, louer la villa pour percevoir des loyers…) mais aussi du pouvoir de disposer de la chose en la détrui-
sant par exemple ou en la vendant (abusus). Le propriétaire dispose donc de l’usus, du fructus et de l’abusus.
Des restrictions légales peuvent être apportées au droit de propriété pour cause de nécessité publique c’est-à-
dire chaque fois qu’intérêt supérieur et général commande de telles dérogations : expropriation pour cause
d’utilité publique, servitudes publiques pour l’eau, l’électricité… (Article 15 de la Constitution du Sénégal).

Le droit de propriété doit être distingué de la simple possession et de la détention.

***La possession consiste à se comporter comme le titulaire d’un droit que l’on a ou que l’on n’a pas. Elle
suppose d’abord une détention exclusive de la chose mais aussi l’intention d’agir comme un propriétaire. Le
propriétaire est souvent le possesseur du bien mais le contraire peut advenir

***La détention est par contre le fait d’avoir le bien par devers soi mais sans véritable intention de se compor-
ter comme le véritable propriétaire. Le locataire d’un appartement en est le détenteur. En matière de meuble,
l’article 262 du Code des Obligations Civiles et Commerciales (COCC) présume que le possesseur de bonne
foi est propriétaire.

b – Les démembrements de la propriété

Les prérogatives reconnues par le droit de propriété peuvent être exercées par des personnes différentes. Cha-
cun détient alors un démembrement de ce droit de propriété. Ces « fragments » de la propriété sont :

- Le droit d’usage qui permet à son titulaire d’user simplement de la chose.

- L’usufruit est le droit reconnu à une personne, appelée usufruitier, d’user d’une chose et d’en recueillir
les fruits sans pouvoir en disposer, en abuser. Le véritable propriétaire, qui dispose de la prérogative d’abuser
de la chose est nommée nu propriétaire.

32
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

- Le droit de servitude fait bénéficier son titulaire d’une charge qui pèse sur le propriétaire d’un autre
immeuble pour rendre plus facile l’usage et l’utilité de son propre immeuble. Le plus courant, c’est la servitude
de passage qui permet au propriétaire d’un immeuble enclavé d’avoir un droit de passage sur l’immeuble d’un
autre pour accéder à la voie publique. Les servitudes peuvent être légales ou conventionnelle (obtenue sur la
base d’un contrat).

- Le droit de superficie confère à son titulaire un droit sur la surface du sol et les constructions qui y
sont édifiées. Par contre, le sous-sol appartient à une autre personne nommée tréfoncier.

2 – Les droits réels accessoires.

Ils n’offrent à leur titulaire qu’une garantie sur le bien objet du droit. Pour le titulaire du droit réel accessoire,
la chose sur laquelle s’exerce son droit ne constitue qu’une réserve de valeur à mettre en œuvre en cas de non
paiement par le propriétaire de cette chose. Ce sont des sûretés réelles. Il y’en a plusieurs :

a - l’hypothèque est la garantie portant sur un immeuble que le débiteur ou un tiers constitue pour
garantir le paiement de sa dette. Il s’agit d’une sûreté sans dépossession car celui qui donne la garantie conti-
nue à jouir de l’immeuble donné en garantie (celui qui donne sa maison en garantie à une banque continue
d’y habiter par exemple). Ce n’est qu’en cas de non paiement à l’échéance que le créancier est autorisé à saisir
l’immeuble pour se faire payer.

L’hypothèque peut être conventionnelle c’est-à-dire résulter de la volonté des parties. Elle peut être légale
lorsqu’une disposition de la loi oblige à la constitution d’une hypothèque pour protéger certains créanciers.
Enfin, elle peut être judiciaire par l’intervention du juge qui autorise le créancier à prendre une inscription
hypothécaire sur un immeuble du débiteur.

Le créancier qui bénéficie d’une hypothèque dispose d’un droit de préférence sur l’immeuble. On entend par
là qu’il a le droit d’être payé en priorité sur le prix de l’immeuble objet de sa garantie après la vente de celui-ci.
Il dispose également d’un droit de suite qui lui permet de poursuivre l’immeuble en quelques mains qu’il se
trouve en cas de non paiement par le débiteur.

b – Le gage est une garantie portant sur un meuble corporel (voitures, chaînes en or…) que le débiteur
remet au créancier (gage avec dépossession) ou garde par devers lui (gage sans dépossession. Le non paie-
ment de la dette à l’échéance permet au créancier de réaliser la garantie en faisant vendre la chose remise en
gage afin de se faire payer sur le prix.

c – Le nantissement : il consiste pour le débiteur à donner en garantie un meuble incorporel (fonds de


commerce, compte bancaire, droits d’associé…). Le créancier nanti dispose, comme le créancier hypothécaire
ou le créancier gagiste, d’un droit de suite et de préférence.

II – Les droits personnels

On les appelle aussi droits de créance ou obligations. Contrairement aux droits réels qui confèrent des pré-
rogatives sur des choses, les biens personnels confèrent des prérogatives envers d’autres personnes, d’autres
sujets de droit. Ce sont des liens de droit entre sujets de droit.

Dans le droit personnel ou droit de créance, deux positions sont à différentier. Celle du créancier c’est-à-dire
de celui à qui le droit permet d’exiger d’une autre personne une certaine prestation. Celle-ci peut être une
33
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
obligation de faire, de ne pas faire ou de donner. La position contraire à celle de créancier est celle de débiteur
qui est occupée par le sujet à qui incombe l’obligation de donner, de faire ou de ne pas faire.

Les droits de créance ou obligations prennent leur source tantôt dans la loi tantôt dans la convention des par-
ties. Il arrive que le législateur mette à la charge de certaines personnes, en dehors de tout contrat, une obliga-
tion envers d’autres personnes. Ces dernières deviennent les créancières des premières. Par exemple, l’article
155 du Code de la famille met à la charge des époux l’obligation de nourrir, entretenir, élever et éduquer leurs
enfants.

Mais, c’est surtout par la voie conventionnelle que les obligations naissent le plus souvent. La convention
par excellence qui fait naître ces obligations est le contrat. Il est défini comme un accord de volonté créateur
d’obligations. Par exemple, dans le contrat de vente tel que réglementé par les articles 264 et suivants du Code
des Obligations Civiles et commerciales (COCC), le vendeur contracte l’obligation de transférer la propriété
d’une chose à l’acheteur alors que ce dernier contracte l’obligation de payer un prix. Aussi, dans le contrat de
transport réglementé par les articles 641 et suivent du COCC, le voyageur a une créance envers le transpor-
teur : celle d’être déplacé d’un lieu à un autre. En revanche, la créance du transporteur sur le voyageur consiste
dans le paiement d’un prix. Le contrat de louage fait naître aussi des obligations à la charge du bailleur et
du locataire (Art. 544 du COCC) : celle qui pèse sur le locataire est de mettre les lieux ou la chose louée à la
disposition du locataire et celle qui pèse sur le locataire est de payer un loyer. Dans toutes ces hypothèses,
chacune des parties au contrat s’engage à une obligation. On parle alors de contrat synallagmatique. Il arrive
pourtant fréquemment qu’une seule partie s’engage à l’exclusion de l’autre. Ce sont les contrats unilatéraux.
Par exemple, au sens de l’article 654 du Code de la famille, le contrat de donation est un contrat unilatéral. Il
crée une obligation à la seule charge du donateur qui s’engage à transférer la propriété ou l’usufruit d’un bien
alors que le bénéficiaire ne s’engage à rien.

Chapitre II – La preuve des droits subjectifs

Les droits subjectifs n’ont de valeur juridique pour leurs titulaires que si ces derniers peuvent, à
l’occasion, en apporter la preuve. Ces titulaires peuvent être amenés à apporter cette preuve devant le juge
mais aussi devant une autorité administrative. Le régime juridique de la preuve des droits subjectifs pose trois
types d’interrogations : que faut-il prouver ? C’est la question de l’objet de la preuve (Section I). Ensuite qui
doit prouver ? Elle renvoie à la charge de la preuve (Section II). Enfin, par quels modes prouve t-on les droits
dont on est titulaire ? (Section III).

Section I – L’objet de la preuve des droits subjectifs

Le plaideur qui pose une prétention devant le juge doit-il prouver l’existence de la règle de droit objectif qui
fonde son droit ? La réponse donnée à cette question est négative puisque le juge est censé, mieux que qui-
conque, connaître les règles du droit objectif. Deux exceptions sont apportées à ce principe. La première est
que la partie qui se prévaut d’un usage doit en apporter la preuve par la production d’attestations établissant
cet usage. La seconde exception provient du fait que le juge n’est pas censé connaître la loi étrangère. Aussi, le
plaideur qui se prévaut d’une règle de droit étranger est tenu, selon l’article 830 du Code de la famille, d’ap-
porter la preuve de l’existence et du contenu de cette loi étrangère.

Si le plaideur n’est pas tenu de prouver le contenu de la règle de droit, il lui appartient cependant de prouver
que les circonstances prévues par la règle de droit objectif sont réunies. Par exemple, l’article 118 du COCC
prévoit que quiconque cause un dommage à autrui, par sa faute, est tenu de le réparer. Il n’appartient pas au
plaideur de prouver au juge l’existence de l’article 118 du COCC. Par contre, il lui faudra démontrer qu’une
personne lui a causé un dommage en commettant une faute. Ces circonstances particulières dont la preuve
doit être apportée résultent soit de faits juridiques soit d’actes juridiques dont l’existence est contestée :

34
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

***Les faits juridiques sont des événements quelconques auquel le droit attache des effets juridiques : un acci-
dent de la circulation, le baptême d’un enfant, une célébration de mariage, un crash d’avion... La preuve des
faits juridiques se fait par tous moyens : elle est libre. La réglementation de la preuve des droits subjectifs ne
se pose que pour les actes juridiques.

*** Les actes juridiques. Ce sont des manifestations de volonté auxquels la loi attache des effets juridiques. On
avait vu que ces actes pouvaient être unilatéraux lorsqu’il émane de la volonté d’une seule personne (Exp. :
testament). Ils peuvent aussi avoir un caractère bilatéral ou multilatéral lorsque deux ou plusieurs personnes
s’engagent. Ce sont les conventions dont les contrats constituent la principale modalité (contrat de vente, de
transport, de location, de mariage…)

Section II – La charge de la preuve des droits subjectifs

La demande en justice est l’acte par lequel un plaideur saisit la juge afin que ce dernier se prononcer sur le
bien fondé d’une prétention. Par exemple, celui qui revendique la propriété d’un immeuble demande au juge
de se prononcer sur la réalité de son droit de propriété.
La question de la charge de la preuve amène à se demander qui doit prouver la prétention du demandeur. Le
demandeur lui-même ? Le juge ? Le défendeur c’est-à-dire l’adversaire du demandeur ?

La question est réglée par un principe d’une certaine limpidité : la charge de la preuve incombe au deman-
deur c’est-à-dire celui qui pose une prétention en saisissant le juge. La formule latine « actori incubit proba-
tio » traduit ce principe. Les dispositions de l’article 9 du COCC sont assez édifiantes de ce point de vue en
prévoyant que « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit en apporter la preuve ».

Le défendeur peut avoir deux comportements. D’abord, il remet en cause l’existence de l’obligation même
dont le demandeur demande exécution (Exp : X demande à Y le paiement d’une somme de 50 000 frs qu’il lui
avait prêtée. Y prétend qu’il n’a jamais emprunté de l’argent à X = la charge de la preuve pèse sur X qui doit
prouver l’existence du prêt de 50 000 frs). Ensuite, Y peut se défendre en estimant que la somme de 50 000
qu’il avait empruntée à X a déjà été payée. Dans ce cas, il pose une nouvelle prétention qu’il doit lui-même
prouver. En ce sens, l’article 9 alinéa 2 du COCC dispose que « celui qui se prétend libéré doit prouver que
l’obligation est inexistante ou éteinte »
Il arrive pourtant que le législateur, venant au secours du demandeur, veuille l’ « aider » dans la production
de la preuve en posant une présomption légale à son profit. La présomption légale est un fait inconnu que la
loi tire d’un fait connu qui rend vraisemblable le fait inconnu. L’article 262 du COCC présume par exemple
qu’en matière de meubles, le possesseur de bonne foi est propriétaire. Le fait connu ici est qu’une personne
possède un meuble c’est-à-dire qu’elle le détient et se comporte comme un propriétaire et qu’elle est de bonne
foi. De ce fait connu, la loi pose un autre fait : il est propriétaire. Le possesseur de bonne foi qui prétend être
propriétaire du bien meuble est donc dispensé d’apporter cette preuve puisque la loi pose une présomption
à son profit, apporte la preuve à sa place. Il appartient à son adversaire de prouver qu’il n’est pas propriétaire.
On voit donc que la présomption légale produit un renversement de la charge de la preuve. Pour celui qui
profite de la présomption, l’article 10 du COCC dit qu’il bénéficie d’une dispense de preuve.
Lorsque, comme dans l’exemple de l’article 262 COCC, le défendeur peut essayer de montrer le contraire, de
détruire la présomption, on dit que la présomption est simple. Dans le cas contraire, elle est dite irréfragable :
le fait que la loi pose ne peut être remis en cause.

Le procès civil est un procès de type accusatoire : il est l’affaire des parties contrairement au procès pénal
qui est de nature inquisitoire (l’Etat y prend une place prépondérante et organise la recherche des preuves).
Pourtant, même dans le procès civil, La production de la preuve n’est pas seulement l’affaire des parties. Le
juge participe à cette production. Il lui est permis en effet de poser des questions aux parties, de leur faire des
injonctions, d’ordonner des enquêtes, perquisitions, expertises, pour tenter de déceler la vérité. Cette partici-
pation du juge ne doit pas cependant faire oublier que la preuve est avant tout l’affaire des plaideurs car le juge
35
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
n’est jamais obligé d’ordonner les mesures précitées.

Section III – Les modes de preuve des droits subjectifs

Les modes de preuve renvoient aux techniques et méthodes en vue d’établir la véracité des faits et actes juri-
diques. L’article 12 du Code des Obligations Civiles et commerciales cite, de façon limitative, les modes de
preuve admis en droit sénégalais. Il s’agit de l’écrit, du témoignage, des présomptions du fait de l’homme, de
l’aveu judiciaire et du serment. Il convient de les étudier successivement.

I - la preuve par écrit

On dit aussi preuve littérale. On verra dàbord la forme de l’écrit (A), le domaine de la preuve écrite (B), et
enfin la valeur de l’écrit comme mode de preuve (C).

A – Les formes de l’écrit

L’écrit peut être authentique ou sous seing privé (sous signatures privées). L’acte authentique est celui qui a
été reçu par un officier public compétent instrumentant dans les formes requises par la loi. Cet officier public
peut être un notaire, consul, officier d’état civil… au contraire de l’acte authentique, l’acte sous seing privé ou
sous signatures privées est celui qui n’a pas été reçu par un tel officier public. Il est établi par les parties elles-
mêmes.

Au Sénégal comme ailleurs, l’électronique a bouleversé la conception de la preuve écrite. On s’est pendant
longtemps demandé si les documents établis et envoyés directement par ordinateurs pouvaient constituer des
preuves écrites. Aussi, la question de savoir si on pouvait valablement signer par une forme non manuscrite
s’est posée. Il est reconnu aujourd’hui, en droit sénégalais, que l’écrit électronique vaut preuve écrite lorsque le
mécanisme utilisé permet l’identification de la personne qui s’engage et permet une conservation du contenu
de l’écrit. La signature électronique est bien recevable par exemple par le fait de taper ou d’écrire un mot de
passe sur internet ou un code confidentiel dans un guichet automatique de banque.

B – L’exigence de l’écrit comme mode de preuve

L’article 14 du COCC dispose que « il doit être passé acte devant notaire ou sous signatures privées de toute
convention dont l’objet excède 20 000 frs ». Ce principe conduit à affirmer que l’écrit est le mode de preuve
des actes juridiques. Par contre, concernant les faits juridiques, leur preuve est libre. Ils peuvent être prouvés
par tous moyens. La nécessité de la pré constitution d’un écrit pour la preuve d’un acte juridique reçoit cepen-
dant parfois exception :

***la première exception découle des termes même de la loi. L’écrit n’est pas indispensable lorsque l’objet de
l’acte est inférieur à 20 000 frs (achat d’un pantalon à 14 000frs).

***l’acte juridique peut être prouvé par d’autres modes de preuve lorsque les parties étaient dans l’impossi-
bilité de se procurer un écrit. Cette impossibilité peut être morale lorsqu’il existe notamment entre les parties
des relations familiales proches ou amicales. L’impossibilité morale est laissée à l’appréciation souveraine
du juge saisi de l’affaire. Elle peut être aussi matérielle. C’est le cas lorsque des circonstances exceptionnelles
empêchent aux parties de rédiger un écrit (inondation, naufrage, incendie…).
36
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

***L’acte juridique dont l’objet est supérieur à 20 000 frs peut encore être prouvé par témoignage ou serment
lorsqu’il existe déjà un commencement de preuve par écrit. Le commencement de preuve par écrit corres-
pond à tout écrit qui rend vraisemblable le fait allégué et qui émane de celui contre qui on l’oppose. Il peut
s’agir d’une lettre, des pages d’un journal intime…

***En matière commerciale, la nécessité de l’écrit s’efface. Les commerçants, dans le cadre de leurs affaires,
sont autorisés à prouver leurs conventions par les autres modes de preuve même lorsque l’objet du litige
dépasse 20 000 frs. La règle ne joue cependant que lorsque le litige oppose deux commerçants qui agissent
dans le cadre de leurs affaires.

C - La valeur juridique de la preuve écrite

La force probante de l’écrit varie selon qu’il s’agit d’un acte authentique ou d’un acte sous signatures privées.
***L’acte authentique, reçu par un officier public, fait foi erga omnes c’est-à-dire à l’égard de tous (parties au
procès, juge, administration…). Cette force très grande attachée à l’acte authentique ne vaut cependant que
pour le contenu de l’acte que l’officier de l’Etat civil a fait ou constaté lui-même. Pour ce qu’il n’a pas constaté
lui-même, l’acte ne vaut que jusqu’à preuve du contraire (Exp/ les parties à un contrat de vente déclare chez le
notaire que le prix de la villa à vendre a déjà été versé au vendeur par l’acheteur = le notaire n’a pas constaté le
versement de ce prix).

Une partie peut cependant remettre en cause la validité de l’acte authentique en utilisant une procédure très
complexe, celle de l’inscription en faux. Il faudra alors démontrer que l’acte, bien qu’étant reçu par un officier
public, n’a pas été signé par cette partie, comporte des énonciations fausses ou que l’officier n’était pas compé-
tent pour le recevoir. Du fait de la confiance que notre droit accorde aux officiers publics, cette procédure est
rarissime et aboutit rarement.

***L’acte sous signatures privées, selon l’article 23 du COCC, fait foi à l’égard de tous jusqu’à preuve du
contraire. Il faut cependant qu’il contienne les signatures des parties qui se sont engagées et que la partie illet-
trée ait été assistée par deux témoins lettrés qui attestent que le contenu de l’acte lui a été précisé. L’acte doit
aussi être établi en autant d’exemplaires qu’il y’a de parties qui s’engagent et ayant des intérêts différents : c’est
la formalité du double. Par contre, lorsqu’une seule partie s’engage dans l’acte, la signature de cette personne
est nécessaire ainsi que le montant de son engagement mais l’acte peut être établi en un seul exemplaire.
Pourtant, même lorsque ces conditions sont réunies, une partie peut remettre en cause la validité de l’acte
sous signatures privées. Le juge peut alors ordonner une procédure en vérification d’écriture par laquelle des
experts tentent de vérifier si les signatures figurant sur l’acte et le contenu de l’acte sont originaux ou non.

La preuve écrite, dit-on, est la « reine des preuves ». Outre les cas exceptionnels d’inscription en faux et de
vérification d’écriture, la partie qui fonde ses revendications sur une preuve écrite gagne presque toujours
son procès. La preuve par écrit lie le juge c’est-à-dire que le juge est tenu de donner crédit aux énonciations
d’un écrit lorsque les conditions de validité de l’acte ont été respectées par les parties : on dit que l’écrit est une
preuve parfaite.

II – Le témoignage

La preuve par témoignage est celle tirée des déclarations d’une ou plusieurs personnes qui attestent de la
véracité d’un fait pour y avoir assisté ou en avoir eu directement connaissance. La preuve par témoignage a
toujours suscité une certaine réserve du législateur. Cette réserve se manifeste dàbord à travers la règle selon
laquelle le témoignage n’est jamais recevable contre et outre le contenu d’un écrit. Le juge ne peut donc faire
prévaloir le contenu d’un témoignage sur celui d’un écrit. La méfiance du législateur envers le témoignage
37
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
se manifeste aussi par le fait que la recevabilité du témoignage est laissée à la discrétion des juges. Ceux-ci,
analysant les circonstances, l’identité du témoin, les éléments du dossier, peuvent l’accepter comme mode de
preuve ou le rejeter.
En tous états de cause, le témoignage n’est jamais admissible dans les cas où la loi rend obligatoire une preuve
écrite. Cela veut dire que les parties ne sont alors même pas autorisées à tenter de prouver leurs prétentions
par témoignage. Lorsque le témoignage est admissible, la question de sa recevabilité se pose. Cette recevabi-
lité, c’est-à-dire le fait que le juge considère comme vraies les déclarations des témoins, est laissée à l’apprécia-
tion du juge. Cela en fait une preuve imparfaite : le témoignage ne lie pas le juge qui peut le rejeter.

III – L’aveu et le serment

L’aveu est la reconnaissance, par une partie, des faits allégués contre elle. On distingue deux catégories d’aveu.
L’aveu judiciaire est celui fait par une partie ou son représentant devant le juge lui-même. Il est recevable en
toute matière et du fait qu’il est fait devant le juge, il fait pleine foi contre celui dont il émane. Le juge est tenu
de considérer les faits et actes avoués comme établis.

Il en va autrement lorsqu’on est en face d’un aveu extrajudiciaire. C’est celui qui n’a pas été fait devant le juge.
Sa valeur probante est beaucoup moins affirmée. Il ne lie pas le juge qui le considère comme une simple pré-
somption du fait de l’homme. Autant dire que sa recevabilité est laissée à la discrétion du magistrat.

Le serment est la déclaration solennelle d’un plaideur devant le juge et affirmant le bien fondé de sa préten-
tion. C’est le serment décisoire. Un plaideur défère le serment à son adversaire c’est-à-dire lui demande de
jurer solennellement que ses prétentions sont vraies. Une convention passée entre les parties devant le juge
réglemente la forme du serment ainsi que sa force probante. Le serment est utilisé souvent par le plaideur qui
n’a vraiment plus aucun moyen de preuve. Le serment met celui qui le défère à la merci de son adversaire. En
effet, si ce dernier accepte de prêter serment, celui qui lui a déféré le serment perd le procès. En effet, le ser-
ment lie le juge. Par contre, si cette partie refuse de prêter serment, la loi considère ce refus comme un aveu
de l’inexactitude de ses prétentions à moins qu’elle ne défère à nouveau le serment à son adversaire.

IV – Les présomptions du fait de l’homme

Tous les autres modes de preuve sont extérieurs au juge car ils sont produits par les parties. Il en est autre-
ment des présomptions du fait de l’homme. Par elles, le juge établit un certain nombre de concordances, de
raisonnements, de déductions à partir des éléments du dossier pour fonder sa conviction. Les présomptions
du fait de l’homme doivent se fonder sur des faits graves, précis et concordants. Le COCC interdit cependant
au juge d’avoir recours aux présomptions du fait de l’homme chaque fois que la loi rend obligatoire la pré
constitution d’une preuve (Art. 29 du COCC). Il en va ainsi chaque fois que l’acte juridique qui fait l’objet du
litige a un objet supérieur à 20 000 frs, l’écrit étant nécessaire. Même dans les hypothèses où cette pré consti-
tution n’est pas obligatoire, la présomption du fait de l’homme ne pourra prévaloir sur le contenu d’un écrit.

Les pouvoirs détenus par le juge en matière de preuve dépendent donc largement du mode de preuve dont il
s’agit. Lorsque la preuve des droits subjectifs est apportée par écrit, ces pouvoirs du juge se limitent à vérifier
la validité de l’écrit notamment si toutes les mentions et les signatures des parties y figurent. Lorsque l’acte est
valable, le juge est tenu de considérer son contenu comme établi. Aussi, le juge dispose de peu de pouvoirs
lorsque l’une des parties fait un aveu judiciaire ou défère le serment à son adversaire. Le juge est lié par le
contenu de l’aveu judiciaire ou les faits sur lesquels l’adversaire a prêté serment. Ces modes de preuve sont
dits parfaits.

Le rôle du juge devient différent lorsqu’une des parties tente de prouver ses droits par présomptions du fait
de l’homme, par témoignage, ou par aveu extrajudiciaire. Dans ces hypothèses, le juge dispose d’un véritable
pouvoir d’appréciation qui lui permet de considérer les faits et droits comme établis ou non au vu des élé-
38
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

ments présentés. La force probante de ces autres modes de preuve est dit-on « laissée à la discrétion du juge ».
Ces modes de preuve sont dits imparfaits

On y ajoute que le juge dispose, comme cela a déjà été indiqué, du pouvoir de poser des questions aux parties,
de leur faire des injonctions, d’ordonner des enquêtes, des confrontations, designer des experts. En conclu-
sion, le rôle du juge en matière de preuve des droits subjectifs est diversifié mais déterminant.

CHAPITRE III – La transmission et l’extinction des droits subjectifs

Les droits, comme les biens, sont destinés à une certaine « circulation ». Leur transmission est la technique
principale qui assure cette circulation (Section I). Aussi, à l’exception de quelques rares droits ayant un
caractère éternel, la grande majorité des droits s’épuise avec leur usage. Lorsque le droit n’existe plus, on parle
d’extinction (Section II).

Section I - La transmission des droits subjectifs



Les modes de transmission sont nombreux. On peut utiliser de multiples critères pour le classer. Nous choi-
sissons de les traiter en distinguant les modes non conventionnels (I) de transmission et les modes conven-
tionnels de transmission (II)

I – Les modes non conventionnels de transmission

Ils ne nécessitent pas un accord de volonté entre la personne qui transmet et celle qui reçoit. Il s’agit de la
transmission par voie successorale et de la subrogation légale.

A- La succession

C’est le seul mode de transmission du patrimoine des personnes physiques dans son entier. Lorsqu’une
personne décède, son patrimoine est dévolu à ses héritiers c’est-à-dire les personnes que la loi appelle à la
succession à défaut de testament. Le testament est un acte juridique unilatéral, donc qui manifeste une seule
volonté : celle par laquelle une personne physique organise, de son vivant, la dévolution de ses biens et droits
à d’autres personnes. Lorsque la personne décédée, appelée de cujus, avait prévu un testament, ceux qui lui
succèdent sont nommés légataires.

Les « ayants cause universels » sont ceux qui reçoivent la totalité du patrimoine du de cujus. Lorsque ces
personnes reçoivent chacune une fraction du patrimoine, comme le tiers ou la moitié, le droit les nomme «
ayants cause à titre universel ». Enfin, ceux qui sont désignés pour recevoir un ou plusieurs biens particuliers
sont des « ayants cause à titre particulier ».

Qu’il y’ait testament ou non, la dévolution successorale a pour effet la transmission du patrimoine ou d’une
partie du patrimoine à d’autres personnes.

B - La subrogation légale

Par la technique de la subrogation légale, la loi permet de substituer à un créancier originaire un autre créan-
cier ayant payé à la place du débiteur. L’exemple le plus courant est celui de la compagnie d’assurance qui,
après avoir indemnisé la victime, est subrogée dans les droits de cette dernière pour agir en justice contre
celui qui a causé le dommage. Celui qui reçoit paiement est la subrogeant et celui qui a payé est le subrogé. (Il
acquiert la créance avec tous ses accessoires, avantages et dans la limite de ce qu’il a payé).

II – Les modes conventionnels de transmission des droits


39
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
Ces modes manifestent la présence d’un véritable accord de volonté précédant la transmission des droits sub-
jectifs. Ils sont beaucoup plus nombreux que les modes non conventionnels.

A- La cession de créance

C’est l’hypothèse la plus simple. Une personne détenant un droit personnel envers une autre personne, passe
une convention avec une autre personne pour lui céder cette créance. La personne qui était titulaire, à l’ori-
gine de la créance, est appelée cédant. Celle à qui on transmet la créance est nommée cessionnaire. Enfin,
celle qui était tenu envers le cédant et qui est désormais tenue envers le cessionnaire est nommée « le cédé
». La cession de créance n’exige pas de formalités particulières sinon la notification de la cession au débiteur
cédé c’est-à-dire son information sur l’opération.

B - La cession de contrat

Elle opère une substitution de position contractuelle. Une personne transmet à une autre l’ensemble des
obligations et prérogatives qu’elle avait en vertu d’un contrat qui le liait à une autre personne. Contraire-
ment à la cession de créance, la cession de contrat nécessité le consentement écrit du co-contractant cédé. Le
cessionnaire, c’est-à-dire celui qui prend la position du cédant, ne peut prétendre avoir plus de droits que n’en
avait le cédant.

C - La subrogation conventionnelle

On avait déjà défini la subrogation comme la technique par laquelle une personne qui a déjà payé prend la
place de cette dernière. Contrairement à la subrogation légale qui est celle prévue par la loi, la subrogation
conventionnelle, quant à elle, découle de la convention des parties. (Le subrogeant ne garantit pas la solvabi-
lité du débiteur).

D - La délégation

Un créancier, le délégant, demande à son débiteur, le délégué, d’exécuter l’obligation dont il est tenue à son
égard, envers une troisième personne, le délégataire. La délégation peut être parfaite ou imparfaite. Dans le
premier cas, le délégant est libéré vis-à-vis du délégataire. Dans le second cas, il est toujours tenu vis-à-vis de
ce dernier malgré l’engagement du délégué.

Section II – L’extinction des droits subjectifs.

Certaines causes d’extinction procèdent de la volonté des parties (I), d’autres sont indépendantes de cette
volonté (II).

I – Les causes d’extinction liées à la volonté des parties

*** Le paiement : c’est certainement le mode d’extinction le plus courant. Le paiement en droit, c’est l’exécu-
tion de l’obligation par le débiteur. L’entrepreneur qui construit une maison selon les prévisions d’un contrat
paie comme celui qui achète un bien et remet le prix au vendeur paie aussi.

*** La renonciation est l’acte par lequel le titulaire d’un droit y renonce volontairement c’est-à-dire déclare
sa volonté de ne plus l’exercer. Elle est possible pour les droits patrimoniaux et non ceux ayant un caractère
extrapatrimonial.

***La remise de dette : Convention par laquelle les parties le créancier libère son débiteur de tout ou partie
40
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

de sa dette sans avoir reçu paiement. A la différence de la renonciation, elle peut porter sur une partie seule-
ment du droit.

***La novation : c’est la substitution conventionnelle d’une obligation par une autre. Par exemple, les parties
un transporteur tenu de transporter des personnes à Tambacounda convient avec ces dernières que le trans-
port se fera désormais sur Touba.

*** La dation en paiement : c’est l’hypothèse où le créancier reçoit en paiement une chose autre que la chose
due. L’obligation portant sur la première chose est éteinte.

*** La compensation : dans le cas particulier où deux personnes sont créancières et débitrices l’une de
l’autre, la compensation éteint les deux dettes à concurrence de la plus faible. Les deux obligations doivent
être liquides c’est-à-dire susceptibles d’être évaluées en argent et être toutes deux exigibles c’est-à-dire arrivées
à terme. (Article 215 du COCC : « La compensation n’a lieu qu’entre dettes de sommes d’argent ou de choses
fongibles, liquides, exigibles et saisissables »)

***L’arrivée du terme : lorsque l’exécution de l’obligation était liée à un terme prévue à l’avance par les par-
ties, son arrivée éteint l’obligation. Le terme est un événement futur et certain dont l’arrivée éteint l’obligation
(terme extinctif) ou rend exigible l’exécution de l’obligation (terme suspensif). Seul le terme extinctif consti-
tue un mode d’extinction des droits subjectifs.

II – Les causes d’extinction indépendantes de la volonté des parties

Elles concernent des hypothèses où le droit subjectif disparaît alors que les parties n’en avaient pas décidé
ainsi :

***L’impossibilité d’exécution : « à l’impossible nul n’est tenu » dit-on dans le langage courant. Cela est aussi
vrai en droit. Lorsque l’obligation est impossible à exécuter, elle est éteinte. Il doit s’agir cependant d’une véri-
table impossibilité c’est-à-dire qui ne résulte pas de la faute du débiteur mais d’un événement qu’on ne pouvait
prévoir et que l’on ne peut surmonter.

*** La confusion : elle est présente lorsque les qualités de créancier et de débiteur se retrouvent sur la tête
d’une même personne. Par exemple : le débiteur hérite de son propre créancier. Il devient débiteur et créan-
cier de lui-même ce qui conduit à éteindre la dette.

*** La prescription extinctive : notre droit prévoit parfois un certain délai pendant lequel le droit doit être
exercé. Au-delà de ce délai, on dit que le droit est prescrit, il est éteint : c’est la prescription extinctive ou
libératoire. Par exemple, en droit du travail, l’article L. 126 du Code du travail prévoit que les créances sur les
salaires doivent être réclamées par les travailleurs à leurs employeurs ou au juge dans un délai de 5 ans. Au-
delà, elles sont éteintes.

CHAPITRE IV – Les titulaires des droits subjectifs : les personnes juridiques

Nous avons vu, à travers nos développements, que l’ordre juridique est constitué d’une somme de règles
reconnaissant des droits et imposant des obligations. Ceux à qui sont destinés ces droits et obligations sont
les sujets de droit. La personnalité juridique manifeste la reconnaissance, par notre droit, de la qualité de sujet
de droit. Les personnes juridiques ou sujets de droit sont donc ceux à qui le droit reconnaît la personnalité
juridique. L’étude de la personnalité juridique soulève deux interrogations : celle de son acquisition et celle de
sa perte
41
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
Section I – L’acquisition de la personnalité juridique

Les modes d’acquisition diffèrent selon que le sujet de droit est une personne physique (I) ou morale (II).
I – Les personnes physiques

Tout homme acquiert, en naissant, la personnalité juridique. Tout homme naît « sujet de droit ». L’article 1er
du Code sénégalais de la famille traduit très bien cette réalité en précisant que « la personnalité commence à
la naissance et cesse au décès ». La personnalité juridique s’attache donc à la personne de façon automatique,
elle est indisponible : son existence ne dépend ni de la volonté de l’individu lui-même encore moins celle de
l’Etat ou des autres individus. L’affirmation selon laquelle la personnalité juridique commence à la naissance
laisse supposer que le fœtus, scientifiquement dénommé embryon, ne disposerait pas de la personnalité
juridique. Une telle conclusion serait fausse car l’alinéa 2 du même article 1er ajoute que l’enfant peut acquérir
des droits du jour de sa conception s’il naît vivant.

Remarquons que la loi ne parle que de l’acquisition de droits et non d’obligations. Les dispositions de l’alinéa
2 sont d’un grand intérêt en matière successorale et de donation. On voit donc que lorsque l’enfant né vivant,
c’est-à-dire respire complètement après l’accouchement, le droit sénégalais considère de façon rétroactive
qu’il avait la personnalité juridique dés sa conception. Ainsi, il peut succéder de son père décédé avant sa
naissance ou recevoir les biens et droits dont d‘autres sujets de droits lui ont fait donation avant sa naissance.
Notre droit situe cette conception entre le 300e jour et le 180e jour de la naissance

II – Les personnes morales

Contrairement aux personnes physiques, qui ont une réalité matérielle, les personnes morales sont des sujets
de droits qui n’ont point une matérialité concrète. Il n’est point possible de déjeuner avec l’Etat du Sénégal, la
SENELEC, la SONATEL ou la Société Générale de Banques du Sénégal (SGBS) ni de leur serrer la main. Les
personnes morales sont des groupements de personnes à qui le droit reconnaît la personnalité juridique. Cer-
taines d’entre elles sont des personnes morales de droit public. C’est le cas de l’Etat du Sénégal, des collectivi-
tés territoriales (mairies, communes…) mais aussi de certains démembrements de l’Etat (UCAD, La Poste…).

D’autres personnes morales sont de droit privé. Ce sont principalement les sociétés et les associations. Leur
critère de distinction, selon l’article 764 du Code des Obligations Civiles et Commerciales, réside dans la
poursuite ou non d’un but lucratif. Selon la loi sénégalaise, « la société civile est le contrat par lequel deux ou
plusieurs personnes mettent en commun des apports et constituent une personne morale pour les exploiter et
se partager les profits ou les pertes qui résultent de cette activité ». L’association est définie comme « le contrat
par lequel deux ou plusieurs personnes mettent en commun leur activité et, au besoin, certains biens, dans un
but déterminé autre que le partage de bénéfices » (art. 811 du COCC). L’article 763 du COCC reconnaît aux
sociétés et associations la personnalité morale qui leur confère la qualité de sujet de droit. Cette reconnais-
sance leur donne, à l’image des personnes physiques, l’aptitude à avoir des droits, acquérir des biens, signer
des conventions, être soumises à des obligations….

L’octroi de la personnalité juridique pour les personnes morales peut requérir des formalités particulières
comme une autorisation administrative (syndicats). D’autres fois, cette personnalité juridique n’est opposable
aux tiers qu’après l’immatriculation au registre du commerce et du crédit mobilier (sociétés commerciales)
ou dans un journal d’annonces légales. N’ayant pas une réalité physique, les personnes morales agissent par la
voix de leurs représentants appelées selon le cas « gérants », « administrateurs », « dirigeants sociaux »…

Section II – La perte de la personnalité juridique


42
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

Les règles sont encore différentes selon que la personne en présence est une personne physique (I) ou morale
(II).

I – la perte de la personnalité juridique pour les personnes physiques

Pour les personnes physiques, le décès, procédant le plus souvent de la mort, constitue le mode unique de
perte de la personnalité juridique (A). Parfois cependant, une incertitude peut exister sur le fait de savoir si
l’individu est mort ou non. Lorsqu’on a plus de nouvelles d’une personne, le droit établit une procédure qui
peut aboutir à déclarer l’individu décédé alors même que son corps n’a pas été retrouvé. Ces personnes, sans
être mortes avec certitude, sont considérées comme décédées. C’est la question de l’absence et de la dispari-
tion que notre droit réglemente de façon originale (B).

A – La mort

Étant attachée à la vie de l’être humain, chaque individu conserve sa personnalité juridique jusqu’à sa mort.
La mort établit le décès avec certitude du fait de sa constatation sur le cadavre du de cujus (personne décé-
dée).

Parfois, les prérogatives qui résultent de la personnalité juridique peuvent être atténuées. Pourtant, la person-
nalité juridique elle-même ne disparaît jamais du vivant de la personne. Les mineurs et les majeurs incapables
peuvent voir leur capacité d’exercice atténué : ils ne peuvent exercer eux-mêmes les droits que la loi reconnaît
aux personnes juridiques (vendre, acheter…). Pour d’autres personnes, c’est la capacité de jouissance c’est-
à-dire l’aptitude à acquérir des droits qui est atténuée. Par exemple, la condamnation pour certains crimes
s’accompagne d’une perte des droits civiques et politiques. Pourtant, dans toutes ces hypothèses, la personna-
lité juridique subsiste toujours. Elle ne disparaît qu’avec la mort.

B – Les incertitudes sur l’existence

Deux hypothèses sont envisagées par le droit sénégalais et qui manifestent cette incertitude : l’absence (1) et la
disparition (2).

1– L’absence

L’absent est défini par l’article 16 du Code de la famille comme « la personne dont le manque de nouvelles
rend l’existence incertaine ». On remarque d’ores et déjà que le Code de la famille évoque un manque de
nouvelles sans s’intéresser à la cause de celui-ci. L’absence ne manque pas de poser un certain nombre de
difficultés en droit pour au moins deux raisons : l’individu n’étant plus présent, la question de la gestion de
son patrimoine se pose mais aussi celle de sa famille. Aussi, l’absence fait planer une incertitude sur le fait de
savoir si celui dont on a plus de nouvelles est toujours vivant ou non. La manière que le législateur a de régler
ces questions manifeste un certain espoir de ce dernier que l’absent n’est pas encore mort.

a – Du manque de nouvelles à la déclaration de décès

On constate la multiplication et la longueur des procédures devant conduire à déclarer l’absent décédé. Cette
multiplicité des procédures manifeste l’espoir qu’a le législateur que l’individu est encore en vie.

43
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL
SUPPORT DE COURS UVS 2014 LICENCE 1 SJP
Lorsque les dernières nouvelles remontent à plus d’un an, tout intéressé, et le ministère public, peut former
une demande de déclaration de présomption d’absence devant le Tribunal de première instance du dernier
domicile de l’absent. La loi ordonne que le parquet diligente une enquête sur le sort de l’absent et une publica-
tion par voie de presse écrite, radiodiffusée… la déclaration de présomption d’absence ne peut être prononcée
par le juge avant un délai d’un an à compter du dépôt de la demande. Il faut alors attendre un autre délai de
deux ans pour pouvoir déposer une demande de déclaration d’absence. Le juge considère une seconde fois
les éléments en cause pour déclarer ou non l’absence. L’individu n’est plus alors présumé absent mais déclaré
absent et considéré comme tel.

Le manque de nouvelles peut aller plus loin. Dix ans après les dernières nouvelles, une demande de déclara-
tion de décès peut être déposée par tout intéressé. Il s’agit du délai au-delà duquel notre droit estime qu’il y
a très peu de chances que l’individu soit encore en vie. Pour autant, le juge ne peut rendre une ordonnance
de déclaration de décès sans une enquête complémentaire du parquet. C’est seulement sur le fondement des
résultats pessimistes de celle-ci qu’il peut prononcer une déclaration de décès. La déclaration de décès est
transcrite sur les registres de l’état civil et ouvre la succession de l’absent.

b – La gestion des biens et de la famille de l’absent.

La personne dont on est resté sans nouvelle, l’absent, a pu laisser des biens, des enfants, un conjoint…

***Dès le dépôt de la demande de déclaration de présomption d’absence, le juge nomme un administra-


teur provisoire des biens de l’absent (un tiers, son conjoint, un parent choisi par le juge, un ami que l’absent
avait désigné…). L’administrateur provisoire gère les biens de l’absent sous le contrôle du juge. Jusqu’au pro-
noncé de la déclaration d’absence, il ne peut accomplir seul que des actes d’administration c’est-à-dire ceux
qui ne font pas sortir des biens du patrimoine de l’absent. Les actes de disposition étant subordonnés à l’auto-
risation du juge. A compter de la déclaration d’absence, il lui est permis d’accomplir des actes de disposition.

La déclaration de décès de l’absent ouvre sa succession et opère la transmission de son patrimoine à ses
héritiers. Lorsque l’absent réapparaît après la déclaration de décès, il reprend ses biens mais dans l’état où il
les trouve (restitution des biens dévolus par la succession) mais ne peut revendiquer ceux qui ont été aliénés
(vendus) régulièrement.

***Jusqu’à la déclaration d’absence, le manque de nouvelles ne produit aucun effet sur le sort du mariage de
l’absent. Par contre, le jugement déclaratif d’absence donne au conjoint de l’absent le droit de demander le
divorce pour cause d’absence. Lorsque l’absent réapparaît alors que le divorce a déjà été prononcé, aussi bien
le divorce que le nouveau mariage lui sont opposables.

***Enfin, le sort des enfants de l’absent est pris en compte par les règles de l’administration légale et de la
tutelle. La tutelle renvoie à la désignation, par le juge, d’une personne autre que le conjoint de l’absent, char-
gée de s’occuper de la personne et des biens de l’enfant. L’administration légale consiste à nommer une per-
sonne s’occupant de la gestion des biens de l’absent. L’administration légale revient en principe à la personne
qui exerce la puissance paternelle sur l’enfant, souvent le conjoint de l’absent. Comme pour l’administration
des biens de l’absent, la mise ne œuvre des régimes de tutelle et d’administration légale se fait sous le contrôle
étroit du juge. La réapparition de l’absent met immédiatement fin à ces régimes de protection.

2 – La disparition

Son régime juridique est moins formaliste, moins procédurale que celui de l’absence. Le disparu est la per-
sonne dont « l’absence s’est produite dans des circonstances mettant sa vie en danger sans que son corps ait pu
être retrouvé ». A la différence de l’absence, la disparition se caractérise donc par la constatation de circons-
tances qui laissent peu de chance à la survie de la personne (incendie, naufrage, crash d’avion, inondation…).
44
VERSION 1.0
Université Virtuelle du SENEGAL – Support de cours version imprimable Octobre 2014
SJP LICENCE 1 SUPPORT DE COURS UVS 2014

De ces circonstances particulières, la loi fait plus un « pari » sur la mort de l’individu que sur sa survie. Cette
présomption de mort influence tout le régime juridique de la disparition.

Contrairement à l’absence, il n’y a, pour la disparition, ni déclaration de présomption de disparition ni décla-


ration de disparition. La multiplicité des procédures est évitée car le droit considère l’individu comme certai-
nement décédé. L’unique procédure est alors la demande de déclaration de décès. L’affaire est instruite sans
que le juge ne soit tenu de diligenter une enquête administrative sur le sort du disparu. Rien ne lui interdit
cependant de le faire s’il estime ne pas avoir des éléments d’information suffisants.

Comme pour l’absence, le prononcé du jugement de décès est transcrit sur les registres de l’état civil. Elle
ouvre la succession du disparu. Le jugement doit nécessairement fixer une date pour le décès. Celle-ci doit
être fixée en tenant compte des éléments du dossier ou, en cas de difficultés, fixée au jour de la disparition.
Comme l’absent, le disparu peut réapparaître après la déclaration de décès. Il se trouve dans la même situa-
tion que l’absent qui revient : il récupère ses biens dans l’état où il les trouve. Le divorce ou le remariage de
son conjoint lui sont opposables.

45
VERSION 1.0
Octobre 2014 Université Virtuelle du SENEGAL

Vous aimerez peut-être aussi