Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
LE CONTROLE DE GESTION :
Sophie MIGNON
Robert TELLER
LE CONTROLE DE GESTION : 2
Introduction
Cet ouvrage développe une vision intégrée du contrôle de gestion qui a pour but
un pilotage des organisations intégrant stratégie, cognition et finance. Cette
intégration stratégie-cognition-finance semble être, en effet, une piste prometteuse
pour redonner du sens à des pratiques managériales « écornées » par une
orientation trop centrée sur la valeur actionnariale et l’optimisation uniquement
financière. Comme toute pratique, le contrôle de gestion subit les effets des crises
et des mutations qui bouleversent les économies globalisées d’aujourd’hui. Le
développement de la globalisation et de la financiarisation accentue, en effet, la
pression des critères financiers comme éléments décisifs des choix stratégiques.
La crise financière récente vient questionner la légitimité des soubassements
théoriques jugés jusqu’alors quasi incontestables et notamment l’efficience des
marchés financiers et son corpus issu de la théorie micro-économique. D’un autre
côté, la prise de conscience de la rareté des ressources et des impacts de la
compétition mondiale sur les équilibres de notre planète suppose un
renouvellement des enjeux stratégiques de long terme et plaide pour une approche
intégrant mieux les diverses parties prenantes. Par ailleurs, le développement de
l’économie de la connaissance et l’explosion des ressources liées à l’internet
remettent au premier plan la question des stratégies d’acteurs dans la gestion des
organisations. Ces lames de fond impactent fortement la structure, les stratégies et
les modes d’organisation des entreprises dans le monde. Une telle situation
bouscule forcément les approches managériales ainsi que le contrôle de gestion et
notamment l’utilisation de certains de ces outils. Il convient de réfléchir à un
système de contrôle adapté qui puisse faire l’interface entre les besoins de la
planification stratégique et les exigences de plus en plus rigoureuses des
contraintes financières ou des budgets opérationnels.
A l’origine, le contrôle de gestion prend sa source dans le domaine stratégique
mais son rôle peut varier considérablement en fonction de l’environnement et du
modèle théorique sous-jacent. Sur la base d’une approche classique de la stratégie
fondée sur l’avantage concurrentiel, on assiste à un développement des pratiques
de contrôle de gestion à logique stratégico–fonctionnelle. Ce sont des outils de
déploiement de la stratégie en actions opérationnelles. L’entreprise est divisée en
centres d’activités à partir d’une analyse des processus. L’accent est mis sur la
performance globale qui inclut, outre la dimension financière, des aspects non-
financiers tels que la qualité, les délais, la valeur pour le client … Il s’agit de
contribuer à animer la structure, à accroître la réactivité globale de l’entreprise, à
définir un système d’information permettant de comprendre la performance
globale de l’entreprise. Son cadre conceptuel est plutôt de type partenarial dans la
mesure où il dépasse la vision purement financière de la performance et de
l’organisation.
Sous la pression de la financiarisation des économies, on assiste à une progression
sensible du contrôle de gestion à logique purement financière. Ce mode de
contrôle suppose une définition préalable d’un objectif financier global qui est
LE CONTROLE DE GESTION : 3
incitations uniquement axées sur la valeur de l’action. On peut même parler d’un
mouvement « politique » de contestation du soubassement conceptuel d’un
capitalisme trop financiarisé…
Ce constat permet de mettre l’accent sur l’intérêt du concept de contrôle de
gestion intégré. Cette approche repose sur une logique qui reconnaît l’importance
de la création de valeur mais l’analyse comme le résultat d’une intégration de la
valeur financière et stratégique. Cette dernière dépend étroitement de la valeur
organisationnelle et concurrentielle. Elle met en avant des concepts comme ceux
de compétences fondamentales, de savoir-faire, d’avantage compétitif. Elle
suppose une intégration de la comptabilité de gestion comme cadre conceptuel de
la valeur stratégique à partir d’une gestion de la base de processus. Le contrôle de
gestion a, dans cette optique, un rôle majeur de conception du système
d’information et d’aide à l’évaluation de l’ensemble des facteurs de la
performance globale (voire sociétale). Le concept de contrôle de gestion intégré
n’a pas de périmètre bien stabilisé. Il peut se concevoir comme un mode
complémentaire du contrôle à logique financière ou comme un mode alternatif à
ce dernier. Ces deux conceptions ont chacune leur logique et leur légitimité. Elles
impliquent, toutefois, une déclinaison spécifique des référentiels mis en œuvre qui
peut conduire à repenser les fondements du contrôle de gestion ou à proposer un
réaménagement de ses outils.
La conception du contrôle de gestion intégré en tant que mode complémentaire au
contrôle de gestion à logique financière présente l’avantage de rappeler la
contrainte de la « gestion par la valeur » qui apparaît aujourd’hui difficilement
contournable. Il semble, en effet, difficile de se passer du financement, de l’apport
des marchés de capitaux, des mécanismes assurantiels et de couverture des
risques. De plus, sous réserve d’une meilleure régularisation et d’un contrôle plus
strict, la plasticité et la réactivité des marchés financiers restent un facteur
indispensable du développement de l’innovation et donc de la croissance.
Le mode alternatif du contrôle de gestion intégré insiste sur l’autonomie de
« l’entité – entreprise » dans le cadre d’un réseau de parties prenantes. Il est plus
ouvert aux nouvelles préoccupations liées aux aspects sociétaux du management:
prise en compte du développement durable et de l’ensemble des relations
partenariales, développement d’outils spécifiques tels que le « stakeholder’s
report » ou les mesures d’impact environnemental, gestion spécifique du capital
humain … L’approche alternative remet en cause de façon explicite la pertinence
du dogme de la « Shareholder Value » et propose, d’emblée, des concepts
alternatifs autour de la « Stakeholder Value ». L’orientation stratégique du modèle
intègre le fait que la valeur est d’abord construite par les acteurs avant d’être
donnée par le marché. Elle est systématiquement orientée vers l’innovation quitte
à ne pas se conformer aux standards du marché pour être correctement valorisé à
court terme.
La période qui s'ouvre s'avère donc particulièrement intéressante puisque la thèse
soutenue par les partisans d’un contrôle de gestion asservi à la finance est
largement remise en cause en raison des nombreux effets pervers produits par
LE CONTROLE DE GESTION : 5
Les concepts que nous venons d’évoquer sont développés dans quatre chapitres.
CONTROLE DE GESTION
définir les buts de l’organisation et les organisées et gérées par le contrôle
ressources qui lui sont nécessaires. opérationnel, ou contrôle des tâches
Les politiques sont ensuite mises en œuvre INTERFACE qui permet d’avoir l’assurance que
et concernent l’acquisition, l’usage, la de telles tâches sont effectuées de
cession de ces ressources. Ces politiques manière efficace et efficiente. Ce
sont traduites dans des plans et des budgets contrôle définit des procédures de
qui font l’objet d’une analyse de cohérence routine et, le plus souvent, des
et d’un suivi dans le temps. automatismes permettant d’optimiser
des tâches répétitives.
contrôle fait également référence à trois notions importantes, le contrôle proactif (feed-forward control),
l’autocontrôle, l’interconnexion planification-organisation-contrôle.
LE RISQUE D’EXPLOITATION
Le risque d’exploitation concerne la probabilité de couvrir les charges d’exploitation avec les recettes
d’exploitation. La décision d’exploitation est généralement basée sur un ensemble de prévisions relatif aux
variables essentielles : prix, coûts, quantités produites et vendues.
LE RISQUE FINANCIER
Le risque financier reste un paramètre fondamental du contrôle de gestion notamment par les effets rapides
qu’il peut provoquer sur la survie de l’entreprise. Le risque financier présente deux aspects distincts: un risque
financier d’exploitation qui est l’aptitude d’une entreprise à couvrir ses décaissements avec les encaissements
d’exploitation et un risque de structure financière qui concerne la part relative des fonds propres et empruntés
ainsi que la nature de la dette. Ce risque de structure financière est lui-même décomposable en risque de
déséquilibre et en risque de taux et risque de change. Les deux risques peuvent être de sens contraire. Cela
peut permettre de compenser provisoirement un déséquilibre financier ou de même sens ce qui est excellent
dans le cas d’indicateurs favorables et catastrophique dans le cas contraire. On peut schématiquement résumer
la problématique ainsi:
CA1 CA2
Plage de fonctionnement
D1
C
B
D2
A
D
Chiffre d'affaires
a1
a2
La zone 1 est une zone à risque élevé qui montre une situation de défaillance et de non viabilité de l’entreprise
sauf amélioration des paramètres clés (délais, taux d’encaissement et de décaissement et volume d’activités).
La zone 3, par opposition, est la zone “ saine ” qui ne devrait pas poser de problèmes au niveau du risque
financier d’exploitation. La zone 2, par contre, reste une zone à risque potentiel qui est difficile à interpréter
mais qui illustre bien les difficultés actuelles du diagnostic d’entreprise. En effet, cette zone peut engendrer
des situations de trésorerie positive ou négative, pour un même volume d’activités, en fonction des
configurations réelles de délais et de coûts. Plus cette zone est “ étendue ” et plus le diagnostic est
problématique.
Le pilotage d’une entreprise suppose la connaissance d’une destination, d’un
chemin vers lequel il faut tendre. La détermination de ce chemin implique une
étude approfondie des interrelations entre les contraintes de l’environnement, les
finalités de l’entreprise, ses structures, son système de communication et
d’information. Le cadre formel de cette réflexion est le plan stratégique. L’objectif
est susciter la création ou le renforcement d’atouts particuliers qui doivent être
protégés contre les attaques concurrentielles sur une longue période de temps.1
Ces atouts concurrentiels défendables sont des forces ou des actifs de l’entreprise
que tout concurrent - présent ou potentiel - ne pourra recréer lui-même que
moyennant la mise en œuvre de ressources et d’un calendrier tels que ce
concurrent ne peut plus gagner à moyen terme. Le contrôle de gestion est
impliqué dans le travail d’identification et de planification des atouts
concurrentiels défendables. On retrouve ici la notion de facteurs-clés de succès
d’une part et de segmentation des activités d’autre part. Le système de contrôle de
gestion devrait, également, contribuer à localiser les activités de l’entreprise en
tenant compte du cycle de vie des produits et de la position concurrentielle pour
chaque métier. Enfin, sans aller jusqu’à postuler que la stratégie sociale doit
conditionner la stratégie économique basée sur les couples produits - marchés, le
contrôleur de gestion devra s’assurer de la bonne concordance de deux
composantes de la stratégie globale de l’entreprise2. Ce point est essentiel car il
conditionne aussi certains aspects de la performance liés à la motivation du
personnel et à la réduction des coûts cachés tels que l’absentéisme.
6- LE CONTROLE DE GESTION CONTRIBUE A OPERATIONALISER ET A
MODELISER LES PROCESSUS DE CREATION DE VALEUR:
A partir du moment où la finalité de création de valeur tend à devenir commune à
toutes les entreprises, le contrôle de gestion ne peut qu’intégrer cette contrainte.
L’approche en termes d’activités, aussi bien au niveau des coûts (Activity based
costing, ABC) que des décisions de gestion (Activity based management, ABM)
permet cette intégration. Le cadre conceptuel de cette analyse est celui de la
chaîne de valeur de PORTER. Dans l’approche par activité, on ne centre plus le
processus d’attachement des coûts sur les centres de responsabilité mais sur des
activités souvent transfonctionnelles qui définissent la configuration de l’offre que
1 Voir sur ce point : P. JOFFRE et G. KOENIG : Gestion stratégique, l’entreprise, ses partenaires – adversaires et leur univers, Editions
EMS, 1992.
2 Voir sur ce point : A.C. MARTINET : Planification stratégique, Encyclopédie de gestion, 2° édition, tome 2, pages 2249 et sq. Economica,
1997.
LE CONTROLE DE GESTION : 13
3 N. BERLAND (2004), « La gestion sans budget : évaluation de la pertinence des critiques et interprétation théoriques », CCA , vol 7, n° 4,
pp 37-58 .
4 P-L. BESCOS, E. CAUVIN, P. LANGEVIN, C. MENDOZA (2004), « Critiques du budget : une approche contingente », CCA, Tome 10,
vol, 1, pp 165-185 ;
5 D. CHOFFEL, F. MEYSSONNIER (2005), « Dix ans de débats autour du Balanced Scorecard », CCA , Tome 11, vol 2, pp 61-81.
6 F. MEYSSONNIER et F. POURTIER (2004), « Les ERP changent-ils le contrôle de gestion », CCA , Tome 12, pp 45-64.
7 G. NARO (1999). « Compétitivité, rentabilité, productivité, emploi….contrôle de gestion et GRH », Document interneERFI, Université
Montpellier I.
8 H. BOUQUIN: Pourquoi le contrôle de gestion existe-t-il encore ? Gestion 2000, volume 21, N°3, septembre 1996, pages 97 et sq.
LE CONTROLE DE GESTION : 15
que des aspects négatifs car il remplace l’incertitude par une certitude (par exemple, la certitude
d’avoir appliqué des directives venues de la hiérarchie). Bien utilisé, le contrôle par la hiérarchie
hiérarchie
apporte un équilibre entre l’initiative individuelle qui ne peut jamais totalement disparaître et une
coordination évidemment nécessaire. Le contrôle de gestion ne se substitue pas complètement au
contrôle par la hiérarchie, mais vient en atténuer certaines caractéristiques : allégement des
contrôles a priori, accélération des processus de prise de décision, meilleure motivation,
responsabilisation des personnels.
De type bureaucratique, ce contrôle correspond à un pilotage mécanique. Il s’impose dans
Le contrôle par le règlement et
certaines formes d’organisations notamment publiques, mais il existe aussi dans toutes les
entreprises ayant des procédures de contrôle interne qui évitent aussi bien les erreurs que les
tentations de fraude. Les limites de ce mode de contrôle tiennent au fait qu’il ne porte pas sur
les procédures
l’action elle-même mais sur la procédure par laquelle chaque acteur définit la substance de son
action. Il résulte une rigidité peu compatible avec la flexibilité requise par une concurrence active
et une mobilisation des capacités de création du personnel. Le règlement a, par contre, d’autres
qualités: en formalisant le savoir-faire, il permet sa capitalisation dans l’organisation; en
dépossédant les individus de l’exclusivité du savoir-faire, il permet des substitutions dans le
personnel et par conséquent, une certaine flexibilité. L’audit est une forme de contrôle par le
règlement.
Il suppose le découpage de l’organisation en entités autonomes ayant chacune un compte
d’exploitation ou de résultat. Chaque entité peut s’approvisionner ou vendre librement à l’intérieur
Le contrôle par le marché.
Le contrôle de gestion tel que nous le connaissons n’est qu’un mode parmi d’autre
de contrôle organisationnel. W. OUCHI9 note dès 1977 que les mécanismes de
contrôle organisationnel ne s’appuient pas uniquement sur le contrôle des
9 W. OUCHI (1977), “The relationship between organizational structure and organizational control”, Administrative Science Quaterly, vol
22, pp 95-113.
LE CONTROLE DE GESTION : 16
10 M.A. ABERNERTY, P. BROWNELL (1997) « Management Control Systems in Research and Development Organizations : the Role of
Accounting Behavior and Personnel Control », Accounting, Organizations and Society, vol. 2, n°3-4, pp 233 -248.
11 G. NARO (1998), « La dimension humaine du contrôle de gestion : La recherche anglo-saxonne sur les aspects comportementaux de la
gestion budgétaire », Comptabilité, Contrôle, Audit, Tome 4, vol 2, pp 45-69.
LE CONTROLE DE GESTION : 17
12 R. MAEDER: De nouvelles missions pour le contrôle, Revue Française de Gestion, Janvier Février 1991.
13 Source: R. Simons (1995) :Levels of control, Boston, Harvard Business School Press.
14 D’après Ph. LORINO : Méthodes et pratiques de la performance, Les éditions d’organisation, Paris, 1997.
LE CONTROLE DE GESTION : 18
Henri Bouquin propose une explication plus générale de la limite des modèles de
contrôle de gestion en rappelant qu’ils reposent sur trois hypothèses de base: le
cloisonnement des centres de décision, l’articulation du court et du long terme et
l’hypothèse culturelle. Ces trois hypothèses sont fortement remises en cause et
limitent de ce fait le modèle classique. L’hypothèse de cloisonnement renvoie à la
notion de centre de responsabilité donc à un certain type de structuration de
l’organisation (la prolifération des réseaux, des alliances et des relations de
partenariat réduit l’indépendance du centre). L’évaluation de la performance
suppose que l’on puisse définir une articulation entre court terme et long terme
mais celle-ci est de plus en plus difficile à assurer. Enfin, le modèle classique
repose sur une hypothèse culturelle forte, celle de l’optique contractuelle
privilégiant la post-évaluation basée sur des résultats chiffrés. Or, d’autres voies
existent et peuvent se montrer, dans certains cas, aussi pertinentes.
2 / 2 LES DIFFICULTES LIEES A LA CRISE DE LA REPRESENTATION
COMPTABLE DE L’ORGANISATION
Le contrôle de gestion reste lié au système d’information comptable. Ce dernier
ne donne une image correcte de la performance et de la structure d’une entreprise
que dans un environnement relativement stable et peu perturbé.15 L’information de
gestion reste en grande partie figée lorsqu’il s’agit de rendre compte des situations
de crise ou de rupture. Ces insuffisances peuvent être aggravées par une vision
abusivement financière du contrôle de gestion. Les autres facteurs potentiels
d’obsolescence de l’information comptable sont identifiés, qu’il s’agisse de
l’inversion de la pyramide des coûts, de la réduction des coûts industriels, de
l’accroissement de la part des services dans la création de valeur, de l’importance
du savoir-faire et de la connaissance, de la dématérialisation de l’entreprise et de
sa production, de la globalisation et de la financiarisation de l’économie, ou
encore de l’impact considérable des nouvelles technologies de l’information. Le
paradigme de l’entreprise patrimoniale n’assure plus forcément la meilleure
représentation comptable des structures actuelles des organisations dès que celles-
ci sont complexes. Les mutations actuelles de l’économie, sous l’impact
notamment de la globalisation et de la financiarisation des échanges, accentuent
les phénomènes de transformation des entreprises (dématérialisation, hiérarchies
plates). Dans ce contexte, le système de contrôle de gestion se heurte à la
difficulté de mesurer les actifs immatériels puisque les outils mis à sa disposition
sont imprégnés de l’approche traditionnelle où les relations entre la production et
les coûts sont stables. L’ampleur des actifs immatériels du fait de la tertiarisation
de l’économie apparaît comme une limite forte de la représentation comptable et,
à travers elle, de la pertinence du contrôle de gestion qui lui est associé.
3- LES PROBLEMES LIES A LA MODELISATION DU PROCESSUS DE
CREATION DE VALEUR:
15 D. LECLERE : Configurations structurelles hybrides et hétérogénéité du contrôle de gestion, Actes du XVI ème congrès de l’AFC, Mai
1995, volume 2, pages 1103 et sq M. SAKURAI : Past and future of japanese management accounting, Journal of cost management, volume
9, N°3, fall 1995, pages 21 et sq.
LE CONTROLE DE GESTION : 19
19 P-L. BESCOS, E. CAUVIN, P. LANGEVIN, C. MENDOZA (2004), « Critiques du budget : une approche contingente », CCA , Tome
10, vol 1, pp 165 -185.
20 F. DUBUS-VILLESEQUE, Y. DUPUY (2008), « L’évolution des pratiques budgétaires dans les entreprises : innovation ou
régression ? », Papier de Recherche, CREGOR, Université de Montpellier,
21 Simons R. (1990), « The Role of Management Control Systems in Creating Competitive Advantage : New Perspectives », Accounting,
Organizations and Society, vol. 15, n ° 1-2, pp 127 – 143;
22 G. NARO (1999), op. cit.; A.G. HOPWOOD, P. MILLER (1994), Accounting as social and institutionnal practice, Cambridge University
Press.
23 A. GIDDENS (1984), The constitution of Society, Cambridge, Polity Press, 1984.
24 A. BOURGUIGNON, V. MALLERET, H. NORREKLIT (2002), “L’irréductible dimension culturelle des instruments de gestion:
l’exemple du tableau de bord, op. cité.
LE CONTROLE DE GESTION : 23
que les managers prennent le risque de laisser ces outils déterminer leur
évaluation et rémunération, ce qui n’est pas le cas en France. Au-delà de ces
exemples, « ce dévoilement est utile par qu’il suggère qu’en matière d’importation
d’innovations managériales, la culture agit comme une contrainte : sans accord
minimum entre les représentations implicites des méthodes et la culture locale, on
peut penser que l’innovation ne se diffusera pas, quelles que soient les logiques
institutionnelles à l’œuvre » (p 29).
5- CONTROLE, CRISE OU RUPTURE
Les stratégies de crise ou de rupture oscillent entre deux conceptions. Une
première conception considère qu’une crise n’est qu’un accident entre deux
périodes de croissance. S’il en est bien ainsi, le problème à résoudre est celui de
l’adaptation des outils de gestion traditionnels basés, la plupart du temps, sur une
hypothèse de croissance tendancielle dans un environnement relativement stable.
L‘autre conception de la crise fait l’hypothèse d’un « état de rupture » caractérisé
par une grande instabilité permanente. Le problème est alors celui de la
conception de nouveaux outils de gestion.
CRISE PROVISOIRE RUPTURE A CARACTERE DURABLE
Les années 2000 ont été marquées par un certain nombre de critiques formulées à
l’encontre des budgets (CAM-I, 1999)25 . Parmi les critiques récurrentes, a été
avancé le fait qu’ils enferment les managers dans des contraintes trop fortes,
qu’ils ont souvent construits sans lien avec la stratégie, qu’ils sont constitués par
la reprise des chiffres de l’année passée, qu’ils sont souvent complexes et
uniquement financiers. Ces dysfonctionnements ont été synthétisés par I.
GIGNON-MARCONNET (2003)26 dans le tableau suivant :
MOTIFS D’UTILISATION DYSFONCTIONNEMENTS
La gestion des équilibres financiers
La prévision des équilibres financiers Le manque de fiabilité des prévisions
La communication financière
L’allocation des ressources financières
L’ajustement organisationnel
La déclinaison de la stratégie L’arbitrage à court terme
L’émergence de buts et de stratégies La création de conflits
La résolution des conflits La manipulation des chiffres
La coordination des activités
La communication sur les objectifs
certaines de ses fonctions. C’est lorsqu’il est utilisé comme outil de prévision-
planification qu’il est le moins critiqué. En revanche, dès qu’il sert à évaluer ou à
coordonner les services, il semble que les managers rencontrent des difficultés à
l’utiliser et que des effets pervers apparaissent » (N. BERLAND, 2004, p 55). De
plus, la manière dont certains managers se servent du budget peut être à la source
de dysfonctionnements. En effet, l’absence de différenciation des données peut
conduire à une saturation de l’attention de managers. Au contraire la distinction
de Simons entre un contrôle diagnostic et un contrôle interactif permet de
minimiser les critiques formulés à l’encontre des budgets. Si la tendance semble
être celui d’un recours moins fréquent au système budgétaire au profit de tableaux
de bords stratégiques et à une simplification des données diffusées, d’autres
études réaffirment au contraire la place prééminente des budgets au sein des
systèmes de contrôle. A partir d’un observatoire sur les pratiques budgétaires
d’entreprises en Languedoc Roussillon, Y. DUPUY et F. VILLESEQUE-DUBUS
(2008)28 montrent en effet que les procédures budgétaires semblent encore jouer
un rôle marquant dans le pilotage des organisations. Les systèmes budgétaires
sont ainsi présentés comme un support majeur d’apprentissage (via les révisions
budgétaires) et de l’intégration organisationnelle (car leur élaboration s’avère
concertée). Néanmoins, on n’observe pas de « tyrannie du chiffre » (les écarts sont
peu diffusés aux opérationnels). Il convient aussi de noter que ces budgets
constituent plutôt un outil de diagnostic et servent essentiellement au pilotage
stratégique. Ainsi, les budgets s’avèrent nécessaires mais non suffisants : les
tableaux de bord sont, en effet, utilisés de façon complémentaire pour assurer la
contrôlabilité des organisations. L’importance des budgets est aussi soulignée par
S. GAGO et D. E. PURDY (2007)29 : le test d’un certain nombre d’hypothèses
relatives au degré de négociation du budget avec l’ensemble des managers, à
l’importance perçue de ces budgets, au degré de formation et d’expérience requis
pour les utiliser ….ont permis de souligner les paramètres suivants : Pour être
considérés comme pertinents, les budgets se doivent être négociés, délivrés à
temps et enrichis d’informations complémentaires d’origine non-comptable. Enfin
les managers dont les salaires sont indexés sur la performance ont une conscience
plus aigue de l’importance des budgets. Parallèlement, ceux disposant d’une
formation et d’une expérience d’utilisation sont plus à même d’en apprécier la
portée. Le retour en grâce des systèmes budgétaires est aussi accentué selon Y.
DUPUY et F. VILLESEQUE-DUBUS (2008)30 par la financiarisation des
entreprises relayée par la diffusion des normes IFRS et le pouvoir recouvré des
contrôleurs de gestion dans le processus de diffusion des PGI (progiciels de
gestion intégrés). D’autres facteurs sont avancés par I. GIGNON-MARCONNET
(2003) pour expliquer le maintien de l’outil budgétaire en dépit des critiques dont
il a fait l’objet. Selon l’auteur, « le maintien de la gestion budgétaire tient plus à
28 F. DUBUS-VILLESEQUE, Y. DUPUY (2008), « L’évolution des pratiques budgétaires dans les entreprises : innovation ou
régression ? », Papier de Recherche, CREGOR, Université de Montpellier,
29 S. GAGO, D.E. PURDY (2007), « The importance of budgets », Congrès MCA, Paris.
30 Op. cit.
LE CONTROLE DE GESTION : 26
31 FRERY F.: « Et si l’entreprise n’était qu’un épisode de l’histoire? » Annales du Management, XII èmes Journées Nationales de IAE,
Montpellier 1994.
LE CONTROLE DE GESTION : 27
tels que le rendement des actifs. Des pistes de renouvellement des outils de
contrôle récemment ont été proposées pour s’adapter aux nouvelles formes de
structures modernes en particulier celle de la firme-réseau. Il s’agit en particulier
des budgets transversaux (ABB : activity based budgeting). L’existence de ces
budgets (58% de l’échantillon) mais aussi leur diversité a été soulignée par F.
VILLESEQUE-DUBUS (2005). Il semble tout d’abord que les budgets
transversaux soient très étroitement liés aux découpages organisationnels par
activités, processus ou métiers. Ils se distinguent des budgets hierarchico-
fonctionnels classiques car leur dimension est fréquemment associée aux produits
et marchés. Cependant, ils sont aussi complémentaires de ces derniers car utilisés
dans une optique de « coordination stratégique » mais aussi de supports de
« rationalité instrumentale » dans la mesure où ils servent au suivi des réalisations
via le calcul des écarts. C’est donc leur complémentarité plus que la substitution
l’un à l’autre qu’il convient de souligner.
R. BEAUJOLIN-BELLET et G. NOGATCHEWSKY (2005) 32 ont synthétisé trois
modes de contrôle prévalant dans le cadre des relations clients-fournisseurs,
conséquence de l’externalisation croissante des activités des entreprises
Trois modes de contrôle client-fournisseur et leurs facteurs de contingence
Contrôle par le marché Contrôle Contrôle par la
bureaucratique confiance
Dispositifs de contrôle Peu de mécanismes Intervention directe du Développement de ce
spécifiques puisque le client : mode de contrôle dans le
marché domine : Mise en temps :
concurrence systématique Le contrôle repose sur Au départ, le contrôle
par appel d’offre sur les l’autorité et les règles repose sur la réputation et
prix. fixées à l’avance ; critères les expériences
de sélection détaillés ; antérieures ; puis les
supervision directe ; contacts réguliers,
revues formelles l’intensification des
communications et
l’action jointe stimulent
la confiance
Contrats incomplets et
peu détaillés
Contrat « complet » mais Contrats incomplets mais
peu détaille détaillés
Objets du contrôle Les résultats (souvent Les résultats et/ou les Les capacités et les
prix, qualité, délais) comportements comportements
(principalement les relationnels
procédés de travail)
Facteurs de contingence Sur les transactions : Sur les transactions : Sur les transactions :
Forte connaissance des Forte connaissance des Faible connaissance des
résultats processus résultats et des processus
Forte répétitivité des Faible à moyenne Faible répétitivité des
transactions répétitivité des transactions
Faible spécificité des transactions Actifs très spécifiques
actifs Actifs modérément Sur l’environnement :
Sur l’environnement : spécifiques Peu d’acteurs sur le
32 R. BEAUJOLIN-BELLET, G. NOGATCHEWSKY (2005), « La rupture du contrôle par la confiance dans les relations clients-
fournisseurs », CCA, Tome 11, vol 2, pp 39-60.
LE CONTROLE DE GESTION : 28
Ouvrant la voie vers une recherche d’un contrôle de gestion des organisations
dématérialisées, plusieurs travaux soulignent l’importance de la confiance pour
gérer les organisations en situation d’incertitude. B. BAUDRY (1995)33, K ;
LANGFIELD-SMITH et D. SMITH (2003)34 montrent que la confiance s’avère
un mode de contrôle efficace des entreprises en réseaux. Cette confiance permet
en effet de réduire l’incertitude et les risques (moins d’asymétries d’information,
de comportements opportunistes), elle favorise l’engagement durable des parties,
la résolution des conflits, la flexibilité, le partage des connaissances. Néanmoins
elle est aussi fragile. Selon J.H. DYER et W. CHU (2000)35 , la confiance inter-
organisationnelle repose sur des relations interpersonnelles. Ainsi, le départ ou le
changement d’individus peut mettre à mal la confiance tissée entre deux
organisations. Rachel BEAUJOLIN-BELLET et Gwenaëlle NOGATCHEWSKY
(2005) se sont appuyées sur une étude des relations clients-fournisseurs pour
montrer les spécificités d’un mode de contrôle par la confiance. Les critères
privilégiés par les donneurs d’ordre étudiés étaient, sur la période considérée, ceux
de la disponibilité, du travail bien fait, « car ils permettaient d’anticiper les
situations critiques et d’assurer la continuité de l’exploitation industrielle » (p 47),
de la proximité géographique (sollicitation de prestataires locaux uniquement), de
la réactivité. En termes de formalisation des contrats, ces derniers étaient peu
précis afin de régler les éventuels conflits, tacitement reconduits d’année et année,
et fondés sur une facturation a posteriori. « Les clients et les fournisseurs
partageaient la même idée : obtenir/délivrer une prestation de qualité dans un
contexte où le prix passait au second plan » (p 48). La direction des grands
groupes engagés dans ce type de relations a décidé de rationaliser et de centraliser
les processus d’achat. Ainsi, le contrôle par la confiance a été remplacé par un
contrôle par le marché (priorité donnée aux résultats et aux prix, mise en
concurrence des fournisseurs par des procédures d’appel d’offre, applications
stricte des contrats). Les conséquences ont été sans appel pour les deux parties :
sentiment d’abandon pour les fournisseurs locaux, perte du slack organisationnel
et perte de flexibilité pour les donneurs d’ordre : « la rupture des relations clients
fournisseurs s’est traduite par un accroissement des situations d’urgence et par
une prise de risque accrue en termes de continuité des exploitations industrielles et
de dégradation des équipements » (p 53). Le contrôle par la confiance, lorsqu’il
33 B. BAUDRY (1995), L’économie des relations interentreprises, La découverte, collection Repères, Paris.
34 K. LANGFIELD-SMITH et D.SMITH (2003), « Management control systems and trust in outsourcing relationships », Management
Accounting Research, vol. 14, pp. 281-301.
35 J.H. DYER et W. CHU (2000), « The determinants of Trust in Supplier-automaker Relationships in the US, Japan and Korea », Journal of
International Business Studies, vol. 31, n°2, pp. 259-285.
LE CONTROLE DE GESTION : 29
n’est pas enrichi par des dispositifs formels, fragilise les relations car « il
n’apporte pas les preuves de sa performance » pourtant indispensable lors de
changements de critères de décision. Il convient donc, comme l’avaient déjà
soulignés N. GUIBERT et Y. DUPUY (1997)36, T.K. DAS et B.S. TENG (1998)37
de trouver un équilibre entre des mécanismes informels de contrôle fondés sur la
confiance et des modes plus formels fondés sur le respect des règles et des
résultats pour gérer les coopérations inter-firmes.
7 LA QUESTION DU MODELE D’ORGANISATION IMPLICITE DU CONTROLE
DE GESTION
Le contrôle de gestion n’est pas un outil neutre. En particulier, le modèle
organisationnel dominant induit un modèle de contrôle. La théorie contractuelle
des organisations permet de faire une certaine lecture des problèmes de contrôle
dans l’entreprise. Cette théorie considère l’entreprise comme un ensemble de
contrats (explicites ou implicites) désignés sous le terme générique de mandat.
Les systèmes de contrôle interne, en particulier par les sécurités mises en place,
sont alors des moyens permettant de réduire les coûts liés à ces contrats (les coûts
d’agence). En garantissant la confiance dans l’information et en réduisant
l’incertitude dans les échanges, ils ont une fonction d’assurance implicite. Le
modèle des shareholders qui sert de fondement aux décisions stratégiques fondées
sur la maximisation de la valeur actionnariale dans les pays anglo-saxons est une
bonne illustration de cette approche. Elle implique une vision du contrôle de
gestion forcément différente de celle fondée sur une approche de type
stakeholders.
7/1 LE CADRE THEORIQUE DE LA VISION DES SHAREHOLDERS :
L’HYPOTHESE DE LA VALEUR FINANCIERE COMME VALEUR ETALON
Cette théorie est fondée sur les travaux de JENSEN et MECKLING (1976,
2000)38 qui dissocient les managers des actionnaires et contractualisent totalement
le droit des sociétés. L’entreprise est un nœud de relations contractuelles, les
dirigeants sont les mandataires des actionnaires (théorie de l’agence) et comme
tels, ils peuvent être tentés de servir plutôt leurs intérêts personnels que ceux des
actionnaires, alors que la théorie financière la plus classique est fondée sur le
postulat selon lequel les dirigeants doivent maximiser l’avoir de leurs actionnaires
à long terme. D’où la nécessité d’assurer la transparence de manière à limiter
l’asymétrie d’information existant entre les actionnaires et les dirigeants et à
obliger ces derniers à rendre des comptes. Il conviendra aussi d’instituer des
contrôles propres à éviter les dysfonctionnements liés à ce conflit d’intérêt
fondamental, que ces contrôles soient a priori ou a posteriori. Ce cadre théorique
36 N. GUIBERT et Y. DUPUY (1997), « La complémentarité entre contrôle formel et contrôle « informel » : le cas de la relation client-
fournisseur », CCA, Tome 3, Vol 1, pp 35-52.
37 T.K . DAS, B.S. TENG (1998), « Between Trust and Control : Developing confidence in partner cooperation in alliances”, Academy of
Management Review, vol. 23, n°3, PP 491-512;
38 M.C. JENSEN et W.H. MECKLING (1976), Theory of the firm : Managerial Behavior, Agency, Cost and Ownership Strucutre, Journal
of Financial Economics, 3 (4), pp 305-360 ,, repris dans : M.C. JENSEN (2000), A Theory of the firm. Governance, Residual Claims and
Organizational Forms, Harvard University Press.
LE CONTROLE DE GESTION : 30
39 G. CHARREAUX (1997) , Le gouvernement des entreprises, Corporate governance, théories et faits, Economica, 540 pages.
G. CHARREAUX, P. WIRTZ (2007), Gouvernance des Entreprises : Nouvelles Perspectives, Economica, 395 pages.
LE CONTROLE DE GESTION : 31
40 A. BOURGUIGNON (1995) , Peut-on définir la performance ?, RFG, Juillet Août 1995, pp 61-65. ; A. BOURGUIGNON (1997), « Sous
les pavés, la plage….ou les multiples fonctions du vocabulaire comptable : l’exemple de la performance », CCA, mars 1997, vol 3, n°1, pp
89-101; A. BOURGUIGNON (2004), “The American Balanced Scorecard Versus the French tableaux de bord : the ideological dimension”,
avec V. Malleret, H..Norrekit, Management Accounting Research, vol 15, n°2, pp. 107-134.
41 S. MIGNON (2001), Stratégie de pérennité d’entreprise, collection Entreprendre, Edition Vuibert.
LE CONTROLE DE GESTION : 33
42 E. CAUVIN Développement et test du modèle de comptabilité par activités: une application dans les services. Thèse, Aix IAE, 1994.
43 Ph. LORINO, J-C TARONDEAU,(1998), « De la stratégie aux processus stratégiques », Revue Française de gestion, Janvier, p. 5-17.
44 Voir P. AUREGAN, P. JOFFRE et F. LEVIGOREUX (1997), Modèles d’analyse stratégique : contributions récentes, Encyclopédie de
gestion, volume 2, pages 2041 et sq..
LE CONTROLE DE GESTION : 34
APPROCHE CONTINGENTE
Dans l’approche contingente, la stratégie s’inscrit dans une logique d’ajustement des capacités de
l’organisation aux exigences de l’environnement. A des postures stratégiques clairement définies de
domination par les coûts ou de différenciation par la qualité, se substituent des mouvements stratégiques qui
peuvent conduire à une gestion simultanée des coûts, de la valeur et de la réactivité. L’idée centrale est que
l’attitude concurrentielle est nuancée par la capacité d’adaptation de l’entreprise à son environnement.
45 C. DEJOUX : Pourquoi les entreprises françaises s’intéressent à la théorie des ressources ? Direction et Gestion , N° 166, 1998.
LE CONTROLE DE GESTION : 35
46 B. WERNERFELT (1984), « A Resource based Theory of The Firm », Strategic Management Journal, vol 5, pp 171-180
47 B. WERNERFELT (1995), « The Resource-based View of the Firm : Ten Years Later », Strategic Management Journal, vol 16, n° 3, pp
171-174.
48 R. HALL (1993), "A framework linking intangible resources and capabilities to sustainable competitive advantage", Strategic
Management Journal, vol. 14, pp 607-618.
49 D.J. COLLIS, MONTGOMERY C.A. (1995), « Competing on Resources, Strategy in the 1990s », Harvard Business Review, pp 118-143.
50 J. BARNEY (1991), « The Resource-based Model of the Firm : Origins, Implications and Prospects », Journal of Management, vol 17,
n° 1, march; J. BARNEY (1996), « The Resource-based Theory of the Firm », Organization Science, vol 7, n° 5, septembre-octobre, p 469.
51 R.P.RUMELT (1995), « Inertia and Transformation » in C.A. MONTGOMERY (Ed) : Resource-Based and Evolutionary Theories of the
Firm, Harvard Business School, Kluwer Academic Publisher, pp 101-132.
LE CONTROLE DE GESTION : 36
L’approche fondée sur les ressources complète plus qu’elle ne se substitue aux
approches orientées sur les positions de marché.52
Les deux démarches stratégiques: les modèles LCAG et ISPC
Le modèle LCAG Le modèle ISPC
Modèle traditionnel initié par Learned Modèle intention stratégique – pôle de compétences ou approche
Christensen Andrews et Guth ou modèle par les ressources
SWOT (strength, weakness, opportunity,
threat)
52 P. AUREGAN, P. JOFFRE et F. LEVIGOREUX (1997), « Modèles d’analyse stratégique » : contributions récentes, Encyclopédie de
gestion, volume 2, pages 2041 et sq. 1997.
LE CONTROLE DE GESTION : 38
ou créer une base de différenciation. C’est à travers ces activités que les
compétences centrales et les capacités organisationnelles s’expriment. La gestion
des activités et la reconnaissance de la plate-forme stratégique se nourrissent d’un
objectif commun, la création de valeur pour le consommateur.
1/3 LE PARADIGME STRATEGIQUE DES CONNAISSANCES
Plusieurs typologies ont été proposées pour cerner ce concept complexe. M.
POLANYI (1995)53 par exemple, a mis en évidence la dimension tacite des
connaissances et souligné le fait que l’on pense plus que ce que l’on peut en dire.
I. NONAKA (1994)54, a mis en évidence les processus de conversion possibles
entre les connaissances tacites et explicites qui renseignent sur les possibilités de
transfert de connaissances dans les organisations. Les connaissances tacites sont
enracinées dans l’action, dans les expériences et sont impliquées dans des
contextes spécifiques. Elles comportent deux composantes (I. NONAKA, 1994),
une composante cognitive et une composante technique. La première se rapporte
aux schémas mentaux des individus tels des cartes mentales, des croyances, des
paradigmes et des points de vue. La composante technique consiste en des savoir-
faire pratiques, des tâches et des métiers applicables dans des travaux spécifiques.
La dimension cognitive des connaissances tacites est difficile à articuler et
façonne la façon dont nous percevons le monde55. Les connaissances explicites
sont plus déclaratives et d’ordre plus général, leur formalisation et leur
codification sont possibles. Certains auteurs56 remettent cependant en cause la
typologie et la distinction tacite-explicite qui revêt, selon eux, un caractère
artificiel voire inutile, car toute connaissance même explicite comporte une part
irréductible de connaissances tacites. C’est le cas par exemple des routines
organisationnelles dont la mise en œuvre et l’utilisation, même lorsqu’elles sont
formalisées, nécessitent la maîtrise de connaissances tacites. Il apparaît donc qu’il
ne s’agit pas tant de distinguer les deux types de connaissances que de
comprendre comment elles se combinent et interagissent (I. NONAKA, H.
TAKEUCHI, 199757). Ces derniers auteurs ont ainsi été les précurseurs du
knowledge management en proposant une théorie de la connaissance construite
autour de l’interaction dynamique entre les deux dimensions du transfert de
connaissances. Quatre modes de conversions de connaissances sont proposés : du
tacite au tacite (socialisation), du tacite à l’explicite (extériorisation), de l’explicite
au tacite (intériorisation) et de l’explicite à l’explicite (combinaison). Enfin, est
aussi envisagé le transfert entre les niveaux ontologiques suivants : individu,
groupe, organisation et inter-organisations. « L’organisation doit mobiliser les
58 S.G. WINTER S.G. (1987), « Knowledge and Competence as Strategic Assets » pp 159-184 in TEECE D.J. (1987), The Competitive
Challenge : Strategies for Industrial Innovation and Renewal, Balinger.
59 In M. INGHAM, 1995, p 40 (préface I. NONAKA et H. TAKEUCHI, édition française, De Boeck Université)
60 D.J. TEECE (1998), « Capturing Value from Knowledge Assets : The New Economy, Markets for Know-How, and Intangible Assets »,
California Management Review, vol 40, n°3, pp 55-79
61 R. REIX (1995), « Savoir tacite et savoir formalisé dans l’entrerprise », Revue Française de Gestion, n°105, septembre-octobre, pp 17-28
62 R.M. GRANT (1997), « The Knowledge-based View of the Firm : Implications for Management Practice », Long Range Planning, vol
630, n°3, juin; R.M. GRANT (1996),« Knowledge and the Firm : Overview », Strategic Management Journal, vol 17, hiver, pp 5-9; R.M.
GRANT (1996),« Toward a Knowledge-based theory of the firm », Strategic Management Journal, vol 17, hiver, p 109-122.
LE CONTROLE DE GESTION : 40
63 K.B. CLARK, T. FUJIMOTO (1991), Product Development Performance : Strategy, Organization and Management in the World Auto
Industry, Harvard Business Shool Press, Boston, MA.
LE CONTROLE DE GESTION : 41
64 D.J. TEECE, PISANO G. SHUEN A. (1997), “Dynamic Capabilities and Strategic Management”, Strategic Management Journal, vol 18,
n°7, pp 503-533.
65 C.A. O’REILLY et M.L. TUSHMAN (2004), « The Ambidextrous Organization », Harvard Business Review, Avril, pp 74-81.
LE CONTROLE DE GESTION : 42
66 J.B. HARRELD, C.A. O’REILLY, M.L. TUSHMAN (2007), “Dynamic Capabilities at IBM : Driving Stategy into Action”, vol. 49, n°4,
pp 21-31.
67 R.M. CYERT, J.G. MARCH (1963), A Behavioral Theory of the Firm, Prentice-Hall, Englewood Cliffs, NJ.
68.R.R. NELSON, S.G. WINTER (1982), An Evolutionary Theory of Economic Change, Belkrap Press, Boston, MA.
69 Op. cit
70 B. EKOKA ESSOUA (2006), « Cohérence logique entre le modèle stratégico-opérationnel en contrôle de gestion et la théorie de la firme-
compétence foncière des économistes évolutionnistes », CCA, numéro thématique, octobre, pp 139-161.
LE CONTROLE DE GESTION : 43
71 M. LEBAS : les défis de la prochaine décennie Revue Française de Comptabilité N° 265 Mars 1995.
LEBAS M. : Les nouveaux modes de management des entreprises : diviser pour régner et intégrer pour créer de la valeur, un défi pour les
comptables, Revue Française de Comptabilité, N° 270 Septembre 1995, pages 46 et sq.
MILKOFF R. : Une double lecture d’ABC, Modèles comptables et modèles d’organisation, Actes du XVI congrès de l’AFC, Montpellier
1995, volume 2, pages 799 et sq.
72 H. BOUQUIN : Les fondements du contrôle de gestion, que sais-je, PUF, Paris, Octobre 1994.
On retrouve la thèse de l'Analyse Stratégique des Coûts (PORTER) ou de la Comptabilité Stratégique (BROMWICH), qui repose sur une
évaluation des coûts des concurrents, des clients et des fournisseurs.
73Ph. LORINO : Le contrôle de gestion stratégique: la gestion par les activités, Paris, Dunod 1991; J.L. MALO : Première approche d'un
cadre méthodologique de recherche en comptabilité, Annales du Congrès AFC, Reims 1989, p.384-420.
74P. PERROT: Coût et stratégie, RFC, septembre 1992.Voir également l’approche de D. BESSIRE : Régulation et systèmes de planification
- contrôle ; 273 pages, Economica , Paris 1995.
75 E. CAUVIN : Développement et test du modèle de comptabilité par activités : une application au secteur des services, Thèse, AIX 1994.
LE CONTROLE DE GESTION : 44
76 Y. DE RONGE : Contrôle de gestion et compétitivité, pages 477 et sq., in M. INGHAM Editeur : Management Stratégique et
compétitivité, De BOECK Université, 1995.
77 P. MEVELLEC , La comptabilité à base d’activités, une double question de sens, Revue Comptabilité Contrôle Audit, N°1 , Mars 1995
p62 et sq.
78 P. MOON et K. BATES : Core analysis in strategic performance appraisal, Management accounting research, N°4, 1993.
79 A. JUGNET : un renouveau de la valeur pour un renouveau de la comptabilité de gestion ; Actes du VXI congrès de l’AFC, Montpellier
1995, volume 1, pages 387 et sq.
80 T. H. JONHSON : Management Accounting in the 21st century, Journal of cost management, volume 9, N°3, fall 1995, pages 15 et sq.
81 Ph. ZARIFIAN : La gestion par activités et par processus à la croisée des chemins, Gérer et comprendre, Mars 1995, N°38, pages 80 et
sq.
B. MARTORY et Y. PESQUEUX : La nouvelle comptabilité des coûts, 295 pages, PUF, Paris 1995.
LE CONTROLE DE GESTION : 45
82 G. SOLLE Guy et T. GARROT : Le processus : une voie de refonte du contrôle de gestion dans les entreprises de services, application
au secteur public non-marchand. Actes du VXI congrès de l’AFC, Montpellier 1995, volume 2, pages 977 et sq
A. BURLAUD , T. SAADA , C. SIMON : Comptabilité analytique et contrôle de gestion, 199 pages, VUIBERT, Paris 1995.
83 H. BOUQUIN : Les fondements du contrôle de gestion, PUF, que sais-je ?, Paris 1994.
84 Ph. LORINO , J-C TARONDEAU : De la statégie aux processus stratégiques. Revue Française de gestion, Janvier 1998, p. 5-17.
LE CONTROLE DE GESTION : 46
l’élasticité de la demande par rapport au prix pour principal du contrôle de gestion stratégique est alors
chaque attribut ; suivi de la stratégie des concurrents basé sur l’analyse stratégique des coûts : mesure des
actuels et potentiels ; définition de la structure des coûts des concurrents, de la courbe de demande de
coûts et des technologies utilisées par chacune des l’industrie afin de s’assurer que le volume associé à la
firmes de l’industrie, définition des conditions du domination par les coûts existe, structure de la chaîne
maintien de la longévité du portefeuille d’attributs de valeur par rapport à celle des concurrents, position
des produits. relative face aux facteurs d’évolution des coûts de
chaque activité, analyse des économies de champ, qui
résultent de la production simultanée de plusieurs
produits par une seule entreprise.
Traduction de la stratégie en règles d’actions Continuum entre les routines statiques et les routines
opérationnelles et capitalisation des expériences des dynamiques
actions opérationnelles
Activités, base de liaison entre ressources et objets de Compétences collectives et routines
marge organisationnelles
Outils de gestion, supports imparfaits de Routines organisationnelles, modèles d’interactions,
l’apprentissage collectif solutions efficaces à des problèmes particuliers
Recherche causale, démarche d’ensemble de Principe de recherche, caractéristique des routines
résolution des problèmes, de pilotage ou de prise de dynamiques (principes d’essais-erreurs, innovation)
décision
Source : B. EKOKA ESSOUA (2006, p 153)
L’auteur donne ainsi quelques exemples des similitudes des deux conceptions. Sur
la similitude « outils de gestion » et « routines organisationnelles », on voit en
effet que, parmi les routines présentés par G. DOSI et R.R. NELSON (1994)85, se
trouvent les « modes opératoires, les processus de choix des investissements et les
processus de délibérations » qui sont en fait des outils de gestion. Sur la similitude
entre « l’activité comme unité de base de l’analyse » et les « compétences
collectives et routines organisationnelles », l’auteur rappelle que l’activité peut
être vue comme la mise en œuvre d’une compétence individuelle ou collective.
Les savoir-faire de l’entreprise se trouvent ainsi au cœur des deux conceptions de
la firme et du contrôle. Sans prétendre à une opérationnalisation précise et
complète des concepts de capacités dynamiques, il apparaît néanmoins que le
contrôle de gestion actuel a réussi à intégrer la logique causale dans la démarche
de pilotage, à concevoir les outils de gestion comme support d’apprentissage
organisationnel et à s’appuyer sur une vision de l’entreprise fondée sur les
processus et les compétences.
Le lien entre contrôle de gestion et apprentissage organisationnel a été également souligné par M.
BOLLECKER (2002)86. En effet, la phase de suivi des réalisations du processus de contrôle de gestion
(régulation budgétaire) est source d’apprentissage organisationnel dans la mesure où elle génère des actions
correctrices conduisant à des modifications de pratiques et de routines des centres de responsabilité.
En effet, des apprentissages « simple boucle » au sens de C. ARGYRIS et D.
SHÖN (1978)87 sont réalisés lorsque les corrections portent sur les moyens
humains (remotiver, rendre plus compétent) ou matériels. Des apprentissages
« double boucle » au sens de C. ARGYRIS et D. SHÖN sont réalisés lorsque les
objectifs même sont amenés à être remis en cause. L’originalité de l’étude de M.
BOLLECKER est d’apporter à une vision classique de l’apprentissage un ancrage
au niveau individuel (et non plus seulement organisationnel) grâce au modèle de I.
NONAKA et H. TAKEUCHI (1997)88.
85G. DOSI et R.R. NELSON (1994), « An introduction to evolutionary theories in economics », Journal of Evolutionary Economics, pp.
153-172;
86 M. BOLLECKER (2002), “Le rôle des contrôleurs de gestion dans l’apprentissage organisationnel : une analyse de la phase de suivi des
réalisations », CCA , Tome 8, Volume 2 , pp 109-126 .
87 C. ARGYRIS, D; SHÖN (1978), Organizational Learning: A Theory of Action Perspective, Addison Wesley, Reading Mass.
88 I. NONAKA, H. TAKEUCHI (1997), La connaissance créatrice. La dynamique de l’entreprise apprenante, De Boeck Université.
LE CONTROLE DE GESTION : 50
En particulier, l’auteur met en évidence l’impact des contrôleurs de gestion dans le processus d’extériorisation,
combinaison, socialisation et intériorisation des connaissances.
l’extériorisation des connaissances - conversion de connaissances tacites en connaissances explicites - se fait
par la mesure périodique des résultats (« formalisation de l’expérience dans des documents comptables »).
La combinaison des connaissances – échanges de connaissances explicites – est réalisée à travers la diffusion
de ces documents comptables agrégés
L’intériorisation – transformation de connaissances explicites en connaissances tacites – se manifeste lorsque
des leçons tirées de l’analyse des documents sont « encodées dans les modèles mentaux individuels »
La socialisation – partage de connaissances tacites – est développée lorsque les discussions dans les réunions
de suivi de réalisation (portant sur les écarts entre objectifs et réalisations) par exemple conduisent à un
« échange d’expériences » entre individus.
Le contrôleur de gestion joue un rôle crucial dans cette dernière phase car, tout
d’abord, il est souvent la tierce personne permettant de lever les freins liés aux
capacités cognitives limitées et aux stratégies défensives individuelles. De plus, il
joue souvent le rôle d’un « traducteur » des informations entre les centres
opérationnels et la hiérarchie et entre responsables opérationnels. « Plus
précisément, ce rôle d’intermédiaire et d’interlocuteur semble nécessaire pour
expliquer à chacun les objectifs et contraintes des différentes centres
opérationnels ainsi que pour la recherche de compromis et de solutions
permettant d’apaiser les conflits mais aussi pour rappeler régulièrement aux
directeurs de centre les objectifs généraux de l’entreprise à atteindre » (p 123).
Or lorsque ces échanges permettent de mettre en œuvre des actions de correction,
on peut constater des apprentissages organisationnels.
89 J. SHANK & V. GOVINDARAJAN , (1993) Strategic Cost Management: The New Tool for Competitive Advantage, New York, The
Free Press
LE CONTROLE DE GESTION : 51
ENTRANTS POTENTIELS
Menace de nouveaux entrants
MARGES
Développement technologique
Approvisionnements
Logistique Production Logistique Commercialisati Services
interne externe on
Activités principales
LES ACTIVITES CREATRICES DE VALEUR, NATURE ET IDENTIFICATION :
Les activités créatrices de valeur sont les différentes activités physiques et
technologiques qu’une firme réalise dans le but de créer un produit qui possède
une valeur pour ses clients. Les activités créatrices de valeur sont donc les
éléments de base de l’avantage concurrentiel parce qu’elles sont source de
différenciation ou de réduction des coûts. L’identification des activités créatrices
de valeur est fonction de leur technologie et de leur importance stratégique. I1 faut
subdiviser en activités les grandes fonctions que sont notamment la fabrication et
la commercialisation. Le découpage peut être de plus en plus fin, mais les
activités doivent rester distinctes. Le degré adéquat de désagrégation dépend des
bases économiques des activités et des finalités qui motivent l’analyse de la
chaîne de valeur. Toutefois, on doit séparer les activités lorsque:
- elles reposent sur des mécanismes économiques différents;
- elles ont un impact potentiel élevé sur la différenciation;
- elles représentent une fraction importante ou croissante des coûts.
Les activités principales et de soutien:
Les activités principales: Les activités de soutien :
Ce sont les activités impliquées dans la création Ce sont les activités nécessaires à l’accomplissement des
du produit, sa vente et son transfert au client. activités principales
PORTER distingue cinq activités principales: PORTER en dénombre quatre:
la logistique des entrées: activités liées à la les approvisionnements: activités liées à la façon dont on
réception, au stockage et à la distribution des se procure les divers éléments nécessaires à la
éléments entrant dans la fabrication du produit; fabrication et à la vente du produit;
la production: activités liées à la transformation le développement de la technologie: activités liées à
de ces éléments en un produit fini; l’amélioration du produit ou du processus de production
la logistique des sorties: activités liées au (technologie au sens large: Recherche et
rassemblement, au stockage et à la distribution Développement, informatisation de la gestion de
des produits aux clients; production,...);
le marketing et les ventes: activités liées à la la gestion des ressources humaines: activités liées au
façon par laquelle le client se procure le produit et recrutement, à l’emploi, à la formation, à la promotion et
90 M.E. PORTER , Competitive Advantage: Creating and Sustaining Superior Performance, New York, The Free Press, 1985.
LE CONTROLE DE GESTION : 53
Focalisation/spécialisation Focalisation/spécialisation
(sur les coûts) (sur la différenciation)
ETROIT
Politique de Prix Index du prix relatif du SBU Changements dans l’index des
relativement aux concurrents (moyenne prix relatifs
des concurrents = 100)
Programme de Marketing Pourcentage des dépenses de marketing Changements dans ce
dans les ventes pourcentage
Stratégie d’investissements Valeur des usines et des équipements Changements dans les ratios
relativement aux ventes, à la valeur d’investissements
ajoutée et à l’emploi. Changements dans la nouveauté
Nouveauté des équipements et usines Changements dans la
Productivité du travail productivité Changements dans
Pourcentage des stocks / ventes le pourcentage
externe. L’optique est, ici, fondamentalement différente et met l’accent sur le rôle
du contrôleur de gestion dans l’élaboration du référentiel concurrentiel. La
connaissance de la tendance des parts de marché, des ventes, des résultats et des
coûts des entreprises concurrentes est d’une grande importance. Ces variables
permettent de juger de la position stratégique d’une entreprise et de son évolution.
Elles forment la base du tableau de bord concurrentiel dont l’objet est de guider
l’entreprise dans sa recherche d’avantages compétitifs. Ces informations doivent
ainsi être recueillies, en valeur relative et réelle.
Part de marché relative et absolue (source: DIXON, 1993, p. 613)
PART DE PART DE MARCHE RELATIVE
MARCHE REELLE
Diminution Stable Augmentation
Perte de terrain par Perte de marché avec le Gain de terrain / concurrent
Diminution rapport à l’ensemble des concurrent principal contre principal
concurrents tous les autres Perte /ensemble concurrents
91 L. DEMIRAG (1994) : Management Control Systems and Performance evaluations in Japanese Companies : a British perspective,
Management Accounting, London, vol. 72 n°7, Jul/aug, p 18-20
92 K. SIMMONDS (1986) : The accounting assessment of competitive position, European Journal of Marketing, vol.20, n°l, p 16-31
LE CONTROLE DE GESTION : 58
étudier les coûts d’une entreprise concurrente). données complète excellemment l’évaluation de la
soutenabilité de la stratégie nouvellement engagée par
l’entreprise étudiée.
K. WARD (1993) fournit l’exemple des stratégies de prix des sociétés japonaises.
Les sociétés américaines se sont rendu compte, mais trop tard, que les premières
avaient un réel avantage de coûts, ce qui leur permettait de toujours maintenir leur
stratégie de prix. Les sociétés américaines avaient, en effet, initialement supposé
que les sociétés japonaises fixaient leur prix de vente en-dessous de leurs coûts
dans un but de domination du marché, et ce avant de restaurer des prix de vente
leur garantissant une rentabilité.93 La connaissance des niveaux de coûts aurait
permis d’éviter cette erreur. L’analyse des indicateurs précédents doit être
complétée. En effet, la prévision des stratégies futures (celles que les concurrents
pourraient mettre en œuvre compte tenu de leurs capacités actuelles), doit être
faite. L’ensemble de ces informations forme ainsi un tableau de bord concurrentiel
qui doit être régulièrement mis à jour (voir ci-après).
2- LA METHODE CORE DE MOON ET BATES: EVALUATION DE LA
PERFORMANCE STRATEGIQUE DES CONCURRENTS
MOON et BATES (1993) font partie des auteurs préconisant une orientation externe de la comptabilité de
gestion.94 Elle doit en effet permettre d’évaluer la « performance stratégique » des concurrents. Ils proposent
une méthode permettant d’évaluer cette performance à partir de l’information publiée. Les états financiers sont
analysés à la lueur des éléments stratégiques, pour évaluer le succès de la stratégie mise en œuvre. Cette
méthode, baptisée CORE (Context - Overview - Ratios – Evaluation) , comprend quatre étapes.
1) Mise en scène de l’entreprise au travers de l’étude du contexte interne et externe
La connaissance du contexte dans lequel évolue l’entreprise est obligatoire si l’on veut comprendre ses états
financiers.
Le contexte externe de l’entreprise.
L’objet est de définir tout d’abord les caractéristiques typiques du secteur d’activités (industriel ou de services)
auquel appartient l’entreprise étudiée afin d’apprécier la structure « normale » qu’auraient les états financiers
d’une entreprise typique de ce secteur. Les caractéristiques sont par exemple la proportion d’actifs circulants et
fixes, le type de financement, les caractéristiques du cycle d’exploitation et ses conséquences en termes de
position de trésorerie ... (DE RONGE, 1992). Ensuite, les états financiers doivent être évalués en tenant compte
des changements intervenus dans les conditions générales du marché pendant la période d’analyse de
l’entreprise (MOON et BATES, 1993). Les changements économiques, politiques et juridiques influencent
positivement ou négativement les états de l’entreprise. L’impact de telles influences doit être estimé.
Le contexte interne de l’entreprise.
L’évolution dans le positionnement stratégique de l’entreprise modifie progressivement les états financiers de
l’entreprise. L’analyse de cette évolution sur la période d’analyse est alors essentielle. De même, l’estimation
nécessaire de la soutenabilité de l’avantage compétitif obtenu à la suite de ces changements passe par
l’identification et le suivi des facteurs-clés de succès de la stratégie choisie.
2) Appréciation globale
Après avoir situé l’entreprise dans son contexte, une première analyse des états financiers est proposée par
MOON et BATES. Le but est d’estimer globalement (sans aucun calcul) la performance de l’entreprise à partir
de la tendance des ventes, des profits et des actifs et dettes. Cette analyse peut être complétée par toute
93 K. WARD (1993) : Accounting for a sustainable competitive advantage, Management Accounting, London, vol. 71 n°9, October, p. 36
94 P. MOON & K. BATES (1993) : CORE analysis in strategic performance appraisal, Management Accounting Research, 4, p 139-152
LE CONTROLE DE GESTION : 59
information publiquement disponible. Il doit être tenu compte d’événements intervenus pendant la période
d’analyse tels que grèves, fusions - acquisitions, ... ainsi que des changements dans la politique comptable
utilisée.
3) Utilisation de ratios
Une évaluation de la réalisation des objectifs stratégiques est proposée dans cette troisième phase. L’essentiel
est de choisir des ratios représentatifs des facteurs-clés de succès établis dans la première phase et d’avoir
une certaine constance dans leurs choix. L’interprétation des ratios ainsi calculés est réalisée en étudiant les
ratios sur plusieurs années afin d’évaluer plus profondément la performance de l’entreprise, et en tenant
compte, à titre de norme éventuellement, de la comparaison avec ceux d’entreprises concurrentes et opérant
dans le même secteur.
4) Evaluation globale de l’entreprise
Une évaluation globale de la performance de l’entreprise est enfin réalisée, en se basant sur les trois premières
étapes.
95 C. MICHAILESCO : Les déterminants de la qualité de l’information comptable, thèse, Paris Dauphine, Septembre1998.
LE CONTROLE DE GESTION : 60
Présentation des actions menées pour l’insertion et l’emploi des minorités, des jeunes, des femmes et des
handicapés sur le territoire national et à l’étranger.
Présentation des éléments du domaine sociétal :
Présentation des actions pour la protection de l’environnement, maîtrise de l’énergie et de leurs impacts.
Présentation purement qualitative et descriptive des divers éléments permettant d’apprécier la continuité
temporelle du groupe (absence d’évaluation économique et financière).
Perspectives et Prévisions
Perspectives du groupe et orientations stratégiques (produits, marchés, choix de développement).
Objectifs chiffrés fixés (rentabilité, croissance du CA, parts de marché, ... Prévisions du chiffre d’affaires et du
résultat d’exploitation futurs. Explications des variations entre prévisions précédentes et réalisations.
Informations segmentées par activités (CA, résultat d’exploitation, éléments d’actifs, effectifs, investissements).
Informations segmentées par zones géographiques (CA, résultat d’exploitation, éléments d’actifs,
investissements, effectifs).
Evaluation des atouts compétitifs du groupe:
Accès aux ressources : réserves ou détention en propre de sources de matières premières, pouvoirs de
négociation auprès des fournisseurs, contrats privilégiés à long terme, intégration en amont;
Unités de production: capacité, flexibilité, productivité, emplacement géographique, spécialisation, certification
aux normes de qualité ;
Maîtrise des coûts : structure des coûts, rentabilité, courbes d’expérience, maîtrise des charges d’exploitation;
Technologie : détention de procédés, importance des innovations annuelles
Qualité du management: organisation interne, maîtrise des diverses fonctions ;
La position sur les marchés de l’entreprise: classement par rapports aux concurrents, possibilité de manœuvre
sur les marchés
L’image de l’entreprise: réputation, marques, prix et distinction, efforts publicitaires, mécénat et sponsoring ;
L’offre des produits : complémentarité de l’offre, étendue et positionnement de la gamme ;
La valeur des produits : norme de qualité, supériorité technique, prix, services accessoires, adaptation à la
demande ;
La distribution des produits : autorisation, partenariat, déploiement du réseau, équilibre géographique,
adaptation du réseau à l’évolution de la demande.
96 K. WARD (1992) : Accounting for the Competition, Management Accounting, London,vol.70,n°2, Feb, p 19-20
LE CONTROLE DE GESTION : 61
97 LLFORBIS et N.T. MEHTA (1981) : Value-Based Strategies for Industrial Products, Business Horizons, 24, 3 (May), p 44-52
98 Ph. LORINO (1994) : Target Costing ou gestion par coûts-cibles. Première partie : boîte à outils ou mode d’apprentissage
organisationnel. Qu’est ce que le « Target Costing ? », Revue française de comptabilité, n°255, Avril, p35-45
LE CONTROLE DE GESTION : 62
Coût objectif
Pour une entreprise industrielle, les produits sont les vecteurs privilégiés du profit
et la profitabilité des produits se joue pour l’essentiel dans les phases amont
(planification et conception) du cycle de vie, et non dans les phases aval
(production et distribution). Le constat est désormais bien connu : 80 % des coûts
du cycle de vie d’un produit sont préengagés (prédéterminés par les décisions déjà
prises) lorsque la première unité du produit est lancée en production, alors même
que 80 % de ces coûts ne seront effectivement dépensés qu’après cette date.
La détermination du coût -cible
Prix de vente Marge = Coût acceptable
Coût-cible Kaizen costing
(objectif au
lancement) Target costing
profit-cible global entre ces différents produits. Ph. LORINO indique deux voies
pour y parvenir.
La décomposition organique La décomposition fonctionnelle
Le coût - cible est éclaté sur les Elle part du marché et du client (les fonctions du produit sont les
sous-ensembles qui composent le besoins du consommateur que le produit doit satisfaire. Il est alors
produit. Il est donc supposé qu’il attribué un degré d’importance de chaque fonction pour le client. Le
existe une continuité dans la degré d’importance de la fonction est déployé entre les composants à
composition organique du produit. l’aide d’outils matriciels, permettant de calculer le degré d’importance
de chaque composant. Une comparaison entre le degré d’importance
du composant et son poids dans le coût total est effectuée. Elle permet
de mettre en évidence une liaison entre le coût d’un composant et sa
valeur pour le client.
L’analyse du produit en panier d’attributs initiée par LANCASTER fonde la
décomposition fonctionnelle qui tient compte du coût des attributs et des
préférences du consommateur. Lors de l’estimation de coûts, plusieurs techniques
sont utilisables.99
Les techniques d’estimation des coûts
Méthodes paramétriques Méthodes analogiques Méthodes analytiques
Basée sur la corrélation statistique entre Le coût du nouveau produit est Fondées sur des analyses très
le coût d’un produit et des dérivé de la comparaison entre techniques du produit qui
caractéristiques physiques (volume, le coût d’un produit similaire dégagent des éléments
poids) afin d’obtenir le coût estimé. existant et le nouveau produit techniques de coûts (nombre
Cette technique grossière peut être (par évaluation différentielle) d’heures d’usinage ... ), valorisés
employée dans les phases amont de la avec les données de la
conception. Cette méthode n’est donc comptabilité analytique.
pas applicable dans le cas d’un produit
dont les caractéristiques ont
radicalement été remises en cause.
RESUME
L’analyse de l’avantage concurrentiel associée à l’analyse stratégique des coûts
forment le socle de l’approche externe du contrôle de gestion stratégique. Cette
approche illustre la version minimale du contrôle de gestion stratégique qui prend
ses racines dans l’approche classique de la stratégie basée sur les déterminants de
l’avantage concurrentiel. Cette approche classique de la stratégie a pour but
principal de mesurer la position compétitive de l’entreprise dans son secteur et par
rapport aux principaux concurrents. Elle sert de support au contrôle de gestion
stratégico-fonctionnel qui va déployer la stratégie dans l’organisation. Les outils
tels que la gestion stratégique des coûts, le tableau de bord concurrentiel ou la
méthode des coûts-cibles sont des apports indispensables aux systèmes actuels de
contrôle de gestion. Le target costing représente bien la philosophie de
l’orientation externe du contrôle de gestion stratégique. La position compétitive
de l’entreprise est assurée, en « indexant » les coûts sur une référence externe, le
prix de vente. Le déploiement des coûts entre les produits tient compte des
99 LORINO Ph. (1994) : Target Costing ou gestion par coûts-cibles. Première partie : boîte à outils ou mode d’apprentissage organisationnel.
Qu’est ce que le « Target Costing ? », Revue française de comptabilité, n°255, Avril, p35-45
LE CONTROLE DE GESTION : 64
Centres Les centres d’investissement sont des centres où le dirigeant est responsable de l’importance
d’investissem de certains actifs utilisés: il combine au mieux profits immédiats et investissements tendant à
ent accroître les bénéfices futurs. Le dirigeant dispose d’une large autonomie et son objectif est
de maximiser le rendement de l’investissement (c’est-à-dire un taux de profit) ou le bénéfice
résiduel (le bénéfice net moins le coût d’utilisation du capital).
La mise en œuvre de centres de profit peut présenter des difficultés, notamment
lorsqu’une généralisation de ces centres incite les responsables à donner la priorité
au bénéfice à court terme et à refuser de saisir les opportunités à moyen et long
terme. Choisir entre ces diverses options est une tâche essentielle mais délicate
qui dépend du degré de délégation, de la nature de l’activité, des objectifs
généraux de l’entreprise, du créneau qu’elle cherche à occuper, etc. Gérer par
centres de responsabilité suppose de bien appréhender les différentes facettes de la
notion de responsabilité, d’autant plus que l’équilibre entre centralisation et
décentralisation est souvent difficile à trouver et sujet à de profondes révisions au
cours du temps. Dans cette approche, les contrats passés entre unités jouent un
rôle essentiel. De façon générale, l’un des objectifs de la décentralisation est
d’exploiter au mieux des sources d’informations disparates et disponibles
localement dans des contextes particuliers en déléguant tout ou partie du pouvoir
de décision à différents niveaux de l’organisation. Mais cette décentralisation du
pouvoir suppose une bonne prise de conscience des implications, souvent
contradictoires, du concept de responsabilité, qui comprend deux notions
distinctes: l’engagement et la maîtrise. L’évolution permanente de la technologie,
des marchés sur lesquels l’entreprise se développe et de ses ressources humaines,
LE CONTROLE DE GESTION : 69
101 R DEMESTEERE, Ph LORINO N MOTTIS : Contrôle de gestion et pilotage, Nathan, 1997 Page 42.
102 THOMAS C., 1997, « Déterminants et évolution de la hiérarchie au sein des organisations», Thèse de doctorat en Sciences de Gestion,
Université de Nice-Sophia Antipolis.
LE CONTROLE DE GESTION : 70
montant des actifs utilisés (ROI). En mesurant les profits d’une unité par rapport
aux actifs employés, les dirigeants peuvent apprécier si les profits permettent un
retour suffisant adéquat sur le capital investi dans l’unité. Le capital a toujours des
usages alternatifs, et les dirigeants doivent être attentifs à ce que les rendements
des actifs soient supérieurs au coût d’opportunité du capital investi. Sans une
mesure du ROI, il est difficile de motiver les cadres, pendant le processus de
budgétisation et de les inciter à estimer correctement les cash-flows futurs. Cette
approche incite les dirigeants à se concentrer sur la façon de réduire le niveau des
besoins en fonds de roulement utilisés par les unités décentralisées. Cette
approche de la performance financière connaît plusieurs limites et peut provoquer
des distorsions dans le comportement des responsables de centres de profit. De
nombreux travaux académiques ont montré, depuis longtemps, comment réduire
ces inconvénients en utilisant une mesure de la performance alternative, le
bénéfice résiduel. Ce concept réapparaît avec force sous les vocables de
management par la valeur actionnariale.
PORTEE ET LIMITES DU ROI (RETURN ON INVESTMENT)
La méthode DUPONT de NEMOURS a été créée en 1903 lorsqu’il a fallu gérer
plusieurs unités décentralisées et allouer des ressources pour la fabrication, l’achat
et la vente des différentes unités. Pour prendre des décisions sur l’allocation des
fonds d’investissement, les dirigeants appliquaient la règle du coût d’opportunité
du capital et arrêtaient l’investissement dans une unité, dès lors qu’il était possible
d’investir dans une autre unité pour un meilleur rendement. Pour guider leurs
décisions, le critère du ROI a été développé. Donaldson Brown, le directeur
financier de Dupont (puis par la suite de General Motors dans les années 1920), a
étendu considérablement la pratique du R0I en montrant qu’il pouvait être écrit
comme le produit de deux ratios : le profit (P), ou retour sur ventes, et le ratio de
rotation des actifs (turnover) (T) : ROI = P* T = Profit / ventes * Ventes / actifs.
Les ratios P et T pouvaient être décomposés, à leur tour, pour représenter la
formation du revenu et des coûts ainsi que la formation du capital investi.
L’exemple de Matsushita
De façon parallèle et apparemment indépendante, une autre forme d’organisation des centres de profit apparaît
dans les années 1930 chez Matsushita au Japon. La stratégie était de sélectionner une personne convenable
pour chaque segment d’activité et de déléguer le pouvoir à ce directeur. Le rôle du président était de contrôler
les directeurs de la division afin que leurs actions personnelles soient conformes aux objectifs généraux de
l’organisation. Chaque centre d’activité avait un pouvoir indépendant et autonome quant aux fonds générés et à
sa capacité en matière de R&D. Matsushita, à la différence de presque toutes les autres sociétés Japonaises,
n’a pas compté sur la dette pour financer ses opérations. Chaque activité était dotée d’un stock de ressources
financières, matérielles, humaines et technologiques. Chaque responsable de division avait la maîtrise de son
stock de capital. Les directeurs de la division étaient responsables des deux tâches principales: gestion des
profits et gestion des fonds investis. La société a développé son propre système interne d’allocation pour rendre
efficace une gestion des fonds décentralisée. Le capital interne d’une division correspondait à la somme des
actifs fixes et du besoin en fonds de roulement ( capital de fonctionnement). Le BFR était normalisé et rapporté
au franc de vente puis budgété.
Les règles pour l’allocation du capital interne étaient fixées comme suit:
1 Le capital interne = Besoin en fonds de roulement + actifs fixes - réserves.
2 Un intérêt est appliqué sur le capital interne = 1% par mois, (payé à la direction centrale chaque mois)
LE CONTROLE DE GESTION : 72
3 Un impôt de la direction centrale est appliqué pour couvrir les frais généraux = 3% des ventes, payés chaque
mois.
4 Après que ce paiement ait été déduit, le profit net du centre devrait égaler 10% des ventes ( l’objectif cible)
5 Des dividendes et un impôt égaux à 60% du profit du centre est remis au siège dans le mois suivant. Le solde
est conservé pour financer de nouveaux investissements.
6 Si les ressources du centre étaient insuffisantes, il pouvait, temporairement, emprunter au siège. Les fonds
excédentaires pouvaient être déposés dans la Banque Matsushita et rapporter intérêt.
7 Pour les investissements importants exigeant d’importantes sorties de fonds, la proposition devait être
soumise à la direction centrale pour approbation.
A l’origine, le ROI a été utilisé pour augmenter l’efficacité des directeurs qui
étaient surtout des ingénieurs ne pratiquant la gestion que sur le tas. Même dans le
cas de Matsushita qui souhaitait faciliter la décentralisation, le contexte était celui
de la gestion d’activités par divisions qui travaillaient sur des produits, des
processus, des marchés et des clients qui étaient bien connus. Les cadres et les
responsables d’unités étaient encouragés à développer la prise de décision
décentralisée. Après la deuxième guerre mondiale, les entreprises ont commencé
à diversifier leurs activités et à pratiquer la croissance externe en achetant des
entreprises dans d’autres secteurs. Cette augmentation massive des
investissements de diversification impliquait souvent une réduction des
compétences spécifiques au secteur pour la direction générale. Les besoins du
management en matière d’aide à la décision étaient tels qu’ils ne pouvaient plus
être assurés au niveau des centres de responsabilité. Le ROI qui n’était qu’un outil
statistique de mesure de la performance permettant la discussion au niveau des
plans à long terme est devenu une réalité en lui-même. Une norme - cible envoyée
du haut de la hiérarchie vers le bas pour responsabiliser les directeurs des
divisions. Les incitations et promotions devenaient dépendantes de leur capacité à
réaliser l’objectif cible en matière de ROI. Il est clair qu’avec une telle
philosophie, des effets pervers sont à redouter. L’exemple simple ci- après, inspiré
de celui proposé par Kaplan et Atkinson, en montre quelques aspects.103 Les
performances d’une division sur trois périodes de quatre mois consécutives sont
les suivantes :
Période ROI PROFITABILITE ROTATION
1 12.6% 17.1% 0.736
2 13.4 20.2 0.664
3 15.4 22.7 0.679
A première vue, la performance paraît excellente, avec une augmentation du R0I
pour chaque période. Cependant, la décomposition révèle une augmentation de la
rentabilité (retour sur les ventes) qui surcompense une réduction de la rotation
des actifs. Après enquête, la direction a appris que le responsable de la division
avait augmenté la production dans les périodes 2 et 3, avec accumulation de
stocks de produits finis. Une partie des coûts a été absorbée dans les stocks
permettant une amélioration de la marge sur les produits réellement vendus.
L’augmentation du stock est reflétée par la baisse du ratio de rotation des actifs.
104 Des problèmes surviennent également avec la vente possible des actifs. Si le centre possède un actif de
20000 qui rapporte 18% par an, elle peut augmenter son ROI en le cédant et, ce, bien qu'il crée de la valeur
pour l’entreprise puisqu’il rapporte plus que le coût du capital. Après la vente le ROI est de : ( 20000 – 3600)/
(90000 – 20000) = 23,4%.
LE CONTROLE DE GESTION : 74
est soustrait au bénéfice net et le solde est appelé bénéfice résiduel. Gardons
l’exemple des deux centres de responsabilités.
Calcul du Revenu Résiduel :
DIVISION 1 DIVISION 2
Capitaux investis 90000 50000
Bénéfice net après impôts 20000 12500
Coût du capital 15% 13500 7500
Bénéfice Résiduel 6500 5000
ROI 22.2% 25%
Le calcul du bénéfice résiduel est à l’avantage de la Division 1.La différence RI
de 1500 est due au rendement en excès du coût de capital de 3,75% (18,75% -
15%) appliqué au supplément de capital investi (40000). Si la Division 1 retient
un projet d’investissement de 15000 qui rapporte 20% son bénéfice résiduel
augmentera, alors que s’il se débarrasse d’un actif de 20000 qui rapporte 18%, le
bénéfice résiduel diminuera.
Options pour le centre de responsabilité 1 :
Situation actuelle OPTION 1 OPTION 2
Nouvel Investissement de Ventre d’un actif de
15000 20000
Capitaux investis 90000 105000 70000
Bénéfice net après impôts 20000 23000 16400
Coût du capital 15% 13500 15750 10500
Bénéfice Résiduel 6500 7250 5900
Le bénéfice résiduel augmente à chaque fois qu’il y a un investissement qui
rapporte plus que le coût du capital. Cet indicateur produit une congruence entre
l’objectif d’évaluation de la division et les actions qui maximisent la richesse
économique de l’entreprise. De ce point de vue, le bénéfice résiduel offre des
avantages considérables sur le ROI. De plus, cette mesure est aussi plus flexible,
puisqu’un coût du capital différent peut être appliqué à investissements de risques
différents. Le coût du capital par centres de responsabilités peut être différent, les
actifs investis dans un même centre peuvent être comparables mais figurer dans
des classes de risque différentes (cas du risque financier sur des comptes clients
ou des actifs fixes très spécialisés durables).105 L’évaluation par le bénéfice
résiduel permet d’identifier pour chaque direction, le coût des capitaux ajustés à
des risques différents alors que le ROI ne le peut pas. Finalement, ce type de
critères financiers - ROI et bénéfice résiduel - présente des avantages indéniables
pour responsabiliser des managers sur la rentabilité du capital investi tout en leur
laissant d’importantes marges de manœuvre. Cependant, il faut absolument tenir
compte du contexte stratégique avant de les mettre en œuvre : privilégiant la
production de cash-flow par les centres de responsabilité, ces indicateurs sont
particulièrement adaptés à des centres « vaches à lait », mais sans doute peu
recommandés pour des centres « dilemmes », dans lesquels la priorité est
d’investir, de développer des produits, de faire de la recherche, donc de sacrifier le
105 Voir toutefois la discussion sur le coût du capital dans la section suivante.
LE CONTROLE DE GESTION : 75
106 G. HIRIGOYEN (1997), Stratégie et finances, Encyclopédie Economica, volume 3,page 3064.
LE CONTROLE DE GESTION : 76
107 J-C. MATHE (1995), Rétrospectives et perspectives en stratégie de l’entreprise, Economie et Sociétés, Mai, Tome 29, N°5, pages 31 et
sq.
LE CONTROLE DE GESTION : 77
Stratégie opérationnelle :
Approche d’une logique de la valeur organisationnelle et
concurrentielle sous contrainte de la norme financière globale
développement des axes produits marchés
Construire et développer un avantage compétitif soutenable
108 C. HOARAU ET R. TELLER (2001), Création de Valeur et management de l’entreprise, Vuibert, Paris, pages 49 et sq.
LE CONTROLE DE GESTION : 78
109 J. CABY, M-F. CLERC-GIRARD et J. KOEL : Stratégie d'entreprise et finance: Le processus de création de valeur, REVUE
FRANÇAISE DE GESTION, MARS-AVRIL-MAI 1996.
LE CONTROLE DE GESTION : 79
facteurs de création Croissance des Période de croissance Investissements Coût du capital
de valeur ventes de la valeur BFR Immobilisations
marge
IS
110 J-F. REROLLE: Evaluation d’entreprise, principes et méthodes. Revue fiduciaire Comptable, N°223, 1996, pp 38 et sq .
LE CONTROLE DE GESTION : 80
personnes en 1990 à 35 650 en 1992. Les investissements productifs et les dépenses de R-D sont
considérablement réduits : 419 millions de dollars en 1989, 82 millions en 1991,
3. une redistribution aux actionnaires de la plus grande partie du cash-flow générés par ces mesures.
Cet exemple d’application de la stratégie de maximisation de la valeur pour l’actionnaire a déclenché une
controverse à propos de l’hypothèse d’une focalisation excessive de ce type de stratégie sur les choix à court
terme, controverse amplifiée par la comparaison des gains des actionnaires et des dirigeants salariés avec
l’importance des licenciements mis en œuvre.
Cette approche de l’évaluation devrait se généraliser et devenir une compétence
fondamentale des contrôleurs de gestion en liaison avec la direction générale. De
nombreux auteurs pensent que les approches d’évaluation privilégiées seront
celles qui ont le pouvoir explicatif le plus puissant. Une mesure systématique des
performances économiques des différentes activités devrait permettre de réaliser
une meilleure allocation des ressources de l’entreprise en fonction de l’impact des
projets sur la valeur actionnariale. La valeur apparaît alors comme le
dénominateur commun de la planification stratégique et financière, de la politique
d’acquisition et de désinvestissement. Les dirigeants et les salariés seront incités à
maximiser la valeur à partir de mécanismes de primes ou de bonus liés à
l’enrichissement des actionnaires. La phase essentielle du processus est la
réflexion stratégique. Plus importante que le résultat final, cette étape permet
d’identifier les forces et les faiblesses des différentes activités de l’entreprise, leur
niveau de risque, celles qui créent de la valeur et celles qui en détruisent, les choix
stratégiques qu’il convient d’adopter (désinvestir, maintenir ou alléger, améliorer,
réinvestir, repositionner), les conditions financières du développement de
l’entreprise, les éléments clés de succès et les facteurs d’échec des stratégies
retenues.
2- LA DISCIPLINE DE LA VALEUR (VALUE BASED MANAGEMENT)
Le concept de value based management repose sur l’idée qu’une entreprise doit
réussir à la fois sur le marché des biens réels et sur le marché financier. Négliger
l’un des deux ne manquera pas d’avoir des conséquences dramatiques sur marché
réel. Il convient, dans cette optique, d’aborder l’actionnaire comme un client et de
comprendre quelles sont ses attentes. L’application d’une discipline de la valeur
s’inscrit dans cette volonté de convaincre le marché de sa détermination à créer de
la valeur à long terme pour l’actionnaire. Cette approche implique d’introduire,
dans le contrôle des performances, de nouvelles mesures plus significatives de la
création de valeur. On peut les résumer sur le tableau suivant :
La discipline de la valeur :
Source : J-F.REROLLE, F. QUENTIN, J-M BEGHIN : L’art de la finance, Les Echos, 1998.
ANALYSER ALIGNER CREER
Diagnostic stratégique de la valeur Projet d’implantation Décisions stratégiques
Analyse de marché financier Outils d’analyse Exécution stratégique
Audit des processus clefs de la Tableaux de bord de la valeur Management du risque
création de valeur Processus décisionnel Politique financière
Portefeuille d’améliorations Formation et communication (dividendes, levier, scissions,
Gouvernement d’entreprise rémunérations, rachats d’actions,
signalisation au marché, choix
LE CONTROLE DE GESTION : 81
d’investissement).
Les pratiques observées montrent que deux attitudes extrêmes sont fréquentes.
Dans un cas, la valeur est conçue comme un vecteur de communication,
l’entreprise met en place des indicateurs de création de valeur pour les diffuser
auprès des investisseurs. Dans un autre cas, la valeur est considérée comme le
dogme suprême et l’entreprise déploie des indicateurs qui s’imposent comme des
normes rigides dont l’objectif est d’encadrer les décisions des acteurs et de
rémunérer les managers sur la base du respect des règles financières imposées.
Ces deux attitudes sont certes excessives mais elles montrent bien le risque de
dérive qui peut aboutir à se focaliser sur le court terme et à sous-investir de façon
systématique en privant ainsi l’entreprise des décisions stratégiques susceptibles
de déboucher sur des avantages compétitifs réels et durables. Le fait de faire
primer la rationalité financière dans des choix fondamentaux qui engagent l’avenir
comporte des risques qui ne peuvent être négligés. On peut se demander pourquoi
les entreprises ont mis si longtemps pour adopter cet indicateur qui a l’avantage
d’être capable de surmonter les difficultés pourtant bien connues du ROI introduit
par la société Dupont il y a presque un siècle ?
On peut, avec Kaplan et Atkinson, avancer trois séries d’arguments.111
Les types de dysfonctionnement dus à la concentration sur le bénéfice comptable et le ROI n’ont été
correctement perçus que récemment. La prise de conscience vient probablement de l’influence du leveraged -
buy - out et du Management buy Out dans les années 1980. Ces activités ont été menées par des sociétés qui
n’exploitaient pas efficacement leur base d’actifs pour les actionnaires. Les activités de LBO et de MBO ont
fourni une visibilité externe de l’approche par la discipline du marché et son impact sur les décisions des
entreprises en matière de financement et d’investissement. Cela a encouragé les dirigeants dans les années
1990 à faire beaucoup plus attention à la maximisation de la richesse des actionnaires et à se méfier des
indicateurs basés sur la maximisation des performances purement comptables. La valeur économique ajoutée
exige que les entreprises spécifient un coût du capital, soit globalement pour l’ensemble des activités ou pour
chacune des divisions et activités. Les dirigeants étaient peu disposés à spécifier un coût du capital par
activités, surtout s’ils doivent faire des calculs explicites au sujet des ajustements par classe de risques. Jusqu’à
la diffusion et à la reconnaissance des approches issues du MEDAF (développées dans les milieux de la
finance académique dans le milieu des années 1960), les dirigeants utilisaient des techniques relativement
arbitraires pour estimer le coût du capital ajusté au risque. Dans l’approche EVA, le coût des capitaux propres
est reconnu explicitement. Comme ce coût du capital est soustrait des bénéfices des divisions, le bénéfice net
global de l’entreprise est inférieur à celui de la comptabilité financière fourni aux actionnaires. La plupart des
entreprises souhaitent une cohérence complète entre la comptabilité interne et externe quitte à repousser une
procédure qui n’a que des objectifs internes mais qu’elles ne pourraient pas employer dans les états financiers
publiés. Par contre, les primes d’incitation en faveur des cadres et dirigeants ont souvent été basées sur une
mesure de type EVA. Dans ces plans, la plage de la prime est définie comme un pourcentage (de l’ordre de
10%) de l’excédent des profits réalisés sur un taux préétabli de rendement du capital investi. Cependant, les
deux approches EVA et ROI présentent des problèmes supplémentaires quant il s’agit de les rendre
opérationnelles comme mesure de performance au niveau des divisions ou de centres de responsabilité. A ce
stade il convient de mieux explorer les voies d’une intégration des approches par les processus avec les
approches centrées sur la valeur. Pour améliorer les mesures du ROI ou de EVA, il conviendrait de procéder à
111 R. KAPLAN et A. ATKINSON ; Advanced Managment Accounting, 3° édition, (date ?), pages 508 et sq.
LE CONTROLE DE GESTION : 82
de nombreux ajustements. L’information financière telle qu’elle est publiée est peu utile à des fins de contrôle.
Les correctifs importants concernent l’imputation du coût du capital sur les actifs utilisés, la comptabilisation et
l’identification des investissements immatériels sources de performance (les intangibles tels que la R&D, la
publicité, les actions de formation), le retraitement des actifs loués, la prise en compte de l’inflation, la méthode
d’amortissement, etc. De ce point de vue, la méthode EVA préconisée par Stewart contient une liste de près de
200 ajustements prévus pour opérer le passage du résultat comptable à celui de l’EVA. Relier efficacement la
comptabilité financière publiée à l’extérieur et la comptabilité de gestion utilisée pour formaliser les décisions en
interne est une tâche importante pour le contrôle de gestion. Cette fonction d’intégration est analysée
ultérieurement.
112 J. SLYWOTZKY: Value Migration, Harvard Business School Press, 1996. A. RAPPAPORT: Creating
Shareholder Value, The Free Press, New York, 1986, G.B. STEWART, The Quest for Value, Harper Business,
1991; T. COPELAND, T. KOLLER, J. MURRIN, Valuation - Measuring and Managing the Value of Companies,
John Wiley and Sons, 1990.
LE CONTROLE DE GESTION : 83
comptable de ces mêmes capitaux. La MVA est en fait très proche du ratio Q de
Tobinqui est égal au rapport de la valeur de marché des capitaux investis à la
valeur de remplacement des actifs (approximée le plus souvent par la valeur
comptable). L’EVA peut être définie selon la formule suivante:
EVA = RCAI - (Kw x Capitaux investis) ; (RCAI = résultat courant après
impôts et Kw = coût moyen pondéré du capital).
Un dirigeant peut prendre des décisions d’investissement non conformes au
meilleur intérêt des actionnaires parce, d’une part il n’a pas à supporter le coût des
capitaux investi et que, d’autre part, il ne perçoit aucune rémunération en
contrepartie de la valeur créée pour les actionnaires. L’EVA, permet de rémunérer
les dirigeants en fonction des bénéfices générés tout en tenant compte de
l’importance du capital investi. Le résultat courant avant impôts (RCAI) est
considéré comme représentatif du résultat opérationnel, qui est ensuite minoré
d’un montant correspondant au coût du capital, déterminé en considérant que la
valeur économique des actifs existants est représentative du capital mis à la
disposition de l’entreprise ou d’un centre de responsabilité. Du fait de
l’importance des distorsions comptables, le total de l’actif tel qu’il figure au bilan
ne correspond ni à la valeur de réalisation des actifs ni à leur valeur de
remplacement. Le bilan est donc d’un intérêt assez limité lorsqu’il s’agit d’évaluer
la situation nette. S. STEWART procède à plus de 200 ajustements afin d’arriver
à une estimation de la valeur des actifs. Selon TODD T. MILBOURN la plupart
des entreprises estiment que 15 ajustements, au maximum, sont réellement
nécessaires. Parmi ceux-ci, citons la compensation des dettes d’exploitation et des
actifs circulants, l’imputation des écarts d’acquisition bruts sur les réserves, la
neutralisation des provisions pour restructuration, l’imputation au compte de
résultat des frais de recherche et de développement (et éventuellement les frais de
publicité) et la neutralisation des provisions pour dépréciation des stocks calculée
selon la méthode LIFO (last in-first outi). Ces ajustements sont considérés comme
étant assimilables aux fonds propres. Leur impact sur les fonds propres et le
résultat courant avant impôts est présenté ci-après:
Eléments assimilables aux fonds propres
A ajouter aux fonds propres : A ajouter au RCAI
Quasi-fonds propres, Provision pour impôt Augmentation des quasi-fonds propres, Dotations aux
différés , Provision pour dépréciation des stocks provisions pour impôts différés, Dotations à la provision
(méthode Lifo) Amortissements cumulés des pour dépréciation des stocks, Dotation aux
écarts d’acquisition, Ecarts d’acquisition non amortissements des écarts d’acquisition, Augmentation
constatés , Immobilisations incorporelles, des immobilisations incorporelles, Eléments
Eléments exceptionnels cumulés, Autres exceptionnels, Augmentation des autres provisions
provisions (créances douteuses, garantie ).
En outre, l’endettement net est augmenté de la valeur capitalisée des loyers versés
au titre de contrats de location simple. Le but de ces ajustements est d’obtenir un
bilan qui traduise plus fidèlement la valeur économique des actifs que le bilan
social.
Bilan économique (corrigé)
Actif Passif
LE CONTROLE DE GESTION : 84
Actifs circulants (stocks évalués selon la méthode Dettes financières à court terme
FiFo) – Dettes d’exploitation Dettes financières à long terme
Ecarts d’acquisition nets Fonds propres (nets des montants imputés sur les
Immobilisations nettes réserves)
Actif total (valeur économique des capitaux Passif total (montant des sources de financement)
investis)
La principale faiblesse de l’EVA, que la méthode partage avec la plupart des
autres indicateurs de performances financières, concerne l’absence de prise en
compte des évolutions futures, (voir ci-après).
3.2 LES PRINCIPAUX APPORTS DU CONCEPT
Le raisonnement de type EVA permet de sensibiliser les dirigeants sur le rôle des
sources de financement comme facteur de compétitivité et notamment sur
l’impact des taux d’intérêt. D. JACQUET113 rappelle qu’au début des années
quatre-vingt la rentabilité industrielle de constructeurs automobiles japonais
(Toyota et Nissan) était voisine de celle de General Motors (16 % pour les
premiers, 14 % pour GM); mais les taux d’intérêts étaient voisins de 3 % au
japon, alors qu’ils étaient de l’ordre de 13 % aux Etats-Unis. Dans ce contexte,
l’écart entre rentabilité industrielle était pour les japonais de 13 % et pour General
Motors de 1% seulement.
Le coût global du bilan :
Source : D. JACQUET : EVA et MVA, Analyse Financière, septembre 1997, N°112.
Le coût financier des stocks Le coût du crédit client
Un centre de profit qui génère un chiffre d’affaires Une division qui génère un chiffre d’affaires X avec un
d’un milliard de euros, un résultat d’exploitation grand distributeur qui tente de lui imposer un
égal à 7 % du chiffre d’affaires, soit 70 millions, et accroissement des délais de règlement de 2 à 3 mois. Si
dispose d’un niveau de stocks s’élevant à 100 le directeur de la division n’est pas évalué sur le coût de
millions. Le responsable de la division est incité à son actif économique, il sera tenté d’accorder cette faveur
réduire ses stocks mais ne sait pas valoriser cet à son client sans trop résister. Or, le coût sera réel pour
enjeu. Si le coût du capital représente 10 %, une l’entreprise et ses actionnaires. Prenons un coût de
bonne compréhension de l’EVA lui montre que le capital égal à 10 %. Quelle augmentation des prix de
coût financier des stocks est égal à 10 % de 100 vente pourrait compenser l’accroissement des stocks,
millions, soit 10 millions de euros. Pour un taux donc des capitaux engagés ? Le coût financier de
d’impôt de 33 %, cela représente un équivalent de l’augmentation des délais de règlement est égal au coût
15 millions de euros de résultat d’exploitation. de capital multiplié par l’accroissement des capitaux
Ainsi, plus de 20 % du résultat d’exploitation de la investis, soit : 10 %*X* (1 + 20,6 %) / 12 = 0,01X. Le
division sont gaspillés dans le coût financier d’un résultat d’exploitation après impôts doit donc payer ce
actif qui ne génère pas de valeur ajoutée. De plus, surcoût financier: Delta RE x (1 - 33,33 %) = 0,01X. D’où :
une réduction, par exemple, de moitié de ces Delta RE = 0,015X. Une augmentation de prix
stocks générerait une valeur économique de 5 correspondante représente le ratio Delta RE/X et est
millions de euros nets d’impôts, équivalente à un égale à 0,015. Passer le délai de règlement de 2 à 3 mois
accroissement de 7,5 millions du résultat a une incidence financière qui peut être compensée par
d’exploitation, soit une augmentation de 10 % de une hausse des prix de 1,5 %.
ce résultat, ou de 0,75 % des prix de vente.
Cet exemple permet de constater que les systèmes de rémunération basés sur les
résultats peuvent conduire à une consommation excessive du capital, tandis que
ceux basés sur le taux de rentabilité des fonds propres sont susceptibles d’avoir
l’effet inverse. Cela permet d’expliquer pourquoi l’EVA a été choisie par de
nombreuses entreprises comme moyen d’établir un lien entre le choix des projets
et la rémunération des dirigeants.
4- LA LOGIQUE DE FINANCIARISATION : PREDOMINANCE DES MODELES
FINANCIERS D’EVALUATION STRATEGIQUE
La logique du déploiement de la stratégie de la valeur financière à l’ensemble de
l’organisation repose sur les modèles financiers d’évaluation stratégique. Dans ces
modèles, la chaîne des cash-flows futurs attendus détermine la valeur financière
(VF) (G. HIRIGOYEN, 1997).114 Cette valeur (VF) comprend d’une part la valeur
des actifs existants et la valeur des opportunités de croissance. (VF) est donc une
valeur actuelle de flux futurs ou une combinaison de flux constatés (historiques) et
prévisionnels. Cette approche de l’évaluation économique repose sur l’idée que la
valeur d’une entreprise est la somme des valeurs actuelles des composantes
suivantes: la rente perpétuelle (ou non) dégagée par les actifs existant au moment
de l’évaluation, les économies futures d’impôts réalisées grâce à l’endettement (du
fait de la déductibilité des charges financières) et les revenus futurs dégagés par
de nouveaux investissements. Rente et cycle de vie posent des problèmes
complexes liés à la mesure de la performance, à la mesure du risque et donc du
coût du capital et à l’identification des processus de valorisation des produits. Se
pose également le problème du temps et notamment de la détermination des
cycles pendant lesquels les flux attendus créeront de la valeur. Les économies
d’impôts liées à l’endettement peuvent faire l’objet d’une estimation à partir des
documents comptables actuels (notamment l’annexe). Le modèle Growth Share
Matrix du Boston Consulting Group a mis en valeur la dimension financière des
modèles stratégiques. G. HIRIGOYEN propose une présentation critique, qui met
l’accent sur le principal message de la démarche: l’analyse par la valeur fait de
l’actionnaire un arbitre (orientation des choix stratégiques vers la maximisation de
la création de valeur) et un gardien (surveillance des coûts d’opportunité des fonds
propres investis par la société, la performance des investissements s’appréciant
moins en termes de rentabilité qu’en termes de création de valeur). 115
Les modèles financiers d’évaluation stratégique
Source : D’après J.ALLOUCHE et G. SCHMIDT : les outils de la décision stratégique, pages 90 à 92, tome1,
Collection Repères, La Découverte, 1995.
De nombreux modèles financiers d’évaluation stratégique sont aujourd’hui disponibles. Ils se présentent
souvent comme des prolongements des modèles de portefeuille.
114 G. HIRIGOYEN (1997) , Stratégie et finances, Encyclopédie Economica, volume 3,page 3064.
115 G. HIRIGOYEN: Nouvelles approches du lien stratégie - finance. Revue française de gestion, 92, janvier - février 1993, p. 64-73. G.
DEFORTELLE : La valorisation stratégique, Banque - Stratégie, 88, octobre 1992, p. 21-23. CABY Jérôme et KOEHL Jacky : Les modèles
financiers d’évaluation stratégique. Une validation empirique, communication aux XIièmes Journées nationales des IAE, 1991. G.
HIRIGOYEN et J. CABY: La création de valeur de l’entreprise , Economica, Paris, 1997, 117 pages. Ch. HOARAU : Diagnostic financier
et diagnostic de l’entreprise, PUF, Paris, 1996, 319 pages.
LE CONTROLE DE GESTION : 87
Opérationnelle
Accroissement des 29.5% Dettes 474000
investissements
Accroissement du BFR 16.5% Nombre d’actions 48940
Taux d’impôt 30%
Coût du capital 9.25% Période de prévision 5 ans
Calcul des cash-flows
Année Ventes Marge Résultat Taux d’impôt Impôt Cash-flow
s (B) Opérationnel (D) (000) Net
(000) (000) (E) = D*C (000)
(A) C = (A) x (B) C–E
COUT DU CAPITAL
116 A. NABET ., G. DAVID (2003), « L’introduction d’indicateurs de création de valeur actionnariale dans un groupe français : SNCF
participations », CCA, Tome 8, vol 1, pp. 111-128.
LE CONTROLE DE GESTION : 91
117 Ch. HOARAU: Diagnostic financier et diagnostic de l’entreprise, PUF, Paris, 1996, 319 pages.
LE CONTROLE DE GESTION : 92
118 Voir G. CHARREAU : Finance d’entreprise. Les Essentiels du Management, EMS, 227 pages, 1997
LE CONTROLE DE GESTION : 93
- le modèle de valorisation des options qui peut permettre d’évaluer des projets
d’investissement dont certaines caractéristiques sont similaires à celles des
options. 119
D’autres méthodes sont utilisées par les praticiens. Le modèle fondé sur la
croissance des dividendes présente l’inconvénient de reposer sur une hypothèse
de croissance continue des dividendes et ne tient pas compte du niveau de risque
attaché à l’investissement. Certaines entreprises utilisent des approches
comptables pour évaluer le coût du capital. Parmi ces méthodes, on peut citer:
1. - La méthode de la capitalisation des dividendes, qui a tendance à conduire à
une sous-évaluation du coût du capital car elle ne tient pas compte des plus-
values ;
2. - La méthode fondée sur le ratio, cours/bénéfice, ou son corollaire, le taux de
rendement des bénéfices, méthode qui ne tient pas compte de la croissance
attendue des résultats de l’entreprise ;
3. - Le taux de rentabilité des capitaux investis. Certaines entreprises utilisent
cette approche mais il est peu réaliste d’évaluer un faible coût du capital
simplement parce que l’activité présente un faible taux de rendement comptable;
4. - Le taux de rentabilité des projets marginaux. Certaines entreprises classent les
projets en fonction de leur taux de rentabilité, donnant le feu vert à ceux offrant le
taux le plus élevé ;
5. - Le coût de financement. Si les projets sont évalués en fonction du taux
d’intérêt payé par l’entreprise sur ses emprunts, le taux d’actualisation ne tient pas
compte du risque total attaché à l’investissement ;
6. - Le rendement historique des actions de l’entreprise.
Dans l’ensemble, il apparaît que le modèle issu du MEDAF reste très utilisé en
pratique malgré les controverses auxquelles il donne lieu régulièrement. Dans la
mesure où il n’y pas de réel consensus sur l’estimation de du coût du capital, il
apparaît qu’un des piliers du contrôle de gestion financiarisé est fragilisé (voire
inexistant) ce qui peut conduire à sa remise en cause. On touche, là, à un point
central car le coût du capital reste la donnée fondamentale pour mesurer la
création de valeur. Sa mesure exerce une influence déterminante sur la valeur
attendue donc sur la stratégie. Une sous-estimation du coût du capital peut se
traduire par des investissements insuffisamment rentables et un gaspillage des
ressources financières. Une surestimation du coût du capital, peut priver
l’entreprise d’opportunités de croissance. De plus, le recours systématique au coût
du capital conduit les entreprises à étalonner ses performances internes sur des
indicateurs externes volatils déterminés sur des marchés financiers dont l’horizon
temporel est généralement plus court que celui des activités économiques.120
2- LES DIFFICULTES DE MISE EN ŒUVRE DU CONTROLE DE GESTION
ASSERVI A LA FINANCE
semble être une perspective intéressante dans la recherche d’une refondation des
pratiques managériales trop souvent perverties par un excès de financiarisation.
122 Voir sur ce point G.KOENIG : Management Stratégique, paradoxes, interactions et apprentissages, Nathan, (date ?), 534 pages,
notamment, Chapitre 4.
123 G HAMEL et CK PRAHALAD : La conquête du futur, Inter-Editions, 325 pages, 1995.
124 C. DEJOUX : Pourquoi les entreprises françaises s’intéressent à la théorie des ressources ? Direction et Gestion, N° 166, 1998.
LE CONTROLE DE GESTION : 103
125 Voir sur ces points : G. KOENIG : Management Stratégique, 544 pages, Nathan, 1996, notamment Chapitre 7.
126 G. MILAN "La plate-forme stratégique dans un environnement instable", Revue Française de Gestion, Novembre-Décembre 1991.
127 T . DURAND (2006), « L’alchimie de la compétence », Revue Française de Gestion, n° 160, pp 261-292.
LE CONTROLE DE GESTION : 104
saisir une opportunité ou de contrer une menace), rares, et difficiles à imiter (par
exemple enracinées dans des relations sociales ou historiques complexes). De
nombreuses théories ont articulé le concept de compétences autour de la notion de
savoirs et savoir-faire (ou connaissances tacites et explicites). Ainsi I. NONAKA
et H. TAKEUCHI (1997)128 ont bâti leur théorie autour de l’interaction
dynamique entre ces deux dimensions du transfert de connaissances. Les
connaissances tacites sont liées au savoir-faire de l’entreprise et se diffusent par
l’observation, l’imitation et l’expérience. Elles sont enracinées dans l’action, dans
les routines et dans un contexte spécifique. Les savoirs explicites sont au contraire
codifiés, transmissibles en un langage formel et systématique.
Quatre modes de conversion des connaissances sont proposés par I. NONAKA (1994): du tacite au tacite
(socialisation), du tacite à l’explicite (extériorisation), de l’explicite au tacite (intériorisation), et de l’explicite à
l’explicite (combinaison). Enfin, est aussi envisagé le transfert entre les niveaux ontologiques suivants :
individus, groupe, organisation et inter-organisations. Le passage du niveau individuel à organisationnel renvoie
au processus de capitalisation et d’apprentissage organisationnel (C. ARGYRIS et D. SCHÖN, 1978129).
Thomas DURAND (2000) va plus loin que cette distinction classique entre
savoirs tacites et explicites en soulignant la dualité cognitif/comportemental du
savoir. « La théorie de la compétence semble s’être jusqu’ici plus préoccupée des
capacités cognitives, telles que le savoir, le savoir-faire, les brevets ou les
technologies, que des questions de comportement des individus ou des groupes
sans parler de la culture et de l’identité d’une organisation ». L’auteur avance que
« le comportement et l’identitaire » constituent une dimension importante de la
compétence et propose un modèle de la compétence articulé autours de trois
dimensions : les connaissances (savoirs), les pratiques (savoir-faire) et les
attitudes (savoir-être).
Tableau 1 : Les trois types de savoirs, dimensions fondamentales des compétences
organisationnelles
Connaissances (savoirs) Ensemble structuré d’informations assimilées et intégrées dans des
cadres de référence qui permettent à l’entreprise de conduire ses
activités et d’opérer dans un contexte spécifique, en mobilisant pour
ce faire des interprétations différentes, partielles et pour partie
contradictoires.
Techniques (savoir-faire) Capacité à agir d’une façon concrète selon un processus ou des
objectifs prédéfinis.
Attitudes (savoir-être) Combinaison de différentes sous-dimensions telles que le
comportement, la culture, l’identité avec un dose certaine de
volonté, d’engagement et de motivation.
Source : T. Durand (2000), p. 278
Ces trois dimensions interagissent de façon dynamique et contribuent à
l’évolution de l’organisation à travers l’apprentissage qu’elles génèrent. En effet,
l’apprentissage par « le faire », l’apprentissage par « l’apprendre » et
128 I. NONAKA, H. TAKEUCHI (1997), La connaissance créatrice. La dynamique de l’entreprise apprenante, De Boeck Université.
129 C. ARGYRIS, D. SHÖN (1978), Organizational Learning : A Theory of Action Perspective, Addison Wesley, Reading Mass.
LE CONTROLE DE GESTION : 105
130 G CHARREAUX et P DESBRIERES : Gouvernance des entreprises : valeur partenariale contre valeur actionnariale, Revue Finance
Contrôle Stratégie, N° 2, Juin 1998, pp 57 - 88.
LE CONTROLE DE GESTION : 106
Dans l’approche financière traditionnelle, la valeur créée est égale à la rente reçue
par les actionnaires. Elle correspond à l’excédent de leur rémunération par rapport
au rendement attendu estimé, habituellement, à partir du modèle d’équilibre des
actifs financiers et en supposant un marché des capitaux efficient. La
rémunération des créanciers financiers étant égale à leur coût d’opportunité -
c’est-à-dire au coût de la dette risquée sur un marché présumé efficient -, les
actionnaires sont les seuls créanciers résiduels.
3.1 VALEUR PARTENARIALE ET VALEUR ACTIONNARIALE :
Valeur partenariale contre valeur actionnariale
Source : G. Charreaux et Ph. Desbrières Gouvernance des entreprises : valeur partenariale contre valeur
actionnariale, Finance Contrôle Stratégie, N° 2, Juin 1998, pp 58).
Valeur actionnariale Valeur partenariale
Les mesures telles que l’Economic La valeur partenariale s’appuie sur une mesure globale de la rente
Value Added (EVA) ou la Market créée par la firme en relation avec les différents Stakeholders non les
Value Added (MVA), reposent sur seuls actionnaires. Elle repose sur la logique de mesure de la rente sur
l’hypothèse traditionnelle que tous la base de l’analyse de la chaîne de valeur proposée par M. E. Porter.
les apporteurs de facteurs de En considérant la chaîne de valeur la plus simple, à savoir une firme
production - à l’exception des qui ne dispose que d’un seul fournisseur et d’un seul client, la valeur
actionnaires - sont rémunérés à leur créée, du côté du fournisseur, est égale à la différence entre le prix
coût d’opportunité (supposé le plus payé par la firme (le coût explicite) et le coût d’opportunité, soit le
souvent égal au prix du facteur prix minimum requis par le fournisseur pour entreprendre ou
établi sur un marché concurrentiel). poursuivre la transaction. La généralisation de cette démarche à
Les actionnaires, créanciers l’ensemble des clients et des différents partenaires apporteurs de
résiduels exclusifs, étant les seuls ressources (dont les salariés, les dirigeants, les actionnaires, conduit à
apporteurs de ressources à recevoir mesurer la valeur créée par différence entre les ventes évaluées au prix
la rente créée par la firme, la valeur d’opportunité et la somme des coûts d’opportunité pour les différents
créée n’est alors que la mesure de la apporteurs de ressources. Le résidu non affecté peut s’interpréter
rente qu’ils perçoivent. comme le « slack » managérial, c’est-à-dire l’excédent représentant la
latitude dont dispose le dirigeant dans ses négociations avec les
différents Stakeholders; ce slack, non partagé est réinvesti (notamment
sous la forme d’investissements de remplacement ) ou conservé sous
forme de liquidités.
L’exemple suivant donné par G. CHARREAUX illustre bien ce propos :
Considérons la chaîne de valeur la plus simple, à savoir une firme qui ne dispose
que d’un seul fournisseur et d’un seul client. Supposons que le fournisseur soit
disposé à contracter avec la firme pour un prix minimum de 100 égal à son coût
d’opportunité, et qu’en raison de l’asymétrie d’information ou d’un rapport de
pouvoir favorable au fournisseur, la transaction se soit conclue après négociation
au prix de 200, représentant le coût explicite pour la firme. Du côté du client, une
négociation a conduit la firme à conclure au prix de 900 alors que le client était
disposé à payer un prix limite de 1000. La valeur créée est égale à: prix
d’opportunité - coût d’opportunité = 1 000 - 100 = 900. La répartition de cette
valeur est la suivante :
fournisseur: 200 - 100 = 100 firme: 900 - 200 = 700 client: 1000 - 900 = 100
La part de la firme est égale au prix perçu diminué du coût explicite des
ressources. La répartition finale dépend des pouvoirs respectifs de négociation de
LE CONTROLE DE GESTION : 107
131 Voir aussi : Michel CAPRON et Françoise QUAIREL: Contrôle de gestion et pilotage des performances sociétales, Actes du XIX°
Congrès AFC, tome 2, Nantes, 1998.
LE CONTROLE DE GESTION : 108
ANALYSER Diagnostic stratégique de la valeur. Analyse de marché financier. Audit des processus-
clefs de la création de valeur . Portefeuille d’améliorations
ALIGNER Projet d’implantation. Outils d’analyse.Tableaux de bord de la valeur
Processus décisionnel. Formation et communication. Gouvernement d’entreprise
CREER Décisions stratégiques.Exécution stratégique. Management du risque.Politique
financière, (dividendes, levier, scissions, rémunérations, rachats d’actions, signalisation
au marché, choix d’investissement).
INTEGRER Prise en compte des stakeholders. Développements de la base de compétences, Gestion
de l’immatériel. Activation et évaluation des incorporels, Apprentissage
Le cadre théorique qui vient d’être esquissé repose sur la notion de base de
processus.
3.3 VERS UNE MESURE OPERATIONNELLE DE LA VALEUR PARTENARIALE
G. CHARREAUX (2007)132 a proposé une mesure opérationnelle de la valeur
partenariale. Abandonnant l’hypothèse traditionnelle selon laquelle les
actionnaires seraient les seuls créanciers résiduels, l’auteur inclut dans son modèle
l’ensemble des parties prenantes: clients, fournisseurs, financiers, salariés …. afin
d’appréhender plus correctement comment se forme et se répartit la valeur dans
une perspective partenariale. La valeur créée se calcule à partir des notions de prix
et coût d’opportunité. Le prix d’opportunité est « le prix au-delà duquel l’intérêt
de transaction disparaît pour le client ». Le coût d’opportunité représente « le prix
minimum qu’un fournisseur serait disposé à accepter pour effectuer la
transaction ». La valeur créée représente la différence entre le prix et le coût
d’opportunité. Il est à noter qu’une hypothèse du modèle est que la marge de
négociation est nulle vis-à-vis du concurrent le plus performant (c'est-à-dire qu’il
y a, pour ce concurrent, identité entre les éléments opportunistes et les éléments
explicites).
Concernant les ventes, la différence entre les ventes d’opportunité (évaluées en fonction du ratio ventes
explicites/ressources mobilisées) et les ventes explicites représente la valeur partenariale appropriée par les
clients. Concernant les charges, la différence entre les charges explicites et les charges d’opportunité (évaluées
en fonction du ratio charges explicites/ressources mobilisées) constitue la valeur partenariale respectivement
appropriée par les salariés, les fournisseurs et les financiers.
Le tableau ci-dessous retrace l’évaluation de la valeur partenariale créée par les
principaux constructeurs du secteur automobile européen en 2004.
Tableau : Evaluation de la valeur partenariale créée par les différents constructeurs (2004 en K€)
Peugeot Renault Fiat Volkswagen BMW
Ventes d’opportunité 59 658 527 40 715 000 52 443 059 102 035 521 45 790 987
Charges d’opportunité 50 972 978 34 787 396 44 807 994 87 180 401 39 124 382
- Consommations 40 039 011 27 325 320 35 196 448 68 479 755 30 732 000
externes d’opportunité
- Salaires d’opportunité 7 245 290 4 944 674 6 369 000 12 391 806 5 561 132
- Charges financières 3 688 677 2 517 402 3 242 546 6 308 840 2 831 250
d’opportunité
Valeur partenariale 8 685 549 5 927 604 7 635 065 14 855 119 6 666 605
132 G. CHARREAUX (2007), « La valeur partenariale : vers une mesure opérationnelle…. », CCA, tome 13, volume 1, juin, pp 7-47.
LE CONTROLE DE GESTION : 109
VP=VO-CO
Répartition de la valeur partenariale
Peugeot Renault Fiat Volkswagen BMW
Clients 40,9% 0% 57,8% 56,8% 9%
Fournisseurs 21,8% 14% 46,7% 22,6% 0%
Financiers 0% 13,6% 3% 6% 24,9%
Salariés 14,6% 8 ,1% 0% 11,2% 23,9%
Total valeur répartie 77,3% 35,7% 107,4% 96,6% 57,8%
aux partenaires
Valeur non répartie 22,7% 64, 3% -7,4% 3,4% 42,2%
(appropriée par la
firme)
Elément d’ajustement -7,1% -13% -13,4% -1,6% -15,1%
Valeur non répartie 15,6% 51,3% -20,8% 1,8% 27,1%
ajustée
Source : Extrait de G. Charreaux (2007, p 24 et 25)
« La valeur partenariale représente la valeur créée pour l’ensemble des acteurs de
la chaîne de valeur, compte tenu de ce que seraient disposés à payer les clients et
des rémunérations minimales que seraient prêts à accepter les apporteurs de
ressources. Pour la firme, il s’agit donc d’une valeur potentiellement appropriable
via l’amélioration de son pouvoir de négociation vis-à-vis de ses partenaires. » (p
24). L’intérêt de la démarche partenariale est qu’elle permet de réaliser un
diagnostic sur les différences de rentabilité des firmes d’un secteur en fonction de
leur position relative par rapport à leurs partenaires et à leurs concurrents. On peut
montrer, par exemple chez Volkswagen, qu’en raison d’un faible pouvoir de
négociation de la firme à l’égard de ses clients, la valeur partenariale revenant à
ces derniers est de 56,8%, tandis que la part que s’approprie la firme n’est que de
1,8%. A l’inverse, Renault parvient à s’approprier 51,3% de la valeur partenariale
ne laissant aucune part aux clients. Les différences de performances peuvent donc
s’expliquer par des différences de pouvoir de négociation vis-à-vis des clients,
fournisseurs ou financiers mais aussi par ses interactions avec ses concurrents.
« Une firme, par ses actions, modifie certes la valeur qu’elle crée et s’approprie
mais également, les valeurs créées et appropriées par ses concurrents et le secteur
tout entier » (p 36). Au-delà du diagnostic, cette valeur partenariale peut aussi
s’entendre de façon dynamique et permettre de saisir l’évolution de ces
interactions dans le temps. Enfin, l’auteur montre que la part revenant à
l’entreprise constitue un slack, une marge de manœuvre pour les dirigeants. Ces
éléments viennent ainsi renouveler l’approche patrimoniale classique de la
création de valeur.
133 Pierre MEVELEC/ De la nature des systèmes de coûts, Actes des XIVèmes Journées Nationales des IAE, volume I, pages 391 et sq.,
Nantes 1998, Presses Académiques de l’Ouest.
LE CONTROLE DE GESTION : 112
La production est différenciée autour de segments particuliers d’attributs. L’accent est mis sur
l’évolution du contenu du produit et l’importance des activités. L’entreprise bénéficie des
économies d’envergure sur certaines ressources communes et des économies de variété. La
Le modèle de variété
production conjointe de deux produits est obtenue à un coût moindre que pour la production
séparée. La méthode comptable repose sur la méthode A.B.C. Ce sont les inducteurs de coûts
qui permettent de regrouper les imputations de ressources en combinant les activités entre
elles. Le coût devient un construit complexe qui privilégie la recherche de l’exactitude.
La recherche du coût de produit n’est plus l’objectif fondamental. La notion de produit devient
de plus en plus tertiaire (accroissement de la part d’immatériel). La méthode laisse entrevoir la
possibilité de relier les coûts des activités aux attributs du produit, source de sa différenciation.
Dans le modèle de la variété, l’entreprise est assimilée à la gestion d’un portefeuille
d’activités.
Par rapport aux autres méthodes classiques, l’A.B.C. procure une analyse
transversale (et non verticale) de l’organisation hiérarchique et des grandes
divisions de l’entreprise (études, méthodes, production, contrôle qualité,
logistique, administration, système d’information). Chaque activité peut
contribuer à la position relative de la firme en termes de coûts et créer une base de
différenciation. Pour analyser les sources de l’avantage concurrentiel, il est
indispensable d’examiner de façon systématique toutes les activités qu’exerce la
firme et leurs interactions. La chaîne de valeur est l’instrument fondamental pour
y parvenir. Elle décompose la firme en activités pertinentes au plan de la stratégie,
dans le but de comprendre le comportement des coûts et de saisir les sources
existantes et potentielles de différenciation (voir le Chapitre 2).
1.3 LES TROIS GENERATIONS DE LA METHODE ABC / ABM
Les trois générations de la méthode ABC / ABM
D’après : P BARANGER et P MOUTON : Comptabilité de gestion, Hachette ,
pp 200 et suivantes, Paris, 1997.
Les systèmes de Les premiers systèmes de coûts par activités ont été mis en œuvre aux Etats-Unis.
coûts de la L’objectif essentiel était d’obtenir des coûts plus fiables en faisant disparaître les
première subventionnements croisés entre produits. L’ABC ne se limitait pas uniquement au calcul
génération des coûts et permettait aussi d’améliorer les activités (mais séparément) en réduisant leur
consommation de ressources ou en éliminant certaines activités sans valeur. Mais cette
méthode n’impliquait alors aucun changement organisationnel, ni aucune préoccupation
managériale.
Les systèmes de Les systèmes de coûts ne se limitent plus à l’obtention de coûts plus fiables et à des
coûts de la améliorations isolées des activités. Ils s’appuient sur une tout autre vision de l’entreprise,
seconde beaucoup plus transversale qui conduit à remettre en cause les traditionnels centres de
génération responsabilité. Ils sont résolument orientés vers le client et les processus destinés à le
servir. On identifie d’abord les processus, puis ensuite les activités qui permettent la
réalisation du processus. L’analyse débouche sur des améliorations continues ou des
reconfigurations de processus. La mesure de la performance (par l’intermédiaire des
inducteurs de coût et de performance) est primordiale pour orienter les actions. On parle
LE CONTROLE DE GESTION : 114
135 G. WEGMANN (2007), « Developments around the Activity-based Costing method: A state of the art », Congrès MCA, Paris.
136 R.S. KAPLAN, S.R. ANDERSON (2007), « Time driven Activity-based Costing: A simpler and More Powerful Path to Higher Profits,
Harvard Business School Press, Boston.
137 M. GOSSELIN, C. PINET (2006), « Dix ans de recherche empirique sur la comptabilité par activités : Etat de la situation actuelle et
perspective », Comptabilité, Contrôle, Audit,Tome 8, Vol. 2, p 127 à 146.
LE CONTROLE DE GESTION : 115
Processus de support :
formation, informatique, ressources humaines, etc.
Processus centraux
Conception Production Commercialisation Valeur Client
Processus de management
administration, finances, contrôle de gestion, organisation, etc.
PC 1
PC 2
PC 3
…
LE CONTROLE DE GESTION : 117
PM 1 PM 2 PM3 PM4 …
Gestion des tâches attribuées aux acteurs : Les tâches sont réparties entre les acteurs des différents
processus de façon à limiter les risques de fraudes et de malversations. La répartition effective des rôles
dépend du respect de règles de compatibilité et de validation en place dans le système. Une application
nommée SOD (« Separation Of Duties ») permet de vérifier de façon informatique la cohérence des rôles
attribués à un acteur.
Documentation des processus : elle repose sur 11 fiches pour chaque processus :
Fiche d’identification du processus
Liens amont/aval avec les autres processus
Charte d’organisation : compétences consommées pour les métiers (skills and roles)
Cartographie du processus (« Qui fait quoi ») : représentation graphique du chaînage des activités sur un axe
temporel
Points de contrôles. 2 types différents de points de contrôle à mentionner : ISO (si le point de contrôle concerne
les contrôles qualités) / BC (Business Control : si le contrôle ne concerne que l’entreprise, en interne)
Mesure des résultats : dashboard
Compliance test : vérification que les points de contrôle ont bien été effectués (Sarbanes Oxley)
Liste des applications clés et databases qui supportent les processus
Description du système d’archivage des documents liés au processus
La checklist des contraintes légales et réglementaires (en lien direct avec les Program Managers)
Applications supports des processus :
Les entreprises qui n’utilisent que SAP sont très rares
SAP définit 65 profils (1 seul par personne)
SAP est asservi aux processus et non pas le contraire : seules les fonctions basiques du PGI seront utilisées.
Tout est coordonné par les workflows (afin de gérer les « qui fait quoi »)
Librario enterprise : logiciel de récupération des informations dans les bases de données pour générer des
reporting.
Actuellement, sur les 36 processus, Les 6 plus complexes sont modélisés de façon informatique
(workflow).(Extrait d’entretien avec un responsable du site de Montpellier, octobre 2007)
coût des activités l’heure de main-d’œuvre directe, le kilogramme de matière consommée) ; les inducteurs
aux objets liés à l’organisation ( réglage pour une production par lots, nombre de commandes,
nombre d’ordres de fabrication, de livraisons, de lignes de facture); les inducteurs liés à
l’existence du produit (maintenance des dossiers techniques, modifications techniques,
conception des produits, nombre de références entrant dans la composition du produit);
les inducteurs liés à l’existence d’une capacité (éclairage, chauffage, assurance) .
Sous-traiter certaines Les activités secondaires peuvent être sous-traitées si leur coût est trop élevé.
activités ( restauration d’entreprise, entretien des locaux, gestion de la paie , établissement des
documents comptables)
Dimensionner correctement les activités, Redéployer les surcapacités et les
Equilibrer les activités ressources libérées par la suppression d’activités, Développer la formation pour
stimuler la créativité, Résoudre les goulets d’étranglement sur les activités critiques.
Réduire le temps de réponse aux demandes des clients.
L’approche par les processus montre que le coût est causé par de nombreux
facteurs liés par des interactions complexes. Pour comprendre le comportement du
coût, il faut donc comprendre les interactions entre ces facteurs. Chaque
déterminant implique des choix de la part de l’entreprise (par exemple, produire à
petite ou à grande échelle) qui pilotent le coût unitaire. La complexité de la ligne
de produit est un déterminant structurel des coûts. Un autre déterminant important
est l’engagement à l’égard de la qualité. Cette approche qualité est aujourd’hui
largement reconnue comme un atout concurrentiel clé. Cette approche se situe
dans une optique d’ingénierie simultanée et d’ingénierie de la valeur, mais peut
s’analyser selon la méthodologie ABC - ABM en termes de processus.
L’analyse de la valeur est une méthode pour concevoir un produit de manière qu’il assure au moindre coût
toutes les fonctions que le client désire, et qu’il est prêt à payer, et seulement celles-là, avec toutes les
exigences requises et pas plus. Elle vise à extraire les coûts inutiles d’un produit et à en améliorer la qualité par
la remise en cause du produit lui-même dans sa conception. Le cœur de l’analyse de la valeur est constitué par
la notion de fonction. En réponse à un certain nombre de besoins, un produit assure un certain nombre de
fonctions. Ces fonctions ont plus ou moins de valeur aux yeux du client, on leur attache plus ou moins de prix,
on est prêt à payer plus ou moins pour les obtenir. Cette démarche s’applique aux produits et à tout objet,
ouvrage, service, ou système. L’analyse de la valeur est un effort organisé combinant un ensemble de
techniques, le travail en équipe et la créativité, pour rendre plus fonctionnels et plus économiques les produits,
les procédés, les systèmes de production, d’exploitation ou d’organisation. L’idée essentielle est de recenser et
décrire avec précision les différentes fonctions du produit, puis de rechercher comment elles peuvent être le
mieux remplies au moindre coût. C’est un support pratique de l’innovation. Cette analyse s’applique, avec des
variantes, aux produits existants et aux produits nouveaux. Dans les deux cas, il s’agit d’identifier les fonctions
que doit remplir un produit (pour satisfaire des besoins ou des goûts) de déterminer leur coût spécifique (par
l’analyse des opérations), d’apprécier l’utilité et la valeur de chacune d’elles. Parfois, la découverte d’une
fonction inutile conduit à l’éliminer et provoque une économie de coût. Parfois, l’utilité se révèle d’ajouter une
nouvelle fonction au produit et l’étude peut aboutir à la conclusion que cela est possible pour un coût minime.
Alors que pour un produit existant on ne doit faire qu’un effort limité pour la recherche de nouvelles idées de
fonctions, au contraire, pour un produit nouveau, il peut être très utile de rechercher de nouvelles fonctions.
cercles de qualité, à la maintenance préventive et de fabrication, et le coût des audits qualité à la fin du
à la gestion des relations avec les fournisseurs processus de production.
dans le but d’améliorer la qualité de leurs
livraisons de matières premières.
Coûts des défaillances internes: Coûts des défaillances extérieures:
Ce sont les coûts occasionnés par la rectification Ce sont les coûts inhérents à la livraison de produits
des produits défectueux avant qu’ils ne défectueux au client :
parviennent au client : coûts d’interventions sous garantie, d’analyse des
Coût des rebuts, des retouches, des réparations, défauts, des retours, des rappels de produits, des
de la modification structurelle des produits, de poursuites au titre de la responsabilité produit et de la
contrôle des retouches, d’immobilisation des perte de clientèle.
machines et le coût du manque à gagner en raison
du moindre volume des produits mis en vente.
La mesure des coûts de la qualité est complétée par des informations spécifiques
sur les mesures non-financières de la qualité.
3.3 METHODES ABC - ABM ET VALEUR AJOUTEE ECONOMIQUE
Le déploiement du management par la valeur (approches EVA ou ROI) pose des
problèmes délicats quant il suppose des outils opérationnels de mesure de
performance par divisions ou centres de responsabilité. Il est nécessaire de
procéder à de nombreux ajustements pour que l’information financière puisse être
utilisée à des fins de contrôle. Les correctifs importants concernent l’imputation
du coût du capital sur les actifs utilisés, la comptabilisation et l’identification des
investissements immatériels sources de performance (les immatériels tels que la
R&D, la publicité, les actions de formation), le retraitement des actifs loués, la
prise en compte de l’inflation, la méthode d’amortissement, etc. De ce point de
vue, la méthode EVA préconisée par Stewart et ses nombreux ajustements prévus
pour opérer le passage du résultat comptable à celui de l’EVA constitue un apport
indéniable. Cet apport n’est cependant pas suffisant. L’utilisation de la base de
processus comme fonction d’intégration peut permettre de relier efficacement la
comptabilité financière publiée à l’extérieur et la comptabilité de gestion utilisée
pour formaliser les décisions en interne. On peut considérer qu’il s’agit d’une
mission centrale du contrôleur de gestion. Un des leviers majeurs pour améliorer
le pilotage en interne des indicateurs ROI ou EVA est sans doute à rechercher
dans l’approche en termes de processus. L’analyse aux niveaux des activités et
des processus (produits, clients, marchés, qualité, délais, variété, cash-flows, )
peut faciliter la prise de décision au niveau des centres de profits ou des SBU.
Cette approche permet d’abord d’identifier les actifs qui sont en relation avec les
charges encourues. Les dépenses en immobilisations sont des actifs temporaires
qui s’intègrent dans les produits et charges. La quasi-totalité des actifs
représentent des dépenses à incorporer dans les charges en fonction d’un cycle
donné. Le fait de pouvoir suivre l’ensemble des processus aboutissant aux
produits facilite considérablement l’évaluation du capital investi par activités.
L’exemple de calcul des besoins en fonds de roulement par activités, proposé par
LE CONTROLE DE GESTION : 121
139 Voir aussi l’approche de H. BOUQUIN : ABC et BFR Revue française de comptabilité, 1996.
140 R. KAPLAN et A. ATKINSON ; Advanced Management Accounting, 3° édition, pages 521 et sq
LE CONTROLE DE GESTION : 122
L’analyse ABC des actifs investis révèle que la ligne A exige seulement 0.70 d’actifs par euros de vente, alors
que la ligne B en exige 1.05. Cette différence vient du fait que sur la ligne A, les dirigeants ont établi des
contacts étroits avec les fournisseurs, les livraisons sont gérées en juste à temps, la production s’ajuste plus
facilement à la demande qui est plus stable etc.. De plus , les bons rapports avec les clients réduisent l’en-cours
au minimum.
Pouvoir mener une réflexion en termes de valeur au niveau des activités et des
processus par le biais d’une approche ABC - ABM semble être un facteur clé de
cette approche. Le fait d’affecter des actifs aux produits et aux processus ne pose
pas de problèmes majeurs. Certains tels les stocks sont déjà affectés ou
affectables. Les actifs dédiés, tels que le matériel de production spécialisé,
l’outillage, le matériel de conception peuvent être affectés à des gammes de
produits qui utilisent ces ressources. D’autres actifs dépendent probablement de
plusieurs gammes de produits et une répartition est envisageable sur la base des
inducteurs de coût pertinents. L’approche EVA encourage aussi les entreprises à
capitaliser les dépenses telles que la recherche et développement, les frais de
publicité et de promotion, et à les amortir sur leur durée de vie spécifique.
L’affectation de ces actifs incorporels aux produits et processus est donc possible.
Elle suppose une segmentation fine du système d’information et une reconception
permanente de ces systèmes. Comme en matière de charges, il est probable que
certains actifs ne pourront pas être affectés à des produits ou à des processus.
Certains peuvent concerner des clients (cas des en-cours clients ou du stockage
des produits pour leur compte) et devraient leur être affectés pour permettre une
analyse de la valeur par segments de clientèle etc.. L’intégration ABC et EVA
peut ainsi paraître naturelle. La méthode ABC avait pour objectif de corriger
certaines allocations arbitraires de charges aux produits. L’approche EVA cherche
à corriger la non-imputation du coût du capital sur les résultats comptables et
financiers. L’utilisation conjointe des deux méthodes ABC et EVA peut fournir
aux dirigeants une carte plus claire des inducteurs de rentabilité économique et de
création de valeur.
141 E.M. MORIN, A. SAVOIE, G. BEAUDIN: L’efficacité de l’organisation, théories, représentations et mesures, Gaetan Morin, 1994.
LE CONTROLE DE GESTION : 123
142 C-H.D‘ARCIMOLES : Diagnostic financier et gestion des ressources humaines, Economica, 1995, pages 59 à 65. Voir aussi : J-C.
MATHE et Al. RIVET : Valeur et rentabilité : l’effet de ressources humaines, Analyse financière, N° 102, Mars 1995.
LE CONTROLE DE GESTION : 124
(Source: D’après M. LACOMBE SABOLY et B; SIRE : L’apport du système comptable à la gestion des
rémunérations, Papier de Recherche, ESUG Toulouse, 1995)
Les gestionnaires des rémunérations ont, de longue date, eu recours aux outils du contrôle de gestion pour
étudier l’évolution de la masse salariale, l’analyse de sa répartition et des disparités de salaires. De façon plus
récente, les spécialistes des rémunérations se tournent également vers les outils et concepts du contrôle de
gestion pour résoudre des questions d’avantages liées à la stratégie des rémunérations face aux nouveaux
modes d’organisation du travail. Les organigrammes “plats” induisent un relâchement du contrôle hiérarchique
alors que les changements fréquents de production ou de projets diminuent la pertinence des référentiels qui
servent de base à la fixation des objectifs et à l’évaluation des performances. Ces deux conséquences
renforcent les phénomènes d’asymétries d’information et les risques qui en découlent (risque moral et risque de
sélection adverse). La première réponse des managers a été celle de l’implication organisationnelle ( projets et
chartes d’entreprise). Beaucoup d’entreprises se trouvent face à un dilemme: comment garantir l’efficacité
économique de l’organisation sans revenir à un contrôle hiérarchique plus étroit, alors même qu’on vient de le
rejeter à cause des coûts de structure et du manque de flexibilité qu’il engendre. Pour réconcilier le point de vue
des salariés et celui des responsables de centres de profits, la voie la plus prometteuse apparaît aujourd’hui
comme devant passer par une amélioration des modes de reconnaissance individuels et collectifs de la
performance. Cette focalisation sur la reconnaissance par les rémunérations s’explique en partie par le fait que
les possibilités de reconnaissance par la carrière se sont estompées. La réflexion est donc fortement axée sur
la recherche de modes de fixation des objectifs et d’évaluation des performances qui soit acceptable par tous,
c’est-à-dire qui réconcilient l’impératif de rentabilité avec les comportements et les aspirations des salariés. Le
rapprochement des responsables des rémunérations avec les spécialistes de la comptabilité et du contrôle de
gestion trouve dans ce contexte toute sa pertinence. La difficulté de mise en œuvre des systèmes de
rémunération variable provient des biais qui peuvent apparaître dans l’évaluation des performances. Ils se
situent à plusieurs niveaux. Les outils traditionnels fournis par le système comptable présentent des faiblesses
tout particulièrement pour l’évaluation des performances des cadres dirigeants. Le contrôle hiérarchique est
biaisé par l’asymétrie d’information qui résulte des organigrammes plats car ils rendent moins pertinents les
référentiels utilisés pour la fixation des objectifs et l’analyse des résultats. L’évaluation par les acteurs eux-
mêmes est biaisée par le manque d’informations sur l’environnement et le positionnement stratégique de
l’entreprise. Le premier biais peut être réduit par la mise en place de mesures de la valeur créée affranchies des
défaillances évoquées de l’information comptable. La réduction des deux autres biais peut se faire dans le
cadre d’un jeu coopératif. Cependant, son émergence a peu de chance de se réaliser par de simples
incantations à la solidarité collective. L’application du principe de subsidiarité dans le partage des
responsabilités appuyé sur des procédures cohérentes de rémunération des performances est la condition
d’une réconciliation des intérêts individuels et collectifs, sous la condition qu’il y ait une réelle cohérence entre
les modes d’évaluation globaux de la performance et les modes appliqués localement aux différents niveaux de
responsabilité.
143 Voir sur ce point le thèse de C. THOMAS : « Déterminants et évolution de la hiérarchie au sein des organisations», Thèse de doctorat en
Sciences de Gestion, Université de Nice-Sophia Antipolis (date ?)
144 C. ARGYRIS, D; SHÖN (1978), Organizational Learning : A Theory of Action Perspective, Addison Wesley, Reading Mass.
145 K.B. CLARK, T. FUJIMOTO (1991), Product Development Performance : Strategy, Organization and Management in the World Auto
Industry, Harvard Business Shool Press, Boston, MA.
146 B. KOGUT, U. ZANDER(1996), « What Firms Do ? Coordination, Identity and Learning », Organization Science, vol 7, n°5.
B. KOGUT, U. ZANDER (1992), « Knowledge of the Firm, Combinative Capabilities, and the Replication of Technology », Organization
Science, vol 3 , pp 383-397.
147 S.J. MEZIAS, M.A. GLYNN (1993), « The Three Faces of Corporate Renewal : Institution, Revolution and Evolution », Strategic
Management Journal, vol 14, pp 77-101.
148 J.G. MARCH (1981), « Footnotes to Organizational Change », Administrative Science Quaterly, n°26, pp 563-577.
149 G. DOSI, D. TEECE, S. WINTER (1991), « Les frontières des entreprises : vers une théorie de la cohérence de la grande entreprise »,
Revue d’Economie Industrielle, n°51, 1er trimestre, pp 238-254.
LE CONTROLE DE GESTION : 126
conséquence, ce sont les routines elles-mêmes, et la capacité du management à amener l’organisation à les
mettre en œuvre, qui constituent une capacité essentielle de l’organisation ».
L’analyse de J. MARCH se centre sur les processus d’«exploration » et
d’« exploitation » :
« L’essence de l’exploitation réside dans le raffinement et dans l’extension de
compétences, technologies et paradigmes existants. La rentabilité de tels
investissements s’avère toujours positive, de court terme et prévisible.
L’exploration puise dans l’expérimentation d’alternatives nouvelles. Le retour sur
investissement s’avère ici beaucoup plus incertain à long terme et souvent négatif
à court terme», (J. MARCH, 1991, p 85150). J. MARCH s’intéresse au contexte
social de l’adaptation des organisations. Il examine la façon dont les croyances
individuelles et les règles organisationnelles s’influencent mutuellement. Par
ailleurs, il se penche sur une deuxième caractéristique majeure formée par le
contexte concurrentiel (« competitive ecology ») au sein duquel l’apprentissage a
lieu et les connaissances sont utilisées. Les organisations stockent les
connaissances dans des procédures, normes, règles et accumulent cette
connaissance sur le long terme en puisant dans les connaissances individuelles. En
même temps, ces mêmes individus sont socialisés par l’adhésion aux valeurs
organisationnelles. Cet apprentissage mutuel conduit à une convergence entre les
croyances organisationnelles et individuelles. Cependant, le risque, selon J.
MARCH, est que « les individus s’adaptent aux règles organisationnelles avant
que ces dernières n’aient pu « apprendre » d’eux » (p 85). Cette convergence
érode par conséquent les potentialités de progrès et donc d’adaptation des firmes
et tend à substituer l’exploitation à l’exploration d’alternatives inconnues. Selon J.
MARCH, les facteurs permettant de contrer cette dégradation du processus
d’adaptation sont : une socialisation lente et un léger « turn-over ». En effet, une
socialisation lente dans une nouvelle organisation favorise le maintien d’une
certaine diversité des croyances individuelles propices à l’exploration, et donc à
une évolution des connaissances sur le long terme, de même un faible « turn
over » (en particulier lorsque l’environnement est turbulent) constitue un moyen
d’introduire de la diversité, et donc de retarder l’intériorisation par les individus
des codes organisationnels.
Un élément important est le contexte concurrentiel. L’auteur montre en effet que le rôle des connaissances
dans le cadre d’une « course pour le leadership » est ambigu. Les performances induites par la production de
nouvelles connaissances (« returns to changes in knowledge ») sont dépendantes de la position de la firme eu
égard à ses concurrents. Parfois, les processus d’apprentissage augmentent à la fois la performance moyenne
et sa variance. L’auteur donne l’exemple de l’adoption d’une nouvelle technologie à l’égard de laquelle le
manque d’expérience peut conduire à une plus grande disparité des performances. Néanmoins, l’apprentissage
peut aussi conduire à diminuer la variance dans le mesure où la fiabilité (concernant la qualité et la vitesse
d’exécution d’une tâche) augmente avec l’expérience.
On retrouve là un argument central du knowledge management selon lequel cette
expérience est génératrice de capacités organisationnelles. Néanmoins, le revers
150 J.G. MARCH (1991), « Exploration and Exploitation in Organizational Learning », Organization Science, vol 2, N)1, pp 71-87.
LE CONTROLE DE GESTION : 127
de cette fiabilité est le risque d’éroder les chances de prééminence à l’égard des
concurrents sur le marché. G.P. HUBER (1991)151lui aussi s’est penché sur le
processus d’apprentissage en se focalisant sur quatre éléments du processus :
l’acquisition de connaissances, la distribution d’informations, l’interprétation de
ces données et la mémoire organisationnelle. Sa définition de l’apprentissage est
la suivante « une organisation réalise un apprentissage lorsque l’une de ses
composantes acquiert un savoir qu’elle estime potentiellement utile à
l’organisation» (G.P. HUBER, op. cit. , p 89). Celle-ci rejoint celle donnée
ultérieurement par C. O’DELL et D.J. GRAYSON (1998, p 6)152 « Le
management des connaissances est une stratégie consciente consistant à procurer
au moment opportun les savoirs appropriés aux personnes concernées et à les
aider à partager et transformer l’information en action, de façon à améliorer la
performance organisationnelle». En revanche, l’apprentissage ne conduit pas
forcément un changement de comportement. Il peut dans un premier temps
essentiellement modifier les cartes cognitives des membres d’une organisation.
L’argument principal de Huber est que l’apprentissage efficace doit être d’une
grande envergure, c’est à dire qu’un nombre important de composantes doit être
convaincu de l’utilité des connaissances en jeu. En outre, cet apprentissage est
stimulé par la variété des interprétations. Ce souci d’expérimentation, voire de
désapprentissage a été aussi pointé par W.H STARBUCK., A. GREVE, B.L.T.
HEDBERG (1978)153, P.C. NYSTROM, W.H. STARBUCK (1984)154 et T.
DURAND (2000)155. Enfin, les différentes unités doivent être capables de
développer une compréhension uniforme de ces interprétations divergentes. En
revanche, ces représentations partagées peuvent laisser la part belle à une certaine
ambiguïté « l’ambiguïté facilite l’accord sur des actions communes dans la
mesure où elle autorise chaque composante d’un groupe à croire en tout ce qui
est nécessaire pour atteindre un consensus» (G.P. HUBER, 1991, p 103). On
retrouve là l’idée de Grant selon laquelle les membres d’une organisation ou d’un
groupe ne sont pas tenus de connaître les spécialités de chacun mais que leur
efficacité collective émane d’une habitude de travail en commun. En outre, est
mise en avant la distinction intéressante entre les sources de l’apprentissage
congénital, fondé sur l’expérience d’une part, et celles fondées sur l’acquisition
(dans le cadre de recrutements ou plus largement d’opérations de
fusions/acquisitions, alliances..), l’imitation et la veille stratégique d’autre part.
151 G.P. HUBER (1991), « Organizational Learning : The Contributing Processes and the Literatures, Organization Science, vol 2, n°1, pp
88-115.
152 C. O’DELL , D.J. GRAYSON (1998), If Only We Knew What We Know, New York, The Free Press.
153 STARBUCK W.H., A. GREVE, B.L.T. HEDBERG (1978), "Responding to Crisis", Journal of Business Administration, vol 9, n° 2
154 P.C. NYSTROM, W.H. STARBUCK (1984), "To Avoid Organizational Crises, Unlearn", Organizational Dynamics, spring, pp 323-
332.
155 T . DURAND (2006), « L’alchimie de la compétence », Revue Française de Gestion, n° 160, pp 261-292.
LE CONTROLE DE GESTION : 128
L’objectif est d’inscrire les différents outils du contrôle de gestion dans les
différents processus d’apprentissage organisationnel.156
3- KNOWLEDGE MANAGEMENT ET CREATION DE VALEUR157
Afin de cerner les différentes facettes de la connaissance et de rendre compte de
sa complexité, il convient de distinguer le statut de la connaissance comme actif
ou stock et le statut de la connaissance comme processus. Une première école
découle du courant stratégique de l’analyse des ressources: les connaissances sont
des ressources uniques, non imitables, difficilement transférables, et sources
d’avantages concurrentiels. Les organisations sont conceptualisées comme
mécanismes de création et d’utilisation de connaissances. La connaissance
possèderait donc une valeur propre, de par sa rareté, sa qualité, son caractère
fondamental ou « core-competence » au sens du modèle « resource-based ».
Précisons cependant comme le souligne E. PENROSE (1959)158, que les
ressources n’ont pas de valeur intrinsèque, mais qu’elles en prennent lorsqu’elles
permettent de délivrer des services à haute valeur ajoutée. Les démarches
managériales consistent alors à stocker des connaissances valorisées, afin de les
mettre à disposition et de les diffuser au sein des organisations, notamment par le
biais de bases codifiées (M.T. HANSEN et alii, 1999159).
Ces approches normatives et fonctionnalistes (L. EMPSON,2001160) fondent le statut de la connaissance
comme objet unanimement reconnu, parfaitement identifiable et indépendant de tout contexte individuel ou
organisationnel. Or les connaissances se situent à un niveau individuel, elles sont souvent indissociables d’un
contexte, d’une action. De plus la mobilisation de connaissances s’appuie souvent sur un ensemble
d’interrelations intra-organisationnelles (entre acteurs, entre pairs) et inter-organisationnelles (entre l’entreprise
et ses clients par exemple).
Une deuxième approche considère que les connaissances sont mobilisées dans des
processus et ne peuvent être appréhendées qu’en tant que telles. Ce n’est pas le
stock des connaissances qui donne à la firme son avantage compétitif mais la
façon dont elles sont utilisées dans le processus de création de valeur (B.
LOWENDAHL et alii, 2001161). Cette création de valeur se construit tout au long
d’un processus pouvant être décomposé en quatre phases (M. ALAVI, D.
LEIDNER, 2001162) : la création, le stockage et la mémorisation, le partage et le
transfert, l’application. Cette approche permet de représenter à la fois la nature
cognitive et sociale des connaissances organisationnelles, leur enracinement dans
les pratiques et les modèles cognitifs des individus, mais aussi dans la culture ou
les pratiques collectives. La première phase dans le processus de management des
connaissances est la création de connaissances qui se fait selon des échanges entre
connaissances tacites et explicites, entre connaissances individuelles et
connaissances partagées au sein d’un groupe.
3.1. LES ACTIVITES D’ACQUISITION ET DE CREATION
I. NONAKA (1994)163 a mis en évidence un processus en spirale liant les
différents types de connaissances et a défini quatre modes de création de
connaissances : la socialisation et l’internalisation à l’origine de la création de
connaissances implicites, et l’explicitation et la combinaison comme étant un
processus de création de connaissances explicites. Les dimensions tacite et
explicite peuvent s’enrichir des notions de processus individuel et processus
collectif de création de connaissances. La socialisation se réfère à la conversion de
connaissances tacites en de nouvelles connaissances tacites à travers des échanges
sociaux et collectifs et des expériences partagées par les membres de
l’organisation (M. ALAVI, D. LEIDNER, 2001, op. cit.). La socialisation passe
par la compréhension en commun d’un problème, facilitée par le partage des
mêmes valeurs et de la culture organisationnelle. I. NONAKA et N. KONNO
(1998)164 ont mis en évidence le concept de « BA » qui fournit une plate-forme ou
espace partagé au sein duquel on trouve les fondations pour la création de
connaissances et où les échanges de connaissances se font de façon transcendante
entre des individus. La socialisation suppose de capter des connaissances tacites
lors de travaux communs au travers d’une « proximité physique » : les individus
partagent des valeurs communes, sont confrontés aux mêmes problèmes, ils
partagent également du temps professionnel et parfois extra-professionnel. Selon
l’auteur, les organisations ont ainsi intérêt à privilégier l’émergence de ces lieux,
(le concept de « BA » étant équivalent à « place » en anglais) et à créer des
conditions favorables à leur développement. Les connaissances se créent
également de façon plus explicite notamment par combinaison. La combinaison
des connaissances consiste à créer des connaissances explicites en classant,
regroupant, synthétisant des connaissances explicites déjà existantes (M. ALAVI,
D. LEIDNER, 2001, op. cit.).
La combinaison peut être un processus individuel ou collectif, elle a trait notamment aux travaux sur les bases
de données, aux travaux statistiques. Bien que la création de données soit artificielle, leurs combinaisons et
représentations peuvent être source de création de valeur et constituer une aide à la décision. Par exemple les
techniques de data mining ne créent pas a priori de connaissance, mais permettent de mettre en évidence des
liens entre données qui peuvent s’avérer très instructifs pour l’action. Selon I. NONAKA et N. KONNO (1998), il
est important de considérer la communication et la diffusion des processus ainsi que la systématisation et la
dissémination de ces connaissances dans l’organisation.
163 I. NONAKA (1994), « A Dynamic Theory of Organizational Knowledge Creation », Organization Science, vol 5, n°1, pp 14-37.
164 I. NONAKA,, N. KONNO (1998), « The Concept of « BA » : Building a Foundation for Knowledge Creation », California Management
Review, Vol 40, N°3, Spring, pp 40-54.
LE CONTROLE DE GESTION : 130
165 M. GIROD (1995), « La mémoire organisationnelle », Revue Française de Gestion, n° 105, septembre-octobre, pp 30-57.
LE CONTROLE DE GESTION : 131
166 S.S. TAN, H.H. TEO, K.K. WEI (1998), « Developping a Preliminary Framework for Knowledge Management in Organizations », In
Proceeding of the Fourth Americas Conference on Information Systems, E. Hoadley and I. Benbasat (eds), Baltimore, MD, August, pp 629-
631.
167 C. ARGYRIS, D; SHÖN (1978), Organizational Learning : A Theory of Action Perspective, Addison Wesley, Reading Mass.
168 E.W. STEIN, V. ZWASS (1995), « Actualizing Organizational Memory with Information Systems », Information Systems Research, vol
6, n°2, pp 85-117.
169 J.C TARONDEAU (1998), Le management des savoirs, Que sais-je N°3407, Puf
LE CONTROLE DE GESTION : 132
170 B. VANDENBOSCH, M.J. GINZBERG (1996), « Lotus Notes and Collaboration : Plus ça change, », Journal of Management
Information Systems, vol 13, n°3, pp 65-82.
171 M.H. ZACK (1999), “Managing Codified Knowledge”, Sloan Management Review, Vol. 40(4), pp 45-58.
172 S. WATSON et K. HEWETT (2006), “A Multi-Theorical Model of Knowledge Transfer in Organisations: Determinants of Knowledge
Contribution and Knowledge
LE CONTROLE DE GESTION : 133
173 T.H. DAVENPORT, DE LONG D.W., BEERS M.C. (1998), “Successful Knowledge Management Projects”, Sloan Management
Review, Winter, pp 43-56.
174 M.T.HANSEN, M.R. HAAS, (2007), “Different Knowledge, Different Benefits: Toward a Productivity Perspective on Knowledge
Sharing in Organizations”, Strategic Management Journal, Vol. 28 (11), p. 1133-1153.
175 C. JANICOT, S. MIGNON, Vers un modèle de codification des connaissances : nature et perspectives, SIM, A paraître.
176 L. ARGOTE, L. SARA, D. EPPLE (1990), « The Persistence and Transfer of Learning in Industrial Settings », Management Science,
Vol 36 (2), pp. 140-154
177 L. ARGOTE, ED DARR, D. EPPLE, (1995), “The Acquisition, Transfer, and Depreciation of Knowledge in a Service Organizations:
Productivity in Franchises”, Management Science, Vol. 41(11), pp 1750-1763.
178 L. ARGOTE, P. INGRAM (2000), Knowledge Transfer : A Basis for Competitive Advantage in Firms”, Organizational Behavior and
Human Decision Processes, vol 82, n°1, pp 150-169.
LE CONTROLE DE GESTION : 134
179 L’objet du datawarehouse est de centraliser les informations externes et internes de l’entreprise.
180 L. MARKUS (2001), « Toward a Theory of Knowledge Reuse: Types of Knowledge Reuse Situations and Factors in Reuse Success »,
Journal of Management Information Systems, Vol. 18 (1), pp 57-93.
181 P. ALMEIDA, B. KOGUT (1999), « Localization of Knowledge and the Mobility of Engineers in Regional Networks », Management
Science, vol 45, pp 905-917.
182 J. BROWN, P. DUGUID (1998), « Organizing Knowledge », California Management Review, vol 40, n°3, pp 90-111.
183 M. GITTELMAN et B. KOGUT (2003), « Does Good Science Lead to Valuable Knowledge ?, Biotechnology Firms and the
Evolutionary Logic of Citation Patterns », Management Science, vol 49, n°4, pp 366-382.
184 M. BOLLECKER (2002), “Le rôle des contrôleurs de gestion dans l’apprentissage organisationnel : une analyse de la phase de suivi des
réalisations », CCA , Tome 8, Volume 2 , pp 109-126 .
LE CONTROLE DE GESTION : 135
vers l’autre mais grâce à la combinaison des connaissances individuelles des deux
protagonistes. Un autre procédé consiste à coder les connaissances tacites sous
forme de règles et procédures, directives ou systèmes-experts. Ce moyen
d’intégration est efficace lorsque l’activité à accomplir est complexe et les
spécifications des performances précises.
L’auteur donne l’exemple de Mc Donald chez qui il est apparu plus ingénieux de créer un manuel couvrant tous
les aspects de la gestion d’un restaurant plutôt que de former chaque responsable en cuisine, nutrition,
marketing, comptabilité, production, gestion des ressources humaines etc.
Les technologies de l’information permettent justement de stocker, mettre à
disposition, mettre à jour et transmettre ces directives (par exemple mise sur
l’intranet d’une firme de maintenance de la politique, des manuels et standards de
réparation) et contribuent ainsi à développer la mémoire organisationnelle et à
accélérer l’intégration des connaissances par l’automatisation des routines. Par
exemple, la création d’une base de données des « meilleures pratiques » peut
nourrir les routines organisationnelles (lorsque l’environnement est relativement
stable) (M. ALAVI et D. LEIDNER, 2001). Ces règles et instructions, constituent
bien un moyen de coordonner des individus dont les spécialités sont toutes
distinctes les unes des autres mais, dès lors que les connaissances tacites sont en
partie inexprimables, ce procédé implique aussi une perte substantielle des
connaissances développées au niveau organisationnel. Les routines en revanche
permettent de coordonner des connaissances tacites sans qu’il soit nécessaire de
les expliciter. A l’instar de J.G. MARCH, H.A. SIMON (1958, p 142)185, R.M.
GRANT considère que « des activités sont devenues routinières lorsque la
décision a été simplifiée par le développement de réponses fixes à des stimuli
définis ». Grant donne l’exemple très éclairant des équipes chirurgicales en bloc
opératoire. La performance de leurs prestations vient de l’habitude de travailler en
commun, de l’expérience, générant des réflexes, des comportements adéquats,
sans que chaque individu ait besoin d’expliciter, de communiquer ses
connaissances individuelles. Cette coordination, ces schémas d’interaction fondés
sur une compréhension mutuelle des rôles de chacun sont déclenchés par une série
de signaux explicites et implicites. Grant précise également que la coordination
d’opérations moins complexes peut être réalisée par un simple respect des
séquences d’une chaîne d’activités.
Un autre type d’application des transformations des données en connaissances
touche à l’interaction client/entreprise. Les TIC en particulier permettent de
collecter, diffuser, analyser des informations du marché, à fin de les transformer
en connaissance et apporter de la valeur à leur clients. 186 La création de
connaissances marketing (grâce aux techniques de data mining (réseaux
185 J.G. MARCH, H.A. SIMON (1958), Organizations, New York, John Wiley & Sons.
186 A. DUFOUR(1997), Le Cybermarketing, Presses Universitaires de France.
J-J RECHEMANN (2000), L’internet et le marketing, Editions d’Organisation.
LE CONTROLE DE GESTION : 137
187 « Le data mining consiste à extraire et à analyser par des méthodes statistiques, un large volume de données puisées dans le data
warehouse de l’entreprise, en vue de découvrir des tendances ou des règles qui s’avéreront utiles pour définir la stratégie marketing » (R.
Lefébure, G. Venturi, 2001)
188 M.J. SHAW, C. SUBRAMANIAM, G.W. TAN, M.E. WELGE (2001), “Knowledge Management and Data Mining for Marketing”,
Decision Support Systems, vol 31, n°1, May, pp 137-137.
189 S. BROWN (2001), CRM : La gestion de la relation client, Village Mondial.
190 K. B. MONROE (1991), Pricing-Making Profitable Decisions, Mc Graw Hill, New York, NY.
191 A. RAVALD, C. GRÖNROOS (1996), “The Value Concept and Relationship Marketing”, European Journal of Marketing, vol 30, n°, 2,
pp 19-30.
LE CONTROLE DE GESTION : 138
192A.P. MASSEY M.M. MONTOYA-WEISS, K. HOLCOM (2001), “Re-engineering the costumer relationship : leverage assets at
IBM”, Decision Support Systems, vol 32, pp 155-170.
193 R S KAPLAN ET D.P. NORTON : Le tableau de bord prospectif , Les éditions d’Organisation, 1997, 311p
LE CONTROLE DE GESTION : 139
R.S. Kaplan et D.P. Norton justifient le tableau de bord prospectif par la nécessité
de bâtir un potentiel concurrentiel à long terme en créant de la valeur.
Le tableau de bord prospectif
L’axe financier L’axe clients
Le TBP s’appuie toujours sur les indicateurs Les segments de marché et les indicateurs de
financiers pour évaluer efficacement les effets performance concernent la satisfaction et la fidélité
économiques quantifiables des actions passées. Ils des clients existants, l’extension de la base de
permettent de déterminer si les intentions et la mise clientèle, la rentabilité par catégorie de clients, la
en œuvre de la stratégie contribuent à améliorer le part de marché sur les segments ciblés. Mais l’axe
résultat financier. En général, les objectifs financiers clients doit aussi comporter des indicateurs
portent sur la rentabilité, mesurée par exemple par le spécifiques qui représentent les déterminants de la
bénéfice d’exploitation, le retour sur les capitaux fidélité des clients. Ils permettent de formuler la
engagés , la valeur ajoutée économique. Ils peuvent stratégie de marché qui produira la performance
aussi viser une croissance rapide du chiffre d’affaires financière optimale dans le futur.
la génération de liquidités, la gestion du risque
L’axe processus internes L’apprentissage organisationnel
Il s’agit d’identifier les processus-clés de l’entreprise, Il a trois composantes, les hommes, les systèmes, les
qui permettent d’offrir une prestation qui attire et procédures. Les axes financiers, clients et processus
fidélise les clients tout en assurant aux actionnaires le internes révéleront le fossé entre les capacités
rendement financier qu’ils attendent. Ces indicateurs actuelles des hommes et des systèmes et celles qui
se focalisent sur les processus qui auront la plus forte sont nécessaires à une véritable avancée dans la
incidence sur la satisfaction des clients et la performance. Pour combler ce fossé, les entreprises
réalisation des objectifs financiers de l’entreprise. doivent investir afin de donner de nouvelles
Les indicateurs « processus internes » révèlent les compétences à leurs salariés et d’améliorer les
processus qui jouent un rôle-clé dans la performance systèmes d’information et les procédures. Des
stratégique de l’entreprise. Noter l’incorporation des indicateurs génériques de résultats – satisfaction,
processus d’innovation dans cette catégorie fidélité, formation et compétence des employés -
d’indicateurs sont associés à des déterminants de la performance
propres à l’activité.
Source: d’après R S KAPLAN et D.P. NORTON : Le tableau de bord prospectif, Les éditions
d’Organisation, 1997, pages36 et sq.
LA VISION
APPROCHE FINANCIERE
Leader sur le marché
Comment Croissance à fort potentiel
aborder la Profit Croissance Valeur Profitabilité
relation avec les financière
actionnaires
APPROCHE CLIENT
Comment améliorer la Délais Qualité Service Innovation ,Faible taux de défaillance
valeur de l’offre pour et Livraison en temps réel, Responsabilisation
les clients cycles
APPROCHE INTERNE
Quels sont les Délais Qualité Productivité Time to market
processus citriques et Gestion opérationnelle des cycles,
pour satisfaire les cycles Process fiables
clients Ingénierie de la valeur
APPRENTISSAGE
ORGANISATIONNEL Développement
Participer à l’amélioration des nouveaux
des processus Innovation Amélioration Actifs produits
organisationnels permanente intellectuels, Amélioration
savoir –faire continue
Compétences
fondamentales
194 D. CHOFER, F. MEYSONNIER (2005), « Dix de débat autour du Balanced Soorecard », CCA, tome 11, vol 2, pp 61-81.
195 J. MERIC (2003), « L’emergence d’un discours de l’innovation managériale : le cas du Balanced Scorecard », CCA, numéro spécial,
mai, pp 129-145.
LE CONTROLE DE GESTION : 141
Si certains auteurs ont privilégié des typologies théoriques, d’autres ont privilégié
les études de terrain. E. MISIASZEK, F. ORIOT, D. OTTLEY (2007) ont en
particulier étudié les caractéristiques des balanced scorecard dans des PME
françaises. Il apparaît sur la base des études de cas approfondies réalisés par les
auteurs, que les tableaux de bord sont essentiellement réalisés par et pour la
direction générale. Une caractéristique appréciée des tableaux de bord prospectifs
est leur aspect multidimensionnel : les indicateurs non-financiers y occupent une
place de choix. En effet, dans les entreprises de petites taille, les tâches du
dirigeant sont plus diversifiées et les indicateurs non financiers (touchant à la
production, au marketing, au RH) sont mieux à même de servir un dirigeant
polyvalent. De plus, le contrôle de ces entreprises souvent familiales privilégie
aussi une performance plus globale et à plus long terme. Les indicateurs
développés sont souvent au service d’un stakeholder dominant (actionnaire,
client…) et sont complétés par des relations informelles (visant par exemple à
développer la confiance entre les employés) concernant les autres parties-
prenantes.
Concernant le lien entre ces tableaux de bords et la stratégie, il convient de souligner que les intentions
stratégiques sont clairement identifiées dans les PME faisant usage de cet outil (il peut s’agir d’améliorer la
profitabilité, d’éliminer les produits non rentables, d’améliorer le cashflow, etc) et que ces objectifs clés (KSO :
Key Strategic Objectives) sont adroitement traduits sous forme d’indicateurs clés (KPM : Key Performance
Measures). Néanmoins, la décomposition en (KSF : Key Strategic Factors) et leur traduction sous forme de
KPM (Key Performance Measures) apparaît moins systématique. Les KSF récurrents concernent la
productivité, la diversification en dehors de la niche initiale, la satisfaction du consommateur, la relation avec les
employés (promouvoir plus de flexibilité, améliorer la motivation et la compétence). Lorsque ces derniers ne
sont pas suivis grâce à des indicateurs formalisés (KPM) ils le sont grâce à des mécanismes de contrôle plus
informels. C’est le cas par exemple de l’écoute des besoins clients davantage ressentis grâce aux réunions
organisées et facilitées par la proximité géographique des entités que par des indicateurs précis présents dans
les tableaux de bord des dirigeants. Ces indicateurs sont ensuite analysés collectivement et périodiquement
afin que l’information véhiculée par les indicateurs soit comprise par les personnes concernées, qu’elle puisse
générer des actions correctrices, voire conduire à revisiter la stratégie en s’appuyant sur les boucles de
l’apprentissage organisationnel.
Globalement, les études sur l’utilisation de tableaux de bord, y compris dans les
entreprises de petite taille montrent que les modes de gestion très intuitifs laissent
aujourd’hui la place à des représentations plus formelles des logiques sous-tendant
la performance d’une entreprise.
5- LES NOUVELLES MISSIONS DU CONTROLEUR DE GESTION
Comme le souligne M. BOLLECKER (2006),197 quatre tâches majeures sont actuellement confiées au
contrôleur de gestion : la surveillance des activités, le pilotage (élaboration des budgets, suivi des réalisations,
reporting ), la coordination verticale et horizontale et la mission de changement. « Le socle commun à ces
quatre missions réside dans le rôle central de pourvoyeur d’information au service des responsables de centre
et ou de la direction générale » (op. cit. p 90). Néanmoins, en dépit de ce dénominateur commun, les deux
dernières missions ont conduit à un renouvellement de la fonction de contrôleur. En effet, celui se voit
197 M. BOLLECKER (2006), « La recherche sur les contrôleurs de gestion : état de l’art et perspective », CCA, tome 13, volume 1, juin,, pp
87-106.
LE CONTROLE DE GESTION : 143
aujourd’hui doté d’une mission pédagogique de traduction des objectifs de la direction auprès des opérationnels
(coordination verticale) et d’optimisation des relations entre les unités (coordination horizontale). En plus des
compétences techniques, les qualités relationnelles et la capacité d’explication des connaissances font
désormais partie des caractéristiques requises pour exercer ces fonctions. Plus globalement les qualités « de
contact, de souplesse et de dynamisme » (op. cit. p96) sont de plus en plus exigées par les entreprises. Ensuite
le contrôleur devient aussi accompagnateur voire même initiateur de changement lorsqu’il participe par exemple
à la mise en place d’un ERP (Entreprise Resource Planning). Libérés de tâches routinières, il peut se consacrer
de façon plus approfondie aux tâches de conseil auprès de la direction stratégique. En effet, les effets positifs
attendus de l’intégration des informations comptables, productives, commerciales dans le cadre d’un ERP sont
multiples : promotion d’une vision transversale et processuelle de l’entreprise, évolution du rôle des contrôleurs
de gestion (moins de gestion des données et plus de conseil), autonomie accrue des cadres intermédiaires,
développement de mesures de la performance moins strictement financières... Néanmoins, les études de
terrain menées sur l’impact des ERP sur le contrôle de gestion font cependant état de conclusions plus
nuancées. Selon, F.MEYSSONNIER et F.POURTIER (2006)198, la mise en place des ERP a eu un impact
limité sur les concepts et les modélisations du contrôle de gestion. En effet, leur introduction dans les
entreprises n’a été que rarement l’occasion de mettre en place des systèmes de calcul de coûts basés sur les
activités (ABC), les utilisateurs des ERP se satisfaisant le plus souvent des systèmes classiques de calculs de
coûts structurés par centres de responsabilités. De plus, l’informatisation transversale des systèmes
d’information s’avère en fait partielle, avec le développement d’applications locales (sous Excel, Acess, Visual
Basic) permettant aux contrôleurs de retrouver leurs usages antérieurs. Les conséquences de la mise en place
des ERP se situent plus au niveau de la répartition des tâches entre managers de terrain et contrôleurs.
D’après R. SCAPENS et M. JAZAYERI (2003)199, les ERP permettent quatre évolutions en matière de contrôle
de gestion :
« - L’élimination des tâches routinières (paye, une partie de la budgétisation etc.)
le transfert de connaissances comptables aux managers de terrain (au lieu d’être dépendants des contrôleurs
de gestion pour l’établissement des documents historiques, ils peuvent les établir de façon directe en temps réel
sous des formes adaptées et modulables en fonction de leurs besoins.
l’utilisation d’indicateurs avancés plus nombreux (éléments physiques précurseurs des performances plutôt que
des mesures financières les constatant)
un rôle plus large des contrôleurs de gestion. » (cité par F. MEYSSONNIER et F. POURTIER, op. ci., p 49).
L’étude empirique des auteurs, à partir d’études de cas, nuance l’impact des ERP
sur les outils et sur le rôle des contrôleurs. Sur les outils, ils confirment que
l’introduction des ERP génère une amélioration de la forme des outils
« automatisation, rapidité d’obtention des informations, finesse de découpage »
mais que sur le fond les innovations restent périphériques. L’automatisation
complète des outils de contrôle s’avère d’ailleurs souvent peu compatible avec les
spécificités des processus industriels. Sur le rôle du contrôleur, si la théorie met
l’accent sur de nouvelles missions (de conseil auprès des décisionnaires et de
participation à l’élaboration de systèmes de pilotage) dévolues au contrôleur, la
réalité présente une autre facette de cette évolution. En effet, ces derniers restent
pour l’instant fortement impliqués dans des tâches de paramétrage et de mise en
route des ERP et de vérification des données et ne voient que pas leur rôle évoluer
à des niveaux plus stratégiques. Le rôle du contrôleur de gestion n’est donc pas
198 F. MEYSONNIER, F. POURTIER. (2006), « Les ERP changent-ils le contrôle de gestion ? », Comptabilité, Contrôle, Audit, Tome 12,
Volume1, mai, pp 45-64.
199 R. SCAPENS ., M. JAZAYERI (2003), “ERP Systems and Management Accourting Change : Opportunities or Impacts ? A Research
Note “, European Accounting Review, vol 12, n° 1, pp 201-233.
LE CONTROLE DE GESTION : 144
radicalement transformé par la mise en place des ERP mais ces derniers
contribuent de façon incrémentale à son évolution. L’évolution du rôle du
contrôleur se doit aussi d’être nuancée en fonction de la taille de l’organisation et
la position hiérarchique du contrôleur. M. BOLLECKER (2006) souligne en effet
que les entreprises de petite taille ont plus tendance à développer un contrôle de
gestion autour de dimensions techniques alors que les organisations de grande
taille accordent aux contrôleurs des missions plus stratégiques. Les facteurs de
contingence sont aussi culturels (implication dans l’opérationnel au Royaume Uni,
implication dans la formulation de la stratégie en Allemagne). En dépit de ces
nuances, on assiste globalement à une évolution de leur pouvoir d’influence:
détenteurs d’informations transversales, conseillers, acteurs de changement
stratégique, c’est aujourd’hui l’image traditionnelle des contrôleurs qui semble
voler en éclat.
RESUME
Le contrôle de gestion intégré est fondé sur une approche combinée de la stratégie
classique et de l’approche par les ressources. Il prend appui sur la version rénovée
de la comptabilité de gestion à base de processus et s’inscrit dans le contexte de la
« stakeholder theory ». Ce modèle fourni par la base de processus permet le
pilotage stratégique et contribue à la reformulation de la stratégie dans une
philosophie d’amélioration continue. 200 Cette approche de la base de processus
comme vecteur prioritaire de l’information permet de faciliter l’intégration entre
le contrôle de gestion d’une part et la stratégie financière d’autre part. Elle fait de
la base de processus un point focal de la réconciliation entre la valeur financière et
stratégique. Elle prend en compte la complexité des relations, des motivations et
des rationalités. Elle sert de support au développement de l‘apprentissage et des
savoir-faire collectifs. La base de processus est construite en liaison avec les
acteurs et en fonction des priorités stratégiques. Ce processus de construction
suppose une vision adaptative du Management à base d’activités centrée sur l’idée
d’amélioration continue (l’ABM de l’architecte est préférée à l’ABM du
mécanicien). Il permet d’identifier, puis d’évaluer, les compétences qui génèrent
des actifs immatériels sources de valeur. Le contrôle de gestion intégré ne peut,
pour autant, négliger les aspects liés à la création de valeur pour l’actionnaire. A
cet égard, il participe à l’identification des « inducteurs de valeur » et surtout il
cherche à intégrer les deux visions de la valeur stratégique et financière.
L’importance prise par la valeur financière oblige, de plus en plus, les entreprises
à communiquer, non seulement avec le marché mais aussi, avec l’ensemble de ses
partenaires financiers. Ce signal sera d’autant plus efficace qu’il est adossé de
façon crédible à la valeur stratégique. Les mécanismes de reconnaissance et de
valorisation des compétences fondamentales issus de la base de processus sont, à
cet égard, un facteur important de crédibilité. L’adossement de la valeur financière
200 M. LEBAS : Comptabilité de gestion, les défis de la prochaine décennie, Revue Française de Comptabilité, N° 265, Mars 1995.
LE CONTROLE DE GESTION : 145
Conclusion générale
UNE EVOLUTION PROBABLE DU CONTROLE DE GESTION ASSERVI A LA
FINANCE
Les multiples scandales financiers suivis d’une crise financière sans précédent ont
fini par ébranler le socle de l’efficience des marchés et des paradigmes de la
micro-économie financière. La toute puissance du dogme exclusif de la
maximisation de la valeur actionnariale débouche finalement sur un échec relatif.
Contrairement aux attentes, les incitations financières indexées sur le cours de
l’action n’ont pas réduit les asymétries informationnelles et les comportements
opportunistes. Elles semblent, au contraire, les avoir aggravés en produisant des
effets pervers liés à la difficulté de mise en œuvre des indicateurs et à leur
caractère hautement manipulatoire. De nombreux travaux empiriques convergent
pour montrer que statistiquement et sur une période suffisamment longue, les cas
de réussite des stratégies de création de valeur sont beaucoup plus faibles que les
cas d’échec. Ainsi, l’étude de Bain and company, dans son survey de 2005, a
montré que moins de 10% seulement des 8400 grandes sociétés du G7 ont
couvert le coût du capital et créé de la valeur sur une période de 10 ans. Sur le cas
français, partant des 450 plus grandes, 28 seulement sont créatrices nettes de
valeur pour leurs actionnaires.201 Surtout, il semble que ce soit sur le fond, même
que le management par la valeur financière soit limité. Ce mode de management
serait limité par sa relative inefficacité face aux nouvelles formes d’organisations
basées sur les réseaux, la connaissance, l’information ou l’innovation. Ces
nouvelles structures impliquent des configurations et des rapports de pouvoir
beaucoup plus complexes. La problématique n’est pas « seulement » l’incitation
financière, il faut aussi assurer la coopération, l’adhésion, la fidélisation des
compétences rares. Dans ces entreprises en réseau où le capital humain joue un
rôle fondamental, la création de valeur ne se décrète pas, elle ne peut pas, non
plus, faire l’objet d’une appropriation exclusive dès que certains acteurs
développent des compétences spécifiques telles que des savoirs ou des pratiques
très particulières et non duplicables de façon simple. Un autre mode de
management paraît, alors, nécessaire.
UN DEVELOPPEMENT NECESSAIRE D’UN MODELE DE CONTROLE DE
GESTION INTEGRE COMPLEMENTAIRE AU CONTROLE DE GESTION
ASSERVI A LA FINANCE.
On a vu que le contrôle de gestion intégré complémentaire au contrôle de gestion
à logique financière présente l’avantage de rappeler la contrainte, difficilement
contournable, de la « gestion par la valeur » tout en offrant des perspectives
stratégiques et managériales plus larges : prise en compte des ressources et des
compétences distinctives, gestion à base de connaissance, développement de
201 http://www.bain.fr/bainweb/LocalOffices/our_work.asp?office_id=125&language=3&menu_id=126
LE CONTROLE DE GESTION : 147
202 HOARAU C. et TELLER R., Création de valeur et management de l’entreprise, op. cité, pages 199 et sq.
LE CONTROLE DE GESTION : 149
Eléments de bibliographie
AIRAUDI S. (1994): Le destin de la globalisation, Revue Française de Gestion, Octobre, p 26 et sq.
ALAVI M., D. LEIDNER (2001), « Knowledge Management and Knowledge Management Systems:
Conceptual Foundations and Research Issues », MIS Quaterly, vol 25, n° 1, pp 107-137.
ALMEIDA P., B. KOGUT (1999), « Localization of Knowledge and the Mobility of Engineers in Regional
Networks », Management Science, vol 45, pp 905-917.
ARGOTE L., ED DARR, D. EPPLE, (1995), “The Acquisition, Transfer, and Depreciation of Knowledge in
a Service Organizations: Productivity in Franchises”, Management Science, Vol. 41(11), pp 1750-1763.
ARGOTE L., L. SARA, D. EPPLE (1990), « The Persistence and Transfer of Learning in Industrial
Settings », Management Science, Vol 36 (2), pp. 140-154.
ARGOTE L., P. INGRAM (2000), Knowledge Transfer : A Basis for Competitive Advantage in Firms”,
Organizational Behavior and Human Decision Processes, vol 82, n°1, pp 150-169.
ARGYRIS C., D. SHÖN (1978), Organizational Learning: A Theory of Action Perspective, Addison Wesley,
Reading Mass.
BARNEY J. (1991), « The Resource-based Model of the Firm: Origins, Implications and Prospects », Journal
of Management, vol 17, n° 1, march.
BARNEY J. (1996), « The Resource-based Theory of the Firm », Organization Science, vol 7, n° 5,
septembre-octobre, p 469.
BAUDRY B. (1995), L’économie des relations interentreprises, La découverte, collection Repères, Paris.
BERLAND N. (2002), « Comment peut-on gérer sans budget », in Science de gestion et pratiques
managériales, Réseau des IAE, Economica, 16ème congrès des IAE, pp 411-421 ;
BERLAND N. (2004), « La gestion sans budget : évaluation de la pertinence des critiques et interprétation
théoriques », CCA , vol 7, n° 4, pp 37-58 .
BESCOS R-L., DOBLER P, MENDOZA-MARTINEZ C., NAULLEAU G., (1991) : Contrôle de gestion et
management, Paris, Montchrestien.
BESCOS, P-L , E. CAUVIN, P. LANGEVIN, C. MENDOZA (2004), « Critiques du budget : une approche
contingente », CCA , Tome 10, vol 1, pp 165 -185.
BOLLECKER M. (2002), “Le rôle des contrôleurs de gestion dans l’apprentissage organisationnel : une
analyse de la phase de suivi des réalisations », CCA, Tome 8, Volume 2 , pp 109-126 .
BOLLECKER M. (2006), « La recherche sur les contrôleurs de gestion : état de l’art et perspective », CCA,
tome 13, volume 1, juin, pp 87-106.
BOUQUIN H. (1994): Les fondements du contrôle de gestion, que sais-je, PUF, Paris.
BOUQUIN H. (1996): Pourquoi le contrôle de gestion existe-t-il encore ? Gestion 2000, volume 21, N°3.
BOUQUIN Henri. (1997) : Comptabilité de gestion, Paris, Sirey.
BOUQUIN H. (1998): Le contrôle de gestion, PUF, 4° édition, Paris,.
BOURGUIGNON A., (1993) : Comptabilité analytique et stratégie: comment font les japonais ? », Revue
française de comptabilité, N°245, Mai, p 44-51
BRECHET J-P (1996): Gestion Stratégique, Le développement du projet d’entreprendre, Editions Eska.
BROMWICH M. & BHIMANI A., (1989): Management Accounting; Evolution not Revolution,
Management Accounting, Octobre, vol.67, n°9, p 5-6
BROWN J., P. DUGUID (1998), « Organizing Knowledge », California Management Review, vol 40, n°3,
pp 90-111.
BROWN S. (2001), CRM : La gestion de la relation client, Village Mondial.
BURLAUD A. et SIMON C. (1993): Comptabilité de gestion, Vuibert, Paris.
BURLAUD A., TELLER R., CHATELAIN-PONROY S., MIGNON S., WALLISER E., (2004): Contrôle de
gestion, Vuibert, Paris, 360 p.
CAM I (1999), Beyond Budgeting, White Paper, May.
CAUVIN E., (1994): Développement et test du modèle de comptabilité par activités: une application dans les
services. Thèse, Aix IAE.
CHARREAUX G. (2007), « La valeur partenariale : vers une mesure opérationnelle…. », CCA, tome 13,
volume 1, juin, pp 7-47.
CHARREAUX G. et DESBRIERES P. (1998): Gouvernance des entreprises : valeur partenariale contre
valeur actionnariale, Revue Finance Contrôle, Stratégie, Volume 1, n°2, Juin .
LE CONTROLE DE GESTION : 150
GRANT R.M. (1997), « The Knowledge-based View of the Firm : Implications for Management Practice »,
Long Range Planning, vol. 630, n°3, juin.
HALL R. (1993), "A framework linking intangible resources and capabilities to sustainable competitive
advantage", Strategic Management Journal, vol. 14, pp 607-618.
HAMEL G. et PRAHALAD C.K. (1995) : La conquête du futur, InterEditions, 325 pages, 1995.
HANSEN M.T., M.R. HAAS, (2007), “Different Knowledge, Different Benefits: Toward a Productivity
Perspective on Knowledge Sharing in Organizations”, Strategic Management Journal, Vol. 28 (11), p. 1133-
1153.
HANSEN M.T., N. NOHRIA, T. TIERNEY (1999), “What’s Your Strategy for Managing Knowledge?”
Harvard Business Review, mars-avril, p. 106-116.
HARRELD J.B., C.A. O’REILLY, M.L. TUSHMAN (2007), “Dynamic Capabilities at IBM : Driving
Stategy into Action”, vol. 49, n°4, pp 21-31.
HERGERT M. et MORRIS D., (1989): Accounting data for value chain analysis, Strategic Management
Journal, vol. 10, 1989, pp. 175-188.
HIRIGOYEN G. (1997), Stratégie et finances, Encyclopédie de gestion, Economica, volume 3,page 3064.
HIRIGOYEN G. et CABY J. (1997): La création de valeur de l’entreprise, Economica, Paris.
HOARAU C. : Diagnostic financier et diagnostic de l’entreprise, PUF, Paris, 1996, 319 pages.
HOARAU C., TELLER R. Création de valeur et Management de l’entreprise, Vuibert, Paris, 2001.
HOPWOOD A.G., P. MILLER (1994), Accounting as social and institutionnal practice , Cambridge
University Press.
HUBER G.P. (1991), « Organizational Learning: The Contributing Processes and the Literatures,
Organization Science, vol 2, n°1, pp 88-115.
INGHAM M., 1995, p 40 (préface I. NONAKA et H. TAKEUCHI, édition française, De Boeck Université)
JANICOT C., S. MIGNON (2004), « La chaîne de valeur du processus de gestion des connaissances », in P.
Baranger (Ed), La chaîne de valeur : un concept démodé ? , Presses Universitaires de Rennes, 2004, pp 149-
183.
JANICOT C., S. MIGNON (2008), « Vers un modèle de codification des connaissances : nature et
perspectives », SIM, A paraître.
JENSEN M.C., W.H. MECKLING (1976), Theory of the firm: Managerial Behavior, Agency, Cost and
Ownership Structure , Journal of Financial Economics, 3 (4), pp 305-360, repris dans : M.C. JENSEN (2000),
A Theory of the firm. Governance, Residual Claims and Organizational Forms, Harvard University Press.
JOFFRE P. et KOENIG G. (1992): Gestion stratégique, l’entreprise, ses partenaires – adversaires et leur
univers, Editions EMS.
KAPLAN R.S. , NORTON D.P.(1997) : Le tableau de bord prospectif , Les éditions d’Organisation, 311p.
KAPLAN R.S., ANDERSON S.R. (2007), « Time driven Activity-based Costing : A simpler and More
Powerful Path to Higher Profits, Harvard Business School Press, Boston.
KAPLAN R.S., ATKINSON A. (1998) : Advanced Management Accounting, 3° edition.
KOCH S. et TREMOLIERES R. (1995), Evaluation économique et stratégique de l’entreprise, évolution et
nouvelles tendances, Analyse financière, N°104, Septembre, p.75
KOENIG G. (1996): Management Stratégique, paradoxes, interactions et apprentissages, Nathan.
KOGUT B., U. ZANDER (1992), « Knowledge of the Firm, Combinative Capabilities, and the Replication of
Technology », Organization Science, vol 3 , pp 383-397.
KOGUT B., U. ZANDER(1996), « What Firms Do ? Coordination, Identity and Learning », Organization
Science, vol 7, n°5.
LANGFIELD-SMITH K. et SMITH D. (2003), « Management control systems and trust in outsourcing
relationships », Management Accounting Research, vol. 14, pp. 281-301.
LAUZEL P., TELLER R., (1997), Contrôle de gestion et budgets, Paris, Sirey, 1997, 7° édition.
LEBAS M. (1995): Comptabilité de gestion, les défis de la prochaine décennie, Revue Française de
Comptabilité, N° 265, Mars.
LONING H., PESQUEUX Y. et coll., (1998): Le contrôle de gestion, Paris, Dunod.
LORINO Ph. (1991), Le contrôle de gestion stratégique La gestion par les activités, Dunod, Paris.
LORINO Ph., TARONDEAU J-C, (1998): De la stratégie aux processus stratégiques. Revue Française de
gestion, Janvier, p. 5-17.
LORINO Ph. (1997): Méthodes et pratiques de la performance, Les éditions d’organisation, Paris.
LE CONTROLE DE GESTION : 152
LOWENDAHL B., O. REVANG, S.M. FOSSTENLOKKEN, (2001), “Knowledge and Value Creation in
Professional Service Firms: A framework for analysis”, Human Relations, New York, Vol. 54, Iss. 7; p. 911-
931.
MARCH J.G. (1981), « Footnotes to Organizational Change », Administrative Science Quaterly, n°26, pp
563-577.
MARCH J.G. (1991), « Exploration and Exploitation in Organizational Learning », Organization Science,
vol 2, N)1, pp 71-87.
MARCH J.G., H.A. SIMON (1958), Organizations, New York, John Wiley & Sons.
MARKUS L. (2001), « Toward a Theory of Knowledge Reuse: Types of Knowledge Reuse Situations and
Factors in Reuse Success », Journal of Management Information Systems, Vol. 18 (1), pp 57-93.
MARTINET A-C (1997) : Planification stratégique, Encyclopédie de gestion, 2° édition, tome 2, pages 2249
et sq. Economica.
MARTINET A-C. et REYNAUD E. (2004) : Stratégies d’entreprise et écologie, Economica, 166 p.
MARTORY B. (1990): Le contrôle de gestion sociale - Ed. Vuibert, Paris.
MARTORY B., PIERRAT C. (1996): La gestion de l’immatériel : évaluation et pilotage, Nathan, Paris.
MASSEY A.P., M.M. MONTOYA-WEISS, K. HOLCOM (2001), “Re-engineering the costumer
relationship: leverage assets at IBM”, Decision Support Systems, vol 32, pp 155-170.
MATHE J-C (1995), Rétrospectives et perspectives en stratégie de l’entreprise, Economie et Sociétés, Mai,
Tome 29, N°5, pages 31 et sq.
MERIC J. (2003), « L’émergence d’un discours de l’innovation managériale: le cas du Balanced Scorecard »,
CCA, numéro spécial, mai, pp 129-145.
MEVELLEC P. (1992), Outils de gestion : la pertinence retrouvée, Ed.t° Malesherbes, Paris.
MEVELEC P. (1998): De la nature des systèmes de coûts, Actes des XIVèmes Journées Nationales des IAE,
volume I, pages 391 et sq., Nantes 1998, Presses Académiques de l’Ouest.
MEYSONNIER F., F. POURTIER. (2006), « Les ERP changent-ils le contrôle de gestion ? », Comptabilité,
Contrôle, Audit, Tome 12, Volume1, mai, pp 45-64.
MEZIAS S.J., M.A. GLYNN (1993), « The Three Faces of Corporate Renewal : Institution, Revolution and
Evolution », Strategic Management Journal, vol 14, pp 77-101.
MICHAILESCO C. (1998): Les déterminants de la qualité de l’information comptable, thèse, Paris
Dauphine, Septembre.
MIGNON S. (2001), Stratégie de pérennité d’entreprise, collection Entreprendre, Edition Vuibert.
MODEN Y. & SAKURAI M. (Eds) (1989): Japanese Management Accounting: a World Class Approach to
Profit Management, Cambridge, Productivity Press
MONROE K. B. (1991), Pricing-Making Profitable Decisions, Mc Graw Hill, New York, NY.
MOON P. & BATES K., (1993) : CORE analysis in strategic performance appraisal, Management
Accounting Research, 4, p 139-152.
NABET A., G. DAVID (2003), « L’introduction d’indicateurs de création de valeur actionnariale dans un
groupe français : SNCF participations », CCA, Tome 8, vol 1, pp. 111-128.
NELSON R.R., S.G. WINTER (1982), An Evolutionary Theory of Economic Change, Belkrap Press, Boston,
MA.
NOBRE ThierryTh., (1997): Adaptabilité et utilité de la gestion stratégique des coûts dans la petite entreprise,
Revue Française de Comptabilité, N° 291, Juillet – Aout.
NONAKA I, H. TAKEUCHI (1997), La connaissance créatrice. La dynamique de l’entreprise apprenante, De
Boeck Université.
NONAKA I, N. KONNO (1998), « The Concept of « BA » : Building a Foundation for Knowledge
Creation », California Management Review, Vol 40, N°3, Spring, pp 40-54.
NONAKA I. (1994), « A Dynamic Theory of Organizational Knowledge Creation », Organization Science,
vol 5, n°1, pp 14-37.
NONAKA I., H. TAKEUCHI (1997), La connaissance créatrice. La dynamique de l’entreprise apprenante,
De Boeck Université.
NONAKA I et KONNO N. (1998), « The Concept of « BA »: Building a Foundation for Knowledge
Creation », California Management Review, Vol 40, N°3, Spring, pp 40-54.
NYSTROM P.C., W.H. STARBUCK (1984), "To Avoid Organizational Crises, Unlearn", Organizational
Dynamics, spring, pp 323-332.
O’DELL C., D.J. GRAYSON (1998), If Only We Knew What We Know, New York, The Free Press.
LE CONTROLE DE GESTION : 153
O’REILLY C.A. et M.L. TUSHMAN (2004), « The Ambidextrous Organization », Harvard Business
Review, Avril, pp 74-81.
PENROSE E.T., (1959), “The Theory of the Growth”, Oxford: Blackwell.
PEREZ R. (2003) : La gouvernance de l’entreprise, La découverte, Paris, 124 p.
PERROT P., (1996): La dynamique « coûts – stratégies », illustrations dans l’industrie laitière, Thèse, IAE
Nantes.
POGUE G., (1990): Strategic Management Accounting and Marketing Strategy, Management Accounting,
London, April, vol.68,n°4, p52-54
POLANYI M. (1995), The Tacit Dimension,London, Routledge-Kegan.
PORTER M., (1986) L’avantage concurrentiel, Inter Editions
RAVALD A., C. GRÖNROOS (1996), “The Value Concept and Relationship Marketing”, European Journal
of Marketing, vol 30, n°, 2, pp 19-30.
RECHEMANN J-J (2000), L’internet et le marketing, Editions d’Organisation.
REIX R. (1995), « Savoir tacite et savoir formalisé dans l’entreprise », Revue Française de Gestion, n°105,
septembre-octobre, pp 17-28.
RULKE D.L., S. ZAHEER, M. H. ANDERSEON (2000) « Sources of Managers’ Knowledge of
Organizational Capabilities », Organizational Behavior and Human Decision Processes, vol 82, n° 1, pp 134-
149.
RUMELT R.P (1995), « Inertia and Transformation » in C.A. MONTGOMERY (Ed) : Resource-Based and
Evolutionary Theories of the Firm, Harvard Business School, Kluwer Academic Publisher, pp 101-132.
SCAPENS R., M. JAZAYERI (2003), “ERP Systems and Management Accourting Change : Opportunities
or Impacts ? A Research Note “, European Accounting Review, vol 12, n° 1, pp 201-233.
SHANK J.K. et GOVINDARAJAN V., (1995) : La gestion stratégique des coûts, Les Editions
D’Organisation, Paris, 238 p.
SHAW M.J., C. SUBRAMANIAM, G.W. TAN, M.E. WELGE (2001), “Knowledge Management and Data
Mining for Marketing”, Decision Support Systems, vol 31, n°1, May, pp 137-137.
SHILLINGLAW G., (1963) :The concept of attributable Cost, Journal of Accounting Research, vol. 1.
SIMMONDS K. (1986) : The accounting assessment of competitive position, European Journal of
Marketing, vol.20, n°l,p 16-31.
STARBUCK W.H., A. GREVE, B.L.T. HEDBERG (1978), "Responding to Crisis", Journal of Business
Administration, vol 9, n° 2.
STEIN E.W., V. ZWASS (1995), « Actualizing Organizational Memory with Information Systems »,
Information Systems Research, vol 6, n°2, pp 85-117.
TAN S.S., H.H. TEO, K.K. WEI (1998), « Developing a Preliminary Framework for Knowledge
Management in Organizations », In Proceeding of the Fourth Americas Conference on Information Systems,
E. HOADLEY et I. BENBASAT (eds), Baltimore, MD, August, pp 629-631.
TARONDEAU J.C. (1998), Le management des savoirs, Que sais-je N°3407, Puf.
TEECE D.J. (1998), « Capturing Value from Knowledge Assets : The New Economy, Markets for Know-
How, and Intangible Assets », California Management Review, vol 40, n°3, pp 55-79.
TEECE D.J., PISANO G. SHUEN A. (1997), “Dynamic Capabilities and Strategic Management”, Strategic
Management Journal, vol 18, n°7, pp 503-533.
TELLER R., (1976) : Le contrôle de gestion en avenir incertain, Paris, Dunod, 1976.
TELLER R., (2004) : Contrôle de gestion in : collectif, Le contrôle de gestion des organisations, Vuibert,
Paris, 358p.
THOMAS C., (1997), Déterminants et évolution de la hiérarchie au sein des organisations, Thèse de
doctorat en Sciences de Gestion, Université de Nice-Sophia Antipolis.
VANDENBOSCH B., M.J. GINZBERG (1996), « Lotus Notes and Collaboration », Journal of Management
Information Systems, vol 13, n°3, pp 65-82.
WARD K., (1993) : Accounting for a sustainable competitive advantage, Management Accounting, London,
vol. 71 n°9, October.
WATSON S. et K. HEWETT (2006), “A Multi-Theorical Model of Knowledge Transfer in Organisations:
Determinants of Knowledge Contribution and Knowledge.
WEGMANN G. (2007), « Developments around the Activity-based Costing method : A state of the art »,
Congrès MCA, Paris.
WERNERFELT B. (1984), « A Resource based Theory of The Firm », Strategic Management Journal, vol 5,
pp 171-180.
LE CONTROLE DE GESTION : 154
WERNERFELT B. (1995), « The Resource-based View of the Firm : Ten Years Later », Strategic
Management Journal, vol 16, n° 3, pp 171-174.
WINTER S.G. (1987), « Knowledge and Competence as Strategic Assets » pp 159-184 in TEECE D.J.
(1987), The Competitive Challenge : Strategies for Industrial Innovation and Renewal, Balinger.
YOSHIKAWA T., INNES J. & MITCHELL R, (1989) : Japanese Management Accounting: Comparative
Survey, Management Accounting , vol , n° (UK), November, p20-23.
ZACK M.H. (1999), “Managing Codified Knowledge”, Sloan Management Review, Vol. 40(4), pp 45-58.
ZARIFIAN Ph.(1995) : La gestion par activités et par processus à la croisée des chemins, Gérer et
comprendre, Mars 1995, N°38, pages 80 et sq.
LE CONTROLE DE GESTION : 155