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Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche

Université Saad Dahleb - Faculté de médecine de Blida


Cours de neurologie – 4ème année médecine (2021/2022)
Dr S.Bekouaci : maitre de conférence.

Les tumeurs cérébrales


I- Définition, nosologie :
Les tumeurs cérébrales peuvent être séparées en tumeurs dites “primitives”
(qui se développent à partir des cellules du cerveau lui-même) et tumeurs
“secondaires” qui correspondent à des métastases (cellules en provenance
d’une tumeur située ailleurs dans l’organisme). Ainsi, on distingue:
*Les tumeurs intracrâniennes primitives: provenant des cellules et des tissus
du système nerveux central (SNC) et de ses annexes, pouvant être bénignes ou
malignes. (voir tableaux)
*Les métastases : peuvent concerner le parenchyme cérébral
(encéphale/cervelet) et/ou les méninges. Elles peuvent être révélatrices, ou
découvertes lors d’un bilan d’extension d’une tumeur primitive connue
(métastases synchrones) ou survenir au cours de l’évolution d’un cancer connu
(métastases métachrones)
Les cancers qui métastasent le plus souvent au cerveau sont : les cancers du
poumon, du sein, du rein et les mélanomes.

II-Epidémiologie :
*Pour les tumeurs primitives du SNC: ceux sont des tumeurs rares (1.2% des
cancers).
Chez l’adulte, les gliomes sont les tumeurs les plus fréquentes suivis des
méningiomes.
Chez l’enfant, les TC sont les cancers les plus fréquents après les leucémies.
Les tumeurs cérébrales les plus fréquentes chez l’enfant sont les astrocytomes,
les médulloblastomes et les épendymomes.
*Pour les métastases: il est difficile de donner des chiffres précis pour les
métastases.
Les métastases du SNC intéressent moins de 20% des cancers.
Tumeur Cellule d’origine Localisation privilégiée
Gliomes de grade I Astrocytes Parenchyme cérébral ou
(pilocytaire),II(bas (astrocytomes) cérébelleux
grade),III (anaplasique) Oligodendrocytes
ou IV (glioblastome) (oligodendrogliome)

méningiome Cellules arachnoidiennes Méninges (cortex, tente,


base du crane)
Tumeurs épendymaires Cellules épendymaires Parois ventriculaires
(ependymomes) tapissant les cavités du
SNC
Tumeurs pinéales Parenchyme pinéal Région pinéale
Médulloblastome et Cellules embryonnaires Cervelet
autres tumeurs
embryonnaires
Schwannome Gaine des nerfs Neurinome du VIII

Principales tumeurs primitives intracrâniennes et leur origine : Tumeurs des


tissus nerveux et des annexes

Tumeur Cellules d’origine Localisations


privilégiées
Lymphome cérébral Tissu lymphoide Sus et sous-tentoriel

Germinome Cellules germinales Pinéale


totipotentes
Adénome hypophysaire Parenchyme Hypophyse
hypophysaire

Principales tumeurs primitives intracrâniennes et leur origine : Tumeurs


d’autres tissus

III-Physiopathologie :
Les causes des tumeurs cérébrales primitives sont souvent inconnues.
Une susceptibilité génétique est observée dans certains syndromes
héréditaires (phacomatoses) : neurofibromatose de type 1, neurofibromatose
de type 2, sclérose tubéreuse de Bourneville…
Certains facteurs environnementaux sont identifiés: antécédents d’irradiation…
Il n’y a pas de preuve absolue que l’alimentation,le tabac, l’exposition aux
pesticides ou aux rayonnements non ionisants (téléphone portable, lignes à
haute tension) soient impliqués.

IV-Diagnostic :
1/Symptômes cliniques :
Les tumeurs cérébrales, qu’elles soient primitives ou secondaires, connaissent
3 principaux modes de révélation, variables selon la localisation et la dimension
de la tumeur :

*Le syndrome d’hypertension intracrânienne : il s’agit d’un syndrome fréquent


au cours de l’évolution des tumeurs cérébrales primitives ou secondaire.
Il est souvent d’installation progressive, parfois brutale, se manifestant par :
- des céphalées progressives, de plus en plus gênantes et résistantes aux
traitements, à prédominance matinale parfois nocturnes
-des nausées matinales et vomissements en jet sans effort (signes liés à
l’augmentation de pression à l’intérieur du crâne)
-Paralysie du VI (nerf droit latéral) avec diplopie, sans valeur localisatrice
-œdème papillaire au fond d’œil
-troubles de la vigilance allant de l’obnubilation jusqu’au coma

*Des crises d’épilepsie : qui correspondent à une irritation des circuits


neuronaux, du fait de la tumeur et de l’œdème qui l’entoure.
Ces crises peuvent être partielles, motrices ou sensitivo-motrices…

*Des déficits neurologiques : par atteinte de ces mêmes circuits neuronaux,


ces déficits sont souvent d’évolution progressive avec valeur localisatrice :
-Déficit moteur (monoparésie, hémiparésie) avec syndrome pyramidal (signe
de Babinski) en cas de localisation frontale
-Déficits sensitifs (hypoesthésie ou dysesthésie) en cas d’atteinte pariétale
-Déficits phasiques si atteinte du lobe temporal dominant
-Déficits visuels  (diminution ou perte de l’acuité visuelle uni ou bilatérale,
hémianopsie) en cas d’atteinte temporale interne ou occipitale.

D’autres signes peuvent être observés :

*Les troubles cognitifs ou comportementaux : un syndrome dépressif, un


syndrome confusionnel, un syndrome démentiel d’évolution rapide, un
syndrome frontal doivent faire demander au moins un scanner, et au mieux
une IRM, avant de conclure à tort à une pathologie psychiatrique ou
dégénérative.

Un examen neurologique complet est obligatoire devant tout signe


neurologique en commençant par l’évaluation de l’état de conscience par les
scores de Glasgow et Liège afin de définir les situations d’urgences. L’examen
neurologique se fait selon une chronologie spécifique : état de conscience,
examen des fonctions supérieures, examen des nerfs crâniens, examen
sensibilité puis motricité puis réflexes des membres supérieurs puis inférieurs
puis du tronc, examen de l’équilibre puis examen général.

2/Anatomo-pathologie :

→Les tumeurs primitives:


*Les tumeurs gliales: (classification OMS 2016)
grade I (gliome pilocytaire de l’enfant),
grade II (gliome de bas grade),
grade III (gliome anaplasique),
grade IV (glioblastome)
*Les méningiomes: sont gradés selon la classification OMS qui reflète le risque
de récidive: grade OMS 1 (bénin),
grade OMS 2 (atypique),
grade OMS 3 (anaplasique)

*Les médulloblastomes: il faut rechercher les mutation SHH qui ont une valeur
pronostique et thérapeutique.

→Les tumeurs secondaires (métastases):


L’histologie des métastases répond à celle des cancers d’origine.
En l’absence de tumeur primitive connue, elles devront être biopsiées ou
réséquées à visée diagnostique. On recherche alors des signes d’orientation
histologique  et immunohistochimique:
-expression de gata3,dosage des récepteurs à l’oestradiol et à la progestérone,
+/-surexpression de la protéine HER2 dans les cancers du sein
-expression de TTF1 pour les adénocarcinomes du poumon
-mutation B-RAF pour les mélanomes

3/Imagerie :
*La TDM cérébrale: est un examen de débrouillage rapide mais insuffisant
*L’IRM cérébrale: est l’examen de référence, les aspects IRM orientent souvent
le diagnostic de glioblastome, gliome grade II, méningiome, médulloblastome,
lymphome, adénome hypophysaire, métastases.

4/Bilan d’extension :
→ Les tumeurs intrcraniennes primitives: ont un très faible pouvoir
métastatique, le bilan d’extension est inutile
(sauf pour les médulloblastomes, des épendymomes et les lymphomes où
l’IRM médullaire est requise pour le bilan d’extension).
→Les métastases cérébrales: leur découverte doit faire rechercher le cancer
primitif par :
*TDM TAP
*TEPscan si la TDM TAP est douteuse ou négative.

5/Diagnostic différentiel :
L’IRM complétée par des séquences métaboliques permet le plus souvent
d’éliminer une atteinte non tumorale :
• Abcés cérébral+++
• Toxoplasmose cérébrale
• Encéphalite, notamment à virus herpes
• Sclérose en plaques
• Accident vasculaire ischémique ou hémorragique
• Malformation vasculaire

V-Principes thérapeutiques :
→Armes thérapeutiques:
*La chirurgie: la résection chirurgicale optimale débute la séquence
thérapeutique lorsqu’elle est possible
L’exérèse doit être la plus large possible, tout en respectant les fonctions
neurologiques dont l’altération compromettrait la qualité de vie post-
opératoire . L’évaluation de la qualité de réséction doit être effectuée par une
IRM post-op précoce dans les 48heures .
*La radiothérapie: la radiothérapie des TC primitives est utilisée comme
complément de la chirurgie ou de manière exclusive. Il s’agit d’une
radiothérapie externe délivrant des rayonnements X issus d’un accélérateur
linéaire, la dose varie de 54 à 60 Gy selon l’histologie.
Les métastases cérébrales peuvent être traitées par une radiothérapie
cérébrale.
*La chimiothérapie: elle a un rôle dans le traitement de la plupart des tumeurs
cérébrales malignes primitives, avec toutefois un bénéfice variable selon le
type tumoral:
Les molécules utilisées sont: témozolamide, sels de platine, étoposide
Une association chimio-RT peut être proposée.
*La thérapie ciblée: Bevacizumab dans les astrocytomes grade III et IV.

→Les principales stratégies thérapeutiques :


Dans tous les cas, il faut procéder à une exérèse chirurgicale la plus complète
possible (sauf si le siège ne le permet pas ou en cas de lymphome)
*Astrocytome de grade III et IV : radiothérapie avec temozolomide
*Oligodendrogliome de grade II : radiothérapie suivie de polychimiothérapie
*Lymphome cérébral : polychimiothérapie
*Médulloblastome : radiothérapie craniospinale et chimiothérapie
*Germinome : chimiothérapie et radiothérapie.

→Situations d’urgence :
*Traitement de l’hypertension intracrânienne : il s’agit d’une urgence vitale
(risque d’engagement cérébral), on préconise :
-traitement anti-oedémateux par corticoides à fortes doses
-traitement osmotique : mannitol
-traitement étiologique : dérivation ventriculaire externe en urgence en cas
d’hydrocéphalée, exérèse tumorale.
*Traitement de l’épilepsie tumorale : il s’agit d’un symptôme fréquent,
souvent révélateur. Le traitement de la tumeur améliore souvent l’épilepsie, il
faut prescrire dès la 1ère crise un anti-épileptique.

VI-Evolution, pronostic :
L’évolution et le pronostic des tumeurs cérébrales sont variables selon leur
nature, leur agressivité histologique et le possibilités thérapeutiques
Certaines tumeurs peuvent être guéries par la chirurgie seule (astrocytome
pilocytaire de l’enfant, méningiome de grade I), par la chirurgie associée à la
radiothérapie et à la chimiothérapie (médulloblastome, germinome), par la
chimio seule (lymphome). D’autres tumeurs sont rapidement mortelles (gliome
de haut grade).

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